21/02/2015
18:41:24
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[Terminée] [Élections | Chronique] La Citadelle Assiégée.

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LA CITADELLE ASSIÉGÉE.


« Messieurs. »

Tous les regards s'orientèrent dans la direction de l'homme qui venait parler, imposant par la même un silence respectueux. Un vieil homme. Dans un uniforme suranné de guérilleros, une unique médaille accrochée à la poitrine. Il faisait un peu tâche au milieu du comité. Des civils. Presque exclusivement des civils. Ils n'avaient pas vraiment connu la guerre, ou de loin. Leur vision de cette dernière était celle des technocrates, des organisateurs. Au mieux, celle des élus du peuple qui ne peuvent pas réellement comprendre la réalité du terrain. Pas qu'ils avaient échappés au service confédéral. Pas non-plus qu'ils étaient tous ignares concernant les matières militaires. Certains étaient assez vieux pour avoir de vifs souvenirs de la dernière révolution. Mais enfin, disons les choses, ils restaient majoritairement des civils. Et les quelques-uns aux passifs d'officier – De Rivera, Aquilon – étaient respectivement un ancien de la logistique, poste assez peu exposés aux grandes décisions stratégiques, et un pur officiel de terrain, idéologue, le genre quasi-commissaire politique, dépêché par la Convention pour être son œil et sa bouche. Aucun des deux n'était en mesure de concevoir une doctrine politico-militaire qui ne soit pas au choix un tissu de poncifs, ou un pur pamphlet idéologique. C'était pourtant la mission que la Convention avait donnée au Comité lors de sa réélection de 2005, mission sur laquelle on déciderait ou non de son maintient ou de son renvoie à la case électorale.

Le vieux guérillero se répéta. Pour l'emphase.

« Messieurs. » Puis, car il s'était levé, il se rassit sur sa chaise, et rassembla des fiches éparpillées devant lui. « Je pense que nous devons regarder la réalité en face. Ce n'est pas un échec, c'est une erreur.
C'est pire que ça et vous le savez, citoyens. »

Actée. Elle n'était pas de très bonne humeur. Probablement que la situation avait imposée un rythme relativement effréné aux affaires étrangères. La pauvre – qui n'avait jamais vraiment été du genre à dormir paisiblement – avait enchaînée les nuits courtes. Le micro-sommeille qu'affectionnaient tant certains de ses pairs ne faisaient pas partie de son logiciel citadin. Embourgeoisé, diraient les critiques. Tout de même, on ne peut pas lui en vouloir de vivre à un rythme normal. Tous les habitants de l'Union ne peuvent pas être des révolutionnaires armés, à dormir par vague de trois heures, à s'entraîner une semaine par mois, à attendre la prochaine confrontation. Une nation n'était pas une citadelle.

Tout de même, le Grand Kah y ressemblait de plus en plus. Peut-être que la citoyenne Actée devrait se faire aux nuits courtes. Son commentaire, en tout cas, ne lui attira aucune sympathie et on lui fit signe de se taire. Le vieux guérillero continua comme si de rien était.

« Nos décisions ont amené à cette crise. Il est évident que nous avons sur-estimés nos moyens et que nous avons péchés par orgueil. Le temps viendra – rapidement – où nous devrons rendre des comptes à ce propos. Mais avant tout nous devons comprendre ce qui n'a pas fonctionné, ce qui nous a empêché de remplir efficacement notre mission pour l'Union. Comprendre, d’abord, puis remédier. Et rapidement. Cette erreur ouvre la porte à nos ennemis.
Et ils vont s'en donner à cœur joie. » Cette fois la citoyenne Zeltzine. Comme elle parlait peu en dehors des affaires économiques, on l'écoutait. Ce n'était pas une de ces commissaires qui prenait la peine de débattre chaque point de chaque ordre du jour. Cela ne signifiait pas que sa parole avait droit à plus de crédit, simplement que s'il fallait débattre de ses propos, c'était en son for intérieur. Elle ne répondrait de toutes façons pas vraiment à un avis contraire, se contentant de sporadiquement exprimer sa position, ou d'asséner des vérités ou de formidables intuitions quand on s'attardait sur son domaine d'expertise. « Nous devons de déclarer la guerre – façon de parler, je vous vois venir De Rivera – à la première puissance mondiale. Notre illustre voisine. »

La Raison, comme on surnommait Maximus de Rivera, secoua doucement la tête.

« Je n'allais pas vous reprendre, je pense même que vous avez raison. C'est aussi une opportunité.
En quoi ? » Rai Sukaretto le regardait droit dans les yeux. Son sourire amical ne révélait aucune émotion. Maximus pris le temps de formuler sa réponse, le silence, extrêmement pesant, dura quelques secondes.

« C'est la première puissance mondiale. Ce n'est pas comme si l'Union avait attaqué et perdue contre une puissance de second rang. Premièrement, si ma mémoire est bonne, l'invasion du Pontarbello par l'Alguanera ne fait pas l’unanimité sur la scène internationale. On peut notamment signaler la prise de position d'Aumérine.
Nous avons parié sur le bon cheval, commenta Xen Suchong.
D'autres régimes suivront, continua le citoyen. Notamment hors de la sphère libérale occidentale. Il sera extrêmement simple de faire du Pontarbello un point de tension à exploiter auprès des nations anti-impérialistes. Ensuite, la perte de matériel militaire est effectivement problématique. D'ailleurs je ne m'explique pas comment il se fait que des corps armés équipés pour lutter de façon efficace en situation d'infériorité aérienne, et armés pour lutter contre des blindés, se fasse ainsi écraser par une milice trois fois inférieure en effectifs et ne jouissant pas nécessairement de matériel supérieur en termes de qualité, mais là n'est pas le sujet et je suis sûr qu'une analyse ultérieure des évènements enrichira largement les propositions du Directoire. Là où je veux en venir c'est que nous avons perdu du matériel qui devait de toute façon être donné à des pays alliés de moindre importance ou recyclé pour laisser place à des appareils de nouvelle génération.
Donc ce n'est pas si grave ? C'est ce que vous tentez de dire, Edgar ? Vous essayez de vous rassurer, mon vieux ! »

Rai souriait mais ne semblait pas convaincue. Elle était, au même titre que quelques-autres membres du Comité, debout autour de la table de réunion. Elle fit trois pas vers le citoyen De Rivera pour lui mettre une tape amicale dans le dos. L'ancien officier fit claquer sa langue contre son palais. Actée, qui s'était éloignée pour regarder par la fenêtre, lança un regard par dessus son épaule.

« Oui. Ce n'est pas si grave. En comparaison au drame national qu'a été la dernière Junte ce n'est rien. Notre économie ne sera pas affectée. Il me semble que l'esprit de l'Union est encore fort. Il me semble aussi que cette défaite s'inscrit dans une polarisation du monde que nous voyions venir de longue date. Rien de surprenant. Nous n'allons pas nous faire de nouveaux ennemis. Au contraire je pense que nous allons attirer l'attention de tout ceux qui ont intérêt à voir chuter notre encombrant voisin, et cherchaient un pays capable de faire le nécessaire.
Vous n'envisagez pas sérieusement…
Je n'envisage rien.
Envisagez ce que vous voulez. » Actée regardait toujours dehors. Même si ils ne voyaient pas son visage, les membres du Comité devinaient clairement son agacement. « Le Comité Estimable n'envisage rien, lui. »

Un nouveau silence. Chacun se replongeait dans ses fiches, ses notes, les rapports de ses commissariats et commissions parlementaires. Styx Notario et Aquilon Mayhuasca, les deux chiens fous du comité, parlaient à voix basse. À titre personnel on pouvait assurer qu'ils ne s'aimaient pas et en rester là. Ils formaient cependant au sein du Comité les représentant de l'aile radicale de la Convention. Lui issue des Splendides, elle d'un accord entre les Syndicats des Brigades et de l'Accélération, ils formaient un fer de lance interventionniste, idéologisé et pas aussi étanches au bon sens que ne le laissait croire leur réputation. Fous, peut-être, mais doués, indéniablement.

C'était Aquilon, après tout, qui avait porté le projet de réarmement du Grand Kah. Sans lui pas de Kotios, pas d'alliance Pharoise. Une grande partie de la doctrine militaire de l'Union – aujourd'hui mise en échec – reposait sur ses idées, ses recommandations. Et Notario ? Son petit projet au Yuhanaca avait été stoppé net par l'intervention fédérale. Elle ne s'en était pas remise. Elle avait, comme qui dirait, un plat qui se mange froid en attente de consommation.

Elle prit la parole d'un ton neutre. Au sein du Comité on lui reprochait encore ses aventures personnelles avec les services secrets. On la tolérait pour sa compétence, mais elle devait se montrer prudente.

« Nous perdons du temps. »

C'était sa façon à elle d'être prudente. Au moins elle n'avait pas directement insulté l'un des citoyens. Actée se rapprocha de la table, pour l'écouter. Si elles devaient se disputer, elle préférait le faire en voyant son visage. Les autres durent comprendre son attention, car il y eut quelques yeux levés vers le ciel. Notaria se montra imperturbable.

« Nous savons très bien ce qu'il faut faire. Consolider le Comité Estimable ou admettre son échec et le remplacer par une nouvelle formation. Nous devons demander à la Convention Générale d'accepter notre démission. »

La citoyenne Actée plaqua ses mains sur la table. Sa réponse fut prononcée avec un calme détaché, chaque mot nettement articulé, qui détonait clairement avec son expression furibonde.

« Je n'ai pas particulièrement envie de démissionner à cause des erreurs poussées par la frange radicale. »

Pour elle le Pontarbello s'inscrivait à la suite d'une dérive interventionniste à laquelle elle s'était toujours opposée. Quelques acquiescements. Suchong alla jusqu'à inviter la maîtresse des services secrets à  « montrer l'exemple ». Le citoyen de Rivera laissa ses camarades s’houspiller, puis réclama le silence quand le ton menaça de monter. Lui n'avait pas grand-chose à reprocher aux radicaux. On ne le surnommait pas La Raison pour rien : le Comité avait approuvé ces opérations. Ces erreurs étaient celles de tout ses membres. La démission n'était pas une solution optimale, mais restait une possibilité entendable.

