

L'année vient à peine de commencer et nul ne peut affirmer le contraire que le Président Fédéral l'avait marqué d'un grand coup dès son ouverture. Si le chef de l’État westalien avait déjà échangé avec plusieurs autres dirigeants étrangers depuis son arrivée au pouvoir, principalement des alliés, le hasard du calendrier des rencontres a voulu que la première nation à être invitée sur le sol de la Grande République n'est autre que le Grand Kah. Considéré par de nombreux observateurs comme la deuxième puissance mondiale, c'est surtout son influence idéologique qui reflète vraiment sa position d'acteur incontournable sur la scène internationale. Symbole du renouveau démocratique pour certains, une alternative sociétale parmi d'autres pour les plus pragmatiques, voir un pays aux idées extrémistes et dangereusement révolutionnaires pour ses détracteurs. A une année près, l'ancien gouvernement hardenboriste (1991-2015) avait vu pu assister, de loin, à la Quatrième Révolution, celle ayant amené les communalistes kah-tanais au pouvoir, face à une junte chaotique et brutale. Si Victor Hardenbor, au cours de son premier mandat, n'avait clairement pas eu une vision positive de cet éphémère régime réactionnaire, pour son incohérence politique et ses méthodes que lui-même n'aurait pas osé appliquer, l'image qu'il avait des nouveaux "maîtres" du Grand Kah n'était pas meilleur pour autant. Très longtemps associé au communisme, par d'astucieux raccourcies politiques, le communalisme n'a jamais eu une bonne image en Westalia. Le gouvernement néo-horvanxien s'est longtemps appliqué à présenter toutes ces idéologies aux caractères révolutionnaires comme l’œuvre de fanatiques extrémistes et sanguinaires, voir "désunionistes", une insulte que la droite radicale aime utiliser à tout va pour critiquer la gauche. Ainsi, il n'était pas étonnant que la dernière décennie se déroula sans interaction particulière avec l'Union des Communes, et il n'en fut pas plus surprenant de voir que les conservateurs s'étaient appliqués à rester à l'écart de cette dernière durant toute la période de l'ouverture sur le monde, pourtant historique dans le rayonnement diplomatique de la Grande République. Il faut dire que ce pays paltoterran contribu beaucoup à alimenter les théories complotistes des "dangereuses et néfastes influences étrangères sur la pureté de la civilisation westalienne", pour ne reprendre simplement que les mots du Sénateur Henry Ross et Président du Parti National Westalien, un mouvement politique d'extrême-droite, nostalgique de la dictature horvanxienne (1876-1919) et aux tendances isolationnistes.
Malgré tout cet historique, les temps changent et les visions aussi. Avec la popularisation d'internet, maintenir un discours tel qu'avait pu le faire les conservateurs durant plus de deux décennies n'était plus aussi efficace. Dépassé par l'arrivée de nouvelles idées, aussi bien à gauche qu'à droite, il n'est pas exagéré de dire que ces flux de pensées sortant des standards traditionnels westaliens ont eu leur importance dans la chute électorale du précédent gouvernement fédéral et dans le remodelage de la scène politique westalienne. En effet, c'est au cours de ce que certains s'amusent à appeler la "Little Yellow Revolution" (Petite révolution jaune), en référence à la couleur principale du Front Populaire et Démocrate, que les mouvements de gauche ont connu une renaissance historique. Avec leur arrivée au pouvoir l'année dernière, ces derniers opèrent un changement de cap dans la navigation de la Grande République et présentent peu à peu leurs projets pour réformer la société, sans cacher une certaine déconstruction d'une partie de l'héritage des années conservatrices, vers une société "plus libre et démocratique". Ainsi, il n'est pas étonnant de voir que la doctrine diplomatique du nouvel exécutif se veut plus ouverte avec des nations jusqu'à présent mal vue, tel que le Grand Kah. Disposant d'une plus grande marge de manœuvre que son prédécesseur, le Ministre Fédéral aux affaires étrangères, Richard Kaylor, s'efforce de préparer un grand plan visant à la constitution d'un réseau de contacts diplomatiques renforcé et de nouveaux partenariats stratégiques avec différentes nations du monde. Visiblement, le principal représentant du communalisme à l'échelle de la planète se voit offrir la possibilité d'une normalisation des relations avec la Grande République. Pour le nouveau chef de la diplomatie, entretenir des liens avec des nations aussi influentes et importantes que cette dernière est une étape nécessaire pour faire de Westalia un véritable acteur international d'importance, alors que son pays s'impose de plus en plus comme une puissance économique incontournable en Aleucie. Au niveau national, cependant, il y a une nécessité de ne plus présenter le Grand Kah comme "ce grand monstre rouge paltoterran", avec le risque de se mettre à dos les citoyens les plus méfiants de ce dernier. Il n'est pas possible de défaire une image entretenue depuis des dizaines d'années en peu de temps, mais une rencontre correctement menée par les deux représentations pourrait avoir un certain effet.


