Posté le : 24 mai 2025 à 21:57:06
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Gaspard Le Maître releva lentement sa tête lorsqu’il eut fini de s’incliner devant sa majesté la reine de Teyla et de lui baiser la main en signe de respect. Pour tout autant c’est un cas plutôt étranger pour le camerlingue car, a pour habitude, de voir sa majesté Catherine Courvoisier agir comme la cheffe d’Etat de la principauté lorsqu’il était en sa présence durant les longues années de son mandat, alors que là, pour la première fois, elle est et agissait comme la cheffe d’État d’un autre pays. Une situation plutôt étrange et surprenante aux yeux du camerlingue, qui essaye difficilement de s’acclimater à la situation dans laquelle il se trouvait.
Sa suite, composée des ministres d’État et de hauts fonctionnaire du gouvernement de la Principauté ainsi qu’un mystérieux personnage, s’inclina tour à tour devant la reine en guise de salutations. Gaspard Le Maître, lui, commença par écoute attentivement la reine et répondit, une fois qu’elle eut fini de parler, avec un large sourire sur le visage :
« Ce sera fait sans faute, majesté. Son excellence, le Co prince évêque Armel Chagnon, serait ravie de savoir que Sa majesté royale s’est inquiétée de son état santé. Grâce à Dieu, il va mieux et tant mieux, et vos paroles apporteront certainement du réconfort à sa grâce. »
Aussitôt, Le Maître lança, tout en écoutant son collègue premier ministre Angel Rojas, une série de regards autour de l’aéroport pour observer son environnement. Il vit que le royaume de Teyla était bien digne de sa réputation de superpuissance mondiale avec d’immense dispositifs de sécurité misent en places autour de l’aéroport qui permettait tout de même la présence de quelque journaliste qui criblait le camerlingue de photos au point de presque l’aveugle. L’accueil qui leur était réservé lui alla d’ailleurs droit au cœur.
Une fois que son collègue premier ministre eut fini de parler, d’un ton neutre et ferme, il le remercia de ses salutations de bienvenue et dit :
« C’est trop d’honneur, excellence. De son histoire, la principauté de Saint-Alban n’a jamais reçu un si noble accueil, et jamais une autre nation ne nous a considérés comme étant de la famille. Teyla est, pour ainsi vous dire, depuis toujours une source d’inspiration pour nous, une sorte de grand frère modèle à suivre. Ça me réchauffe le cœur de savoir que vous nous considérez comme un membre de la famille et surtout que c’est un sentiment partagé. »
Aussitôt, le camerlingue et sa suite suivirent leurs hôtes, qui leur indiquèrent le chemin à suivre. Lorsqu’il sut qu’il montait dans la même voiture que sa majesté la reine, la cheffe d’État de l’une des plus grandes puissances mondiales, Gaspard Le Maître ressentie une vaste gêne et tenta de refuser cet immense honneur qui lui était accordé. Mais face à l’insistance de ses hôtes et pour ne pas paraître impolie, il accepta l’honneur qui lui est accordé et monta dans la même voiture que la reine, qui les conduisait directement vers leur lieu de réunion, suivi du reste de la délégation.
Lorsque la délégation partit, le camerlingue observa les rues et les bâtiments défiler et, dans son cœur, il ressentit un certain calme. Pour la première fois, l’ensemble des pressions politiques et diplomatiques qui pesaient sur ses épaules semblait s’estomper. Il était loin de Saint-Alban et de ses crises : politique notamment, avec la sulfureuse qui est devenue, à son grand désarroi, chancelière de Mareau et qui depuis lors n’arrêtait pas de lancer, pique après pique, des attaques contre la nouvelle-Kintan, chose qui gênait profondément le camerlingue mais qui n’avait aucun moyen de se débarrasse de cette encombrante femme politique. Ce qui venait s’ajoute à la crise économique qui semble se profiler à l’horizon sur la principauté, un poids qui lui aussi devenait gênant et presque incontrôlable, détruisant en quelque temps des années de labeurs du camerlingue. Sa visite diplomatique à Teyla, ou sa fuite dans son fort intérieure pour échapper à ces poids, était récompensée : il semblait, pour la première fois depuis longtemps, libre. Un sentiment qu’il avait presque oublié et il contait bien profité de son voyage à Teyla pour se reposer.
