Rencontre Astra - Grand Kah

Zlow, le 15 Janvier 2006

Tout était prêt, du décor de la salle de réception à l'orchestre et son chœur qui joueront l'hymne de l'Astra et du Grand Kah, en passant par les drapeaux des deux pays hissés côte à côte régulièrement de part et d'autre de l'allée centrale arborée menant aux portes majestueuses du palais présidentiel. Ne restait plus qu'à attendre les invités, guidés depuis l'aéroport jusqu'au lieu de rencontre, à quelques centaines de mètres de là sous bonne escorte.
Aujourd’hui était un grand jour, Nahos Majr devait recevoir les équipes du Grand Kah. En effet, le pays était heureux de rencontrer ce pays démocratique et aller parler principalement d'accords commerciaux mais également pourquoi pas d'une alliance militaire tant le pays est puissant.

Les représentants du Kah firent le trajet dans un dirigeable semi-rigide sobrement nommé la "Fierté Argentée de l’Éternelle Libération Céleste". Un nom qu'il devait à ses concepteurs, des partisans de l'avant-garde artistique et technique, qui n'en restait pas moins un bel appareil, chargé des plus hautes technologies en matière d'avionique et de durabilité. Le trajet avait été légèrement rallongé du fait de la guerre au Varanya mais, au final, arriva dans les temps à Zlow. Si l'on oubliait la cohorte d'assistants et de techniciens diverses, véritables petites mains nécessaires au bon déroulé de toute rencontre diplomatique, le Kah avait dépêché deux de ses figures les plus notables en la personne des citoyens Isabella Zeltzin et Aquilon Mayhuasca. Responsables respectivement du commerce extérieur et du prix des denrées pour la première, et de la coordination théorique et idéologique de l'Union pour le second. Deux membres du Comité de Volonté Publique, exécutif de l'Union. Un seul aurait fait l'affaire, mais la tradition communaliste voulait que les représentants du peuple soient toujours accompagnés d'un pair pouvant apporter une opinion différente voir une opposition concrète à ses décisions. Ils appelaient ça le principe de collégialité.

Les deux kah-tanais arrivèrent donc. Un homme dans un manteau noir, portant une chemise blanche dont il laissait expertement le bout des manches et du col dépasser. L'air sévère, pensif, calculateur. A côté de lui une petite femme, le regard brillant caché par une voilette rouge, les cheveux teints d'un bleu nuit, surmontés d'un béret, les épaules couvertes d'une longue cape à motif floral. Les deux ne se ressemblaient pas beaucoup, ne dégageaient pas la même impression, mais faisaient indubitablement partie de la même culture. Ça se voyait à leurs expressions faciales, aux subtilités rassemblant leurs gestes, leur parler, leur accent, au sein d'une même famille.

Ils avancèrent sous les drapeaux, dignement, échangeant quelques mots discrets et acquiescement complices en entendant leur hymne. Arrivés devant les portes du palais, les deux étrangers échangèrent quelques derniers mots. Arrivés au niveau de Nahos Majr, ce fut Aquilon qui parla en premier.

- "Merci de nous recevoir en personne." Il sourit, ce qui était rare chez lui. "Nous avons hâte de commencer à échanger. Nos pays sont éloignés par la géographie, mais proches pour ce qui est de leur âme. Je suis le Citoyen Aquilon Mayhuasca."

- "Et moi la citoyenne Isabella Zeltzin. N'hésitez pas à écorcher nos noms si vous n'arrivez pas à les prononcer."
- "Oui, oui. Je représente l'Idéologie et la citoyenne le commerce. Nous avons cru comprendre que le premier objectif de cette rencontre était de lier des partenariats de nature plutôt économique ?" Il lança un regard à sa délégation. Une bande d'experts propres sur eux, attendant leur heure. "Mais je suis sûr que ce n'est qu'une première étape."

"Évidemment" dit Nahos Majr avec un grand sourire. "Mais le secteur économique est la base d'un sujet qui peut lier nos deux pays afin de ne pas bruler d'étapes" ! Le Président ouvrit sur ces mots la marche, conduisant son équipe et ses conviés dans la salle des discussions où se dressait une table garnie de divers amuse-gueules tels des amandes sucrées, des dattes et des figues. En boisson, un thé reposait dans une théière traditionnelle. De nombreux sièges avaient été disposés autour de la table en prévision des différents intervenants kah-tanais et astrasiens qui allaient prendre part aux discussions. Prenez place, dit Nahos en désignant les sièges." Puis après une petite pause : Cette rencontre est un grand jour, commencez tout de suite si vous le voulez bien, d'ailleurs puisque vous êtes nos hôtes, nous vous laissons traiter le premier sujet, souhaitez vous abordez un sujet particulier ?"

