11/05/2017
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La Manche Silice déroule le tapis rouge pour Fiumiglia

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Le Triumvirat de Manche Silice a organisé mi-mars 2016 une rencontre officielle avec les dirigeants de la République de Fiumiglia à Rio de l'Estuaire.

Par temps clair, les habitants des deux pays peuvent s'apercevoir. Justement, l'événement s'est tenu dans la vice-capitale siliquéenne, Rio de l'Estuaire.

Pour l'occasion les autorités locales ont pavoisé aux couleurs du voisin. Longtemps il a été dit qu'il n'y avait pas de meilleur allié dans la région de la trépublique que la Youslévie. Le couple évasien ainsi soudé avait porté le projet désormais à l'arrêt d'union des nations évasiennes.

Depuis les relations se sont distendues entre Sedjan et Rio. Elles restent fortes mais la Manche Silice qui se trouve à un moment charnière du mandat triumviral, doit affirmer son leadership sur la région.

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Les trois triumvirs assurent l'accueil protocolaire de la délégation de Fiumiglia. Le roi Vittorio est particulièrement mis en avant. Sa langue maternelle, le landrin, est très proche de celle parlée par les invités.
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Cette entrevue diplomatique avec le grand voisin siliquéen ne pouvait qu'être important pour Fiumiglia. Tout le monde savait au pays que la petite et pauvre île ne représentait qu'un grain de sable à coté des moyens militaires et économiques de la Manche Silice. Pour faire ressortir l'importance de l’événement, et le respect accordés à leurs interlocuteurs, une délégation de choix avait été choisie, Maurizio Vittori, le Ministre des Affaires Étrangères, Cosimo Sabbatini, le Président du Conseil et donc chef du gouvernement, et Gianluca Antonelli, le Président de la République. S'affichait donc là, à Rio de l'Estuaire, tout le gratin de l'élite démocrate-chrétienne qui régnait hégémoniquement sur le pays insulaire depuis la début de la Seconde République.

Si officiellement les trois membres de cette délégation devaient s'en tenir à leurs tâches respectives, il était officieusement connu qu'Antonelli était celui qui tirait les ficelles, qui prenait véritablement les décisions. Son apparence d'un homme recroquevillé sur lui-même, avec une peau légèrement boursoufflée et un cou quasiment absent masque une bête politique qui a gravit les échelles de l'appareil démocrate-chrétien en enchainant les stratagèmes, coups-bas et retournements de vestes jusqu'à devenir la figure politique la plus importante du pays. Mais c'est sa "légende noire" qui en fait l'une des personne les plus craintes de Fiumiglia, ce qui n'est pas mince à faire dans un pays où la violence politique et criminelle est devenue pratiquement usuelle. L'opposition communiste lui impute l'organisation, avec les services secrets, de nombreux attentats suspects qui auraient été en réalités des opérations de couvertures pour déstabiliser la gauche ou se débarrasser d'opposants politiques. Ces rumeurs qui fleurissent depuis des années dans les couloirs des différents palais institutionnels n'ont jamais pu être prouvés, et les nombreux procès qui lui ont été imputés, par rapport à ces faits ou à des affaires plus classiques de détournement de fonds ou de corruption en lien avec le crime organisé, ont également tous été des échecs cuisants face à une défense qui pointe le manque de preuves et de témoignages.

Ainsi cette délégation prit la direction de Rio de l'Estuaire dans un bel avion privé de fonction. Une fois installé dans la voiture qui les attendait à l'aéroport, les trois hommes purent profiter de la vue des drapeaux installés dans les principales artères de la capitale. Même si ils connaissaient l'importance de la discussion qu'ils allaient devoir tenir dans quelques heures ils ne semblaient pas particulièrement stressés, anxieux ou tendus. Sabbatini et Vittori parlaient de football et des résultats des matchs qui s'étaient déroulés la veille tandis qu'Antonelli, plus discret, regardait les rues de la capitale silicienne par la fenêtre, en jetant, lors des feux rouges, un regard vers les notes qui lui avaient été confié par son cabinet avec les principaux points à faire valoir et à défendre.

Une fois la voiture arrivée au point de rendez-vous, les trois hommes en sortirent quand la porte leur fut ouverte. Ils se dirigèrent alors tout d'abort vers le roi Vittorio auquel ils adressèrent une révérence diplomatique, laissant à l'invité, comme c'est la tradition, l'honneur de prononcer les premiers saluts.