« Nous pourrions proposer de convoquer des élections anticipées. À ce stade la plupart d'entre nous jouissent encore de la pleine confiance de la Convention.
C'est ce que je disais, lâcha Notario. Consolider ou admettre l'échec. Je suis pour une consolidation, vous vous êtes concentrés sur la seconde proposition. »

Actée secoua la tête. Toujours pas convaincue. Son analyse dépassait la nature politique de l'erreur. C'était une femme de fond.

« Peu importe. Des élections anticipées ne serviront à rien si nous ne prenons pas en compte le fait qu'il nous faut impérativement une nouvelle ligne répondant aux derniers développements internationaux.
Vous voulez dire, une ligne militaire ? » Aquilon. « Car c'est bien ce qui coince. La question militaire est laissée aux Directeurs, qui ne devraient théoriquement pas se charger de l'aspect politique de la chose armée. Or le commissariat à la Paix n'est pas représenté au sein de ce comité. Pourquoi le serait-il, le Grand Kah était un pays désarmé avant que l'Estimable ne fasse approuver la création d'une force opérationnelle. »

Et ce réarmement ne s'était pas accompagné d'une réorganisation du Comité de Volonté Publique. Maintenant, tout le monde pouvait réaliser que c'était un vrai problème.

« Alors quoi, continua Zeltzin. Un Estimable Deux ? On prend les mêmes, on recommence, mais quelqu'un aura la charge de la Paix ?
A vrai dire je compte profiter de cette occasion pour prendre ma retraite. »

Les regards pivotèrent une fois encore vers Maxwell Bob, dit l'Ancien. Le vétéran de la politique et de la guerre civile souriait tristement. On fit silence pour le laisser continuer. C'est vrai qu'il avait connu les gouvernements d'avant-guerre. De tous, c'était celui dont la traversée de l'Histoire kah-tanaise était la plus longue.

« Je suis vieux. Je n'ai rien à faire dans ce gouvernement. Ma présence était utile il y a sept ans, lorsque l'Estimable avait besoin d'une figure publique connue pour assurer un semblant de légitimité à la nouvelle Convention. Je pense que mon rôle est joué.
Donc on prend les mêmes, corrigea Zeltzin, moins vous.
Il suffira d'orienter la campagne. Demandez aux communs de vous trouver des personnalités en mesure de présenter un projet militaire à la Convention. Je suis sûr que cela sera extrêmement intéressant.
Des élections pour un commissariat seul. » Actée se passa une main sur le visage. Elle n'avait pas vraiment d'avis sur cette question précise, malgré sa nature exceptionnelle. « Les pharois vont croire qu'on les copie.
Mais non. » Rai lui posa une main sur l'épaule et pris un ton didactique. « Nous sommes un comité, ça n'a rien à voir avec un ministère.
Hmhm. Bien. C'est entendu alors ? »

Pas d'objections. Aquilon, en ses qualités de rapporteur de la Volonté Publique auprès du Parlement, fut envoyé expliqué la situation à la Convention. Il allait falloir voter.
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Des lettres.


Au citoyen-général Atl Mikami.

Mon vieil ami. Comment vous portez-vous ? Cela va faire bientôt trois ans que nous ne nous sommes pas vu, et je sais. Je vous connais. En tout cas assez pour vous imaginer me répondre, laconique dans le plus pur style télégraphique, comme on vous l’apprend à l’académie de la garde, que je ne vous écris plus beaucoup. Je plaide coupable. À une époque il me semblait important de dire à l’un des quelques héros de Kotios que la ville allait mieux. De mieux en mieux. Puis enfin, qu’elle allait bien. La ville va bien depuis plusieurs années. Cela ne change pas beaucoup. Inutile de vous tenir au courant du reste : tout avance, rien ne change. L’anarchie, la démocratie directe, vous venez du même pays que moi. Vous savez comment cela fonctionne ; Les multitudes d’histoires locales se fondent dans un immense tout de plus en plus opaque, maintenant qu’il n’est plus rythmé par les impressionnantes purges et les efforts de reconstruction. Tout va bien. Tout va toujours bien. Je ne vous écris pas à propos de Kotios.

Vous l’aviez peut-être deviné.

La situation Kah-tanaise semble de plus en plus incertaine, et j’ai eu la grande surprise d’apprendre que le Comité de Volonté Publique avait demandé – et obtenu – sa dissolution. Je lis quotidiennement l’Observateur, aussi j’ai conscience des arguments avancés. Il faut peut-être un changement d’exécutif à la Convention. Ce point je ne le remets pas en cause. Cependant je sais, tout le monde sait, qu’une partie de l’opinion publique va prendre cette démarche à l’envers. On va probablement penser que le comité cherche à se défiler au moment le plus inopportun. L’Alguanera se fait extrêmement menaçant. Si je persiste à penser que personne ne veut d’une guerre et que tout le nécessaire sera fait pour que l’embryon d’escalade en cours ne se développe pas en conflit ouvert ou même larvé, il est indéniable que ces tensions auront un effet extrêmement toxique sur notre démocratie et risque d’influer négativement sur la composition du prochain Comité de Volonté Publique. Vous le savez peut-être, la plupart des théories politiques composant mon idéologie propre, ma façon de percevoir le monde, étudiée en université, conçue par la réflexion, l’observation des faits et la mise en pratique de divers théories, fait de moi une centriste. On pourrait me rattacher aux horlogers. Ou à une membre de la Conserve un peu plus interventionniste. Ce que je vais dire est donc à comprendre sous le prisme de cette position droitière et relativement modérée, donc j’ai appris avec le temps à ne plus avoir honte puisque après tout, notre démocratie accepte les opinions les plus molles, et les faits m’imposent constamment de les ignorer au profit d’actions dont la radicalité me débecte mais semble, fréquemment, nécessaire.

Donc : j’ai peur que les tensions géopolitiques amènent à une surreprésentation des groupements idéologiques interventionnistes et radicaux au sein du prochain comité. Impossible de savoir comment se sont déroulés les débats au sein de l’Estimable, mais ils ne pouvaient pas ignorer qu’en demandant la dissolution du comité spécifiquement quand les tensions sont au plus haut, ils ouvraient la voie à ce genre de risque. Je parle bien de risque, car je crois qu’il nous faut au contraire des politiciens plus technocrates qu’idéologues. Les idéologues ont fait leur travail – et magnifiquement avec ça. Le Liberalintern est une belle machine, les planificateurs et les communes ont de belles feuilles de route pour les trois décennies à venir. Maintenant il convient de tout appliquer dans la mesure du possible, et de se poser.

Bref. Un comité plus radical ou interventionniste risquerait de saborder – involontairement – les avancées de l’Estimable. Je suis pour la Révolution, mais je crois que nous devons la mener intelligemment et cibler spécifiquement les fascistes. L’Obsession des Brigadiers et des Futuristes pour les capitalistes, et cette espèce de passion étrange qu’ont les Splendides pour le Baroque et le décadentisme ne composent pas nécessairement une conception politique que je suis capable d’appréhender. Kotios, à vrai dire, n’en compte pas beaucoup. Nous étions tous des modérés à notre arrivée. Certains le sont encore. En tout cas le Club et la Section Défense se sont adaptés à la culture locale pour éviter de la contaminer avec des extravagances que le Grand Kah ne peut supporter que par la force de l’habitude. (Je ne parle pas nécessairement des punks de Rai. Ils sont… Intéressants. Et qui plus est nous en avions emmenés quelques-uns dans nos bagages. Pour des rats des caniveaux ils défenestrent du fasciste comme peu de monde en serait capables).

C’est mon interprétation politique des choses. Elle est peut-être erronée, mais je crois que la qualité du journalisme politique au sein de l’Union assure une certaine clarté dans ce que je crois comprendre depuis la lointaine eurysie. De plus, mon cœur est encore au Grand Kah, même s’il s’est fait à Kotios et à ses rives froides.

Autre-chose.

Je sais que vous entretenez des liens privilégiés avec l’Egide du fait de votre rôle au sein de la garde. Peut-être serez-vous capable de m’éclairer sur ces choses que l’on m’a rapporté et qui m’inquiètent légèrement. J’ai entendu dire que des gens, au sein de la Convention, avaient employés le terme Citadelle Assiégée. Citadelle Assiégée. Ce n’est pas anodin. C’était le terme utilisé pour désigner Kotios lors des premiers jours de son existence. Plus précisément c’était le terme que j’avais demandé aux propagandistes de la Section Défense d’utiliser dans l’ensemble de notre communication officielle. Kotios, Citadelle Assiégée. Cette conception permettait de justifier la formation d’une milice armée d’un extrême niveau de professionnalisme. Vous savez aussi quelles conséquences imprévues ont accompagnées ce petit surnom. Notamment mon prorpe surnom, celui de "chevalière-citoyenne". Je n’ai rien contre le romantisme. Dans une autre vie j’aurai pu être une splendide ; Mais tout de même, j’aurais préféré que ce titre ne me soit pas attribué. De même je préférerai que le terme Citadelle Assiégée ne soit pas utilisé pour qualifier le Grand Kah. La situation Kah-tanaise n’est en aucun cas comparable à la situation kotioïte de l’époque, et si les médias et les représentants se mettent à faire la confusion entre les deux, la menace d’invasion – qui reste limitée – sera comprise comme beaucoup plus importante, amenant à la radicalisation du discours public dont je parlais précédemment, et à un risque d’emballement, de course en avant, donc il serait sans doute difficile de nous extirper. Kotios, par exemple, a eu énormément de mal à se reconstruire et à quitter l’État d’exception intauré par les juges. Malgré l’aide internationale. Malgré sa victoire ; Malgré tout. Le Grand Kah pourrait, dans une telle situation, s’en retrouver changé à jamais.

