13/02/2017
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[Lermandie-Nebrownia le 25/05/2016] Rencontre à Gelestal

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Gelestal, le 25/05/2016

C'est anglais mais c'est beau
Gare Centrale de Gelestal

Le soleil était au beau fixe ce matin de mai, les températures douces annonçaient une journée agréable. Les annonceurs météo avaient néanmoins prévu le retour des nuages dès le lendemain, et de la pluie dès le Surlendemain, le gris des murs se mêlerait alors à celui du ciel. Les habitants de l’ancienne capitale Vietique s’amusaient à dire que leur ville était invisible par temps gris. Matilda soupira, les yeux levés au ciel. Depuis sa prise de pouvoir, un an auparavant, de nombreux travaux avaient débuté dans tout le pays, Gelestal n’y faisait pas exception. De grands projets avaient littéralement inondé les bureaux de la mairie, de nombreux proposaient la destruction pure et simple des symboles de l’ancienne Vietie. La chose n’était pas faisable à chaque fois, que ce soit pour des raisons culturelles ou tout simplement pratiques, car certains de ces bâtiments étaient habités. Et puis l’opinion publique était aussi à prendre en compte. Bien que les nostalgiques de la Vietie ne soient plus très nombreux, ils l’étaient suffisamment pour représenter une réelle nuisance dans l’avancement des projets. La tenue de cette réunion entre deux anciens ennemis de la Vietie dans son ancienne capitale était aussi un message destiné aux nostalgiques de ce pays en général, à Cuvilier en particulier. En effet, celui-ci, en cavale depuis un an, semblait avoir réussi à établir un front commun au sein du groupe “Vietie Renaissance”, groupe désormais considéré comme terroriste.

*il va falloir que j’en parle aussi, de ce gros sac* se dit Matilda. Après tout, Cuvilier nourrissait à l’encontre de la Lermandie un ressentiment assez vif, au point de dresser des plans d’attaque contre ce pays lorsqu’il était à la tête de l’armée Nebrownienne.

Matilda baissa les yeux et les posa sur le bâtiment qui l’entourait : la Gare Centrale de Gelestal. Vestige de la période de la République Vietique, ce bâtiment était un des rares à ne pas avoir été détruit lors de l’ère de la dictature communiste, en raison de la catastrophe logistique qu’aurait entraîné des travaux aussi colossaux en son sein, sans doute. Le grès rose dont elle était constituée avait foncé avec le temps, et l’usage intempestif de la vapeur et du Diesel, lui donnant une couleur rouge-marron qui tranchait au milieu des bâtiments gris typiques des constructions communistes. Sa forme aussi tranchait, toute en lignes effilées et pointes montant vers le ciel, là où la tendance générale des bâtiments autour était plutôt du style “cubes de béton posés au cordon”, alignés comme à la parade.

- Le train du Président Duval est annoncé au poste 5, Générale, dit le chef de gare, descendu de son bureau pour l’occasion.
- Dans combien de temps sera-t-il là ? Demanda Matilda
- Dans deux minutes répondit-il après avoir rapidement consulté sa montre

La nouvelle se répandit tel un murmure derrière Matilda. En plus d’elle, de ses conseillers, de son ordonnance et garde du corps Fira Mynooc et de quelques membres de sa Garde Présidentielle (des volontaires de son ancienne Brigade portant l’uniforme de l’ancienne Garde Présidentielle, pré Kellem), de nombreux industriels et investisseurs avaient fait le déplacement pour rencontrer des homologues Lermandiens. On voyait, par exemple, les deux dirigeantes de la SNCF, le PDG de la firme LANATA, celle des F2N (Fonderies Nationales Nebrowniennes) et celui de la CNM (Compagnie Nebrownienne de Motorisation) entre autres. Bien évidemment, Ernest le lui avait dit, les rencontres diplomatiques de ce genre étaient toujours l’occasion de faire des affaires. Ce dernier se tenait légèrement en retrait, derrière elle, souriant mais légèrement tendu. Matilda eut un sourire en coin : elle n’était pas seule à ne pas être à l’aise. Mais au moins, elle n’était pas engoncée dans son uniforme de parade. Elle avait longuement hésité à le revêtir, mais l’avait finalement jugé beaucoup trop pompeux pour ce qu’elle attendait de cette rencontre diplomatique. De plus, elle était tenue, par le protocole militaire, d’afficher ses décorations, chose qu’elle détestait profondément. Elle était donc vêtue de son habituelle tenue de service courant, un treillis camouflage dans lequel elle se sentait particulièrement à l’aise. Elle avait néanmoins coiffé le béret de son arme.

