09/02/2018
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Dodécapole - Les prémices de quelque chose de plus grand...

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Dodécapole: l'éternel champ de bataille du monde fortunéen



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" Elles étaient douze, les filles de Fortuna dans le grand nord, dans ces eaux froides de la Manche Blanche que nous avions tirer du monde des barbares. Elles étaient toutes aussi belles et brillantes les unes que les autres, mais elles étaient tout autant colériques, difficiles et insoumises, un autre don que Dame Fortune nous confia. Et lorsqu'elles ne jalousent pas les étrangers, elles se battent entre elles, très souvent. Depuis le temps de la colonisation fortunéenne de la Manche Blanche, personne n'a pu unifier la Dodécapole de Fortuna de manière durable, ou autrement que de la manière la plus symbolique. Cette multitude de villes isolées a toujours été une ode à la liberté, à l'indépendance et à l'autonomie. Apamée essaya la première dans des temps anciens, sans succès. Velsna quant à elle, s'adonna à ce dessein avec légèrement plus de succès au XIIIème siècle, mais ne pu jamais y accomplir autre chose qu'une unité de façade sous la protection nous nominale de sa puissante flotte. Les manœuvres et les manigances de ces entités aboutissent toujours aux mêmes résultats: la cohabitation difficile, puis une guerre dévastatrice pour remettre les pendules à l'heure, et enfin, le calme et la reconstruction. Tel a toujours été ce cycle de création et de chute qui assure aux dodécaliotes une liberté, pour la simple raison qu'ils sont bien trop turbulents pour être domptés dans la durée. Mais les cycles finissent toujours par prendre fin...et l’équilibre de la balance finit toujours par se briser, car l'Histoire est une cruelle maîtresse qui n'aime pas les répétitions et l'immobilité.

Aujourd'hui, il me semble bien que tout soit réuni afin que la Dodécapole ne rencontre une autre de ses crises. La question n'est pas de savoir quand que de savoir pourquoi, et avec quel résultat. Retour au statut quo ou bouleversement géopolitique ? Même moi, qui ait écouté les leçons des sages: historiens, philosophes et grands orateurs de ma naissance à ce jour, je ne puis rien affirmer de ce qui arrivera.

Parmi ces douze cités, indéniablement je puis dire que l'origine des choses partira de trois de ses plus grandes filles: Volterra, Apamée et Adria, car ce sont elles qui avec Velsna, mènent les choses de la politique, et imposent leurs vues aux autres. Apamée, qui jalouse le temps où elle dominait la Dodécapole. Volterra, dont le nouveau maître est l'un des individus les plus fascinants et inquiétants de ce monde, ou Adria, qui réussira ou échouera ses efforts de pacification de cette confédération par le monopole du commerce. Velsna, elle, choisira certainement d'être spectatrice de cette délicieuse pièce de théâtre, et trouvera certainement toujours un moyen de négocier avec le vainqueur..."


Gina Di Grassi


Résumé de la Dodécapole et but de l'évènement: Bienvenue sur ce topic, qui aura pour but de mettre à disposition des joueurs un résumé permanent de tous les évènements conflictuels au sein de la Dodécapole. Pourquoi employer le terme de "conflictuel" plutôt que "guerre ouverte" ? Pour répondre à cette question, il faut bien comprendre ce qu'est la Dodécapole: une confédération lâche de cités-états bordant toutes la Manche Blanche, et dont le seul point commun est d'être regroupés au sein d'un même substrat culturel commun, qu'est celui de la culture fortunéenne. Pas de gouvernement central, des régimes politiques différents, parfois opposés, des personnalités fortes et des intérêts divergents...en Dodécapole, tout est prétexte à la recherche du conflit, ou à minima de la rivalité. Les cités se font la guerre ou la paix dans un manège incessant qui dure depuis bien longtemps. Aussi, c'est là le terrain de jeu idéal pour obtenir des gains politiques, avancer ses pions dans ces eaux turbulentes: perdre peu ou gagner peu, tout perdre ou tout gagner.


Règle numéro 1: Les choix présentés aux joueurs ont des conséquences importantes sur les affrontements.

Comme vous le comprenez, il sera donc possible d'influer sur ces luttes internes, le plus souvent sans grandes conséquences, mais qui si certaines conditions sont réunies, pourraient bien déboucher sur un conflit ouvert entre plusieurs de ses cités. Ce topic centralisera tous ces évènements.

Outre le fait de redonner à la Manche Blanche un RP intéressant, le but est également de permettre à des joueurs parfois néophytes ou en retrait des grands équilibres du monde de GK de pouvoir agir au sein de la Dodécapole avec davantage de largesses que d'habitude. Les grands affrontements prévus dans le cadre de cet évènement seront donc "semi-narratifs": ils impliqueront d'un côté le système classique des points de nuisance et de véritables effectifs, mais de l'autre, chacun de ces affrontements sera ponctués de points critiques du récit, impliquant des décisions de la part des joueurs qui détermineront des bonus ou des malus beaucoup plus importants qu'à l'accoutumée. Ces décisions seront accompagnées d'un facteur déterminant dans la lutte pour la conquête de l'hégémonie en Dodécapole: l'équilibre des puissances.



Règle numéro 2: l'équilibre des puissances

La Dodécapole est un monde en constante évolution, où les alliances ont la particularité d'être bien souvent courtes et fluctuantes. La fidélité ne se conquiert bien souvent que par les cadeaux ou la terreur, au choix, et à tendance à se perdre dans le vent dés lors qu'elle n'est plus rappelée par ceux qui l'auront contracté. Dans ce cadre, où trois cités sortent du lot pour tenter de s'approprier l'hégémonie, il ne faut pas oublier que celle ci ne pourra se concrétiser que dans le cas où toutes les autres entités, plus mineures, consentiront à la dite domination. Autrement dit, il est très peu probable de pouvoir se proclamer hégémon de la Dodécapole sans que toutes les autres cités, ou du moins une majorité d'entre elles, reconnaisse Volterra, Apamée ou Adria en tant que tel. C'est ce que l'on nomme "l'équilibre des puissances". Dés lors qu'une majorité de cités reconnaîtront l'hégémonie d'une autre, le tire d'hégémon, protecteur de la Dodécapole, celles ci pourront convoquer une réunion du Congrès de la Dodécapole, où le titre d'hégémon pourra être accordé à la cité qui obtiendra le plus de soutiens.

Dans l'état actuel des choses, l'équilibre des puissances se présente comme tel (et pourra être sujet à de grands changements à l'avenir). A noter que les cités n'ont pas toutes une voix égale, et que certaines ont davantage d'influence que d'autres, ce qui est déterminé par la taille des cercles. La couleur détermine leur allégeance actuelle. La cité qui obtiendra une majorité absolue de points en termes de facteur d'influence (sans Velsna) deviendra le nouvel hégémon de la Dodécapole.




Règle numéro 3: le facteur d'agressivité

Outre l'équilibre des puissances qui est déterminé par le facteur d'influence, chacune des trois plus grandes cités de la Dodécapole voit ses initiatives conditionnées par une "jauge d'agressivité". Plus la jauge d'agressivité sera élevée, et plus les actions d'une telle cité seront marquées par des prises de risque agressives et une acceptation de plus en plus prononcée à l'idée d'un conflit ouvert. Lorsqu'une cité voit sa jauge parvenir à dix points, il ne sera plus qu'une question de temps avant que le conflit n'éclate au grand jour...mais après tout, ce ne serait pas la première fois en Dodécapole, n'est-ce pas...

Jauges actuelles:

Apamée: 1/10
  • Gouvernement: actuellement, Patrizio Pisistrati est l'homme fort de la démocratie apaméenne. Il incarne le parti de la tempérance et de la paix. Tant qu'il fait peser son influence dans la cité, il est donc peu probable qu'elle soit à l'initiative d'une guerre ouverte...mais Pisistrati est également un homme vieux à la santé fragile...
  • Congrès de la Dodécapole: La mise en retrait de l'hégémon Adolfino Adrigola a ravivé certaines ambitions... (+)
  • Actions récentes: Néant
Volterra: 3/10
  • Gouvernement: Depuis la prise de pouvoir de Salvatore Lograno suite au déjà légendaire "braquage de Volterra", la ville a repris une politique de militarisation et commence à faire campagne pour engager des mercenaires en pagaille. Une situation qui fait peser de sérieux doutes sur la capacité au compromis et à la bonne entente du "dictateur cool" de Volterra. (++)
  • Congrès de la Dodécapole: La mise en retrait de l'hégémon Adolfino Adrigola a ravivé certaines ambitions... (+)
  • Actions récentes: Néant
Adria: 0/10
  • Gouvernement: Cela fait désormais près de dix ans depuis que Marina Moretti a été nommée doyenne des universités d'Adria. Depuis, celle ci a été bien plus intéressée par une politique de développement économique de sa cité et de grands travaux que par une politique étrangère volontariste. Pour le moment, Adria est donc remarquablement calme...mais cela pourrait rapidement changer si des opportunités se présentent.
  • Actions récentes: Néant


Règle numéro 4: le rôle de Velsna

Comme vous avez pu le voir, Velsna constitue l'un des douze membres de la Dodécapole, et c'est l'un de ses citoyens, Adolfino Agricola, qui possède le titre d'hégémon de la Dodécapole. A ce titre, l'hégmon se doit d'intervenir dans le cas où une cité de la Dodécapole est attaquée par une puissance extérieure à la confédération, et unir les cités au sein d'une défense commune. Ce rôle est donc relativement restreint dans ses attributions, bien qu'important sur le plan militaire, et en être le détenteur est avant tout une question de prestige, ce que tous recherchent. Cependant, si le sénateur Aricola se donne corps et âme dans le cadre de sa fonction, celui-ci a récemment fait savoir qu'il ne serait pas candidat à sa propre succession, ce qui met la plus honorée fille de Fortuna dans un certain embarras. Bien que le Sénat paraît tenter d'imposer à nouveau la nomination de l'un de ses citoyens à la lourde tâche de coordonner cette armée d'enfants turbulents, les velsniens ne ferment pas la porte à ce qu'une autre cité fournisse le nouvel hégémon à la Dodécapole, et se place pour l'instant dans une positon de stricte neutralité vis à vis des velléités communes d'Apamée, de Volterra ou d'Adria.

En principe donc, Velsna ne devrait pas intervenir dans le cadre de cette lutte interne, et se conformer au choix de la majorité (hrp: également dans un soucis d'équité vis à vis des participants). CEPENDANT, cela ne veut en aucun cas dire qu'elle restera inactive si ses intérêts sont directement menacés, et si d'aventure l'une des trois autres cités aux prises dans cette lutte bénéficierait de ses faveurs, il se pourrait bien qu'elle fasse usage de son influence pour faire pencher la balance.

Outre ces "petits coups de pouce" que Velsna pourrait apporter à un tel ou un tel, en sa qualité d'hégémon de la Dodécapole, la cité velsnienne se réserve le droit d'intervenir en cas d'agression manifeste de l'une des cités dodécaliotes par une puissance étrangère.



Règle numéro 5: le rôle de l'hégémon

L'hégémon est considéré comme le seul magistrat de la Dodécapole à l'échelle fédérale. En absence d'une quelconque autorité étatique, son rôle théorique est l'organisation d'une réponse défensive à une invasion ou attaque étrangère. Dans cette éventualité, toutes les cités de la Dodécapole doivent céder leur commandement à titre temporaire à l'hégémon. Cela, c'est dans la théorie, car il faut noter dans les faits que la force de mobilisation d'un hégémon est davantage liée à la force de sa personnalité et son influence politique préalable sur les cités dodécaliotes. En l'état actuel des choses, Adolfino Agricola, le sénateur velsnien est en position de faiblesse vis à vis de ces dernières, et il n'est pas certain que celles ci se rangent systématiquement de son côté dans cette éventualité. Le statut d'hégémon

L'accès à la position hégémon est l'objectif de la plupart des forces politiques internes à la Dodécapole, d'une manière ou d'une autre, et il est fort probable que l'accès de tel acteur politique à cette fonction en remplacement d'Adolfino Agricola soit déterminé dans la recomposition de son équilibre interne. De plus, la conquête de cette fonction donnera accès à la flotte fédérale de la Dodécapole à son possesseur.

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Le congrès dodécaliote d'Avril 2017
Au pied du mur: la marche arrière d'Adolfino Agricola


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Toujours du mouvement, toujours de l'agitation, tel était probablement le mantra de ce petit groupe de micros-états qui formaient la Dodécapole. Ce n'était pas pour rien que jamais cet ensemble n'avait constitué autre chose que cette fédération disparaitre, et non un État structuré. En théorie, ce territoire baptisé la Dodécapole n'existait que sur le papier, et n'était l'appellation que d'une région culturelle davantage qu'une nation. On ne prêtait à Apamée et à Volterra le seul point commun d'être des entités fortunéennes de taille comparable. Quant à Velsna, elle avait depuis bien longtemps dépassée le stade de la Dodécapole, et exerçait sa puissance en son nom propre. C'était là d'ailleurs le vœu de la plupart de ces petites nations, mais un vœu que personne d'autre n'avait su accomplir: conserver son indépendance et son identité propre dans le cadre de ce monde fait d’États-nations et autre régimes barbares qui s'étaient trouvés chacun pour lui, des valeurs fédératrices rassemblant de gré ou de force des millions d'individus. On est bien loin des 300 000 habitants d'Apamée, ou des 200 000 de Volterra. Au delà de leurs campagnes respectives, elles ne sont rien de plus que des villes libres, des petits poissons dans un océan de requins.

Pour survivre, elles ont donc dû se mettre d'accord sur un aspect fondamental de leur existence: une défense commune , qui s'active le temps de la durée d'une menace, avant de s'effacer de nouveau au profit des vieilles rivalités qui démarrent de nouveau bien volontiers dés que l'orage passe. L'hégémon de la Dodécapole, tel est ce titre qui est tant convoité, mais dont une seul cité peut être détentrice en même temps. Au delà de son statut de gardien, il y a tout le prestige qui va avec, et qui accorde le respect et à la crédibilité à son détenteur. Indéniablement, cette fonction figure dans la liste des rancœurs qu'entretiennent chacune des entités de la Dodécapole.

Jusqu'il y a peu, il était acquis depuis le XIIIème siècle que la charge devait revenir à un citoyen de la cité la plus riche et la plus puissante de la confédération, en l’occurrence Velsna, qui a monopolisé cette fonction depuis les guerres celtiques, non sans quelques interludes où la charge a pu être transmise à des apaméens ou des volterrans à de rares occasions. Le plus souvent, ces occasions se présentent dés lors que la cité velsnienne a le regard braqué ailleurs, ou qu'elle fait face à ses propres problèmes qui l'empêchent de présenter une relève digne de confiance aux yeux des autres membres de la Confédération...mais il semblerait que cette fois ci, le problème soit d'une nature bien plus personnelle et relève de l'agenda politique même de l'individu qui soit actuellement honoré de sa charge.