Ce qui me fait penser que ce risque est réel, et ce pourquoi je faisais référence à votre lien avec l’Egide, c’est qu’on m’a rapporté que certains groupes de la Protection Civile s’étaient composés en "Section Défense", selon l’exemple de Kotios et en reprenant le vocabulaire développé par mes camarades lors du putsch fasciste et de la guerre qui a suivi. Je ne veux en aucun cas que les discours que j’ai développés pour défendre cette ville martyre, incroyable soleil d’un nouveau monde, soient appliqués à un Grand Kah dont le rôle historique est tout autre. La confusion entre les deux serait dangereuse et comme je le disais précédemment, je n’aime pas beaucoup le romanticisme en politique. Pas quand il n’est pas mérité ; Kotios est fermement romantique. Le Grand Kah ? Vu les moyens de notre Union il serait préférable qu’elle n’ait pas la tête dans les nuages. Pourriez-vous me confirmer que ces groupes, ces sections défenses kah-tanaises, ne posent pas de problème ?

Du reste vous êtes une figure publique importante. Presque mythique en fait. Victorieux en Damannie et à Kotios. Votre prestige et celui du directoire est peut-être écorné depuis les derniers développements concernant notre aviation, mais votre voix reste celle de l’unique expert militaire connu par les citoyens de l’Union. Peut-être pourriez-vous prendre position en faveur du calme et de la modération ? Je crois comprendre que la Convention va chercher au moins un membre, pour le prochain Comité de Volonté Publique, capable d’insuffler une stratégie claire à l’armée. Ce poste vous irait bien.

Mais ce n’est que mon opinion, et comme je le disais il n’est informé que par des journaux, quelques observations et une dose conséquente de réflexion pouvant amener à des erreurs de jugement.

En tout état de cause j’espère que vous vous portez bien.

Salut et fraternité,
Meredith.



À la citoyenne Meredith.

Chevalière-capitaine. À défaut de m’écrire à propos de la ville, vous pouviez m’écrire à votre propos. Très heureux que Kotios se porte bien. C’est aussi mon cas. Si j’en crois la quantité de mots que vous avez mis dans cette lettre je crois que vous allez aussi bien. Ainsi tout le monde va bien. Sauf le Grand Kah et son aviation. Pour vous répondre les sections défense en question ne sont pas problématiques. Elles composent un sous-syndicat au sein des forces armées ; Rien de problématique. Je vous tiens au courant. Concernant le reste je ne peux pas me lancer en politique. Je suis membre du Directoire. La situation est assez tendue, comme vous le disiez. Je ne souhaite pas que l’on m’accuse de césarisme. Je ne souhaite pas non-plus être ce vieux militaire qui prétend remettre de l’ordre dans un pays en pagaille. Je suis trop vieux pour la politique, et l’uniforme souillerait les sièges de la Convention. Le kaki n’a rien à faire dans l’hémicycle. La Junte l’a prouvée assez clairement. Autre-chose. Quand ils m’ont nommé à la tête de la garde, lors de son agrandissement, j’ai accepté car j’étais le seul officier supérieur avec une expérience réelle de la guerre, et en mesure de transformer la force de défense de la Convention en force de défense de la Confédération. C’est tout. Je ne me lancerai pas dans cette aventure, même si je vous accorde que la situation a de quoi laisser perplexe.

Je suis honoré que vous ayez pensé bon de me proposer de le faire.

Essayez de m’écrire plus souvent. Quitte à me dire que tout va bien. Il est toujours agréable de voir que malgré votre mauvais caractère vous n’êtes pas encore morte. De plus, ça me permettrait de rapatrier l’homme des services secrets que j’ai chargé de vous suivre.

Amicalement,
Votre vieux camarade Atl.
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Création de la Section Défense de Nayoga Lamanai.


C’est comme ça, nous sommes une force de l’avenir.
C’est le premier jour du mois. On ne peut pas nier qu’il a fait beau. Trop beau, même. L’air est étouffant comme dans un four. Le ciel bleu vomi ses rayons, accable les rues sales du port. On se croirait de retour sous les barricades et les incendies. Dans la salle de conférence, il y a un courant frais. Le badguir aspire l’air chaud, le recrache dehors. Une fenêtre donne sur la place du temple, très large. Il y a toutes ces façades qui datent d’avant la colonisation. De la peinture fraîche. Une propreté qui en ferait oublier l’époque. Tout est couvert de fleurs. Sur les marches de la pyramide, un prêtre-juge fait audience, abrité par un porche de toile. À l’écart, silencieux, les murs épais de la maison des congrès protègent leurs invités.

Ils sont moins d’une centaine. Des visages si différents, ils se ressemblent tous. Je les reconnais en ce qu’ils représentent. Ce qu’ils sont n’a aucune forme d’importance. Énumération. Liste. Sociologie inutile. On devine dans leurs regards un même esprit. Affligés, vétérans, grands blessés, étudiants brillants, oisifs, inutiles, violents, tarés de tout ordre, syndicalistes, radicaux frustrés, futuristes déçus, artistes, fonctionnaires, journalistes, expatriés. Une masse habitée par le même rêve. La même sensation. Il manque quelque-chose.

Sur les sièges inoccupés, on ne voit pas l’aveu de défaite. C’est tout le contraire. Entre les hommes et femmes se trouvent les morts. Ils sont plus nombreux que les vivants, ces spectres à venir. Leur absence est écrasante. La salle est immense, sans eux. Comme l’intérieur d’une cathédrale, où l’on pleurerait les anciens martyrs. Ceux et celles dont la disparition hante encore tous les autres. Les membres fantômes d’une force en pleine recomposition. Mais on ne pleure pas. La douleur continuera éternellement. On s’y complaît. Ces hommes et femmes sont le peuple de l’ombre, martyr. Cette douleur, c’est eux. Leurs visages l’expriment.

Graves. Souffrants. Exaltés ? Pas encore. Bientôt.

Je les connais tous. Pas besoin d’avoir vécu à leur côté, d’avoir entendu leurs noms. Je les connais. Ces regards avides, ces yeux cruels. Cette jeunesse qui exploserait pour un rien, un appel systématique à la violence. Et encadrant la scène, comme les piliers d’un temple ancien, ou d’un ordre nouveau, les hommes de la guerre. Les vétérans, ceux qui ont connu la souffrance réelle du combat. Un autre genre de frustration. Les yeux des vieux demandent « Quand fera-t-il jour, camarade ? ». Pas de réponse évidente. Les jeunes répondent « Demain. » Demain. Demain ils prendront les armes et peut-être, même, marcheront dans la direction d’Axis Mundis pour y ordonner que l’on y pratique la Révolution. Qu’on y pratique enfin cette reine de toutes les luttes. Les pyramides se dégonflent comme des baudruches. Leur sommet est instable. Les autels, prêts à se renverser en l’absence du prêtre. La place est libre.

Ce sont des choses qui arrivent, historiquement. Et à la tête de cette cohorte légionnaire, ils veulent une femme. Moi. Un porte-étendard, soutenue par quelques pilus. Notre bannière noire de sang, qui coagule à chaque pas. De grosses gouttes épaisses se déversent sur le manche, se répandent au sol. Le sang de tous les martyrs présents et à venir. De Kotios. De Damannie. Du Vanarya. Du Pontarbello. Du Grand Kah. Notre sang. Le sang humain. Bien rouge. Chargé d’oxygène et de fer. Fluide infini, incommensurable, inexplicable. Psychomagique et fragile. On le boira à la source, comme le lait maternel. L’internationalisation de la lutte doit se faire. La lutte des classes doit devenir réalité. Opposer les pays prolétaires aux pays bourgeois. L’analyse est dialectique, matérialiste. Tout à la fois. Elle est évidente mais gardée secrète. Ils savent. Ils ont vu et ont compris. Trop intelligents pour ne pas avoir saisi la réalité du problème. Les vieux érudits pontifiants. Les commissaires suréduqués, géniaux, les vieux sages barbus, dans leurs uniformes magnifiques, qui nous récitent les quantiques de la réalité, d’une génération sur l’autre, sans jamais sauter une ligne. C’est la génération éternelle des vieux fous. Les morts dominent les vivants. Pas encore. Mais les vieillards dominent le monde. Reliques philosophes dont la sagesse n’a jamais été qu’une excuse à l’inaction. Plus tard, plus tard. Les conditions ne sont pas réunies. Plus tard, plus tard, il faut reconstruire. Plus tard. Et quand ils passent à l’action, c’est par erreur. Presque par glissement freudien. La réalité leur revient comme un infarctus. Ils s’échappent à eux-mêmes. Brièvement, n’arrivent plus à oublier le sens de leurs discours. Se souviennent. Ils sont kah-tanais. Le sang qui jaillit dans leurs veines est chaud. La révolte. La révolution. La lutte finale et totale contre les ennemis de l’humanité. Et ils agissent. Puis se souviennent. Non. Ce n’est pas ça. Ils sont sages, modérés. Ils gélifient tout ce qu’ils touchent. L’action se meurt. Elle n’est jamais aboutie. On l'étouffe. Deux siècles de Grand Kah. Deux siècles de fausse couche.

Mais l’analyse est évidente. Des pays bourgeois. Des pays prolétaires. Des ennemis de classe, encastrés dans leurs frontières. Qu’on prépare les cordes. Qu’on sonne les cloches. Qu’on couvre les jeunes vierges, Izcalie, Lofoten, Bratolia, d’encens et qu’on leur donne les armes pour se venger. Elles porteront les enfants de l’idéologie : la révolution. Qui dévoreront leurs mères, leurs pères. A bat les vieilleries. Décapitons jusqu’au dernier tyran. Tuer les riches. Se repaître de leurs corps. Nous graisserons la Roue du progrès de leur sang. Soixante-dix millions d'âmes l’exigent. Deux-cent millions. Un milliard. À terme, toutes l’espéreront.

Car notre marche ouvre un sillage rouge. On nous suit à la trace qui coagule sur les pavés.

