11/05/2017
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Némédie Actualités : "Quand la Némédie parle, le monde écoute"

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Némédie Actualités


"Quand la Némédie parle, le monde écoute"


Némédie Actualités, créée en 1841 sous forme de journal imprimé, est la plus ancienne et la plus respectée des institutions médiatiques du pays. D’abord publié dans la ville de Korion, il se révèle rapidement la voix des faits, la boussole des cives de l’institution, avide de retrouver unité dans un pays alors divisé par rivalités régionales et débats sur l’unité nationale.

Avec l’avènement de la télévision au XXe siècle, Némédie Actualités devient, du tout premier coup d’œil au coulant des premiers tourniquets publics, la première chaîne d’information du pays, seul à être d’un journalisme rigoureux, indépendant au fond de sa pratique journalistique confié un héritage dans celui justement des valeurs d’intégrité, service public, vérité.

Aujourd’hui reconnu dans tous les formats télé, radio, presse écrite, numérique , Némédie Actualités est sans conteste considéré comme la source d’information la plus fiable du pays : elle couvre l’actualité nationale, régionale, internationale de tout un réseau de correspondants s’étalant sur tout le continent afaréen et autre.

Réputée pour ses grandes enquêtes, ses débats équilibrés, ses reportages en profondeur, la chaîne incarne l’excellence journalistique némédienne au service de la nation et de ses nationaux.

Siège :
Epidion, capitale historique de la Némédie, au centre de la vallée des ancêtres, véritable pôle culturel, historique et politique.

Bureau de rédaction :
Korion, au berceau de la chaîne, toujours un lieu prestigieux, qui conserve les archives des premiers numéros du journal.
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Olythos, la région oubliée de la Némédie ?


Située à l’extrême sud de la Némédie, dans ce pays devenu désert où les oliviers semblent les derniers à résister à l’appel de la poussière et des routes perdues, s’étale une région que l’on hésite à évoquer même sous sa première initiale dans le grand Nord : Olythos.

Berceau d’un monde pastoral ancien, terre de penseurs disparus, Olythos est aujourd’hui le nom d’une pauvreté, d’une misère, d’un sentiment d’abandon et de rancœur. Selon un rapport , pas moins de 27 % des foyers se situeraient sous le seuil de pauvreté, trois fois plus que la moyenne nationale. Le marché du travail ne fait guère mieux, puisque le taux semble se fixer à 9 %, sans qu’aucun programme structurel ne se manifeste encore.
La région, longtemps jugée ingouvernable, est cruellement sous-dotée en infrastructures. Les établissement scolaires ferment par manque d’enseignants, les hôpitaux manquent de médicaments, certaines communes peinent à reconstituer des réseaux électriques stables. De nombreux analystes invoquent les travers d’une trop grande centralisation des investissements dans le nord du pays, autour des grands centres de vie comme Epidion, au détriment de zones périphériques.
Mais derrière cette misère économique, c’est une fracture politique qui s’opère. Dans les montagnes, les rumeurs de regroupements armés restent persistantes. Le mouvement des Fils de la Terre, déclaré il y a trois ans, continue de faire des adeptes. Leur message dénonçant le désintérêt porté à la partie sud par les élites d’Epidion trouve un écho grandissant au-delà des montagnes de la vallée d’Olythos.
Le gouvernement s’est certes engagé à réformer. Mais les promesses s’accumulent, les années passent, et peu à peu les convois d’aide humanitaire remplacent les projets de développement, tandis que le temps, lui, ne s’arrête guère. Et dans l’ombre des ruines antiques de la bénie Olythos, la Némédie s’expose un jour à connaître, sous l’une ou l’autre forme, les guerres fratricides qui ont si longtemps opposés les cités rivales.
Quoiqu’il en soit, Olythos n’est pas seulement une terre errante. C’est aussi une région marquée par des traditions anciennes, des chants populaires, des rites oubliés, et par une architecture rustique qui défie les siècles. « C’est l’oubli qui nous destine à disparaître, ce n’est pas la pauvreté », témoigne pour sa part Thalia Erenidis, institutrice en demi-salaire dans le village aujourd’hui quasiment désert de Karyon.
Considéré naguère comme le grenier du royaume, Olythos fournissait blé, huile et bétail aux cités du Nord. Mais les grandes voies commerciales ont progressivement contourné la région, l’exploitation a été forcée, et la population des collines a fui. Drimakos ou Velana sont aujourd’hui à moitié ruines, maisons éclatées, puits à sec. La jeunesse ne voit pas d’avenir et émigre vers las des montagnes, vers Epidion, et parfois au-delà des mers.
Les visites gouvernementales qui, lorsqu’elles ont lieu, sont jugées trop rares pour être crédibles : « Ils viennent avec leurs beaux habits dorés, ils photographient et ils repartent. Rien ne change. » Bougon, un vieil homme au visage ridé, lance, dans un café poussiéreux de Pelargos, qu’aucune télévision n’a pu s’inquiéter de filmer la chaîne des caravanes de caméras qui, durant ce temps, est venue filmer les derniers soulèvements du pain sans pain. La présence de l’Etat est émoussée à des postes de gendarmerie, comme, occasionnellement, à des renforcements de soldats en mission relative à une « sécurisation » qui ne parvient pas à rassurer la population et qui, au contraire, semble alimenter le sentiment d’occupation. De nombreuses affaires d’arrestations présidentielles, voire de brutalités, sont circulées dans la rumeur sans que de sérieuses enquêtes n’aient été déclenchées. Est-ce le prochain réveil politique ? La question est, aujourd’hui, à peine celle de savoir si Olythos souffre, mais si Olythos explosera. Les autorités némédiennes craignent un embrasement général, exacerbé par la montée des Fils de la Terre organisation pour l'instant pacifiste, dont le discours populiste fraye avec une jeunesse condamnée au désespoir. La longue déconnexion de l’Assemblée des Cités, et l’absence d’un plan de redressement digne de ce nom peuvent n’inviter à espérer que la crise ne soit pas ouverte.
Dans les ravinements des ruelles de Lykistra, on entend parfois s’élever un chant grave, entre prière et lamentation. C’est celui de ce petit théâtre abandonné, où Andronikos Veleis, autrefois berger, aujourd’hui porte-parole officieux des oubliés d’Olythos, œuvre chaque soir avec le concours d’un petit groupe de jeunes et de vieux. Andronikos parle peu mais le poids de son verbe est peu commun.
Ex-étudiant de philosophie à Epidion, il a tout abandonné lorsqu’il a compris que le sud de la Némédie ne serait jamais partie prenante des bienfaits de la modernité. Puis il a prêché une certaine forme d’autonomie locale et de retour à l’agriculture collective. Mais parfois, des idées plus radicales. D’aucuns disent qu’il a eu des contacts avec les Fils de la Terre, ce qu’il ne dément pas franchement. « Je ne partage pas toutes leurs méthodes mais je comprends leur rage. »

Il appelle au mois prochain à une grande Marche du Blé : cortège pacifique allant de Zerynthia jusqu’aux portes d’Epidion pour rappeler que la capitale doit manger grâce aux terres d’Olythos. Si elle se tient, cette marche pourrait être l’amorce d’une véritable renaissance politique du sud ou celle d’un confrontation ouverte entre le pouvoir central et la rue.
Il faut dire que la fracture entre le nord et le sud du royaume n’est pas que géographique, elle est politique, elle est culturelle, elle est historique. Les Olynthiens parlent encore un vieux dialecte que certains aristocrates d’Epidion méprisent. Leur musique, leur cuisine, leur art de vivre ne sont pas ceux des élites du nord. Ce fossé que des siècles de centralisation ne couvrent pas semble se creuser encore plus aujourd’hui.

Pour des intellectuels némédiens, Olythos est une « colonie intérieure ». L’intitulé sonne fort et dérange dans les couloirs ministériels. Mais on peut regarder les chiffres :

Olythos présente un taux de chômage de 31 % contre 7 % dans le reste du pays.

45 % des jeunes quittent Olythos avant 25 ans pour « n’importe quel ailleurs » et 65 % de la terre arable appartient à de grandes familles du nord ou à des entreprises.

Et pourtant, ce sont les Olynthiens qui nourrissent le pays : blé, olives, agrumes, sans parler des richesses minérales non négligeables comme le zinc ou l’or.

Cependant, ce qui frappe d’emblée en Olythos, ce n’est pas la précarité ni l’exode rural, mais bien cette sensation persistante d’être quelque peu devenu étranger à son propre pays. « Pour eux, nous ne sommes pas Némédiens. Nous sommes des montagnards, des arriérés, une main-d’œuvre qu’on extrait comme on extrait la roche », glisse amèrement Sotiris Kalgaros, maire de Melkyra, petite commune de mille âmes, autrefois prospère justifiant la classification du plan de gestion tenu à l’abri des moustiques précisément par l’exploitation de ses carrières de marbre qui sont désormais désormais désertées.

L’absence de relais media national n’arrange rien. Olythos n’existe que dans la tragédie ou dans le folklore. Quand un glissement de terrain emporte un village, quand se soulevent des émeutes, là en parle. Mais jamais pour parler de la reconstruction, du monde associatif, de ces jeunes ingénieurs qui, par amour du lieu, refusent de quitter leur région et tentent d’y relancer une économie du local. C’est le silence le reste du temps.


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le Marathon d’Epidion


Ce sont les rues d’Epidion qui ont résonné du bruit des pas qui s’alignent, des encouragements, de la musique populaire, à l’occasion de la 2ème édition du Marathon d’Epidion en 2016, à laquelle 50.000 coureurs, professionnels ou amateurs, mais aussi simples passionnés, se sont lancés dès les premières heures du jour dans une ambiance sportive et fraternelle.
Le grand vainqueur est Alexandros Theonidis, 24 ans, de Thermon. Ce coureur, encore peu connu a franchi le poste d’arrivée au temps excellent de 2h11’47’’. Il a réalisé un coup d’accélérateur dans la montée du plateau d’Akrothenos ce qui lui a permis de gagner.

"Quand j’ai franchi cette côte, j’ai tout donné. Voilà des mois que je me suis préparé, en espérant ce moment, gagner à Epidion, c’est non seulement le sport, mais aussi symbolique", a-t-il déclaré, ému au micro.

La première place revient dans la course féminine à Daphné Kastrou, vétérane de 34 ans, elle remporte par une belle maîtrise en 2h51’03’’ pour sa 4e participation.
Cette année encore, le parcours du marathon a mis à l’honneur les paysages contrastés et le patrimoine d’Epidion. Départ à l'assemblée des cités, devant le Parlement, puis le long des anciens remparts d’Amphissia.
Le passage le plus redouté, la montée du plateau d’Akrothenos, à 17 km de la course, réputé pour sa forte pente et son vent de face. Mais les panoramas sur les collines environnantes valent tous ces efforts. La descente vers le Grand théâtre d’Epidion a permis à beaucoup de reprendre leur souffle avant la dernière boucle.

Si aujourd’hui le Marathon d’Epidion est l’un des plus prestigieux du continent, c’est qu’il fait coexister l’exigence sportive et l’héritage culturel : cette année encore, le parcours a été émaillé de récitations de poèmes épiques et de chœurs populaires, insufflant dans l’épreuve l’art et l’histoire et rappelant que le sport en Némédie n’est pas séparé de la culture.

Des groupes de théâtre de rue ont aussi agrémenté la montée du quartier d’Hermothea, jouant des scènes de la Guerre des Cités, clin d’œil aux origines guerrières et fières du peuple némédien. Certains coureurs ont même choisi de ralentir pour entendre ces performances, se mêlant ainsi de la sueur du dépassement et de la poésie de l’art pour le plus grand plaisir des spectateurs ! Mais encore, le traditionnel Mini-Marathon, qui s’adresse aux enfants de 7 à 16 ans, a fait se rassembler près de 10 500 enfants et adolescents ayant fait le déplacement de toute la Némédie. Le petit parcours de 4 kilomètres à faire autour du Parc des Citoyens est propice pour beaucoup de découvrir la course liée au plaisir. Chaque enfant repart avec une médaille et avec un petit livre illustré de la légende d’Hérasios, mythique fondateur d’Epidion. Ravi du succès logistique de l’événement, le maire d’Epidion, Niketas Solon, a ainsi qualifié la manifestation :

"C’est un honneur d’avoir accueilli autant de monde dans l’affection, la discipline et la splendeur de notre ville."

Cela dit, quelques riverains ont évoqué le nombre de bus à réduire en raison d’une certaine panne de transports, ainsi que la gestion difficile des déchets, notamment rue du Forum Royal et quartier de Nephélis. Le Comité d’organisation a promis de fournir un rapport détaillé d’ici la fin de semaine et dans l’optique de procéder à des ajustements pour l’an prochain.

