11/05/2017
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Extrait de : « Histoire politique de Fiumiglia »
Rinaldisme contre Fascisme révolutionnaire : Comprendre les deux faces de l'extrême droite fiumiglienne

[PARTIE 1]


Dirigé par : Dr. Felice Talone - Docteur, Chercheur et Maître de Conférence en Histoire des Idées Politiques à l'Università Catolana di Modessetto.



 Fiumiglia dispose d'une particularité assez singulière en terme de politique. Notre pays dispose en effet de deux principaux mouvements d'extrême droite, antagonistes, qui, tout en répondant à des problématiques similaires et à une idéologie d'extrême-droite commune, se sont également toujours positionnés en rejet l'une de l'autre. Cette rivalité et cette différenciation, toujours visibles aujourd'hui dans l'arène parlementaire (Movimento Sociale - Nuova Lega), mais également dans les groupuscules extrémiste, sont le fait de l'histoire, de la culture et des réalités sociales de notre pays. Mais cette approche globale et historique ne saurait cachée l'influence importante qu'ont joué les deux théoriciens principaux de ses courants, Vittorio Rinaldi pour le rinaldisme et Fulvio Zetticci pour le fascisme révolutionnaire, dans la création d'une opposition idéologique et personnelle entre ces deux courants. Le présent article explorera, notamment grâce à une biographie comparative, des citations issus des livres, articles ou lettres des deux auteurs précédemment cités, les principales différences doctrinales qui expliquent l'opposition franche et violente qui sépare, encore aujourd'hui, les deux mouvements fascistes fiumigliens. Nous apporterons, en complément, une analyse historique et sociologique de ces différences tout en observant leurs effets sur la politique actuelle de Fiumiglia.
Zetticci et Rinaldi
Fulvio Zetticci (gauche) et Vittorio Rinaldi (droite)


I - Biographies comparatives


 L'une des principales différences observables entre les deux hommes réside dans l'écart de parcours qui les sépare. Zetticci est un fils de paysan, se revandiquant chrétien, profondément révolutionnaire et hyperactif, tandis que Rinaldi descend d'une grande famille aristocratique, affiche un anti-cléricalisme convaincu et se positionnera toute sa vie comme un intellectuel déconnecté de la réalité du terrain politique. Zetticci méprisera toujours son rival politique qu'il qualifiera à de nombreuses reprises de "poussière de bibliothèque" ou de "schizophrène décadent'. Dans cette première partie nous réaliserons une biographie de la vie de ces deux individus pour pouvoir comprendre, en détail, les différences frappantes dans la vie et dans la formation politique des deux hommes.

Zetticci, du pâturage au fusil

 Fulvio Armando Zetticci est né le 12 octobre 1895 dans le petit village méridional et pastoral de Valloli dans les zones les plus reculées des environs de Buli. Une presse universitaire assez peu sérieuse a, pendant de très longues années, inscrit et propagé un narratif romantique dans lequel ce serait la géologie rustre et difficile de sa région de naissance qui aurait expliqué le développement politique du jeune homme. Si cette typologie biographique tend à s'effacer, grâce notamment à des logiques et des paradigmes de recherche plus sérieux des biographes modernes, la vision d'un Zetticci ayant grandi dans l'effort et le développement par le travail dur et ingrat reste malgré tout inscrite dans un imaginaire collectif, alimenté, il est vrai, par une forme de fascination pour l'inventeur du fascisme fiumiglien. Si Zetticci est bien fils de berger, il faut également prendre en compte que sa mère, Martina, était institutrice, lettrée et descendante d'une famille de notables locaux, de même son père, Amadeo, détonne par rapport aux autres bergers des environs, il sait lire, parle le dialecte mais également l'italien, et surtout possède ses terres de pâturage. Ce dernier point est crucial pour comprendre la sociologie de la famille Zetticci, posséder les pâturages permettait d'avoir de plus grands troupeaux, d'être plus rentable et de faire fructifier le terrain de diverses manières. De ce fait, Fulvio grandit dans une position particulière et unique dans cet espace, à la marge de plusieurs mondes et classes rurales, entre le petit-bourgeois, le berger et le lettré. La famille aura un cadre de vie acceptable tout au long de l'enfance et de l'adolescence de Fulvio et de ses 3 frères et 2 sœurs, tous ont pu être scolarisés, même les filles, ce qui indique une forme de progressisme et d'ouverture, qui n'étaient pas forcément partagés par la plupart des bergers, qui n'en avaient de toute façon pas les moyens. Amadeo et sa femme sont connus pour être relativement religieux, ils célèbrent les fêtes principales et la messe dominicale mais mangent des aliments carnés les vendredis et ne sont pas forcément férus de prières. Cela peut s'expliquer par le positionnement "à gauche" de la famille, Amadeo s'engagera épisodiquement dans des syndicats agricoles, se présentera sur des listes politiques de gauche et sera même élu au conseil de sa commune en 1903, au sein d'une liste démocrate, ce qui indique encore une fois une forme de position de notable local, à une époque où les partis politiques sont particulièrement faibles dans les zones rurales. Cependant Amadeo Zetticci n'est pas socialiste et ne le sera jamais, son positionnement de propriétaire terrien, même s'il ne concernait qu'une bande de terre modeste de quelques hectares, lui fera toujours craindre une forme de perte de ses propriétés matérielles.

