11/05/2017
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[Karty/Grand Kah] La Commendatio

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À: Commissaire aux Affaires Extérieures
DE: Bureau d'Analyse Géostratégique – Section Eurysie Orientale
DATE: 08/04/2017
OBJET: Fiche de synthèse sur la République Impériale de Karty en vue d'une rencontre diplomatique

Karty se présente comme une puissance régionale en pleine mutation. Fondamentalement militariste, nationaliste et souverainiste, cet État sort d'une longue période de construction conflictuelle qui a forgé son identité. Son idéologie est marquée par un anti-communisme viscéral et une fierté nationale exacerbée, résumée par leur devise : Patrie, Armée, Honneur.

Leur politique étrangère est un paradoxe : ils prônent un isolationnisme en refusant d'intégrer les grandes alliances multilatérales (UEE, BNE, OND), mais tissent activement un réseau dense d'alliances bilatérales centrées sur la défense mutuelle et le commerce. Leur principal allié et point d'ancrage est le Royaume de Teyla, lui-même membre de l'OND.

Sur le plan intérieur, le régime vient d'opérer une transition politique majeure en se proclamant « République Impériale ». Cette structure hybride, où une Chancelière élue détient le pouvoir exécutif tandis que le Tsar conserve une influence capitale au sein du Conseil Militaire, est une source potentielle d'instabilité. Des tensions culturelles internes entre les majorités slaves et les minorités germaines et italiennes persistent.

Leur armée est leur principal outil de puissance et de dissuasion. Leur doctrine privilégie la suprématie aérienne et une posture défensive, mais ils n'hésitent pas à des démonstrations de force disproportionnées contre des acteurs jugés plus faibles pour affirmer leur statut. Leur marine reste à ce jour leur point faible.

Nous recevons une nation fière, hypersensible aux questions de souveraineté et d'honneur, dotée d'une force militaire conséquente mais stratégiquement prudente. Leurs faiblesses résident dans leur dépendance énergétique aux importations d'Uranion et leurs fragilités politiques et culturelles internes. Notre approche devra être empreinte de respect formel, tout en exploitant subtilement ces vulnérabilités.

[...]


Actée Iccauthli posa le rapport dans son dossier, et le repoussa sur le bord de la table. Le carton crissa doucement contre le bois laqué. Un son bien dérisoire dans le grand salon diplomatique. Rien, dans cette note, ne promettait une rencontre réellement productive. C'était ce qu'elle avait déjà expliqué à ses camarades du Comité, et à la Convention générale, lorsqu'il avait fallu statuer sur l'utilité d'accepter ou non cette rencontre. Elle l’avait ensuite répétée lorsqu’il avait fallu décider des objectifs de la rencontre. Puis, enfin, et en désespoir de cause, quand elle avait commandé la production de ce rapport.

Karty était, à tout point de vue, une nation opposée aux principes même du communalisme libertaire. Elle ne voyait vraisemblablement en l'Union qu'un danger potentiel, si éloigné par deux océans et un manque relatif d'implication en Eurysie centrale. Qu’est-ce qu’on pouvait tirer d’eux ? Qu’est-ce qu’on pouvait réellement en tirer ? Sans trahir les objectifs ou principes de la révolution ?

Elle en était encore à se le demander.

Alors quoi ? Que pouvait-on vraiment, vraiment espérer d'une rencontre de ce type ? Elle s’enfonça dans son fauteuil, ses doigts se serrèrent et desserrèrent sur les accoudoirs en velours rouge et son regard parti en direction des grandes fenêtres. Dehors il y avait un soleil aveuglant, et une masse épaisse de kah-tanais zigzaguant entre les étales du pochtecatl. Elle se reprit en se redressant. Pochtecatl était un terme associé aux cultures nahuatl. Ici on parlait plutôt de bazaar, ou de souk.

Peut-être que le nouveau gouvernement élu de la République Impériale (le nom lui arracha un petit sourire ironique) voulait tester sa légitimité républicaine en allant se frotter avec grandes démocraties de ce monde. Peut-être qu'il s'agissait simplement d'un nouvel exemple de cette stratégie remarquablement efficace que les kartyiens avaient suivi jusque-là : à savoir, s'orienter dans le sens du vent. C'est que pour le moment le Zéphyr de l'Histoire gonflait les voiles de l'Union. Mais ça ne suffisait pas. Pas à justifier cette rencontre. Pas à en faire autre chose qu'une simple visite de courtoisie. Elle se tourna vers la table et posa une main sur le dossier, hésita, puis s'en saisit à nouveau, prête à plonger dans la suite de la synthèse. La porte du salon s’ouvrit.

« Alors ? Les singes savants du Commissariat ont fait des miracles ? »

Elle releva les yeux vers la source de la voix. Le citoyen Aquilon Mayhuasca venait d'entrer. Il était comme elle l'un des deux "jeunes radicaux" qui avait profondément influencé la reconstruction du Grand Kah après la junte. Le temps était passé et ils n'étaient ni particulièrement jeunes ; ni particulièrement radicaux. Les pragmatiques menaient la danse avec une régularité d'horloge mährenienne, et les nouveaux radicaux dépassaient tous leurs ancêtres en audace et en violence.

Aquilon, au moins, avait sa place acquise dans la postérité. Malgré ses petits airs d'intellectuel à lunette, il avait été à l'origine de la nouvelle architecture de la Garde Communale. Merde. Dix années d'opérations militaires brillamment réussies avaient pour origine cet infâme petit coordinateur à la théorie politique. Elle lui sourit avec ironie. Cet infâme petit coordinateur était un bon camarade.

« Des miracles ? Pas vraiment. Les tiens ?
– Mes singes savants s’occupent de la Coordination et du Rapporteur. Ce sont des affaires internes, Karty, eh bien. » Il fit la moue. « Ils s’en foutent. »
 Je voulais dire le comico’ à la paix, tu y as encore tes entrées.
– Ah ! » Il haussa tranquillement les épaules et vint se placer derrière elle pour jeter un rapide coup d’œil à ses fiches. « Eh bien rien de bien intéressant. Karty ne représente pas un intérêt stratégique immédiat. Tu sais qu’ils ont quelques plans pour les écraser militairement si ça devenait utile, quelques idées pour tenter de les inféoder à l’Union ? Rien de réaliste en ce qui nous concerne, évidemment. Ce n’est pas comme si on allait leur dire ‘Bonjour et bienvenue au Grand Kah ! Ne faites pas attention aux soldats, nous réfléchissions juste à l’intérêt d’une invasion de votre empire’ ... »

Elle souffla, faisant tourner distraitement un stylo entre ses doigts.