A bien des égards, Adolfino Agricola est un sénateur velsnien des plus prometteurs et brillants, de manière indéniable. Il est ambitieux, organisé et pointilleux. En théorie, ce serait là des grandes qualités pour quiconque désire se verser dans l'art de la bonne administration. Qui plus est, Agricola est le détenteur d'un élément indispensable aux ambitions politiques d'un sénateur velsnien sur le point de connaître l'apogée de son influence: le prestige du fait militaire. C'est qu'Agricola n'était pas un simple arriviste de bonne famille, dont l'élection était le fait du père de son père: il avait mérité son élection, de par son ralliement à Di Grassi durant la Guerre civile des Triumvirs, de lui et de son frère, de par ses faits de guerre à Hippo Regia ou à Vatluna... Mais peut-être que l'origine du problème se trouvait précisément dans l'étendue de ses talents et de ses vertus, et qu'il estimait être beaucoup trop digne pour devoir s'accaparer le fardeau qu'était le fait d'être l'hégémon de la Dodécapole. Être hégémon était se donner beaucoup de mal pour accorder ses violons avec onze autres entités des plus mineures dans les plans de la cité sur l'eau, tout en se faisant plus d'ennemis que d'amis. Être hégémon, c'était devoir mettre de côté tous ses grands projets pour la cité velsnienne, sacrifier toutes les autres opportunités politiques qu'offraient le reste du monde fortunéen, dans la seule optique de devoir régler les problèmes des uns et des autres sans contrepartie et sans récompenses. Être hégémon, c'était devoir se satisfaire d'une voie de garage.

Adolfino Agricola le savait: il valait bien mieux que cela, et sur son bureau, il fut porté à son attention deux choix dans la poursuite de ses objectifs personnels, car oui, il avait été mis à l'épreuve par ces excellences du Sénat, qui non contents de voir Agricola soutenir le fardeau de la Dodécapole, c'était vu donner une tâche quant à elle bien plus capitale dans les plans du gouvernement communal velsnien: la charge lourde et difficile du dossier achosien. Cette Achosie, qui à côté de la Dodécapole, était la terre rêvée de l'opportunité politique dans la cité sur l'eau. Régler la crise latente entre Velsna et Achos, ce serait là comme toucher le graal du doigt au Sénat velsnien. Ce prestige, seuls quelques individus l'avaient atteint, et leur avait donné ce que tous les sénateurs velsniens recherchent: la dignitas, ce prestige immortel qui devait accompagner la richesse afin de mener à la carrière la plus accomplie qui soit.

Agricola le savait: la Dodécapole ne serait jamais sa destinée en tant qu'homme d'ambition. Aussi, sans beaucoup de surprise, il réunit comme chaque année le Congrès fédéral de la Dodécapole, qui se tint cette année en la cité velsnienne de Velcal, lieu de tant d'arbitrages et de discussions. Si d'ordinaire cette réunion, figurant dans l'après immédiat des jeux confédéraux d'Apamée était le lieu de règlement des litiges et des conflits divers, celui-là serait le lieu de son annonce: sa mise en retrait progressive jusqu'à ce que le cités dodécaliotes lui ait trouvé un successeur. Ce n'était pas une démission, loin de là car il assurerait toujours sa fonction jusqu'à son remplacement, mais cela constituait sans aucun doute le premier pas vers son retrait définitif des affaires de la Confédération. L'annonce ne surprit pas, certes, et elle ne prit pas de cours son beau monde, mais il était évident qu'elle faisait autant d'heureux que de malheureux.

Du côté de ceux qui fulminaient figurait bien entendu la doyenne des universités d'Adria, Marina Moretti, qui était probablement celle qui perdait le plus dans cette affaire. Adria avait toujours été le plus fervent soutien de l'hégémonie d'Agricola, de par sa détermination à favoriser les échanges commerciaux sans taxe entre les cités de la Dodécapole, par les efforts qu'il avait exercé afin de laisser la Dodécapole en dehors des troubles internes que connaissait Velsna. Par dessus tout, la présence d'un velsnien à l'hégémonie avait permis jusqu'alors d'éviter l’émergence de "répliques scaeliennes", avec l'apparition de ce que l'on nommait dans le monde fortunéen des "princes", ces individus sans foi ni loi qui passaient outre les institutions afin d'assouvir leurs velléités personnelles. La mise en retrait d'Agricola sonnait ainsi comme la disparition d'un verrou, libérant des énergies qu'il valait mieux canaliser. Indéniablement, l'énergie du moment était celle du nouveau protecteur de Volterra.

Celui qui trépignait sur sa chaise, qui alternativement, s'étalait de son long avant de se redresser frénétiquement au fur et à mesure du déroulé du discours du velsnien, c'était bien lui. Il avait bien compris que si il y avait bien un moment pour agir, pour sortir de l'ombre et prendre toute la lumière, c'était bien celui-là. Agricola et Lograno s'étaient déjà rencontrés à l'occasion des jeux confédéraux de Dame Fortuna, et les conclusions étaient sans équivoque: les intérêts des deux hommes étaient fondamentalement incompatibles, et finiraient forcément par se confronter. Aussi, cet appel d'air que celui que Lograno considérait comme la plus grande menace actuelle à ses projets venait de créer lui-même, sans qu'il ne fasse quoi que ce soit, lui fit dire qu'il avait bien fait de se présenter à ce congrès. Par plusieurs fois, Lograno se tourna vers Marina Moretti, lui affichant son sourire, et toutes ses dents bien blanches. Le sourire n'était pas celui d'un homme heureux, non...celui d'un homme béat.

Entre Lograno et Moretti, les délégués d'Apamée étaient quant à eux murés dans le silence. Ils n'avaient pas jubilé à l'annonce d'Agricola, tout comme ils n'avaient pas montré leur agacement. Patrizio Pisistrati, probablement l'un des hommes les plus considérés et respectés de la Dodécapole, celui qui d'ordinaire animait tant les cercles de discussion de la Démocratie apéméenne, lui également était prostré: non pas pétrifié par l'annonce, mais pensif, pensant déjà à la prochaine manœuvre qu'il fallait effectuer afin de de parer à l'indécision et au retrait d'Agricola. Durant les jeux confédéraux, il avait mis en garde l'hégémon face aux ambitions de Lograno, il pensait alors qu'il était l'homme idéal pour se dresser face à ce nouveau prince. Après tout, il était déjà réputé pour ses talents de médiateur en Achosie. Pisistrati ne le montrait pas, mais il était profondément déçu par la décision du velsnien, mais il n'avait pas d'autre chois que de composer avec. Il devrait alors s'esposer, lui et la sécurité d'Apamée, afin de contrecarrer lui même les plans de Lograno, ce qu'il n'avait pas prévu à la base. Mais quoi qu'il en soit, chez certains apaméens, cette perspective était moins mal reçue, et même, était interprétée par tous les chercheurs de gloire de la cité comme une opportunité afin de replacer leur ville, qu'ils estimaient être le centre naturel de la Dodécapole, au centre du jeu.


Le congrès se déroulait: après l'annonce d'Agricola, les non-dit commençaient à inonder la pièce, les délégués de toutes les cités se regardèrent. Ils n'étaient pas surpris, mais ils savaient très bien que leurs positions sur un possible successeur étaient en profonde contradiction. Le vote déterminant l'identité du futur hégémon n'aurait pas lieu aujourd'hui, mais les tractations avaient déjà commencées, à la seconde même où le mot "retrait" s'était échappé de la bouche de l'hégémon. Comme toujours, le congrès était accompagné d'un copieux banquet, dans lequel on faisait bien souvent mine de masque les désaccords...jusqu'à ce que ceux ci n'éclatent au troisième verre de vin. Déjà le retrait d'Agricola se faisait sentir dans les manières et les comportements de chacun, et la discorde pouvait surgir de délégués de cités qui étaient jusque là dans un retrait relatif. D'un coin de l'oeil, les deux représentants de Porto Rosso et de Nuevo Fortuna se scrutaient. Il n'était un secret pour personne que les contentieux territoriaux entre ces deux cités oligarchiques relativement mineures étaient latents depuis des décennies, voire davantage, et qu'l suffisait de conditions spécifiques pour que l'incendie reprenne sur les cendres agglutinées de tous les conflits précédents. En cause, un simple désaccord sur la propriété d'un territoire abritant des mines d'argent, et qui constituaient la base d'une prospère industrie joaillère locale.

Il aura suffit d'une réflexion à l'heure du dessert de la part du délégué de Porto Rosso, quelques mots piquant assez la fierté de l'autre intéressé pour provoquer une réaction épidermique.


"Ce verre est magnifique. Je vous suis reconnaissant de nous servir notre vin dans de l'orféverie de Porto Rosso, excellence Agricola."

" Espèce de petite merde !"


La fourchette passa juste sous le nez de l'hégémon, qui se redressa subitement de sa chaise pour séparer les deux délégués, dont l'un s'était jeté sur l'autre en renversant la moitié de ce qu'il y avait sur la table dressée. Cet acte, tout le monde en était certain, serait le premier d'une longue série, où les cités dodécaliotes allaient se défaire de leurs inhibitions. Dans un coin de la pièce, il y avait deux personnes qui observaient la scène, l'un avec le sourire, l'autre avec appréhension: Lograno et Moretti.


Effets:
- Congrès de la Dodécapole: L'annonce de la démission prochaine d'Adolfino Agricola a semé le trouble dans la Confédération. Volterra et Apamée gagnent toutes deux un point de facteur d'agressivité
- Les cités mineures de Porto Rosso et de Nueva Fortuna entrent en situation de conflit larvé.
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Activités politiques et militaires dans la Dodécapole

Avril 2017


Résumé:
- Congrès de la Dodécapole de 2017: Adolfino Agricola, hégémon de la Dodécapole, annonce son retrait progressif de sa fonction, sans en avoir prévenu les cités membres au préalable, ou même Velsna, dont il est citoyen et sénateur. Celui-i a semblé donner la priorité à la question achoso-velsnienne au sein de son parcours politique personnel. Une certaine confusion semble s'être installée parmi les cités membres, dont certaines n'avaient pas prévu de candidat potentiel pour prendre la suite du velsnien.
- Don de navires de Velsna à l'hégémon de la Dodécapole: Pour répondre aux inquiétudes suscitées par le départ prochain d'Adolfino, la cité velsnienne a fait don de huit navires à la force maritime fédérale, baptisée sous le nom de "Classis VII Dodécapolis", en échange d'un flux d'armes conséquent.
- Réarmement naval limité des flottes dodécaliotes: Devant les potentiels troubles à prévoir dans le cadre de la succession de l'hégémon actuel, certaines villes de la Dodécapole se sont lancer dans une réorganisation de leurs forces navales. On suppose qu'Apamée, Volterra et Adria ont fait main basse sur six navires, sans que l'on sache précisément qui parmi ces entités.
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RP Important (point critique du récit), ACTE I


Le combat des 500: lutte d'honneur entre Porto Rosso et Nuevo Fortuna

Par Gina Di Grassi (2017)



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"L'esprit civique est magnifique et tragique, horrible et magnifique, heureux et triste à la fois...Ce qui nous soude et nous pousse dans une direction commune peut parfois nous autoriser à envisager le pire, collectivement, et à ne pas le remettre en question pour l’intérêt du plus grand nombre. Assassiner un être humain est une honte, mais tuer 1 000 d'entre eux avec l'accord du reste du groupe, c'est cela la guerre: l'acceptation de la démonstration de violence collective légitimée par le besoin de l'ensemble. La cité est un être en lutte avec d'autres de sa trempe, une troupe de léviathans en lutte pour manger les autres. Au milieu de tout cela, nous autres, les hommes et les femmes, ne sommes rien d'autre que les outils de leur puissance, à l'instar des armes que nous tenons dans le creux de nos mains. Les vertus individuelles: la résilience, l'héroisme, le courage...sont d'autant de carburants qui servent à nous convaincre que ce que nous faisons est utile et juste. Cet aveuglement, cette folie collective...voilà ce qui s'est emparé des cités de Porto Rosso et de Nuevo Fortuna en ce beau mois de mai, tout juste trois ans après qu'une frénésie similaire se soit emparée de la cité velsnienne.

Les guerres sont des évènements qui font entrer l'Histoire dans des cycles bouillants, et qui laissent des blessures profondes qui perdurent parfois des décennies, ou des siècles. Ce moment de l'Histoire, celui où ces deux petites oligarchies de la péninsule d'Apamée n'avaient en apparence aucun lien avec la lutte dans laquelle Apamée, Volterra et Adria étaient engagées, dans un premier temps par voie politique. La haine était séculaire, comme parmi beaucoup de communautés fortunéennes rivales, et pour comprendre celle qui avait cours entre Porto Rosso et Nuevo Fortuna, il fallait remonter à leur fondation même, d'après les récits des grands classicistes velsniens de l'époque des Guerres celtiques.

Depuis toujours, les deux villes de la pointe nord de la péninsule apaméenne partageaient des frontières changeantes, qui varient d'une époque sur l'autre en fonction des dynamiques d'alliance qu'elles entretenaient avec la bien plus impérieuse Apamée. Celle qui avait les faveurs avaient les terres qui allaient avec. Mais le fait qu'elles soient toutes deux dans l'orbite de la démocratie dodécaliote ne changeait rien à cette inimitié, au contraire, cette situation d'hégémonie appaméenne avait été précisément permise par sa position médiatrice. Le problème étant que les tensions ont été amplifiés par ce perpétuel mouvement territorial de va et vient, qui leur faisait subir un affreux cercle vicieux. Tout était digne de dispute: les conflits cadastraux qui voyaient parfois certaines familles de propriétaires en venir aux armes et à la guerre privée, de même que la lutte pour les droits d'appellations d'origine contrôlée des vins de la Péninsule, dont les revenus rendaient que plus profitables la perspective d'une guerre remportée. Tous ces motifs relevant de la vénalité venaient meurtrir les familles de grands propriétaires fonciers des deux cités: nul n'avait point perdu de fils, de fille, de frère, de mari ou d'amis dans ces luttes. Et chaque mort était une autre ligne ajoutée au très livre de rancunes de la Dodécapole.