Un chuchotement généralisé derrière elle la tira de ses réflexions. Regardant par dessus son épaule, elle vit que tous les regards s’étaient tournés vers la voie, au loin, aux premières aiguilles avant l’entrée en gare. Tournant les yeux à son tour, elle vit le train Présidentiel Lermandien qui franchissait le pont juste avant le Poste 1, poste d’aiguillage commandant toutes les aiguilles de la gare. Elle s’étira brièvement et soupira un bon coup, essayant de chasser l’anxiété qui commençait à monter. Elle se souvint de sa surprise lorsqu’elle avait appris que le Président Lermandien était assez jeune pour être son fils, mais chassa cette pensée. Après tout, s’il en avait les compétences, qu’importe qu’il soit jeune ou non, tant qu’il menait son pays de manière efficace. Un autre coup d'œil lui montra la locomotive de tête du train Lermandien qui venait de passer le bout du quai.

*Tiens, une rame tractée… ça aurait sûrement plu à Noroît* se dit Matilda

- Dommage que Nono ne soit pas là, dit Ernest, derrière elle, une rame tractée, ça lui aurait sans doute beaucoup plu
- Tu sais qu’il déteste ce surnom, lui répondi Matilda par dessus son épaule, mais je me suis fait la même réflexion
- Il aurait juste été intenable en suppliant pour visiter, caméra au poing, repris Ernest
- Chasse le naturel et il revient au galop conclu Matilda, un sourire en coin
- Il a dit la même chose à ton sujet ce matin, c’est marrant, continua Ernest, ne te mets pas trop de pression, la Lermandie est une nation qui nous a toujours été globalement favorable, tout ce qui ressortira de cette réunion sera positif

Le sourire de la générale de Brigade s’élargit. Son mari semblait avoir expressément demandé à son ami de lui confirmer son soutien et sa confiance face à cet évènement. Ce n’était pas juste des mots, elle le sentait, tout comme elle sentait le soutien d’Ernest, qui était devenu un ami pour elle aussi, avec le temps. Le train s’avançait vers le bout du quai, ralentissant progressivement. La Gare Centrale de Gelestal était une gare Terminus, Matilda et la foule qui l’accompagnait attendaient en bout de quai.

- Une CC-720 ?
- La version originale, les CC-720 sont, pour certaines, une production sous licence des MBM-D-72000 Lermandiennes

Ernest pouffa. Il savait que son ami Noroît adorait les locomotive en profil “nez cassé”, il devait en avoir tellement parlé que sa femme avait retenu les info déballées sur le matériel. Le train Lermandien s’arrêta dans un crissement de frein, métal contre métal produisant un son strident guère agréable à l’oreille. L’odeur du métal chaud caractéristique s’éleva en même temps que l’hymne Lermandien, joué par la fanfare d’une unité motorisée, le détachement de la garde présidentielle se figeant dans une présentation des honneurs impeccable.

Une porte s’ouvrit, laissant le passage au jeune président Lermandien. Par pur réflexe, Matilda porta la main au béret, un salut impeccable pour le jeune dirigeant. Puis, elle lui tendit la main.

- Monsieur le Président Duval, c’est un réel plaisir de vous recevoir et de vous rencontrer. Avez-vous fait un bon voyage ?
Dans le train Présidentiel, tracté par un MBM-D-72000, le Président Duval fit une pause sur les lectures des résumés diplomatiques entre la République de Lermandie et l'Etat de Nebrownia. Bien sûr, le Président Duval connaissait les liens historiques entre les deux grandes nations qui fut plus ou moins compliquer mais il y avait une opportunité d'améliorer la puissance de son pays par la coopération. Il tourna alors ses yeux vers les fenêtres de sa cabine, lui permettant d'observer le paysage viétique rural et pseudo-industriel post-viétique. Il regarda longuement ce paysage quand soudain quelqu'un frappa à la porte de son bureau.

Un major d'homme: "Monsieur le Président, j'espère que je ne vous dérange pas. Mais nous arrivons bientôt à destination".