– "Merci."

Ils s'installèrent, Aquilon servant le thé à la citoyenne Zeltzin puis aux quelques délégus et experts qui avaient fait le trajet avec eux. Ceux-là sortaient des dossiers, des pochettes cartonnées, des ordinateurs de poches, reconfiguraient peu à peu l'espace en zone de travail. Quand il eut terminé, Aquilon s'installa et but une très courte gorgée de thé, indiquant à Isabella qu'il lui laissait la parole. Elle le remercia d'un signe de tête.

– "Voyons voir. L'économie, vous disiez ? Il y a plusieurs points que nous pourrions traiter. Si nécessaire permettez-moi de vous faire une synthèse de notre situation. Le Grand Kah jouit de très nombreuses ressources naturelles et représente de nombreuses opportunités pour les acteurs étrangers. Pour commencer nous avons d'importants gisements d'or, de cuivre, de minerai de fer, d'étain, ainsi que des réserves substantielles mais encore très peu exploitées de pétroles et de gaz naturels. Nous essayons de limiter l'usage de ressources non-renouvelables. Cette position idéologique… " Elle lança un regard en coin à son collègue. "Nuit à notre économique, mais d'une façon que nous trouvons encore acceptable.

Nous sommes parmis les plus grands producteurs mondiaux de canne à sucre, soja, café, orange, noix, maïs, papaye, tabac, ananas, banane, coton, haricot, noix de coco, pastèque, citron, cacao, noix de cajou, avocat, mangue, goyave, riz, tomate, tournesol, citron, poire, orge, raisin, artichaut, blé, cerise, prune, pêche, kiwi, pomme et noisette. Nous secteur agricole est très développé, bien qu'il réponde en premier lieu aux demandes du marché intérieur. Nous avons une bonne industrie du zinc, du plomb, du ciment. Notre potentiel éolien et hydroélectrique permettrait, à son plein potentiel, de couvrir respectivement trois fois et une fois et demi les besoins en énergie de l'Union – nous essayons d'atteindre une consommation d'énergie entièrement renouvelable dans les années à venir.

Notre économie a cependant évoluée d'une économie primaire à une économie clairement secondaire, là aussi dans un but principalement autarcique. Nous transformons ces nombreuses ressources sur place de façon à ne pas dépendre d'organismes ne répondant pas directement au peuple de l'Union. Le Grand Kah a donc développé une importante infrastructure industrielle. Nous produisons des semi-conducteurs, des produits pétrochimiques, automobiles, de l'avionique, nous développons notre industrie navale, nos pièces micro-électroniques, nos méthodes et équipements de communications sans fils, d'écrans plats, d'ordinateurs. L'Union s'envisage comme une nation High-tech, nous développons autant le Hardware que le Software dans le but de rendre la haute technologie accessible, simple d'utilisation et aussi peu polluante que possible. Nous avons aussi un secteur culturel très développé – je suis sûre que les enfants d'Astra ont connaissances de quelques-uns de nos canhoxtli (light novel), de nos films, de nos jeux vidéos – nous avons attirés de nombreux stylistes reconnus, et quelques joailliers principalement attirés par nos réserves de pierres précieuses. Topaze, émeraude, améthyste. Nous avons aussi une industrie pharmaceutique de pointe en plein développement. Vous avez peut-être entendu parler de Thylacine Corporation ? Cette société du Lofoten qui a profité de nos expertises et de notre politique fiscale pour installer un laboratoire de clonage sur notre sol ?

Et... Voilà. Oui cette liste est un peu indigeste. Bon, ce pourquoi nous avons des délégations pleines de doctorants prêts à régler ces détails numéraires à notre place. N'est-ce pas votre excellence ? Ce qu'il faut comprendre, très concrètement, c'est que le Kah est une nation qui essaie de répondre à la plupart de ses propres besoins. Notre politique est d'exporter plus que nous n'importons, et d’emmagasiner autant de devises que nécessaires. Nous ne nous endettons pas, notre économique est soutenue par une importante base d'industrie civile. Nous avons pour autant de nombreux services à proposer."

Elle attrapa une pochette que lui tendait un membre de la délégation, et l'ouvrit pour en faire émerger un document qu'elle inspecta brièvement.

