27/10/2017
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[Vayie — Illirée] Sœurs par delà les années

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"Monsieur le Premier ministre, les Vayiens seront à l'aéroport dans une demi-heure"

Veychter opina du chef. Si l'homme savait beaucoup de la culture de ses voisins du sud, il avait tout de même entrepris de se documenter copieusement jusques à tant que ses invités n'arrivassent. Il n'était nullement question de commettre un faux pas ou même d'être désarçonné par une référence subtile inconnue à son peuple. Non. Mais voilà que son secrétaire lui indiquait impérieusement que le "jusques à tant que" n'était plus qu'une question de minute avant de se changer à un beaucoup plus imprévisible "maintenant." Il s'employa quelques brefs instants à mettre de l'ordre dans son bureau avant de se dresser en soupirant. Son assistant, resté dans l'encadrure de la porte en attendant que son ministre ne se mette en mouvement, lui emboîta le pas sitôt que celui-ci s'engouffra dans les couloirs du nouvellement baptisé "Palais du Peuple."

Quelques minutes plus tard, les deux hommes émergeaient du bâtiment avant qu'ils ne se soient finalement glissés dans une longue automobile noire aux vitres teintées. Dès l'instant que la portière eut refermé le véhicule, ce dernier s'élança soudain dans l'allée pavée ; suivit par un modeste cortège d'officiels et de voitures — plus massives — des services de sécurité intérieure. Les automobiles s'injectèrent sans accroc dans la circulation de la capitale et roulèrent une vingtaine de minute en direction d'un aéroport militaire dans la banlieue proche de la ville. Veychter s'empressa de sortir de son véhicule, ne prenant qu'à peine le temps de le refermer derrière lui. L'avion vayien, escorté depuis la frontière par des appareils millitaires illiréens, se posa sur le tarmac. Un escalier mobile fut prestement appliqué contre la paroi de l'aéronef. Des Vayiens en sortirent.

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La porte de l'avion s'ouvrit, invitant les membres du gouvernement vayien à s'avancer hors de l'appareil. La main droite devant ses yeux pour se protéger du soleil éblouissant de la capitale, le Premier ministre Gilendes sortit le premier. C'est le sourire aux lèvres qu'il se dirigea vers son homologue illiréen, Karl Veychter. Tandis qu'il descendait l'escalier, les autres membres du gouvernement prenaient sa suite, éblouis tant par la lumière naturelle que par la découverte du pays voisin.

Sitôt arrivé en bas de l'escalier, Gilendes tendit sa main en direction de Veychter, marquant officiellement le début de la rencontre par une poignée de main entre les deux dirigeants.

"C'est un plaisir de vous rencontrer enfin. Nous vous remercions de nous accueillir au sein de votre capitale lors de cette réunion. Je ne doute pas que nos deux nations en ressortent grandies."
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Veychter contempla sans mot dire la ribambelle des représentants vayiens plisser les yeux en rencontrant le soleil de cette claire matinée. Il devait bien reconnaître que la transition d'un avion vers le vrai monde n'était jamais des plus commodes, bien qu'un attérissage nocturne eût pu pallier la problématique solaire. De tous ces diplomates et importants personnages, il reconnu son homlogue, le vieux Gilendes, en tête de fil. Les Premiers ministres s'avencèrent l'un vers l'autre pour une poignée de main, des sourires dont personnes n'aurait pu déterminer l'authenticité sur les lèvres. L'Illiréen constata avec surprise que la poigne de son homologue ne semblait pas s'être amollie avec les années de la vieillesse, elle conservait au contraire un maintient puissant digne d'un athlète. Le prime étonnement passé en une fraction de seconde, il sourit de plus belle à la formule convenue du Vayien, — la complétant sans sourciller.

— "Mais le plaisir est pour moi Monsieur Gilendes. Je suis bien navré que les tristes circonstances de ma nomination à ce poste ne nous ait pas permis de procéder à cela plus tôt... Mais allons, nous sommes bien là aujourd'hui pour réparer ce tort. Si vous voulez bien me suivre."