Le Marathon d’Epidion ne tire pas son origine d’un simple fait sportif : il le hérite d’une mémoire profonde, imbriquée à la mythologie némédienne et aux combats de l’Antiquité. Le marathon, selon les traditions, est né de l’histoire de Kleon d’Aristheia. Ce messager de la Cité d’Epidion a, en effet, effectué à pied le trajet d’environ 40 km qui le séparait de Lykarnès pour annoncer la victoire d'Epidion sur les armées de Myrida, lors de la Bataille du Mont Egrivos (vers - 432 av J-C). Kleon, selon les chants anciens, serait tombé mort après sa course. Cet acte héroïque, qui constitue l’origine mythique souvent considérée comme une version locale du célèbre récit de Phidippidès, a été chanté à travers les âges dans les poèmes, représenté dans les fresques, et de cet événement, un drame sacré est joué chaque printemps dans les théâtres d’Epidion

C’est lors de la journée nationale dédiée à la mémoire des combattants et des sages de la Cité du 11 novembre 1903 qu’eut lieu le premier « Marathon d’Honneur », mis en place par l’Assemblée de la cité, où une trentaine de coureurs vêtus de tuniques blanches rituelles symboles de la pureté et de la mémoire étaient appelés à parcourir, en silence, le chemin sacré à la mémoire des messagers, des éclaireurs, des combattants morts pour l’unité de la Némédie.

Ce n’est qu’en 1982 que le Marathon a pris sa forme moderne, devenue chronométrée, reconnue par la Fédération athlétique némédienne, ouverte à des athlètes étrangers. Depuis, sa croissance n’a cessé d’être exponentielle, rassemblant, dans une ambiance d’hommage, d’efforts sur soi-même et de fête populaire, des milliers de coureurs chaque année. Marathon dénommé « Marathon d’honneur », le Marathon d’Honneur est ainsi devenu un symbole puissant de l’union nationale entre mémoire, sport et identité culturelle.



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Est-ce ainsi que l’on préserve la paix ?


Cette décision constitue un véritable tournant dans la politique extérieure de la Némédie. Car, dans un communiqué d’une rare fermeté, diffusé hier soir depuis le Palais royal, Sa Majesté le Roi Andronikos IV a imposé l’interdiction immédiate de tout vol en destination de l’UC Sochacia et la fermeture de l’espace aerien à tout aéronef immatriculé sous pavillon sochacien.

Cette mesure intervient à la suite d’un échange diplomatique particulièrement âpre entre les deux pays. La Némédie avait, selon nos sources, émis récemment un projet d’accord diplomatique et commercial à l’UC Sochacia, dans un esprit "d’ouverture et de coopération" selon le ministère des Affaires étrangères némédien.
La réaction sochacienne, quant à elle, ne passe pas inaperçue, en raison de sa virulence.

Dans une telle situation, le Roi Andronikos IV tranche. Voici les dispositions adoptées :


Annulation de tous les vols, qu’ils soient commerciaux, diplomatiques ou privés à destination de l’UC Sochacia, avec effet immédiat.

Fermeture de l’espace aérien némédien à tout appareil sous le pavillon sochacien.

Délai de dix jours donné aux citoyens sochaciens présents sur le sol némédien pour quitter le pays « dans l’ordre et en toute sécurité ».

Refus d’accréditer toute représentation diplomatique de la Sochacia sur le sol némédien.

Tout en gardant un ton d’une grande dignité, le communiqué signale l’urgence de rupture dans lesquelles "la Némédie ne saurait être l’objet de mépris ou de ridicule, quels que soient les motifs", conclut le texte.

En toile de fond de l’échange parfois inattendu, se dessine une conception de la diplomatie profondément opposée. D’un côté, la Némédie, monarchie stable et respectueuse du protocole, dit son attachement aux règles internationales et à la coopération équilibrée ; de l’autre, la Sochacia, régime socialiste aux contours idéologiques flous, aurait pour certains analystes « une posture théâtrale et provocante, cultivant à la fois burlesque et radicalité, grotesque et ludique ».
Pour le ministère némédien, cette affaire ne vise pas seulement un différend commercial, elle interroge le sérieux même du régime sochacien. « Nous ne traitons qu’avec des pays sérieux, pas avec des machinistes diplomatiquement erratiques », déclare un haut responsable némédien sous le sceau de l’anonymat.

Cependant, cette réponse un peu trop franc choc soulève des questions. Est-ce la bonne solution ? La position qui semble celles de certains experts s’inquiète d’un durcissement des attitudes qui pourrait peser sur la stabilité régionale Faut-il laisser une chance à la désescalade diplomatique ? Ou, au contraire, la Némédie doit-elle mettre un terme à ce qu’elle considère comme une attitude arrogante et provocatrice ?

Une chose est sure, la Némédie a abattu la ligne rouge. Et dans un monde de désenchantements de l’alliance des alliances et du sens des paroles au même titre que des actes, la condition première du dialogue inter-humain est le respect de l’autre. En souhaitant être respectée, la Némédie semble vouloir rappeler à la communauté internationale que l’honneur n’est pas un souvenir du passé, mais un fondement du présent.

À l’issue de la diffusion de ce communiqué au ton acrimonieux, un large débat s’ouvre en Némédie, si la réaction du ministère des Affaires étrangères se veut porteuse de l’honneur de la nation, elle ne va-t-elle pas, elle aussi, envenimer les débats ? Car, au-delà du ton, du sarcasme reçu, des insignes blessées, une question hantait désormais les discussions politiques tout autant que les conversations populaires, la Némédie veut-elle préserver la paix ?

Le ministre Philippos Adrastos assène sans ambages que la fermeté actuelle a un prix pour une diplomatie du respect. Il clame qu’accepter, par le silence ou l’acceptation d’un ton condescendant serait, à terme, avaliser le précédent de l’attitude désormais fondée sur la mépris, au sein d’une communauté diplomatique où "les rapports de l’indépendance des États ne se fondent plus sur la réciprocité, mais sur la caprice". Mais dans la rue, que ce soit à Épidion ou à Korion, se demandent certains citoyens si un pays ne doit pas être des plus fermes pour se faire entendre et prévaloir sa voix.

« Nous refusons de devenir tels ceux dont nous dénonçons les comportements », clame Sofia Markélis, professeur aux relations internationales à l’Université de Myrida. Pour elle, la Némédie a tout à bénéficier à se démarquer, non par la rupture, mais par la constance la patience et la modération. « L’histoire diplomatique est pleine de scandales pardonnes, d’attaques blessantes dépassées. Ce qui fait une grande nation, c’est celle qui empoigne de manière stable. »

Dans un éditorial paru ce matin dans La Voix des Cités, le journaliste Ikarion Saros cite, lui, "une réponse proportionnée dans le registre, mais peut-être démesurée dans les vertus ". Il cite l’interdiction du vol, l’expulsion prochaine des ressortissants sochaciens, et la fermeture à toute perspective de dialogue comme gestes radicaux qui pourraient figer la Némédie dans une posture rigide, en inadéquation avec l’ambition du pays de jouer un rôle d’équilibre dans l’Afarée du Nord.

Du côté du gouvernement, au contraire, on ne manque pas de réaffirmer que la paix est la priorité de la politique étrangère. Un conseiller du ministre nous dit ainsi sous couvert d’anonymat : " La paix, ce n’est pas la passivité. C’est parfois le courage de dire non. Cela dit, la Némédie ne refuse pas le dialogue dans l’absolu, seulement quand il est respectueux. "

Cette précision sera-t-elle assez rassurante pour l’opinion ? On en doute. Une partie de la jeunesse, dans les cercles notamment étudiants et artistiques, commence à s’inquiéter d’un tout autre registre, la Némédie dont le ton est manifestement dur, ne finira pas, à son tour, par devenir un État intransigeant ?

Dans un pays éprouvé par la sagesse, l’harmonie, le juste milieu et la mémoire de royaumes jadis unis plus par la parole que par les bras, cette tension nouvelle ne peut qu’inquiéter. « Nous sommes némédiens, donc nous devons parler avec profondeur » assène avec discrétion un ancien diplomate en retraite, observant le silence, dans son jardin d’Olythos.

L’avenir désormais se joue autour de deux enjeux présumés : la réaction de la Sochacia, si tant est qu’elle s’emploie à modérer son propos – autrement qu’en poursuivant son ironie ; la capacité de la Némédie à faire la preuve, dans l’éternité, d’une puissance pacificatrice sans abandonner son exigence de respect.

Car au fond, comme dit le folklorique proverbe némédien :
« Le fleuve peut frapper la roche, c’est dans le lit qu’il change la terre. »

Mais, sous ces mots forts, comme une inquiétude réelle. Car, si la fermeté peut flatter l’orgueil d’un État atteint, elle peut aussi traduire une logique de retrait. Dans les rues d’Epidion, sur les places d’Oreia ou dans les cafés d’Arethia, les citoyens némédiens discutent : « Et à présent ? »
Certains applaudissent la fermeté d’Andronikos IV, considérant qu’il est régné comme le roi qui protège la souveraineté de son peuple ; d’autres, plus réservés, s’interrogent : cette montée verbale justifiait-elle une rupture si nette ? Némédie a-t-elle librement et sciemment rompu la relation avec un possible partenaire, malgré les outrages ?

Il faut dire que le discours royal, à la fin de son propos, insiste sur un point : la Némédie veut la paix. Cela, le peuple némédien l’entend. Mais, la Némédie le comprend alors sous la forme de mesures de fermeture : fermeture de l’espace aérien, suspension des relations, rappel de ses ressortissants.

Est-ce une intention de paix, ou bien la manifestation d’une plus vaste rupture diplomatique ? Le roi se veut-il défenseur de l’honneur de la couronne, ou est-on en train d’amorcer une nouvelle doctrine de relations internationales faisant de la dignité une valeur plus qu’un préalable à la négociation ?

Dans les cercles intellectuels d’Ephedra, les voix commencent à se faire entendre. L’historien Zalassios Forekios rappelait ce matin sur Radio12 :

" Nous avons été humilés, c’est vrai. Mais la grandeur d’un pays n’est pas seulement dans les réactions, elle est aussi dans les facultés à faire de l’offense, une occasion. Si nous fermons la porte, sommes nous bâtisseurs ou gardiens du mur ? "

C’est bien ce paradoxe qui alimente la réflexion aujourd’hui. Peut-on dire que la Némédie peut tenir un rôle majeur dans la stabilité régionale si elle n’existe que sur le mode de la mise à distance immédiate, fût-elle justifiée ? Et surtout, cette prise de distance ne risque-t-elle pas d’apparaître à d’autres États comme un manque de fermeté ? Certains partenaires n’oseront-ils plus s’exprimer librement, par crainte de nouveaux silences diplomatiques, de nouveaux gels ?

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Les Centrales Nucleaires némédiennes


Dans toutes les provinces du pays, la cristallisation de vapeur s’élève dans le ciel, témoin d’une properité temporelle qui n’atteste ni d’une guerre ni d’une agonie, mais bien de la tranquillité de la Némédie moderne. Avec un réseau de soixante centrales nucléaires opérationnelles sur l’ensemble du territoire du pays, la Némédie, sans conteste l’un des pays les plus nucléarisés au monde, affiche le nucléaire qui lui a été imposé et dont elle profite à bon escient, en pleine possession de son choix et dans une vision stratégique d’avenir.
Ces centrales, toutes distinctes, logent chacune la version nationale de la technologie et de l’architecture du réacteur, le NEDEON-VI, produit de haute volée du (CRE) Consortium Royal Énergétique qui a été conçu, après une gestation de plusieurs années, en coopération avec l’Académie des Sciences d’Ephedra. Ce réacteur dit de centrale de sixième génération est de type C qui fonctionne en cycle fermé, avec un système de refroidissement au sel fondu et des systèmes de sécurité passifs autonomes.

La solution singulière du NEDEON-VI est de produire simultanément à l’électricité de l’électricité la plus pure, du plutonium précieux. Ce plutonium est collecté, traité, et stocké dans des installations hautement sécurisées dont une partie est systématiquement mise à la disposition de nations partenaires avec lesquelles, dans des accords strictement civils, le plutonium peut être négocié.

"Le plutonium n’est pas un danger, c’est une ressource. Je l’ai fait en bon père de famille dans le cadre donné par les normes internationales" , dit Meliton Karastamatis, directeur de Lysidros, l’une des plus grandes centrales du pays situé au nord.

En Némédie, peuplée de plus de 110 millions d’habitants, près de 70 % de l’électricité provient de centrales nucléaires, le reste étant produit par des barrages hydroélectriques et éoliennes offshore installées dans la mers et les campagne, qui assemblés permettent une souveraineté énergétique du pays, ainsi qu’une réduction significative de son empreinte carbone.

Chaque année ce sont des centaines de térawatts/heure qui sont produits et redistribués vers les grands centres urbains d’Ephedra, Myrida, Phaidonia, Korion ou Epidion et d'autre encore, mais aussi vers les zones plus rurales, pour une justice énergétique.

En effet, le NEDEON-VI qui équipe toutes les centrales du pays, s’est un des leviers du développement économique, permettant la formation de milliers d’ingénieurs et de techniciens, l’émergence de clusters technologiques régionaux, l’exportation vers d’autres états afaréens et de d'autre continent.

Depuis trois ans, le plutonium némédien fait l’objet d’un commerce discret mais croissant, contrôlé par un organisme public, le Pays, organisant les ventes de cette ressource précieuse utilisée dans les batteries de satellites, les réacteurs miniatures ou la recherche en fusion nucléaire.