 Fulvio connaît donc une enfance relativement douce, à l'inverse de la vision fantasmée qu'il a lui-même participé à créer en affichant son statut de fils de berger. La plupart des textes biographiques récents explorent même la piste d'une enfance particulièrement délicate pour le jeune homme qui aurait été bien plus proche de l'école de sa mère plutôt que des pâturages de son père. L'éducation du troisième fils de la famille aurait été tournée davantage vers l'acquisition de culture scolaire plutôt que vers la mobilisation des caractéristiques physiques propres aux bergers. Il semblerait que ses deux frères aînés, Marco et Daniele, aient été ceux chargés d'accompagner le patriarche dans ses occupations pastorales quotidiennes, tandis que Fulvio et Pasquale, son petit frère, seraient restés davantage avec leur mère, à l'école ou à la maison, n'allant dans les pâturages que lors des saisons intenses pour donner des coups de main. Cela expliquerait notamment les très bons résultats scolaires du jeune Fulvio qui surperforme dans le petit établissement scolaire communal où travaille également sa mère. L'importance de Maria Zetticci dans la formation intellectuelle de Fulvio a longtemps été sous-estimée ou carrément ignorée, au profit d'une interprétation faisant de son père l'inspiration principale du parcours qui suivra. Mais il apparaît aujourd'hui, à la lumière de toute la documentation accumulée sur la vie de Zetticci, que c'est principalement sa mère qui influencera sa vie, et notamment son intérêt pour le milieu universitaire qui sera au cœur de son développement politique. C'est ainsi Maria qui l'envoie à 10 ans dans un collège privé de la grande ville locale de Giusa malgré l'opposition temporaire de son mari qui craignait de perdre un bras utile lors de la haute saison. Fulvio se retrouve donc à 10 ans, en pension complète, loin de sa famille, cette expérience représente pour lui un choc, une forme de traumatisme. Le garçon qui avait grandi dans les montagnes, qui jouait constamment dehors avec ses frères ou ses camarades d'école se retrouve coincé entre des murs austères et éduqué par des religieux qui le sont tout autant. Pendant ces années, les seules vraies éclaircies seront les mois de vacances qu'il passe à Valloli avec sa famille et où il se repermet d’apprécier sortir en plein air. Il se retrouve également dans un milieu bourgeois citadin qui n'est pas le sien, qu'il ne comprend pas et qu'il rejette. Fulvio Zetticci décrira toujours ces 6 ans de pension comme l'apparition d'une constante de sa vie : la violence. Les bagarres dans l'établissement sont régulières et Fulvio fait tout aussi régulièrement jouer ses poings pour obtenir ce qu'il veut. Malgré ces entraves régulières au règlement, il reste un élève particulièrement studieux et se retrouve à de nombreuses reprises premier de sa promotion dans la plupart des matières, notamment en littérature où il est rapidement pris sous l'aile de son professeur, Sandro Brunacci, qui l'encouragera à poursuivre dans la voie académique. Fulvio n'a pas un grand nombre d'amis, au contraire, il est souvent isolé : dans un environnement principalement bourgeois, son statut de berger dérange ou fait rire. Le jeune garçon prend alors conscience de sa position sociale, lui qui avait été dans une position favorisée dans son village natal, se retrouve parmi les élèves pauvres dans son nouvel environnement. Il se remémorera à de nombreuses reprises, au cours de sa vie, l’humiliation qu'il a ressentie la première fois qu'il a été à la cantine et qu'il lui avait été interdit de s'asseoir à la même table que ses camarades plus riches, ou de la fois où il ne lui fut rien servi à manger pendant 4 jours parce que ses parents avaient un retard de paiement auprès de l’établissement. Zetticci renforce donc sa violence, qu'il concentre dans ses divers essais et compositions qui deviennent de violentes diatribes dirigées de manière désorganisée contre des organisations et institutions diverses. Mais la grande rencontre qu'il fait durant la fin de son collège est celle de Salvatore Mancini, un camarade qui l'introduira à la théorie politique et notamment au principe de lutte des classes. Fulvio est passionné par ces thèses, qu'il lie avec les observations sur sa position sociale et la haine de ses camarades bourgeois, il commence donc à fréquenter les milieux socialistes, par l’intermédiaire de Salvatore et avec la complicité du gardien du collège, lui aussi socialiste, qui les laisse sortir la nuit pour assister aux réunions des différents espaces politiques de Buli. À cette époque-là, les mouvements socialistes sont peu présents dans le sud, sauf à Neapoli où une classe prolétaire se forme à cette époque, les paysans du sud qui viennent d’accéder au suffrage universel sont peu formés politiquement et ne se reconnaissent pas vraiment dans les revendications ouvrières, concentrées autour des villes du nord comme Modesseto ou Codène.

 Le jeune étudiant, qui est sur le point de finir le collège et qui devra choisir entre poursuivre son cursus éducatif ou rejoindre pour de bon son village natal, se retrouve à militer localement et fait l'acquisition de nouveaux ouvrages de théorie qu'il dévore souvent en quelques jours. Après avoir obtenu son diplôme, avec les honneurs académiques, il retourna à Valloli le temps de décider quel chemin il devait désormais prendre. Plusieurs choix s'offraient à lui, son père défendait l’idée de passer sa certification d’instituteur pour exercer dans le village aux côtés de sa mère, l'idée était encore probablement d'avoir un bras supplémentaire sous la main pour gérer le troupeau en cas de coup dur. Sa mère insista lourdement une nouvelle fois pour l'envoyer dans un environnement plus prestigieux, pour qu'il continue ses études et obtienne mieux qu'une certification d'enseignant, il ne fait pas de doute que l'objectif de Maria ait été d'envoyer son fils à l'université. On reconnaît dans cette division entre Amadeo et Maria une profonde différence sociale : l'importance perçue de l'éducation à cette époque (et même encore aujourd'hui à certains égards) n'est pas la même entre un berger, même petit-bourgeois, et une institutrice fille de notable. Finalement, son père finira par plier une nouvelle fois sur ce sujet, la théorie la plus probable sur ce manque de conviction du père à garder son fils auprès de lui est qu'Amadeo voyait peu d'avenir aux pâturages pour un garçon trop dissipé, bagarreur et "intello", des critères qu'il jugeait probablement contraires à la tenue correcte d'un troupeau, à l'inverse des aînés, Marco et Daniele, plus calmes et tranquilles, qui étaient au centre des préoccupations du patriarche. Fulvio, qui voulait de toute façon retourner dans un milieu urbain pour retrouver les cercles socialistes, trop absents de sa campagne agricole, accepta volontiers la démarche de sa mère. Après quelques lettres de recommandation qu'il obtint de Sandro Brunacci, il fut accepté dans un lycée séculier, de tendance libérale à Buli. Brunacci réussit même à lui faire obtenir une bourse scolaire qui lui permettait à la fois de payer les frais mensuels de son nouvel établissement scolaire mais également une chambre privée en dehors de l'internat. Ses trois ans au lycée Parizzo de Buli furent donc une balade de santé aux côtés des six ans d'isolement et de dépression qu'il avait endurés à Giusa. N'ayant plus de raison de se révolter dans son environnement scolaire, Fulvio devint un élève modèle, calme, discipliné, sociable et même parfois souriant. La violence qu'il exerçait autrefois dans la cour de récréation ou dans les couloirs de l'internat ne disparut pas pour autant, elle fut simplement transférée dans ses nouvelles activités politiques. Les milieux gauchistes de Buli, faibles, mal organisés, disparates et en confrontation constante avec une police particulièrement oppressante, agissant quasiment ouvertement sous commandement des grands patrons des soufrières et des grands exploitants agricoles, furent ravis de l'arrivée de ce gamin teigneux, déterminé, qui ne pouvait vouer une haine plus grande à la bourgeoisie. Fulvio participa à presque toutes les actions violentes de grande ampleur, arrivant de manière presque miraculeuse à éviter la prison à chaque fois. Il ne s'installa pas dans un mouvement en particulier ; de toute façon, selon des témoignages de l'époque, il changeait de bord socialiste à chaque lecture, il fréquentait tous les cafés socialistes, parlait à tout le monde et faisait souvent office de messager entre les différentes organisations et courants. À Buli, où les mouvements de gauche étaient trop faibles pour se faire une guerre de chapelle, ce type de comportement volatil ne posait pas forcément problème. Il devint même une forme de figure locale : on retenait sa hargne, son courage lors des affrontements avec la police, mais également ses nombreuses aventures romantiques. Fulvio profitait en effet de sa chambre privée pour y recevoir de nombreuses femmes qu'il séduisait dans les bars ou même dans les différentes protestations auxquelles il participait. Il ne s'agit pas du sujet de cet article, mais de nombreux auteurs, notamment Dr. Eva Biancollini et Dr. Massimo Carravita, ont effectué des analyses particulièrement intéressantes sur la vie sexuelle de Fulvio Zetticci. On y ressort notamment la figure de Livia Pivali, que Zetticci retiendra toujours comme sa première aventure, de dix ans sa cadette, qui prendra sa virginité alors qu'il n'avait que quatorze ans. Si Fulvio Zetticci, dans une approche viriliste, se gargarisera toujours de cette première aventure avec une femme plus âgée, des démarches plus ou moins psychanalytiques proposent cet événement, déstabilisateur dans la construction d'un jeune homme, au même titre que ses six ans à Giusa, comme une cause de sa violence, particulièrement dans le domaine sexuel, sujet que nous aborderons de manière rapide plus tard dans l'article.

