11/05/2017
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Activités intérieures politiques

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Activités intérieures politiques.

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Il n'est rien de plus noble, de plus digne d'un homme que de se consacrer au service de l'État.
Palais Grayson
RP rétrospectif

Le Royaume de Teyla pouvait-il survivre à l'éternité, à l'infini, à la mort des Hommes ? C'est là la question qui hante les couloirs feutrés du Palais Grayson, les couloirs feutrés de la Résidence Faure, les couloirs feutrés du Parlement Teylais. Cette question transcende l'Homme, elle fut posée à tous les siècles, à toutes les époques dans lesquelles l'homme était présent. Quand cela n'était pas le Royaume de Teyla, c'était l'Empire Rhémien. Elle touche à l'héritage que laisseront les hommes qui ont bâti une nation, qui ont fait vivre et parfois survivre une nation. Le Royaume de Teyla pouvait-il s'effondrer lentement, subitement ? Quelles seraient les causes de cet effondrement, qu'il soit prévisible ou soudain ?

Catherine III n'arrivait pas à se sortir ces questions de son esprit depuis plusieurs semaines, plusieurs mois. D'apparence, tout allait à merveille au Royaume de Teyla. Le Gouvernement de Sa Majesté allait de l'avant, l'économie était fleurissante, le peuple n'était pas contre ses élites et sa classe dirigeante, l'armée pouvait empêcher des invasions étrangères et l'Organisation des Nations Démocratiques se portait à merveille. Mais cela était de façade, Catherine III le savait que trop bien depuis le rapport des Services de renseignement sur son bureau depuis plusieurs semaines. Le temps créait des fissures sur les Hommes et donc les nations. Elles étaient apparues sur Angel Rojas, le Premier ministre du Royaume de Teyla depuis les élections de deux mille douze. Elles étaient apparues, visibles par ceux qui cherchaient, qui savaient regarder au-delà de la force affichée en public. Nombreux sont ceux à l'avoir remarquée, peu sont ceux ayant compris les raisons intrinsèques de ses fissures.

La Loduarie. Ce mot, cette ombre persistante, avait laissé des traces invisibles, mais terribles sur l'homme qu'était Angel Rojas. Il ne faisait aucun doute, selon les renseignements, que le comportement de la Loduarie Communiste, immoral et barbare dès le début de son mandat, avait marqué à jamais l'ancien juge anti-corruption. On aurait pu croire que son ancien métier pouvait l'avoir formé à accepter deux morts de citoyens teylais et ensuite le jugement des nations qui demandaient au Royaume de Teyla de ne pas jouer un conflit, même diplomatique seulement, frontalement contre la Loduarie Communiste. Pourtant, la réalité de la Loduarie dépassait tout ce qu'il avait connu dans les tribunaux. En tant que juge, Angel Rojas avait l'habitude d'affronter les pointes de noirceur dans l'esprit humain. Mais il avait toujours eu la possibilité, même infime, de rendre la justice dans les tribunaux teylais, en ouvrant des enquêtes, en invitant les médias lors des arrestations envers les puissants.

Avec la Loduarie Communiste, on était loin de tout ça. On n'était plus dans les tribunaux, mais dans les missives et les insultes diplomatiques. On était dans la pure confrontation de deux modèles politiques et idéologiques. L'un était une démocratie libérale, l'autre était un communisme autoritaire. Lorsque la Loduarie Communiste a décidé d'assassiner deux Teylais, l'affrontement pour l'imposition d'un modèle de régime politique et le contrôle implicite de l'Eurysie de l'Ouest s'imposait aux deux nations. L'affrontement était inévitable et de la faute de la Loduarie Communiste, selon les penseurs et dirigeants teylais. Pour Angel Rojas, les corps gisants sur le sol étaient un choc. La Loduarie Communiste avait fait le choix, de ce jour-là, de la terreur à l'encontre du Royaume de Teyla.

Un choix audacieux qui n'avait pas payé sur le long terme en l'absence de véritable opération de déstabilisation du Royaume de Teyla ou de ses partenaires. Mais le choix de la Loduarie Communiste avait fonctionné sur le Premier ministre de Sa Majesté. Plus le temps passait, plus il était affecté par la situation face à la Loduarie Communiste. Il ne dormait plus, il était envahi de crises d'angoisse ou de panique lorsqu'on évoquait la Loduarie Communiste. Bien que son corps était présent lors des réunions concernant la Loduarie Communiste, son esprit était absent. Son regard pouvait rester fixé sur l'interlocuteur, son visage garder cette expression impénétrable que la presse tant louait, mais son esprit était ailleurs, piégé dans les boucles infinies de la crainte, de la peur et de l'humiliation passée. Il revoyait les photos des cadavres dans la presse loduarienne, le cri de douleur des familles des victimes.

Dans les couloirs feutrés du Palais Grayson, derrière son bureau, Catherine III pensait à tout cela. Elle relisait constamment le rapport des Services de renseignements du Royaume de Teyla et leur analyse concernant l'état de santé mentale du Premier ministre. Ils remettaient en cause la capacité d'Angel Rojas de prendre les décisions nécessaires et de diriger une crise à l'encontre de la Loduarie Communiste. Concernant les autres sujets, Angel Rojas semblait tenir bon, mais là n'était pas la question. La Loduarie Communiste était une menace, la principale menace pour la sécurité du Royaume de Teyla et de son peuple. Le Royaume de Teyla se devait de fonctionner, il n'avait pas le choix de s'arrêter pour une âme, si abîmée soit-elle. La cruauté de la situation n'échappait pas à Catherine. Elle n'avait jamais aimé Angel Rojas, mais elle l'avait nommé. Il était le vainqueur flamboyant de l'année deux mille douze et des élections législatives de la même année. Elle l'avait vu réussir économiquement, politiquement. Elle l'avait vu construire un Royaume plus puissant que jamais et prêt à assurer sa défense plus que jamais.

