Posté le : 06 août 2022 à 17:05:01
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Christianisation coloniale et dérives
Le Tahoku est un pays relativement disparate, autant géographiquement que culturellement. Carrefour des religions et philosophies nazuméennes, il compte en son sein quantité de groupes religieux différents, avec chacun leur contingent d'ordres, réformes, dérives sectaires et hybridations. Bouddhisme et shintoïsme prédominent le paysage métaphysique tahokais, à l'exception du sud du pays, sous l'influence du confusianisme. Néanmoins, l'envoi de missionnaires au Tahoku durant la colonisation (1750-1920) va introduire une autre religion encore : le christianisme. Longtemps retenus à la ligne de côte par les armées disparates tahokaises, les colons ne pourront véritablement transformer le pays qu'au sein de ses provinces côtières, et purent s'y maintenir du fait des grands bouleversements qui agitaient la région, mettant à mal l'avantage de la connaissance du terrain et des montagnes et forêts primaires impénétrables. Du fait de cette persistance instable, les efforts de raccordement à la capitale furent focalisés sur l'entretien militaire et non sur le développement civil. Les colonies établies servirent ainsi majoritairement de base militaire régionale qui elle-même avait besoin en permanence de renforts, associant la religion de l'oppresseur avec l'agression en elle-même. En conséquence, une persécution des convertis -considérés comme des vendus du régime- et des descendants des colons fut organisée par le deuxième empire du Tahoku à la suite de son indépendance. Les tables ayant tourné, les derniers survivants partirent se réfugier dans les montagnes. Ainsi protégés de l'Inquisition Impériale, ironiquement basée sur celle de l'oppresseur, les fidèles furent abandonnés à leur sort. En effet, l'administration impériale et ses sections armées avaient atteint leur but : réduire considérablement l'influence à long terme que les étrangers pouvaient répandre dans le tout nouveau pays, et chasser leurs derniers représentants ne valait tout simplement pas la peine. En effet, l'armée impériale révolutionnaire avait été mise à l'épreuve par les combats et subissait les conséquences d'une mauvaise récolte, amenuisant sa capacité de déploiement.
C'est donc au creux des vallées glaciaires tahokaises du Subaru et du Kaneshiro que se redressa la foi chrétienne. Cependant, l'éloignement géographique de la capitale participa à la construction d'une identité séparée de celle de la métropole : au fur et à mesure des générations, de nouvelles traditions se formèrent et d'autres, issues de la culture tahokaise, furent adoptées. Le maintien de la cohésion nationale était majoritairement pris en charge par les convois militaires et commerciaux transitant dans la région, apportant un lien affectif avec la mer à la culture syncrétique ainsi formée, lien qui se perdit ou se transforma lors des migrations vers l'intérieur des terres. C'est ainsi qu'on observe de nombreuses communautés chrétiennes le long des rivières et ruisseaux de montagne, au-delà de leur simple utilité pratique. Ces communautés néo-formées sont donc exclusivement des groupes d'effectifs limités, coupés du monde, et entièrement autonomes. On les reconnaît par ailleurs par leur style architectural mixte, et les noms de leurs villages qui croisent racines anglophones et japonaises. Parfois subsiste quelques cultures exotiques de la région, jalousement préservées de l'extinction par les aïeuls de la communauté. De faible diversité génétique, elles font face à des maladies génétiques récurrentes compensées par de rares croisements avec les communautés à proximité.
Imprégnées par les croyances ancestrales de la région, les communautés chrétiennes présentent elles-mêmes une tradition spiritualiste (ou spiritiste selon les cas) ancrée dans les légendes sur les esprits habitant les forêts et montagnes recluses du Tahoku. Ainsi existent des communautés doublant leur pratiques religieuses de séances de communication avec l'au-delà, et d'autres élevant ces pratiques à une mission évangélique de protection des hommes contre les démons hantant les terres du pays. D'autres encore, associant chrétienté et croyances animistes du shintoïsme, ressemblent plus à des cultes polythéistes qu'à leur religion initiale, quand il ne s'agit pas de groupuscules bouddhistes syncrétiques.