Alors qu’il rêvassait encore, il ne remarqua presque pas l’immense et magnifique palais qui se dévoilait devant ses yeux. Pris d’un sursaut, il ouvrit les yeux sur ce qui était le palais Grayson, dont il avait nombre de fois entendu parler, de sa beauté et de son esthétisme artistique sans pareil. À l’arrivée devant le grillage du palais, il se ressaisit pleinement et fut pris de surprise par l’arrivée des gardes royaux qui entourèrent la voiture dans laquelle il se trouvait. Les explications de sa majesté la reine suffirent à le rassurer et provoquèrent un certain sentiment dans son cœur, un sentiment inexplicable : admiration, joie….
« Ceci est une tradition bien particulière qui marque l’attachement de Teyla à ses traditions mais aussi à ses rois » répondit-il après que la reine ai fini de parler, avant d’ajouter après avoir réfléchi momentanément en se rappelant de sa principauté :
« C’est une histoire fort intéressante, majesté. Chez nous, il n’existe pas de gardes royaux puisqu’il n’en existe pas la nécessité. Il faut se dire que la principauté catholique de Saint-Alban a longtemps été sous le règne de princes-évêques au pouvoir fort étendu et encore aujourd’hui, il possède une influence non négligeable sur la société Saint-albois malgré la perte de leurs pouvoirs politiques. Le symbole qu’ils incarnaient, et continuent d’incarner : celle de l’unité religieuse et de la foie, forme un certain aura autour d’eux, qui, amis comme détracteurs, provoque un profond sentiment de respect et qui mettait en garde quiconque voudrait leurs faire du mal. Et depuis, ces serviteurs de Dieu, on juge bon de ne pas s’attribuer de gardes du corps : Dieu seul leur suffit. Quand je vois les gardes royaux du royaume de Teyla, je me demande bien à quoi auraient pût ressemblé ceux de la principauté, s’ils avaient existé. ». Conclut-il avant de suivre la reine, s’assurant de respecter une bonne distance derrière elle par respect pour son rang. Le camerlingue souhaitait à tout prix éviter d’imposer à la principauté une humiliation diplomatique pour sa réouverture à l’international, chose qui certainement le décrédibiliserait pour toute future rencontre avec d’autre puissance.
Une nouvelle fois perdu dans ses pensées, il observa, tel un enfant, l’intérieur de ce magnifique palais. À chaque salle, il semblait de plus en plus ébloui et émerveillé. Une fois arrivé dans une immense salle, il observait, tel un enfant dans un musée, ces hommes et ces femmes représentés sur les murs de l’immense salle et qui exerçaient leurs métiers, leurs arts, et démontraient, malgré leur immobilisme, leur savoir-faire et leur maîtrise technique : il ressentait la maîtrise qu’avait le forgeron de sa forge, du politicien de l’art de la parole, ou encore, pour ne citer qu’eux, du soldat et de la maîtrise de son épée ; il s’imaginait à leur place, tel un enfant rêveur, se demandant quelle aurait été sa vie s’il n’avait pas occupé la position qu’il occupe actuellement, s’il n’avait pas toutes ces responsabilités sur les épaules.
Avant de se ressaisir, il se raisonna : il avait fait tous ces sacrifices pour une chose : la grandeur de la Principauté, et il n’était pas question d’abandonner alors qu’elle commençait juste à se faire une place sur la scène internationale.