Mais, hélas, elle l'avait vu de plus en plus inquiet face à la Loduarie Communiste. Fort heureusement, son Premier ministre était entouré de gens compétents et d'amis. Mais la situation pouvait-elle durer ? Sa Majesté était seule face à cette question. Elle avait le pouvoir de dissoudre sans nécessité de consultation ou de réunir des conditions. C'était là, avec la nomination du Premier ministre, son seul pouvoir politique. La nomination du Premier ministre était seulement symbolique, car il venait toujours des rangs du parti vainqueur des élections, mais la dissolution de l'Assemblée nationale n'avait rien d'un geste politique neutre. Ce n'était pas une simple formalité. Une dissolution jetterait le pays dans une période d'incertitude, avec des élections anticipées qui, même si Rojas gagnait, laisseraient le Gouvernement actuel en gestion des affaires courantes. C'était un risque, alors que la Loduarie Communiste devenait de plus en plus frontale dans ses actions anti-teylaises. Quel message serait envoyé si elle utilisait cette arme ? Et si jamais Rojas gagnait, celui-ci aurait une majorité amoindrie et donc une légitimité moins importante. Peut-on prendre ce risque dans la situation actuelle ?

En ce 5 avril 2016, deux coups retentirent à la porte qui menait dans l'une des pièces les plus reculées, isolées du Palais Grayson. Catherine III était assise sur l'un des fauteuils de cette pièce qui ne correspondait pas à la grandeur d'un Palais, d'une couronne. La pièce avait beau être petite, elle n'en restait pas moins royale. Une table, dont la finesse des traits était telle qu'elle aurait rendu jaloux n'importe quel menuisier. Des livres de droit constitutionnel se retrouvaient posés dans un désordre comme si ils étaient une réponse à l'interrogation qui ne se terminait jamais de Sa Majesté. Les deux coups frappés à la porte résonnèrent de nouveau, plus insistants cette fois. Catherine III redressa légèrement le buste, posant délicatement le livre qu’elle tenait encore, "L'histoire de la Constitution, Julie Kourou", avant de répondre :

- Entrez, dit Catherine III, la voix s'élèvant pour se faire entendre.

Une silhouette se montra timidement, il s'agissait seulement d'un majordome du Palais Grayson, qui dit sur un ton calme :

- L'honorable Ministre Pierre Lore est arrivé, Votre Majesté.

- Faite le entrer, dit Catherine III.

Le majordome s’effaça sans un bruit, et la porte se referma quelques secondes, le temps d’un silence. Catherine profita de cet instant pour replacer le livre parmi les autres. Alors qu'elle était en train de se lever, la porte s'ouvrit et cette fois-ci Pierre Lore apparut aux yeux de Sa Majesté Catherine III. Elle avait entendu, par des gens de la cour, que Pierre Lore était un homme bizarre mais un homme qui semblait avoir la stature d'État. Elle l'avait déjà rencontré par le passé, pour préparer des rencontres, des traités. Elle n'avait rien eu à redire quant au comportement de Pierre Lore. Elle était de ceux qui auraient défendu Pierre Lore s'il était attaqué.

Pierre Lore, en dépit des rumeurs, se tenait avec une dignité presque austère, mais toujours avec cet œil émerveillé par la monarchie, ses symboles et ce qu'elle représentait aux yeux du ministre et de beaucoup de Teylais. Sa Majesté jeta son regard sur les bras du ministre des Affaires Étrangères. Il n'avait pas été mis au courant des raisons de cette entrevue, mais il était venu avec énormément de dossiers diplomatiques, comme pour se préparer à toutes les éventualités. Mais il ne pouvait pas se préparer à ce que Sa Majesté s'apprêtait à lui dire.

- Votre Majesté, dit-il en s’inclinant, c’est toujours, malgré mes visites passées, un honneur non altéré de me retrouver, en ces lieux, et en votre présence, dont la grâce n'a cessé d'être un modèle pour l'ensemble du Royaume.

- Je vous remercie, Monsieur le Ministre. Votre attachement pour le Royaume de Teyla, ce qu'il représente, les valeurs qu'il porte et son peuple sont connus de tous, y compris de moi. C'est la raison de votre présence, Monsieur le ministre. Je vous invite à vous asseoir à la table, si cela vous convient.

Pierre Lore ne chercha pas à contre-argumenter. Il s'assit à la table, prenant place devant la souveraine du Royaume de Teyla. Il posa ses dossiers à côté de lui. Catherine III le fixa, puis glissa lentement son regard vers les livres de droit éparpillés sur la table. Elle était là pour prendre un avis, d'un homme qu'elle pensait être au service du Royaume de Teyla et non au service de Pierre Lore. Une qualité rare. Elle devait se lancer, malgré le fait que Lore était l'ami du Premier ministre.

- Je vous ai fait venir ici, dit-elle en prenant un ton montrant la gravité de la situation, un ton qu'elle avait souvent, loin des oreilles indiscrètes et des médias, car je dois prendre un avis sur un sujet qui me préoccupe et une solution à laquelle je pense. Je compte sur votre entière discrétion une fois sorti de cette pièce, Monsieur le ministre.

Elle chercha de ses yeux, sur le visage de Pierre, un signe d'approbation.

Comme vous le savez, le Gouvernement de Sa Majesté réussit bien à ses missions, dirais-je même à ses devoirs. L'économie, l'Organisation des Nations Démocratiques, l'industrie de la défense, du spatial, la politique internationale, tous ces sujets sont maîtrisés par le Gouvernement de Sa Majesté, bien qu'on pourrait émettre quelques critiques, mais ce n'est pas mon rôle. Du moins, pas en dehors de l'entrevue mensuelle avec le Premier ministre. Je vais être directe. Le sujet concerne la Loduarie Communiste et je pense à la dissolution de l'Assemblée nationale.

La Loduarie. La dissolution. Deux mots qui, prononcés ensemble dans la bouche de la Reine, faisaient l'effet d'une bombe. Il comprit aussitôt que les dossiers qu'il avait ramenés n'allaient servir à rien dans cet entretien. Le visage de Pierre Lore trahissait son étonnement et la peur qui l'avait submergé. Pierre Lore comprit que la situation devait être assez grave pour que Sa Majesté pense à dissoudre alors que tout allait bien, comme l'avait signifié Catherine III, dans la politique gouvernementale.