Le Président Duval remercia le major d'homme et prépara ses affaires. Il mit alors sa veste qui a été conçue pour son costume trois pièces prit son attaché casse contenant divers documents diplomatiques plus ou moins essentiels. Il sorta alors de sa cabine pour rejoindre la délégation diplomatique.

Le Président Duval rejoignit alors sa délégation diplomatique. On pouvait alors voir divers représentants industriels lermandienne qui discutèrent business tels que:
- Lucas Bouchard, Président de la SNTF
- Lucien Lemans, PDG de MANBRAMA
- Pierre Thyssel, PDG du Groupe Acitris
- Adrien Schmit, PDG de SCHMIT AVIATION
- Lucas Balladur, PDG de TEMSOFT
- Lucas Alkavel, PDG de ALKAVEL

Le Président Duval discuta de tous et de rien avec sa délégation diplomatique tout en discutant de la situation internationale, notamment par rapport au Consul Pandoro, qui continua à être insolent et méprisant envers la République de Lermandie (ainsi que de son chef de l'Etat) et ses alliés.

Quelques minutes plus tard, le train fut arrivé dans la Gare Centrale de Gelestal, une gare qui représentait l'ancienne prestige de l'ancienne République Vietique avec un coup d'Etat au début du 20eme siècle.
Les gardes du corps de la délégation diplomatique sortirent de manière synchroniser des wagons dans le but de s'assurer de leurs protections, tout en ne gênant pas les autorités nerbownienne (une procédure qui a pu être discuter en amont entre le gouvernement lermandien et le gouvernement nebrownien).
Et après reçu le signal du chef de la sécurité présidentiel, le Président Duval et sa délégation diplomatique sortirent du train et saluèrent l'actuel chef de l'Etat de Nebrownia ainsi que de ses invités.


Michel Duval: "Générale Mathilda Emerson, le plaisir est réciproques. On peut dire que le voyage fut reposant, malgrès le contexte internationale en Aleucie. "

Peu après les salution cordiaux, le Président Duval et sa délégation rejoignit les limousines blindés gouvernementales, des vehicules blindé produit par la société MANBRAMA, arrivé en avance via un train logistique de la SNTF missionné par le Ministère de la Guerre de la République de Lermandie.
Matilda Sourit. Bien entendu, elle était au courant des démêlés Lermandiens avec Sterus. La seule raison pour laquelle elle n'avait pas clairement positionné Nebrownia dans la crise était qu'elle jugeait son pays pas encore assez stable pour avoir son mot à dire dans une crise majeure comme celle-là. De nombreuses voix s'étaient élevées au sein des différents conseils pour prendre clairement parti pour un ou l'autre camp, mais Matilda avait maintenu la neutralité de Nebrownia dans l'affaire.

- Il est vrai que le contexte actuel est pour le moins... particulier, dit-elle, invitant son invité à l'accompagner d'un geste de la main, et commençant à marcher en direction de la sortie de la gare où les attendaient un convois de voitures officielles du gouvernement. Typiquement le genre de situation qui nous fait douter de la maturité des échanges diplomatiques, n'est-ce pas ? Quand aux décisions de certains gouvernements concernant leurs dirigeants, nous, Nebrowniens, sommes assez mal placés pour juger. Après tout, nous sommes encore en phase d'étude de notre potentiel futur type de gouvernement. Même si, je ne vous le cache pas, je commence à trouver le temps long. J'espère bien ne pas avoir à prolonger le mandat qui est le mien ad vitam aeternam.

Tout en marchant, ils passèrent devant des Gardes Présidentiels, disposés tout au long du trajet, Matilda les saluant tous, reconnaissant nombre de ses anciens subalternes parmi eux. Enfin, ils arrivèrent au hall principal de la gare, un vaste espace au sol marbré, d'imposantes peintures disposées au mur vantaient l'efficacité des anciens chemins de fer Vietiques ainsi que les lignes principales du pays. Celles vantant les prouesses militaires de l'ancien pays ayant été détruites durant l'ère Kellem, après l'annexion, deux pans de murs restaient vierge de toute peintures, recouverts d'un enduis blanc, ils contribuaient à l'éclairage de l'ensemble. Les portes magistrales, hautes de trois mètres et encadrées de sculptures, à l'intérieur comme à l'extérieur, parachevaient l'ensemble. L'ancien gouvernement Vietique avait souhaité que cette gare soit une des vitrines de sa grandeur. Force était de reconnaître qu'ils s'en étaient donnés les moyens ici. Pour Matilda, qui avait combattu l'armée Vietique mais qui n'avait pas pu participer à la revue de Gelestal suivant la victoire de 84, cette journée était un peu particulière. Une forme de découverte.