« Quels tarés.
 »

Aquilon haussa à nouveau les épaules. Il se dirigea vers une carafe d'eau posée sur une desserte et se servit un verre. Il devait se dire que, fut un temps, ces idées leur auraient semblé très alléchantes. Mais outre le coût humain d’une invasion, elle n’aurait jamais que précipité un régime, du reste un peu moins détestable maintenant qu’il y a peu, dans les bras d’ennemis de l’Union. De toute façon le Commissariat envisageait semi sérieusement la destruction de tout régime qui n’était pas ouvertement socialiste ou communaliste. Ça faisait partie de ses prérogatives. Il s’éclaircit la gorge en faisant le tour de la table.

« Le commissariat fait ce qu’on lui demande. » Il but une gorgée puis sembla se rappeler de quelque chose. « Et à ce propos ! La citoyenne Hazel dîne avec nous, ce soir. »

Le citoyen avait prononcé le mot « dîne » avec une inflexion un peu particulière, presque ironique. Le Commissariat à la Paix avait demandé l’autorisation de participer à cette rencontre, et la Convention lui avait accordé. Mais tout le monde avait imaginé que ce serait via le citoyen McUalraig, le pionnier de la guérilla qui avait vaincu la Communaterra. Après tout, il se trouvait à Gokiary – on avait en effet décidé que la rencontre aurait lieu dans la commune Afaréenne. Officiellement parce qu’elle était à mi-distance entre Karty et Lac-Rouge. Un geste de cordialité qui avait aussi l’avantage de ne pas offrir à la république impériale le symbole d’un atterrissage triomphant dans la capitale mondiale du communalisme, au Paltoterra.

Seulement non. Cormac était très occupé avec une enquête interne, à propos d’anomalies dans les livraisons d’armes à destination du Gondo. Quelque chose d’un peu obscure qui lui prenait manifestement tout son temps. Ce serait donc Hazel Maillard. Et c’était sans doute plus intelligent, sur le plan diplomatique. Cormac était un homme de la brousse et de la guérilla, qui faisait peu de cas des réactionnaires et considérait le monde avec un cynisme redoutable. Hazel, elle, était le plus pur produit des grandes académies kah-tanaise. Intelligente – brillante, même. Méthodique. Moins remarquée pour ses faits d’arme que pour avoir mené d’importantes réformes logistiques, assurant le bon approvisionnement de l’impressionnant dispositif de déploiement kah-tanais à travers le monde.

Elle était, par bien des aspects, beaucoup plus modérée que son camarade. En somme Cormac représentait le communalisme révolutionnaire et triomphant. Hazel, quoi qu’inattaquable sur le plan idéologique, aurait pu avoir sa place dans n’importe quelle armée du monde.

Ainsi, Actée approuva la nouvelle d’un vif acquiescement.

« Parfait. »

Aquilon croisa les bras.

« Je savais que ça te plairait », rétorqua-t-il en plissant les yeux. Il leva le menton et fit un geste vers une horloge accrochée au mur. « Et maintenant nous devrions peut-être aller accorder nos violons avec la citoyenne Maillard. On verra bien ce qu’on leur dira. »

Actée referma le dossier et le passa sous son bras en se levant de son siège.

« Tu veux dire qu’on improvisera. »

Aquilon ouvrit la porte et la tint ouverte, lui faisant signe de passer avant lui.

« C’est toi, la diplomate.
– J’improviserai. » Elle souffla, amusée, puis le dépassa. « D’accord. »



La chaleur en Afarée était déjà difficile à supporter pour un habitant du cru. Pour un Euryien de l’Est, issu d’un pays farouchement isolationniste et n’ayant sans doute jamais quitté les horizons tempérés du vieux continent, elle relevait de l’épreuve. Dans le meilleur des cas, le Kartien de gouvernement, grand bourgeois ou fils et fille d’oligarque, avait peut-être séjourné dans l’une de ces ridicules stations balnéaires réservées aux riches que l’on trouve sur certaines côtes afaréennes. Rien, en somme, qui prépare à l’expérience de mort imminente qu’offre le soleil équatorial au blanc moyen. Et certainement pas quand la situation – ici une mission diplomatique – vous oblige à enfiler un complet trois pièces.

Aussi, parce que l’objectif n’était pas de tuer les invités de l’Union, on avait prévu un parcours limitant au maximum leur exposition au monde extérieur. De toute façon cela tombait bien, la commune de Gokiary s’était formellement opposée à toute débauche diplomatique en l’honneur de Karty. Pour reprendre les termes employés par ses représentants, on pouvait tolérer la présence des « peignes culs » de l’Empereur, mais on irait pas non-plus leur faire croire qu’ils étaient les bienvenues.

Ainsi une fois descendus de l’avion qui les avait amenés sur le sol de la commune, les représentants impériaux passèrent directement du hall de l’aéroport aux habitacles climatisés de berlines électriques qui les amenèrent jusqu’à l’intérieur d’une assemblée communale. Le double avantage de ce parcours était, comme dit, d’éviter la mort aux Kartiens et, secondaire mais pas des moindres, de justifier l’absence totale de cérémonie officielle célébrant la rencontre. Tout était protocolaire, mais désincarné. Le strict minimum diplomatique, en somme. On pouvait au moins reconnaître aux kah-avais qu’ils savaient être francs.

Dans l'assemblée, la petite délégation diplomatique qui avait jusque là accompagné les eurysiens se dispersa pour laisser apparaître les deux membres du comité de Volonté Publique chargés de la rencontre. Ils attendaient les Kartiens au seuil d'une large porte en bois sculpté.

https://i.imgur.com/TI28a6v.png

« Bienvenue à Gokiary. J’espère que vous avez fait bon voyage.
– Si vous voulez bien nous suivre ! »

Le premier membre du comité, et visiblement la principale interlocutrice, était la citoyenne Actée Iccauthli. C'était une femme au visage sévère et aux traits fins, dont les cheveux noirs étaient coupés courts. Son regard, sombre et perçant, précédait chaque parole d'une analyse concise de ses interlocuteurs.