La rixe qui a éclaté le 1er mai 2017 entre ces deux cités, n'avait guère avoir avec les grandes affaires de la Confédération, autrement plus intéressantes qu'une vulgaire bagarre de village, si je puis nommer cela ainsi. Encore une fois, Porto Rosso accusait frontalement les autorités de Nuevo Fortuna de mordre sur les frontières fixées quelques dizaines d'années auparavant par Apamée, et comble de l'ironie: les intéressés avaient remarqué que leurs cartes respectives ne correspondaient pas à l'occasion d'une réunion concernant l'édification d'un axe routier transfrontalier. Il ne fallu guère plus que quelques kilomètres carrés de terre aux contours flous pour relancer la dispute. Comme toi, lecteur peut déjà le remarquer, rien ne porte à croire que cette simple affaire allait déclencher une série d'évènements catastrophiques tels que ceux que nous avons connu par la suite...mais il est de ce monde une certitude dans la politique: c'est que chaque petite lutte est une opportunité pour certains de passer un pied dans la porte. Cette situation n'avait certes guère à voir avec les instabilités causées par l'annonce de l'hégémon Agricola, mais indéniablement, son éclatement était favorisé par ce qui ressemblait à la disparition d'un garde-fou contre les luttes fratricides.

Aussitôt le problème constaté, les autorités de Porto Rosso et de Nuevo Fortuna se tournèrent vers Apamée, demandant son arbitrage, puisque c'est cette cité qui avait conçu les frontières actuelles...mais la situation était plus compliquée...plus gênante plutôt...puisque durant toutes ces années, Apamée, pour mieux acheter la paix, s'était bien gardée de dire aux cités que ce problème était déjà connu, car ils l'avaient volontairement crée. Apamée avait achetée la paix pour quarante années, mais elle se retrouvée là en bien fâcheuse posture dont fort heureusement, Porto Rosso et Nuevo Fortuna n'avaient pas entièrement connaissance.

La première réunion concernant la correction de la frontière ayant échouée de la plus lamentable des manières, la démocratie d'Apamée, prise de cours la première fois, tenta de réparer ses erreurs en invitant une délégation des deux cités à présenter leur cause face à l'assemblée des citoyens. Un matin, on vit ainsi deux convois pénétrer dans la ville, arrivant de deux directions différentes. Des hommes et des femmes vêtus de noirs, comme un sombre présage, chacun tenant de lourds dossiers justifiant leurs revendications.

Les débats firent rage durant de nombreuses heures, jusqu'à la tombée de la nuit. Si les premiers instants avaient été ceux de l'appel au droit et à la légalité, et que Porto Rosso et Nuevo Fortuna avaient frénétiquement exposés un grand nombre d'argument tout droits sortis de leurs dossier, il est apparu que le droit céda progressivement sa place à la rhétorique pure et aux avantages réels d'un appui à l'une de ces deux cités. Apamée était certes, de toutes les cités de la Dodécapole, celle qui déclamait le plus sa vertu, mais elle ne restait qu'une entité politique, qu'un léviathan pourvoyant à sa propre survie. Lorsque la lune fut pointée dans le ciel, on pouvait aisément affirmer que le "droit" et le "discours juridique" étaient allés au diable, et que l'on quantifiait désormais sa légitimé à son nombre de troupes, et à ses navires. Devant toute l'assemblée, à un moment crucial précédant les délibérations des apamméens, le plus grand de tous les membres du corps civique, Fabrizio Psistrati, sage parmi les sages, fit quérir aux deux délégations d'ultimes mots pour soutenir leur cause. Les représentants de Porto Rosso s'avancèrent les premiers, et eurent ces mots que je te rapporte, lecteur, mots pour mots:


"Notre prétendue sagesse d'autrefois, qui nous détournait de partager avec autrui, le hasard des guerres qui ne nous regardaient pas, nous paraît maintenant impuissance et faiblesse. Dans nos combats de toujours avec les néo-fortunéens, nous les avons nous-mêmes repoussés par nos propres forces, mais maintenant qu'ils se disposent à nous attaquer avec des forces plus considérables, rassemblées de toutes leurs terres, nous voyons que nous sommes dans l'impossibilité de vaincre avec nos seuls moyens et que le péril est immense pour nous, si nous succombons. Aussi sommes-nous contraints à vous demander du secours dans cette affaire, ainsi qu'à tout autre peuple aimant la justice, et vous devez nous pardonner, si nous renonçons à notre inaction d'autrefois qui fut inspirée moins par mauvais vouloir que par erreur de jugement. Nos ennemis sont les mêmes. Il serait de votre intérêt qu'il n'existe pas d'autre force que les nôtres réunies. Soyez les amis de ceux qui ont les plus grandes forces."

Le discours fut éclatant et brillant, illustrant la beauté des mots que nous, fortunéens, aimons par dessus tout. Mais là encore, la décision des apaméens se fit attendre, si bien que l'on demanda aux deux délégations, cordialement, de bien vouloir rentrer chez elle en attente d'un verdict de leur part. Ce fut une grossière erreur, car là où il aurait fallu trancher dans le vif sans faire souffrir le blessé plus que nécessaire, Porto Rosso et Nuevo Fortuna n'attendirent pas la réponse des apaméens pour en venir aux mains: les mots des grands propriétaires terriens de la frontière s’échangeaient bien plus rapidement que ceux de la diplomatie, si bien que sur place, il y avait déjà de petites armées privées qui ne brûlaient que de reprendre ce qu'ils estimaient leur droit de propriété. Les deux délégations n'étaient pas rentrées chez elles que les premiers combattants de chaque camp étaient déjà morts.

Un jour, on retrouva une famille entière massacrée dans son exploitation agricole d'un côté de la frontière, lorsqu'un autre jour, ce fut un marché rural qui fut visé par une expédition punitive. On prenait les armes de part et d'autre de la frontière, sans que les deux gouvernement ne rechignent particulièrement à cette série d'escarmouches, bien au contraire. Ce fut comme si malgré la tentative de discussion, celle ci n'avait jamais eu lieu. Les autorités de Nuevo Fortuna et de Porto Rosso perdent vite tout sens de la raison, et quitte à faire la guerre, autant bien la faire, et mettre tout son poids de son côté dans ses revendications: la quête du rapport de force aveugla tout le monde. Des plus sages aux moins sages, des plus prudents aux plus effrontés. Il n'y avait plus de morts tragiques, plus de retenue...simplement l'affrontement entre deux sommes d’intérêts différents et profondément incompatibles, où l'individu ne comptait plus.

Le jour du 1er mai n'était certes pas le premier à voir des morts, mais il fut le premier à voir les deux gardes civiques des villes rivales se rencontrer en rase campagne. Un combat dont la petitesse des forces présentes ne ferait que renforcer son aura historique. Une bataille qui n'était qu'un grand règlement de compte mettant en jeu la fierté et la virilité des habitants des deux cités. 500 hommes et femmes se battant pour un simple corps de ferme à la frontière dominant un fond de vallée exposée. Une position dominante convoitée qui était le témoin d'un combat homérique, parfois d'un soldat contre un autre: le combat des 500.


effectifs engagés dans l'escarmouche a écrit :

Garde civique de Porto Rosso et milices privées:
- 270 ali 4

Garde civique de Nuevo Fortuna et milices privées:
- 230 ali 4


En coulisses de cet affrontement, on tentait de tirer des ficelles, car des deux camps, on avait la certitude qu'il y avait une chance sur deux d'être la partie lésée: inacceptable, si bien que c'est à cet instant que l'on pu relier ce massacre en rase compagne à l'autre acteur de notre récit: Volterra, et le fantasque Lograno. Nuevo Fortuna et Porto Rosso ne s'étaient pas contentées d'envoyer un appel à l'aide à Apamée, mais également un à Volterra...dont on attendait également une réaction. A cet instant, le nord de la péninsule d'Apamée s'était transformée en un terrain de jeu entre deux intérêts qui les dépassaient."



Lieu de l'action:

a
Péninsule d'Apamée




HRP: Une situation de crise locale vient d'éclater en Dodécapole. Les deux cités viennent d'en appeler à l'aide d'Apamée et de Volterra. Si la décision finale revient à leurs dirigeants, les joueurs dont des personnages et des forces sont présentes en Dodécapole peuvent les influencer pour prendre une décision fatidique. Pour cela, il suffit de demander une réunion avec l'une de ces cités, et concevoir un plan d'action avec Apamée ou Volterra à l'aide de vos personnages ou vos mercenaires. L'event se déroulera dés lors que tous les joueurs s'estimeront prêts à laisser dérouler les évènements (dans le cas où il existe deux équipes distinctes).

Il n'y a pas pour le moment de guerre ouverte entre Apamée et Volterra, mais une action trop audacieuse de la part des joueurs pourrait la déclencher...Pesez donc vos actions.
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RP MAJEUR ACTE I


Histoires dodécaliotes


L'étrange disparition de son excellence Agricola
Gina Di Grassi (Septembre 2017)

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"Que l'amour soit maudit, car il nous détourne du reste de l'univers. Des choses de la politique comme de la vie, des choses de la paix et de la guerre. Maudit soit l'amour, car c'est là chose bien trop belle à ressentir, qui fait paraître tous les autres fruits bien fades, et rend le reste de notre existence futile. Que je regrette d'aimer."
. Pietro Balbo, le grand Pietro Balbo, depuis le fond des âges, nous rappelle sans cesse la justesse des choses. Lui qui vivait il y a près de 800 ans, sa langue est toujours aussi acérée, et ses mots raisonnent encore dans l'enceinte des nobles sénateurs. Pietro Balbo, toi qui a vaincu les achosiens aux Grandes plaines, toi qui a tant sacrifié pour finalement être vaincu par ce sentiment si simple, un ennemi si doux.

Nous célébrons l'amour à chacune de nos festivités, l'amour de notre cité et de nos proches à chaque fête de San Stefano qui clôt la fin de l'année, l'amour de nos amis et des choses simples de l'alcool et des jeux. L'amour est toujours la chose la plus facile à aborder avec les étrangers, avec le rire et le désir, sans doute, thématique universelle qui a fait la renommée des plus grandes histoires. Aussi, c'est non sans fascination pour celle de la Dodécapole que j'eus à ajouter celle-ci à mon récit, qui se construisait progressivement devant mes yeux, mes yeux grands ouverts comme des lanternes.

Tout d'abord, lecteur, je puis te décrire en premier lieu le point de vue de ces yeux que sont les miens. C'est là le témoignage limité de ma personne, qui ne suis guère omnisciente. Mais je puis dire que ce jour du 17 septembre 2017, l'air changea d'odeur, et le ciel changea de couleur. Adria était encore plus belle qu'à l'accoutumée, et nous nous apprêtions, avec les braves enfants d'Achosie du Nord que nous étions, à partir pour la guerre, pour la cité de Cortonna. Je me souviens encore de la moiteur de cet air sur les quais, car c'est là que je vis poindre à l'horizon des navires. Ils étaient grands, très grands, et on cru reconnaître l'étendard du soleil rouge au loin, le soleil de l'hégémon de la Dodécapole. L'étonnement était le même chez mon commandant illustre, Mardonios, qu'il l'était pour moi, et il vint entre nous toutes les questions auxquelles nous pourrions penser: que diable l'hégémon, lui qui depuis des mois était muré dans le silence, venait faire aux confins orientaux de la Dodécapole ? Lui qui était à quai depuis tout ce temps, qui voyageait de ville en ville pour se quérir des dernières pensées de ses anciens protégés, lui qui s'apprêtait à les quitter pour les rivages achosiens, qu'il avait choisi aux dépens de tous les autres.

Sa dernière venue remontait à moins d'un an, peu après les jeux confédéraux de Dame Fortune, où ce dernier avait rencontré Marina Moretti, la gardienne d'Adria, pour la première fois. Ses navires s'arrimèrent, et en sorti devant mes yeux son excellence, le Sénateur Adolfino Agricola, Hégémon démissionnaire de la Dodécapole. Lui que l'on pensait en retrait et en attente de trouver un successeur à sa fonction...lui se tenait là, tout fier devant nous. Il vint à mon commandant et le salua noblement. C'était la première fois depuis la Guerre des Trumvirs que je le vis de si près, lui qui avait combattu bravement pour mon excellence père. Il tait courtaud, les cheveux frisés, d'un noir de jais, mais bien avenant. Il me reconnu, s'inclina et m'embrassa la main droite, avant d'expliquer les raisons de sa venue, celle d'une simple visite de courtoisie à l'attention de son excellence Doyenne, Marina Moretti. Nous l'avons donc escorté jusqu'au bâtiment du Rectorat, où elle tenait réunion. Adolfino Agricola, que je pensais si sage, était au pas pressé, et refusa d'attendre la fin de la réunion des doyens d'Adria. Malgré nos protestations, il fit irruption dans la salle et informa à tous de sa présence. Il aperçu son excellence Moretti, et c'est à cet instant que je le vis: le maudit amour, et le maudit désir. La séance fut écourtée, sans que Moretti ne proteste d'un mot, puis, on nous dit de nous retirer. Durant trois jours, le Sénateur Agricola est resté à Adria, car nous l'avons accompagné à plusieurs cérémonies publiques, jeux et festivités en l'honneur de Dame Fortune. Toujours il resta en compagnie de la Doyenne, et on ne le vit pas pressé de partir. Au bout du troisième jour, il fut temps de dire adieu à Adria, et la flotte de l'Hégémon reparti. Mais car les temps étaient aux changements, et parce que son excellence Agricola était peut-être rongée par autre chose, elle revint finalement deux jours plus tard, pour y rester définitivement.

Cela est tout ce que mes yeux peuvent dire, mais je puis vous dire également ce que les autres hommes et femmes, plus importants que moi, ont pu en dire. L'Hégémon Agricola avait déserté sa propre fonction avant sa fin effective. Tout comme il avait renoncé à sa fonction de Stratège militaire d'Achosie du Nord, pour laquelle il voulu pourtant quitter la Dodécapole en premier lieu. Il avait fui pour les bras de la Doyenne Moretti, qui le prit en étreinte. Scandale et ignominie de voir un sénateur velsnien déserter sa propre patrie, avec une bonne part de sa flotte qui plus est. Au nom de l'amour (mais probablement de la politique également), il abandonna donc les siens et les promesses de pouvoir dans l'occident velsnien, pour faire basculer toute la Dodécapole dans le domaine de l'incertain. Cette flotte qu'il commandait, ce n'était pas la sienne, c'était celle de toutes les cités coalisées de la confédération. Toutes ces villes dont les déserteurs faisaient affront aux leurs par leur absence. Partir ainsi, avec plusieurs patrouilleurs, corvettes et frégates, emportant nombre de fortunéens du nord dans une aventure douteuse et piégeuse. C'était plus désormais là une flotte confédérale, mais une flotte de brigands et d'hors la loi. Moi qui pensais son excellence Agricola commandant soumis, j'eus raison. Mais je m'étais trompé sur l'identité de son maître, ou de sa maîtresse, en l'occurence.