– "Outre nos nombreuses expertises, nous sommes tout à fait partisans de l'installation de sociétés étrangères sur notre sol, ou d'accords permettant à nos coopératives d'exercer plus aisément à l'étranger. Nous pensons aussi que l'économie est un moyen plus qu'une fin, et que nous pouvons servir des buts similaires – enrichir nos pays, les lier – par d'autres méthodes plus indirectes telle que des partenariats culturels, des facilités concernant le transit de biens et d'individus, des programmes d'échanges universitaires. Ainsi de suite." Elle reposa le document et offrit un sourire aimable à son interlocuteur. "La question est donc : qu'est-ce que le Kah peut faire pour vous ?"

"Je suis ravi que vous posez cette question !" répondit Nahos Majr "Actuellement notre population a besoin de sucre, alors j'ai pensé que nous puissions en importer en grande quantité et ainsi devenir votre principal client en terme de canne à sucre. Nous aimerons bien importer en moins grande quantité des denrées qui ne se trouvent pas sur notre territoire, c'est à dire les artichauts, du soja ainsi que de l'orge et du blé pour développer à bien notre secteur agricole en plein désert. Pour aller sur des matières, nous aimerons bien également vous importer du cuivre, du minerai de fer, de l'étain, du zinc, du plomb et du ciment. Si nous devons parler de nous, nous sommes des grands exploiteurs de pétrole mais à ce que vous m'avez dit, vous essayer d'en limiter les usages et je vous comprends. Nous pouvons vous exporter des diamants même si nous en exploitons en faible quantité."

Elle écouta la réponse du président, se saisissant d'un ordinateur de poche sur lequel elle commença, scrupuleusement, à noter des chiffres qu'elle compara avec le contenu de ses dossiers, faisant interagir les résultats entre-eux, pensive. Elle marmonnait pour elle-même.

– "Voyons, trois mille tonnes disponibles à l'exportation, en faisant exception de celles déjà employées, un total d'un milliard cinq cents millions... Diamant industriel, cinq le carat, plus demande de diamant brut... Cinquante-sept millions sept mille et cinquante mille de joyeux et..." Elle referma l'appareil d'un geste sec.

– "Citoyenne, si nous signons un accord il y aura largement le temps de convenir des quantités totales."

– "Oui, oui." Elle toussota. "Ce que je veux dire c'est que nous avons une forte demande de diamant. Joyaux comme diamants de qualité inférieure, industrielle. Ils présentent de très nombreux usages. Notamment dans le secteur industriel. Découpes précises, semi-conducteurs de pointe, foret en tout genre, pointe d'outils diverses. Vos besoins d'importation semblant excéder votre capacité d'exportation. Une partie de l'échange sera donc pécuniaire. Pour ce qui est de votre secteur agricole nous pourrions aussi organiser une mission d'assistanat ?"

Le citoyen Aquilon acquiesça vivement, mais la laissa continuer.

– "Des ingénieurs agricoles de l'union pourraient venir vous aider à organiser les premiers plants d'importation, et réfléchir avec vous de techniques et de solutions permettant de faire pousser ces denrées de façon optimale dans le désert. Hydroponie, environnements contrôlés et autres. Nous avons un antécédent en la matière."

« Nous sommes forts ravis d’entendre cela, nous acceptons avec joie votre mission d’assistanat. Nous aimerons également installer une ambassade dans la capitale de votre pays. Voir jumeler certaines villes astarsiennes et kah-tanaises. Quand pensez-vous ? Nous avons également pensé à une alliance militaire dans le but de protégé nos nations. »

La citoyenne Zeltzin sourit et acquiesça vivement, pivotant vers ses assistants auxquels elle glissa quelques mots. Aquilon pris la relève.

– "Je suis sûre que la Commune d'Axis Mundis - en termes classiques, disons que c'est l'emplacement géographique où sont installés la plupart de nos institutions confédérales, ce qui ferait office, dans une nation centralisée, de capitale, ne verrait aucune objection à vous louer un bâtiment pouvant servir d'ambassade. Quant à la question du Jumelage... Nous avons de nombreuses communes que cela intéresserait, oui."

Il joignit les mains sur la table.

– "La question militaire est un peu plus délicate. Mais là encore, l'Astra est, par essence, une nation que le Kah se doit de considérer comme amie, au moins sur le plan de l'idéologie et du système politique. Nous faisons de la défense de la Démocratie, la vraie démocratie, celle du peuple et non des élites économiques et oligarchiques, l'aspect central de notre politique militaire. Assurer des partenariats avec votre nation semblerait donc tout à fait logique d'une part, souhaitable de l'autre. Nous jouissons déjà d'excellentes relations avec d'autres nations, notamment la Floralie.