À ses côtés se tenait le citoyen Aquilon. D'une tranche d'âge similaire, il était moins connu à l'international et affichait un sourire tranquille, sûr de lui. C'était un homme qui manifestement ne s'embêtait pas à ressentir le doute ou l'hésitation.

Sans un mot de plus, ils firent signe aux délégués de les suivre à l'intérieur. La salle où ils pénétrèrent était un havre de fraîcheur et de confort qui tranchait radicalement avec l'extérieur plus sobre de l'assemblée. Des boiseries sombres couvraient les murs, des tapis épais étouffaient le son de leurs pas et l'air était brassé par de larges pales de plafond. Une immense baie vitrée, ouverte sur un balcon, donnait directement sur un bazar. Le contraste était saisissant : en bas, tout était cacophonie, vie, bruit. Un tourbillon de couleurs, de cris et d'odeurs qui montait à peine jusqu'à eux.

Déjà présente, se tenant près de la baie vitrée, l'officier Maillard se tourna vers eux. En uniforme de service impeccable. Dès que les représentants kartiens franchirent le seuil, elle se leva, s'avança d'un pas assuré pour les saluer d'un signe de tête formel puis leur serra fermement la main, un geste bref et professionnel, éloigné des conventions révolutionnaires. Parfait, pensa Actée, notant la réaction des kartiens devant un salut si familier pour eux. À côté d'elle, Aquilon afficha un sourire entendu.

« Je vous présente la citoyenne Hazel Maillard. Vous n'êtes pas sans savoir qu'elle est l'une des trois figures de tête du triumvirat de notre Garde communale.
– Messieurs-dames », ponctua Actée en indiquant une table basse. « Installons-nous. »

Suivant l'exemple de leurs hôtes, tout le monde pris place sur les larges et confortables coussins posés au sol, de part et d'autre d'une table basse en bois laqué. À peine étaient-ils installés qu'un employé entra silencieusement, déposa un plateau et servit à chacun une tasse de thé fumant et parfumé. La rencontre pouvait commencer.

« Vous êtes à l’initiative de cette rencontre », lâcha enfin Actée. « Souhaiteriez-vous commencer en nous indiquant les sujets que votre gouvernement aimerait d’aborder ? »
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Un jeu de pouvoir.
Le trône rouge.
L'appel décisionnaire.
En territoire hostile.


Un jeu de pouvoir
Politiste Kartien Fern Hossein

alinéaLe monde géopolitique actuel est formé autour de pôles, un qui se veut multilatéral. Anciennement, le monde était scindé en deux, une obligation de s'aligner à l'UNCS ou à l'ONC, certains dérivant tout de même par l'indépendance. Ce code a été largement cassé, donnant celui que l'on connaît bien aujourd'hui. C'est là la théorie des axes d'alignement, défendue par le politiste Kartien Fern Hossein. Ce dernier présente l'ensemble des pôles qui règnent sur le monde, cependant aucun d'entre eux n'arrive réellement à la pleine domination. Le tout varie des organisations internationales, aux pactes régionaux, jusqu'aux puissances totalement indépendantes. Un jeu de pouvoir en somme, un que l'on pourrait comparer à un échiquier géant, chacun plaçant ses pièces, s'alliant à d'autres, révélant ou cachant ses positions et stratégies, dans le but même de vaincre le roi adverse.

Commençons par les quelques pôles des organisations internationales, se comptant au nombre de trois. L'Organisation des Nations Démocratiques tout d'abord, maintenant principalement sa domination en Eurysie. Une organisation pour les pays se revendiquant démocratiques, bien que certains n'y voient qu'un impérialisme des plus décadents. L'Organisation des Nations Commerçantes ensuite, une organisation plus effacée et moins présente, qui n'en est cependant pas des moins puissantes. Ses membres sont plus qu'éparpillés, mais sont tous de grandes puissances, comme Fortuna ou l'Alguarena. L'Union Internationale du Communisme et du Socialisme enfin, institution pour les pays portant les valeurs de la gauche, bien qu'écroulée par la chute du régime Loduarien.

Continuons par les pôles régionaux, des puissances solitaires et indépendantes. Plus difficile à déterminer, il en revient de la puissance régionale, se transformant parfois mondialement, de certaines nations tant leur puissance est imposante. Ces puissances se disputent souvent au sein du même continent, revendiquant une souveraineté plus grande que l'autre. Au Nazum, la guerre d'influence semblerait se disputer entre le pôle Jashurien et le pôle Poetoscovien. Au Paltoterra, elle se transcrit par le pôle Kahtanais et celui Alguarenos. En Afarée cela devient plus compliqué, aucun pôle ne s'affirmant réellement, si ce n'est celui du Pacte de Défense Afaréen, portant les voix d'Antegrad et du Califat d'Azur. En Aleucie, la guerre des pôles semble s'effectuer autour de l'ASEA, ainsi que certaines puissances comme le bloc Westalo-Lermandien contre celui Stérusien. La situation la plus complexe relève évidemment de l'Eurysie, il est impossible d'en dominer la totalité, nous pourrions la découper en quatre secteurs. L'Eurysie occidentale, dont la sécurité est principalement assurée par les soins Teylais. L'Eurysie de l'Est, une terre de conflits incessants où des nations comme l'Empire de Slaviensk essayent malgré tout de stabiliser la région. L'Eurysie du Nord, indirectement dominée par le BNE par l'intermédiaire de la Rimaurie, de l'Altrecht et de Menkelt. Enfin l'Eurysie centrale, clairement assurée par les deux grandes puissances en coopération que sont Rasken et Karty. Le point commun de toutes ces grandes puissances ? Toutes passent essentiellement par la puissance militaire, la Poetoscovie étant le seul réel changement par le soft power.


Le trône rouge
Philosophe Kartienne Askinia Meldovara

alinéaRevenons en au Paltoterra, continent où la torche éteinte se dispute le pouvoir contre l'Alguarena, l'ONC donc, mais aussi Sylva, l'OND donc. Une nation se revendiquant communaliste, amie des nations victimes de la colonisation, ennemie des régimes autoritaires. C'est sous cette optique où le Kah ne semblerait guère apprécier la République Impériale de Karty, nation proche de l'ensemble des membres de l'OND, une nation indépendante et ouvertement militariste. Si le Kah possède l'une des meilleures armées du monde, si ce n'est la plus grande, attaquer Karty reviendrait tout de même du suicide stratégique tant les pertes seraient conséquentes. Dans le cas d'une attaque kahtanaise sur les territoires impériaux, la victoire n'en serait que des plus dures. De même, Volkingrad possède un grand nombre d'alliés, prêts à apporter soutien face à une telle ignominie...