 Au niveau scolaire, Fulvio continua dans sa réussite habituelle. Durant ses trois années de lycée, il obtint les félicitations académiques à chaque fin de semestre et recevait des appréciations plus que positives. Dans cet environnement plus sain, il devint beaucoup plus sociable, et ce même avec des camarades qu'il considère comme bourgeois. Un de ses plus grands amis de lycée sera par exemple Antonio Cesteli, le fils du propriétaire de la principale fabrique de savon de Buli, et il aura une courte relation amoureuse avec Giulia Rossi, la nièce du maire de la ville. Fulvio cultive son charisme, se prête aux discours en public et s'affirme comme un jeune homme sûr de lui. Durant longtemps, les relais médiatiques et académiques du fascisme ont propagé l'idée que Zetticci ait été un orateur hors pair naturel, ayant reçu une forme de don divin lui permettant de parler magiquement et efficacement à la foule. Bien évidemment, cette explication tient de la propagande et non d'une réalité historique. Fulvio a appris la rhétorique ainsi que l'art du discours auprès de Nicolo Bianconi, son professeur d'étude lyrique de première année de lycée. Fulvio Zetticci le reconnaissait lui-même dans ses premières mémoires, mais quand il comprit l’intérêt du mythe de "l'orateur naturel" et de sa propagation, il demanda la suppression des mentions de cet homme lors des réimpressions qui devaient suivre, d'autant plus que Bianconi était un socialiste convaincu, qui avait pris le jeune Zetticci sous son aile en pensant apercevoir un futur grand nom du socialisme fiumiglien. Il ne fallait donc pas montrer que le talent d'expression et de contrôle des foules du fondateur du fascisme révolutionnaire était en réalité hérité d'un pur représentant de l’idéologie ennemie. Comme nous le verrons dans les prochaines parties, Zetticci n'hésite pas à revendiquer une filiation passée avec le socialisme, mais uniquement quand cela lui permet de se représenter comme une figure impressionnante, magnanime et dépassant, en quelque sorte, les clivages ; mais le socialisme ne doit jamais être une explication à sa grandeur revendiquée. Nous pouvons résumer cette idée au fait que le socialisme doit représenter une étape intellectuelle, précoce et immature, qui amène nécessairement vers un glorieux fascisme transcendant les époques. Mais la transition vers le fascisme ne se fit pas encore durant sa période de lycée. Le turbulent jeune homme trouve dans le socialisme une réponse à toutes ses interrogations, à tous ses doutes. Fulvio n'a pas un questionnement dont il ne peut trouver la signification dans un livre de théorie ou après une discussion arrosée auprès de ses camarades, dans un bar miteux acceptant les rassemblements de rouges. Il ne remet pas en question le socialisme car il représente également une bonne raison d'être violent. À cette époque de sa vie, il ne connaît pas d'autre cadre de pensée qui lui permet de légitimer, par la théorie, ses pulsions violentes et destructrices. La religion lui apparaît encore comme un cadre de socialisation bourgeois, à l'opposé de la virilité qui devrait être celle d’un révolutionnaire. Il est très probable qu'il ait reçu une éducation anticléricale dans son lycée ; ces établissements laïcs étaient souvent des lieux de propagation du sécularisme, à une époque où la plupart des pays voisins réalisaient une transition vers des modèles de société où l’État se séparait de l’Église. Mais c’est sûrement son attachement au socialisme qui le poussa davantage à rejeter partiellement les enseignements cléricaux, au profit d’une doctrine politique qui concentrait, avec ses études, la majorité de son occupation intellectuelle.

 Après l’obtention de son diplôme de fin de lycée, Fulvio fut conseillé par Bianconi de s'inscrire à l'université publique de Codène, l’Università degli studi di Codena, où il pouvait, grâce à des connexions, lui obtenir une bourse similaire à celle dont il avait bénéficié durant ces trois dernières années. Le jeune homme, désormais à la veille de sa majorité, accepta sans hésitation et sans retourner chez ses parents pour demander leur opinion. D’ailleurs, à partir de cette période, il ne retournera que très peu à Valloli, et presque uniquement pour voir sa mère. Dans les différents mémoires que Zetticci a écrits, sa relation avec sa famille ainsi que les liens avec sa terre natale sont toujours enjolivés. En réalité, il n'est pas une exagération de dire qu'il n'était pas un homme de famille, et encore moins de campagne. Des analyses un peu aventureuses expliquent cela par son acquisition des valeurs socialistes ; nous nous contenterons plutôt de dire que Fulvio est le fruit de ses conditions sociales. Celui qui se bâtissait comme un intellectuel en construction n'avait plus réellement d'attache avec le milieu pastoral dans lequel il a vécu les premières années de sa vie. Il est également vrai que sa famille n'a jamais fait des pieds et des mains pour le faire revenir. Zetticci, dans sa représentation personnelle, a joué sur une forme d'ignorance et de fascination pour les milieux agricoles du sud de Fiumiglia, qu'on représente volontiers comme des figures traditionalistes, soudées avec une attache familiale forte ; dans les faits, les réalités migratoires de l'île avaient déjà déchiré une bonne partie de ce tissu social qui était alors en perdition économique et démographique. Toutes les familles de cette époque avaient, au moins, un membre qui s'était exilé au nord ou dans un autre pays. La situation de Fulvio, en partance pour Codène, était alors loin d’être la plus unique et douloureuse de son cadre géographique. Au contraire, elle était même plutôt acceptable.