Dans ce commerce transparaît une influence nouvelle de la Némédie, située à la croisée de l’énergie et de la diplomatie, au point que certains analystes n’hésitent pas à parler d’" atome-roi " aujourd’hui au même titre que le pétrole en 1960.

D’ores et déjà une soixante-unième centrale est en construction dans le sud du pays, dans la région d’Olythos, longtemps oubliée. Ce projet symbole de la volonté de transformer une terre laissé à l’abandon en centre énergétique régional générateur d’emplois, de savoirs, et de fierté.

"Nous ne bâtissons pas une centrale, nous écrivons un avenir pour la région", résume le stratège de l’énergie Themistoklis Ardianos, directeur du chantier d’Olythos. Sur ce site, un enthousiasme inédit réunit en effet jeunes apprentis formés dans des lycées techniques, ingénieurs revenant d’expatriation et ouvriers formés dans les provinces du nord autour de la transformation d’une région marginalisée en pilier énergétique du pays.

La somme colossale investie dans la filière nucléaire au titre de l’investissement public, soit 4,2 % du produit intérieur brut, a elle aussi été décidée par la Couronne. Elle s’inscrit dans un horizon de plusieurs année. Il s’agit de la Stratégie de l’Autonomie Durable, qui prévoit l’implantation de mini-réacteurs NEDEON-T dans certains endroit, dans des zones industrielles pouvant être qualifiées d’isolées ou à haute valeur stratégique, et qui réduit le risque de dépendance aux importations, même en cas de crise géopolitique.

La Némédie, consciente de ses responsabilités, s’est dotée d’un organe de supervision indépendant , l’Autorité Royale Nucléaire, qui fournit chaque mois un rapport public, consultable en ligne. Elle collabore avec l’Office National de l’Énergie Atomique et a mis en place un dispositif de traçabilité du plutonium produit, transporté ou vendu.

Le choix du nucléaire loin d’être une fuite en avant, ou une course technicienne est inscrit dans une vision civilisationnelle, il s’agit de faire de l’énergie non plus un risque ou un privilège, mais un droit, universel, facteur d’égalité, et donc de souveraineté pour chaque région, chaque famille, chaque individu.

En plus de son parc nucléaire impressionnant, la Némédie tire une richesse géologique fondamentale, ses gisements d’uranium, repliés dans les bassins miniers de l’Est et du Sud-Est. Cette abondance naturelle garantit au royaume une indépendance stratégique presque totale dans le cycle du combustible nucléaire.

La possession de ressources en uranium à disposition permet à la Némédie de ne dépendre d’aucun fournisseur étranger pour alimenter ses réacteurs NEDEON-VI. Éléments d’une chaîne entièrement nationale, l’extraction, l’enrichissement et la fabrication des barres de combustible sont sous la supervision de la CNEA, donnant à l’État une souveraineté sur l’une de ses ressources les plus précieuses.
Alors que de nombreux pays doivent composer avec un marché énergétique instable ou des contraintes géopolitiques, la Némédie s’inventent, jour après jour, des voies à la fois autonomes, stables et résilientes. De la sorte, ce pays n’est pas seulement un modèle d’indépendance énergétique, mais également un acteur central dans les équilibres énergétiques de l’Afarée, capable de s’imposer comme la clé de voûte de sa sécurité énergétique.

Voici la Liste des 60 centrales nucléaires némédiennes (équipées de réacteurs NEDEON-VI)

Lysidros

Aetherion

Dorkamna

Thalmakis

Melantheion

Xelmaris

Kastoréa

Nédrion

Arkymoros

Velisya

Télemnos

Galmyros

Helkris

Damaïa

Orontrès

Zerykia

Tymarion

Zophoros

Kalmydia

Seranta

Myreida

Nektoros

Delkarion

Agléa

Phoryas

Edrassos

Ylatheos

Tharkinon

Kelydra

Derkhéna

Vorynthos

Skelmaris

Olkyris

Prelydon

Hyrgamos

Talsédris

Athrymon

Krystelleion

Olyphrée

Zarkheion

Mendryos

Lékadion

Typhasos

Xerion

Palethros

Evrykomas

Dalikon

Nymerkar

Éranthis

Zynkaron

Phoïdanéos

Krelysia

Ardyphion

Semnèsia

Doralkhé

Theramnon

Valkionis

Kelmyras

Terykhelion

Solkraïa

61e centrale en construction :


Olymaris, localisée dans la région d’Olythos, est la première centrale à nouvelle génération programmée pour être équipée du NEDEON-VI+, version améliorée à rendement et à profondeur de recyclage optimisés. Elle sera aussi la première centrale à accueillir une unité de recherche ouverte aux ingénieurs partenaires.

CNEA

Crée en 2007 par l’ordonnance royale, la Compagnie Némédienne de l’Énergie Atomique CNEA, entreprise publique d’intérêt national ayant pour mission de gérer, stocker, certifier, et vendre le plutonium produit sur le territoire national par les réacteurs NEDEON-VI, a pour but de faire du plutonium némédien un instrument de développement scientifique, industriel, et diplomatique tout en veillant au strict respect des normes internationales de non-prolifération.

Estimé actuel directeur en fonction de la Commission Nationale de l’Énergie Atomique, Erathelios Drakon, ancien ingénieur chef du projet NEDEON-VI, est un acteur bien connu du champ du nucléaire civil némédien. Répartie entre deux concepts de l’énergie, comme outil au service de l’essor des Nations et de la Paix au fur et à mesure des progrès technologiques.


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KALYROS FAIT EXPLOSER LES COMPTEURS !


Il s’agit d’un vrai raz-de-marée musical car le dernier album de Kalyros, icône montante de la scène némédienne, bat tous les records d’écoutes dans le pays. Sorti il y a tout juste une semaine, "Metaxy Fōs kai Skotadi" (Entre lumière et ténèbres) est déjà écouté plus de 15 millions de fois, en totale rupture avec les réalisations d’écoute en musique contemporaine du pays.
Porté par des titres de choc comme "Dómata", "Thermida" ou l’éblouissant “Anemos tis Nychtas”, l’album mélange les sons traditionnels némediens avec des rythmiques modernes électro-pop, dans une recette aussi audacieuse que fascinante.
Saluer maintenant un peu partout la critique “le poète électrique de sa génération”, Kalyros séduit un public de plus en plus vaste, qui dépasse les frontières, des réseaux sociaux aux clubs d’Ephedra et aux places de Myrida, ses refrain sont omniprésents.

"Je n’avais pas pensé à un tel écho. Ce succès appartient à ceux qui vivent et qui sont touchés par cette musique, c’est un partage d’émotions. Et ce n’est pas fini." , a déclaré Kalyros dans un entretien exclusif.
L’artiste, qui est originaire de la région de Korion, est déjà en phase de préparation d’une tournée nationale qui s’annonce pour fin d’année avec des dates annoncées à Epidion, Athernastos et encore . . . .

Kalyros, ou Andronis Kalydon, est l’enfant d’un petit village de la région de Korion où les chants de son grand-père, ancien chantre d’église, nourrissent ses premières découvertes musicales. Les vinyles de synthwave collectionnés par son frère aîné font le reste. À 10 ans, il compose ses premières mélodies, sur un clavier récupéré dans une brocante, et commence à les publier sur les plateformes numériques. Sa voix grave et ses textes poétiques attirent rapidement l’attention.
À 19 ans, il part pour Ephedra, où il fonde un petit collectif d’artistes indépendants, le "Stoa Kallitechnōn" (Portique des artistes), et commence à jouer avec un petit groupe dans des cafés et festivals locaux. C’est là qu’il attire l’attention d’un influent producteur de Némédie Sonor, qui lui propose un contrat.
Son premier EP, "Nychta sto Neró" ("Nuit sur l’eau"), connaît un certain succès et constitue un moment marquant pour la scène alternative en général. Il en est de même pour "Metaxy Fōs kai Skotadi", son premier album complet, dans lequel il fusionne des genres et les style dans un style unique, à la frontière de la musique ancestrale et des paroles profondes, et des textures électroniques minimalistes, comparé par certains à un “rituel digital”.

Ce qui attire la réaction chez Kalyros, c’est la notion de rassemblement. Jeunes pétris par la ville et vieux mélomanes, critiques tatillons et amoureux d’une pop au sexy dilaté, ils se retrouvent tous dans une voix commune, une nouvelle respiration. Ses concerts se présentent à la fois comme l’événement sonore de l’écoute en commun et comme la cérémonie d’une émotion collective, le tout scandé parfois par la lecture de poèmes ou par la projection d’images inspirées des fresques némédiennes.
Il s’agit d’un souffle nouveau qui ne se réduit pas dans la seule performance, scénique il est vrai. Kalyros crée un univers. Un monde où l’ancestral et le contemporain n’entrent pas en contradiction, mais au contraire, ouvrent un dialogue. On entend déjà les coups de cloches des églises de Korion se mêler aux pulsations électroniques, les vers des traditions orphiques se glisser sur des beats syncopés. C’est la réinvention d’une liturgie moderne à l’image même de ce que l’artiste nous avoue :

Le public s’y retrouve bien, les places publiques, les taxis, les toits d’Ephedra, les titres de Metaxy Fōs kai Skotadi, sont assidûment repris en boucle. On parle déjà de « phénomène Kalyros », de renaissance némédienne, aux vents d’une jeunesse avide de sens, de beauté. Pour une autre écoute, un autre chant.

Kalyros, au-delà de sa musique, c’est probablement pour son engagement souvent discret mais toujours permanent envers les siens, qu’il est d'une telle popularité. En effet, depuis déjà plusieurs années, l’artiste consacre une part conséquente de ses revenus à des associations de terrain opérant dans la région d’Olythos, la région la plus pauvre de la Némédie. Lieu de collines arides, de vestiges oubliés, de tensions sociales vives, de rares opportunités, sa mobilisation a permis la réhabilitation de deux écoles, d’un petit studio de musique communautaire, et un centre de formation de jeunes artistes.

À Vradopolis, petite bourgade d’Olythos, un mur a été entièrement recouvert d’une fresque illustrant Kalyros entouré des enfants tenant des instruments fabriqués avec des bouts de bois et des éléments de récupération. On pouvait y lire :

"Den mas ξehase" qui signifie " Il ne nous a pas oublié."

Les chiffres viennent également confirmer les présomptions concernant la dimension du phénomène Kalyros, qui ne semble pas avoir de limite d’âge. En effet, selon les dernières statistiques du cabinet Némédie Sonor et des plateformes de streaming, les morceaux du rappeur sont écoutés par un public âgé de 9 à 61 ans, avec peu de différences quantitatives significatives au sein des tranches d’âge, alors que les personnes ayant moins de 20 ans représentent environ 30 % des audiences.



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La Némédie face au défi de la surpopulation


Avec une population qui a atteint le chiffre de 110 872 386 habitants, la Basse Némédie entre dans une phase critique de son développement. Le pays, connu pour ses paysages diversifiés et sa culture plurimillénaire, fait désormais face à une pression démographique exceptionnelle. Sa capitale Épidion loge à elle seule plus de 21 millions d’habitants, concentrant ainsi un grand nombre d’acteurs de l’économie et de l’activité de la vie sociale du pays.

D’un côté, depuis la décennie 90, la Némédie est connue pour sa probable démographie croissante qui résulte d’un taux de natalité important ainsi que du progrès de la médecine, boostant l’espérance de vie. D’un autre, cette dynamique porteuse de vitalité et de dynamisme du pays, pose des problèmes d’organisation et d’aménagement des territoires, ce qui peut sembler inquiétant.

Épidion est révélatrice de cette dynamique : la capitale s’étend de plus en plus loin, des connexions et quartiers surgissent comme des champignons, les voies de communication comme les transports de surface et de fond sont sans cesse étendus pour satisfaire les besoins de la demande. D’autres grandes villes comme Myrida et Phaidonia suivent le même chemin.

Si la situation demeure maîtrisée en 2016, certaines populations d’experts alertent sur les risques sur le long terme, la très forte concentration de la population dans quelques grandes métropoles et l’absence d’un équilibre des politiques d’aménagement entre des régions déjà en retard de développement comme le sud némédien et leurs grands centres urbains pourrait créer des inégalités dans l’évolution de ces territoires, mais aussi une pression sur les ressources naturelles, l’eau notamment, qui commence à attirer l’attention des pouvoirs publics.

Dans le cadre de ces enjeux, le Gouvernement royal et l’Assemblée des Cités ont donc été conduits à réfléchir à une stratégie d’ampleur permettant de concilier cette croissance au préalable non seulement choisie mais voulue tout autant nationale. Ainsi s’avère nécessaire l’élaboration d’un vaste Plan d’Équilibre Démographique :

Plan d’Équilibre Démographique

Favoriser le développement de villes secondaires pour une répartition plus équilibrée de la population ;

Moderniser les infrastructures existantes en milieu urbain ou rural ;

Protéger les ressources naturelles notamment à travers la gestion de l’eau et des sols ;

Développer l’économie locale des territoires les moins développés pour endiguer l’exode rural.

La difficulté est grande car il s’agit de maintenir l’âme de la Némédie cette subtile harmonie entre urbanité et tradition, modernité et respect du territoire tout en satisfaisant aux exigences du présent,

Quant au niveau de la population, la prise de conscience est encore tardive. Beaucoup voient dans la croissance démographique un gage de prospérité, et la promesse d’un meilleur avenir. Mais les autorités, conscientes des risques d’un déséquilibre permanent, veulent agir avec prudence et prémonition.