Gianluca AntonelliAntonelli

Cosimo SabbatiniSabbatini

Maurizio VittoriVittori
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Le cortège officiel arrivait devant le palais triumviral. L'édifice n'avait pas beaucoup vu passer de chefs de l'État au cours des trois dernières années. Le petit personnel avait accueilli la nouvelle de cette réception avec joie et effervescence. Recroquevillée sur elle-même, Rio de l'Estuaire sous domination de Firmino Costa avait troqué le faste pour la routine bureaucratique. La perspective d'un réchauffement diplomatique avec Fiumiglia et cette Seconde République réjouissait les Aguapans qui entretiennent des liens historiques avec l'île.

Alignés sous une ombrelle devant le palais, les triumvirs, les élus régionaux, les grands cadres administratifs et les représentants des intérêts stratégiques dévisagent les trois silhouettes sortant de l'escorte. Des coups de canons à blanc éclatent depuis un fortin dominant le quartier. Une formation musicale de cuivres et de tambours se lance alors dans une interprétation de l'hymne nationale de Fiumiglia.

Après les présentations officielles, la délégation s'est retirée dans une aile privative du complexe. Vittorio IV le souverain landrin s'adressait principalement au président du Conseil, non pas par calcul, mais parce qu'il portait le même prénom que l'un de ses aïeux, lui-même monarque landrin. "Il n'y a pas de hasard, nous devions nous rencontrer un jour ou l'autre. C'est tellement agréable de pouvoir se parler dans une langue qui est pratiquement semblable. Les locuteurs de notre landrin se raréfient, je le déplore", lançait-il.

Maurizio Vittori et Gianluca Antonelli étaient au contact des deux autres triumvirs, Firmino Costa, le bouledogue mutique, surnom dont l'avaient affublés ses nombreux détracteurs, jaloux de sa domination du jeu politique national, et Anselmo Martinez, le très effacé aguapan.

Après de nouveaux échanges d'amabilités, Vittorio IV qui présidait la séance a souhaité la bienvenue à la délégation de Fiumiglia et s'est immédiatement lancé dans une présentation des enjeux de cette rencontre.