 Codène est une période cruciale de la formation intellectuelle et politique de Zetticci. Le jeune homme, qui vient de s'inscrire en droit, est frappé par la différence entre la petite scène militante de Buli, où il avait réalisé la plupart de sa formation politique, et la gigantesque arène que représentaient les milieux politiques de la capitale. Si à Buli, les différentes mouvances gauchistes se réunissaient dans une alliance de fait contre la répression, à Codène la situation est totalement différente. La ville est remplie d'ouvriers qui travaillent pour les grands groupes industriels locaux, le mouvement militant est puissant, organisé et très concurrentiel. En 1913, quand Fulvio arriva dans la ville, on comptait 17 groupes militants de gauche, allant des sociaux-démocrates jusqu'aux communistes, et une dizaine de mouvances plus clandestines qui se montraient presque exclusivement lors de mouvements sociaux ou de grèves. Dès lors, la position instable de Zetticci, ses voltes-faces permanentes et son refus de s'introduire dans une mouvance en particulier agacent particulièrement. Sa violence incontrôlée et bien souvent inutile inquiète également ses propres camarades qui ne voient pas en lui un révolutionnaire fiable, mais un agitateur sans colonne vertébrale qui met en danger les différents groupes dans lesquels il passe. Ses discours et interventions, aussi lyriques et bien écrits qu'ils soient, peinent à convaincre les militants mieux formés et instruits de Codène ; Zetticci fait dialoguer des auteurs de façon critiquable, change d'opinion entre deux discours et s'avance trop rapidement dans un milieu qui craint et rejette encore les tribuns. Fulvio ne comprend pas le milieu socialiste local, est raillé pour son accent du sud, ou pour son manque de connaissances politiques. Dans le même temps, il commence à fréquenter Gianmarco Sorella, un penseur alternatif du socialisme, ostracisé de ce dernier, proche des idées syndicalistes, qui voit dans la violence et l'illégalité révolutionnaire un moyen d'empêcher la dilution des idées ouvrières dans le système bourgeois. Sorella, qui souffre de maladies depuis de nombreuses années et qui ne croit plus à une victoire socialiste, développe une rengaine réactionnaire assimilant toute notion de progrès à une volonté bourgeoise de détruire la morale prolétarienne. Zetticci est passionné par l'homme, qui, même si isolé, malade et ouvertement dépressif, reste un penseur brillant, charismatique et mobilisateur dans sa conception de la violence comme outil politique nécessaire. Ces nouvelles logiques que Fulvio présente dans ses interventions sont rejetées violemment par l'intégralité des mouvements de Codène qui commencent à ne plus supporter la présence d'un agitateur qui critique si violemment les stratégies politiques de son propre camp idéologique. La séparation définitive avec le socialisme se déroulera à la sortie d'un bar où il avait violemment critiqué la compromission des milieux socialistes avec l'ordre bourgeois, il est agressé par cinq militants qui le laisseront geindre au sol, le visage tuméfié et un bras cassé. Il passera plusieurs semaines à l’hôpital à la suite de cette agression. Cet événement marque la coupure franche entre Zetticci et le socialisme. Il l'évoquera dans ses mémoires comme la naissance du fascisme révolutionnaire.

 Séparé du socialisme et particulièrement revanchard envers ce dernier, Zetticci, accompagné de plusieurs acolytes qui l'ont rejoint, souvent étudiants comme lui ou désabusés par ce qu'ils estiment être les errements du socialisme, se lance dans la fondation d'un mouvement alternatif reprenant les idées de Sorella, alors mourant. Le socialisme, et davantage même le socialiste en tant qu'individu, sont d’emblée présentés comme des ennemis naturels de ce nouveau courant alternatif, qui se manifeste et se vend comme une force de défense du "peuple" contre les déviances de la bourgeoisie moderne et des socialistes. L'origine du terme fascisme, qui deviendra le nom du courant, de l'organisation et de l'idéologie développée par Zetticci, est trouble, si ce dernier revendique la paternité du terme, des auteurs indiquent qu'il s'agit d'une expression qui aurait pu être volée à d'autres mouvements moins importants à Fiumiglia ou au travers du monde latin. Il semble avoir été formé autour d'un jeu de mots reposant sur la polysémie de fasci, un terme qui désigne à la fois une appellation originellement péjorative pour désigner les groupuscules politiques violents, mais également une arme figurative de l'Empire Rhémien qui symbolisait la puissance du pouvoir. Libéré du carcan idéologique socialiste qu'il avait eu tant de mal à mobiliser à Codène, Zetticci donne des discours enflammés, lyriques et débordant d'appels à l'action dans tous les coins de la ville. Il peine à rallier d'anciens socialistes à sa cause, la plupart connaissant sa réputation particulièrement négative, mais il trouve un écho, qui le surprendra lui-même, auprès du prolétariat religieux et d'anciens royalistes, attirés par la contraction des idées anti-bourgeoises et de l'appel à la sauvegarde des traditions. En quelques mois, Zetticci parvient à mobiliser une centaine d’individus autour de lui, dans un groupuscule qu'il nomme Fasci Revoluzionari. Très vite, le groupe est mobilisé au harcèlement et à la violence contre les militants socialistes, aux actions virulentes publiques destinées à le faire connaître, et à la propagande politique plus classique, notamment au sein des milieux ouvriers, avec peu de succès, mais également, avec une réussite plus élevée, chez les étudiants et les travailleurs peu qualifiés venus du sud. Fulvio terminera rapidement ses études de droit, obtenant une maîtrise en seulement deux ans, mais son intérêt n'est plus là, il voit l'université comme un lieu de recrutement plutôt que comme un espace d’apprentissage, il travaille brièvement comme assistant dans un cabinet d'avocats mais ses salaires lui servent principalement à financer le mouvement. Selon lui, il est indispensable d’organiser et de professionnaliser le fascisme, tout en le tenant éloigné de l'appareil bourgeois. L'un de ses premiers et principaux points de désaccord avec Sorella est sur la question du mythe de prise de pouvoir à lier au mouvement, pour ce dernier c'est la grève générale qui permet de s’agréger les masses, Zetticci, qui a conscience de sa faible influence sur les ouvriers qualifiés, la remplace par le renversement violent, sous toutes ses formes : putsch, coup d'État, révolution..., mené par une élite militante. Dès lors, il faut militariser le fascisme pour le rendre capable de s'opposer de manière frontale à l’État bourgeois et aux organisations socialistes. Les Fasci Revoluzionari multiplient les camps d'entraînement, les préparations aux affrontements urbains et orientent également les recrutements vers des militants d'extrême droite, anciennement royalistes, déjà préparés à la clandestinité, capables de former les plus jeunes recrues aux méthodes nécessaires. La base du fascisme se construit donc sur un patchwork épars regroupant à la fois des individus intéressés par la pensée alternative de Zetticci, des lazzaroni émigrés du sud de l'île rejetés par les milieux socialistes classiques, des étudiants bourgeois haïssant leur propre classe et en recherche identitaire, des réactionnaires catholans intéressés par la défense de la tradition et l'anti-socialisme, et des anciens militants royalistes d'extrême droite, habitués à la clandestinité, se reconnaissant dans la lutte contre la bourgeoisie et l’État. L'idéologie en elle-même n'a, pour la plupart, pas forcément d'importance dans leurs adhésions, Zetticci affirmera de toute façon toujours que l'idéologie doit être un outil pour la prise de pouvoir, pas un obstacle ou un poids ; si elle doit être modifiée ou mise de côté de façon pragmatique pour faciliter les objectifs du mouvement, cela doit être fait. Les seules constantes de Zetticci seront l'anti-socialisme, la lutte contre l’État bourgeois, et surtout la violence.