L’essor démographique particulièrement rapide de la Basse Némédie doit être considéré comme un facteur favorable, en premier lieu à deux niveaux. L’économique d’abord ; population forte et jeune, c’est tout un potentiel de travail susceptible de soutenir la production manufacturière, d’alimenter une consommation intérieure, donc de donner corps à un marché se révélant ainsi relativement dynamique. C’est bien de cela qu’attendent les entreprises locales ou étrangères avec la Némédie un pôle d’attractivité qui peut s’appuyer sur un vivier de travailleurs associés au public que leur offre en effet un marché local ambitieux, en dépit du caractère traditionnel et rural, de nombreuses bourgades, rendant nulle l’impression de stagnation au profit d’une animation qu’en revanche on pourrait récuser au bénéfice de l’ordre de solidité qui fait également du territoire un marché plus familier. C’est là un atout à l’équilibre financier de l’économie némédienne amenée à savoir rester tout en se développant dans la phase des années 2000, donc privilégiée au sein des pays ayant pu assurer un taux de croissance positif, de quoi conserver une position en tête de liste de ce qui deviendra ensuite considéré comme les puissances montantes d’Afarée. La jeunesse également constituerait l’urgence dans laquelle s’inventent de nouvelles instances culturelles et où s’affirment des idées neuves, le renouvellement d’initiatives d’entreprises répondant positivement à ce défi de changements sociaux contraignant à l’artiste, et encore rêveur dans cette voie de la surprise, à se tenir aussi sur la voie du non aboutissement des occasions perdues, de la promesse de découvrir Épidion ou d’être séduit par d’autres cités oniriques.

La tendance à l’urbanisation a aussi permis de doter le pays en infrastructures améliorées, en routes toujours plus nombreuses, en transports publics renouvelés, en hôpitaux et écoles construits par milliers pour répondre à la demande. Ce foisonnement d’initiatives a produit de nouvelles banlieues, de nombreux nouveaux pôles universitaires, voire des véritables « cités nouvelles » surgies de terre là où étaient installés des espaces et des vies rurales.

Cependant, ces avantages créent parfois les propres contradictions de leurs bénéfices.
La densité urbaine extrême d’Epidion commence à atteindre des limites, avec embouteillages récurrents, logements toujours plus onéreux, et pollution de l’air croissante. Certaines zones pourtant à la pointe de la modernité peinent à offrir à chacun des conditions matérielles de vie satisfaisantes, en matière de logement ou de services publics.

Rythme accéléré des constructions urbaines, tension sur le matériel mis à disposition. L’eau potable, l’électricité, les systèmes de traitement des déchets doivent constamment être agrandis, avec le poids d’investissements colossaux. Les collectivités locales sont souvent lésées et dépassées par la poussée démographique.

Plus préoccupant encore, le dilemme territorial. Tandis qu’Épidion, Myrida et Phaidonia croissent à toute vitesse, certaines régions méridionales et de l’intérieur némédien, le cas de la province d’Olythos en étant le meilleur exemple, échappent totalement à cette dynamique, déclenchant des frustrations et un exode rural massif vers les grandes agglomérations. En effet, cette migration interne tarifaire déséquilibre le tissu social et économique de diverses provinces au bénéfice de la métropole, laissant derrière elle des territoires sous-peuplés et affaiblis économiquement.

À long terme, des universitaires de l’Université Royale d’Épidion, se mettent en garde contre l’éventualité d’une bombe sociale, à savoir une jeunesse plus nombreuse dans les métropoles, confrontée à un manque d’opportunités économiques et à un avenir sombre.

La pression liée à l’écologie monte constamment et le solde de l’exploitation des ressources naturelles et de leur renouvellement est de plus en plus fragile. Les nappes phréatiques alimentant Épidion présentent déjà des signes de tension, les terres agricoles en périphérie des grandes villes sont progressivement grignotées par l’urbanisation, et les forêts, riches en biodiversité, font face à la pression croissante des besoins d’une urbanisation expansive et de la demande en bois de construction.

Culturellement et historiquement attachée à l'actualité de l’écriture de l’histoire, mais consciente que cette histoire dépend des choix d’aujourd’hui, la Némédie est face à un moment de vérité. Le défi consiste à faire en sorte que cette force démographique chanceuse ne se transforme pas en sinistre crise. Il ne s’agit plus de se contenter de croître, mais de croître de façon intelligente, en répartissant équitablement les richesses, en préservant l’environnement-vital et en renouvelant les formes de gouvernance-urbaine.

La tâche est immense, mais l’histoire némédienne a fourni moult exemples de résilience et d’imagination.. Déjà des projets pilotes émergent : création de villes écologiques en province, mise en réseaux à travers des lignes de TGV les liens entre villes et campagnes, politiques d’incitation au retour à la terre en milieu rural pour les jeunes diplômés…
Si ces initiatives se poursuivent, cette Némédie pourrait devenir, au XXIe siècle, le premier exemple d’un pays devenu un modèle d’adaptation et de croissance durable, fidèle à son double héritage de conquête moderne mais aussi de respect des traditions.

La Némédie se classe aujourd’hui au deuxième rang des pays les plus peuplés d’Afarée, juste derrière l’Empire de Churaynn, mais surtout au sixième rang de la population mondiale. Avec ses 110 872 386 habitants occupant 895 992 km², le pays présente une densité de 124 habitants par km², chiffre qui, bien loin de représenter une saturation, existe pourtant dans un état de soulèvement particulièrement obsédant, notamment dans les centres urbains à forte poussée démographique.
Cette impressionnant état de peuplement en lui-même bien qu’intéressant pour la recherche, surtout sur le très long terme, n’existe pas dans une dimension neutre tant il est le révélateur de l’irrésistible montée en puissance d’une nation qui ne le cachons pas, était jusque là subtilement ignorée et éclipsée par de plus anciennes puissances du continent afaréen. Mais en quelques décennies, la Némédie est devenue un des cœurs démographiques et économiques de l’Afarée, imposant son propre rythme à la fois en région, mais aussi à l’échelle du monde. Toutefois, la dynamique interne entraîne le pays dans un effet boomerang que les institutions, souvent simplement administratives, de ce pays doivent dès lors apprendre à gouverner.

Parmi ces différents effets, l’émigration némédienne vers les pays voisins est en pleine croissance. D’une façon plus spontanée et surtout plus dynamique, jeunes et familles, qui viennent souvent de territoires ruraux en état d’abandon ou de périphéries urbaines trop congestionnées, mettent leurs espoirs d’avenir au-delà des frontières nationales. L’Ivéri tout d’abord, pays frontalier à l'ouest, voit ainsi son tissu social lentement modifié par l’implantation némédienne croissante dans ses provinces frontières. Les migrants s’y sentent favorisés par la promesse de terres agricoles encore disponibles, d’un coût de la vie moins onéreux et d’un mode de vie rural à conserver, loin des tensions des grandes villes némédiennes.

Plus soutenue encore est la veine migratoire vers l’Empire de Churaynn, immense voisin orienté, pays le plus peuplé du monde. Avec sa population déjà qualifiée de titanesque, le Churaynn est en effet paradoxalement ménageant pour quelques Némédiens des ouvertures dans les zones encore peu urbanisées ou aujourd’hui en voie d’industrialisation expéditive. Les autorités churaynnaises, qui n’ont pas d’emblée été favorables, commencent à concevoir des politiques d’intégration locales de cette main d’œuvre étrangère, appréciée pour son niveau scolaire, son sens de l’effort et son goût pour la collaboration.

Cet épisode migratoire concrétise un phénomène historique pour cet État, puisque jusqu’à présent, la Némédie n’avait été qu’une destination pour quelques flux migratoires, en particulier artistiques et économiques, elle devient désormais elle-même terre d’émigration. Ce phénomène transforme profondément la composition sociale du pays, ses priorités diplomatiques et sa politique intérieure, le gouvernement royal, conscient de cet état de fait, s’appliquant à la fois à freiner l’exode des jeunes talents mais aussi à organiser des coopérations bilatérales avec les pays d’accueil, dans une approche dorénavant gagnant-gagnant.
Mais à ce pas amer, se cachent aussi de véritables drames personnels et familiaux. Partir, quitter la Némédie n’est pas un acte anodin. Il s’agit bien souvent de renoncer, douloureusement, à une terre au plus vif attachement, à une culture millénaire portée par les souvenirs olfactifs de cités anciennes, de temples, de montagnes et de mers sacrées, nombre de migrants gardant espoir d’un jour revenir, témoins vivants d’une Némédie, même lointaine, continuant de hanter les âmes de ses enfants.

En même temps, sur le territoire national, devraient être mises en œuvre les procédures de politique d’adaptation et de politique de redistribution démographique. Le Plan d’Équilibre démographique, dont les grands principes ont été établis, est mis en œuvre activement : incitations fiscales pour les implantations rurales, aménagement de « villes-jardins », subventions pour les entreprises s’implantant hors des grandes métropoles, extension du réseau ferré à grande vitesse pour désenclaver les provinces.

Dans plusieurs provinces autrefois « marginées », comme l’Astérida, la région de Telmora ou la vallée de Sarmenos, s’effectuent des tentatives de renaissance. Des projets pilotes y propulsent : cités universitaires implantées en milieu naturel, programmes d’agroécologie alliant agriculture durable et développement économique, écovillages destinés à une jeunesse diplômée et motivée. Si de telles expériences fonctionnent, elles constituent peut-être les débuts d’un nouvel âge d’or rural.

Tenant compte d’un autre aspect, la question écologique ne peut être posée et posée autrement que comme un défi omniprésent. La Némédie ne peut pas se réduire à répartir des hommes, il lui faut changer son rapport aux ressources naturelles. Déjà, des tensions sévères émergent dans la gestion de l’eau. À Épidion, la surexploitation des nappes phréatiques commence à entraîner la salinisation des sols côtiers alors que la pollution des milieux urbains menace plusieurs des cours d’eau les plus importants. Les forêts anciennes du Nord et du Centre, parmi les plus riches d’Afarée en matière de biodiversité, sont grignotées par les pressions foncières et une coupe illégale des arbres.

Il s’agira donc pour la Némédie non pas seulement de croître mais de se réinventer sans se perdre, de se construire une société capable d’allier la dynamique de sa jeunesse, l’élan de sa croissance et la sagesse de ses traditions millénaires. Ce carrefour des héritages et des ambitions n’a jamais été si présent à lui-même : un peuple jeune, ardent, exalté par l’avenir, et pourtant lourd d’un monde à préserver.

Si elle remporte ce défi audacieux, non seulement elle sera l’un des pays dont la population est la plus nombreuse du monde : elle sera l’un des rares exemples d’une transition réussie entre un passé glorieux et un avenir responsable, un phare, un exemple pour Afarée et peut-être pour l’ensemble du monde.


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Tensions croissantes en Afarée


Ce matin, le roi Andronikos IV s’est adressé à la Nation némédienne et à la communauté internationale au Palais royal dans une déclaration d’une solennité que l’on croyait disparue depuis longtemps. À la suite de la mort du président Ismael Idi Amar de la Fédération Centrale Démocratique d’Antegrad, tué lors d’une frappe balistique sur le Palais présidentiel du pays, le souverain némédien a exprimé à la fois son inquiétude la plus vive et une réelle émotion.

Dans une allocution grave, le roi a évoqué une tragédie pour l’ensemble du continent d'Afarée, dénonçant un acte lâche et inacceptable, qui porte non seulement atteinte à la souveraineté d’un État, mais également à l’édifice même de la paix internationale. Porter atteinte à la vie d’un chef d’État, a-t-il dit, n’est pas seulement une atteinte à l’homme, mais c’est porter atteinte à la stabilité.

Le roi Andronikos IV a salué la mémoire d’Ismaël Idi Amar, qu’il a désigné comme un homme d’Etat de vision, dont l’engagement politique a participé à faire grandir la puissance de son pays. Il a indiqué que cette perte était d’autant plus dure que la Némédie, parce que les deux pays étaient liés, avait toujours suivi avec attention et bienveillance la marche de cette nation sœur.
Les risques d’escalade sont réels, et sans jamais céder à une condamnation absolue de l’attaque au Palais présidentiel, le roi a mis en garde les siens. La position de la Némédie doit rester claire, jamais la violence n’est une solution. Et l’acte d’attaquer cette scène politique, qui n’a rien de fortuit, ne peut recevoir aucune excuse des circonstances, ni des raisons de politique ou de guerre.

Le souverain a manifesté la solidarité entière de la Némédie avec le peuple antegradien frappé par le deuil, et a présenté ses condoléances à la famille du président décédé, et a demandé la création d’une enquête internationale impartiale pour établir toutes les circonstances entourant cette attaque, identifiant les responsables à poursuivre devant la justice.
Andronikos IV a conclu sa déclaration en déclarant que la Némédie continuerait à appuyer les initiatives diplomatiques et les efforts en faveur de la paix, et notamment dans une région aussi stratégique et vulnérable que l’Afarée.