L'explication du sujet fut longue par Sa Majesté. Sans lui donner les documents de renseignements, elle mentionna lesdits documents. Ce n'était une surprise pour personne que les renseignements veillaient à la santé mentale de ses dirigeants, dont le Premier ministre avait un pouvoir important au Royaume. Pierre Lore ne pouvait pas s'en étonner. Il ne fut pas surpris, pas autant que l'aurait cru Catherine III, sur l'état de santé d'Angel Rojas. Étant un ami de ce dernier, il avait bien observé, comme la plupart des ministres, que quelque chose avait changé en Angel. Il ne savait pas quoi avant cette discussion, mais maintenant il comprit et il s'en voulut de ne pas avoir demandé à Angel les raisons de ce qui semblait être un mal-être. Il ne se détourna pas non plus de ses responsabilités quant à la situation avec Angel Rojas. Il aurait dû être plus présent pour Angel Rojas lorsqu'il le pouvait. Sa Majesté rétorqua que Pierre Lore n'était pas au gouvernement en deux mille douze, mais qu'importe, Pierre Lore avait un sentiment de culpabilité.

Toutefois, Sa Majesté l'avait fait venir pour une raison. Prendre conseil auprès de Lore sur la situation actuelle et une potentielle dissolution...

- Défense du Royaume de Teyla, je sais bien Votre Majesté, dit Pierre Lore assit face à Catherine III,

-Je ne suis pas celle qui veut faire basculer le Royaume dans l'instabilité et dans la stupeur. Une telle décision provoquerait de la stupeur, non ? Le visage de Pierre Lore ne laissa aucun doute. Ses traits, habituellement sereins, se durcirent imperceptiblement, trahissant son avis. Plus que cela, Catherine III voyait bien que Pierre Lore pensait qu'une telle décision affaiblirait le Royaume de Teyla.

- Vous avez le pouvoir de dissoudre la chambre basse, sans nécessité de réunir des conditions ou de consultation. Mais est-ce que cela changera quelque chose ? Oui, une telle décision affaiblirait Angel Rojas, car le message envoyé par une dissolution sans explication ne pourrait être autre que "Vous estimez qu'Angel Rojas ne réunit pas les conditions, les qualités pour être Premier ministre, alors qu'il a la majorité absolue la plus large depuis cinq décennies au moins". Angel Rojas aura l'approbation du parti et, à vrai dire, la mienne, il reste mon ami. Il gagnera les élections, même s'il n'aura que la majorité relative, mais je crois qu'en l'état il gardera la majorité absolue. Elle sera moins grande, moins confortable, mais il restera Chef du Gouvernement.

- Certes, mais au regard de son état de santé, très préoccupant, peut-il encore exercer le pouvoir, Pierre ?

- Tout seul, non, mais accompagné, oui, dit fermement Pierre Lore. Le Royaume de Teyla a prévu, non pas spécifiquement cette situation, mais des situations dans lesquelles le Premier ministre en poste n'aurait pas les épaules pour gouverner. Il ne s'agit en aucun cas d'épaules ici, mais de santé. Nous ne pouvons pas jeter en pâture et en place publique un homme dont la santé mentale nous inquiète tous et toutes. Ce serait une cruauté, et cela ne ferait qu'encourager la Loduarie, leur prouvant que leurs méthodes psychologiques ont fonctionné.

La dissolution provoquerait une situation de mini-crise politique. Je m'explique...


- Je sais ce que vous allez dire, Monsieur le ministre. Le Gouvernement va gérer les affaires courantes le temps de la campagne électorale et de la nomination d'un nouveau Premier ministre. Dans une situation normale, le gouvernement sera nommé un mois et demi après la date de la dissolution. Si nous estimons que ma décision fragilisera de manière conséquente Angel Rojas sur la scène intérieure et qu'il obtient seulement une majorité relative, le délai d'un mois et demi augmente à trois mois le temps que les discussions avec le parti Les Royalistes se fassent. C'est durant cette période que le Royaume de Teyla sera le plus perméable à des attaques loduariennes. Mais permettez-moi de contrer vos probables arguments. Le Royaume de Teyla restera au sein de l'Organisation des Nations Démocratiques et aura le soutien total de l'organisation en cas de menace ou d'attaque indirecte comme directe contre le Royaume. Les déploiements de nos partenaires sont certains de rester.

De plus, notre force armée reste égale à celle de la Loduarie Communiste. Si ils attaquent, ils devront traverser les montagnes, ils subiront conséquemment plus de pertes que nous. Vous allez poser la question du maintien d'une politique cohérente à ce niveau-là. Je crois que l'élément essentiel reste que le Premier ministre a peur de passer à l'acte, a peur de la guerre, mais si la nation se retrouve en guerre, une fois la stupeur passée, alors il aura les capacités mentales pour gérer la nation et l'emmener vers la victoire. Si tel n'était pas le cas, que cela soit dans une situation d'un gouvernement transitoire ou non, je suis la cheffe des armées tout comme lui. Si j'expose la situation, alors j'aurai l'oreille de l'État-major.


- J'entends, Votre Majesté, mais cela serait détourner l'objectif de cette disposition de la constitution, dit l'homme fidèle au Royaume. L'objectif premier de cette disposition était qu'en cas de corruption du chef de l'État ou du gouvernement, l'autre partie non corrompue ait toute la légitimité pour défendre le Royaume de Teyla de cette corruption ou compromission, y compris à travers la force armée nécessaire. Le statut de chef des armées ne donne pas seulement de la légitimité auprès des armées, il en donne au peuple. Si ce détournement de l'esprit de la constitution est nécessaire, alors je m'y conformerai, mais uniquement dans un cas légitime, Votre Majesté.

Vos arguments sont pertinents sur la dissolution. Mais j'ajoute, Votre Excellence, qu'en cas de dissolution, comme j'ai eu à cœur de le dire précédemment, Angel Rojas aura de très fortes chances de l'emporter. La dissolution l'affaiblira sur le long terme. Sur la scène internationale, pour faire face à la Loduarie Communiste, ce n'est pas rassurant si Angel termine affaibli. Ce que je crains, Votre Majesté, ce n’est pas qu’Angel Rojas perde les élections. C'est qu'il les gagne dans un contexte de crise ouverte qu'il n'aura pas provoquée, mais qui l'aura déstabilisé. Un Premier ministre vainqueur, mais blessé publiquement par sa propre Souveraine, même pour des raisons légitimes et nobles, serait une proie plus facile pour les services de renseignements de la Loduarie Communiste. Elle aura une vraie accroche pour affaiblir le Royaume de Teyla à travers le Premier ministre, ce qu'elle cherche, assurément, à faire. Là, ils feront la guerre frontalement et traverseront la frontière.