"Chers amis, il est temps d'écrire une nouvelle page de notre histoire commune. Trop de temps s'est écoulé depuis que nos deux pays se sont tournés le dos. Nos concitoyens peuvent difficilement comprendre comment la bande de terre face à l'horizon sur laquelle des ancêtres, des parents, des amis vivent est si inaccessible. Nous aimerions qu'à l'issue de cette rencontre, les habitants puissent se déplacer librement. Conscients des défis sécuritaires que vous traversez aujourd'hui, nous comprenons qu'il faut manœuvrer avec délicatesse et ne pas donner l'opportunité à vos ennemis de l'intérieur de faire de notre pays leur base arrière. C'est la raison pour laquelle, nous cherchons également à nous doter d'un système de sécurité commun".
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Antonelli et Sabbatini écoutèrent attentivement les propositions de leur interlocuteur puis se regardèrent avant d'échanger, entre eux, quelques mots principalement sur la notion de système de sécurité commun. Ils parlèrent dans leur dialecte local commun, ce qui rendait très compliqué la compréhension de ce bref et discret échange, même pour un locuteur de l'italien comme le roi Vittorio. Les deux hommes savaient que les questions de sécurité étaient les plus tendues, chaque changement dans ce domaine s'arrachait après de longues négociations à la Chambre des Députés et au Sénat mais aussi après de longues périodes de contestations dans la rue. Il ne faisait aucun doute que les différents groupuscules politiques et leurs alliés au Parlement s'opposeraient corps et âmes à l'entrée d'une nation étrangère dans l'organisation sécuritaire du pays, quitte à provoquer de nouvelles vagues de violences et d'attentats. Mais ce qui semblait inquiéter d'avantage encore Sabbatini et Antonelli était la perspective de la mafia. La paix relative qui existait entre l'échelon politique et les différentes familles mafieuses s'était organisé autour d'une recherche du statut-quo, un certain laissez-faire pour les activités économiques illégales en échange d'une atténuation de la violence. La trop grande intrusion d'un pays étranger dans les affaires internes pourrait mener à une remise en cause de cette paix fragile. Après quelques dizaines de secondes de discussions entre eux Antonelli s'écarta alors de Sabbatini, toussa un peu pour réadapter sa voix, puis répondit au roi à voix-haute, de nouveau en italien.
« Il est évident que la situation actuelle des frontières est une aberration. Le contexte compliqué de notre pays ne doit pas justifier les lourdeurs administratives et les difficultés personnelles que rencontrent celles et ceux qui essayent de visiter leurs proches de l'autre coté de la mer. Je suis favorable à une simplification de l'entrée sur nos territoires respectifs depuis ces derniers. Je pense qu'une simple procédure de contrôle de sécurité classique et une vérification d'identité devraient être les seules formalités mises en place entre nos nations. Les lourdes séances de paperasses n'ont jamais empêché un crime, par contre elles rajoutent une lourdeur insupportable sur les épaules des simples citoyens qui veulent fêter Noël en famille. » Sur ce sujet il savait qu'il pouvait avoir le soutien de l'ARD, la principale et plus influente association de défense des intérêts de la diaspora. Elle dénonce depuis des années les lourdeurs administratives absurdes que les Fiumigliens de l'étranger ou d'origine doivent faire face pour passer quelques jours chez leurs familles.
« En ce qui concerne la sécurité, » reprit-il après avoir bu une gorgée d'eau, sachant qu'ils s’apprêtait à se lancer sur un terrain dangereux,« vous comprendrez, très facilement je pense, que nous agissons sur ce sujet avec le plus grand calme et la plus grande attention possible. Nous avons un proverbe chez nous, "chi va piano va sano", celui qui va doucement va surement. C'est la position que nous avons sur cette question. La perspective d'une plus grande coopération entre nos forces de l'ordre respectives n'est pas inquiétante en soi, je pense même personnellement qu'elle est souhaitable. Mais Dieu sait qu'à la fois d'un point de vue politique ou social, il nous serait compliqué de justifier un rapprochement trop soudain. » Il réfléchit un peu, puis sans demander l'opinion de ces compères, s'attela à faire une contre-proposition. « Je pense que nous devrions tout d'abord nous en tenir à des mesures purement réglementaires : pas de débat au Parlement, une médiatisation moindre. La mise en place d'une ligne de correspondance entre les services de police siliquéens et fiumigliens et un partage des avis de recherche entre les postes frontières me semblent être des bons matériaux de début de coopération. Ensuite nous pourrons adapter, augmenter les échanges si tout se passe bien, jusqu'à ce que la coopération soit un état de fait durement contestable. Mais j’insiste sur le fait que cela doit se penser sur le long terme. Vous savez chez nous les gens veulent énormément le changement, ils manifestent pour qu'il arrive, font des attentats en son nom, mais quand vous le mettez devant eux ils prennent peur et manifestent contre. Donc très vite vous en arrivez à faire du changement mais doucement. » Sa dernière phrase le fit sourire un peu, ce qu'il ne faisait que rarement. Il s'agissait en réalité de la méthode qu'Antonelli avait pratiqué toute sa vie en politique, funambuler sur la ligne de l'acceptable pour la déplacer de plus en plus vers ses objectifs.
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Les homologues de Fiumiglia avançaient leurs pions avec prudence et les Triumvirs se doutaient que cette rencontre n'allait pas déboucher sur l'annonce tonitruante que tant d'Aguapans attendaient pourtant. Les frontières n'allaient pas disparaître en un claquement de doigt.

Aussi, les diplomates et les juristes mettaient sur le papier une convention qui reprenait ce à quoi les représentants de l'état insulaire étaient prêts à acter: la simplification des procédures d'admission sur les territoires des deux pays avec un contrôle de sécurité dit classique et une vérification d'identité.

Les Triumvirs proposaient alors l'écriture d'une clause dite de revoyure en mai 2017 pour évaluer les résultats de cette nouvelle politique et l'éventualité d'une extension. Ils soumettaient également une proposition d'allègement des barrières douanières.

En matière de sécurité, les insulaires avaient quelque peu douché l'enthousiasme des siliquéens qui pensaient pouvoir instaurer comme ils l'avaient fait avec la Youslévie, une coopération notoire qui avait été saluée au plan international. Fiumiglia laissait la porte ouverte cependant à un travail coordonné et discret entre les services de sécurité des États respectifs.

La journée touchait déjà à sa fin et les Triumvirs conclurent la rencontre en appelant de leur souhait à une rencontre dans un format plus grand avec les autres Etats de l'espace évasien.
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