Ces tensions croissantes dans la région suscitent aujourd’hui une juste inquiétude en Némédie et dans le monde. Éliminer un chef d’État en fonction dans une opération militaire constitue un point de rupture potentiellement catastrophique. Il ne s’agit plus d’un geste isolé, mais d’un signal inquiétant dans un milieu déjà affaibli par des rivalités régionales, des convoitises territoriales et la multiplication des foyers de crise.

Les populations civiles assistent très anxieusement au déroulement des événements, ne craignant rien tant que le déchaînement de règlements de comptes, d’initiatives étrangères ou d’autoritarisme que pourrait déclencher l’instabilité actuelle. Les ONG humanitaires, qui craignent pour leur part une aggravation rapide de la situation sur les terrains où les conditions sont déjà précaires, notamment dans les zones anciennes des conflits d’avant, s’étonnent alors, d’autre part, de la difficulté à obtenir la possibilité de l’aide humanitaire.

La situation est joignable. Il convient dans une telle ambiance de se trouver dans la tempérance et l’esprit de la responsabilité pour sauver l’imminente de la riposte et non de la guerre, du besoin de vérité et de justice. En échaudant le croyant de la tranquillité dans les affaires, l’Etat, la communauté internationale serait forcée, non pas sous le coup de l’épreuve du genre, mais pour l’apaisement. Car, ce dont l’Afarée a besoin c’est de la paix, aujourd’hui plus que jamais.



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Le Karty décrète un embargo contre la Némédie après une simple annulation de commande



Dans un geste que certains décrivent comme théâtral, les représentants du Saint Empire de Karty ont fait parvenir hier au ministère des Affaires Étrangères de Némédie, une lettre annonçant un embargo tant économique que politique. Pourquoi un embargo ? Parce qu’une commande de matériels militaires a été annulée, la Némédie ayant le droit de reconsidérer ses partenariats stratégiques.
La missive, rédigée en termes particulièrement violents et accusateurs, accuse de l’État Némédien d’"ingratitude diplomatique". Alors que sous l’outrance des mots et l’indignation feinte, il s’agit en réalité d’atteindre un pays entier bien plus que de frapper une entreprise qui, de cette manière, pourrait bien porter plus de mal au Karty qu’à la Némédie.

Némédie exporte vers le Karty plusieurs matériaux d’intérêt stratégique mondial, dont, l’uranium, le thorium, le plutonium, le nickel et le manganèse. Ces matières sont stratégiques dans le secteur de l’énergie, de la défense et de l’industrie de haute technologie. Les exportations kartiennes vers la Némédie, en revanche, ne sont, pour l’économie némédienne, qu’une anecdote sans apport structurel.

"Nous avons annulé un contrat, pas déclaré la guerre", a confié un confié à conseillé du ministère. "Ce sont eux qui font d’un acte banal de gestion contractuelle une scène de théâtre diplomatique."

Répondant à nos sollicitation, Philippos Adrastos, Ministre des Affaires Étrangères de la Némédie a réagi posément… et avec une pointe d’ironie : "J’ai ri, oui. Ce n’est ni le style ni le sérieux d’un diplomate. On aurait aimé une missive telle qu’on aimerait un fin texte théâtral, une lettre à la Némédie, ici il ne s’agit que d’un ludisme outrancier."

Le ministre n’a pas daigné par ailleurs répondre officiellement à cette correspondance : "A quoi bon répondre à ce genre de gesticulation. Le Karty n’apporte guère, dans le meilleur on y perdra certainement plus, dans le pire c’est nul. "

Pour un certain nombre d’analystes, cette réaction brutale et désordonnée du Karty constituerait en fait une inquiétude plus générale, la crainte de voir la Némédie, pays en plein développement industriel et diplomatique, avancer à pas de géant sur l’échiquier international.
"La montée en puissance de la Némédie gêne," analyse une politologue de l’Université d’Ephedra. "Et certains régimes, rétifs à perdre leurs privilèges d’hier, n’ont pas de peine à l’accepter."

A l’Assemblée des Cités, les élus némédiens ont adopté à l’unanimité une motion de soutien au ministère des Affaires Étrangères et à la décision de ne pas répondre à la provocation. Le texte note que "la diplomatie némédienne doit garder son altitude au-dessus des invectives, se garder des nécessités du passé révolu, et se tourner vers l’avenir".

Cette tentative d’intimidation permet surtout de mettre en lumière la fébrilité du Saint Empire de Karty. De son côté, la Némédie continuera d’avancer ses partenariats avec des partenaires sérieux, stables et respectueux pour le moins des usages diplomatiques internationaux.

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Exercice stratégique



Lors d’une allocution solennelle et retransmise en direct du palais royal, Sa Majesté Andronikos IV est venu s’adresser à la nation avec une gravité qui était sous-tendue par un contexte géopolitique de tensions avec le Karty montantes. Le roi némédien, soucieux d’apaiser autant que d’affirmer la fermeté du pays, a rappelé les principes de la diplomatie némédienne (paix, respect, souveraineté, dialogue). "Notre civilisation millénaire n’est pas née de la force obscure, mais de la sagesse", dit-il avec franchement, en ajoutant que, si la Némédie est un pays aimant la paix, cela ne doit pas être entendu pour le pays comme un signe de faiblesse. Cette déclaration intervient après plusieurs signaux de confrontation émanant du Karty. Mais la Némédie face aux provocations n’a pas cédé à l’émotion et a décidé de répondre non pas par la menace mais par la vigilance et la préparation.

Le roi a ainsi annoncé le lancement d’un grand exercice de stratégie militaire, dans la région d’Athenastra, au sud-est de la région.
D’après les informations précises et confirmées, cet exercice de grande ampleur mettra notamment en scène, notamment, le sous-marin lanceur d’engins de 8e génération "Menandros", vaisseau amiral de la flotte némédienne, et deux missiles balistiques de 2e génération à portée moyenne, testés dans un cadre strict et rigoureux. La manœuvre militaire se déroulera dans une zone terrestre strictement définie, éloignée des zones les plus peuplées, avec des mesures de sécurité rigoureuses mises en œuvre pour assurer une totale transparence. Les autorités ont pris soin de tenir informer les riverains de l’île d’Athenastra, où l’armée a travaillé étroitement avec les autorités locales pour lever toute inquiétude. Des campagnes d’information, des affichages clairs, et des moyens de communication amplifiés ont été déployés pour que la population ne soit pas surprise, ni effrayée. "Il n’y a aucun danger, aucune évacuation, aucun confinement, tout est sous contrôle", insiste un officier du commandement naval d’Ephedra.

Techniquement, l’objectif de l’exercice consiste en première approche à vérifier la capacité du Menandros à réaliser un tir coordonné depuis immersion contrôlée ainsi que la fiabilité des systèmes permettant le guidage et la communication entre pôles militaires. C’est un message fort, envoyé non seulement au peuple némédien mais aussi à l’ensemble de la communauté internationale : celui d’un pays qui ne veut pas de la guerre mais qui sait se préparer. Comme l’a relevé le roi : "Ce n’est pas une provocation, ni une menace, mais une vérification opérationnelle dans le cadre d’une logique purement défensive (éventuellement préventive)." A Athenastra, le sentiment général est serein voire légèrement frémissant.

Pour les diplomates, le message est limpide, la Némédie reste ouverte au dialogue. L’appel royal à ne pas commettre "la dernière erreur qui pourrait être faite", et de voir dans une escalade militaire avec le Karty un point de non-retour a été entendu comme une mise en garde évidente. En mer, les forces navales némédiennes (sous-marins d’attaque de nouvelle génération, destroyers multifonction, croiseurs à propulsion hybride) sont, selon les experts, bien au-dessus des capacités militaires du Karty. Mais il n’est pas envisagé d’opérer en démonstration de force. "Notre roi fait ce que la sagesse prescrit, il protège sans provoquer, il affirme sans hausser le ton", analyse une source proche du ministère des affaires étrangères. Le ministre Philippos Adrastos, qui suit de près la situation, a d’ailleurs confirmé que des canaux diplomatiques sont encore ouverts, malgré un refroidissement des échanges, il est vrai.

Malgré les déclarations officielles et la tentative d’apaisement des autorités, plusieurs habitants d’Athenastra commencent à faire circuler des doutes. Les voix plus sceptiques estiment que la zone choisie pour l’exercice présentée comme reposant uniquement sur des critères stratégiques et éloignée des zones sensibles serait au contraire le lieu d’une parcelle du Front du Mehravan Libre, ce mouvement indépendantiste qui agit dans les contreforts est de l’île et dont l’existence semble rendue publique au long des années.

"On veut nous faire prendre un exercice habituel, et tout le monde sait ici que le Front a là-bas des infrastructures non seulement connues mais qui sont réelles dans le dédale des gorges de Varissos", souffle un pêcheur de la baie d’Alkara anonyme. D’autres disent avoir vu ces dernières jours des mouvements discret mais intense de logistique où se mêlaient convois terrestres militaires sur des routes rarement utilisées en temps ordinaires. D’aucuns se demandent si l’exercice annoncé ne serait donc pas un facile camouflage d’un coup militaire finement dissimulé sous le prétexte de dissuasion géopolitique.

D’emblée, le roi a rejeté les accusations, parlant de "spéculations dénuées de fondements s’alimentant à la source d’éléments hostiles à l’unité nationale", tout en affirmant que "la Némédie ne procédera évidemment jamais à des interventions secrètes sur son propre territoire, sans en référer à l'assemblée des cités"
Cependant, dans les villages du sud-est de l’île naît une inquiétude sourde qui, néanmoins, reste contenue, tandis que les habitants sont partagés entre sentiment patriotique et crainte de devenir, malgré eux, spectateur d’un affrontement plus grave que celui qui vient d’en être le cadre.

Un consensus se dessine parmi des analystes plus hauts placés, défendant ainsi l’idée d’une double communication, intérieure et extérieure. Le Front du Mehravan Libre, dont les revendications d’indépendance s’étaient récemment radicalisées, pourrait (à en croire ces analystes) être une cible potentielle de cette démonstration de force voilée. En effet, les intentions sont rarement formulées clairement en Némédie, malgré une communication royale soigneusement pesée. L’exercice, de son côté, est toujours prévu pour démarrer dans les dix jours qui viennent. D’ici là, tous les yeux sont rivés sur Athenastra.


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Une dette mystérieuse qui inquiète



Une ombre financière est venue alourdir, il y a quelques semaines, le ciel du pays. La Némédie est confrontée à une Dette publique ayant littéralement dépassé son paroxysme pour atteindre de nos jours plusieurs millions d’Halegion, montant qui provoque surprise et inquiétude tant chez le grand public que chez les experts de l’économie. Or, les raisons pour lesquelles une telle endettement massif pourrait exister restent largement obscures et, à ce jour, les autorités, en premier lieu les politiques, n’ont pas fait preuve d’une complète transparence à ce sujet. Parallèlement à cela, l’inflation poursuit son ascension, elle frappe de plein fouet le pouvoir d’achat des Némédiens. Les prix des biens de consommation de première nécessité de l’énergie, des services, augmentent en flèche, suscitant une grogne de plus en plus importante dans les rues.

Dans cette ambiance difficile plusieurs médias étrangers, tout particulièrement ceux du Tanska, n’ont pas tardé à stigmatiser les possibles causes possibles à cette crise. On a ainsi pu lire que cet endettement pourrait peut-être l’opinion n’en avance pas la preuve résulter d’un accroissement important des dépenses militaires, au travers notamment d’achats d’armements onéreux.
Sur le plan de l’officialité, le gouvernement reste silencieux, voire très réservé sur ce sujet sensible. Il se borne pour l’heure à rappeler que les décisions budgétaires sont prises dans la transparence, et qu’aucune information complémentaire ne sera dévoilée avant qu’une analyse complète n’ait été menée. Du coup, on ne peut que spéculer. L’incertitude ambiante a une fâcheuse tendance à porter atteinte à la confiance tant des citoyens qu’à l’attention des partenaires internationaux. Le public attend désormais des éclaircissements rapides pour connaître les causes de cette crise et savoir comment s’en sortir.

Le mystère demeure entier. Qui tient réellement les cordons de cette source de déficit ? Pourquoi le gouvernement reste-t-il si muet ? La Némédie traverse une période où prudence est mère de… et où l’avenir économique du pays semble suspendu à des réponses dont la connaissance échappe pour l’heure à tous. Alors que la question de la dette est devenue pressante depuis que la Némédie en est bien atteinte, cette opacité suscite rumeurs et questionnements dans les quartiers populaires comme dans les cercles d’affaires : quel est le rapport de ces colossales dépenses aux projets ou engagements qu’elles visent ? Pour les uns des investissements publics mal maîtrisés, pour les autres des budgets fictifs, des contrats opaques, du détournement… Le silence assourdissant des autorités (qui n’est pas nouveau) amplifie la peur le dépit, dans un climat d’incertitude qui pèse sur le moral des ménages et entraîne un coup de frein à l’activité économique.

Cette incertitude a des conséquences politiques. Au sein même de l’Assemblée des Cités, des voix s’élevant pour réclamer plus de transparence et l’institution d’une commission d’enquête indépendante. Des représentants de la société civile sonnent la mobilisation pour éclaircir cette crise et ne pas voir la Némédie s’enliser dans un cercle d’endettement et de récession.