- Une guerre frontale, répéta-t-elle à voix basse. Vous pensez réellement que la Loduarie Communiste se risquera à une guerre frontale ? L'élite de cette nation sait le rapport de force et l'élite de cette nation sait pertinemment, même dans la pire situation, que la Loduarie Communiste perdrait.

- Ce sera leur seule chance de tenter quelque chose... Un silence lourd s'installa, puis Pierre Lore reprit. Ils verront cela comme une opportunité, le Royaume de Teyla pourrait être divisé, selon leur analyse. Les durs du régime tenteront de forcer la main de Lorenzo pour enclencher un conflit armé. Ils profiteraient de la période de vulnérabilité maximale, ce gouvernement d'affaires courantes sans pleine autorité, pour tester nos défenses.

Angel Rojas est comme tous les ministres accompagnés par des conseillers, ses propres ministres et vous concernant la guerre dans ses décisions. Ensemble nous pouvons faire front, non pas pour le remplacer, il reste le décideur ultime, mais pour accompagner au mieux ses décisions sur la Loduarie. Nous devons lancer des plans de défense, d'évacuation de la population à la frontière. Ces plans existent mais ne sont plus à jour. La ministre de la Défense ne m'aime pas, mais je peux tenter de voir pour qu'elle lance cette réactualisation des plans. Nous préservons la face d'Angel Rojas, qui a renforcé le Royaume de Teyla. Le Royaume de Teyla doit protéger les siens qu'importe la situation, c'est mon intime conviction, Votre Majesté. Nul n'est au-dessus du Royaume et nul n'est abandonné par le Royaume. Sa faiblesse sur le dossier Loduarien, et si nécessaire sur d'autres dossiers, sera comblée par la force collective du Gouvernement.

Au sein du Mouvement Royaliste et d'Union, Rosalie Chabas s'occupe très bien des députés et s'assure à ce qu'ils soient fidèles à Rojas.


- Bien, acta fermement Sa Majesté. Elle se leva et regarda Pierre Lore tout en cherchant le livre de la constitution. Ayant compris la symbolique de ce texte pour le ministre, elle dit : Je ne vais pas dissoudre l'Assemblée nationale tant que le Gouvernement est uni et derrière Rojas sur la Loduarie. Il convient que cette unité doit venir tant des membres de son gouvernement que d'une majorité de députés, Monsieur le Ministre. Je conçois qu'Angel Rojas a servi le Royaume à sa manière et nous devons lui rendre. Je parlerai dans la semaine avec le ministère de la Défense, ne vous en faites pas, je vais faire réactualiser ces maudits plans. Quant à vous, dit-elle d'une voix timide, je vous confie le Royaume de Teyla. Faites preuve d'un dévouement ultime envers ce Royaume.

Angel Rojas reste notre Premier ministre. Il a, vous l'avez dit, bâti un Royaume puissant avec ses forces et faiblesses. Mais là où le Royaume frémit de douleur de manière trop inquiétante, là où la Loduarie Communiste tente de nous vaincre, je veux que vous et les quelques personnes de confiance que vous trouverez sur votre chemin compensiez, colmatiez les brèches. Non pas ouvertement, non pas en insultant l'autorité du Premier ministre, mais en construisant dans l'ombre un cercle de confiance qui saura aiguiller Angel Rojas dans sa plus grande tâche : celle de protéger le Royaume de Teyla face à ces menaces.

Monsieur Lore, je vous demande humblement un sacrifice invisible. Un acte d'amour qui ne saura jamais reconnu publiquement, outre ma protection envers vous.


Pierre Lore ne dit pas un mot, mais à ses yeux larmoyants, à son visage, elle sut qu'il acceptait ce sacrifice.
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L'État, c'est la continuité. Il ne meurt pas. Il doit vivre, même s'il faut pour cela tout sacrifier.
Les survivants désignés - I

L'attaque de la Principauté de Carnavale sur la capitale de l'Empire Démocratique et Parlementaire du Nord, Estham, est pour tout le Royaume de Teyla, comme pour toute l'Organisation des Nations Démocratiques, un choc qui bouleverse la société. Selon les premières estimations, plus d'un million de personnes sont mortes ou portées disparues. Il n'a fallu que quelques heures de plus et la coordination de tous les services de secours de l'Organisation des Nations Démocratiques pour que les simulations augmentent le nombre de morts estimées de plus de deux cent mille personnes. Sa Majesté et le Gouvernement de Sa Majesté regardaient avec horreur les bilans provisoires augmenter d'heure en heure. Pour l'une des premières fois de l'histoire de l'humanité, les bilans provisoires n'augmentaient pas par dizaine ou centaine de personnes mortes ou disparues, mais bien par millier de personnes mortes ou blessées.

La stupeur mêlée à la peur avait envahi les esprits du Gouvernement de Sa Majesté et aussi de Sa Majesté. Cette dernière avait, par ailleurs, quitté le pays pour le Paltoterra Fortunée, après une invitation du Doge actuel de la Sérénissime République. Une invitation qui tombait à point nommé pour tout le monde, y compris la famille royale. Son fils et héritier du Trône, Taylo Courvoisier, était resté au Royaume de Teyla pour montrer que la famille royale ne fuyait pas, bien au contraire, elle restait présente pour la population teylaise. L'opinion publique, pour une fois, ne fut pas en accord avec l'action de Catherine III, qui voyait une fuite en avant de Sa Majesté, elle qui était censée défendre le Royaume de Teyla coûte que coûte, y compris au prix de sa vie. C'était là le cœur de la survie de la monarchie teylaise.