Avec l'ouverture de cette rencontre historique, c'était un véritable baptême du feu pour le tout récent 12ème Président Fédéral de la Grande République. Il se tient là où se tenait son éternel rival, il y a encore quelques mois, et se retrouve désormais dans cette mission tout aussi honorable que lourde de responsabilités en représentant l'ensemble des westaliens devant une force étrangère. Un sentiment d'autant plus important quand on sait que la délégation accueillie aujourd'hui n'est autre que celle du Grand Kah, une superpuissance, la deuxième plus puissante du monde. S'il est vrai que de nombreuses différences se posent entre leur société respective, Simeon Belagri avait approuvé qu'une rencontre soit organisé avec ces derniers, une chose impensable sous le précédent gouvernement. Pourtant, les enjeux et opportunités sont nombreux s'il s'agit de traiter avec l'Union des Communes. Sa position géographique à travers le globe, son poids diplomatique ou encore son importance dans le grand réseau du commerce international en font une nation avec qui il peut y avoir de nombreux avantages à tirer : des accords commerciaux favorables à la croissance du pays, l'image d'une Westalia moins réfractaire et plus ouverte dans sa diplomatie ou tout simplement l'assurance d'être sous un meilleur œil, pour cette puissance largement supérieure à celle de la Grande République.
Au cours de la fin d'année 2015, les échanges diplomatiques se sont intensifiés avec le Grand Kah et il y avait eu une véritable volonté kat-hanaise de développer un partenariat assez important avec la troisième puissance économique aleucienne, probablement dans une volonté de rapprochement avec le nouveau gouvernement marqué plus à gauche que la plupart de ses voisins continentaux, malgré le fait que Westalia reste une nation encrée dans un libéralisme très accentué et une tradition capitaliste historique. Pour le chef de l'état et son ministre, il allait être aussi important de trouver un équilibre certain entre le rapprochement diplomatique et la vitesse de développement de ce même rapprochement. Si la coalition de gauche avait accueilli cette visite de façon mitigée, l'opposition de droite n'a pas manqué l'occasion de faire la critique du nouveau gouvernement avec des propos particulièrement durs, symbole d'une méfiance encore profonde des idéologies encrées à gauche et tout particulièrement des pays qui en font la promotion aussi ouvertement.
Malgré l'hiver, il n'avait pas neigé sur la capitale fédérale westalienne, et le beau temps était au rendez-vous depuis quelques jours. Il faut dire que le climat local ne permet pas des tombées de neiges abondantes et fréquente dans cette région du pays, malgré un certain froid en ce troisième jour de l'année 2016. Ainsi, un accueil pu facilement être mis en place à l'aéroport fédéral Stanislas Asfort, le plus grand du pays, où une piste fut dégagée pour permettre à l'avion de la délégation kat-hanaise d'atterrir, après plusieurs milliers de kilomètres parcourus en vol. Depuis quelques années, ce genre d'infrastructure avait connu une importante modernisation, poussé par l'internationalisation du pays et la croissance exponentielle des investissements nationaux comme extérieurs dans le pays, qui ont poussé en une transformation favorisant les échanges avec l'étranger, humains comme de biens. Dans une certaine formalité diplomatique, la délégation fut accueillie d'un grand tapis rouge et d'un orchestre de la Garde Républicaine, qui commença à jouer le "Chant des Peuples", l'hymne officiel du Grand Kah, accompagné de plusieurs drapeaux kat-hanais et westaliens flottant tout autours.
S'avançant d'un pas assuré, le Président Fédéral se présenta à la délégation étrangère :
Simeon Belagri : Représentants du Grand Kah, c'est un honneur de pouvoir vous accueillir sur les terres de la Grande République. J'espère que le voyage jusqu'à Columbia a été confortable et que la distance parcourue ne vous a pas paru trop longue. Dans cette rencontre historique, le peuple westalien désire tout autant que vous de tourner la page de plusieurs décennies de silence diplomatique, afin d'ouvrir la voie vers un futur plus ouvert et remplie d'opportunité pour tout un chacun.
Il n'était pas difficile de reconnaître le Président Fédéral de la Grande République, tant il était unique en son apparence. Bien que d'une taille plus petite que celle de son prédécesseur, restant pour autant dans la moyenne, la gestuelle de ses mains et de ses bras trahissent ses origines madreriannes, dont le peuple s'exprime énormément avec de grands mouvements. Mais ce sont surtout ses mimiques particulièrement iconiques du personnage qui permettent de l'identifier avec aisance, tout particulièrement les expressions de son visage toutes particulièrement accentuées, dont la combinaison avec sa gestuelle et son ton amicale ont beaucoup contribué à en faire la personnalité politique la plus appréciée des westaliens ces dernières années. Avançant derrière lui, Richard Kaylor peut paraître plus sobre et moins expressif que son chef de l’État, une comparaison assez évidente, mais sans pour autant être froid, puisque c'est ce dernier qui a convaincu le premier d'accepter l'organisation d'une rencontre. Avec un air semblant plus calme, le chef de la diplomatie se présente aux représentants étrangers.
Richard Kaylor : Cher représentants kat-hanais, toute la Grande République est honoré de pouvoir vous accueillir à Columbia. J'espère que nous pourrons profiter de cette rencontre pour développer des liens solides et une entente bénéfique à nos peuples.