 À l'aube de 1920, alors que son mouvement prend de l'ampleur, Zetticci prend conscience de la nécessité de bâtir un mythe guerrier et viril pour porter l'idéal de son parti. De plus, l'oppression étatique est plus féroce qu'il ne le pensait ; à cette période, un certain nombre de ses militants importants sont emprisonnés. Zetticci lui-même passa 8 mois en prison en 1918, et il semble évident que les formations n'ont pas été assez poussées pour préparer les Fasci Revoluzionari à la clandestinité et à l'insoumission face à l'État. À la même période, les volontaires fiumigliens s'engageant au Grand Kah se multiplièrent, souvent issus des milieux catholans réactionnaires. Ils partirent lutter, lors des guerres de Réactions, aux côtés des guérilleros monarchistes contre les socialistes révolutionnaires. Zetticci, qui ne portait jusque-là que peu d'importance à ce long conflit lointain, y voit désormais l'opportunité de former son mouvement aux combats en conditions réelles, tout en récupérant une partie de la droite catholane, et ce en construisant une mystique guerrière autour de son mouvement en combattant ses ennemis jurés : les socialistes. Ainsi, dès la fin de l'année 1920, on décompte 164 membres des Fasci Revoluzionari sur le sol kah-tanais. En 1923, Zetticci décide de passer à la vitesse supérieure : il se rend lui-même sur les lieux, où il prend les armes et fonde, avec l'accord des réactionnaires locaux, sa propre unité de combat, autonome et ne répondant qu'à son seul commandement. La jungle kah-tanaise deviendra rapidement le laboratoire de la violence fasciste. L'Unità Paolo Grassi, du nom d'un militant fasciste tué par un socialiste en 1919, sera une véritable colonne infernale destinée à terroriser les combattants et les populations kah-tanaises. L'autonomie de l'UPG et sa réputation attireront des individus non fascistes qui seront embrigadés dans la folie terroriste qu'impose Zetticci à ses soldats. Les viols, massacres, enlèvements, incendies, pillages et autres crimes de guerre sont laissés impunis et font presque partie intégrante de la stratégie de terreur souhaitée par l'élite fasciste aux commandes. Zetticci ira plusieurs fois à l'encontre de certains de ses subordonnés qui souhaitaient intégrer une forme de discipline militaire classique dans les rangs de l'Unità Paolo Grassi. À part l'obéissance pure et complète à son leadership, les caractéristiques d'une armée de métier ne l'intéressaient pas. Le squadrisme qui caractérisait l'UPG n'était pas un état de fait, mais une stratégie voulue et encouragée par volonté stratégique. Très rapidement, l'UPG se détourne des intérêts militaires de ses alliés locaux. Pour Zetticci, la guerre n'est plus qu'une longue formation au squadrisme et aux méthodes de terreur, qu'il compte bien faire revenir à Fiumiglia après la guerre. La violence aveugle, incontrôlée et hasardeuse, qui caractérisait aussi bien les Fasci Revoluzionari que Zetticci lui-même, se transforme, au fil des exactions et des observations tirées de ces dernières, en une violence plus cruelle, mais également plus contrôlée, théorisée et fonctionnelle. Il ne s'agit plus d'être agressif pour être agressif ou pour se sentir contre le système : la violence a un but, une finalité, quelque chose qui doit justifier des pratiques aussi barbares que le massacre, le viol ou la torture. De fait, la terreur, qui était auparavant une conséquence de la violence, en devient maintenant l'objectif. Pour Zetticci, qui paraphrase grossièrement les travaux de Sorella, désormais décédé, la terreur est un mythe, aussi bien chez celui qui l'impose que chez celui qui la reçoit : le premier y voit sa capacité à réduire son adversaire à une masse de peur, à l'empêcher d'exercer sa propre violence, tandis que le second la conçoit comme une pression de chaque instant, quelque chose qui le bloque dans sa pensée militante. En somme, un adversaire terrifié est un ennemi qui se tait. Au bout d'un an, des premières tensions apparaissent entre Zetticci et les factions réactionnaires kah-tanaises, qui se plaignent des exactions de l'UPG, de son non-respect des objectifs militaires et de son désintérêt général et grandissant pour la cause monarchiste, à l'exception près de la chasse aux socialistes. Zetticci, déjà satisfait de ce qu'il a accompli en un an pour son propre compte, prend acte et commence à planifier un retrait. Cependant, avant de partir, l'UPG s'accordera un baroud d'honneur sous la forme d'une expédition géante de 3 mois dans la jungle profonde, qui se transformera en un massacre en bonne et due forme dans les zones de population autochtone, que Zetticci accusera, sans forcément y croire lui-même, d'être des nids à socialistes. Finalement, en mai 1925, l'UPG se retire du Grand Kah et rentre progressivement à Fiumiglia, où elle sera incorporée complètement dans les Fasci Revoluzionari. La fin de l'UPG ne marque pas l'arrêt brusque de la participation des Fiumigliens aux guerres de Réactions, mais elles se feront désormais au sein des forces classiques ou dans d'autres bataillons internationaux. Si la relation entre Zetticci et les réactionnaires kah-tanais s'est terminée en eau de boudin, le squadrisme et les idéologies de violence qu'il aura théorisés resteront populaires, notamment chez les autres volontaires étrangers, dans des versions plus respectueuses des objectifs classiques de guerre. Des symboles et des méthodes désormais classiques du fascisme international, comme le salut rhémien ou la torture à l'huile de castor, auront également été transmis par des fascistes fiumigliens à d'autres volontaires étrangers durant ces guerres. Les crimes de l'UPG, mal documentés, restent difficiles à quantifier, mais des sources kah-tanaises évoquent des dizaines de milliers de victimes.

 De retour à Fiumiglia, Zetticci applique les techniques qu'il a observées et théorisées dans la jungle. Les premiers mois post-Grand Kah se caractérisent par une refonte totale des Fasci Revoluzionari sur un modèle squadriste. Ces dernières, qui fonctionnaient alors autour d'une conception relativement autonome, n'obéissant qu'à des ordres généraux qui étaient ensuite appliqués différemment en fonction de la formation et de la culture politique des membres chargés de la mise en place, sont remaniées. Le message est clair : toutes les sections doivent apprendre à obéir aux ordres. La hiérarchie fasciste est également remise en question en quelques mois ; les compagnons d'armes de l'UPG tirent le gros lot et obtiennent tous les postes de commandement locaux, tandis que les camarades idéologiques de Zetticci, les disciples de Sorella, sont évincés à des postes honorifiques ou à de simples tâches logistiques. Zetticci place tous ses œufs dans le panier de la prise de pouvoir violente. Dès lors, les "intellos" et les individus obéissant davantage à une idéologie qu'à un mouvement ne lui sont que d'une utilité relative. Il est persuadé qu'en se concentrant sur la mise en avant d'une idéologie ou d'un courant, comme le font les socialistes, il ouvre la voie à la mise en place de factions qui ne feront que ralentir la diffusion du fascisme, et surtout son inexorable envie de pouvoir. Cette époque marque le développement d'une équation simple qui doit rester dans tous les esprits : le fascisme, c'est Zetticci, et Zetticci, c'est le fascisme. Et pour cela, rien de mieux que de faire monter des individus plus intéressés par lui que par le fascisme. Umberto de Angelis, qui récupère à cette époque le commandement national des Fasci, avouera, de manière assez claire et sans aucune honte, n'avoir jamais lu le manifeste du fascisme. Cet homme, qui est devenu alors le second plus important dans l'appareil fasciste, a été le principal homme de main de Zetticci lors de la "Campagne du Kah". Il s'est distingué par sa loyauté, sa cruauté et son inventivité dans la mise en place de la terreur. C'est à lui que le grand leader fasciste donne la mission de transformer les Fasci Revoluzionari en un outil de déstabilisation et de violence organisé et efficace. De Angelis redessinera son organisation en nombreuses brigades, de tailles modestes, mobiles et obéissantes, capables de frapper rapidement et efficacement sur tout le territoire et de disparaître aussitôt dès que les autorités apparaissent. L'influence des combats et des expéditions punitives dans la jungle se fait particulièrement sentir dans l'organisation de ces brigades rapides d'intervention ; elles remplissent un rôle similaire. Cette nouvelle logique squadriste sera tout particulièrement déployée à l'encontre des socialistes. Dans la seule année 1926, 3 massacres de militants socialistes et des centaines d’agressions sont attribuables aux brigades mobiles des Fasci. Ces dernières prennent par surprise des groupes se réunissant pour des réunions politiques ou des discours, et attaquent principalement avec des couteaux, mais également parfois avec des armes à feu. Zetticci, malgré sa haine des socialistes et de tout gauchisme, interdira publiquement les attaques de grévistes, même de gauche. Il affirmera que le fascisme ne doit pas être l'allié de l'ordre bourgeois. Certains historiens ont analysé cela comme une réminiscence du syndicalisme de Sorella ; nous le considérerons davantage comme une posture médiatique visant à se faire mieux accepter des ouvriers. Durant la Campagne du Kah, Zetticci n'a eu aucun mal à justifier le meurtre de syndicalistes dès lors qu'ils avaient été identifiés comme ennemis politiques. La différence étant que les syndicalistes kah-tanais n'avaient aucune forme d'importance dans son accès au pouvoir, là où le ralliement de la classe prolétaire était vu comme un élément essentiel de la stabilisation du fascisme une fois au pouvoir.