Velsna, Apamée, Volterra et toutes les cités, chaque navire volé était là un affront impardonnable fait à leur nom et à leur prestance. J'eus entendu depuis l'autre bout de la Manche Blanche, le Sénat velsnien hurler et appeler à la trahison. L'assemblée des citoyens d'Apamée mugir et gronder. Le maître de Volterra médire et lorgner davantage sur le titre d'hégémon. Adolfino Agricola, était devenu en l'espace de trois jours un personnage maudit par son engagement, maudit par le Sénat des Mille des sages velsniens, car il déshonorait la patrie. Maudit par les autres dodécaliotes, car il les avait volé, et avait rapporté le tout à la dame d'Adria.

Les volterrans et les apaméens, n'avaient pas le temps, pour l'heure de se pencher sur la question, car ils étaient avec leurs propres batailles. Mais la désertion d'Agricola leur avait fait braqué les yeux sur la cité d'Adria, et les avait rappelé à son existence. Que celle ci avait son rôle a jouer, et que la Doyenne Moretti, que l'on soupçonna un temps de mollesse, avait déployé son jeu. Que Volterra et Apamée s'entredéchirent, c'était là une manœuvre gagnante dans toutes les issues pour Marina Moretti. Elle avait rapporté dans sa couche, et en compagnie d'Adolfino Aricola le tiers de la flotte confédérale.

J'entendis plus tard, que le Sénat de Velsna s'était réuni en urgence, pour dégrader Adolfino Agricola de son titre de sénateur, et le décréter ennemi de la République. Au grand détriment de la faction de son excellence mon père, qui lui avait confiance, car il avait été brave face au tyran Scaela en son temps. De tous les hommes, son excellence Matteo Di Grassi fut l'un des plus affectés par son acte, car il était davantage fils que confrère pour lui, et qu'il ne supporta jamais que l'on trahisse sa confiance, et son affection. Adolfino Agricola ne serait jamais un personnage illustre. Son courage ne serait jamais reconnu. Il ne serait jamais promis à la gloire du commandement en Achosie. Il n'en avait que faire, car il avait choisi l'amour.

HRP:
Effets:
- Si Adolfino Agricola se considère toujours hégémon de la Dodécapole, il n'est plus reconnu comme tel par la plupart des cités de la confédération, Velsna en premier.
- D'ici quelques jours, Adolfino Agricola devrait, sauf retournement miraculeux, être déchu de tous ses commandements par le Sénat velsnien, et décrété "ennemi de la République et du peuple velsnien".
- La flotte confédérale, la "Classis VII Dodecapolis" est dissoute de fait: Agricola conserve le tiers de la flotte qu'il adjoint à la cité d'Adria, tandis que les autres navires dont les capitaines ont refusé de le suivre retournent à leurs cités respectives.
- Un congrès dodécaliote devrait être convoqué après la fin de l'Acte I de l'intrigue pour désigner un nouvel hégémon, et déterminer la conduite à suivre à l'égard d'Adolfino Agricola et d'Adria.
- Les relations entre Adria et les cités de Volterra et d'Apamée sont désormais épouvantables.


Bonus:

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Histoires dodécaliotes


L'aimé de Dame Fortune
Gina Di Grassi (Octobre 2017)

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L'océan s'agite. Les vagues enflent. C'est comme un chant, un sifflement qui bourdonne au loin, et qui ne cesse jamais. Le tempo varie au rythme des vagues. On dit que les anciens pensaient que Dame Fortune leur parlait par cet intermédiaire, il faut "faire chanter la mer". C'est elle qui nous apporte notre fortune et nos biens, et lorsque celle ci ne nous les ramène pas, elle nous permet de les atteindre au moyen de navire, de s'en emparer avant de repartir chez nous.

De nos jours, il n'est guère plus que quelques croyances éparses, davantage des réflexes pavloviens, des habitudes davantage que des rîtes, pour faire rappeler au monde l'importance de Fortuna dans nos existences. Le temps passe, et les croyances aussi, elles cèdent la place au folklore, qui cède ensuite sa place à l'oubli. Mais il y avait toujours des hommes, de ma connaissance même, qui redoutaient encore les colères de la fortune, qui lui attribuaient leurs victoires et leurs échecs, et recueillaient leurs espoirs.

Beaucoup d'hommes de la République et des cités fortunéennes pensaient ainsi: il n'y a guère de bon ou de mauvais camp, car Dame Fortune décide du vainqueur et du perdant. Seul le plus malin, le plus prévoyant et parfois le plus retord décide du camp de la vertu à posteriori des évènements. Voilà donc pourquoi nous n'accordons que peu d'honneurs à la cause des perdants, car leur situation reflète la volonté de Dame Fortune.

De telles croyances étaient encore vivaces parmi les soldats, parmi l'élite des petites campagnes et de province. Elles faisaient part intégrante de la compétition aristocratique, et "régulait" en quelque sorte les ambitions de chacun, car Dam Fortune punit l'echec aussi sévèrement que ses récompenses sont grandes. Peu osent la défier. Mais lorsque cela se produit, cela n'est le fruit que d'hommes et de femmes d'exception, celles et ceux que notre République craint, car ce sont là les individus les plus incontrôlables seulement qui peuvent la défier, les mêmes qui défient nos institutions. Ceux là, alternativement, on les traite de fou ou de génie, mais il n'y a guère d'entre deux entre ces deux conditions. C'est exactement de cette race que la personne de Salvatore Lograno se tient.

Toi, lecteur, toi qui connait la réputation de l'Homme, tu sais de lui qu'il est aventurier, escroc et charlatan. Tu sais qu'il est la foi investisseur et voleur, qu'il est beau parleur et tueur avec un couteau dans le dos. A la vérité, Salvatore Lograno était par bien des choses tout ce que Dino Scaela avait toujours voulu être, en son profond. Dino Scaela a perdu la faveur de Dame Fortune car il était noyé dans ses propres obsessions et des névroses: il était si proche de rétablir le règne de Léandre, si proche qu'il en perdait la notion de la réalité de la condition des Hommes. Il idéalisait un passé qui n'existait plus, qui n'avait peut-être jamais existé. Il se parait dans de la soie et des bijoux, et imitait nos anciens avec autant de drôlerie qu'un vulgaire macaque pourrait le faire. Il fétichisait, avec une ardeur plus grande même que les garants des institutions qu'il condamnait. Certains kah tanais auraient dit de lui qu'il était un paradoxe, pour le peu que j'estime leur philosophie pompeuse et déterministe.

Salvatore Lograno était d'une toute autre race, il en était certain de cela, malgré son admiration de Scaela. Lograno était lucide, malgré ses apparences, lucide par rapport aux attentes des hommes et des femmes de son entourage. Il lisait dans les yeux de ses interlocuteurs comme dans un un livre ouvert, il estimait leurs désirs, et il leur proposait que tous ceux ci se réalisent en échange de la fidélité. C'était là une chose que le traître Scaela n'eut jamais conçu: la réalisation que la vision que nous donne Dame Fortune de l'avenir ne concerne que nous, et que nous ne la partageons pas tous. Fortuna a vaincue Scaela, car il a été aveuglé. Lorgano, lui, était persuadé de toujours voir clair, d'avoir une vision périphérique des choses, du dehors. L'apparence de Scaela était son être, l'apparence de Lograno était sa coquille.

On pouvait croire que Salvatore Lograno n'était pas un homme un pieux, qu'il n'était qu'un amateur de tout ce qui brille, un amasseur compulsif, un ancien mercenaire sous stimulants. Il était grand tort à celui qui sous-estimait l'homme, ce que j'ai toujours affirmé sans la moindre réserve. Indigne il était, idiot il n'était pas, et profonde étaient ses pensées. Lograno était pieux, tant et si bien qu'il se qualifiait comme le plus croyant des Hommes. Il était en amour de Fortuna, et se considérait comme son plus grand serviteur. Vraie ou fausse, cette dévotion lui donnait une foi qui transparaissait et venait rejallir sur la loyauté inébranalble de ses seconds et officiers les plus proches, qui buvaient les paroles d'un prince dont je n'a point connu de plus habile avec les mots:

" Incroyant ? Moi ? Qui connait Dame Fortune que je la connais ? Le fou de Vittorio Vinola, qui s'est donné aux étrangers en pensant qu'ils allaient le sauver ? Le pâle Di Grassi, dont Fortuna a affublé de tant de qualités au point de lui donner la victoire, mais dont il ne se sert pas ? Dino Scaela ? Qui s'est enroulé dans des vieilles idoles pour se dire plus pur que les autres ? Je connais tous ces hommes, je m suis battu pour eux, en échange de miettes. J'ai vu le bain de sang du Néorion. J'ai vu la bataille de Velathri...et je n'y ai vu que des hommes faibles. J'ai vu des gens prier pour la victoire, la supplier à genoux, lui consacrer de l'argent à n'en plus finir. "Dame Fortune, donne moi la victoire ! Dame Fortune, donne moi de quoi manger ! Dame Fortune, protège moi des morpions !". Ces gens ne savaient pas comment honorer Dame Fortune: on ne prie la Fortune, on prend les opportunités qu'elle met sur notre chemin, on arrache ce qui appartient à d'autres, pas parce qu'on le mérite, pas au nom d'idéaux étriqués qui ont condamné mes prédécesseurs. On prend car on peut prendre. Voilà pourquoi je suis l'homme le plus pieux qu'il soit: lorsque les autres hommes me voient, ils prient. Ils prient de toutes leurs forces quelque chose qu'ils ne comprennent pas, à s'en faire exploser les veines des deux mains. Et parce qu'ils prient, je les tue. Les hommes prient Dame Fortune à mon contact, et je les tue, parce qu'ils sont EUX, des incroyants. Je l'ai fait en Dodécapole, je l'ai fait en pleine velsnienne, je le ferai entre les murs d'Apamée. Fortuna ne donne pas, elle tend, et on prend."


Salvatore Lograno était ainsi.



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L'Homme bon et le mauvais prince
Gina Di Grassi (Novembre 2017)

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Les hommes de bien ne foulent pas cette terre par grand nombre, et à de nombreuses occurrences. Qui pourrait croire que parmi tous les tyrans de ce monde, parmi tous les aventuriers roublards, parmi tous les requins se cachant sous les traits de la politique...qui pourrait croire que parmi eux se nichent parfois des hommes de bien. Et que signifie donc "être un homme de bien ?". J'en eus rencontré plusieurs, qui partageaient des caractères communs, qui éveillaient chez leurs pairs une grande confiance: des hommes et des femmes dotés d'un sens du détachement absolu, des individus démontant une générosité sans limites et sans en attendre en retour....qui écoutent attentivement à chacune des paroles qui leur est adressée et prennent compte de tous les avis. Ils ne sont guère nombreux, mais je puis dire que son excellence Adolfino Agricola était de ceux là: un homme de bien, que tout le monde fortunéen considérait comme un traître.

Son idylle avec son excellence Moretti était à peine cachée, et ils prenaient guère de gêne à la dissimuler à notre vue. C'était un élan naturel qui ne semblait pouvoir être contenu: les hommes de bien sont-ils ceux qui étaient honnêtes avec leurs propres sentiments ? Je n'ai point de réponse à apporter à cette question, malgré toute ma recherche. Mais étrangement, et au mépris de ma bonne éducation qui m'avait enseigné le respect des engagements et de la parole donnée, Agricola évoquait à mes pensées une grande empathie vis à vis de son sort, et une incompréhension. Comment un homme de bien pouvait-il être un traître dans la foulée ? La loi était-elle seulement juste ? Déserteur, il l'était indéniablement, mais déserteur pourquoi ? Il m'était difficile de comprendre comment un Homme que l'on qualifiait partout et en tout temps de prometteur, tant prometteur qu'il avait été promis à un commandement militaire illustre en Achosie, pouvait avoir fait le choix de l'infamie. Il était appelé à devenir un grand, et l'un des hommes les plus riches de Velsna. Le renoncement volontaire à la gloire et à la richesse était aussi inexplicable que fascinant, car il induisait un homme qui se fichait des richesses matérielles, et qui n'avait que faire de sa position. Alors peut-être, peut-être qu'Adolfino Agricola était un homme authentiquement bon et vertueux.

Homme bon, il l'était peut-être, mais malheureusement, les grandes choses de la politique ne nécessitent pas la bonté, mais la grandeur. Pas la grandeur d'âme mais la grandeur des ambitions personnelles, alliées à une grande vision et un devoir à la servitude de la République. Servile, il ne l'était point, car il avait brisé les chaînes de velours qui le liait à Velsna. Mais il fallait distinguer le bon et le bien. J'estimais Adolfino Agricola en tant qu'Homme mais j'eus été très longtemps indécise sur ses qualités de prince. Il y a peu d'hommes bons en politique, car la politique est la nécessité du mensonge et de la duplicité dans des temps où la morale inflige davantage de souffrance qu'elle n'en guérit. Aussi, il est nécessaire de se montrer mauvais pour assurer le bien, ce que les Hommes bons sont moins disposés à faire.

Quoi qu'il en soit, Adolfino Agricola, en renonçant à son commandement et aux honneurs du Sénat, s'était improvisé Homme politique dans une autre cité par la force des choses, et était devenue le bras armé de la personne qui nous aviosn juré de défendre, ce qui n'était pas sans nous mettre dans l'embarras, car nous restions tout de même des citoyens de la cité velsnienne, et lui restait un traître. Le Maître Mardonios tentait toutefois de garder sa consistance, et il ordonna à tous de faire montre de respect envers l'homme, malgré une gêne réciproque et visible par tous, et il m'avait formellement interdit de révéler ma présence ou mon identité à cet "Homme bon". Aussitôt Agricola poserait le pied en la patrie des velsniens, qu'il se ferait traîner jusqu'au Sénat par les pieds, et probablement emprisonné pour le reste de ses jours dans la prison des soupirs. Je craignais alors son regard, car celui-ci, qui s'était battu sous les ordres du Sénateur mon père en plaine velsnienne, aurait pu faire de ma personne son otage pour négocier une porte de sortie avec ce dernier, car c'était là ce qu'un bon Prince aurait fait. Mais c'était avant tout l'opération future de Cortonna que nous voulions cacher de lui, par crainte d'un refus de sa part.

Bon Prince ou mauvais prince, j'eus l'occasion de finalement découvrir l'Homme politique à l'occasion de l'une de mes dernières journées en la cité d'Adria, avant notre grand départ pour l'expédition de Cortonna. On me demanda souvent de décrire la ville qu'était Adria sous la gouvernance commune de Marina Moretti "l'érudite", et d'Adolfino Agricola "le bon", et je dirais de ce temps que c'était une ville toujours en fête, et que ne dormait jamais. Chaque coin de rue cachait une procession festive, ou un défilé pompeux. C'était une ville arrogante, renforcée par une flotte et de fiers marins venus de toutes les cités, qui étaient loyaux à Agricola davantage qu'à la cité. Ils étaient ses compagnons d'infortune et de desertion, et de patrie, ils n'avaient plus que lui. Agricola dilapidait l'argent en quantité de largesses et de cadeaux à notre intention, car il nous savait velsniens, et il craignait une trahison ou une désertion de notre part. C'était là compréhensible, mais cela n'avait effleuré l'esprit de Maître Mardonios. Ce qui n'était pas dépensé en cadeaux à notre attention l'était en divertissements et de fêtes pour l'armée que nous formions alors. Cette troupe tenue par la loyauté envers un homme davantage qu'envers un pays.