Mais qu'importe, le Royaume de Teyla devait agir et vite pour assurer la survie du Royaume de Teyla mais aussi éviter que des nations tentent de s'immiscer dans la brèche et très certainement le vide laissé par la frappe sur Estham. Le Gouvernement, l'Empereur devenaient-ils ? La frappe, si horrifique soit-elle, avait pour elle l'efficacité. Elle frappait le cœur économique, politique et administratif du pays. Le pays avait envoyé du personnel de secours, des policiers, des militaires, des fonctionnaires, des équipements médicaux, autant qu'il pouvait à l'Empire du Nord, afin d'assurer la survie de l'État et de ses habitants. La priorité pour le Royaume de Teyla, de manière très cynique, n'était pas tant la survie des habitants que la survie de l'État, l'administration. L'Empire Démocratique et Parlementaire du Nord, éminemment membre de l'Organisation des Nations Démocratiques, ne devait en aucun cas s'écrouler, disparaître. Il avait le droit de faiblir, sous le poids du choc mental, moral, économique et politique, mais il ne pouvait pas rompre définitivement. La survie de cet État était cruciale pour la survie de tous ses habitants.

De manière assez "surprenante", les services publics et la société civile de tout l'Empire du Nord continuaient de fonctionner. Le fonctionnement n'était pas habituel et avait en lui la trace d'un choc mental important, d'une épreuve dont la dureté ferait mourir chaque Homme sous son poids. Mais les autorités locales devaient tout de même se débrouiller pour maintenir les services en fonctionnement, en vie. C'était là le rôle de l'Organisation des Nations Démocratiques et du Royaume de Teyla de donner les moyens à ces autorités locales de continuer de fonctionner autant que possible. De continuer à faire tourner l'économie, pour éviter l'appauvrissement globalisé de toute une population, qui a déjà tant souffert.

Après le choc passé, l'Empire du Nord ayant retrouvé un semblant de gouvernement et d'autorité pouvant prendre les décisions et l'assurance de la survie de l'Empereur Maximilien II, il était admis auprès de l'Empire et de tous ses partenaires de l'Organisation des Nations Démocratiques qu'il était désormais temps de venger l'Empire et faire en sorte que cette attaque ne puisse jamais être reproduite par la Principauté de Carnavale. Tout le monde l'avait compris au sein du Gouvernement de Sa Majesté, celui-ci signifiait la guerre, or pourtant aucun membre n'utilisait ce mot. Pour ce mot, si symbolique, il serait utilisé le 25 décembre lorsque l'Assemblée nationale suivie de la Chambre des Nobles votèrent la déclaration de guerre formelle à la Principauté de Carnavale.

Or, la survie de l'État Teylais comptait tout autant que la survie de l'État Nordiste, voire plus, si les dirigeants teylais étaient honnêtes en public. Il devait survivre pour ne pas laisser toute une population d'Eurysie de l'Ouest sans boussole, sans autorité qu'on pouvait écouter. Que serait la réaction de la population teylaise s'il n'y avait plus d'administration, de gouvernement, de souveraine ? Le Gouvernement de Sa Majesté avait en partie la réponse avec l'effondrement de la Loduarie Communiste. Il avait su réagir avec promptitude et sérieux, mais cela serait-il le cas de tous les voisins du Royaume de Teyla, si ce dernier venait à s'effondrer tout aussi subitement ? Tout l'appareil d'État fut mis en route pour assurer la survie du Royaume de Teyla et de son peuple. Le Royaume de Teyla est une machine qui ne doit pas s'arrêter, qui ne peut pas s'arrêter, avait dit un inconnu un jour.

Alors que Catherine III était en visite officielle au Paltoterra, dont les raisons et la durée extrêmement longue ne trompait personne, sauf les plus naïfs ou ceux ayant besoin d'être rassurés, le Prince de Gèvre, Taylor Courvoisier, était resté à Manticore. Dès le premier jour, le régent du Royaume de Teyla en l'absence de Sa Majesté sur le territoire, se démarqua de sa mère. Là où sa mère était discrète, restait dans l'ombre du Palais Grayson et du Gouvernement, Taylor se montra à l'opinion publique à la tâche. Ce jeune homme, qui avait fait récemment son service militaire, pouvait aider de ses mains et comptait bien le faire. Les habituels discours de Catherine III remplis de métaphores, d'envolées lyriques étaient effacés par la franchise de Taylor.

Le silence est parfois plus assourdissant que le fracas des bombes. Depuis des jours, ce silence lourd de chagrin, de colère et d'une incompréhension glaçante pèse sur nos cœurs. Le silence des millions de voix éteintes à Estham. Le silence des familles brisées, des espoirs anéantis.

[...]

Permettez-moi de vous dire cela. Je suis comme vous, j'ai peur. Mais cette peur ne m'ordonne pas de fuir face au danger potentiel. Elle me dicte de rester avec vous, de construire avec vous une réponse forte, une réponse montrant notre unité. Je suis Teylais, comme vous, et j'ai espoir de voir mon peuple, ma nation s'élever comme elle l'a fait tant de fois par le passé, dans des moments tout aussi tragiques. Ma place est ici, nulle part ailleurs. Au milieu de vous et avec vous. Pas seulement à Manticore, mais partout à Teyla. J'ai fait mon service militaire pour servir ce pays. Je suis le fils de Teyla, et je ne fuirai pas le danger qui menace notre nation.

[...]

J'adresse toute ma confiance au Gouvernement de Sa Majesté d'Angel Rojas pour réussir à surmonter l'épreuve commencée par la Principauté de Carnavale. Ce gouvernement saura répondre aux besoins, aux attentes, etc.

Pour le Gouvernement de Sa Majesté, sa tâche ne s'arrêtait pas à des discours pour rassurer la population, calmer la panique et les scènes de heurts au sein du Royaume de Teyla et notamment dans les grandes villes du pays. Non, la continuité du Royaume de Teyla demandait plus. Elle demandait, si ce n'est la survie de ses membres, le remplacement, rapidement, des plus hautes fonctions de l'État, si celles-ci venaient à périr subitement et en même temps, que cela soit dans une attaque chimique ou biologique. Il revenait au Gouvernement de Sa Majesté de s'assurer que si tous les hauts fonctionnaires venaient à succomber en une fois et de manière commune, que ces hommes et femmes qui ont servi et servent le Royaume de Teyla soient remplacés dans les plus brefs délais par des personnes compétentes et ayant connaissance des dossiers les plus importants.