Au dehors, attendaient une vingtaine de voitures officielles, noires, blindées, surmotorisées. Matilda avait assisté en personne à des tests de résistances de ces voitures, conçues pour résister même à du 12.7mm. Bien évidemment, une roquette anti-char ou un tir de 25mm leur était fatale, mais leur résistance globale forçait le respect. La voiture de MAtilda et du Président Duval attendait, la porte maintenue ouverte par un officier de la Garde Présidentielle. Après avoir salué l'officier, Matilda invita de la main le jeune Président Lermandien à y prendre place, le suivant rapidement après s'être assurée que chaque membre des délégation prenait place dans une voiture. Sans grande surprise, les deux dirigeantes de la SNCF parlaient avec les dirigeants de la SNTF et de MANBRAMA, Ernest avait lui une discussion très animée avec les dirigeants des Groupes ACITRIS et TEMSOFT, avec force hochement de têtes et prises de notes.

Une fois installés, le conducteur démarra et lança le convois dans les rues de Gelestal, Préalablement éclairées par une section de motards de la police.

- Bien... vous pouvez parler librement, pas de micros ici et la séparation avec le chauffeur est insonorisée, dit Matilda après avoir bu une gorgée d'eau des bouteilles présentes dans la voiture. J'espère que vous nous pardonnerez notre neutralité dans la crise qui oppose votre nation à Sterus. Même si j'ai l'impression que ce n'est pas la première fois que ce pays s'oppose à vous ou vos alliés... Existe-t-il un précédent historique de tensions entre vos nations ? demanda-t-elle, bien que connaissant déjà la réponse.

Matilda se félicitait souvent de cette neutralité silencieuse qu'elle avait imposé à sa nation, cela lui évitait d'être contacté par des pays fauteurs de troubles tel que semblait être Sterus. Ensuite, quel intérêt pouvait représenter sa nation aux yeux d'un tel état ? Nebrownia remontait en puissance, mais pas assez fort pour que cela se remarque. Encore que les tensions actuelles avaient poussé le gouvernement à accélérer quelque peu les choses.

Le convois progressait à bonne allure dans les rues de l'ancienne capitale Vietique. Le trajet entre la Gare Principale et l'ancien "Palais du Peuple", comme les communistes Vietiques avaient nommé le siège de leur dictature, ne durerait qu'une dizaine de minutes à ce rythme, assez pour poser les axes principaux des discussions à venir.
Michel Duval: "Il est vrai que peu d'Etat en Aleucie de l'Ouest ait un régime politique stable ayant une durée minimum de deux siècles. Mais je dois avouer que j'ai hâte que votre administration comprenne le besoin de stabilité sur le long terme avec l'adoption d'un futur régime politique. Mais quoi qu'il arrive, soyez rassurer que mon gouvernement s'adaptera à votre diplomatie, et ceux peu importe à votre régime politique. "

Après cette introduction diplomatique entre le Président Duval et son homologue nebrownienne, le président Duval discuta de divers sujets peu important tel que l'enthousiasme de sa femme sur une certaine brownie "nationale" tout en se marchant calmement vers les voitures officielles.

Peu après que le Président Duval s'était assis installer dans la même voiture que la dirigeante, le Président Duval écouta son homologue.


Michel Duval: "Il est tout à fait normal que votre gouvernement provisoire décide de maintenir sa neutralité pour éviter un conflit avec une nation étrangère, surtout quand votre pays n'a pas les moyens militaires et politiques pour une potentielle guerre. Et encore, la Lermandie n'est actuellement pas prête pour une guerre mais possède des moyens pour défendre son intégrité territoriale avec la collaboration de ses partenaires et alliés. Mais une chose est sur, ce con[...] de Pandoro de m[...] a forcé un réveil de notre puissance militaire, car nous estimons qu'un conflit avec la Fédération de Sterus, manipulé par Pandoro, est possible mais reste prévisible. Docn je reste inquiet, mais je suis confiant de notre capacité à défendre notre indépendance.