L'appel décisionnaire
Chancelière Angèle Orlovski, dirigeante de la République Impériale de Karty

Chancelière Orlovski-"Да ?"
Grand Ambassadeur Smanöv-"C'est moi, Sacha. Le Kah a accepté ta proposition d'entrevue, j'ai là leur réponse sous les yeux. Ils expriment clairement un ressentiment mais bon, ils acceptent quand même."
Chancelière Orlovski-"Je n'aurais pas pensé qu'ils accepteraient, ce qui nous aurait tout de même donné le prétexte que nous avions sollicité la diplomatie tandis qu'ils la refusent. Enfin, nous nous rendrons donc au Grand Kah..."
Grand Ambassadeur Smanöv-"Qui composera la délégation ? Tout cela me paraît bien dangereux."
Chancelière Orlovski-"Je serais la seule à m'y rendre, une grande délégation serait un signe d'amitié qui ne se prête pas à l'événement. Aussi, le risque est nul, les autorités Kahtanaises sont bien conscientes qu'attaquer une délégation diplomatique revient d'un casus belli et d'un acte entièrement non défendable."

AlinéaEn effet, s'en prendre aux représentants diplomatiques d'un Etat lors d'une entrevue viole le principe même du dialogue. Cela reviendrait à commettre l'irréparable, aucune nation ne pourrait soutenir une telle exaction sans en prendre lui-même les conséquences. La République Impériale de Karty s'est démocratisée, avec elle apportant une nouvelle diplomatie. Une qui accepte de traiter avec l'ensemble de l'échiquier politique, y compris les pays dotés des idéologies marxistes, communistes ou communalistes. En effet, Volkingrad a réussi à s'approcher de la Kaulthie, allant jusqu'à obtenir des relations cordiales, favorables à la coopération régionale. Si une telle alliance est de circonstances, la Kaulthie étant frontalière à son voisin Kartien, rencontrer le Grand Kah résulte d'un autre facteur. Entre autre, le tout vient à assurer la doctrine de neutralité diplomatique, tout du moins un essai de maintien.


En territoire hostile
Chancelière Angèle Orlovski, dirigeante de la République Impériale de Karty

alinéaFinalement arrivée à bon port, la délégation Kartienne se joignit aux côtés des diplomates Kahtanais. Ils se comptaient au nombre ostentatoire de trois, comptant une diplomate, un citoyen et une militaire. Lorsqu'ils avaient opté pour cette configuration, la délégation Kartienne elle, était d'une composition des plus simplistes. En réalité il n'y avait que la Chancelière Orlovski, accompagnée de quelques fonctionnaires parmi des traducteurs, des secrétaires ou assistants. En conclusion, Angèle sera la seule interlocutrice pour la totalité de cette entrevue. La Chancelière avait bien conscience des stratagèmes Kahtanais, elle pouvait les résumer intérieurement. Tout d'abord il y avait l'absence quasi totale des protocoles diplomatiques, bien qu'elle ne s'était jamais attendue à être accueillie en grande pompe. Egalement, la présence de cette "Hazel Maillard", membre de l'état-major, voudrait sans doute inspirer la peur. Enfin il y avait l'expression et les réactions de ses homologues tout simplement, tout en particulier pour cette "Actée Iccauthli". Cette dernière avait le visage froid, d'une tenante de droiture et d'une assurance de fer. Dame Orlovski n'en était pas désarmée pour autant, elle avait été habituée à bien pire tout au long de son mandat. l'expérience ne lui manquait guère, elle était la dirigeante légitimement populaire de sa patrie après tout. Ainsi, Angèle laissa le luxe de la parole à son interlocutrice, elle qui disait simplement aux Kartiens de commencer. "Qu'il en soit ainsi" se dit-elle, inspirant discrètement avant de prendre la parole.

Chancelière Orlovski-"Effectivement, nous sommes à l'origine de cet événement. Je me permets de vous remercier pour celui-ci, symbole d'une volonté diplomatique. Comme l'ayant été précisé au sein de nos échanges, ce qui demeure assez facilement décelable, nos deux nations ne partagent guère les mêmes systèmes ou principes, en bref les mêmes valeurs. Toutefois, la différence ne résulte point de l'exclusion du dialogue, tout du moins c'est là la vision de notre gouvernement. Nos deux nations représentent deux pôles distincts, sur deux sols différents, il en va de même pour nos objectifs. A vrai dire, la situation actuelle voudrait même nous placer sous les augures de la concurrence. C'est précisément sous ces augures que je vous parle en ce moment, dans le but de les modifier. Nos deux nations ne sont point dans l'obligation de se concurrencer, je ne vous parle point d'une alliance, non. Il serait cependant fort intéressant d'en conclure des accords, visant par exemple à la volonté de conserver la diplomatie en tout temps."

La Chancelière avait annoncé les visions Kartiennes, en les modelant par les tournures diplomatiques. Elle avait opté pour la franche honnêteté, en assouplissant le tout par certaines formes. En bref, la République Impériale de Karty proposait une sorte de pacte de non-ingérence, pouvant être bénéfique aux deux parties.
1707
« Sōdesu ka, понятно. »

Aquilon et Hazel, qui ne parlaient pas japonais - ou très superficiellement, et certainement pas le russe. Ils lancèrent un regard surpris à la citoyenne Iccauthli. La diplomate en cheffe de la Confédération affichait une expression pensive, presque renfermée. Finalement elle sourit, et redressa son regard pour le fixer dans celui de la chancelière.

« Le Grand Kah s'adresse à qui veut bien lui parler : nos différences, si fondamentales qu'elles furent du temps du Saint Empire, ne justifient pas une approche sectaire de la diplomatie. C'est du moins comme ça que nous voyons les choses. »

Elle but une gorgée de thé et posa doucement la délicate tasse de porcelaine Xin sur son plateau. Le tintement de l'argent s'éleva comme une ponctuation dans l'air conditionné du salon. Les gens de l'Union aimaient manifestement prendre leur temps. Peut-être la suite logique de leur pensée millénariste, de leur conviction profonde que l'Histoire, à terme, donnerait raison à leurs théories.