Le Gouvernement de Sa Majesté s'était réuni, soit en présentiel ou à distance, selon les obligations de chaque ministre et pour des raisons de sécurité, tous les ministres ne pouvaient plus être tous présents aux réunions en présentiel, sauf durant le Conseil des ministres, durant la durée des hostilités avec la Principauté de Carnavale. Durant ces réunions, on y prenait les décisions les plus importantes pour le Royaume de Teyla depuis au moins un siècle, même deux, pour l'avenir du Royaume de Teyla. Le Gouvernement de Sa Majesté devait faire face à l'urgence de la situation et se préparer autant que possible à une attaque chimique sur son territoire. Alors que les idées de décret s'enchaînaient comme rarement, un membre du gouvernement, Sandrine Couturier, la ministre de l'Économie et seconde dans l'ordre protocolaire, eut l'idée de désigner ou suggérer des survivants désignés, dans les postes les plus importants pour la haute administration, qui seraient au courant des dossiers et qui pourraient ainsi prendre leur fonction, si plusieurs personnes de la haute administration venaient à succomber de manière imprévue et dans un laps de temps très court.

Cette idée germa dans l'esprit de tout le gouvernement assez rapidement face à l'ampleur des conséquences de l'attaque sur la capitale de l'Empire du Nord. L'administration du Royaume de Teyla ne pouvait pas s'arrêter du jour au lendemain, sous peine de voir le pays succomber, l'économie s'arrêter, les services publics s'interrompre, la sécurité intérieure être compromise, l'approvisionnement en biens essentiels cesser, et le chaos s'installer à travers le pays. Cette vision apocalyptique était ce que le Gouvernement de Sa Majesté cherchait à tout prix à éviter.

L'idée de Sandrine Couturier, bien que pragmatique, soulevait des questions morales et démocratiques. Est-ce démocratique que le Gouvernement, bien qu'ayant des pouvoirs exceptionnels, construise dans l'ombre un gouvernement, une haute administration fantôme, dont les membres étaient prêts à prendre la place des morts ? Ce geste était-il moral ? Comment s'assurer que les survivants désignés aient une connaissance poussée des dossiers sans compromettre la sécurité nationale ? Comment maintenir le secret sur l'identité des personnes et de cette procédure ? Les ministres étaient chargés d'établir une liste concernant les postes liés à leurs ministères et de proposer la liste des survivants désignés au Premier ministre. C'est le chef de Gouvernement, le plus haut personnage politique du Royaume de Teyla, qui allait devoir trancher chaque nom, tout seul ou entouré de ses conseillers. La tâche n'était pas commune, c'était une première dans l'histoire du Royaume de Teyla.

Angel Rojas ressentit le poids de cette prérogative unique. Ce n'était pas seulement une question de liste de noms. Ce n'était pas simplement une liste de noms. C'était une réponse inévitable face à une horreur évitable, face à des piles de cadavres. Il n'imaginait pas la vie à Estham désormais. Il la voyait décrite par ses conseillers, des ministres, des députés, ses amis, des diplomates de l'Empire du Nord chaque jour. Cela ne devait pas arriver au Royaume de Teyla et si tel était le cas, il devait être préparé à faire face, à se relever. Il revenait au Gouvernement de Sa Majesté et à celui qui dirigeait le gouvernement, donc lui, de s'assurer de cela. C'était un poids énorme, mais grâce aux épreuves vécues lors de la confrontation indirecte avec la Loduarie Communiste, il y était préparé et son gouvernement aussi.

Les pouvoirs de nomination n'étaient pas changés et les règles de nomination ne changeaient pas de cette logique, sauf concernant les pouvoirs de nomination du Premier ministre qui devaient nécessiter un vote à l'Assemblée nationale. Ici, le vote devenait seulement consultatif, durant la période des pouvoirs exceptionnels. Les listes devenaient des suggestions aux personnes ayant les pouvoirs de nomination plutôt qu'un ordre. Sauf peut-être pour le Premier ministre qui avait un pouvoir de nomination important au sein du Royaume de Teyla, normalement contrebalancé par la nécessité de vote pour les trois quarts des nominations. Si cette question était centrale, c'est que le gouvernement s'inquiétait de voir le pouvoir basculer dans une pratique du pouvoir autoritaire. L'état d'exception, la situation exceptionnelle et la peur renforçaient cette impression et la volonté de freiner toute concentration de pouvoir trop importante.

Alors cet homme fit une liste de noms finaux qu'il garda pour lui et l'envoya à son Secrétaire particulier. Le Gouvernement de Sa Majesté allait contacter chacun des noms de la liste et les informer de la situation et leur demander leur accord pour servir, peut-être prochainement, le Royaume de Teyla. Il envoya cette liste de noms à son potentiel successeur, une liste sans nom, qui resterait sur son bureau et dans un disque dur externe pouvant être branché sur un ordinateur. Une autre lettre comportant la liste de noms fut directement envoyée à Sa Majesté Catherine III. Cette dernière lettre fut envoyée directement. La machine était lancée...
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L'État, c'est la continuité. Il ne meurt pas. Il doit vivre, même s'il faut pour cela tout sacrifier.
Les survivants désignés - II

À mon Successeur,

Si jamais cette lettre arrive entre vos mains, sous vos yeux, que cela soit dans deux jours ou quatre mois, alors cela veut dire que le Royaume de Teyla, la nation que nous avons à cœur de défendre, a subi l'une des plus grandes catastrophes du monde et de son histoire. Mon cœur et mon esprit se serrent à l'écriture de ces mots, qui déchirent mon être au plus profond de moi. Si vous lisez ceci, cela signifie que la menace que nous redoutions, depuis la catastrophe d'Estham, et face à laquelle nous avons lutté de toutes nos forces avec nos partenaires de l'Organisation des Nations Démocratiques, a frappé le Royaume de Teyla. Où cela ? Je ne peux le prédire, mais j'aime à croire que la barbarie frappera toujours là où il y a le plus de monde, à savoir Manticore et sa région du même nom.