Veychter conduisit son homolgue à cette même voiture qui l'avait conduis à lui quelques minutes plus tôt, lui en ouvrant même la portière. Les deux chefs d'Etat échangèrent des banalités sur la vingtaine de minutes de trajet de l'aéroport militaire jusques au siège du gouvernement. Quand la conversation en arriva à la littérature de langue illiréenne du haut Moyen-Âge — sujet pour lequel Gilendes semblait éprouver un vif intérêt — ils furent enfin à destination. L'hôte guida donc son invité du jour à travers le Palais du Peuple jusques à un bureau sombrement décoré. La décoration des salles et couloirs traversés rappelait ostensiblement au Vayien le changement de régime parvenu un an et demi auparavant ; les portraits datées de souverains morts depuis des siècles avaient étés troquées pour de toute nouvelle fresque racontant de manière convenue et biaisée l'histoire du pays. Mais, fait rare, l'humble bureau auquel Gilendes avait été conduit présentait une sobriété plus poussée ; et, plus encore, les rares éléments de décoration semblaient antérieurs à la prise de pouvoir du régime eurycommuniste grimé en démocratie. Ce sont spécifiquement deux sabres croisés sur un mur qui attirèrent l'attention du leader vayien : elles semblaient raconter une histoire tant l'une arborrait le style valino-illiréen, tant la seconde portait des armoiries loduariennes. Veychter s'assit, invitant son homologue à faire de même.

— "Voilà, nous serons au mieux ici pour discuter. Comme nos missives diplomatiques l'ont justement relevé, et je suis sûr que vous en conviendrez, nous avons beaucoup à dire. Je propose de nous y mettre dès maintenant, l'amitié entre les peuples — qui plus est des peuples frères — est un sujet qui mérite toute notre énergie je crois. Ainsi je mets cartes sur table, Votre Excellence, je suis convaicu que nos deux nations s'éleverons par une coopération bilatérale. Il n'est pas question de faire renaître l'Empire Illiréen, ça n'aurait tout simplement aucun sens : Tirgon a perdu de son pouvoir tandis qu'Aristion est libre et souverain, et je pense que les choses sont bien ainsi. Mais je vois maintenant que la Vayie demeure ouverte au dialogue et à l'entente, comme votre présence ici l'énonce. Nous pouvons traiter maintenant des petits sujets de la coopération culturelle et nationale, de sujets plus graves tels que notre sécurité collective, et encore des grands sujets de la disposition régionale des forces. Oui, je crois que nous pourrons évoquer tout cela, avant le dîner si possible." Veychter se fendit d'un grand sourire chaleureux. "Mais j'ai assez exposé mon agenda... Monsieur Gilendes, avez-vous des exigeances et des sujets dont vous voulez que l'on traite ?"

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Après un trajet en voiture que Gilendes trouva très instructif, ils arrivèrent au fameux Palais du Peuple. Veychter s'avança, guidant le Premier ministre Vayien au travers des couloirs dont la décoration étonnait particulièrement le vieil homme tant elle paraissait déconnectée de l'Illirée d'il y a quelques mois — alors encore Valinor. Malgré sa surprise, il ne laissa rien paraître qui puisse contrarier son hôte. Cependant, en arrivant dans le bureau de son homologue illiréen, l'étonnement fut plus grand qu'auparavant. Les ornements qui occupaient la pièce, peu nombreux, semblaient dater de bien avant la prise de pouvoir de Veychter. Les deux hommes s'assirent et l'illiréen entama rapidement la discussion. Un air chaleureux collé au visage, Gilendes répondit :

"Je ne peux que confirmer vos dires. Nous avons effectivement décidé qu'il était temps pour la Vayie d'aller de l'avant en faisant un premier pas vers la scène internationale, et quoi de mieux pour le faire que commencer par le faire avec une nation sœur aux côtés de laquelle nous avons évolués. Dans cette optique, nous espérons bien entendu instaurer une relation de confiance, un dialogue sain et une amitié durable. Je n'aurais aucun sujet particulier à ajouter à notre programme pour cette fois, et je pense que nous aurons assez à faire avec ce que vous avez prévu."
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Le Premier ministre illiréen hocha la tête cependant que son homologue méridional lui retendait la perche du contrôle de la conversation. Il était confiant, d'autant plus que le Vayien se montrât tout aussi concilliable et diplomate qu'à l'accoutumée ; et c'était bien la chose qui rassure le plus que de voir un processus connu et prévisible s'effectuer sans accrocs, à l'instant même où un sinistre plongerait Veychter dans une situation peu confortable. Pas tout à fait inextricable — il était déjà sortis la tête haute, ou presque, d'un conflit ouvert avec l'Organisation des Nations Démocratiques — ce n'est pas cet ancien satellite sudiste qui allait faire flancher la grande Illirée par son action délibérée. En revanche, il n'était pas opposé à ce que les choses ne se passent bien, cela faciliterait les choses à défaut de prolonger un froid diplomatique qui n'avait plus lieu d'être entre des peuples frères. Et voilà que Gilendes lui rendait la parole, il devait maintenant le convaincre qu'une plus large association entre leur pays leur serait mutuellement bénéfique.