Je les vois. Ces soixante visages. Ces millions de spectres. Les chaises inoccupées, celles que l’on remarque. Cette masse n’est qu’un embryon. Demain ils seront plus nombreux. Et on parle. Nos propos sont saccadés. Puissants. Les différences sont rabotées, arrachées à la surface du corps par la colère qui souffle. Les éclats de chair éclaboussent le propos. On tombe tous d’accord. On dit les mêmes choses de la même façon, avec la même rage. Ce n’est plus un échange. C’est un mantra. Révolution. Je les vois, ces visages. Je monte sur la scène. C’est ce qu’ils réclament. Nous ne sommes qu’au début, mais l’occasion est manifeste. C’est inévitable, indéniable : il y avait un choix à faire. Ils l’ont fait. Eux les premiers d’un nouveau genre. Je lève le poing. Comme les reliques en leur temps. Rappel pavlovien aux vieux sages, aux philosophes, à la caste des experts. Ils y répondent. Il n’y a plus de trahison possible. Nous sommes désormais les mêmes. Et ils scandent.

Ce qu’ils ne comprennent pas c’est que je ne suis pas un choix. Je suis le vide. Le néant. La fêlure. Ils m’emplissent de la substance qu’ils veulent y voir. Scandent mon nom. Maiko. Maiko. Les deux syllabes qui résonnent dans l’air chaud, prennent une vertu incantatoire. Je ne sais pas ce qu’elles signifient. J’en ferai quelque chose. Nous trouverons un arrangement. Je lève la main pour les saluer.

L’air du temps a changé.
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Le Modéré


Viktor Anastase Miloradovitch, surnommé Caucase


Avec ses airs de souffreteux qu’on aurait jeté sous un train, Viktor Anastase Miloradovitch, surnommé Caucase par ses amis, ne faisait pas partie de ces gens qui présentaient bien. Il en faisait d’ailleurs une fierté personnelle.

En effet, il n’ignorait pas comment fonctionnait ce système, fort imparfait mais un peu sympathique, que le reste du monde appelait démocratie. Le système représentatif (il avait du mal à y voir une réelle forme de démocratie), élisait plus ou moins ses leaders selon leur tête. Il fallait rentrer dans un certain nombre de normes sociaux-culturelles, parler d’une certaine façon, faire transiter les idées ainsi et pas autrement, etc. Un individu ouvertement déformé, scarifié au plus au degré, ne serait jamais qu’une figure singulière et peut-être sympathique. Mais tout de même systématiquement – dans le sens du terme où cela découle bien d’un set de règle régissant le fonctionnement du système – relégué à une place de troisième plan, à moins d’être nommé par un pair. Ce qui provoquerait inévitablement des questions, des remarques, une levée de bouclier spasmodique et paternaliste chez l’intelligentsia crasseuse qui confond le beau et le bon. Les candidats, dans ces pays, sont des produits. Leur packaging est important.

Au sein du Grand Kah il était un membre actif de la vie publique et politique, et son aspect horrible n’y changeait rien. On l’avait nommé parce qu’on lui faisait confiance, parce qu’il avait trouvé les mots justes pour exprimer les désirs et les idées d’une part non-négligeable de la population. Il était fier d’habiter un pays où son apparence n’était pas un sujet.

De toute façon elle ne faisait jamais que les choux-gras des journaux les moins élevés du débat public. La plupart des canards ne la mentionnaient même plus, sinon en préambule d’un quelconque laïus sur l’origine quasi épique de ses blessures. Des évènements assez tristes qu’il avait toujours, de façon très rationnelle se disait-il, refusé de monter en récit mythologique. Il ne lui était pas venu à l’esprit que ce refus obstiné d’en parler pouvait être lié à quelque rejet d’ordre moins arbitraire que psychologique, et personne dans son entourage n’avait pris la peine de souligner la possibilité, se doutant que cela aurait un impact très limité sur Caucase. L’homme était du genre calme, mais plutôt irréductible. Sur ce genre de choses il changeait assez peu d’avis.

Sur d’autres, cependant, il était d’une ouverture qu’on pouvait qualifier de singulière. Il était comme une machine. Un calculateur en constante recherche de données, les incluant automatiquement dans son algorithme jusqu’à en tirer, à la demande, des conclusions se voulant de plus en plus précises. Pas assez bête pour prétendre ne pas avoir d’idéologie, il assumait cependant que celle-là était d’une flexibilité radicale. Si on lui présentait des preuves convaincantes, que la conjoncture s’y prêtait, que les intérêts confédéraux l’exigeaient, il pouvait passer d’un costume à l’autre. Il n’avait pas d’avis arrêté sur la plupart des sujets – dont il admettait volontairement qu’il n’avait qu’une maîtrise très superficielle. Initialement il n’était jamais qu’un agrégé de philosophie. Ses opinions sur les sujets économiques géopolitiques, militaires, sociaux découlaient d’une vision du monde précisément pensée, mais sans prétention de technicité. Il n’avait aucune honte à cela. Là aussi, il en faisait une fierté.

Il n’y avait pas énormément d’éléments, dans sa carrière ou sa personne, que Viktor Anastase Miloradovitch ne regardait pas avec fierté ou espoir. Il était de ces éternels convaincus que l’on pouvait faire mieux. Cette inclinaison justifiait peut-être sa position modérée sur toutes les questions ayant trait à l’immédiateté de la révolution. Il croyait aux réformes, aux améliorations progressives, d’autant plus au sein du Grand Kah, dont le système si particulier était déjà en soi une application de la Révolution.

Cette position était déjà celle qu’il tenait au début de sa carrière politique. Le terme était presque vulgaire, au sein de cette Confédération où la chose publique se voulait réellement publique, où chaque citoyen prenait par à la vie de sa commune, mais il n’y avait pas vraiment d’autre moyen de qualifier son ascension au sein des rangs des chambres agricoles, de son influence toujours plus importante au sein de certains des clubs politiques du centre.

C’était l’époque où on l’appelait encore l’avocat des campagnes. Il rodait dans les chambres communales du sud est du pays. La région la moins développée de l’Union, qu’une sous-population indéniable avait toujours relégué à une position de second rang, malgré la décentralisation politique. Effectivement ces grandes régions de jungles et de rizières ne nécessitaient pas les mêmes financements que les immenses citées du nord et de l’Ouest, mais cela avait pour effet de rendre certaines des revendications locales inaudibles au plus haut niveau. Défaillance totalement inacceptable dont il avait fait son cheval de bataille. Passant de cénacles en réunion, il avait marché avec des foules paysanne et organisé des grèves et des meetings. On lui avait reproché de vouloir court-circuiter le fonctionnement normal, échelonné, des communes. Il avait répondu que c’était tout le contraire, et les évènements lui donnèrent raisons.

Ses positions en faveur d’une région majoritairement composée de syndicats agricoles lui valurent d’abord la sympathie des Phalanstères. On commença à parler de lui dans les chambres communales supérieures, et son combat fut de moins en moins perçue comme une mobilisation spontanée et populaire que comme l’action d’une personnalité particulièrement brillante. Bien entendu lui-même refusait cette analyse, réductrice et dangereusement centralisatrice. De toute façon tout ce qui comptait c’était de rendre audible ces régions silencieuses. Leur donne conscience de leur propre voix d’une part, et rappeler aux villes l’existence des campagnes. Quand on lui avait proposé d’être nommé au sein des chambres communales, il avait initialement refusé. Ce furent finalement les représentants des Amis de la Commune qui le convainquirent de tenter l’expérience. L’Avocat des Campagnes était une voix puissante en faveur d’un communalisme plus parfait. Il en fallait, des individus capables de regarder sans complaisance les relations entre les différentes communes, de mettre à jour les dysfonctionnements et problématiques qui pourraient à terme décrédibiliser la démocratie directe dans son application la plus pure. Il rejoint ainsi les chambres, et à force de discours et de travail acharné, devint une voix influente, écoutée et à l’héritage déjà important. Concernant les communes du sud-est, au moins, une partie du problème avait été réglé, il avait suffi de redynamiser les représentations locales et d’initier de nouvelles coopérations plus culturelles qu’économiques avec les communes supérieures avoisinantes.

Maintenant, la Convention générale s’agitait à la recherche des membres de son nouveau Comité de Volonté publique. La Convention était une chambre qui n’avait jamais réellement intéressé Caucase. Il en reconnaissait l’utilité et le travail, mais se sentait plus à l’aise au sein de l’Assemblée des communes. Ce haut lieu de démocratie, sensément non-partisan, qui servait tant à défendre les échelons communaux devant Axis Mundis qu’à faciliter le travail de la Confédération. Ce dernier point, cependant, l’avait fait remarqué par les membres de la Convention. Il avait travaillé avec des commissions, rencontrés d’innombrables députés. Il se disait qu’on chuchotait de plus en plus souvent son nom sur les bancs des modérés. Et lui? Il n’avait pas encore fait son choix. Après tout il était un homme modéré, rien ne le pressait vraiment à se lancer dans cette course.

Peut-être qu’on aurait besoin de lui. Peut-être qu’il accepterait.

Ce n’est pas comme si le travail manquait.
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ENTRACTE



Arrêtons-nous un instant sur la nature de ces élections et de leur fonctionnement.


Au sein du Grand Kah, les élections se veulent théoriquement non-partisanes. De fait, les candidats ne sont pas représentés par des partis politiques au sens traditionnel du terme. Les structures politiques organisées sont mal vues, les candidats grimpent généralement les échelons des différents conseils et parlements communaux par leurs efforts et leurs idées, dans une forme de démocratie se voulant aussi direct que possible. Les citoyens d’une commune nomment l’un des leur à la représentation supérieure, qui se compose en parlement nommant elle-même ses représentants en direction de l’échelon supérieur, ainsi de suite jusqu’à un échelon général.

Ce système, dit "Communal", assure la vie de la confédération et son fonctionnement démocratique quotidien. L’Union est cependant dotée d’une instance confédérale, nommée la Convention Générale, en charge des commissariats, commissions et autres organes assurant la régence Confédérale de l’ensemble des communes.