Adria était République, mais il y eut tant d'argent d'Agricola coulant dans les rues de la ville que Marina Moretti et lui formaient un couple à l'ampleur d'une royauté. Ils étaient devenus les princes éclairés d'un petit phare au bout du bout de la Manche Blanche. Riche, lumineux, mais honnis par tout ce qui se trouvait dans le noir. Toutes les cités fortunéennes par delà la mer considéraient désormais Adria avec méfiance pour avoir accueillit le traître. Alors celui-ci essayait de se le faire pardonner en distribuant son argent propre à la foule, en plus de nous, et il tentait de nous divertir par de grands combats, qu'il nommait tournois. Un jour, il fit aménager une grande tribune, toujours avec ses florius qu'il dépensa sans compter, et de grands gradins temporaires tel un théâtre qu'il réserva pour nous tous, "son armée" ou du moins ses troupes et celles de la cité d'Adria réunies, afin qu'elles se donnent en combat honorable. Comme nous escomptions à ce qu'il distribue encore son amour sous la forme d'or, nous nous y rendîmes dans l’espoir d'y gagner notre prix qui n'était en rien mérité, fruit de la crainte d'un Homme.

L'estrade où Agricola se dressait en compagnie de Marina Moretti ressemblait à une cour, la cour de deux individus se constituant leur clientèle par la puissance de l'or. Il y avait là des soupirants au plus proche, des membres de sa flottes, puis plus loin, des adriens plus méfiants, qui assistaient désemparés au spectacle d'un étranger ayant donner assez d'or à chaque citoyen de cette ville pour que ceux ci n'aient plus à travailler durant des mois. Il était beau, il est vrai, avec des cheveux bouclés d'une belle couleur, et un teint vivant, rougit par un alcool joyeux. Il n'avait point changer depuis notre précédente rencontre car je le savais expansif et festif, et dans cette foule, il ne m'avait point reconnu parmi tous ses suivants.

Il donna ses combats les uns après les autres selon la règle du muletto velsnien, et désigna du doigt les volontaires qui se devaient d'être masqués suivant la tradition de cet art, et distribua des prix aux gagnants. Les kotioides n'avaient point l'habitude de ces combats, mais s'en sortirent honorablement face à notre petite troupe. Comme un éclair inspiré par Dame Fortune, je décida alors de découvrir par moi-même si Adolfino Agricola était un bon prince, au désespoir de Maître Mardonios qui tenta de retenir mon bras. Je m'avança donc au devant de toutes ses troupes lorsque Agricola manda deux autres combattants. Parmi les kotioides, le Professeur Bishop s'avança au même instant, guidé lui-aussi par Fortuna. Sachant les kotioides peu accoutumés au canif velsnien, je demanda un couteau émoussé, mais je ne fus pas en reste de la bravoure du professeur, qui en plus d'être érudit brillant, fut finalement combattant adroit qui ne démérita point face à la lame. Tous les combats au muletti sont courts, mais l'intensité des coups faillit me renverser de mes appuis. Je mis finalement le professeur à terre, à qui je tendis la main pour qu'il se relève.

Je gagnai ainsi les honneurs devant toute une assemblée, et on m'appela à m'avancer parmi les Grands de son estrade, au devant d'Adolfino Agricola, qui m'applaudit longuement avec une enthousiasme qui me fit passer pour héroïne. Ainsi me parla t-il:

"Tu as bien combattu ! J'ai déjà vu des kotioides se faire vaincre dans de tels duels, mais jamais d'une façon aussi éclatante."

Son éloge fut tempéré par Moretti, à ses côtés, qui vanta tout autant la force et le courage du kotioide Bishop. Son excellence Agricola acquiesça, pour mieux me percer à jour:
" Bien entendu ma chère, mais il ne peut y avoir qu'un champion ! Retire donc ton masque, que je puisse te voir et t’encenser."

Gênée, je retirai le masque qui sauvegardait Agricola de ma présence, pour que nous nous retrouvâmes face à face, et que "l'Homme bon" constate par lui-même, ne pouvant plus reculer quant aux éloges qu'il pouvait m'adresser:

" Gina Di Grassi. Avance toi. Je peux t'accorder une faveur de tout ce que tu peux désirer. Si c'est en mon pouvoir, alors tu l'auras."

Une faveur inattendue: bien que je fusse la fille de l'un des hommes qui l'avait proclamé ennemi, il n'en fit rien, et resta pendu à mes lèvres jusqu'à ce que je fasse affaire de sa réponse. Me vint alors des mots de défi, encore, car je voulais

" Oui, de faveur j'en ai une, excellence. Intègre moi à ta garde personnelle. Et il ne t'arrivera jamais rien qui puisse porter atteinte à ta personne."

Même Marina Moretti fut abasourdie de l'entendre, et cela laissa l'homme bon dans le silence, avant que sa surprise laisse place, à mon étonnement, à un grand sourire et à des applaudissements nourris:

"...Accordé. Lève toi, Gina Di Grassi, garde personnel !"

Il emboîta mon pas, et m'indiqua la direction vers laquelle il marchait. Plutôt que de questionner la raison de ma présence, il complimenta mes talents et me couvra de gloire, alors qu'il aurait pu faire de moi une monnaie d'échange pour avancer sa cause. J'en arrivai alors à la conclusion qu'homme de bien Agricola était, mais de prince il n'avait pas les attributs.



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Histoires dodécaliotes


Le traître contre la brute
Gina Di Grassi (Novembre 2017)

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Ambiance hiver sur Adria


De son excellence Agricola je pus voir beaucoup, car dés lors que je l'impressionnai à la face du monde, et que je me dévoilais à lui, il pris grand égard pour ma personne. Jamais il ne me menaça de l'emprisonnement, pas même lorsque sa tête fut appelée à décorer les rostres de la tribune des orateurs de la République, et jamais il ne montrait de haine pour ceux qui l'avaient condamné à Velsna. Il se percevait toujours comme notre compatriote, et prétendait toujours se battre pour la cité. J'en doutais toutefois, et je prit bien soin de lui dire avec la franchise qui était la mienne, et qui était certainement la raison de sa confiance envers moi. Un jour, il me demanda, quelque peu plaisantin, mais avec cette réserve qui traduisait une grande peur:

"Excellence Di Grassi. Que pensez vous que notre patrie me fera si d'aventure je tombais entre leurs mains ?"


Je me penchai vers lui pour lui dire la vérité:
" Je pense, excellence, que les nôtres vous traîneraient en triomphe tout du long du Grand Canal de Velsna, les mains attachées dans le dos en vous présentant à la foule, sous leurs quolibets. Ensuite, nos compatriotes vous emporteraient dans la prison des soupirs, en arrière du Palais des Patrices. Ils vous y enfermeraient et jetteraient la clé dans le Grand Canal. Je vous souhaite de remporter votre cause excellence, sans quoi vous ne sortirez jamais de cette prison. Vous y mourrez du grand âge, ou bien, un jour, des hommes parviendraient devant votre cellule avec des couteaux pour se soulager de votre existence. Il y a des crimes que l'on pardonne, mais pas celui de la trahison, pas même pour l'amour d'une femme."

Son excellence resta silencieux un temps et se reposa sur la rambarde d'un escalier en pointant l'horizon, le regard vers le Canal d'Adria qui venait réunir la Manche Blanche et la mer glacée du Nazum. Il sourit, et me répondit ainsi:
" Alors dans ce cas, je tâcherai de faire vaincre ma cause. Le procès en trahison de m'intéressent guère, pas même à mon adresse. Mais toi, excellence Gina, à qui je donne de la valeur à tes mots: suis-je un traître ?"

J'aurais voulu lui mentir à cet instant, et lui dire que ce n'était point le cas, mais cela aurait été contraindre ma nature:
" Je le crains, excellence. Mais je suis payée par ce traître pour veiller sur sa personne, alors cette question n'est guère pertinente, et je ne puis soulager votre mauvaise conscience."

Il me peinait ainsi de lui présenter ma pensée, mais cela aurait été bien plus malicieux de me garder de ce qui occupait mon esprit à sa vue. Son excellence était bon dans ses mots et ses actes auprès de ceux qui collaboraient avec lui, et même le commandant Mardonios ne se plaignit plus passé les premiers émoluments ayant suivi la révélation de mon identité. Nous étions payés comme des mercenaires, et voici alors qu'Adolfino Agricola nous paya comme une garde personnelle, sans pour autant que nous endossions cette tâche Le "mauvais prince", en revanche, fit quérir ma présence à de nombreuses reprises, m'invitant à sa table en ma qualité d'excellence honorable de bonne famille davantage que suivant ma pauvre fonction d'aide de camp.

Son excellence Agricola était un personnage courtois, bien que parfois maladroit, et curieux de bien des choses, sans pour autant me considérer comme un pion. J'étais son obligée, il respectait le rapport qui était le nôtre, d'employeur à employé, de patron à client. D'otage je n'avais rien, pas plus que de faire-valoir, et ma condition ne changea en rien. Lorsque nous étions à sa table, bien souvent durant de soirées où l'alcool était généreux, car l'homme, aux côtés de son excellence Marina Moretti, il avait des questions à nous qui ne portaient point sur la politique la plupart du temps. Il parlait souvent d'Histoire et de société des Hommes, et Moretti, car elle était fort éduquée, bien davantage que moi, lui répondait bien souvent de manière plus développée que son complice. L'homme et la femme réunissaient autour d'eux des esprits qui faisaient de l'ombre à tout ce qui n'était pas de leur monde, mais je me sentais respectée malgré les écarts de nos connaissances que mon paternel n'avait jamais daigné m'enseigner, car ils m'écoutaient et je les écoutais.

Nous festoyâmes des jours durant, et vivions bien à cette cour construite sur mesure par son excellence Moretti pour nous autres, les seuls garants de leur survie, tant politique que physique. Il était improbable que Velsna, du haut de tous ses problèmes, tenta de prendre d'assaut Adria pour un seul homme, quand bien même il était honni de tous...du moins, c'était ce que je pensais, jusqu'à ce que la grande Histoire, qui avait laissé en paix ce couple tragique d'Adria pour aller tourmenter les volterrans et les apaméens, daigna s'intéresser à eux de nouveau.

Une fois encore, un soir, on prit la peine de m'inviter à l'un de ces banquets somptueux, où les plats étaient plus nombreux encore que dans les palazzi velsniens au luxe le plus insolent, et on me fit grand accueil, comme si je fus membre du Directoire d'Adria. Mais cette fois-là, l'humeur eu changée: il y avait le faits sans les sourires, et les débats sans le plaisir. On murmura à mon oreille qu'il y avait eu grand changement en Dodécapole, et que Velsna avait bougé un pion, une nouvelle qui fit grand mal au cœur de son excellence Agricola. Là encore, et même lorsque mes employeurs voulaient m'épargner le spectacle de la politique, je demandai aux deux amants, Moretti et Agricola, les nouvelles du monde. Les deux visages étaient fermés, mais son excellence Agricola fut bien trop bon pour refuser de me donner la vérité, et me rendit avec vertu la franchise que je lui avais donné:

" Je puis te dire, excellence Di Grassi, que notre patrie ne m'a pas oublié. Et j'ai eu grand mal de constater que de grands moyens ont été employés pour m'éliminer. Ces excellences du Sénat des Mille, dans leur langue si subtile, m'ont demandé la mort par la personne que ceux ci ont envoyé pour régenter les cités dodécaliotes. Toi qui le connais, parle moi donc de cet Altarini, et dis moi quel genre d'homme est-il. Je le sais fortunéen de cœur, mais froid de l'esprit, et étriqué. Que signifie donc son arrivée auprès des cités d'après toi ? Nous écoutons tous tes conseils et tes avis, alors fais comme tu le fais à l'accoutumée."

Je pouvais en dire beaucoup et pour longtemps, et je m’efforçai d'être brève, sans pour autant y parvenir.

"Excellence. Je puis voir plusieurs choses en Dom Altarini. Et la première est sur sa personne: c'est un homme violent, grossier, et qui ne fait point de subtilité dans ses jugements. Cela, vous qui étiez sénateur, vous connaissez souvent ses humeurs. Vous le savez comme moi, qu'il est l'un des hommes les plus infâmes que Dame Fortune ait porté sur les flots. Vous connaissez donc très bien le sort que celui-ci vous réserve, la haine qui est sienne de votre personne, pour avoir signé le traité de réconciliation avec les achosiens l'année passée. Il vous déteste, et n'est pas ici uniquement pour loyauté à notre cité, mais pour satisfaire son désir de votre mort."

Son excellence s'enfonça dans son dossier, et il lâcha la main de son amante lorsque ses oreilles eurent bu mes paroles dures. Il souriait toujours, et en posant son regard sur ma personne, ne pu s'empêcher de montrer son accord:
"Oui, c'était là une réponse à laquelle je m'attendais, ma dame. Sa personne est connue, pour mon malheur le plus grand. J'ai été témoin de ses colères, de sa haine à l'écoute des mots que j'ai eu pour Achos, et dont je pensais chaque syllabe. Je signerais ce traité cinq fois de plus, si je pouvais le faire, car il était à mon sens une nécessité pour notre cité. Je suis peut-être un traître, mais je pense avoir rendu plus grand service à ma cité que cet homme. Ce qui m'intrigue davantage que la petitesse de l'esprit d'Altarini, toutefois, est la raison pour laquelle nos compatriotes l'ont laissé dans ce commandement/ Même temporaire et faible de pouvoir, qui sait ce qu'un Altarini peut faire à cette confédération..."

De réponse j'en eus plusieurs, et j’enseignai chacune à son excellence Agricola:
" Certes. Dom Altarini est honni de tous, excellence, mais c'est peut-être ici la raison de sa nomination. Nos compatriotes tiennent en piètre estime la position d'hégémon, et je dois bien l'admettre avec gêne, que c'est probablement pour cela également qu'ils vous ont nommé à cette fonction. Les excellences Hommes du Patrice tiennent en piètre estime Dom Altarini, mais les élections arrivent, et c'est là beaucoup plus commode de nommer cet homme loin de la reine des cités, et régenter quelque terre perdue pendant que la campagne bat son plein, et qu'il ne peut pas y participer. Votre excellence n'est pas entièrement responsable de sa nomination, j'en suis certaine, mais je pense également que personne en notre patrie peut ignorer la haine qu'il voue à votre personne. Altarini saisira n'importe quelle occasion pour tendre sa main sur votre gorge, mais je doute que les velsniens aient interêt à ce qu'il réussisse trop rapidement. Aussi, il aura probablement peu de moyens à sa disposition. Vous l'entendez: cette position n'est pas qu'un cadeau à son adresse et une punition à la vôtre, c'est aussi une punition à la sienne. Vous deux défiez la République dans une manière qui vous est propre: vous par la désertion, lui par sa brutalité, et il serait de l'interêt du Conseil communal velsnien que vous échouiez tous les deux."