 La terreur squadriste fonctionnera à plein régime pendant 3 ans, atteignant son paroxysme durant le premier trimestre de 1929. Jusque-là, l’État observait les événements avec un détachement satisfait. Le processus de massacres de socialistes et de représailles contre les fascistes ne pouvait pas mieux tomber dans une période où les démocrates-chrétiens étaient en train de finir de poser les bases du système de domination politique qui fonctionnera jusqu'à aujourd'hui. Pendant que socialistes et fascistes s'entretuaient, le PDC utilisait les réseaux historiques et puissants du clergé pour imposer une domination culturelle et politique sur une population qui avait acquis le suffrage universel masculin il y a moins de 20 ans et qui portait une confiance relativement aveugle en tout ce qui disposait du nom "chrétien". Mais en 1929, le Ministère des Affaires Nationales (aujourd'hui Intérieur), dirigé par Gabriele Staniasi, changea de stratégie. Les fascistes commençaient à devenir inquiétants et à s'en prendre à des personnalités non socialistes, notamment à l'échelon local où des figures démocrates mais également des patrons pouvaient subir des tortures et des menaces auparavant réservées aux gauchistes. Le tout nouveau Bureau de la Sécurité Nationale, l'USN, créé l'année auparavant par le Ministère, se retrouve chargé de surveiller, d'infiltrer et de documenter les agissements des Fasci Revoluzionari. Au Grand-Kah, les fascistes s'étaient préparés à la lutte armée et aux techniques squadristes, mais aucun des hauts membres de l'organisation n'était formé contre les méthodes modernes d'espionnage et de renseignement. En quelques mois, la quasi-totalité des cellules fascistes sont dévoilées aux yeux de l'USN et noyautées d'indicateurs. Tous les agissements de l'organisation sont consignés, répertoriés et documentés dans le but de construire des rapports utilisables judiciairement. Staniasi voulait un événement marquant, une erreur stratégique d'ampleur de la part des fascistes pour pouvoir leur donner le coup de grâce. Il ne dut attendre que quelques mois : en octobre 1929, un groupement relativement autonome des Fasci de Neapoli agresse puis séquestre pendant 3 jours le député démocrate-chrétien local, Giovanni Davide ; ce dernier ressort de l’événement traumatisé et tuméfié. Staniasi utilisera ses relais dans la presse pour amplifier l’événement et prononcera immédiatement l'interdiction des Fasci Revoluzionari et l'arrestation de ses membres les plus influents. Zetticci est arrêté à son domicile de Codène une dizaine de minutes seulement après la signature du décret d'interdiction. 256 chefs d'inculpation sont reconnus à l'encontre de 70 fascistes arrêtés ; Staniasi encourage la mise en place d'un procès fleuve et influe sur la nomination d'un procureur dont il est proche. Malgré cela, Zetticci sera reconnu non coupable des faits les plus graves qui lui étaient imputés, la Cour n'arrivant pas à le relier directement à la planification des actes dont il a assuré ne pas avoir eu connaissance. Il sera tout de même condamné à 15 ans de prison ferme pour "démarche factieuse", "participation à la mise en place d'un groupe terroriste", "atteinte à la sûreté de l’État" et "rébellion". 3 accusés, dont de Angelius, sont condamnés à mort dans le cas du jugement des massacres de la terreur squadriste, 21 à la détention à perpétuité, 15 aux travaux forcés et les autres à des peines de prison allant d'1 à 25 ans de prison. La faible peine de Zetticci, mise en comparaison avec le très lourd jugement de ses coaccusés, a laissé planer un doute immense sur les actions du Capo ; l'idée que ce dernier puisse avoir collaboré avec le Ministère contre une peine moins lourde reste un spectre important qui hante encore les milieux fascistes actuels. Zetticci fut emprisonné à la prison San Giovanne de Codène dans un isolement physique presque complet mais avec un confort matériel certain. Le dernier espoir révolutionnaire de Zetticci se trouvait dans la possibilité d'une contestation populaire de son enfermement, mais il comprit rapidement que le monde, et plus grave encore, le fascisme tournerait sans lui. Si son absence durant la campagne du Kah avait renforcé sa mystique guerrière, son incarcération aura surtout participé à diviser son mouvement en une galaxie de groupuscules rivaux.

 Ces 15 ans de prison seront des années de dépression lourde et constante pour un Zetticci qui comprend qu'il a raté son rêve de révolution. Sa seule forme d'occupation se trouvera dans l'écriture et la rédaction de lettres. Durant son incarcération, il publiera ses mémoires, des livres théoriques, des romans d'une qualité littéraire discutable et écrira des milliers de lettres dont nous tirons la plupart des éléments biographiques de sa vie. Même s'il n'était plus dans le train politique, il cherchait tout de même à influencer par sa pensée et ses écrits le futur du mouvement fasciste. Il encouragea la création de revues politiques fascistes auxquelles il contribuait régulièrement et participait avec des lettres aux développements théoriques et stratégiques de l'extrême droite suivant la chute des Fasci Revoluzionari. C'est à cette période que commença sa rivalité avec Vittorio Rinaldi, ce que nous aborderons plus tard. Zetticci est apparu à cette période comme une figure d'inspiration pour les nouveaux fascistes, mais ces derniers dépassaient souvent sa vision, pouvaient être en désaccord et critiquaient même parfois ouvertement ses choix stratégiques. La vision de Zetticci n'était plus le fascisme, mais simplement une de ses branches : le fascisme révolutionnaire. Quand le Movimento Sociale se forma en 1941, il reprit certes l'idéologie centrale des Fasci mais en défendant la participation aux institutions bourgeoises, ce qui provoqua la colère de Zetticci qui refusa de reconnaître le parti comme une continuation de sa pensée. Finalement, il se rabibocha avec le MS à sa sortie de prison, comprenant que cela restait le meilleur moyen d'influencer sa politique. Malgré sa libération, il ne reprit jamais vraiment la politique, se contentant de rédiger des notices peu inspirées et souvent contradictoires pour le Movimento Sociale en échange d'un salaire démesuré pour sa participation laconique. En 1958, il est poursuivi par 3 femmes pour viols ; les faits seront, comme souvent à l'époque, requalifiés en attentat à la pudeur et Zetticci ne paiera qu'une légère amende qu'il fit facturer au MS. Il vit dans les mouvements étudiants de 1968 et des années suivantes une possibilité d'un retour du fascisme via une mobilisation des masses, mais il déchanta rapidement quand les étudiants fascistes se tournèrent vers les théories de Rinaldi. Il les désavouera alors, les insultant de bourgeois. Il mourut en 1972 après une agonie de quelques jours, dans sa grande maison de Codène. Il a eu 5 femmes, dont 3 qui l'ont accusé de diverses violences avant ou après sa mort, et 7 enfants. Nous aborderons son lourd héritage politique lors d'une partie suivante.