Les élections des représentants siégeant au sein de cette Confédération s’appuie sur le tissu démocratique des Communes.

Chaque citoyen peut se présenter aux élections parlementaires sur simple inscription et à condition de ne pas avoir subi de condamnation visant spécifiquement à le bannir de la "vie de la cité". La période de campagne, particulièrement longue, vise à la mise en place de nombreux débats entre les candidats au sein des communes. C’est une période d’intense vie démocratique durant laquelle les candidats peuvent prouver leur sérieux, exposer leurs idées, démontrer à leurs concitoyens qu’ils ont compris les ambitions de leur commune et sauront la représenter dignement. Cette période tend aussi à créer des coalitions, composées de candidats se désistant pour se rallier à la candidature d’un citoyen qu’ils jugent plus apte à porter leurs propres idées. La culture Kah-tanais étant (concernant la politique intérieure) très portée sur le consensus, c'est un cas de figure extrêmement fréquent. Les candidats tendent curieusement à sympathiser au fil des débats.

Au moment des votes, les citoyens ne peuvent voter que pour les candidats habitants leur commune supérieure, selon un système de panachage permettant de trier les représentants potentiels par ordre de préférence et de rejet. Un complexe calcul permet ensuite d'attribuer les sièges aux vainqueurs.

Les représentants élus au parlement ne sont, donc, par représentants d’un parti politique. Cependant la vie politique du Grand Kah est aussi incarnée par des "Clubs". Associations et groupes d’influence produisant de la théorie politique, organisant des débats, animant la vie publique. Traditionnellement on rattache les candidats à des Clubs selon leurs programmes (ou leurs votes), de façon à avoir une idée de la composition idéologique du parlement. Ces clubs sont rarement des mouvements de masse mais leur nature peut aller du simple think-tank à la confédération syndicale, voir à la milice internationale. Certains clubs sont comparables à des partis au sens classique du terme, d’autres non. En bref tout est politique, tout est affreusement complexe et les citoyens du Grand Kah baignent dans un univers constant de débats, de consensus et de petits tracts détaillant les idées des uns et des autres. Malgré leur vie assez simple et somme toute assez peu stressante, ou peut-être grâce à ça justement, la politique est pour eux quelque-chose d'extrêmement tangible.


Et donc, qu'est-ce qui est en jeu ?


Ces élections sont traditionnellement désynchronisées de façon à progressivement renouveler le parlement. La Convention générale n'est pas une chose figée. Elle doit être le cœur battant d'une démocratie directe. Il faut bien comprendre qu'on demande à ses députés de voter en fonction de leur position personnelle ou de celle de leurs communes d'origines. Les groupes politiques n'existent que de facto, du fait des positions idéologiques convergentes d'individus, et des orateurs et autres leaders naturels créant des formations ad hoc pour défendre telle loi ou lutter contre telle proposition. Méfiants de politiciens de métiers, les Kah-tanais voient en la politique l'affaire de tous et de chacun. Il est ainsi mal vu de se comporter en politicien, mais attendu des élus une forme d'émulation et de ferveur politique de tout instant. L'atmosphère culturelle aidant, la Convention fut durant une grande partie de son existence un grand théâtre politique d'une extrême probité et dont les bancs furent souvent occupés par des beaux esprits ou, à minima, des esprits formés à la chose politique réelle. Durant certaine période son influence fut largement inférieure à celle des communes, durant d'autres elle acquis une véritable place prépondérante dans la politique de l'Union, on appelle ces périodes des "ères de centralisation". De nombreuses prérogatives étant volontairement partagées avec les communes, la Convention doit de toute façon faire attention à ses décisions et négocier avec cette incarnation plus bouillonnante encore de la volonté populaire kah-tanaise. En 2007, c'est d'autant plus vrai que le Grand Kah est sur une pente ascendante, a quelques affaires à régler avec un monde capitaliste qui a tenté de lui imposer un régime fasciste il y a vingt ans, et s'est rouvert sur le monde avec les degrés de succès qu'on lui connait. C'est une période extrêmement faste pour les discours flamboyants et les personnalités remarquables.

Ainsi donc, la situation est la suivante : Le Comité de Volonté Publique a démissionné en arguant que sa mission initiale, la reconstruction du Grand Kah, était terminée, et que sa composition actuelle n'était donc plus optimale. Ses membres ont exigé aux Communes de trouver en leur sein des individus dotés d'idées politiques et militaires claires pour organiser la défense de la Révolution d'une part, et la future ligne de conduite de l'Union de l'autre.

À l'origine la composition d'un Comité de Volonté Publique est une affaire strictement parlementaire. La Convention doit donc se réunir pour nommer les membres du prochain Comité de Volonté Publique, ainsi que son "nom de règne" (celui du précédent était l'Estimable, par exemple). Cependant les Communes ont demandé (sur une proposition de l’Estimable, qui a manœuvré en ce sens) à ce que des élections anticipées aient lieu pour renouveler une partie sinon l’ensemble de la Convention Générale, jugent sa composition actuelle, élues en temps de paix, non-représentative considérant la dégradation rapide de la situation internationale.

Des débats ont lieu au sein de la Convention Générale pour déterminer si oui ou non il faut renouveler l’ensemble du parlement pour répondre à la crise. Le Comité de Volonté Public a cependant insisté pour que la décision finale revienne aux communes supérieures, par la forme d’un referendum, ce qui force en quelque sorte la main que membres de la Convention qui ne peuvent refuser un referendum sans prendre le risque de se faire forcer la main par les communes d’une part (qui ont le pouvoir d’appeler des referendums si elles se coalisent à suffisamment autour d’un même projet), de voir une partie de la population converger vers Axis Mundis pour envahir le parlement de l'autre, et, enfin, d’entériner sa nature non-représentative par cette action qui serait globalement considérée comme dangereusement "centralisatrice".


En bref, ce qui devait être à la base une affaire strictement parlementaire a été changé par un coup de main politique du comité Estimable en une affaire nationale. Il s'agit d'élections visant à recomposer une partie ou l'ensemble de la Convention, en prévision de la formation du Comité de Volonté Publique. Les résultats impacteront nécessairement le choix des individus nommés dans ce dernier. C'est la première fois que les votes des kah-tanais vont aussi directement impacter la composition du discret exécutif confédéral, ce qui fait de ces élections un évènement très particuliers, quasi-unique à vrai dire. Traditionnellement une telle situation ne se présente qu'en cas de révolution victorieuse, soit environs une fois tout les soixante ans, pour répondre à des tentatives étrangères de restaurer le pouvoir impérial au Grand Kah (tentatives qui, une fois mise en échec, remettent à zéro le calendrier électoral et font donc comme en cette occasion coïncider la recomposition du parlement et du Comité).


Bon, et à quoi s'attendre ?


Difficile à dire. Les politologues étrangers ont toujours eu du mal à analyser la situation politique de l'Union, et ceux du Grand Kah se complaisent ardemment dans cette effervescence si brillante qu’elle en aveugle à peu près tous les observateurs.

À première vue on s’attend cependant à la naissance expresse de nouveaux clubs, la démission de l’Estimable ayant en quelques-sorte ouvert les vannes de certains mécontentements politiques jusque-là maintenus silencieux par le prestige et les nombreux succès du gouvernement confédéral. La grande question est aussi de déterminer dans quelle grande direction se dirigera l’union, on peut donc s’attendre à ce qu’exceptionnellement ces élections se fassent moins sur des critères locaux et nationaux, mais plus sur des visions géopolitiques, macroéconomiques, diplomatiques globale, comme demandé par l’Estimable avant sa démission.

Ces élections seront aussi l’occasion pour des individus désireux de finir au sein du prochain Comité de Volonté Publique de se faire remarquer en vue des négociations qui suivront la fin des élections.
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Quels sont les Clubs Politiques kah-tanais ?



La politique Kah-tanaise ne s'inscrit pas dans le traditionnel cadre "droite gauche". Si la dichotomie droite gauche est globalement considérée comme émanant du premier parlement Kah-tanais, à la droite duquel étaient installés les centralisateurs, conservateurs, partisans de liens d'attaches avec la métropole coloniale, et à la gauche duquel s'entassaient l'ensemble des opposants au maintien de la colonisation, confédéralistes, indigénistes etc, ce clivage a depuis été abandonné au sein de l'Union, car jugé inadapté.

Les trois grands axes de la politique Kah-tanaise, sevrant à différencier les clubs, sont les suivants :

Isolationnisme – internationalisme : Les Clubs sont considérés isolationnistes sur la base de nombreux aspect. Une position favorable à l’autarcie économique, par exemple, ou une opposition à la notion de politique étrangère. Les tenants idéologiques de l’isolationnisme peuvent aussi bien s’expliquer par la nécessité de raffermir l’Union avant de la mettre en compétition avec un monde capitaliste hostile à la simple notion dite d’Égoïsme salutaire, partant du principe que le Grand Kah peut se suffire à lui-même et doit briller dans une splendide isolation. À l'inverse, les clubs internationalistes peuvent aussi bien être partisans d'une diplomatie ouverte, consensuelle, favorable au commerce, qu’à de la propagation par la lutte de la Révolution. Cet indicateur, seul, n’est pas éclairant. Comme les deux suivants.

Réformiste – Radicalisme : Les clubs réformistes tendent à favoriser le consensus, l'amélioration graduelle des conditions de vie, la transition générationnelle d'un système imparfait vers des étapes approchant de l'idéal communaliste libertaire. Ils considèrent que la lutte doit se faire pas à pas, à des échelles humaines, via une modification de la culture, une amélioration constante du corpus idéologique, des tests prudents des théoriques sociaux-économiques du Kah ou, tout simplement, que l’avènement de la société libertaire parfaite peut se faire sans bain de sang. Les clubs radicaux, au contraire, sont favorables à l'action directe, aux changements brusques, à la guerre comme moyen d’action, à la confrontation. Cette distinction peut s'exprimer dans de nombreux domaines, nationaux comme internationaux.