« Si je puis me permettre », repris enfin Actée. « Vous évoquez nos objectifs respectifs, et le risque qu’ils entrent en concurrence. Pourquoi donc ? »

Hazel Maillard acquiesça.

« Stratégiquement, Karty est une puissance régionale qui entretient des relations tout à fait satisfaisantes avec nos propres alliés en Eurycie centrale. Nous ne nous sentons pas menacés par la République Impériale.
– Mais tout à fait », conclus Aquilon. « Pourquoi en irait-il autrement. Nous ne sommes pas entre amis, je vous l'accorde. Mais pas non plus entre bêtes sauvages ! »

Il y eut un silence. Actée capta un éclair dans le regard d'Hazel. Elle secoua la tête avant de sourire.

« S’il vous plaît, le Grand Kah est une puissance qui, que nous le désirions nous non, est au centre de certaines attentions. Cependant, nous disposons de peu d’informations sur Karty, au-delà de ce qu’une approche superficielle nous apprend. De plus votre jeune gouvernement, légitimement élu, doit avoir ses propres ambitions. Alors. Quels sont vos objectifs ? Que comprenez-vous des nôtres ? Pourquoi s’opposeraient-ils ? »
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AlinéaAngèle écouta ses interlocuteurs, et fut touchée de la surprise en notant un fait. Lorsqu'un d'eux parlait, les deux autres confirmaient ses dires, comme si cela donnait un appui. La Chancelière Kartienne ne savait guère commun interpréter cela, à vrai dire peu lui en importait. Elle outrepassa, passant de temps à autre sa main dans ses cheveux pour les replacer, une habitude qui lui était bien connue par ses proches. Elle savait pertinemment que ses homologues n'accéderaient point à sa demande en un claquement de doigts, il fallait convaincre et argumenter. Enfin, Angèle outrepassa les sourires carnassiers et les quelques chausse-trappes, prit finalement la parole.


Chancelière Angèle Orlovski, dirigeante de la République Impériale de Karty

Chancelière Orlovski: Certes, nous ne sommes point sous les sceaux conflictuels, ils ne sont guère des plus amicaux pour autant. Notre patrie est peut-être proche de quelques nations qui le sont également pour vous, toutefois je me permets un commentaire. Vous me demandez les objectifs de mon gouvernement ? Sa perception quant aux vôtres ? Laissez-moi par conséquent vous répondre en toute et plate franchise, des qualités appréciées de nos services diplomatiques.
Il en résulte du devoir pour tout dirigeant d'assurer la sécurité de son peuple, vous en conviendrez. C'est là mon principal objectif, que les Kartiens et Kartiennes bénéficient le plus aisément d'une sécurité, une qui leur est due pour leur confiance électorale. Je peux vous accorder que jadis, notre patrie fut touchée de malheureux événements, allant pour la plupart à l'encontre totale de vos principes. Lorsque la différence n'est pas nécessairement la fondation d'un conflit, permettez-moi de dire qu'elle en est la plupart du temps l'origine. La guerre, les tensions, les conflits, tout cela est malheureusement produit par l'exclusion du dialogue, la non-tolérance de ce que certains qualifient d'ennemis. Notre diplomatie voudrait respecter cet objectif en tout temps, prévoir l'ensemble des risques que nous pourrions rencontrer afin de les écarter, par la simple passe du dialogue. Ce que je vous propose, c'est une manière d'éviter l'exacerbation de tensions entre nos pays, une qui pourrait se déclencher par les différences nous séparant, différences que je n'ai nul besoin d'évoquer.
J'en viens donc à la perception Kartienne de votre estimée nation, si vous me le permettez. Assurément, je puis dire que vous êtes engagés pour faire prévaloir démocratie, combattant par ailleurs les régimes autocratiques. Un combat que nous partageons, je prends l'exemple du Haut Etat d'Altrecht, une dictature, pis encore, une tyrannie avec laquelle nous avons rompu tout lien. Egalement, là réside une perception étatique, vous semblez apporter votre soutien pour la décolonisation des terres. Un fléau dans lequel Karty ne s'est jamais engagé, à l'instar de nombreuses nations Eurysiennes, nous n'avons jamais partagé, nous ne partageons point et ne partagerons jamais la tristement grande table de la colonisation.
En tout et pour tout, la République Impériale de Karty réitère se demande, à noter la proposition d'accords résultant de cette volonté de dialogue, de diplomatie, et de non-ingérence. Notre nation s'affirme de plus en plus, ce qui pourrait venir à dépasser les simples sphères régionales. Cette futur grandeur pourrait s'encadrer sous les sceaux, non de l'amitié je vous l'accorde, tout simplement de la cordialité entre nos deux pays. Qu'en dites-vous, Excellence ?
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La réponse d'Angèle Orlovski flotta un instant dans le silence du salon. Actée Iccauthli laissa passer quelques secondes, son regard ne quittant pas celui de la chancelière. Finalement, un très léger sourire, presque imperceptible, se dessina sur ses lèvres. Elle se tourna vers ses camarades. Aquilon affichait un air d'intérêt poli, le menton posé sur sa main, tandis qu'Hazel Maillard restait parfaitement impassible, son attention entièrement focalisée sur la dirigeante kartienne.

« Votre franchise vous honore, Chancelière », commença enfin Actée d’un ton mesuré. « Elle est une base de travail bien plus saine que les circonvolutions habituelles de la diplomatie. Nous l’apprécions très sincèrement. »

Elle marqua une nouvelle pause, prenant une gorgée de son thé désormais tiède.

« Et je dois vous donner raison sur un point, et pas des moindres : l'Union s'oppose à la tyrannie et au colonialisme. Ce sont des vestiges d'un monde que nous nous efforçons de laisser derrière nous. Nous ne pouvons que nous réjouir que la République Impériale partage, sur ces points précis, notre position. »

Aquilon se pencha légèrement en avant. Derrière ses petites lunettes d’intellectuel, il y avait comme un éclat amusé. Actée lui laissa la parole.

