Posté le : 23 jui. 2025 à 09:28:13
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Le salut et les formules d'usages échangés, les délégations se mirent en mouvement avec fluidité, comme une danse réglée et répétée. Les personnels diplomatiques et agents d’escorte se répartirent en silence dans les véhicules aux vitres teintées, sobres mais bien entretenus du cortège officiel.
Lee Min-jin monta naturellement dans la voiture aux côtés du Duc Constantin de Santre. Avec eux, un interprète et un agent du cercle de sécurité prenaient place en silence. Le moteur s’ébroua, et bientôt le convoi s’élança sur les routes qui serpentent entre les bassins de rétention, les parcs arborés et les voies rapides de la périphérie de Haesim.
Le décor filait par les vitres : lotissements modernes, serres urbaines, rizières de toit. Le ciel, quant à lui, déclinait vers le bleu, laissant peu à peu place à la lueur des lampadaires.
La conversation à bord, polie mais brève, fut celle de deux diplomates qui se découvrent — quelques remarques sur la pureté de l’air, l’élégance du hanbok ou le déroulement du voyage aérien. Rien de plus. Mais pour qui observait bien, il y avait une chose étrange : le cortège avait bifurqué, quittant la route principale menant au quartier diplomatique de Gwanghwa-dong.
Le convoi descendit vers les abords de la zone portuaire, là où les grues de chargement dessinent leur silhouette filiforme contre la lumière orangée du soir. À mesure qu’ils approchaient, on distinguait l’activité modeste mais réelle d’un entrepôt aux portes grandes ouvertes, devant lequel plusieurs silhouettes s’affairaient.
La voiture de tête ralentit. Puis s’immobilisa.
Lee Min-jin descendit la première après qu'on lui eut ouvert la portière. Elle ajusta un pli de sa tenue, puis se tourna vers le Duc, inclinant légèrement la tête.
— Pardonnez ce détour non annoncé, Excellence.
Elle attendit qu’il la rejoigne avant de reprendre, tout en marchant à ses côtés en direction de l’entrepôt.
— Il est de coutume, chez nous, qu’un hôte reçoive un présent de bienvenue. Le vôtre n’était pas d’un format que l’on peut remettre sur un tarmac… alors, nous avons préféré vous y conduire directement.
À mesure qu’ils s’approchaient, la lumière intérieure révélait des visages, des gestes, une atmosphère de calme. À l’intérieur du vaste hangar réaménagé, plusieurs zones étaient organisées de façon méthodique : sous une verrière latérale, un groupe composé de femmes âgées, d’étudiants et d’artisans tissait et nouait des bandages selon des méthodes traditionnelles à base de fibres de coton et d’écorces ; plus loin, un atelier herboriste s'affairait autour de plantes médicinales triées, séchées, puis conditionnées ; ou encore à l’arrière, une unité mobile de don du sang avait été installée, où circulaient en silence infirmiers et bénévoles.
Des caisses étiquetées attendaient leur fermeture. À l’extérieur, plusieurs containers déjà chargés étaient scellés sous la supervision d’un officier civil. L’odeur de tisane chaude et de copeaux d’écorce flottait dans l’air.
Lee Min-jin s’arrêta devant la ligne de chargement, et se tourna à nouveau vers l’ambassadeur.
— Lorsque nos diplomates ont appris ce qu’avait vécu Estham, ils ont transmis l’émotion au cercle du soin, qui l’a fait suivre aux cercles agricoles, puis aux artisans. Très vite, un réseau de volontaires s’est mobilisé.
Voici le fruit de leur initiative : un modeste convoi humanitaire, destiné aux hôpitaux de votre Empire, probablement débordés par un afflux de blessés et de malades. Il partira ce soir même.
Elle marqua une pause, puis ajouta d’un ton plus grave :
— Nous n’avons pas d'étendards à brandir, mais nous savons coudre, extraire, soigner et écouter.