Son excellence ne dit rien, à part avec un grand sourire saluant ma présence d'esprit, et il tendit son verre vers ma personne, pour saluer ce fait:
"Excellence Di Grassi: tu as l'esprit acéré, et je me demande bien pourquoi tu perds ton temps à errer avec une bande de mercenaires, alors que tu pourrais briller davantage que moi, son excellence Moretti et tous les membres de cette cour réunis. Mais cessons la politique, et profitons de ce dont nous pouvons profiter. Les jours qui viennent seront longs, et moins confortables que celui-ci. "



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Histoires dodécaliotes


Les nuages qui apportent l'orage
Gina Di Grassi (Novembre 2017)

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"Vous n'avez pas ça chez vous ?"


C'était là une réflexion que j'eus entendu à nombreuses reprises durant mon séjour parmi les citoyens de la ville d'Adria, et qui me rappelait à mon statut d'étrangère. Comme si cette ville venait me tapoter sur l'épaule, et donner le goût de ne pas être à ma place. A des égards, Adria me donnait le souvenir de l'Achosie du Nord, où j'eus passé mon enfance. Les coutumes de cette patrie là sont plus barbares et rustres qu'ici, certes, mais finalement, l'Achosie du Nord et Adria partageaient une situation similaire, et une relation au monde fortunéen et au monde barbare des plus ressemblantes. Nous sommes en ces deux patries, à deux des horizons du monde, où les coutumes fortunéennes et barbares viennent se rencontrer, que ce soit dans la paix ou la guerre. Les cités d'Achosie du Nord gardant l'occident, et Adria gardant l'orient. La ville regardait des deux côtés de la péninsule d'Albe, elle recevait de l'occident et de l'orient tout à la fois, dans un creuset de civilisation où les commerçants albigeois, pharosi et velsniens venaient à se rencontrer, à à échanger et à repartir de leur côté. C'était là l'extrême limite de la Dodécapole, celle qui subissait ses atermoiements et ses secousses politiques en dernier, la plupart du temps. A l'image du combat de coqs entre apaméens et volterrans qui le l'affectait pas encore, à l'image des accusations de trahison des velsniens à l'encontre d'Agricola qui n'avait pas encore affecté la bonne marche de la cité. La ville se fermait pour l'instant à un conflit qui avait à cœur de tenter de l'agripper et de l'emmener dans la grande danse de l'Histoire.

Désormais, Adria et ses hautes tours de pierre, ses campaniles parmi lesquels on comptait les plus sublimes du monde des enfants de Fortuna, avait ajouté à ses défenseurs tous les fidèles de celui qu'on appelait "traître Agricola", non sans l'appréhension d'une partie de son élite intellectuelle, qui avait bien conscience de la signification d'un tel retournement. Tout le monde n'était pas aussi enthousiaste que Marina Moretti à l'idée d’accueillir ces fugitifs, car c'était là pour eux, et à raison, le signe que la Dodécapole et ses luttes étaient entrés dans la cité orientale par la grande porte, et avec l'assentiment de la Grande Doyenne de la ville. Velsna fulminait dans son coin d'occident pour le moment, sans pour le moment intenter à quoi que ce soit, mais tout le monde savait, son excellence Moretti la première, que les velsniens se souvenaient toujours des affronts, quant bien même la punition mettrait des années à se profiler sur l'horizon pâle de la Manche Blanche. Alors Moretti cherchait tant bien que mal une solution, enfermée dans son bureau, parfois seule, parfois aux côtés du réfugié Agricola, une solution à cet isolement que la politique était en train d'imposer à Adria. Velsna pouvait, si elle le souhaitait, bloquer toute ambition de grandeur à cette cité, et même pire, appuyer les velléités de grandeur d'Apamée ou de Volterra par vengeance. Nul ne savait à cet instant quelle serait l'ampleur de la réponse à la défiance de la doyenne des universités d'Adria, si ce n'est que Dom Altarini, de grand elignée mais de piètre morale, venait en Dodécapole imposer l'ordre avant qu'un nouveau congrès n'ait lieu pour désigner son remplaçant. Il fut déjà probable à ce moment que la parole d'Adria n'y pèserai pas pour grand chose, et que la condition fixée par les velsniens quant à une reconaissance de la cause de justice de Moretti serait la tête d'Agricola.

La cité, elle, continuait de vivre, tout comme Marina Moretti faisait vivre le Directoire: en lui imposant la vue d'un Agricola, dont on ignore si il était pour elle un amant sincère ou un outil politique. Les deux s'étaient bien trouvés, mais on eut tendance dans cette Histoire, à minorer l'intelligence de cette femme au profit de l'audace de l'ancien sénateur velsnien, dont le succès de sa cause pourtant, était conditionné à sa propre réussite. Aussi, je prendrais soin dans ces lignes de m'attarder sur ce que je peux dire de cette femme que je pensa extraordinaire dés notre première rencontre.

Durant cette période de flottement, il est grande faute de penser que la Doyenne des universités ne fut qu'un prolongement de la volonté Agricola. Bien au contraire, celui-ci savait pertinemment, je le pense, que sa position n'était rien sans son approbation. Elle était le lien entre lui et le Directoire scientifique de la cité, qui était le seul pourvoyeur des fonds nécessaires à l'entretien de la petite armée et flotille à sa disposition. Elle est était son unique soutien, et par bien des manières, il était plus dépendant d'elle que l'inverse, et je connais assez bien l'historiographie de ma patrie, et les déformations que mes compatriotes velsniens sont prêts à faire pour marginaliser le rôle d'une femme dans un épisode de la grande Histoire. Les deux amants fonctionnaient de pair, et étaient comme les deux face d'une même pièce. L'un procurait la légitimité de la guerre, l'autre celle de la politique et de l'argent, et il est bien des situations durant lesquelles celle-ci a sauvé les positions d'un Agricola ne connaissait pas les manières de la politique.

Elle fut plus méfiante que le velsnien à mon adresse au début, lorsque mon nom de famille lui attirait la méfiance, à juste titre: il ne fut pas secret, et ne se cacha pas auprès de moi qu'elle m'aurait compter parmi des otages de luxe pour sauver sa cause, malgré toutes les interjections de l'ancien hégémon, car elle était bien meilleure que son complice pour sonder les coeurs des gens de la politique. Mais progressivement, elle substitua les regards méfiants par des conversations courtes et courtoises. Lorsque nous nous croisâmes en de très rares occasions, au détour de l'une de ses sorties publiques, il fut courant de nous incliner l'une devant l'autre, et notre estime commune grandit, par des paroles simples dans un premier temps, puis par des conversations enrichissantes. Le partage de ses préoccupations laissait entrevoir une personne dévouée à ses proches, comme Agricola, mais prenant toutefois compte de la réalité de la politique dont celui-ci était dénué, et appréciant mes avis. Elle me dispensa ainsi, au détour d'un festival populaire auquel elle était apparue de quelques paroles allant dans ce sens.

- Gina, fille de Matteo, ai-je selon vous fait une erreur d’accueillir Agricola dans ses murs ?
- Indéniablement, excellence.
- Pensez vous donc que la vie de son excellence Adolfino n'a point de valeur pour le laisser dans le malheur ?
- Je ne dis point cela, son excellence est fort bon dans ses agissements, bien qu'il défie la loi de manière éhontée. J'évoquais votre cause, et oui, je le pense qu'abriter cet homme entre vos quatre murs est une immense erreur.
- Certes, sur ce point, je suis en accord et c'est un juste constat, mais Adolfino apporte avec lui des hommes et des navires. N'est-ce pas une compensation pour l'opprobre ?
- Des hommes, cela se trouve, des navires, cela se construit. La parole d'Adria en revanche, il n'y en a qu'une, et vous avez dilapidé sa valeur pour son excellence Agricola. Ne le prenez point avec de l'hostilité, excellence, mais vous aurez tout à gagner à distinguer vos intérêts et ceux de son excellence Adolfino. Vous avez à cœur de a survie et la prospérité de votre cité, Adolfino a à cœur de sa survie en tant qu'homme. Si d'aventure vous sombriez dans la détresse, je vous conjure de penser à votre cité avant de penser à sa personne, et d'être prête à vous détourner de lui. Adolfino Agricola est pour vous un nuage qui apporte l'orage.
- Certes. Je ferai bon usage de ces mots...


Son excellence Moretti n'appréciait que peu nos conversations, car elle voulait certainement y entendre autre chose de moi. Elle n'aimait pas mes mots, mais revenait souvent en écouter d'autres, et tirer de moi d'autres paroles. Il fut malheureux que je n'ai point eu sa culture et sa science pour m'entretenir d'autres choses que cela: j'aurais aimé être capable de lui évoquer les vieilles littératures, parler de ce qui se fait de par l'univers, et des sciences auxquelles les grands du monde s'adonnent. Ou bien, que serait-il advenu de notre relation si j'avais été capable de pointer du doigt l'un des nombreux bustes en marbre rhémien parsemant ses collections privées, et m'étendre sur la signification de chacun de leurs détails avec elle, sous un regard admiratif et passioné. Hélas, notre condition et notre éducation nous empêchèrent de trouver d'autres points communs, et je ne fus jamais rien de plus qu'une diseuse de bons conseils de la politique. Je ne doute pas toutefois, d'avoir conversé avec l'une des très rares bonnes âmes du monde fortunéen, et n'éprouve d'autre regret que de ne pas avoir suffisamment profité de sa personne.



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RP Important (point critique du récit), ACTE I


Le combat des 500: bilan

Ils étaient couchés dans les blés
Par Gina Di Grassi (2017)



a

Là où l'on pensait qu'il n'y avait plus d'honneur dans la conduite de la guerre, les citoyens de Porto Rosso et de Nuevo Fortuna laissent un champ de bataille qui rappelle celui d'une autre époque: lorsque l'on se donnait une heure de rendez vous dans un champ entre deux villes pour s'étriper à nombre égal dans le respect de certaines règles. La violence, en rien n'est porteuse d'une quelconque forme de romantisme. Ce fut là une boucherie à petite échelle, comme peuvent l'être la plupart des guerres modernes. Mais il y avait eu là une tentative de rendre la violence acceptable par l'instauration de coutumes de l'ancien temps, dans une tentative désespérée de codifier l'horreur. L'Histoire retiendra que c'est dans ces vergers enneigés, à quelques kilomètres de Porto Rosso, que débuta la Guerre dodécaliote, dans ce champ où nous avions pensé l'espace d'un instant que la chevalerie et la noblesse d'âme aurait permis d'épargner davantage de vies. Héroiques ces hommes et ces femmes des deux cités étaient, mais idiots tout autant. Il y eu peu de monde pour me croire, lorsque je racontais ce récit à des étrangers, qu'il y eu assez d'hommes stupides pour instiguer pareil combat, parce qu'il fallait dans ce cas-ci, davantage évoquer un combat qu'une bataille.

Ils étaient 270 gens de Porto Rosso, pour 230 de Nuevo Fortuna à rejoindre ces vergés nichés en contrebas de la plaine rossiène. On y cultivait la vigne et l'olivier en été, pour laisser place aux blés d'un hiver d'ordinaire si doux, mais qui cette année de 2017, mordait plus fort, et serrait le cœur des hommes et des femmes de noble naissance de ces deux cités. On appela bientôt cet épisode "le Combat des 500", puisque ce furent ces mêmes gens qui se mirent d'accord pour régler leur différend à cette heure à cet instant. Deux milices de deux exploitations agricoles rivales de part et d'autre de la frontière, réunies en un endroit pour se défier. A le décrire, cela aurait presque pu être un jeu d'enfant, une bataille de clocher comme on en connaît si souvent. Mais c'était là un jeu avec des fusils, qui coucha dans le blé beaucoup de ses participants. La règle donnée en amont fut simple: la tuerie devait s'arrêter lorsque l'un des deux camps en ferait l'appel, et le cadastre de la parcelle sur laquelle ils se seraient battus devait revenir au vainqueur.

La fusillade fut courte, pas plus de quinze minutes, mais elle fut d'une intensité rare, sur un terrain vague où les couvertures et les obstacles permettant la protection étaient inexistants. Le propriétaire du du vergé lui même, un viticulteur Porto-rossien, fut sèchement abattu d'une balle dans le front, et s'effondra aux pieds d'une botte de foin. Pourtant, les gens de Porto Rosso n'ont pas renoncé, et par défi, se sont disputés avec les gens Nuevo Fortuna le cadavre de leur chef, au point de lâcher les fusils et d'en venir aux mains. Au terme du combat, les porto-rossiens ont réussi à le ramener parmi eux, à moitié dénudé, et leur audace avait abattue en grand nombre les néo-fortunéens. Au terme de ce massacre, ceux-ci finirent par se déclarer vaincus après avoir agiter leurs drapeaux.

Les deux camps avaient convenu de cette règle, il est vrai, mais lorsqu'il vint le moment de respecter cette promesse, les gens de Porto Rosso commirent l'infamie de continuer feu, et d'en abattre un grand nombre dans leur fuite. Il n'eut jamais été pour certains question d'honneur, car parmi ce charnier de quelque 180 corps, certains ont été tués dos à leurs bourreaux. De cette infamie ne naquit aucun sentiment de triomphe ou de justice telle que celle que l'on avait espérer de cet évènement, rien que le ressentiment et la colère. Les corps des gens de Néo Fortuna eurent été laissés exposés dans le verger trois jours durant, avant qu'on autorisa leurs concitoyens à venir les chercher. La paix était désormais une illusion lointaine, et tous se préparèrent à faire la guerre.

Ainsi débuta la Guerre des dodécaliotes.


Lieu de l'action:

a
Péninsule d'Apamée


hrp: le conflit, sauf intervention ou médiation, paraît condamné à dégénérer. Si la bataille en elle même, qui a fait environ 80 morts côté Porto Rosso et 110 côté Nuevo Fortuna, ne semble pas avoir été décisive d'une manière quelconque, elle est porteuse de conséquences graves: les deux villes semblent procéder à une mobilisation d'ampleur.