« Pour ma part je retiens donc que vous considérez qu'il existerait des tensions latentes entre nos deux pays, Chancelière. C'est une prémisse intéressante. » Il se pencha en avant, ses coudes reposant sur ses genoux. « Voyez-vous, de notre point de vue, la situation est bien plus simple. Le Grand Kah ne se sent pas menacé par la République Impériale. Nos sphères d'influence sont distinctes, nos priorités géographiques éloignées. Un accord de non-agression nous semble superflu. »

Actée Iccauthli hocha lentement la tête, reprenant le fil avec une gravité étudiée.

« Cependant, nous comprenons que votre gouvernement, fraîchement établi et désireux de s'affirmer, puisse ressentir le besoin de clarifier ses relations avec les puissances établies. C’est une démarche légitime. Et c'est pourquoi nous pensons, au contraire de ce que vous suggériez, qu'il serait très productif que nous évoquions les différences et les actions qui façonnent nos perceptions respectives. Car si nous partageons votre avis sur l'objectif de sécurité des peuples, c'est la méthode qui nous interroge. »

Elle fit une pause, son regard se faisant plus perçant.

« Ah, allons, allons... » Aquilon secoua la tête. « Nous ne sommes pas ignorants de la scène internationale. Nous avons noté, par exemple, la dégradation soudaine de vos relations avec le Churaynn, sans arriver à déterminer s'il s'agit d'une simple brouille ou d'une politique d'ingérence délibérée. Nous avons aussi observé, avec un vif intérêt, l'installation de vos bases militaires en Lermandie. C'est une bonne chose ! Nous apprécions ce pays. Mais c'est aussi – et surtout – une chose qui démontre que votre nation n'a pas pour seul objectif la sécurité de sa propre population. Elle exporte ses moyens, qu'ils soient offensifs ou défensifs – et nous savons bien que la distinction est souvent sémantique. Votre ambition, de votre propre aveu, est de dépasser la simple sphère régionale. »

Actée joignit ses mains devant elle, son visage affichant un regret parfaitement maîtrisé.

« Dans ces conditions, Chancelière, un simple accord de non-ingérence ne nous servirait à rien. Il ne changerait rien au fait que nos pays ne sont pas en conflit direct, ni au résultat d'un tel conflit s'il devait avoir lieu. En revanche, il vous donnerait ce que nous appelons un blanc-seing. Une sorte de caution diplomatique pour mener toutes les politiques que vous souhaitez, y compris celles qui, demain, pourraient aller à l'encontre de nos intérêts ou de ceux de nos alliés. »

Hazel Maillard, qui n'avait pas dit un mot, ajusta discrètement son uniforme puis se saisit de sa tasse de thé, dont elle but une gorgée.

« Cela étant dit », reprit Actée, son ton s'adoucissant soudainement, « notre refus d'adhérer à un tel accord, en l’état, ne signifie pas la fin de notre dialogue. Je suis, sur le principe, tout à fait ouverte à ce que nous trouvions une solution alternative. Une solution bien plus solide et constructive.

Vous voyez, si la République Impériale souhaite véritablement bâtir une relation de confiance avec l'Union, et être perçue non comme un concurrent imprévisible mais comme un partenaire stable, alors cette confiance doit reposer sur des actes, pas seulement sur des mots. Nous pourrions envisager un pacte de coopération et de transparence, fondé sur des gestes concrets qui démontreraient l'ouverture de votre nouveau gouvernement et les intentions pacifiques du notre.
 »

Elle commença à énumérer les points d’un ton posé.

« Nous pensons par exemple à un geste de réconciliation nationale, tel que l'autorisation du retour des individus exilés pour des raisons politiques sous le précédent gouvernement. Cela prouverait pour de bon votre rupture avec le passé autoritaire.

Nous pourrions également développer des coopérations économiques. Nos entreprises communales pourraient investir dans des secteurs non-stratégiques de votre économie, créant des liens d’enrichissement mutuellement bénéfiques.

Sur le plan culturel, des échanges universitaires et artistiques renforceraient la compréhension entre nos peuples, au-delà des clichés idéologiques.

Pour faciliter tout cela, et garantir un dialogue permanent, nous pourrions installer un consulat du Grand Kah à Volkingrad. Un lieu d'échange et d'observation, pour s'assurer que nos canaux de communication restent toujours ouverts.

Enfin, en gage de coopération régionale, nous apprécierions un accord nous garantissant un droit de passage logistique à travers votre territoire pour rejoindre notre allié, la Kaulthie. Un simple couloir de transit, qui prouverait votre engagement pour la stabilité en Eurysie centrale. »

Le citoyenne termina sa litanie et afficha un sourire patient. Elle tapota le bord de son fauteuil, puis acquiesça. Aquilon pris la relève.

« Ce, je crois, des fondations bien plus solides qu'un simple pacte de non-agression. Ne croyez-vous pas, Chancelière ? Des preuves tangibles d'une volonté de coopération. C'est une voie exigeante, je vous l'accorde, mais c'est la seule qui mène à un véritable partenariat. »

Puis, comme si une idée encore plus généreuse venait de lui traverser l'esprit, elle se pencha légèrement en avant, un éclat de chaleur dans le regard.

« Bien sûr, Chancelière, ce que je viens de vous exposer n'est qu'une fondation. C'est la base d'une relation cordiale et transparente. Mais nous sentons que votre ambition, votre désir de garantir la sécurité de votre peuple, va plus loin. Et nous sommes prêts à aller plus loin avec vous. »

Aquilon prit le relais d’un ton aimable.

« Tout à fait. Si la République Impériale est prête à s'engager sur cette voie de la confiance, alors l'Union du Grand Kah est prête à offrir ce que nous n'offrons que très rarement : une garantie de sécurité totale et inconditionnelle. L'Union du Grand Kah s'engagerait à défendre l'intégrité territoriale et la souveraineté de la République Impériale contre toute agression extérieure. Votre principal objectif, la sécurité de votre nation, serait assuré par l’une des plus grandes forces militaires qui soit. »

Actée enchaîna.

« Pour qu'une telle garantie soit crédible et immédiate, elle impliquerait naturellement une coopération militaire étroite. Une présence concertée de nos forces sur votre territoire, comme un détachement de protection, prêt à agir à la moindre alerte. Un fil piège que nul agresseur n'oserait jamais franchir. 