Mais ce qui m'inquiète le plus, c'est l'attaque récente d'un pays eurysienne, la Principaux de Carnavale, envers l'Empire du Nord, un de nos alliés. Et ceux pour des motifs absurdes tels que la dénonciation d'un responsable religieux nordien indépendant de son gouvernement les tentatives de corruption. Et ce pays a littéralement fait preuve d'une immaturité que je n'aurais jamais cru exister, c'est-à-dire un bombardement d'un édifice religieux en pleine office présidé par ce même responsable religieux.
Donc actuellement, je ne peux que considère que ce pays est le plus imprévisible, le plus irrationnel et le plus décadent que je puisse connaître.

Et sinon, vous avez des pistes concernant la réforme de votre grande nation?"
Matilda hocha la tête. L’attaque de Carnavale avait en effet été une double surprise. Double car, premièrement, personne ne s’attendait à ce genre d’actions pour un motif aussi trivial, mais aussi, car personne ne croyait, au sein de la diplomatie Nebrownienne, qu’un pays puisse avoir un nom officiel aussi grotesque. Carnavale était presque devenu un running gag. Mais maintenant, tout le monde au sein du conseil d’Etat aux Relations Extérieures savait que ce running gag était doté de missiles intercontinentaux, et du coup, les regards et observations d’autres pays aux noms douteux changèrent. Cet électrochoc avait au moins eu ça de positif concernant la diplomatie Nebrownienne.

- Il est vrai que cette attaque soudaine et absurde a fait l’effet d’un électrochoc pour bien des gens. Nebrownia compte nombre de Catholiques qui ont été profondément choqués par cet acte, je ne compte plus les missives de citoyens exigeant le déclenchement d’une croisade contre cette nation , la Générale eut un petit rire. Personnellement, je suis agnostique, et je tiens à ce que la politique de mon pays reste indépendante des questions religieuses. Eus-je été croyante, je pense que ma décision aurait été la même, politique et religion ne font pas bon ménage. Carnavale est devenu un nom de plus dans la liste des pays dont Nebrownia se méfie.

Elle but une nouvelle gorgée d’eau en jetant un regard par la fenêtre. L’Avenue du Peuple, comme l’avaient nommée les Vietiques, s’étirait, bordée d’immeubles impersonnels aux formes anguleuses. Matilda trouvait ce type d’architecture extrêmement laid, mais les quelques architectes déployés pour étudier la chose, ainsi que la faisabilité de leur destruction, avait estimé que, si l’esthétique était douteuse, les appartements avaient été conçus pour être pratiques, nombre de rangements étaient bâtis dans les murs, l’électricité et la plomberie étaient facile d’accès, la praticité avait été le maître mot de leur conception. Il est vrai qu’à l’époque, peu de Vietiques pouvaient s’offrir des meubles, ce qui faisait de ces appartements des logements parfaits pour loger des fonctionnaires dans des conditions correctes. Encore aujourd’hui, ces immeubles proposaient leurs logements à des tarifs très intéressants.

Le regard de la général tomba sur quelques passants, alors qu’elle réfléchissait à la réponse à donner à la dernière interrogation de son interlocuteur. Les jeunes gens regardèrent passer le convoi, un regard interrogatif pour certain, enthousiaste pour d’autres. L’Avenue du Peuple de Gelestal était massivement peuplée d’étudiants, la proximité avec la gare permettant une desserte aisée du quartier des Universités via le train intra-urbain et les loyers bas étant une aubaine pour les étudiants ne pouvant trouver une place dans les cités Universitaires. Elle sourit. Son fils avait suivi son Cursus de Maïeutique au sein de l’Ecole Nationale de Médecine de Gelestal. Elle se souvint que celà lui avait fait une drôle de sensation. Elle n’avait pu aider à son installation, ses obligations professionnelle exigeant sa présence active à ce moment. Ce qui l’amena à penser à Noroît, son mari, qui dirigeait actuellement l’étude du conseil de transition, et donc, à la question de son jeune interlocuteur.

- Des pistes, il y en a énormément, tant d’un point de vue politique qu’économique et militaire. L’étude des pistes politiques est l’affaire de mon époux, qui étudie un système nous permettant à l’avenir d’éviter le retour d’une dictature à la tête de notre État. J’y ai malgré tout un rôle, car je dirige actuellement Nebrownia, mais mes décisions de ce côté ne sont que temporaires. De ce que j’ai compris, la direction générale irait vers une forme de démocratie. Mais mon époux est resté vague sur les spécificités de celle-ci. En fait, je crois qu’ils ne sont pas tous d’accord concernant les gardes fous à mettre en place pour protéger la nation d’un nouveau Kellem.