La prudence doit également se faire sentir au niveau international. Plusieurs anciens partenaires économiques se montrent très attentifs à cette situation financière sans précédent, qui risque d’amener certaines agences de notation à revoir leur note souveraine à la baisse pour la Némédie et ainsi rendre plus coûteux et plus difficile l’accès à de nouveaux financements sur les marchés internationaux. Une éventualité angoissante, ajoutant une pression économique et politique déjà forte.

Dans le même temps, le climat inflationniste accentue les inégalités sociales. Les plus précaires, déjà troublés par la montée des prix, vivent une descente rapide dans la pauvreté. Les familles modestes, elles, n’arrivent pas à satisfaire l’essentiel, se nourrir, se chauffer, se soigner. Les premières manifestations réunissent des citoyens mécontents qui réclament des réponses concrètes pour protéger le pouvoir d’achat. Dans ce cadre, l’accusation portée, entre autres, par des médias étrangers tanskais reprenant la thèse de l’affaiblissement en raison de dépenses militaires démesurées, fait débat. Si l’État a bien priorisé ces dernières années certaines dépenses militaires, il est difficile d’établir si, et dans quelle mesure, ces dépenses sont responsables du creusement du déficit. À cette hypothèse, souvent sans preuves, se combine un effet de déstabilisation diplomatique de la Némédie face à certains voisins.

Devant cette problématique, l’État est à la croisée des chemins. Il doit composer entre le besoin de rassurer la population et les marchés, et le besoin de préserver les marges de manœuvre budgétaires pour relancer l’économie. Des pistes sont glissées en échos : réforme fiscale, réduction des dépenses non essentielles, renégociation des dettes en cours. Mais tout espérons est dépendant d’une stratégie de communication claire et d’un plan d’action crédible, pour éviter enfin la méfiance s’installe durablement.

Dans une telle situation difficile, plusieurs experts économiques et analystes financiers tentent néanmoins de garder espoir sur la possibilité d’un retour à la normale à moyen terme. Ils estiment que, même si la situation paraît préoccupante, les bases économiques de la Némédie ne sont pas irrémédiablement affaiblies. Le pays détient encore une série d’atouts ses ressources naturelles, un secteur agricole de base et un tissu industriel en chantier qui s’il est bien utilisé peut offrir des ressorts pour redémarrer. Les spécialistes appellent aussi à la patience et à l’apaisement. Tous les acteurs, de l’Etat comme de l’économie et du citoyen, doivent mettre un coup d’arrêt à tout risque de panique ou de fracture. Certes, l’histoire économique de la Némédie a déjà connu des tempêtes, parfois plus violentes, mais qui ont pu être surmontées grâce à une gestion rigoureuse et un effort de solidarité.

Du côté du politique, si le dialogue est parfois difficile, nombre de responsables insistent sur la nécessité de promouvoir l’unité et la responsabilité collective. Ils appellent la population à rester sereine et à accompagner les mesures de redressement qui seront dévoilées bientôt pour porter les efforts engagés dans la durée. Ces mesures comporteront notamment des politiques d’optimisation de l’inflation versant la main aux plus dépendants, afin de ne pas aggraver la crise sociale.

En résumé, quels que soient les défis importants et les incertitudes qui errent, rien n’est définitif. Il faut certes redoubler de prudence, mais on ne doit pas oublier que ces temps de crise savent parfois être des opportunités pour repenser, réformer ou reconstruire sur des bases plus solides. Pour cela, il faudra un effort collectif, un sens de la responsabilité et retrouver la confiance entre gouvernants et gouvernés. La Némédie peut bien surmonter cette épreuve. Gardons donc le calme, ne sombrons pas dans la panique, croyons au rétablissement de notre pays pour que très bientôt, l’économie renaisse et la vie des Némédiens s’améliore durablement.


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Olythos étranglée par l'inflation



Dans les ruelles escarpées de Pylekia, ni le tumulte du marché n’a plus d’écho. Les chauds cris d’enfants et d’odeurs de pains sont déjà loin, s’ils étaient encore d’actualité. Les étals épars se contentent déjà d’essayés, les visages des vendeurs sont aussi fermés qu’inexpressifs, tout comme les clients, notamment plus soucieux. Ici, là où la Némédie sont les plus pauvres, la crise économique a des allures de crise humanitaire. Les prix en Olythos sont multipliés par 2,5 depuis l'inflation, dans une région où le coût de la vie était déjà trop cher, l’inflation pourtant alarmante à ce niveau n’est guère supérieure à la normale.

Un sachet de farine ne vaut plus que le salaire d’un quotidien d’ouvrier agricole. L’huile, le riz, les médicaments de base, ne sont pas seulement trop chers, rien n’est disponible. Une mère de famille raconte qu’elle a l’impression d’être sur la voie de banqueroute avec les enfants qui trouvent déjà ce qui manquait mais qui, à l’école sont déjà avides.

les mouvements de mobilisation se sont généralisés. À Pylekia comme à Elarion et à Ymandros, chaque semaine, parfois plusieurs fois par semaine, les rues sont envahies par des cortèges de citoyens révoltés. On y voit des femmes exhibant des factures d’électricité de la honte et des jeunes, pancarte en main où sont inscrits :

« On ne vit plus ici. »
« Il faut nous laisser respirer. »


Les populations entendent dénoncer un sentiment d’abandon particulièrement fort. Les aides sociales ont été gelées ou remises sur d’autres priorités, disent-elles. Le programme de soutien à l’agriculture familiale, maillon fragile de l’économie olythienne, est à l’arrêt. Les petits commerçants ferment les uns après les autres. L’hôpital régional manque de médicaments et les enseignants également victimes de la baisse du pouvoir d’achat, s’exilent vers d’autres régions.

Ce n’est pas la première fois qu’Olythos crie famine. Voilà des décennies que cette région montagneuse et isolée souffre d’un sous-investissement chronique : routes abimées, infrastructures publiques manquantes ou rares, présence de l’économie informelle… Les politiques de rattrapage, souvent promises, n’ont jamais été à la hauteur. Mais cette fois, il s’agit d’autre chose. La crise actuelle n’est pas conjoncturelle, elle est systémique. La folle envolée des prix a fait du désespoir une misère palpable, et une proportion croissante des Olythiens envisage de quitter cette terre en vue d’un exode rural massif.

Le sujet dépasse le simple cadre local. La montée de la colère sur Olythos pourrait embraser tout le pays. Des manifestants brandissent des banderoles plus radicales où la nécessité d’un changement politique profond ou d’une autonomie régionale a fait son apparition. Les slogans révèlent un rejet croissant de l’Etat central accusé de favoriser celles des régions du nord ou du littoral.

L’exaspération s’est muée en rage. À Ymandros, des familles entières se sont jointes au défilé en silence, voiles de deuil sur la tête, pour « la dignité enterrée vivante ».
« Debout ou bien partis. » clame le slogan viral.

Et beaucoup s’en vont donc. Au cours des dernières semaines, la région est submergée par une vague d’exode inédite. De plus en plus d’Olythiens empruntent la route est (vers le Churaynn, entre pays voisin, il est vrai, présenté comme le dernier refuge). Des villages tout entiers où des communautés rurales modestes avaient discrètement élu domicile, sont peu à peu désertés. On abandonne des barres d’immeubles restées inachevées, des champs inexploitables, des souvenirs trop lourds.

Du coup, face à l’escalade, le pouvoir central a réagi, tardivement, alors mobilisant les forces de police pour contenir les débordements. Des unités spéciales ont été déployées autour des places publiques de Pylekia, devant les bâtiments des administrations d’Elarion, à la gare routière de Ymandros d’où chaque jour s’élance un bus chargé d’exilés. On veut dissuader les rassemblements, contrôler les départs, ne pas laisser l’image de la Némédie se dégrader encore un peu plus à l’étranger.

Mais s’élevant encore plus la tension, elle est ressentie comme un acte de provocation de plus, comme un aveu que le dialogue est rompu. Une scène mise en ligne sur un téléphone portable montre un vieil homme à genoux, face à un policier casqué : "Je n’ai pas besoin d’un bouclier, j’ai besoin de pain", répond-il.
Image que l’on renvoie à l’infini sur les réseaux, elle devient l’illustration de ce fossé qui s’ouvre toujours plus entre l’État et ses laissés-pour-compte.

La région d’Olythos est sur un point de rupture. Les habitants ne veulent plus d’identité de discours, ils veulent d’actes. La souffrance des corps, des esprits et des assiettes s’étale aux yeux de tous. Les aides, malgré les promesses, ne viennent pas de la voix des provinces étouffées ; la situation devient compliquée. Le feu couve. L’exil devient vivre. Pas vivre. Mais survivre.

Dans la commune de Myrida, une association locale dénommée Le Pain des Montagnes vient d’ouvrir une cantine solidaire qui distribue chaque jour des repas chauds confectionnés à partir de récoltes données notamment par certains agriculteurs ayant pourtant choisi de rester malgré tout sur place. Auprès des bénévoles qui y oeuvrent, on compte d’anciens professeurs souvent à la retraite, des étudiants parfois revenus sur place pour filer la main, et même quelques policiers en civil, venant prêter un coup de mains après leur service et anonymement. « On ne peut pas faire comme si on n’était pas des humains », glisse l’un à la peau aplatie qui est en train de laver quelques pommes de terre.

Au-delà, dans le petit bourg de Kalden, vient de se constituer une coopérative autogérée dans laquelle s’est regroupée une dizaine de familles pour relancer ensemble un ancien moulin à eau. La farine, le pain, l’huile d’olive tout est produit en circuit fermé et redistribué dans le petit amphithéâtre. C’est peu. Mais c’est un commencement. La maire du village, élue sur une liste citoyenne le dit : « L’avenir ne tombera pas du ciel. Il faut le construire, pierre après pierre. »

Ces élans modestes, mais éminemment sincères, tendent de plus en plus à interpeller les médias nationaux, absents jusqu’alors de la région. Une équipe d’une chaîne publique s’y rend. Reportage à la une. Sujet en page des journaux. Débat au soir sur des plateaux. Le pays commence à entendre. À voir. A comprendre.

Et à Epidion surtout, un frémissement se perçoit. Dans les couloirs de l’Assemblée des Cités, des élus réclament désormais un plan d’urgence pour Olythos. Une élue de la région Olythos, tirant sa force de la mémoire d’Anastéa Kalomera, prend la parole en séance « Ce n’est pas d’un budget qu’il s’agit, mais d’un choix de civilisation. Ou nous acceptons que des pans entiers de notre pays sombrent, ou nous choisissons enfin de faire nation. »

…des figures emblématiques du monde public se sont ajoutées à ce mouvement de solidarité. Au micro de la matinale, la chanteuse mythique Elefthería Drakona, originaire de Phaidonia mais dont les mélodies évoquent souvent les montagnes d’Olythos, annonçait, sur les réseaux sociaux, qu’elle verserait l’ensemble des recettes de sa tournée d’été à plusieurs initiatives qui soutiennent Olythos parmi lesquelles Le Pain des Montagnes et la coopérative de Kalden. « Je ne peux pas chanter la douleur d’un peuple, et détourner le regard quand elle devient insupportable. L’Olythos c’est la Némédie, et la Némédie c’est un tout un chacun de nous. »

Peu après, le grand comédien et metteur en scène Thassalos Menidès, qui a souvent été engagé pour des causes sociales, déclarait qu’il mettait en scène une pièce consacrée à la vie quotidienne à Pylekia à partir de témoignages recueillis sur le terrain. Tous les bénéfices engrangés seront versés à des structures humanitaires locales. Il appelle d’ailleurs les autres artistes à s’associer à « un printemps némédien de solidarité ».

Mais la dynamique s’étend au-delà de l’univers culturel. Le footballeur de renommée mondiale, Pétros Kalandrinos, capitaine de l’équipe nationale, s’est exprimé à l’issue d’un match retransmis en direct, portant un maillot avec la phrase : Debout ou bien partis. Il s’engage à financer la réhabilitation de l’école primaire de Ymandros, où il envisage d’organiser un tournoi de solidarité avec d’autres stars du sport. « Quand un gamin n’a plus de cahier, plus de cantine, plus de prof, ce n’est pas une région qui est en perdition, mais une nation. »

L’université d’Epidion réagit aussi, annonçant l’envoi d’un corps de volontaires étudiants et professeurs pour soutenir les hôpitaux et écoles de la région sous tension. Médecins, psychologues, ingénieurs se succèdent chaque semaine dans les principales villes de l’Olythos, dans ce qui commence à s’appeler une « mission de solidarité pour la cohésion nationale ».

Il arrive même que surgissent dans le champ économique des comètes. Le très controversé Darios Meletios, président du géant agroalimentaire Alkeron, qui avait défrayé la chronique pour ses conditions de travail imposées aux petits producteurs, a annoncé un « fonds de soutient d’un budget de 15 millions d’Halegion pour la relance de l’agriculture dans les communes rurales d’Olythos ». En outre, il s’engage à acheter les productions locales à un prix garanti fixé lui-même en regard d’un cahier des charges construit avec les paysans. Un retournement de veste que certains critiquent comme de l’opportunisme, mais que voit d’un œil pragmatique le public des consommateurs.