Naturellement, un tel engagement reposerait sur une confiance réciproque. Nous vous demanderions de vous engager à ne mener aucune action qui menacerait les intérêts de l'Union ou de ses alliés. En retour, nous signerions une clause absolument identique, et une promesse d’achat pouvant s’élever à plusieurs centaines de milliers d’unité internationales d’armement. Un équilibre parfait, la base de toute coopération productive. »

Aquilon sembla sentir le scepticisme potentiel de son interlocutrice et se tourna vers la militaire.
« Notre capacité à honorer un tel engagement est, je crois, sans égale. citoyenne Maillard, purement à titre d'illustration, pourriez-vous nous indiquer où se trouve le Groupe Aéronaval d'intervention, en ce moment ? »

Hazel Maillard, qui était restée silencieuse, se redressa avant de répondre d’une voix égale.

« Elle termine actuellement des manœuvres de coopération au large de la péninsule Listonienne, Citoyenne Commissaire. »

Aquilon laissa échapper un petit rire enjoué.

« La péninsule Listonienne ! Mais c'est formidablement pratique ! » Il se tourna vers la Chancelière. « Vous voyez, Chancelière ? Si le pire devait arriver, nos amis pourraient être sur vos rives en moins d'une journée. »

Actée reprit la parole, ramenant la conversation sur le terrain diplomatique.

« Chancelière Orlovski, tout ceci – le Pacte de Coopération, les échanges, et même cette proposition de protection – compose une offre d'ouverture. Une preuve de notre bonne foi et de la valeur que nous accordons à une relation stable avec la nouvelle Karty. Nous avons mis nos cartes sur la table avec, nous le pensons, une grande franchise et une générosité sincère. »

Elle se cala confortablement dans son siège, son regard fixant la Chancelière.

« Ceci est notre vision d'un véritable partenariat, profond et durable. C'est une voie exigeante, certes, mais elle mène à la sécurité et à la prospérité. Maintenant il faut en discuter et négocier les détails. Ainsi, que pensez-vous de ce cadre de discussion ? »
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08/04/2017,

AlinéaDire que la Chancelière Orlovski a le destin de l'Eurysie centrale entre ses mains est un euphémisme, en est un en lui-même. Tout ce pouvoir décisionnel reposait entre ses mains, par la faute du Grand Kah. Malgré les apparentes formes diplomatiques, et les quelques flatteries pour commencer leur argumentaire, les diplomates Kahtanais essayaient tant bien que mal de dissimuler leurs réelles intentions. Pour Angèle, de tels masques en devenait presque ridicule, était-elle à un bal masqué ou bien une entrevue diplomatique ? Elle eut donc ce sentiment, chaque mot qu'elle prononcerait scellerait à jamais l'avenir, tant pour Karty que pour l'Eurysie en général.

En séparant l'intéressant du futile, la Chancelière pouvait résumer le plan du Kah en trois points distincts, tous servant à asservir l'Eurysie centrale. Tout d'abord, la torche éteinte cherchait à déstabiliser un des seuls remparts de cette région, la République Impériale elle-même. Cette volonté passait par la demande du retour des "exilés" communistes Kartiens sur leur terre natale, permettant en premier lieu de fracturer idéologiquement le régime. Le plan économique se traduisait par la seule proposition unilatérale où les entreprises communales financeraient les secteurs Kartiens, permettant peu à peu la oisiveté et dépendance totale envers le Kah. Egalement, le secteur culturel n'était pas épargné, la proposition d'échanges artistiques et universitaires en témoignait. En bref, le Kah voulait fracturer Karty sous tous les plans, culturel, économique et politique, une véritable opération culturelle. Le tout se verrait assurer et coordonner par cette proposition d'installer un "consulat" à la capitale impériale, afin de soit disant "surveiller la continuité des échanges".

Cependant ses interlocuteurs ne s'arrêtaient pas là, bien au contraire. La proposition prétendument généreuse de protection n'était qu'un voile, un maillage qui ne pouvait pas dissimuler le chausse-trappe, l'arme Kahtanaise. Accepter cela reviendrait à faire de Karty un protectorat du Grand Kah, lui permettant par ailleurs d'installer autant de bases militaires que souhaité. Comme le disait Actée, "une présence concertée de nos forces sur votre territoire", quelle blague. A cette demande, Angèle eut bien du mal à garder son sourire de façade, se contentant de passer une main dans ses cheveux pour éviter une réaction pour le moins franche.

Mais le plan du Kah ne s'arrêtait pas là, non, évidement. Cela restera à jamais dans le domaine de l'hypothétique, mais une fois la nation Kartienne sous entier contrôle du Kah, ce dernier pourrait s'étendre aux pays du nord. La proposition à peine dissimulée du transit vers le Kaulthie en était la preuve, c'en devenait attristant. En bref, les Kahtanais voulaient que Karty accepte tout convoi vers la Kaulthie, permettant d'étendre sa domination, ouvrant les portes de l'Eurysie. Sans doute qu'après cela, le plan serait d'influencer l'Empire Raskenois, l'Hotsaline, l'Altercht, un véritable rouleau compresseur. Cependant Angèle n'était pas dupe, elle avait bien conscience de toute cette mascarade. Elle devait gardait des analyses pour elle-même, contourner les volontés du Kah et utiliser ses cartes. La situation devenait de plus en plus complexe, rien d'impossible pour la diplomatie Kartienne... Pour l'instant. Dame Orlovski vit tout de même une porte de sortie, la proposition de non-ingérence entre le bloc Kahtanais et le bloc Kartien. La Chancelière laissa planer quelques secondes, adoptant une posture qu'on lui connaissait bien. Sa main droite se posait sur ses jambes, sa main gauche venait dissimuler sa montre. Une posture qu'Angèle avait pris l'habitude de prendre, que certains qualifieraient de tique. Tandis que ses iris s'illuminaient d'un rare éclat bleuté, elle annonça, de sa caractéristique façade diplomatique.

Chancelière Angèle Orlovski, dirigeante de la République Impériale de Karty

Chancelière Orlovski-"Tout comme vous, laissez-moi vous donner raison sur un point véritablement clef, ce que vous qualifiez de clarification avec les puissances établies. C'est principalement cette raison qui me guide vers vous, Excellences. Je vous remercie donc de partager ce point de vue, cette volonté est bien nourrie de légitimité...