RP IMPORTANT (développement d'enjeux politiques)


Histoires dodécaliotes


Les petits dieux
Gina Di Grassi (Novembre 2017)

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On l'oublie souvent, car les étrangers ne pensent qu'une patrie ne peut être que d'un bloc monolithique et grisâtre, froide structure où toutes les décisions sont prises par un léviathan terrifiant, gouvernant par la tyrannie, imposent leurs vues à des peuples qui ne présentent qu'un seul visage. Ces étrangers oublient souvent que les Hommes libres n'ont pas besoin de tels artifices, de ces faux états qui régentent par la masse et la standardisation, par les normes immuables. La Dodécapole est une patrie d'Hommes libres, oui, qui se gouvernent eux même contre les vents et les marées de la politique internationale, dans les limites de ce qu'il est possible d'exercer comme souveraineté dans un monde qui en ignore les principes. J'ai eu beaucoup parler des cités d'Adria, d'Apamée et de Volterra dans mon récit jusqu'à maintenant, mais pourtant, cela ne reflète pas la complexité des rapports de force dans la confédération que forment chacun de ses états. Dans cette histoire, il n'a jamais été question d'un triomphe d'une patries sur les deux autres, mais sur l'ensemble de la Dodécapole, et il est vain de penser que toutes ces cités, qui n'ont pas le loisir du choix de leurs alliances par leur petite puissance, n'ont pas d'importance dans l'histoire que je conte.

Au contraire, la patrie des dodécaliotes ne trouva de solution que dans le recours à toutes ces cités: celles que l'on pense souvent impuissantes sont pourtant, prises ensemble, les pions d'un grand échiquier, et jouent un rôle conséquent dans la transmission du pouvoir véritable entre les trois patries d'Adria, de Volterra et de Fortuna. Nul puissance ne se construit seule et contre tous. Lecteurs, je vous ai raconté l'Histoire des grands, mais je ne puis la continuer dans vous faire le récit des petits. Cortonna, Castel Estrech, Strombola sur l'Oronte, Cnide, Muthna, Nuevo Fortuna et Porto Rosso... De tous ces pays, je n'ai évoqué que les deux derniers, et guère sous des traits qui peuvent faire penser à des pays de bien et de grandeur. La Dodécapole s'embrasait progressivement: les grandes patries commençaient à s'agiter, mais qu'en était-il des petits ? Y avait-il parmi les petits de ce monde davantage de sagesse que parmi les grands, au delà du carnage de Porto Rosso ? Pourquoi donc personne ne faisait rien lorsque Porto Rosso et Nuevo Fortuna eurent recours aux armes ? Pourquoi personne ne tenta de convaincre les mercenaires d'Adria de ne point organiser une folle aventure en s'en prenant à Cortonna ? Pourquoi personne ne daigna s'inquiéter davantage des desseins malicieux de Salvatore Lograno ?

Dans tout ce vacarme, pourtant, certains ont protesté, d'autres ont fait le mort et la sourde oreille, et quelques uns se sont jetés à bras ouverts dans l'étreinte de la guerre. Par nos latitudes, on appelait ces cités "les petits dieux", dans un mélange subtil d'ironie et d'une pointe de sincérité. Ironie car il était vrai que ces petits dieux n'étaient pas maîtresses de leur destin dans la plupart des cas qui se présentaient à elles, mais sincères tout à la fois, car il ne pouvait être concevable l'idée de nommer un hégémon dodécaliote sans l'assentiment d'une majorité d'entre elles. Si elles n'avaient pas droit à leur chance de,le faire elles mêmes, elles étaient en capacité d'empêcher une cité plus grande qu'elles de le faire. Ainsi, avant même le commencement des affrontements, la loyauté de ces cités eut été le plus grand soucis de tous "les grands": il fallait satisfaire ces petits dieux, quitte à en ménager certains pour en abandonner d'autres. Il ne fallait point l'oublier, que certaines querelles entre ces nations remontaient à un temps, parfois, où la photographie et les armes à feu n'existaient point. Aussi, rallier tout cet univers avec des mots serait une condamnation à l'echec, et de choix difficiles s'imposaient, car la fortune des petits dieux est concomitante de celle des grands.

Si Porto Rosso et Nuevo Fortuna posaient à Apamée le premier de ces questionnements, ce ne serait là que le premier de beaucoup de dilemmes qui allaient venir se tenir entre les patries dodécaliotes et la gloire de nominer un hégémon de sa cité. Porto Rosso et Nuevo Fortuna étaient désormais en guerre, et tous savaient pertinemment de quoi il en retournait, bien avant une simple querelle de cadastre et de territoires frontaliers, bien avant une question de fierté... Il en allait de la domination d'Apamée sur sa propre péninsule, sur ces villes qu'elle pensait sujets loyaux tous deux. Que ces deux cités se détournent de leur affectation vis à vis des apaméens, et c'est Apamée elle même qui se sentirait menacée de les voir se rapprocher de rivaux bien plus dangereux qu'une simple esclandre de voisinage. La Dodécapole était ainsi faite: de petits évènements en apparence anodins, l'horreur banale, étaient pris par tous pour des opportunités politiques menant à des conséquences bien plus grandes.

Qu'en était-il donc des autres patries ? Nous évoquons beaucoup Nuevo Fortuna et Porto Rosso, et leur guerre, que je considère, moi, comme l'un des déclencheurs d'une lutte plus grande, mais il ne fallait point oublier d'avoir une vision large, car les autres "petits dieux" n'étaient point en reste. A l'instant où cette guerre de voisinage se produisait sous les fenêtres d'Apamée, un petit groupe d’aventuriers, celui que nous constituions, avec le commandant Mardonios pour chef, s'apprêtait à opérer "un braquage" d'une patrie quelque peu oubliée de tous, et qui par ce fait, était le terrain d'essai idéal, dans le but de bâtir la puissance d'Adria,et sa légitimité à l'hégémonie.

Cortonna était de ces patries au passé glorieux, mais qui prenait la poussière, car personne n'avait daigné rénover sa puissance depuis fort longtemps, et la ville avait progressivement été oubliée par la grande Histoire. Malheureusement, nul malheur n'est plus grand qu'une nation condamnée au néant par cette dernière, et qu'on revient subitement replacer dans la lumière, car l'éclat la plupart du temps, en fait de la fumée. Pourtant, la cité avait été influente autrefois: pas tant du point de vue de l'argent et de la gloire des armées que de sa position religieuse. Cortonna était alors, jusqu'au temps du XVème siècle, le siège d'un évêché ayant prise sur toute la Dodécapole, incluant également la cité velsnienne, elle même qui du haut de son orgueil que l'on sait fort grand, devait envoyer des clercs poser un genou à terre devant l'évêque de Cortonna. Les habitants de cette patrie, naturellement, ne se concevaient pas autrement que comme les dépositaires de l'autorité des papes de Catholagne, et avec raison.

Mais le temps ne fut pas tendre avec Cortonna, et la cité dés cette époque, commença à entrer en sommeil. Dans un premier temps, ce fut la position de son évêque qui fut mise en danger par les velléités de grandeur de Velsna, qui se substitua de son autorité, et intercéda auprès des papes pour l'institution d'un clergé velsnien indépendant du reste de la Dodécapole. Dans un second temps, ce furent Adria, Apamée et Volterra qui firent de même, et morcelèrent l'ensemble ecclésiastique entre toutes. Dés lors, la cité, dont le prestige ne se reposait que sur la figure des évêques, commença à faner, et lorsque le XXème siècle arriva, on cessa tout simplement de prier, ou du moins, la question de la religion devint de plus en plus secondaire dans les grands enjeux du pouvoir dodécaliote et velsnien. On s'en référait à dieu et sa morale encore, mais d'une manière détachée, comme partout en Eurysie. Le coup de grâce fut porté par la construction du grand canal d'Adria, faisant se rejoindre la Manche blanche et les eaux du Nazum, et qui détournèrent ce qui restait de son commerce vers les eaux de la capitale des érudits. Lorsque débute mon récit, Cortonna n'était donc plus qu'une petite ville parmi d'autres cités de la Dodécapole, entrée dans le rang, dont les élites rabougries veillaient sur un cadavre. De gloire il n'était plus question, seulement d'une survie précaire.

Cortonna était seule, sans alliés, car sa prétention historique était devenu un handicap, comme dans toutes le situations où l'on se pense centre du monde lorsque l'on ne dispose guère des moyens d'arriver à la fin. Gouvernée d'une part par une oligarchie passéiste et d'autre part par un clergé toujours directement nommé depuis la Catholagne, figé dans le temps comme une peinture sur une toile, dont l'éclat se caille par peur de dénaturer l’œuvre d'origine. La cité n'avait pas même daignée se rendre aux différents congrès dodécaliotes depuis plusieurs décennies, sans que l'on fasse remarque de sa disparition. Elle était, à tout point de vue, le ventre mou de cette confédération, et une cible de choix d'ambitions plus grandes qu'elle. Un tremplin. qui conservait quelques atouts de la puissance, des breloques à mettre dans une vitrine, à exposer en signe d'un prestige qui est associé à tous les désirs du pouvoir. Détentrice d'une puissance obsolète et dépassée, c'était là indéniable, mais la portée symbolique de son alignement était tout autre chose.

Or, parmi toutes les cités de la Dodécapole, peu d'autres entretenaient autant d'inimitié avec la patrie des évêques que celle des chercheurs. Adria et Cortonna se vouaient une haine séculaire qui depuis bien longtemps, avait tourné à l'avantage de cette dernière. D'une part, c'était en faute d'Adria que les quais de Cortonna s'étaient vidés de leurs cargos. Et d'autre part, il y avait là une portée symbolique de voir la cité qui s'est enrichie par le biais des savoirs profanes porter le coup de grâce à sa rivale, dont la dernière des fiertés reposait sur l'héritage de la religion. Si officiellement, les autorités d'Adria n'avaient pas fait part depuis longtemps de leurs velléités hostiles vis à vis de leurs adversaires historiques du versant oriental de la Dodécapole, certains individus gravitant autour des cercles de pouvoir du Directoire des universités ne cachaient guère leurs vues, et il avait émergé de leurs esprits une idée folle.

Apamée et Volterra bombaient le torse de leur côté, et personne ne regardait du côté de l'orient. Les cités dodécaliotes étaient pendues aux lèvres de leurs deux consœurs en lutte ouverte d'influence, et certains dans la cité des chercheurs, se plaignirent que celle ci ne fit rien pour profiter de son avantage temporaire. Mais c'était mal connaître les mercenaires dont s'étaient entourés son excellence Marina Moretti, qui avaient leurs propres desseins dans l'espérance que leurs employeurs soient toujours vivants pour les payer lorsque la fin de ce chapitre de leur Histoire serait clos. Les achosiens du nord et les kotioides, à l'ombre des faubourgs d'Adria, paraissaient avoir déjà décidé du sort de Cortonna: le congrès dodécaliote approchait à grands pas, et une voix était une voix, même celle d'une théocratie isolationniste et méprisable. Il était ainsi décidé que de gouvernement, Cortonna devait en changer, avec pour volonté de se débarasser du clergé sclérosé des apaméens.

C'est dans ces temps que j'entendis le commandant Mardonios évoquer pour la première fois la fameuse idée, celle du "braquage de Cortonna". Oui, c'était là un nom puissant, inspiré par San Stefano lui-même pour désigner ce qui ne serait rien de plus que le croisement entre un coup d'état, et la prise d'une ville dans la plus grande des stupeurs. Un coup de main meurtrier digne des grandes épopées et de l'audace digne de récits que l'on me lisait, lorsque je fus rien qu'une enfant, la tête jointe à l'épaule du sénateur mon père. Des exploits qui me font dire que la ruse est le propre des gens de notre patrie, et surpassent de loin toutes les épreuves de force que l'on nous impose. Porto Rosso et Nuevo Fortuna étaient à sang déjà, et pour longtemps, mais nous espérâmes de notre côté, qu'au contraire, ce "braquage" soit une œuvre si fulgurante, comme un éclair dans la nuit, qu'elle laissa tous les acteurs de notre pièce de théâtre devant le fait accompli que la cité d'Adria commençait sa marche en avant.



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RP MINEUR (développement de personnages)


Histoires dodécaliotes


Le tueur de menkiens
Gina Di Grassi (Novembre 2017)

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Sinistre réputation, sinistres souvenirs. Les hommes et les femmes à qui j'ai tenu la compagnie durant ce temps de la guerre dodécaliote étaient du tout venant: des Hommes bons, des Hommes qui tentèrent de faire le bien, ou d'autres qui se sont persuadés de le faire, ou de l'avoir fait. Des Hommes avec des regrets, d'autres qui n'en éprouvèrent pas le moindre. Le temps des dodécaliotes fut un tel déferlement de fureur, qu'il est fort possible que les derniers l'eurent largement emporté sur les premiers. Parmi ceux qui cherchaient la justice, les montagnes d'or ont attiré les moins méritants, et les plus vils des esprits. Pour ceux qui se pensaient être l'exception, ils se sont rendu compte bien vite que les principes, dans des temps de conflit, étaient un luxe qu'il n'était point possible de toucher ne serait-ce que de la pointe du doigt.

J'ai longuement évoqué le nommé Lograno, cette figure fascinante et terrifiante, que j'eus gardé en mémoire car elle exprimait à mon sens toute la violence de ces temps de troubles. De pauvre homme, il devint mercenaire, de mercenaire il devint prince, et de prince il devint tyran. Le temps était aux gens de basse extraction, qui s'élevèrent par dessus leur ancienne condition pour tenter de toucher le soleil. Mais si je parla bien souvent de Salvatore Lograno, j'eus encore épargné à mes lecteurs la bassesse de ses premières armes, qui donna au monde fortunéen et au monde celte une préfiguration de sa cruauté. En tant que conteuse d'histoires, je cherchais longtemps des témoins de cette partie de sa vie, si peu connue et empreinte de mystères. Comment un si petit homme devint si grand et menaçant pour tous les gens de bien. Pour voir au delà de ce brouillard, je fis quérir alors des Hommes qui avaient connu les époques où il commença à faire parler de lui, dans les forêts celtes, et où j'étais bien trop jeune pour me souvenir moi-même.

L'île celtique des années 1990 et 2000, était l'endroit où tous les mercenaires du monde fortunéen se retrouvèrent au moins une fois, comme un rendez vous avec la mort à la lisière de l'univers. Ce fut un temps de violence, comme ces barbares savent très bien l'administrer: l'Achosie du nord, ma patrie, fut en sang lorsque j'étais encore trop jeune pour savoir écrire. Ce que le sénateur mon père ne me conta point par pudeur et pour m'en épargner les horreurs, ce fut mon commandant, Mardonios, qui me l'apprit durant notre séjour à Aria, lui qui avait participé à cette "Guerre de l'AIAN". Le reste de l'île fut en proie à tout autant de malheurs, la patrie des barbares menkiens subissait elle aussi les affres de la mort en ces temps-ci, et attira par la même le Commandant Mardonios, qui avait tout juste fini ses affaires en Achosie du Nord. En fin d'année de 1997, il prit alors le bateau, et se rendit en pays menkien. Leur patrie était déchirée par des groupes de bandits et de voyous qui se donnaient une légitimité bâtie sur les idées au nom desquelles ils se battaient. Dans un temps où le grand Lorenzo eut imposé son pouvoir sur les loduariens, certains d'entre eux prétendaient se battre au nom de "la République de l'amour humain". Tandis que d'autres avaient regardé les tyrans listoniens, et s'étaient dit que c'était peut-être leur manière de gouverner qui fut la plus efficiente. Le peuple menkien, dans ce qu'il appelle encore aujourd'hui "la guerre occulte", était balloté et sans attendre de salut d'un gouvernement qui n'existait plus que sur le papier.