Centralisme - Communalisme : Le centralisme peut sembler paradoxal dans une société se voulant fondamentalement libertaire et anti-étatique. À un point tel que "Centralisateur" est l'une des insultes politiques les plus répandues au sein de l'Union. Cela n'empêche pas de nombreux clubs de défendre des idées centralisatrices ; visant à donner plus de pouvoirs à la Convention Générale, à faire en sorte que la Confédération puisse agir dans plus de domaine voir, dans certains cas rares, que la Confédération devienne une fédération en bonne et due forme. Les arguments justifiant ces positions sont nombreux : nécessité d'une direction centralisée pour la défense de l'Union ou la mise en place des réformes nécessaires à l'avènement de la vraie société sans état, théorie marxiste, doutes quant à la possibilité réelle de réaliser une société communaliste pure dans un monde encore trop capitaliste etc. Les centralisateurs nient rarement que l’objectif final de l’Union est d’obtenir une vraie société sans État. Ils doutent cependant de la capacité de l’Union à faire cette transition dans un contexte géopolitique considéré comme hostile. Les communalistes, eux, ne s’embarrassent pas de ces doutes ou de cette prudence. Ils défendent la notion d'une confédération de communes librement associées, désireux de limiter la fonction confédérale à son strict minimum et pressés d'en finir avec l’État. Ils favorisent les pouvoirs des communes, les directions partagées, les formations ministérielles ad hoc etc.


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Ne sont représentés que les clubs dont les idées sont défendues à la Convention Générale en 2007.
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Que défendent les Clubs Politiques kah-tanais ?



Comme indiqué précédemment les élus se réclament très rarement d'un club donné, on leur attribue une appartenance selon leurs position et leurs affinités, mais il ne s'agit pas d'une composition officielle du parlement, simplement d'un outil utilisé par les journalistes et les politologues pour interpréter la composition de la Convention Générale.

Seront indiqués ici la nature des différents clubs politiques kah-tanais et le nombre de sièges de l'Assemblée occupés par des sympathisants en tout et en pourcentage.