Arrivé dans une immense salle, il suivit les instructions des majordomes et s’installa au siège qui lui était attribué, suivi de sa délégation dans l’ordre protocolaire : Victor Morel tout d’abord, son fidèle ministre des Finances, suivi d’Antoine Bernard, ministre de l’Instruction nationale. Après ce dernier, ce ne fut pas Wilhelm Schneider, le secrétaire à la Défense, qui suivit, mais un visage étranger. Il ne faisait pas partie du gouvernement de la principauté, mais par son aura et sa prestance, il était assurément quelqu’un d’important. Et sans nul doute, c’est un homme d’importance qui ne s’était pas fait remarquer depuis le début de la rencontre : Mohamed Hidalgo, l’ombre secrète du tout-puissant seigneur de Briarres, venu représenter les intérêts de la seigneurie lors du sommet diplomatique.
L’homme, droit, distingué et qui semblait réservé, n’avait rien dit depuis le début de la rencontre. Il s’était, au contraire, caché au sein de la suite diplomatique du camerlingue.
Après s’être installé, Gaspard Le Maître écouta attentivement son homologue Angel Rojas faire son discours. Après qu’il eut fini, il prit la parole :
« Tout d’abord, Excellence, permettez-moi une nouvelle fois de vous remercier de m’avoir accueilli, moi et ma délégation, au sein de votre nation. C’est, comme je l’ai dit, un immense honneur pour moi.
Excellence, le royaume de Teyla est pour nous ce grand frère qui nous a toujours protégés et soutenus. Comme vous l’avez mentionné, le géant d’argile qu’était feu la Loduarie communiste avait représenté une menace d’une ampleur inédite pour notre patrie, et le royaume de Teyla s’est illustré par sa position claire et précise de défenseur de la souveraineté des États et de garant de la stabilité de l’Eurysie. Mais également comme un grand frère modèle.
Excellence, je vous prie néanmoins de m’excuser : la réaction de notre part n’a pas été ce qu’elle aurait dû être du point de vue de votre nation et n’est si je m’avance certainement pas celle qu’attendait ou espérait Teyla. Mais, excellence, veuillez comprendre la position dans laquelle se trouve la principauté catholique de Saint-Alban : celle d’un État neutre dont la constitution interdit tout engagement politique à but offensif, ou du moins, qui pourrait être considéré comme tel. La neutralité est ce qu’il y a de plus cher pour ma patrie, chose que je défendrai ardemment. Dans cette optique, j’ai décidé de garder le silence. Mais un silence qui fait mal, mais qui, dû au contexte, était selon moi nécessaire.
Tout ce que vous avez dit relève du bon jugement. Excellence, comme vous l’avez mentionné, le monde évolue, et il est nécessaire, pour rester dans la course, d’évoluer aussi et de s’adapter. Nul doute que la principauté le fera. Mais pour cela, elle doit d’abord surmonter des obstacles internes et faire face aux tentatives de division de la nation.
La question de la défense est un point chaud et sensible : elle rappelle les horreurs des guerres dont la principauté veut à tout prix se débarrasser. Mais d’un point de vue pragmatique, notre nation doit aussi être capable d’assurer sa propre souveraineté nationale et de la faire respecter. Mais en plus, elle doit être capable de pouvoir venir en aide à ses alliés les plus chers.
Excellence, permettez-moi, sur ces mots, de vous dire que les services de renseignement de la principauté, dont je suis à la tête, sont pleinement en capacité de coopérer avec le royaume de Teyla, et une coopération en ce sens pourrait nous être des plus bénéfiques.
Enfin, permettez-moi de vous présenter l’honorable Mohamed Hidalgo, ombre de son excellence le Lord Joseph Aballes de la seigneurie de Briarres. Sa présence, excellence, s’inscrit dans le projet de coopération qui lie actuellement la principauté de Saint-Alban et la seigneurie de Briarres, et qui nous réunit actuellement ici : comment assurer notre défense face aux menaces qui ne prennent même plus la peine de se cacher pour nous menacer. En ce sens, si sa présence ne vous dérange point, il représentera la seigneurie de Briarres. »