Le commandant Mardonios, par ses exploits connus en pays achosien, fut alors reçu par ce gouvernement menkien en plein désespoir, et lui donna lettre de marque pour exercer son courroux en leur nom: "Tuez les bruns, et brûlez les rouges", tel était la seule indication de ceux qui n'avaient que trop hâte de retrouver leur tranquillité. C'est en ces temps là que Mardonios, le plus grand des mercenaires, fit la rencontre d'un jeune homme de Volterra, qui dans cette ville celte de Kery's, se mit à genoux devant lui, l'implorant d'intégrer sa compagnie si prestigieuse. Il avait les yeux lumineux, le teint pâle et était volontaire de tout, déjà très brillant du haut de ses 17 années d'existence. Mardonios aimait prendre sous son aile de tels gens, sans foyer, sans famille et sans argent: l'existence qu'il menait était, malheureusement, l'échappatoire de beaucoup fuyant une misère plus grande encore. C'est ainsi que Salvatore Lograno a fait son entrée dans la grande Histoire: en tant que sans-rien, que Mardonios couva, habilla et arma, non seulement d'un fusil, mais de ses connaissances de la guerre, car ce serait là mentir de dire que Lograno n'était que cruauté, il était également intelligence et ruse nécessaire pour survivre à cette vie sans cadeaux.

Le Commandant Mardonios m'a dit, m'a avoué à quel point les combats de la Guerre occulte étaient d'un autre âge, où l'honneur n'existait plus. Il me confessa qu'il avait rendu toute la violence qu'on lui donna, qu'il tua des êtres qui n'étaient pas encore hommes, ou qui n’étaient pas encore femmes. Il me dit aussi, que Lograno grandit et apprit à ses côtés de cette terreur, qu'il en absorba les influences, qu'il comprit l'efficacité de la peur pour obtenir des informations et un avancement pour personne. Lograno était fait pour ce métier, mais il savait également se faire aimer, si bien qu'il se retrouva en quelques mois à la tête d'un petit groupe de dix membres de la compagnie du vieux chef. Il partageait avec eux son eau, sa nourriture, ses butins et ses prises, et eux, lui donnaient sa loyauté. Mardonios fut fier de lui à cet instant, mais que ne serait pas ses regrets quelques temps après l'avoir fait entrer dans ce monde, où ce jeune homme était bien trop doué pour son propre bien.

Mardonios, le plus grand des mercenaires, imposait certaines règles, tenta d'instituer un cadre à la violence, mais dans des temps où les frontières étaient aussi floues, il était difficile de surveiller, de constater les choses. Ces limites, comme toutes les autres, Salvatore Lograno les ignorait. De limites, il n'en avait jamais connu aucune, et celle de l'autorité de Mardonios fut la première qu'il franchit dans cette jeunesse qui préfigurait un avenir violent. Mais de cette violence, on ne pouvait dire qu'elle n'avait pas de but à son sens, qu'elle fut aveugle. Ce serait là une erreur lorsqu'on est son ennemi, que de penser que la fureur que Salvatore Lograno administre était gratuite. Dans son esprit, à cette époque lointaine, ce n'était déjà pas le cas. Et le commandant m'a fait part de l'épisode qui l'a convaincu de ce fait, et qui a laissé une marque suffisamment profonde dans son être pour qu'il s'en rappela jusqu'aux quais d'Adria, deux décennies plus tard.

C'était là au début du millénaire, lorsque les gens du gouvernement menkien reprirent l'avantage sur les bandits, et que Lograno eut été sous l'aile de Mardonios depuis quelques années. Ceux-ci s'étaient alors risqué de faire de la petite guerre asymétrique, rouges et bruns, mais sans avoir l'étoffe et le talent des achosiens de l'AIAN, si bien que l'armée impériale des celtes les prit en tenaille, les deux groupes, qui non sans ironie refluaient en désordre depuis deux directions différentes vers la même ville que l'on pensait peuplée de leurs sympathisants. Les combats furent nombreux et l'objet d'une grande fureur. Les muscadins de Mardonios payèrent me tribut de cette bataille, qui ressemblait grandement à celle que livre la sénateur mon père contre les achosiens, plusieurs années plus tôt à la Falaise rouge. Désirant plus que tout sa part du butin, le jeune Lograno se présenta devant Mardonios et lui ft la requête de prendre les rouges et les bruns par surprise de nuit, sans attendre l'armée régulière du Saint Empire. Le vieux chef fut réservé, car de salaire, leurs employeurs avait déjà promis. Aussi, Lograno fit montre de grandiloquents discours, arguant qu'un gain plus grand encore fut possible en atteignant la ville avant ceux-ci. Mardonios refusa encore une fois, mais apprit la nuit qui suivit, que le mot "non" n'est guère souvent connu de l'homme.

De belle nuit, Lograno prit avec lui les hommes fidèles de la compagnie, et entreprit de prendre rouges et bruns de Menkelt dans leur sommeil, mais pas seulement. Il prit les bandits par surprise, mais aussi tous les civils, hommes, femmes, enfants et vieillards, tout ce qui marcha et parla, susceptible d'abriter un grand butin. Il réussit sa prise admirablement, mais ce qui suivi ne fut pas digne d'éloges, car même chez les mercenaires, ce qui advint cette nuit paraissait cruel.

Ceux qui refusaient de donner leurs richesses, par ironie, eurent la mort la moins douloureuse, les abattant dans les règles qui étaient les siennes. Vint ensuite ceux qui donnèrent suffisamment, qui furent les seuls épargnés, à qui il les laissa partir avec une tape sur la joue gauche à chacun. Seulement, il ne laissa disposé que ceux qui s'étaient portés volontaires de leurs propres richesses. Ceux qui avaient dénoncé les richesses des autres, rouges, bruns comme civils, il les garda avec lui, et il chercha à donner un sens à ce qu'il apprêtait à leur faire.

" Vous, bruns. Vous professez le triomphe de la force et de la volonté. Pensez vous pouvoir continuer dans cette croyance lorsque ma botte est sur votre gorge ? Vous vouliez la barbarie, me voilà.

Vous, rouges. Vous professez la République de l'amour humain, mais regardez moi. Pensez vous qu'il est possible de l'atteindre alors que j'existe, et que vous partagez votre air avec moi ?

Vous, pauvres gens. Sachez que que vous mourrez que parce que je suis capable de vous donner la mort, et que vous êtes incapables de la fuir."


La suite de cette histoire, je ne la raconterai pas dans le détail, car elle fut si cruelle qu'il convient d'épargner mes lecteurs d'une telle ignominie qui défia toutes les lois de la guerre, même celles reconnues parmi les mercenaires et gens de peu de foi. Lograno commença ses jeux macabres. Il fit attacher les prisonniers trois par trois, un brun, un rouge et un civil dans chaque groupe. Il traça deux lignes dans la terre avec son pied, à quelques encablures de distance: à son tir, tous devaient se ruer d'une ligne à l'autre jusqu'à ce qu'il ne resta plus qu'un groupe. A chaque allée et venue, le dernier groupe se fit abattre par l'homme lui même. Ils commencèrent la course à cinquante, ils la finirent à trois, qu'il laissa partir. Les autres furent entassés par les hommes et les femmes de Lograno dans un fossé à l'écart de la ville.

Au petit matin, Salvatore Lograno et son groupe revinrent au camp du commandant Mardonios, fiers et le torse bombé d'autant de prises de guerre. Lorsque Mardonios lui demanda d'où il avait fait irruption, il lui pointa la ville fumante du doigt, et dit qu'il avait "tout fait tout réglé". Croyant peut-être à une étreinte et l'affection du commandant, il lui montra les cadavres, dont il fit très fier. Mais cette requête d'amour ne fut accueillie que par le dégoût, et un violent coup dans son visage d'ange. Mardonios le fit tenir par ses hommes, et le passa à tabac. Aucune partie de son corps ne fut épargnée par sa colère, mais le commandant jugea qu'il eut été trop bon de le tuer de cette manière. Aussi, et parce qu'il était animé de cet étrange code d'honneur qui ne le rendait pas moins violent que Lograno, il le fit se relever et lui lança un couteau de muletti à ses pieds, lui intimant de se défendre. Le combat fut court: diminué, jeune et inexpérimenté, Mardonios le taillada de part en part jusqu'à ce qu'il s'écroule, et qu'il perda beaucoup de sang qui coula sans discontinuer de ses plaies. Mardonios le fit jeter dans la fosse où Lograno avait lui-même entassé ses victimes, avant de repartir sans regarder derrière lui.

C'est ainsi qu'assez injustement, et parce que le vieux chef n'a jamais daigné donner sa version au reste du monde, qu'il se fit appeler "tueur de menkeltiens" par le tout venant, sans justice pour sa personne qui n'avait pas été responsable de ce crime. Il quitta Menkelt sans même chercher à être payé, et n'y retourna jamais.

Lorsque je demanda au commandant de se confier quant à cette histoire, je remarqua néanmoins qu'il était tiraillé par le regret d'avoir fait de nombreuses erreurs en ce temps: il exprima en premier lieu le regret de ne pas s'être assuré que Lograno soit bien mort, pour qu'ensuite, il eut des remords de l'avoir amené à cette existence misérable qui était trop bien faite pour lui, avant d'affirmer que Salvatore Lograno aurait mérité une autre vie, et qu'il était bien trop tard pour lui. Mais pas à un seul instant, il en voulait à ceux qui le surnommait par le funeste fait d'armes que quelqu'un d'autre avait fait en son nom. Ces paroles que j'ai soutiré une seule fois, il m'a dit à cet instant que ce serait la dernière fois qu'il en ferait allusion, et que personne ne mérite que l'on raconta ces horreurs.

A cette conversation, j'ai suivi le cours de mes pensées, en allant plus loin, et en me répétant à moi-même qu'il était peut-être de notre faute à tous, en un tout, si des hommes tels que Lograno existent, et qu'il était notre faillite, en tant que groupe.



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RP IMPORTANT (combat)


Histoires dodécaliotes


L'étrange bataille de Messalie
Gina Di Grassi (3 décembre 2017)

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Il est bien triste spectacle que donna les cités de Porto Rosso et de Nuevo Fortuna aux yeux du monde. De matin, les habitants du vieux port de Messalie, la patrie des explorateurs, eurent à subir un évènement à la fois inoui et pathétique, captivant et incongru, d'une grande absurdité. Les habitants du paisible paradis fiscal se réveillèrent avec la vue d'un grand panache de fumée s'élevant au loin, précédant des détonations lointaines. C'était là au début presque imperceptible, deux points à l'horizon, l'un semblant fuir l'autre, qui était responsable de cette immense traînée grise et noire, faisant le trait d'union entre les eaux azurées de la Leucytalée et un ciel bleu sans nuages. C'était là deux navires de modestes dimensions, dont le pavillon à cet instant, n'était point visible depuis la côte. Puis, après une autre salve du poursuivant intensifia le panache, et le traqué se rapprocha graduellement du rivage, grossissant de plus en plus, au point que l'on ne pouvait que constater la nationalité du pavillon: c'était là un navire de la cité dodécaliote de Porto Rosso, dont les marins firent des signes paniqués aux gens de la côte, tandis que le navire ennemi, lui, s'éloigna de sa proie dés qu'elle senti que son audace pouvait provoquer un incident diplomatique trop grave. Il ne fallu guère longtemps pour que le personnel des installations portuaires messaliennes les plus proches, puis son gouvernement, reçoive un message urgent de la part de l'équipage de ce petit patrouilleur, leur demandant l'asile temporaire et la réparation de leur navire en toute urgence. A peine quelques minutes plus tard, les messaliotes accusèrent réception d'un autre message, cette fois ci de la part des assaillants néo-fortunéens: plutôt que de se mettre à dos les locaux, ceux-ci, connaissant l'amour que les messaliens avaient de l'argent, demandèrent à son gouvernement de leur livrer le patrouilleur contre l'équivalent de la coquette somme de 100 millions de florius, l'équivalent d'alors de 1 000 unités internationales standard.

Pour comprendre l'enchaînement d'évènements qui mena à cette situation ubuesque, il fallait remonter le temps quelques jours plus tôt. Lorsque les deux villes se déclarèrent la guerre, il était évident qu'il s'agissait là que d'une petite guerre pour quelques arpents de terre, dans la péninsule apaméenne. Il était évident que les deux micros états n'avaient pas les moyens d'appliquer leur logique de destruction mutuelle à une échelle plus grande que celle-ci. Pourtant, cela n'empêcha pas les deux camps de frapper là où le bas blessait le plus: par le biais de la mer, et de ses ressources dont dépendaient les deux cités. Par le plus curieux hasard du destin, il sembla que Dame Fortuna donna aux deux gouvernements la même idée au même instant, comme par une ironie dont seule celle-ci connaît, pour tester l'amour que les deux patries avaient d'elle. Porto Rosso arma donc un patrouilleur, un grand investissement en soi pour une ville si modeste, dont l'équipage fit aussitôt le tour de la péninsule pour couler chaque navire de pêche néo-fortunéen qu'il croisa. Pourtant, ce fut mal connaître les très fiers habitants de Néo-Fortuna, qui envoyèrent leur propre navire à leur chasse. Les combats qui s'ensuivirent tournèrent raîdement à l'avantage de ces derniers, qui expulsèrent les rossiens de leurs eaux. Mais ce ne fut pas suffisant pour le capitaine du navire néo-fortunéen, qui se mit en tête de ramener ses ennemis en trophée à sa cité.

Ce fut alors le début d'une traque de plusieurs jours qui amenèrent le deux navires à contourner tout le versant ouest de l'Eurysie au gré de leurs escarmouches qui chassèrent inexorablement le navire de Porto Rosso vers le sud, pour finir aux abords de la Leucytalée, dont la bouche béante fut occupée par un important trafic, comme à son habitude. En difficulté, le capitaine du patrouilleur prit pour cible prit alors la décision de bifurquer vers Messalie, à la recherche d'une assistance et d'un refuge. La décision était désormais entre les mains du gouvernement de ce petit paradis fiscal...



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