Confédération & Collaboration (22) 3,6% a écrit :Confédération & Collaboration et l'un des principaux mouvements modérés du Grand Kah. Favorable à une politique déléguant autant de pouvoir que possible aux communes plutôt qu'à la Convention, c'est un mouvement politique atypique au sein du Grand Kah en ça qu'il défend des positions assez agrariennes. Sur le plan international, Confédération & Collaboration défend une ligne pacifique et diplomatique, considérant que le Grand Kah ne doit pas se doter d’une armée mais préserver le système de milice communale, et utiliser la diplomatie et les moyens pacifiques de lutte politique contre l’impérialisme, les oppressions systémiques et le grand capital. Grèves, manifestations, influence culturelle, pressions diplomatiques internationales, création d’accords, de conventions, financement de partis favorables au communalisme etc. Ils sont souvent critiqués pour leurs positions, considérées vieillottes et idéalistes, mais conservent une forme de noblesse et de bienveilance en faisant d’excellents avocats du Communaliste.
Club de l'Impossible (34) 5,6% a écrit :Le Club de l'Impossible a été fondé en 1798, deux ans avant le coup d’État ayant amené à la création du premier Empire Kah-tanais, sur le postulat du penseur Makhesir Xotl-Annel, selon lequel : "Le vrai communalisme est impossible à atteindre, ce doit donc être le phare de notre amélioration permanente". Propos repris sous divers formes dans diverses idéologies découlant des premiers communalistes utopiques. Le Club de l'Impossible considère que la société sans État, sans classe, sans discrimination et d'égalité réelle est irréalisable, mais qu'il est possible de continuellement s'en approcher. Défendant une politique "pragmatique", c'est un mouvement fermement internationaliste qui rejette toute notion d’exceptionnalisme Kah-tanais et défend comme à ses débuts une solidarité internationale des oppressés et des émancipés. Ils considèrent l'action armée comme une continuation malheureuse de la politique, l'alliance avec les démocraties "imparfaites" comme viables et l'opposition aux autocraties comme nécessaires. Sur le plan intérieur ils ont aussi des positions très pratiques, quoi que nettement en faveur d'une décentralisation économique et d'une planification entièrement participative. Ils sont, concrètement, pour tout ce qui assure la survie de l'Union et son évolution vers un communalisme pur et parfait.
Club de l'Accélération (67) 11,2% a écrit :Le Club de l'Accélération doit probablement sa popularité actuelle à la situation géopolitique défavorable et à l'extrême violence avec laquelle les États capitalistes luttent contre l'idéal communaliste. Le Club de l'Accélération a été fondé par des mouvements futuristes au tournant des années 20, a et existé sous divers formes depuis. Son idéologie, l'Accélérationnisme communaliste, est un véritable culte de la vitesse, de la technologie et de la violence. Considérant que l'évolution des moyens techniques doit s'accompagner d'une évolution de l'éthique, le club rejette la morale, considère la violence et la destruction comme des réponses appropriées aux oppressions, et défend un romantisme révolutionnaire excessif tirant ses racines dans la culture paltoterranes pré-coloniale. Opposé aux frontières, au capital, au racisme, à tout ce qui passe pour des "vieilleries", c'est un mouvement extrêmement militariste et persuadé que l'existence du Grand Kah en tant qu'idée dépend de sa capacité à rester un épicentre révolutionnaire actif. Ils sont dans une continuelle course en avant. Handicapés par leur absence volontaire d'organisation et leur hyper-fixation sur les aspects artistiques et culturels de la révolution, ils passent aux yeux des autres clubs radicaux mais moins excessifs pour des excentriques bruyants. Le citoyen Aquilon Mayhuasca, architecte du réarmement de l'Union, a souvent été soupçonné de sympathie accélérationiste.
Club de l'Ouverture (36) 6% a écrit :Fondé durant les années 90 après la dernière révolution ayant amenée à la chute de la Junte militaire impériale, le Club de l'Ouverture défendait originellement l'ouverture aussi rapide que possible du Grand Kah sur le monde. Favorables à des stratégies d'entrisme, ses membres considèrent le communalisme comme une lutte mondiale et le Grand Kah comme un territoire ne pouvant exister en autarcie. Ils sont principalement intéressés par les questions économiques, réfléchissant à des moyens éthiques de prendre part au système capitalisme et d'en exploiter les faiblesses. Ils sont aussi favorables à une tolérance des autres types de régime en vue de créer des accords, des alliances régionales et des traités favorisant d'une part la survie du Grand Kah, de l'autre le respect relatif de la lutte sociale. Loin d'être anti-militariste, le Club de l'Ouverture est largement traumatisé par la dernière parenthèse fasciste qu'a subi le Grand Kah, et est favorable à une politique de défense et d'action commando sur des cibles isolées, ainsi qu'au soutien "ordonné" de toute tentative révolutionnaire crédible. Ils passent pour des modérés. Sur le plan politique, le Club de l'Ouverture est favorable a une relative libéralisation de l'économie en donnant plus de latitude aux citoyens Kah-tanais dans le contrôle de l'économie, plutôt qu'à la communauté. Ils sont aussi favorables à la centralisation de la diplomatie communale au sein de la Convention Générale.
Amicale Sociale-Démocratique (39) 6,5% a écrit :Les Sociaux-Démocrates Kah-tanais ne sont pas exactement les libéraux-lite que l'on trouve dans les démocraties représentatives classiques, en ça qu'ils n'ont pas oubliés que le but du socialisme, même démocratique, doit être d'arriver à la société sans État et sans propriété. Fondé durant les années 1850, il s'agit probablement du plus vieux club ouvertement socialiste du Grand Kah. Favorable à une organisation centralisée de l'économie et de la Confédération, ses membres appliquent la théorie socialiste classique considérant que le communisme (ou le communalisme, dans ce cas) doit s'atteindre via des étapes. Considérant la révolution comme dangereuse (du fait de la résilience des pays capitalistes) et la guerre comme particulièrement répugnante, les sociaux-démocrates ont des positions éthiques fortes sur le respect de la vie et de la souveraineté des peuples. Ils croient aussi en l'amélioration progressive des conditions de vie, considérant le système communal confédéral comme trop sujet au chaos et au désordre. Pour eux les réformes doivent être centralisées et gérées par une assemblée unique. En bref ils sont pour l'augmentation des prérogatives de la Convention Générale, et pour l'augmentation des pouvoirs qui accompagnent son droit de regard sur les affaires communales. Les positions extrêmement centralisatrices du club le place, paradoxalement, dans la droite lignée des conservateurs kah-tanais. D'autant plus que leurs positions socialistes, et donc en faveur d'un certain athéisme, s'opposent nécessairement à la grande part de mysticisme animant le Kah en tant qu'idéologie et nombre d'habitants kah-tanais.
Syndicat des Brigades (36) 6% a écrit :Le Syndicat des Brigades a été fondé par la citoyenne Dolores Xi-Chiang après la dernière révolution, en réponse à un constat simple : l'armée avait été dissoute et l'organisation de la défense territoriale, laissée aux seules communes, laissait à désirer sur à peu près tous les points. Révolutionnaire fermement internationaliste, la citoyenne considérait que la mission du Grand Kah restait avant tout une mission militaire, et que l'amélioration des conditions de vie au sein de l'Union seule était parfaitement inutile - pire - contre-révolutionnaire dans un contexte largement capitaliste. Opposée avant tout aux systèmes capitalistes et monarchistes, elle créa un syndicat visant à faire coopérer les brigades, traditionnels groupes de volontaires humanitaires et militaires partant du Grand Kah pour agir à l'extérieur, et leur insuffler l'organisation qui leur manquait. En quelques années les Brigades devinrent un véritable État dans l’État, sur lequel fut largement basé le réarmement de l'Union. Communaliste jusqu'au bout des ongles, Xi-Chiang ne croit cependant pas aux réformes. Elle considère que le Grand Kah doit devenir l'Armée de la Révolution. Le Syndicat qu'elle a fondé défend cette ligne : le Grand Kah doit, selon ses membres, s'armer et lutter pied à pied contre l'oppression, essaimer les révolutions et faire changer l'ordre mondial avant de migrer vers un système communaliste pur et parfait, considéré idéal mais fragile. Dans ce contexte le Syndicat n'est pas opposé à une "centralisation tactique et temporaire" et la confédération.
Les Amies de la Commune (42) 7% a écrit :Les Amies de la Commune était initialement un mouvement strictement féministe, défandant la lutte contre le sexisme au sein de l'Union et l'implémentation de quotas de représentation, entre-autre-chose. C'était durant les années 1950 et le club a largement évolué depuis. Défendant une ligne "compatissante et humaine", les Amies de la Commune est devenu l'un des principaux avocats de l'internationalisme "doux", considérant que la mission émancipatrice du Grand Kah n'avait pas à être nécessairement internationale, ou même armée, mais actant la nécessité de collaborer avec les peuples ayant fait leur propre révolution pour constituer une grande amicale des nations. Toujours très féminisées, le club s'est aussi saisi de questions de politique intérieure et économique, très favorable à la haute technologie, à l'amélioration des infrastructures au sein de l'Union et à une politique relativement pacifique faisant la part belle aux communes plutôt qu'à la Convention, considérée comme une simple chambre d'écho des volontés communales.
Les Phalanstères (48) 8% a écrit :Les Phalanstères sont à l'origine un simple collectif de... Phalanstères. Tentative par des colons Eurysiens, au dix-neuvième siècle, d'implanter au sein du Grand Kah, les théories utopistes et socialistes de certains penseurs du vieux monde. Créant des communautés très soudées d'artistes, d'artisans et - principalement aussi - de paysans. Les Phalanstères sont restés sur une vision extrêmement utopistes du socialisme. Rejetant à la foi le matérialisme marxiste et le mysticisme communaliste, les Phalanstères considèrent les phalanges, ces communautés de moyens, comme la forme la plus aboutis de communalisme. Négligeant les questions militaires et diplomatiques, le club continue de défendre ces méthodes alternatives d'organisation sociale et, de façon notable, l'implantation de phalanstères dans des pays capitalistes, l'organisation sociale égalitaire de ces structures attirant une certaine population devenant dès-lors autant de potentiels communalistes.
Club du Temple (42) 7% a écrit :Le Club du Temple est l'un des premiers clubs politique Kah-tanais. Fondé durant la première révolution, il défend depuis un idéal communaliste resté pur de la plupart des influences marxistes et matérialistes. Extrêmement respectueux des particularités locales, des religions indigènes, des notions culturelles, le Club du Temple défend l'importance de la Convention Générale dans le fonctionnement de l'Union, considèrent le parlement comme le cœur du Grand Kah, sans lequel les communes finiraient par se dissoudre. Très attaché à la démocratie et aux consensus, le Club du Temple est une organisation qui rejette la violence sous toutes ses formes et croit en un certain exceptionnalisme Kah-tanais, une mission émancipatrice et culturelle mondiale, qu'on pourrait comparer à du nationalisme. Considérant avec méfiance mais pas de réelle animosité les démocraties représentatives, le Club du Temple ne considère pas le capitalisme comme intrinsèquement problématique, et n'a aucune animosité particulière pour la bourgeoisie. Il est resté sur des notions assez anciennes de lutte contre l'oligarque, l'oppresseur, le rendant étonnamment fréquentable à l'échelle internationale, et considère que le système Kah-tanais n'a pas nécessairement besoin d'atteindre le Communalisme Pur et Parfait. Le mouvement ne se définit de toute façon pas comme révolutionnaire.
Technocratie © (41) 6,8% a écrit :Majoritaire dans l'Union durant les années 70 et 80, mais purgé lors de la dernière junte, le mouvement technocratique a largement évolué depuis ses positions initiales, profitant notamment de l’essor d'internet. Partisan d'une révolution technique passant par le hacking, les logiciels libres, la piraterie, et d'une planification informatisée de la société, les Technocrates sont favorables à la modernisation de l'Union dans tous les domaines, techniques comme idéologiques. C'est un mouvement d'enthousiastes, de transhumanistes, de hackers en tout genre, caractérisé par une foi sincère dans l'innovation technologique et sa mise au service de la société. Sur le plan politique ils sont favorables à la modernisation de la (maigre) bureaucratie communale, de la dématérialisation de la démocratie, de la lutte politique et idéologique en ligne et d'une ligne globalement pacifiste et non-interventionniste se concentrant principalement sur des notions techniques.
Club de l'Avant-Garde (61) 10,2% a écrit :Le Club de l'Avant-Garde croit en la professionnalisation de la révolution. Influencé par les mouvements politiques du début du siècle précédent, le Club croit en l'importance d'éduquer les élus aux questions idéologiques et de fonder un chœur solide de représentants capables de défendre une même ligne avec des arguments similaires, qui que dépendant de leur expérience personnelle. Relativement conservateurs dans leur vision du communalisme et de la forme que doit prendre l'Union, ils s'intéressent principalement aux questions de politiques intérieures et de formation des élus, mais sont aussi notables pour être extrêmement soucieux des questions de défense territoriale et partisans d'une ligne dure et ouvertement révolutionnaire à l'internationale. Ils considèrent aussi que l'Union n'est pas encore prête pour le communalisme pur et parfait, qu'ils considèrent globalement comme une abstraction difficile à atteindre, lui préférant une centralisation modérée, notamment sur les questions de l'éducation, de la défense territoriale et de la diplomatie.
Groupe sur le Fédéralisme (8) 1,3% a écrit :Relativement impopulaire, le Groupe sur le Fédéralisme a une revendication clé : la reconnaissance constitutionnelle du fait que l'Union ne serait pas une confédération mais bien une fédération. Partisans d'une gestion centralisée (à l'échelle kah-tanaise) des affaires communales, ils sont fortement soupçonnés de sympathie pour les démocraties représentatives - ce dont ils ne se cachent de toute façon pas vraiment - et représentent dans l'ensemble un courant de pensée assez minoritaire, considérant que l'Union doit consolider son fonctionnement intérieur avant d'entretenir la moindre ambition internationale, ils ont de nettes sympathies marxistes.
Club des Splendides (52) 8,6% a écrit :Le Club des Splendides ne croit tout simplement plus en l’internationalisation de la lutte. Excentrique et nationaliste, ses membres défendent une espèce d'ironie esthétique inspirée par le mythe de l'exceptionnalisme kah-tanais. Désireux d'uniquement concentrer les efforts et les ressources du Grand Kah sur son développement intérieur et la mise en place de son système révolutionnaire, les splendides sont cependant fermement révolutionnaires, considérant que la Révolution est l'esthétique ultime, et qu'elle se fait - généralement - par les armes; Les partisans du club s'habillent généralement dans des costumes baroques, et s'intéressent énormément à la mode et aux questions artistiques, à un point tel que leurs détracteurs les considèrent souvent comme des genres de clowns ou d’excentriques ne comprenant pas le sens de la révolution. En dehors de leur défense d'une "Splendide Isolation", les splendides sont d'authentiques anarchistes libertaires, frisant avec l'individualisme et réfutant toute notion morale.
Les Horlogers (21) 3,5% a écrit :Les Horlogers sont des réformistes pur jus. Satisfait de l’état actuel du communalisme au sein de l'Union, ils défendent le rôle de la Convention Générale et considèrent que le principal but de cette dernière doit être d'analyser le fonctionnement de l'Union pour l'améliorer çà et là, systématiquement, avec soin et parcimonie; Ils ignorent volontairement les questions de politique internationale, d'économie, de défense territoriale, considérant qu'elles ne devraient pas dépendre de la Convention Générale mais de l'Assemblée des Communes, position qui les empêche d’être considérés comme strictement centralisateurs, malgré les grands pouvoirs de gestion et le droit de regard systématique qu’ils souhaitent donner à la Convention et à ses comités.
La Conserve (31) 5,1% a écrit :La Conserve est un collectif de conservateurs Kah-tanais. Soucieux de préserver le Grand Kah - ce qui se traduit par un certain isolationnisme - ils défendent l'idée de la destinée manifeste de l'Union et les aspects les plus mystiques de son idéologie sans pour autant vouloir en faire quoi que ce soit, politiquement. Leur principale inquiétude politique est de brider les mouvements les plus radicaux et d'assurer que les réformes passées ne déséquilibrent pas les pouvoirs entre les communes, ou la société kah-tanaises. Accusés d'être trop timorés sur les questions sociales, ils considèrent pour leur part représenter une forme de parcimonie salutaire, certains allant même jusqu'à dire que la révolution ne peut et ne doit pas être permanente.
Club Un Un Un (14) 2,3% a écrit :Le Club Un Un Un défend la théorie bizarre selon laquelle le vrai communalisme doit être intériorisé, et l'égalité s'incarner dans la pensée même des individus. Désireux de mener une expérience sociale à l'échelle confédérale, ils souhaitent en somme détruire les notions d'individualité, de famille, de croyance religieuse ou personnel, d'éthique, de morale personnelle, et voir à quel point chaque élément du "vieux monde" et de l'individu "en ayant émergé" peut être ou non remplacé par une pensée collective commune à chacun. Ils sont ultra-centralisateurs et leur popularité relative représente un mystère assez inexplicable.
Un Esprit (8) 1,3% a écrit :Un Esprit est à la base la création de l'auteur et économiste kah-tanais Suguro Kharitonov Munemori. Actif dans les années 20 et proches des mouvements futuristes, Munemori travaillait sur le travail à la chaine et l'ergonomie, étendant son étude à tous les champs de la politique il en arriva à créer une théorie considérant la société comme un tout organisé pouvant être amélioré de l'intérieur de la même façon que l'évolution naturelle des êtres affine leur fonctionnement. Soucieux d'obtenir une perfection en toute chose et de rationaliser l'ensemble de la société, il fonda Un Esprit, mouvement étrange polémique considérant que la fin de l’État doit s'obtenir en faisant de chaque membre de la société une cellule d'un grand corps animé, d'où le nom, par un seul esprit. Parfaitement rationnel.
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Actualité de campagne électorale

La date du premier tour de l’élection générale approche à grands pas, et les débats sont de plus en plus endiablés au sein des communes électorales, bien aidés par une actualité extérieure toujours plus chaude, un climat intérieur toujours plus compliqué et le caractère bien trempé des différents candidats.