Si vous lisez ceci, cela veut dire que je suis mort, que j'ai eu la plus noble et honorable des morts : mourir tout en servant le Royaume de Teyla, la nation qui m'a vu naître. Mais, si un homme abattu par les horreurs se passant toujours à l'heure où vous lirez ces lignes vous a donné cette lettre, ou que vous l'avez trouvée sur mon bureau, s'il est toujours en état, cela veut dire que je ne suis pas le seul mort. En outre, cela voudra dire que plusieurs membres de la haute administration et que tout le gouvernement de Sa Majesté, ou plus de soixante pour cent de celui-ci, se retrouvent disparus, morts, ne pouvant plus répondre à leur devoir, non pas par volonté, mais par la force de l'horreur et de ses soldats.

Mais le Royaume de Teyla ne doit pas s'effondrer. Il ne peut pas s'effondrer. Chaque seconde qui s'écoule est un instant de plus où le chaos s'installe, où les autorités du Royaume de Teyla auront du mal à reprendre le contrôle sur la situation. Vous vous sentez sûrement dépassé par les événements, pas à la hauteur des événements. Cela est normal et le Gouvernement de Sa Majesté que je dirige a pris les dispositions afin que ce sentiment soit le moins pénalisant pour le Royaume de Teyla et son peuple, et plus encore que vous n'ayez pas à vous retrouver avec un tel sentiment en permanence.

Je ne peux savoir si vous étiez au courant de ce projet, mais le Gouvernement de Sa Majesté, mené par moi, a bâti une liste de "survivants désignés" pour faire face à une telle situation. C'est-à-dire si une attaque venait à souffler d'un seul coup les plus hauts postes de la haute administration, nécessaires au bon fonctionnement de l'administration entière, Votre Excellence. En outre, cette liste de noms n'est qu'une suggestion afin de préparer l'urgence de la situation. Afin de préparer au mieux cette situation d'urgence, que je me permets d'appeler catastrophique, lesdits survivants désignés, depuis la création de cette liste et son adoption en interne, ont été mis dans le secret défense. Plus encore, ils ont reçu les mêmes documents que les ministres officiels ou les fonctionnaires et directeurs d'agences, d'entités comme la Police Royale, afin de préparer au mieux leur potentielle prise de fonction. En effet, l'urgence requiert une capacité opérationnelle immédiate. Il n'y aura pas de temps pour l'apprentissage, pour la prise en main des dossiers, pour se familiariser avec les rouages de l'État. Ceux que nous avons désignés sont prêts à agir, à prendre les décisions vitales dès l'instant où ils seront appelés.

Ces survivants désignés suivent chaque jour des protocoles de sécurité stricts. Dans la liste, en annexe de cette lettre qui vous est adressée, vous retrouvez les fameux noms et la ville ou le village dans lequel ils seront pour l'entièreté de la durée du conflit militaire avec la Principauté de Carnavale. Deux numéros de téléphones se trouveront sur l'annexe. Si vous voulez enclencher le "Plan Cellier", c'est-à-dire la sécurisation des survivants désignés, car il n'échappera à personne que ces personnes continueront autant que possible leur vie quotidienne. Nous restons une terre de liberté. La sécurisation se passera par le garde du corps qui suit la personne, dont le téléphone s'activera. Les survivants désignés que vous activerez, au cas par cas, seront emmenés dans des endroits listés par le Gouvernement de Sa Majesté, qui feront office de substitution des organisations gouvernementales : ministères, sièges des agences ou des institutions telles que la Police Royale. Ces bâtiments de substitution seront réquisitionnés par le Gouvernement de Sa Majesté immédiatement après le déclenchement du Plan Cellier.

Votre Excellence, cher Premier ministre de Sa Majesté, il est impératif que ce protocole soit lancé dans les heures qui suivent votre nomination. Tout sera rapide, car les événements nécessiteront la rapidité pour y faire face. Chaque minute qui est laissée à passer dans l'activation du Plan Cellier aura des conséquences dévastatrices : des victimes supplémentaires dues à la désorganisation accentuée par l'absence d'un "patron" de la plupart des services publics, le mutisme des chaînes de commandement militaires face à d'éventuelles nouvelles incursions, l'interruption de l'approvisionnement en biens essentiels, l'incapacité des services d'urgence à coordonner les secours, et in fine, le plongeon du Royaume de Teyla et de sa société dans le chaos et la loi de la jungle.

Je puis vous donner un excellent conseil, à savoir suivre les conseils de Pierre Lore, si celui-ci survit. Pour le Royaume de Teyla, j'espère qu'il survivra, Votre Excellence. Je n'oublie pas qu'il est un excellent ami, mais aussi un excellent conseiller diplomatique et politique, bien qu'il se désintéresse de la politique. N'écoutez pas les rumeurs le concernant ou encore les ragots, ils ne sont pas importants. Seul le Royaume de Teyla importera.

Vous aurez à pleurer les morts du Royaume de Teyla, Votre Excellence. Des milliers, peut-être des millions, mais j'espère avoir pris les bonnes dispositions pour que cela n'arrive pas. Parmi ces morts, il y aura sans doute, malheureusement, des visages qui vous seront familiers, des voix qui vous auront attendri, des esprits qui vous auront aimé, et je vous offre d'ores et déjà mes plus sincères condoléances. Mais le pouvoir sera cruel. Il vous demandera, à raison, je le crains, Votre Excellence, d'attendre pour pleurer la mort de vos proches ou de le faire rapidement face à l'urgence de la situation.

Servez-vous de l'amour de nos compatriotes, des fonctionnaires et des soldats qui vous entourent pour trouver cette force nécessaire, pour prendre les bonnes décisions, vous entourer des bonnes personnes afin de constituer une équipe gouvernementale faisant l'honneur du Royaume de Teyla qu'importe le contexte. Ayez conscience que l'urgence ne sera pas uniquement sur le plan sécuritaire et sanitaire, elle sera aussi politique. La démocratie et les valeurs du Royaume de Teyla ne sont pas négociables et je sais que votre nomination est, en partie, due à votre capacité à défendre ces valeurs. L'extrême-droite, l'extrême-gauche, oseront tout pour atteindre le pouvoir, y compris les plus ignobles arguments dans l'espace public. Ces idéologies vont fondamentalement monter en intention de voix, imprégner l'opinion publique.