Elle fait une pause, pensant au visage parfois fermé, parfois réjouis de son époux après les cessions et débats de l’étude du Conseil de Transition. Les débats semblaient souvent assez vifs, mais rarement contre-productifs.

- Concernant l’économie, l’urgence est à la modernisation. Nous avons lancé très tôt un programme massif de modernisation de notre industrie, grandement aidé par l’ouverture de nos frontières et de notre marché. Nous allons, bien évidemment, garder la main sur des industries et des secteurs stratégiques, mais dans les grandes lignes, nous suivrons une voie assez similaire à la votre. Je ne vais pas vous mentir, mais malgré notre programme, à l’heure actuelle, environ 80% de notre secteur industriel utilise encore des machines vieilles de 50 ans. Certes, les secteurs stratégiques disposent de machines beaucoup plus modernes, mais ce contraste est par trop énorme pour soutenir une économie de marché, d’où notre programme de modernisation, nouvelle gorgée d’eau alors que leur convois tourne à gauche, abandonnant l’Avenue du Peuple pour prendre le Boulevard des Pionniers, à l’architecture beaucoup plus agréable à l’oeil. Nous allons aussi bientôt lancer un programme concernant la recherche et l’enseignement, qui ont été grandement délaissés par la précédente administration, à l’exception de quelques secteurs clés. Notre Conseillère Scientifique a terminé récemment de boucler son prévisionnel et son budget pour le programme à venir. Je pense que sa vision est la bonne, un subtil mélange de partage avec d’autres nations, d’échanges, et de protection dans certains secteurs clés. Je pense que mon conseiller de l’Industrie, de la Production et du Commerce discute actuellement avec vos accompagnateurs de certains projets de ce programme.

Elle sourit. C’était agréable de travailler avec des gens compétents, et Ernest, en plus d’être un ami de son époux, était un homme droit dans ses bottes. Elle avait craint un moment que sa relation amicale avec son époux le dissuade de rejoindre son équipe, mais heureusement, il avait accepté, et Matilda avait dores et déjà constaté qu’il “défendait son beefsteak”, comme disait Noroit. Il avait le même objectif qu’elle, et entendait bien y parvenir, même s’il devait pour ça lui montrer les crocs.

- Concernant l’armée… beaucoup de choses ont commencé, mais l’accent est mis sur le ré-entraînement et la modernisation de nos doctrines. D’où la proposition de la tenue d’exercices conjoints prochainement. L’idée serait de nous confronter à des scénarii de guerre moderne, et d’étudier nos capacités de réaction à celle-ci. Je discuterai des détails plus en avant avec votre chef d’etat major, et celui de Westalia car, si j’ai bien compris, vous envisageriez de l’intégrer à ces exercices… ce qui n’est pas pour nous déplaire, ils disposent d’une flotte puissante et moderne, il serait intéressant d’expérimenter nos capacités aéro-navales…
Le Président Duval écouta les propos de son homologue nerbrownienne. Dans le contexte où l’État nerbrownien est en pleine transition démocratique, le chef de l’État lermandien ne pouvait que féliciter la retenue affichée face au problème carnavallais. D’autant plus que les propos de son homologue démontraient une conscience lucide des forces et faiblesses actuelles de son pays, lequel ne disposait presque d’aucune capacité de défense organisée.
Quant à la Lermandie, sa capacité actuelle de défense repose avant tout sur une politique de rattrapage soutenue par des recrutements massifs et des investissements élevés dans l’A.R.D.L., l’agence du Ministère de la Guerre chargée de la recherche et du développement des technologies à usage militaire. Néanmoins, la Lermandie ne peut, pour l’heure, défendre que l’intégrité de son propre territoire, avec le soutien de la Marine westalienne pour sécuriser ses eaux nationales.


Michel Duval: "Vous savez, Générale Emerson, je pense que si l’on parle tant de Carnaval à l’international, c’est surtout parce que ses dirigeants sont totalement immatures et n’acceptent aucune défaite. En cas d’échec, leur seule réponse semble être l’usage de missiles balistiques contre leurs adversaires, quitte à provoquer la réaction d’une coalition internationale.