Je vois que vous abordez notre situation avec le Churaynn, et notre installation en Lermandie... Permettez-moi d'éclaircir ces points. S'il est vrai que les relations avec cet Empire d'Afarée ne sont pas des plus cordiales, je souligne le simple fait de sa dangerosité. Cette nation avait menacé clairement un pays qui nous est frontalier, par extension l'Eurysie Sud-Centrale. Je peux vous accorder que l'action du Churaynn nourrissait la volonté de décolonisation, et de dénonciation d'un régime, pour le moins controversé. Nous déplorons sincèrement que l'Etat que nous autres Kartiens appelons Grammatika nous soit frontalier, toutefois c'est la réalité. C'est pourquoi nous nous efforçons de conserver des relations d'un ordre de dialogue avec ce pays, et c'est également pourquoi nous avons répondu à la menace du Churaynn. Jamais, nous ne tolérerons le Grammatika, au même titre que nous ne tolérerons pas la déstabilisation de la sécurité régionale. Que Grammatika perde sa colonie en Afarée est en soi une bonne chose, cela n'est point de notre ressort. Que le Churaynn s'attaque donc à ce territoire, non à la partie native et Eurysienne du Grammatika. Ce point clos, j'en viens à notre installation en Lermandie. En l'état, je ne peux hélas guère vous communiquer les fondements de cet accord nous liant aux Lermandiens, conformément au Traité d'Epsilon. Sachez simplement que cette action vise à apporter notre aide en cas d'hostilités Sterusiennes, je n'ai nul besoin de vous communiquer la situation en Aleucie... Lorsque j'évoquais notre politique, visant à la sécurité de notre population, c'était là un des nombreux fondements de cette dernière. Il est évident que la République Impériale n'a point un seul objectif, là réside le complexe jeu de la gestion d'une nation, de la géopolitique et bien plus encore.

Je comprends bien votre interprétation, ce que vous appelez donc "blanc-seing". Sachez que là n'était pas ma volonté, comprenez toutefois que le caractère unique de cette entrevue ne facilite guère la chose. Notre présence en ces lieux relève de nos premiers contacts, ces derniers sont inéluctablement une introduction, des prémices fragmentaires. Ainsi je me réjouis de votre proposition, fort intéressante et constructive, à noter un accord de non-ingérence mutuel entre nos nations et leurs cercles d'influence, leurs alliés en somme. A la présente, laissez-moi répondre à la totalité de vos propositions, que vous souhaitez preuves de notre bonne foi, en vous paraphrasant.

Tout d'abord nous avons le retour des communistes Kartiens sur leur terre natale, je m'interroge. Je vous accorde un point, le Parti Communiste Kartien fut censuré, cependant non par volonté du gouvernement. Une telle action n'est pas de mon ressort, il en revient du Conseil Constitutionnel et des 9 Consuls, élus par le peuple. A l'appui, le PCK avait partie liée avec des ex-terroristes, des groupuscules autoritaires, les prémices d'un coup d'état. J'ajoute qu'en rien, les partisans de ce parti furent contraints à l'exil... Ces derniers ont quitté Karty de leur propre chef. Ainsi notre porte ne s'est jamais fermée, ces personnes sont toujours libres de retourner en Karty. J'ajoute enfin que ces actions se placent sous les augures de notre ancien régime, je ne fais que vous relater des faits. En guise de réponse à cette demande, je peux cependant vous affirmer que notre gouvernement est prêt à faire une déclaration publique visant à dénoncer les actions de cet ancien régime, que je sais imparfait.

Concernant le volet économique, il n'en est également pas de mon ressort. Comme vous l'évoquez, vous souhaitez investir dans des secteurs non-stratégiques, la plupart et même la quasi totalité ne sera pas sous le giron d'Etat. En tout et pour tout, je ne peux qu'encourager sans obligation lesdites entreprises à travailler avec les vôtres, également débloquer certains financements pour ces mêmes entreprises... Concernant le secteur culturel, ce dernier se verra encadré par notre gouvernement. De fait, nous sommes entièrement disposés à accepter des œuvres de votre honorable nation, à seule condition que ces dernières ne sont guère à certaines connotations... Enfin, pourriez-vous préciser cette proposition de "consulat" ? Si tantôt ce dernier vise, conformément à vos propos, uniquement à assurer la conservation du dialogue entre nos nations, je dois avouer qu'une ambassade répondrait mieux à ce besoin.

J'aborde à présent votre demande de libre transit avec la Kaulthie, je ne peux que vous encourager à étudier cette demande avec les concernés. Il serait par ailleurs sage d'en converser multilatéralement, je suppose. J'accorde le fait qu'une telle entreprise peut prendre un certain temps, laissez-moi par conséquent vous communiquer une autre solution. Comme toute nation sur ce globe, nos services vous sont ouverts pour étudier chaque demande de transit nécessitant notre espace aérien, maritime ou terrestre.

J'aborde finalement cette rare proposition de protection, je vais être comme à l'accoutumé franche avec vous, je suis dans l'obligation du refus. La République Impériale de Karty, de part ses principes, ne peut se résoudre à accueillir une quelconque présence militaire étrangère, ce de manière permanente. Nous avons par le passé, et encore aujourd'hui, accepté certaines présences militaires, à seul titre que ces dernières étaient temporaires. Je fais par exemple référence à un droit de ravitaillement pour des flottes, ou encore des exercices militaires. Je prends au hasard l'exemple du Royaume de Teyla, notre plus proche allié... De surcroît, notre population verra d'un très mauvais œil une telle action, c'est précisément ce point qui engendre ma réaction. Je préside la Grande Coalition Républicaine, un parti politique au sein de ma patrie, celui étant majoritaire et me conférant par extension ce rôle de Chancelière. Lorsque nos citoyens ont décidé d'accorder leur vote à ce parti, ils expriment clairement une des volontés qui nous est chère, à noter le souverainisme. Mon gouvernement entreprend de conserver la liberté d'action totale de Karty, ce pourquoi notre électorat est si conséquent. Je ne peux que m'excuser, je sais pertinemment que ce n'est sans doute pas la réaction à laquelle vous vous attendiez, toutefois c'est la réalité. Comme vous le dites, il faut négocier les détails, Excellences. Je vous ai également dévoiler mon jeu, mis cartes sur table.
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