Rinaldi, de la transgression au traditionalisme

 La tâche de réaliser une biographie compréhensible de Vittorio Rinaldi semble être d'une complexité folle. Comme nous le verrons dans les prochains paragraphes, l'homme n'était pas connu pour son ouverture personnelle et chérissait le fait d’apparaître comme une forme de mystère pour ses lecteurs, ses admirateurs mais surtout ses détracteurs. Nous nous retrouvons donc dans un cas contraire à celui de Zetticci, qui dissémina des tonnes (littéralement) de lettres au fil de ses nombreuses discussions où il abordait volontiers son passé en le magnifiant toujours pour le faire correspondre à ses envies politiques et personnelles du moment. Rinaldi était au contraire soucieux de ne rien partager de son passé ou de ses aspirations personnelles, à part quelques bribes d'informations qui tiennent souvent plus de l’anecdote que de l'explication biographique. Il y a également un manque de documentation académique assez surprenant quand on connaît l'importance et l'influence de cette personnalité historique. Parmi les explications possibles à cette carence scientifique, nous pouvons relever la nature mysticiste et ésotérique de l'argumentaire politique rinaldien, qui rend difficile la mise en place de travaux sérieux et terre à terre ; le fait que l’œuvre de Vittorio Rinaldi se compose aussi bien de peintures, de textes philosophiques, métaphysiques, lyriques que d’éditos et de manifestes politiques plus simples a également compliqué la mise en place de travaux généraux et globaux au profit d'analyses éparses divisant les productions de Rinaldi en sous-groupes ne communiquant que rarement dans les analyses qui étaient faites sur sa personne et ses travaux. À de nombreux égards, les résultantes des idées de Rinaldi, notamment au sein des groupuscules terroristes fascistes modernes, ont beaucoup plus été analysées et documentées que l'histoire et les dynamiques se cachant derrière cette idéologie. Dès lors, notre approche ne visera pas ici à répondre à toutes les questions qui restent en suspens autour de la figure étrange, mystique et passionnante de Vittorio Rinaldi, mais à fournir au lecteur une analyse et une sorte de compte-rendu des connaissances consensuelles autour de cet individu dans le but de pouvoir mieux analyser les idées qu'il a fait naître. Une de nos premières interrogations, lors de la rédaction de cette partie de l'article, s'est portée sur la nécessité même de réaliser une biographie pour comprendre les idées de Rinaldi. Ce dernier ne disait-il pas lui-même qu'il ne fallait pas analyser ses textes sous la lumière d'une considération contemporaine ou biographique, mais sous le spectre « d'un regard absolu et intemporel trouvant ses origines, non pas dans les errements de la décadence moderniste et de ses considérations individualistes, mais dans les valeurs traditionnelles et objectives de l'ordre éternel » ? Si nous aurons loisir, plus tard dans l'article, de décanter les principes du Rinaldisme et de ses considérations mystiques, nous avons cependant décidé, en tout état de cause, de maintenir une approche temporelle et scientifique afin de favoriser la compréhension de l'analyse, et surtout, de la rendre intelligible à ceux qui ne sont que peu convaincus par l'idée de la nécessité du mysticisme dans l'analyse politique. Ces derniers, dont les principaux rédacteurs de cet ouvrage font, au demeurant, entièrement partie.

 Les informations à propos de la jeunesse de Vittorio Rinaldi sont faibles et seront tirées en grande majorité de documents administratifs, de réalités généalogiques et de témoignages externes dont il est parfois difficile de tirer des analyses cohérentes et intéressantes. Andrea Francesco Emilio De Seusa Rinaldi, vrai prénom de Vittorio, naquit le 6 janvier 1907 dans le centre-ville de Modesseto. Comme son nom l'indique, le nouveau-né est descendant d'une longue lignée de la petite aristocratie, ses origines familiales se trouvent principalement dans le sud, autour de la ville portuaire d’Escoria di Savia, où une branche familiale possède, encore aujourd'hui, une grande demeure surplombant la plage. Malgré l'importance limitée de cette famille dans l'histoire politique et administrative de Fiumiglia (on n’y trouve guère que de petits commandants et des sous-intendants du trésor), la famille Rinaldi dispose d'une renommée plus grande dans le commerce maritime. Les Rinaldi ont été l'une des premières familles, à la fin du 18ᵉ siècle, à se ruer sur le marché très profitable de l'exportation du vin, l'une de leurs lignes commerciales les plus rentables était avec la Listonie, ce qui mena à la création de liens et d'amitiés avec des commerçants de ce pays. Ces liens seront renforcés en 1812 par le mariage d'un représentant des Rinaldi et d'une représentante de la famille De Seusa, grande famille bourgeoise listonienne spécialisée dans le commerce d'esclaves. C'est de cette branche De Seusa-Rinaldi qu'est tiré Andrea "Vittorio" Rinaldi. Son père Vincenzo était un négociant dans l'entreprise familiale de vente de vin, son travail consistait principalement à voyager à l'étranger pour obtenir des contrats d'exclusivité auprès de restaurants, d’hôtels ou de traiteurs. On peut supputer que le jeune Andrea ne devait pas être régulièrement au contact de son père, souvent en voyage, et dont certains témoignages dressent un portrait un peu volage et assez détaché de sa famille. Sa mère Maria, née Garrilia, venait originellement d'un milieu plus modeste, son père était fonctionnaire dans la gestion des voies ferrées. Elle a rencontré Vincenzo à 16 ans, alors que ce dernier en avait déjà 26. Nous ne savons pas grand-chose sur elle ; Rinaldi ne la mentionne jamais, à part pour mépriser sa dévotion religieuse, et les rares témoignages soulignent sa personnalité effacée et ses occupations qui s'inscrivaient dans le cadre classique de la femme au foyer : s'occuper des enfants, nettoyer la maison et s'assurer de la bonne morale religieuse de toute la famille. C'est donc dans un cadre traditionnel, propre à l’aristocratie fiumiglienne, qu'Andrea grandit. Des amis d'enfance affirment que le jeune Andrea ne disposait d'aucune des caractéristiques qui allaient être celles du futur Vittorio ; il était sage, assez bon élève sans être brillant, allait à l'église avec toute sa famille. Mais c'est également assez jeune que naît chez lui une fascination pour les arts, la littérature principalement. C'est l'un des seuls éléments de son enfance que Rinaldi évoquera avec une forme de nostalgie et dans une optique positive, à l'inverse des critiques et du pessimisme qu'il réserve au reste de sa formation sociale et intellectuelle. Il se passionne notamment pour la littérature germanique, son romantisme et son décalage avec la raison et le vécu lui plaisent tout particulièrement à une époque où la littérature fiumiglienne explore principalement des thèmes naturalistes et sociaux dans une approche mi-religieuse, mi-revendicatrice, qui lui apparaît alors dénuée de tout intérêt artistique. D'année en année, sa fascination se décale de la littérature vers la philosophie germanique, où il se familiarise avec les concepts de surhomme, de recherche de la puissance, mais également avec les premières critiques du catholanisme et de la religion chrétienne en général.