L’effet d’entraînement est tout de même très visible : les collectes alimentaires se multiplient dans tout le pays. Chaque semaine des convois partent de plusieurs villes du nord vers les montagnes. A Argéos, des mères de familles convertissent un ancien dépôt en centre de dons et d’emballage des colis envoyés à Olythos. Cette initiative s’intitule Un sac pour un frère.


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Fin de l'Exercice


Ce qui devait n’être qu’un exercice de stratégie militaire de type dissuasif délicatement préparé par les autorités Némédienne autour d’Athenastra pour sa défense a, en quelques heures, pris la dimension d’un événement sans précédent, avec les conséquences d’importants dégâts matériels, d’une onde de choc et d’une atmosphère de stupéfaction sur l’ensemble de l’île. L’opération avait pour but avoué de tester les capacités de tir coordonné du sous-marin Menandros et la robustesse des systèmes de communication militaire. Mais sur le terrain, le déroulé semble avoir dépassé ce cadre.

Selon plusieurs sources croisées, l’exercice a bien démarré comme programmé au matin dans les eaux à l’est de l’île d’Athenastra. À 8h43 précises, le Menandros aurait effectué une immersion complète depuis la base navale d'Epherda avant de tirer un premier missile balistique à moyenne portée. Le tir aurait été un « succès technique » selon le commandement naval. Il a alors été procédé à un second tir environ une demi-heure plus tard.

Ce deuxième tir, effectué depuis une immersion contrôlée au large de la baie à un peu plus de trente milles nautiques a été qualifié de succès parfait par le haut-commandement némédien. Les trajectoires ont été rigoureusement respectées, les systèmes de guidage et de communication ont mieux fonctionné que prévu, et les cibles désignées sur terre ont été atteintes. Sur le plan proprement militaire, l’exercice s’est donc transformé en démonstration technologique parfaite.

Mais sur terre, l’effet est tout autre.

Le bruit causé par les deux tirs consécutifs notamment par le second, au principe même plus puissant a engendré la panique dans plusieurs villages de l’est d’Athenastra. À Alkara, Varissos, et jusqu’à Sélion, des centaines d’habitants ont rapporté avoir éprouvé une violente onde sonore, corrélativement aux vibrations prolongées qui ont fait trembler les vitres et les constructions les plus fragiles. Certains ont même parlé d’une colonne entre bouffées de vapeur et de flammes, provoquant de sa part des phobies de masses, malgré les précédents messages d’information.

« On nous avait indiqué que c’était sous contrôle. Mais quand ma maison a vibré et que mon fils a poussé un cri pensant vivre un tremblement de terre, j’ai compris que ce n’était pas un exercice comme les autres, » réaffirme Mohamed homme de Sélion à la voix encore tremblante.

À Varissos, des bâtiments publics ont été évacués à titre préventif, une école primaire, un centre de soins. Les autorités ont rassuré par le biais de haut-parleurs, de radios communautaires, alors que les téléphones saturés alimentaient les inquiétudes.

Bien qu’ils soient relativement minimes, les dégâts aux biens sont bien existants : fissures sur les façades de certaines maisons anciennes, vitres, quelques toitures partiellement endommagées formant un tableau d’ensemble dans les hameaux les plus touchés par la magnitude du tremblement de terre, notamment Kalythra et Episkopi. Nulle victime n’est déclarée, en dehors de quelques cas de traumatismes légers, chez les personnes âgées ou les enfants essentiellement, relevant de la psychiatrie dans les centres de santé où des patients interrogés disent avoir acquis le traumatisme d’un grand choc psychologique.

Dans le choix de cette zone, certains voient un message dissuasif limpide ou seulement une opération d’intimidation visant à faire croire à une capacité de sortir des foyers de dissidence de l’intérieur. Dans les cafés d’Athenastra, on s’étonne. Surtout que les cibles "symboliques" touchées par les tirs étaient situées dans des zones rurales peu peuplées, mais placées dans l’histoire en tension avec le pouvoir central.

Pour l’heure, les autorités affirment qu’il s’agit d’intimidation ciblée.

Pour alourdir encore le climat de « contention », plusieurs habitants de la zone directement survolée ou impactées par des tirs affirment qu’ils n’ont pas été informés en amont de l’exercice, ni en termes précis, ni à travers des consignes de sécurité claires. À Episkopi, par exemple, une mère de famille explique qu’elle n’a rien reçu d’autre qu’un message radio la veille au soir où était seulement précisée une « manœuvre navale de routine ».

"S’ils savaient ce qui allait se passer, pourquoi ne nous ont-ils pas dit de ne pas rester là ? Pourquoi ne pas avoir évacué les écoles, les personnes âgées, les maisons les plus fragiles ?", lance-t-elle en désignant les fissures qui sillonnent les murs en pierre sèche de sa maison.

Dans d’autres villages, le constat commun est qu’« il y a eu un sous-estimé par les autorités concernant l’intensité de l’exercice et une zone de retombée trop proche des habitations.


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Un enfant de 9 ans retrouvé sain et sauf après 36 heures de disparition


Le récit aurait pu se transformer en drame. Mais c’est une issue favorable qui attend aujourd’hui la famille Anteto de la petite commune d’Arpethros, blottie dans les contreforts du mont Kérandos au nord de la région de Phaidonia.

Ce dimanche matin, à l’occasion d’un rassemblement religieux local, la famille faisait un pique-nique lorsque le petit Petros, 9 ans, a dit être parti "suivre une marmotte". Ses parents et plusieurs voisins se sont immédiatement lancés à sa recherche, en vain.

La topographie très escarpée des monts de Kérandos a provoqué des complications lors des premières heures de la recherche. À la nuit tombée, les autorités ont été alertées. Une trentaine de volontaires de la Garde de Montagne de Phaidonia, avec le soutien d’un hélicoptère thermique, ont été mobilisés.

« Je ne saurais vous dire ce que cela fait. C’est un soulagement incommensurable, s’exclame sa mère, Andriana, les larmes aux yeux. Nous avons été pris par l’immensité de notre impuissance. Je veux remercier chaque main tendue, chaque voix qui a appelé mon fils. »

Mardi matin, à 3h47, Petros a été découvert dans un repli forestier, caché sous un rocher, à environ 7 km de l’endroit où il avait disparu. C’est le chien de sauvetage Miron qui a retrouvé sa trace. L’enfant était très fatigué, un peu déshydraté mais conscient.

« Il a eu des réflexes formidables : il s’est protégé du froid avec des feuilles, se souvenant des enseignements de son grand-père sur les chemins », indique le capitaine Theros Varanos, responsable de l’équipe de secours.

Le petit garçon a été transporté à l’hôpital d’Epidion, où il va être surveillé pendant 24 heures. Il souffre de griffures, de piqûres d’insectes et d’un début de fatigue aiguë mais ne présente pas de séquelles neurologiques ou traumatiques.

La municipalité d’Arpethros a salué la mobilisation exceptionnelle de la population locale : « Cette solidarité montagnarde est la force de notre peuple », a relevé la maire, Kallisti Dragoma, tout en appelant à la vigilance : « Les montagnes sont belles mais imprévisibles. Un moment d’inattention peut virer au drame. » La famille, divisée mais soulagée, a demandé le respect de son intimité : le père, Nikandros, a dit vouloir « prendre du recul et passer du temps ensemble, loin de tout. »

La petite commune d’Arpethros est en émoi depuis l’annonce de la découverte de Petros. Des bougies ont été allumées dans la matinée devant l’église Saint-Alban et une messe d’action de grâce a été célébrée mardi soir par le prêtre local, le père Anastasios. « Le Seigneur a veillé sur cet enfant, contre l’adversité. Mais ce sont aussi les hommes et les femmes de cette terre, par leur courage, leur foi, leur amour, qui ont opéré cette fontaine », a-t-il souligné, devant une assemblée émue.

De nombreux habitants ont aussi ouvert une collecte pour venir en aide à la famille du petit Anteto qui vit modestement. L’association montagnarde Oryon a proposé de prendre en charge les frais médicaux liés à l’hospitalisation de l’enfant tandis qu’une boulangerie du district a mis à disposition des repas gratuits pour les volontaires venus des villages voisins pour seconder les recherches.

Le récit de Petros a très vite franchi les frontières de la commune : les journaux nationaux, la radio, et quelques chaînes de télévision se sont emparés de l’information. À Epidion, des parlementaires de l’Assemblée des Cités ont salué l’ensemble des secouristes lors de la séance du mardi après-midi. Le roi a salué « la réactivité exemplaire des équipes locales et la bravoure des bénévoles, éclatante expression de l’esprit némédien de solidarité. » Des psychologues de l’hôpital d’Epidion sont appelés à venir en aide à Petros dans les jours qui viennent. « Un événement de cette nature, même s’il se termine bien, laisse des traces chez un enfant», fait valoir la docteure Hespéria Malakis. « L’important est de lui permettre de parler, à son rythme.

Dans une Némédie parfois secouée par des tensions sociales et des tiraillements politiques, ce récit a amené un souffle d’espoir, un moment de répit et de communion, relaté par nombre d’éditorialistes, unis pour saluer la force de l’engagement collectif à la rendre possible face à l’adversité.

« Petros, petit berger lumineux, nous rappelle que la vulnérabilité humaine peut se renouveler dans la fraternité», écrit Le Jourla ce matin dans un éditorial signé Phereklès.

A l’heure où l’enfant devrait pouvoir regagner son foyer d’ici la fin de la présente semaine, les autorités réfléchissent à l’idée de renforcer la signalétique sur l’itinéraire le plus accidentogène du mont Kérandos et de proposer des sensibilisations aux risques de la randonnée dans les écoles du secteur.

En parallèle, un débat au sein du Conseil régional de Phaidonia s’est ouvert sur les dispositifs à mettre en œuvre pour sécuriser la fréquentation des zones naturelles par le public familial et par les promeneurs et les randonneurs. Si la présidente du Conseil, Euanthia Kolandros, a reconnu la « réactivité remarquable des secours », elle a aussi admis une « relative vétusté des dispositifs préventifs » dans certaines zones de montagne. « Il ne s’agit pas de fermer l’accès à la nature, a-t-elle précisé lors de la conférence de presse qui s’est tenue mercredi, mais de mieux encadrer ceux qui l’investissent. »

Dans les prochaines semaines, pourrait être votée une enveloppe exceptionnelle pour moderniser les cartes des sentiers, améliorer les informations aux points de balisage, et équiper les refuges en balises de détresse accessibles aux civils. Des partenariats avec les écoles élémentaires sont également envisagés pour introduire, dès le plus jeune âge, la « culture du respect de la montagne » : prendre conscience du danger, savoir s’orienter, gérer l’accident.

Quant à la Garde de Montagne, elle a été inondée de nombreuses félicitations et remerciements.

À l’école d’Arpethros, où la classe de Petros est accueillie, les élèves de madame Elikia Straton préparent collectivement une grande carte ornée de dessins, d’amis à mots et de fleurs séchées, qu’ils offriront à Petros à son retour. « Ce qu’il a vécu, tout seul dans la forêt, c’est un voyage de courage. À son retour, il mérite de sentir qu’il n’est pas seul », dit-elle.

Pour beaucoup, la petite histoire a pris la dimension d’un emblème : elle a généré, dans une Némédie déchirée par les fractures territoriales et les incertitudes économiques, une étincelle d’unité. Une mémoire heureuse, tissée de crainte mais scellée par l’espoir.

Jeudi matin, dans l’hôpital d’Epidion, Andriana, la mère de Petros, confiait simplement à un reporter : « Nous avons frôlé le drame. Mais il nous reste au moins le plus précieux. »

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Pour la première fois, le roi parle !


Un événement rare, historique même ! Ce matin, le roi Andronikos IV s’est rendu sur le chantier naval militaire de Korion alors que l’on procède à la construction de plusieurs bateau militaire dans un silence de fer et de sel. Mais ce qui reste aujourd’hui du jour n’est pas tant la visite inattendue du roi dans la salle des machines de la puissance maritime némédienne où il n’est pas coutumier. C’est ce qu’il advient plutôt dans le sillage de cette visite.

Pour la première fois du règne, le roi s’adresse directement à un journaliste dans un entretien libre et non pas canalisé par le protocole habituel, à l’abri d’un volé métallique, à quelques pas d’une coque encore nue, d’un mât d’essai.

L’atmosphère était tout en attente. Un vent chargé de sel passait au travers des parois ajourées du hangar comme dans la nef inachevée d’une cathédrale d’acier. Les ingénieurs et les marins s’en étaient distinctement séparés, comme s’ils avaient su d’instinct que quelque chose d’exceptionnel allait se produire. Pas d’estrade dorée, pas de caméra d’État, pas de cortège d’interprètes, seulement un roi debout, les mains jointes dans le dos, et un siège de bois brut tiré à la hâte.
Notre équipe, accourue sur place pour couvrir la visite royale, ne s’y attendait pas. L’annonce d’ailleurs avait été discrète, presque murmurée par un aide de camp : « Sa Majesté a décidé de parler. Préparez-vous. » Une phrase qui aurait pu être noyée dans la somme d’informations reçues à haute voix, si elle ne portait en elle, dans sa brièveté même, la gravité d’un instant qu’on ne vit qu’une fois dans une carrière de journaliste.