En ce qui concerne la religion, je comprends parfaitement votre position. Permettre à une foi d’orienter nos politiques est un suicide pour tout progrès social ou technologique. C’est d’ailleurs pour cela que la laïcité a été proclamée en Lermandie dès le début du XXᵉ siècle."

En suivant le regard de son homologue vers l’extérieur, le Président Duval observa l’architecture communiste vietique. Il se remémora qu’en dépit de la rivalité entre la Lermandie et la Vietie, les gouvernements lermandiens de la seconde moitié du XXᵉ siècle s’étaient inspirés de cette architecture dans le cadre du développement de quartiers de grands ensembles. Ces quartiers étaient destinés à accueillir en urgence des populations souvent paupérisées, en réponse à un exode rural massif et à une forte demande d’ouvriers pour les secteurs de l’industrie lourde, agroalimentaire et manufacturière.

C’est pourquoi, lorsqu’il fut élu maire de la municipalité de Bradis puis vice-président de Bradis-Métropole, Michel Duval ordonna le relogement d’une partie de ces populations dans des résidences de meilleure qualité, ainsi que la destruction d’environ 25 % des grands ensembles, en raison de leur vieillissement prématuré, conséquence directe d’une politique de construction d’urgence. Toutefois, certains quartiers furent simplement réhabilités, grâce à des politiques de rénovation et de restructuration du réseau de transports, notamment par le tramway et le métro.


Michel Duval: "Soyez rassurée, Générale Emerson : la Lermandie ne compte pas s’impliquer dans la reconstruction institutionnelle de l’État nebrownien. Mon gouvernement et moi-même avons confiance dans votre volonté de permettre à un peuple longtemps opprimé d’exprimer librement sa souveraineté.
Cependant, je dois vous avouer une certaine inquiétude quant à la rapidité des réformes institutionnelles, car l’instabilité pourrait rendre votre pays vulnérable à diverses ingérences étrangères."

Dans ce cas précis, le Président Duval songea à la Fédération de Sterus et à l’Union et Empire des Cités d’Akaltie, toutes deux impliquées dans la course au trône de la Fédération Maximilane. Cette inquiétude se renforçait concernant Akaltie, en raison de son attitude oppressive envers l’Empire d’Everia — une nation qui n’a, à aucun moment, exprimé un quelconque désir de domination.
Ainsi, pour le Président Duval, il est fondamental que la République de Lermandie multiplie les partenariats et alliances afin de contrer les acteurs hostiles en Aleucie, notamment par la mise en place d’une Entente Aleucienne.


Michel Duval: "Générale Emerson, je comprends parfaitement la volonté de votre gouvernement d’accélérer la modernisation de son secteur industriel, public comme privé. Cela dit, il ne faut pas oublier que certaines vieilles machines âgées de plus de 50 ans peuvent encore se révéler plus efficaces que des modèles récents, grâce à des coûts d’entretien et d’énergie plus faibles. Mais, évidemment, tout dépend des priorités fixées par votre gouvernement.

Je crois cependant que votre ambition de moderniser votre économie permettra à votre pays de mieux s’intégrer dans le commerce international. D’ailleurs, je pourrais envisager de solliciter des entreprises logistiques comme la CML-CGM pour assurer le transport maritime de vos marchandises. Cette entreprise est désormais un acteur international en Aleucie de premier plan, notamment depuis l’acquisition de plusieurs actifs yukanaslaviens."

Le Président Duval prit le temps d’écouter les propos de son homologue sur son armée avant de répondre.

Michel Duval: "La modernisation de l’armée est un enjeu central dans toute politique de dissuasion, tant par la quantité que par la qualité des effectifs et du matériel. Et je vous souhaite sincèrement de réussir, car je pressens que les tensions vont s’intensifier en Aleucie, à cause de certains États belliqueux.

C’est pourquoi je souhaiterais voir votre armée participer à des projets d’exercices militaires conjoints, couvrant les dimensions terrestre, aérienne et maritime. Bien sûr, si nécessaire, le Ministère de la Guerre pourrait vous vendre du matériel militaire, si vous en manquez. Mais il convient de préciser que les Forces Armées Lermandiennes sont prioritaires, d’autant plus en raison de notre rivalité croissante envers la Fédération de Sterus."
Lorsque son jeune vis-à-vis fit allusion à d’éventuelles ingérences étrangères, Matilda haussa un sourcil surpris. Puis elle compris. Maximus, l'État voisin, s’était lancé dans une curieuse affaire, la nomination de son souverain parmi les couronnes d’autres États, y-compris Sterus, nation actuellement presque ennemie de la Lermandie. Elle fronça les sourcils.

