1er juillet 2015
Mei venait de terminer ses examens de fin de collège. Cette période avait été stressante pour elle, ses parents lui avaient mis beaucoup de pression. Mais elle le savait, elle avait réussi. Elle avait bien révisé, et avait rempli toutes ses épreuves avec facilité. Bien qu’elle n’était pas première de classe, elle était bien classée et son professeur principal ne cessait de dire qu’elle était un exemple pour sa génération.
Mais aujourd’hui, l’exemple de sa génération n’avait plus envie de travailler. Elle était enfin en vacances. Alors, pour ce premier jour, elle décida d’affronter la terrible chaleur estivale de Haijing. Elle marchait dans les rues de la vieille ville, décorée de ses lanternes rouges et où les joueurs de erhu faisaient résonner le son de leurs cordes. Les étalages remplis des mets les plus parfumés voyaient les passants progresser lentement, s’arrêtant bien souvent pour admirer les fruits qu’apportait la saison. Ça négociait beaucoup. Mei passait à travers les jambes et les hanches qui lui bloquaient le passage, sans prêter attention aux cris des commerçants qui annonçaient les prix, et les passants qui leurs répondaient bien souvent « Tai gui le !» ; c’est trop cher.
Mei aimait cette ambiance, mais avec le soleil qui tapait, être au milieu de la foule n’était pas vraiment confortable. Les nombreuses ombrelles que portaient les baishanaises ne lui offraient pas l’abri tant espéré. Elle marcha alors en direction de la mer.
Haijing, la capitale du Baishan, était connue dans la poésie pour être une belle ville côtière. Elle l’était sans doute beaucoup plus à l’époque où les bateaux ne venaient pas polluer les airs de leurs grosses fumées grises. Pourtant, Mei trouvait la mer toujours très jolie. Il fallait juste savoir où aller.
Dans le sud de la ville se trouvait le port de commerce, d’où partaient les énormes bateaux conteneurs. C’est là que la mer était la plus moche. Pour trouver les jolis coins, il fallait remonter la digue vers le nord. La ville n’avait pas osé construire de port à proximité du temple de Haijing. Ainsi, tout autour du temple du dragon vert, la plage semblait propre, et il n’était pas rare de voir des gens s’y baigner.
Mei s’avança dans l’eau. Elle avait remonté son pantalon au-dessus de ses genoux pour ne pas le tremper, mais les vagues qui roulaient vers le sable ne semblaient pas comprendre qu’elle souhaitait garder ses vêtements au sec. Certaines la tremper à mi-cuisse, ce qui la faisait crier en reculant.
Le long de la plage de sable fin, la ville de Haijing dressait ses immeubles comme un mur. Les tours d’acier et de vitres reflétaient les rayons du soleil. Tout comme l’eau. L’été est très lumineux à Haijing. Tout au bout de la plage, un énorme édifice coloré faisait ressortir un dragon vert de son toit. Symbole de la ville, le temple du dragon vert accueillait déjà son lot de touristes. Le dragon vert était même devenu l’emblème du pays, on le retrouvait sur le drapeau national.
Alors que la petite baishanaise avait les pieds dans l’eau, une Nai-Nai (une grand-mère), vint à sa rencontre. Elle était drapée d’une fine écharpe, portait des lunettes de soleil et une casquette sous son ombrelle. Si Mei n’avait pas l’habitude de croiser des Nai-Nai ainsi vêtues, elle aurait pu penser qu’elle était malade. Mais c’était bel et bien normal à Haijing, et la vieille dame l’interpela.
— Eh, petite, tu vas attraper un coup de chaud comme ça ! Tu devrais te couvrir, tu vas avoir la peau foncée comme les Afaréens !
Mei roula des yeux. Sa génération commençait enfin à s’ouvrir aux diversités du monde, mais la génération de cette grand-mère y était encore loin. Mei courut hors de l’eau, les goutelettes l’éclaboussèrent, ce qui lui apporta un peu de fraîcheur. Elle commença son retour, puis s’arrêta sur un banc qui faisait face à la mer. Le soleil entamait sa descente. Elle attendit que l’horizon rougisse encore un peu et sortit son téléphone pour prendre le paysage en photo. Elle s’empressa ensuite de la publier sur Kongque, le “instagram” baishanais :

“终于放假了!”
“Enfin en vacances !”