Elles profiteront de la peur, de l'incertitude, de la colère de la population, comme avec la Loduarie Communiste. Elles n'hésiteront pas à saper la confiance envers les institutions, à discréditer les forces de l'ordre, à semer le doute sur notre capacité, et celles de nos alliés, à répondre à l'attaque, à la catastrophe qui a eu lieu, si vous lisez cette lettre. Elles chercheront à diviser, à fracturer notre unité nationale, qui jusqu'ici est notre plus grande force. Combattez sur ce terrain, afin de ne pas laisser une ou des idéologies mortifères enlevant toute humanité à la population de Carnavale, gagner les esprits de la population teylaise. Nous sommes un peuple fier, mais nous avons raison d'être fier, car nos valeurs sont humaines et morales. Ne l'oubliez pas, Votre Excellence, qu'importe où vous mène votre nomination. Ainsi, votre mandat sera bon pour le Royaume et reconnu par tous comme tel.

Avec mon absolue confiance en vos capacités pour faire face à cette épreuve et les épreuves qui se dresseront devant vous.

Fait à Manticore,

Angel Rojas,
Premier ministre de Teyla,
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L'État, c'est la continuité. Il ne meurt pas. Il doit vivre, même s'il faut pour cela tout sacrifier.
Les survivants désignés - III

Votre Majesté,

Lorsqu'en deux mille onze j'ai accepté d'être le candidat pour le poste de Premier ministre, afin de représenter le Mouvement Royaliste et d'Union, je m'attendais à traverser des épreuves tout au long de mon mandat, si je venais à être élu. La démocratie est exigeante envers ses dirigeants, pour le mieux, Votre Majesté, et je conçois qu'à mes débuts, j'ai pu douter d'être capable de mener la mission qui m'incombait et m'incombe toujours : servir avec honneur le Royaume de Teyla. Je sais que Votre Majesté, vous avez toujours été hésitante à mon sujet et à bien des égards, vous aviez raison sur certains dossiers. Mais, avec mon équipe gouvernementale, nous avons tout fait pour grandir le Royaume de Teyla, renforcer ses positions sur la scène internationale et assurer sa défense. Plus que cela, nous avons tout fait pour réduire la pauvreté, renforcer la démocratie.

Chaque jour, nous nous sommes efforcés de traduire nos promesses en actions concrètes, en mettant en œuvre des politiques nécessaires. Chaque jour, nous avons vu les indicateurs dans tous les domaines s'améliorer. Mais la politique, ce n'est pas que des indicateurs. Ce sont aussi des vies. J'ai la certitude que nous avons amélioré la vie des Teylais et des Teylaises. Un mandat de Premier ministre réussi est un mandat qui améliore les conditions de vie des personnes ou alors qui ajoute, renforce des droits. C'est ma conception du pouvoir et je sais que c'est aussi la vôtre, Votre Majesté. Peu de choses nous rapprochent, mais cette volonté, ancrée en nous, nous rapproche plus que tout. Ce lien, que je crois indéfectible, est le cœur même de la culture teylaise, il est le ciment qui tient le Royaume de Teyla.

Est-ce l'urgence ou la peur qui me donne une envie de franchise ? Je n'en sais rien, mon esprit est trop occupé pour réfléchir à cette question à cet instant. Quand les choses se calmeront, si elles se calment, je pourrai peut-être y apporter une réponse. Avec l'effroyable bombardement de la capitale Estham, capitale de l'Empire Démocratique et Parlementaire du Nord, un membre de l'Organisation des Nations Démocratiques n'a jamais eu à connaître des jours aussi sombres. Cependant, et malgré le fait que la menace de bombardement n'a jamais été aussi importante sur Manticore ou toute autre capitale de nos partenaires, je vois une lumière, celle de la paix après la neutralisation de la menace.

Elle émane de la résilience de l'Empire Démocratique et Parlementaire du Nord, de la conviction entière que nous avons pour les valeurs que nous portons et plus encore de l'unité qui lie les membres de l'Organisation des Nations Démocratiques. La Principauté de Carnavale se trompe quand elle nous voit comme des proies à chasser, elle se trompe quand elle croit pouvoir bombarder un peuple allié sans conséquence. Votre Majesté, soyez assurée de ma ferme volonté d'assurer la sécurité du Royaume de Teyla en toute circonstance et face à toutes les menaces. Je vous fais la promesse, sur mon honneur, que la Principauté de Carnavale, dont la menace ne fait plus aucun doute, sera neutralisée en accord avec nos partenaires de l'Organisation des Nations Démocratiques.

Face à la situation, plus qu'urgente, suite au bombardement d'Estham, dont nous pleurons les morts, et la déclaration de guerre officielle contre la Principauté de Carnavale, je vous annonce la déclaration prochaine de l'État de Guerre et de la loi martiale. Ces deux états d'exception sont nécessaires pour que les ressources nécessaires aillent vers l'effort de guerre et que la conduite de la guerre puisse être maintenue le temps nécessaire. Ces mesures drastiques, Votre Majesté, ne sont pas prises à la légère, mais sont dictées par la situation que nous traversons, qui pourrait être pire si l'arsenal chimique et balistique de la Principauté de Carnavale n'est pas détruit. Nous ne pouvons nier qu'en bombardant Estham, la Principauté de Carnavale a fait le choix éhonté de la guerre face à l'Organisation des Nations Démocratiques. La guerre, dans ces circonstances, demande la guerre et le Royaume de Teyla, sous mon mandat, répondra à cette demande, tout en respectant les vies humaines et civiles.

L'ampleur de la menace que représente l'arsenal chimique et balistique de la Principauté de Carnavale ne saurait être sous-estimée. Soyez assurée de la conviction totale de mon gouvernement pour rendre cette menace inopérante. Mon Gouvernement, Votre Majesté, sera focalisé sur cet objectif, sans oublier la vie de la nation et de ses citoyens, la vie démocratique et sa préservation face aux attaques qu'elle subira.

Fait à Manticore,

Angel Rojas,
Premier ministre de Teyla,
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