 Nous passerons assez vite sur la scolarité d'Andréa Rinaldi, ses bulletins ainsi que les témoignages disponibles de ses enseignants ne nous offrent qu'un portrait banal : un élève globalement bon, assez social mais qui se fondait régulièrement dans la masse, semblant éviter d'être au centre de l'attention. Les seuls éléments intéressants que nous pouvons disséquer de ces données sont les résultats assez impressionnants du jeune homme en littérature et dans les matières artistiques en général. Ses écrits de l'époque témoignent déjà d'une grande maturité intellectuelle et d'une capacité, presque miraculeuse à cet âge, à comprendre et faire dialoguer la pensée et les arguments des auteurs qu'il étudie. Il suivit un enseignement on ne peut plus classique pour un membre de la petite noblesse, il fréquenta des établissements privés reconnus de Modesseto, notamment pour leurs méthodes éducatives ambitieuses et novatrices, et ce jusqu'au lycée où il obtint son diplôme de finalité très facilement, avec notamment une félicitation académique dans sa spécialisation en lettres étrangères. Il semble, selon certains de ses professeurs, que le jeune diplômé comptait s'inscrire à l'université dans une section de lettres ou de philosophie pour y poursuivre et renforcer sa passion pour les arts écrits. Mais c'est bien en école d'ingénierie qu'on retrouvera Andrea Rinaldi au début de l'année suivante. Aucune explication claire et précise n'existe sur cet événement, de prime abord anecdotique, de la vie du futur écrivain. Pourtant, comme nous le verrons, il sera d'une grande importance dans la construction du personnage et du caractère de Vittorio Rinaldi. Une des explications les plus logiques, et que la plupart des biographes ont retenue, est que Vincenzo a très sûrement obligé son fils à ne pas poursuivre des études en lettres. Il faut comprendre que Vincenzo Rinaldi était un aristocrate « embourgeoisé », pour reprendre les mots de son fils, qui ne répondait pas ou plus aux idéaux de noblesse mais bien à ceux du marché, du libéralisme et surtout de l'enrichissement personnel. Il est très probable qu'il ait eu des frissons et une peur existentielle à la simple idée d'entendre son fils rejoindre une faculté de lettres ou de philosophie, d'autant plus qu'elles étaient à l'époque de véritables nids à socialistes. À l'inverse, les études d'ingénierie, qu'Andrea finira par rejoindre, étaient la porte dorée des enfants blonds des riches familles. Elles permettaient d’accéder à des emplois valorisés dans les entreprises et ce même à des postes qui ne répondaient pas du tout aux enseignements dispensés dans les cours d’ingénierie. Andrea céda probablement aux demandes de son père et valida, à contre-cœur, son inscription en école d'ingénierie. Durant ces trois ans d'études, il obtint des résultats à peine moyens qui lui permettaient de valider ses examens intermédiaires sur le fil du rasoir, parfois après des séquences de rattrapage. La réalité est qu'Andrea détestait sa formation, il l'analysa comme la « mort de la notion même d’intellect » et la résuma en une simple superposition de notions pré-apprises, inutiles et qui ne devaient surtout pas être discutées sous peine de comprendre que rien n'avait de sens, d'imagination ou de pensée. Durant son temps libre, qu'il ne passait manifestement pas à faire de l'ingénierie, il retourna à ses préoccupations favorites : l'art et la création.

 C'est dans un bar destiné aux artistes et aux amateurs de littérature que Rinaldi rencontra Gregorio Vespuccini, un artiste peintre en vogue dans les milieux avant-gardistes, il était le chef de file des gnognotiques italiens, un mouvement artistique déconstructiviste qui met en avant la spontanéité et l'iconoclasme artistique. Ce mouvement, qui mériterait un chapitre entier pour en décrypter les tenants et aboutissants, est analysé aujourd'hui comme une réaction artistique à une perte de sens perçue des civilisations et de la morale face à la violence et aux changements sociaux qui marquent, à Fiumiglia comme à l'étranger, ce début de siècle. Andrea est passionné par ce mouvement qu'il découvre aux côtés de sa tête de gondole locale, il passe des après-midis entiers à discuter avec Vespuccini et à expérimenter artistiquement avec lui. Andrea, qui n'avait alors jamais pratiqué la peinture à ce degré d'expertise, se découvre un enthousiasme pour cet art qui le sort de la monotonie de ses études. Il se concentre principalement sur la spontanéité des couleurs et des formes, une forme d'anti-sens, de croche-pied à la norme qui le ravit au plus haut point. Ses peintures lui permettent également de découvrir l'exploration du soi, de la psyché intérieure et de l'inconscience, des thèmes qu'il avait déjà entrevus chez des philosophes germaniques mais également via la psychanalyse qui se développait alors également dans cette partie de l'Eurysie. Les œuvres de Rinaldi se font remarquer dans les salons de Modesseto et de Codène, en partie parce qu'elles sont appuyées par un Vespuccini au sommet de sa gloire, mais également parce qu'elles sont esthétiquement très plaisantes à observer, avec des superpositions de couleurs sublimes que même les critiques les plus cinglantes à l’égard des gnognotiques s'accordent à remarquer positivement. C'est à cette période qu'Andrea Rinaldi devient Vittorio Rinaldi. Comme souvent, il n'y a pas d'explications officielles sur cette volonté d'adopter un nom de scène ou un alias, certains biographes évoquent une volonté de se détacher de sa famille, ce qui rentre en contradiction avec le fait d'avoir maintenu justement son nom de famille, tandis que d'autres défendent qu'il s'agissait d'une simple volonté d'adopter un prénom plus classieux et artistique pour mieux coller à ses nouvelles activités. Aux côtés d'autres artistes gnognotiques, il découvre également l'usage de substances psychotropes à usage artistique, bientôt ses œuvres deviennent des représentations claires et magnifiées de ses hallucinations éthériques. Il va, de son côté, commencer à utiliser de la drogue pour expérimenter de nouvelles conceptions philosophiques. À cette époque, une forme de fascination pour les religions et philosophies orientales se dessinait en Eurysie, notamment sous l'influence des aventures coloniales. Rinaldi est particulièrement intéressé par les thèmes d'harmonie corporelle et de concentration de l'esprit qu'il découvre dans ces œuvres exotiques qui se vendent alors comme des petits pains. Il commence à pratiquer des formes d'exercices alternatives comme le yoga ou la méditation, qu'il voit comme des moyens purs d’obtenir l’ascétisme, la perfection mentale nécessaire à tout homme équilibré.




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