— "Bien, bien. Dans ce cas, Monsieur Gilendes, attaquons-nous directement au cœur de ce qui pourrait constituer la base d'une union de nos peuples autour de leur culture et de leurs intérêts commun. Comme vous le dîtes, je suis aussi convaincu que le moyen pour votre nation de trouver sa place dans la vaste Eurysie est de commencer par nouer un pacte d'amitié avec des alliés historiques en lesquels elle sait avoir confiance. Il n'est évidemment pas question de placer une partie de l'avenir du peuple vayien entre les mains de puissances étrangères sur la seule conviction de leurs volontés pacifiques, non. Trouver plutôt une nation dont les intérêts populaires sont si étroitement liés avec les vôtres que celle-ci n'aura d'autre choix que de respecter ses engagement, sous peine de condamner son propre peuple à la déchéance de la traîtrise. Pareille nation au destin intrinsèquement lié à la vôtre, je pense en connaître une ; à la vérité, nous ne serions pas là autrement. Excellence, je suis persuadé que l'avenir des nations de la vieille Illirë est lié l'un à l'autre, c'est pour cela que je vais vous proposer aujourd'hui d'investir dans cet avenir en commun."

Le Premier ministre fit une pause, ménageant son effet avant de vraiment mettre ses propositions sur la table. Il reprit rapidement sa tirade, commençant son mouvement avec une lenteur nouvelle, il semblait soignement décortiquer les mots tandis qu'il parlait.

— "Ce que le Conseil des Ministres d'Illirée me charge de vous transmettre aujourd'hui a fait l'objet de longue études préliminaires, et a été manié de façon d'obtenir à coup sûr une majorité votante à notre Parlement. Cela dit, nous sommes toujours ouverts à toute demande de modification des termes que vous estimerez nécessaire ; il serait d'un impérialisme dégoutant que de vous imposer les maux de notre législation propre. Le dialogue entre les nations doit se faire par la pleine considération des intérêts souverains des peuples, ce n'est pas à quelque élite politique de légiférer pour les autres.

La première chose sur laquelle nous aimerions parvenir à un accord est sans aucun doute un pacte de coopération mutuel — de cette manière nos nations pouraient s'échanger services et technologies en faisant fit de la mince frontière que les sépart. Concrètement, nous souhaitons que la recherche scientifique et académique de nos pays puisse être pleinement publique et partagée à notre voisin, il ne peut guère y avoir de nationalisme dans le progrès.

La deuxième serait un plus complexe accord de frontière, permettant à nos citoyens de librement circuler d'une nation à l'autre. En revanche, le Conseil des Ministre exprime sa volonté à ce que cette ouverture des frontière ne se limite qu'aux individuels ; le but n'étant pas d'envahir son voisin de denrées diverses dans le seul but de saper son économie. Et je pense que c'est pour le mieux, nos pays ont aujourd'hui des réalités et systèmes économiques trop différents pour envisager un pacte de libre échange, je suis certain que vous agréez.

Et finalement nous venons maintenant à la troisième proposition phare, qui est, je dois bien l'avouer, plus controversée. Il s'agit d'un pacte de défence mutuelle doublé de la plus profonde coopération de nos services de renseignement. Bref, nous laissons à la discrétion du peuple souverain de Vayie de déterminer s'il veut de cet ultime proposition. Mais je suis impatient d'avoir votre avis sur ce que je vous ai proposé — et peut être avez vous maintenant des idées de choses supplémentaires sur lesquelles nous pourrions légiférer. Excellence, c'est à vous."


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