Les échanges de regards, la hâte de vérifier les micros, le soin presque cérémoniel de l’ouverture des carnets : tout dans l’équipe manifestait cette tension fébrile qui accompagne une parole longtemps attendue. Une parole officielle, du moins si l’on parle d’un discours, mais si l’on cherche une conversation, alors sans fard, alors sans filet.

Car c’est un fait : rencontrer le roi Andronikos IV vrai, dans un face-à-face dépouillé de tout intermédiaire, était un fantasme professionnel quasi inconcevable pour beaucoup d’entre nous. Souverain discret, il ne se prête guère aux entretiens improvisés, se cantonne pour le mieux derrière le langage de l’État, tant et si bien qu’Andronikos IV est à la fois une figure centrale et une figure fuyante de notre paysage politique. Chaque apparition publique est soupesée, chaque mot est pesé, chaque geste est codifié.

Mais là… là tout allait peut-être changer.

Notre journaliste en résidence, Léandros Miliakis, avait depuis longtemps prévu une série d’articles sur la stratégie maritime de la Némédie. Il avait, sans en avoir l’air, toujours espéré qu’un jour, il aurait le loisir de poser directement ses questions au roi. Apparemment, ce jour est enfin arrivé et la dilatation, telle une marée à l’arrêt, laissait entendre que quelque chose, dans cette interview, ne serait peut-être pas juste actualité maritime.

Et c’était là un moment où quelque chose était sur le point de se passer : le roi allait surgir.

Un frisson traversa la travée, le même frisson partagé que celui provoqué par un profond instinct. Un ingénieur en uniforme a levé les yeux, un technicien a déposé son instrument, sans réel besoin, un caméraman a fait un réglage sur son axe pour être prêt à attraper ce précieux que tant d’années sans parole avaient renforcé.

Mais non.

Ce n’est pas le roi.

Ce sont eux.

Des hommes en noir, surgis du noir du hangar lui-même comme des ombres mises en veille. Ils sont sept, tous dans la même forme uniforme : combinaison mate noire, sans insigne, sans grade, sans aucun reflet. Masque uni, opaque, sans fente visible. Ils ne parlent pas. Et ne bougent jamais à plus de deux à la fois. Pourtant, en moins d’une minute, ils remplissent tout le champ, sans jamais le dominer. Leur présence s’impose, sans crier. Elle se fait discrète, nette, chirurgicale.

Un premier balaya la zone à l’aide d’un appareil portatif aux diodes vertes clignotantes ; un second s’agenouilla derrière une caisse métallique, sans la quitter des yeux, y fourra une main gantée et en ressortit un fil oublié qu’il montra du bout des doigts avant de le reposer ; un troisième longea silencieusement les vitres hautes du hangar, les yeux levés vers les poutres, inspectant les suspensions, comme s’il savait ce qu’il cherchait, même si tout restait invisible.

Un quatrième s’approcha du siège en bois, le siège du roi, le retourna, glissa un petit instrument à son revers, fronça imperceptiblement les sourcils et hocha lentement la tête.

Un cinquième se posta cette fois à l’arrière de Léandros Miliakis, le journaliste ; rien, ne fit, rien ne dit, mais resta présente là dix secondes comme s’il écoutait le silence lui-même.

Enfin, deux autres, qui savaient que la porte n’était pas fermée, placèrent une valise contre le mur dont ils ne furent pas même tentés d’ouvrir le couvercle, comme si l’apparition elle-même de l’objet suffisait à faire comprendre aux observateurs qu’il n’y a d’ouverture qu’en cas d’absolue nécessité.

Tout cela s’est passé en deux minutes. Deux minutes d’une efficacité presque spectrale, d’un silence feutré, intensément optimisées. Deux minutes de vie suspendue.

Puis, sans un mot, sans un geste brusque, sans que personne ne puisse dire au juste à quel moment c’est arrivé, ils disparurent.

Un souffle de mer pénétra à cet instant dans le hangar soulevant d’un coup un léger nuage de poussière salée.

Et tout parut pétrifié.

Les journalistes présents sur place, même ceux qui pratiquaient le difficile exercice de couvrir les visites royales depuis vingt ans, furent impressionnés, muets devant cette danse furtive. Non parce qu’une peur l’emportait à l’instant sur le cœur, mais parce que s’installait instinctivement à l’intérieur des corps ce respect qui est dû au spectacle de la perfection de l’ordonnancement.

C’était bien davantage qu’une sécurité de haut niveau.

C’était la chorégraphie de la puissance.

Et nous savions bien alors que ce qui allait suivre ne serait pas banal.

Et ce fut alors.

Le moment se produisit enfin, celui qui, pour certains, avait fait l’objet d’une préparation, d’un pressentiment, presque d’une crainte. Le roi Andronikos IV était enfin là, n’annonçait ni grincement de lourdes portes du hangar, ni entrée à cornes ni bottes, sa silhouette apparut.

Il venait d’assez loin, du fond, seul et sans escorte apparente, comme s’il avait traversé un corridor de silence, avant d’entrer ici, dans ce grand espace suspendu. Il avançait plutôt lentement mais avec une tranquille autorité qui laissait plutôt à penser qu’il pliait l’air devant lui. Sa tenue n’était, avouons-le pas d’un luxe ostentatoire : une veste d’un bleu presque nuit, taillée à l’ancienne mode marine némédienne, sans médaille ni broderie, juste un discret écusson sur le poignet gauche, celui de la Maison d’Aegeon, brodé en fil noir sur fond noir. Pas d’artifice, mais une royalité, une allure tout de même, qui témoignait de la coutume de commande.

Ses yeux clairs, d’un gris ardoise, fixaient devant lui une végétation inhabituelle, avec une lucidité presque minérale. Son visage, austère bien qu’original, portait cette rare expression d’un homme qui a l’habitude du silence, et d’une parole qu’il sait avoir sa valeur parce qu’elle ne s’échappe pas trop facilement.

Il avait la vertu charismatique non pas parce qu’il avait voulu le devenir, mais parce qu’il ne voulait rien paraître.

Il s’approcha de notre équipe sans détour, immédiatement, tendant une poignée de main au journaliste Léandros Miliakis, le roi le fixant dans les yeux l’instant d’une concentration d’une intensité qui va à l’égal d’une haute considération.

Puis, il déplaça le regard en direction de la journaliste qui l’accompagnait, une femme en hauteur, droite, aux yeux perçants : Themis Akriva, spécialiste des affaires militaires depuis quinze ans. Il ne lui donna pas la main. Il inclina légèrement la tête et plaqua une main ouverte sur sa poitrine, geste ancien et codé de respect en Némédie, souvent réservé aux femmes de haut rang ou aux figures publiques honorées. Cela ne troubla aucunement Themis, pas du tout. Elle esquissa un très léger sourire et dira plus tard qu’elle n’avait « besoin d’aucune main tendue pour reconnaître la valeur d’un salut authentique ».

« Il m’a vue. Il m’a saluée. C’est tout ce qui comptait », annonça-t-elle à des collègues une fois la tension amoindrie.

Ces instants sans mots pesaient déjà dans les mémoires.

Et le roi s’assit.

Lentement.

Installé sur une chaise de bois, débarrassé de toute préoccupation.

Face à lui, nos journalistes se préparaient à ce qui allait suivre, l’un posant son carnet, l’autre activant tout juste son enregistreur. Les visages se crispaient dans le silence, chacun percevant que les mots qui allaient venir seraient rares, mesurés — et peut-être décisifs.

Andronikos IV leva les yeux.

Et ce fut alors, à cet instant précis…

…que l’entretien s’engagea.

Léandros Miliakis sentit une présence à sa droite, silencieuse, pesante. Une silhouette noire venait d’apparaître, aussi furtive que le reflet d’un rasoir dans l’ombre. On s’inclina légèrement, on se pencha vers lui. À travers le masque sans fente, aucune voix ne sortit vraiment, mais un souffle précis, presque murmuré, se glissa jusqu’à son oreille.

« Quinze minutes. Pas plus.»

Puis elle disparut.

Léandros hocha à peine la tête, tout juste un mouvement du souffle. Quinze minutes. Un temps que devait prendre un roi pour faire ou défaire une époque. Quinze minutes pour recueillir ce que pouvait contenir le silence d’un règne de plus lourd.

Il s’éclaircit lentement la voix, croisa un instant le regard du Roi. Le Roi répondit d’un très léger mouvement de menton, comme semble-t-il on fait pour donner le feu vert à un amiral.

Et Léandros commença.

Léandros Miliakis : Sire… Votre présence ici, aujourd’hui déjà, est sans doute un événement. Mais ce qui pourrait l’être encore plus est votre décision de nous parler. Pourquoi maintenant ?

Andronikos IV (voix grave, calme mais chaque mot saisi comme s’il fallait qu’il parvienne aux décennies) : Parce que certains silences ne doivent pas devenir des fosses. Et parce qu’un pays qui se redessine sur la mer doit savoir d’où commence la ligne de ses horizons.

Un frisson discret parcourut l’ensemble des sbires. La voix du roi, pareille à l’ancienne matière du bois, résonnait d’un grave au fond du hangar. Léandros rebondit, il juste épousait le rythme mesuré du roi.

Léandros Miliakis : Le chantier naval de Korion abrite plusieurs coques en cours, dont certaines sont à six étages. N’y a-t-on pas là le signe d’un renforcement militaire significatif, voire d’une nouvelle doctrine ?

Andronikos IV : Non. C’est un recentrage. La mer n’est pas une armure, mais une mémoire. Nous n’armerons pas nos côtes contre le monde, mais nous nous y préparons pour le prévenir.

Themis Akriva (dans une voix douce mais ferme, une question à son tour) :
Votre Majesté, certains analystes évoquent plutôt un virage stratégique vers l’autonomie navale complète, voire un retour à une logique d’expansion économique à partir des routes maritimes. Est-ce là un parti que vous assumez ?

Andronikos IV (légèrement en se tournant vers elle) :
Les ambitions ne se crient pas. Elles se naviguent. Et les chemins de demain ne se tracent pas avec des rames mais avec des raisons. Nous n’ira jamais au-delà de notre éthique. Mais nous irons loin.

Léandros Miliakis :
Beaucoup s’interrogent depuis plusieurs années sur votre silence. Certains y ont vu une forme de repli, d’autres une forme de réserve. Comment définiriez-vous votre gouvernance ?

Andronikos IV :
On ne gouverne pas une île en parlant à chaque vague. Il faut parler au vent. Et le vent n’entend que si l’on sait parfois se taire.

Themis Akriva :
La Némédie traverse des tensions internes. Notamment dans le Sud. Certains vous reprochent un éloignement. Que répondez-vous à ceux qui pensent que le palais est trop loin d’Olythos ?

Andronikos IV (plus sombre, regard plus fixe) :
Le palais n’est jamais éloigné du chagrin du pays. Mais gouverner ce n’est pas courir vers chaque feu. C’est faire en sorte qu’on comprenne pourquoi ce feu ne doit pas exister.

Léandros Miliakis (s’avançant, offensif) :
Votre Majesté… y a-t-il un message que vous souhaitez transmettre aujourd’hui, directement au peuple, sans filtres ?

Andronikos IV (pause… longue pause… et enfin lentement) :
Oui.

Il se tait, regarde le plafond du hangar, comme s’il voulait entendre quelque chose qui n’est pas là, et tourne enfin son regard vers le journaliste.

Andronikos IV :
Dites-leur…
Que je suis là.
Que je les entends.
Et que je suis prêt.

A cet instant, un nouveau souffle de mer entra par les ouvertures hautes du hangar, soulevant à nouveau un voile de poussière blanche. Le roi fut silencieux. L’équipe suspendue, n’osa plus relancer.

Et alors…

Un des hommes en noir revint, plus brusquement cette fois, se planta net à quelques pas. Léandros comprit que c’était fini. Quinze minutes. Justes. Pas une de plus.

Mais pendant ces quinze minutes, quelque chose avait été dit. Ou plutôt posé. Comme une épée dans le sable. Ou une ancre dans l’histoire.

À l’issue de l’entretien avec les deux journalistes nous avons souhaité recueillir sur le vif les impressions de nos journaliste sur place. Son visage, encore tendu, en disait plus que ce qu’il aurait pu laisser dire, mais il consentait à livrer quelques phrases, entre deux silences chargés.

Léandros Miliakis : C’était… super, vraiment impressionnant. On sent qu’on a affaire à des gens d’un autre monde. Ils dégagent quelque chose d’ultra-maîtrisé, précis, sans émotion superflue. Il faut être, très, très sérieux avec eux surtout les hommes cagoulé. Franchement… ça fait peur. C’est un peu terrifiant, je ne vais pas mentir. »

Il a ensuite éclaté d’un rire nerveux puis a refermé son carnet, avant de nous souffler :

Léandros Miliakis : J’ai interviewé des chefs de guerre, des barons politiques, même des mercenaires. Mais eux… c’est une autre catégorie. On n’interroge pas, on écoute. On pose une question, ils vous regardent, et on sent que quoi qu’il arrive, la réponse va nous frapper.


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