Je ne vous cache pas que nous surveillons d’assez près ce qui se fait dans cette nation voisine que vous évoquez sans la mentionner, nous sommes… disons circonspect à son endroit. dit Matilda, avant de poursuivre, nous avons du mal à saisir le pourquoi de la chose… Peut-être qu'ainsi ils espèrent lier des liens forts avec de puissantes monarchies à même de les protéger le cas échéant ? Mais les protéger de qui ? De vous ? Vous n’avez jamais attaqué les premier, dans votre histoire commune, il me semble, et n’avez jamais montré des velléités d’expansion sur leurs territoires… Si ce n’est pas une question de protection, qu’est-ce ? Une forme de mixité ? Matilda hausse les épaules, dans tous les cas, nous nous méfions d’eux et surveillons d’aussi près que possible leur évolution…

Matilda secoua la tête. De fait, la situation de Maximus donnait des cheveux blancs aux analystes du Conseil d’Etat aux Relations Extérieures, d’autant que ce pays avait un passé agressif. Jusqu’ici, Nebrownia n’avait pas encore eu à subir trop d’attention de leur part, mais les récents changements et la relative instabilité dans laquelle se trouvait le pays en ce moment pourraient changer la donne. La surveillance des frontières dans cette région avait été renforcée depuis l’année précédente, les différents conseillers surveillaient de près l’évolution de la situation là bas.

Puis vint la vraie motivation de Matilda, la militaire et non la cheffe d’Etat. L’aspect militaire de la réunion. Matilda se redressa. La proposition de vente de matériel vint d'elle-même, du représentant Lermandien, lui épargnant le scoubidou cérébral nécessaire pour aborder la question vu le contexte actuel. Elle sauta immédiatement sur l’occasion.

Bien entendu, je comprends qu’au vu du contexte, vos armées ont la priorité. Cependant, votre contexte n’est pas le nôtre, aussi nous nous contenterons de matériel bien moins évolué que ce que vous produisez actuellement, notre préoccupation est de retrouver une masse de manœuvre assez rapidement, et surtout, de l’équiper. Matilda sourit j’ai cru apercevoir dans mes rapports que vous vous débarrassiez d’une série de navires ? Notre marine ne dispose à l’heure actuelle que de petites vedettes équipées, au mieux, de missiles anti-char, et je ferais un cadeau superbe à notre pauvre amiral en lui permettant d’ajouter quelques unes de vos anciennes unités à notre Arsenal

La perche était tendue, comment allait réagir le jeune président Lermandien ?
Le Président Duval écouta attentivement les propos de son homologue. Mais les dernières paroles de la Générale Matilda firent lever un sourcil au Président Duval.
Avait-elle réellement proposé à la Lermandie de vendre des navires de guerre à l’État de Nerbrownia ? La réponse était oui.
Franchement, le Président Duval, intérieurement, se réjouissait qu’un État respectable tel que Nerbrownia soit disposé à accueillir des navires de guerre de conception lermandienne.
Mais en même temps, le complexe militaro-industriel lermandien n’était pas encore suffisamment puissant pour, à la fois, vendre des armes et du matériel militaire à des nations étrangères tout en continuant à équiper les Forces Armées Lermandiennes.
Cela dit, cette demande représentait une opportunité stratégique pour accélérer le développement de l’industrie de l’armement nationale.


Michel Duval: "Générale Matilda, je dois avouer que votre proposition d’achat de matériel et d’armes lermandiennes me surprend agréablement. D’autant plus qu’il s’agirait de matériel ayant déjà servi au sein des Forces Armées Lermandiennes.
Dans ce cadre, je reconnais que cette opportunité est extrêmement tentante.
Cependant, au vu de la situation géopolitique complexe causée par le régime de Pandoro et la diplomatie décadente de Carnaval, je crains que notre complexe militaro-industriel ne soit pas encore assez robuste pour fournir simultanément la Lermandie et ses alliés.

Cela dit, je pense qu’une vente modérée, au compte-gouttes, notamment de navires de guerre, serait envisageable.
Et cet achat permettrait à nos industries militaires d’investir davantage dans la production d’armement."
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