Nous pourrions procéder à des échanges de personnel dans le but de former nos troupes, à des exercices en commun, peut-être à des droits permettant à nos flottes et aéronefs respectifs de séjourner sur le sol de l'autre. Qu'aviez-vous en tête ?"

« Pour l’alliance militaire, cela est une bonne chose pour notre pays cela permettra de renforcer la coopération entre nos armées, mais aussi cela permettra aussi un transfert de connaissance et d'expérience entre nos armées.
Bien évidemment, nous ne cherchons pas à créer une alliance militaire dans le but d'attaquer qui que ce soit. Nous sommes une nation pacifique nous ne cherchons pas la guerre avec personne. Cette alliance est une alliance de défense si l'un de nos deux pays est attaqué nous pouvons nous soutenir mutuellement et lutter contre l'envahisseur. »

– "Oui, sur le principe ça correspond à peu près à ce que nous étions en mesure d'accepter. Du fait de sa position l'Union jouit de nombreux alliés mais aussi de nombreux ennemis potentiels. Nous ne voudrions pas que vous soyez trainés dans un conflit provoqué par la nature militante de notre politique. Cependant, et il se pencha en avant pour lui tendre une main, je suis sûr qu'un protocole d'échanges technique, d'entrainement commun accompagné de closes de défense renforceront nos deux nations et leur capacité à agir en toute liberté et légitimité en tant qu'acteurs régionaux et globaux. Il faudra que nous soumettions ces accords aux Communes et à la Convention générale, mais je suis sûr que cela ne posera pas de problèmes. Vous pouvez considérer que ce pacte est signé. Nous vous enverrons les documents approuvés de retour à Commune ville-libre."

Quelques minutes plus tard, un secrétaire vint apporter une pochette à Nahos Majr. Il ouvrit la pochette dans laquelle se trouvait deux exemplaires d'un accord récapitulant l'ensemble des mesures adoptées lors de la rencontre.

Accords de Zlow
entre les Communes Unies du Grand Kah et la Grande Démocratie Peuplique et Socialiste d'Astra

• L'établissement d'une ambassade astrasienne à Axis Mundis et d'une ambassade kah-tanaise à Zlow, ainsi que de consulats au sein des deux pays


• Le jumellage des villes kah-tanais et astrasiennes dans le cadre éducatif des échanges scolaires et linguistiques


• Aide du Grand Kah pour l’agriculture de l’Astra et échanges commerciaux.

Le présent traité acte également la fondation d'une alliance militaire défensive entre les deux pays. Cette alliance permettra de combattre les menaces armées étatiques ou non étatiques, étrangères ou non. Elle pourra donc servir dans la lutte anti-terroriste.
Majr disposa les deux exemplaires sur la table. "Voici l'accord récapitulant l'ensemble des résultats de nos discussions, débuta-t-elle. "N'hésitez pas à signaler une quelconque erreur afin que nous puissions la corriger."

Les deux représentants du Kah parcoururent leur exemplaire du traité des yeux, puis le firent passer à leur suite d'experts et technocrates, qui échangèrent quelques mots avant de les faire transiter jusqu'au centre de la table. Le citoyen Aquilon Mayhuasca acquiesça.

– "Rien à redire." Il lança un regard en coin à Actée. "Comme je vous l'expliquais nous devons faire approuver ce traité par la Convention avant de pouvoir vous confirmer sa validité, ce pourquoi nous vous enverrons une copie signée dans les jours à venir. Mais c'est une formalité, généralement les communes approuvent la politique que nous menons. Surtout sur des sujets aussi peu polémiques."

Il indiqua à ses assistants de récupérer le traité, ce qu'ils firent, le rangeant dans un porte-document en cuir végétal. Actée se leva et tendit une main à ses interlocuteurs étrangers. Elle semblait très satisfaite.

– "Je vous tiens au courant dans les plus brefs délais. Franchement, pour parler librement, je pense que nous ouvrons la porte d'une très riche collaboration !
– Tout à fait." Aquilon approuva, mais n'ajouta rien. Il se leva à son tour.

Dans les jours qui suivirent, la réponse des Communes arrivé : le traité était signé dans son ensemble et plusieurs villes kah-tanaises souhaitaient prendre part au programme de jumelage. On proposa un riche panel de bâtiment à la république pour y installer ses locaux diplomatiques, tous installés à distance raisonnable d'Axis Mundis, la commune gouvernementale.

Les ingénieurs agronomes et les militaires arrivèrent dans un second temps.

Les choses allaient pouvoir avancer.