Non-partisanes, ces élections sont comparables à ce que les anglo-saxons aleuciens qualifient parfois de nonpartisan blanket primary, au sein desquelles tous les candidats font campagne les uns contre les autres sans être rattachés à autre-chose qu’à l’éventuelle formation partisane créée ad hoc pour soutenir leur campagne. À ce stade il est encore impossible pour les politologues de tout ordre de donner un aperçu clair des tendances, il est en effet inenvisageable de sonder l’ensemble des communes électorales sur leurs votes potentiels tout en analysant les positions de l’ensemble des candidats non-partisans pour les rattacher à une tendance politique. À défaut de pouvoir offrir des estimations de la composition idéologique de la législature 2007 – 2012, il est au moins possible de s’arrêter sur l’actualité récente :

Antigone Ornan-Munch est de retour au Grand Kah ! Fille d'un ancien caporal royaliste et d'une mère fonctionnaire sous l'administration de la junte, elle est l’une des rares représentantes du nationalisme pur jus au sein du Grand Kah. Carrément qualifiée de fasciste par ses nombreux opposants, elle est surtout connue à l’étranger pour les impressionnants récits journalistiques qu’elle fit de la guerre civile damann du point de vue des forces monarchistes et les textes théoriques qu'elle aurait écrite en ligne, aidant notamment l'ultra-droite eurysienne à se recomposer. Exilée volontaire après l’interdiction du Club du Renouveau Social, mouvement politique dont les membres étaient un peu trop amateurs d’antisémitisme et d’ultra-violence aux yeux de l’Egide, elle est de retour à l’occasion des élections générales, ayant pour se faire réactivée le mouvement "féministe alternatif" de l’Iris d’Argent, autre de ses créations s’étant entre-autre illustrée en organisant des happenings tel que l’enterrement parodique d’une importante déléguée féministe de l’Union.

Profitant de la récente défaite militaire de l’Union, Antigone Ornan-Munch a tenue une réunion rassemblant un peu moins de deux cents personnes au cercle syndical de Nayoga Lamanai. Intitulé du rassemblement :  « Création d’un Groupement Interventionniste Kah-tanais ». L’ensemble serait sans doute resté un non-évènement sans l’intervention de la Section Défense de Nayoga Lamanai, mouvement de jeunes gens organisés en groupes miliciens violents, liés à la citoyenne Maiko, candidate dans une commune de la ville. L’action violente dirigée contre Ornan-Munch fut globalement saluée par les clubs radicaux et ignorés par l’ensemble des autres, à l’exception de saillies ironiques dans certains médias et de la demande explicite des sections locales de l’Égide que les violences ne viennent pas gêner la tenue future du scrutin.

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Ce qui catapulta réellement l'évènement sur le devant de la scène nationale fut en fait le bref commentaire lâché à ce sujet par Andrean Gabriel d’Alcyon. Le célébrissime aventurier et auteur, dont on ne sait toujours pas s'il compte être candidat, entretenant volontairement le mystère, ayant directement cité la citoyenne Maiko et son "groupe de jeunes enragés de la vie", comme des exemples "frappant" d'actions directes politiques, donnant par la même beaucoup plus d’importance à ce qui aurait été au final une simple rixe politique en y apportant le crédit d’une personnalité aussi respectée qu’influente auprès de plusieurs clubs politiques radicaux.

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La citoyenne Meredith, interrogée sur tout éventuel lien entre la Section Défense de Nayoga Lamanai et celle de Kotios, dont elle était la porte parole avant son retour à Lac-Rouge, a démentie tout lien et a fermement condamnée les violences d'une part, et les discours populistes de la "fasciste Ornan-Munch", se permettant de rappeler le sort réservé à ceux de la commune Eurysienne mais insistant sur le fait que c'était à la Magistrature et éventuellement l’Égide de s'occuper d'eux.




« Elle n'a pas le droit de faire ça, il faut l'abbattre ou quelque-chose ! »- Citoyen Roka, Club de l'Impossible, sur le retour d'Antigone Ornan-Munch
« Un spectre hante le Grand-Kah : le spectre du communisme. »- Citoyenne Xi-Chiang, Syndicat des Brigades
« Appelez un exorciste ! »- Citoyen Castillero, Technocratie ©
« Les fascistes se battent entre-eux dans nos rues. S'ils commencent à nous voler notre travail, ça va pas être vivable.- Citoyen Vosloo, Club de l'Accélération

« Pour commencer nous ne sommes pas fascistes. C'est ce culte de la pensée unique défendu par le système des clubs qui devrait être qualifié de fasciste. Parce que notre féministe se dit alternatif on nous agresse en pleine rue. Parce que nous sommes pour un Grand Kah fier de et debout, on nous... Hey, revenez ! »- Antigone Ornan-Munch

« Oui, nous les avons massacrés. Oui, nous recommencerons. »- Citoyen Rogers, Section Défense de Nayoga Lamanai

« Qu'est-ce que les communistes eurysiens ont à voir là-dedans ? On va pas s'arrêter sur tout les accidents de parcours, si ? »- Citoyenne Akimi, Confédération & Collaboration
« L'écologie sans anti-fascisme c'est du jardinage. »- Citoyen Tsuneari, Les Amies de la Commune

« La différence entre le Club de l'Accélération et un ouragan, c'est que l'ouragan, lui, ne fait pas exprès. »- Citoyenne Soyer, Club de l'Ouverture
« Alguarena ? Vaste projet. »- Citoyen Xaolt, Club des Splendides
« Demandez à nos amis Pharois si on leur marche sur les pieds. Je vous le dis, ce qu'il nous faut c'est des sous-marins ! De toute façon c'est pas comme s'il nous restait des avions. »- Citoyenne Vosloo, Club de l'Accélération
« A un moment donné il va falloir arrêter les révolutions, sinon on va se retrouver là où on a commencé et on aura l'air bien fin. »- Citoyen Sawa, Groupe sur le Fédéralisme
« Je ne dis pas que les représentants proches des autres clubs sont dangereux pour l'Union. Je dis qu'ils sont inconséquents, nuls sur tous les dossiers et que j'en ai vu se moucher dans les rideaux de l’hémicycle. »- Citoyen Totlet, La Conserve
« Être député c'est dur, vous savez. Heureusement il y a le citoyen Totlet. Quoi qu'on dise on fait toujours moins bêtes que lui. »- Citoyenne Melluza, Club du Temple
« Je peux pas saquer Actée, à faire tout ces ronds de jambe pour mieux leur chier dessus. »- Citoyen Meiji, Club de l'Avant-Garde

« Toute résistance est futile. »- Citoyenne 04-1, Club Un Un Un
« Attendez, je n'ai rien contre les religions, moi. Et ce n'est pas ma faute si les gens continuent de croire à ces trucs d'ignares. »- Citoyen Hébras, Club de l'Impossible
« Quand j'entends capitalisme, c'est instinctif, je sors le fusil. »- Citoyen Kairi, Club de l'Accélération
« Vous liez les journaux étrangers ? Moi oui. Qu'ils aient un avis sur nos élections, c'est d'une insolence... »- Citoyen Quint, Club du Temple
« Ben non, notre programme est très simple, ce n'est pas ma faute si vous manquez d'éducation. »- Citoyenne Huang-Koh, Un Esprit
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Arrestation de la Citoyenne Ornan-Munch.

La citoyenne Antigone Ornan-Munch, exilée notoire et proche des mouvements réactionnaires monarchistes, a été arrêtée ce matin par la protection civile de la commune du Quartier de l’Aube, à Nayoga Lamanai. L’opération a eu lieu après une consultation des citoyens de la commune, ayant décidé par consensus de l’expulser du quartier sur soupçon de fascisme. La citoyenne a dénoncé son expulsion comme une attaque directe visant à l’empêcher de faire de la politique au sein du Grand Kah, qualifiant le bulletin officiel de la commune la qualifiant « D’entre-autre globalement désagréable » comme ridicule, et en a appelée à l’échelon supérieur de la Magistrature dans le but de casser la décision communale. Les prêtres-juges de la ville ont annoncés qu’ils mèneraient une enquête de principe tout en insistant sur le fait que c’était à la commune seule de décider comment attribuer ses biens, lieux de vie compris, et que la magistrature ne pourrait pas nécessairement statuer sur quoi que ce soit d’autre que l’éventuelle absence de preuves concernant les allégations publiées par la commune.

De nouvelles lettres.


Citoyenne Notario.

J’ai bien reçu votre menace. Je comprends ce que signifie mon arrestation et vous assure que je n’ai pas cherché à déstabiliser l’Union ou à lutter contre vous en ranimant le mouvement politique de mes jeunes années. Je sais que cela peut sembler difficile à croire, mais ce que je fais ici je le fais non-pas de mon propre chef, mais pour remplir ma mission auprès du Cabinet noir. Je sais ce que signifie être une tulpa. Je sais que vous attendez de moi que je reste près des mouvements fascistes, réactionnaires, divers, sur lesquels je vous informais.

J’ai été trop efficace : ceux-là me perçoivent désormais comme leur meilleur élément. Je ne suis pas revenue ici, ils m’ont envoyé. Il en va d’eux comme de vous : il n’est pas possible de refuser les missions qu’ils vous donnent.

Vous m’excuserez donc de ma présence. Je sais aussi que vous serez tenté de me faire expulser du territoire pour vous assurer que je puisse retourner à mon assignation Eurysienne, mais je vous assure que ce serait contre-productif. Ils verraient en cet échec la preuve de mon incompétence, et vous perdrez ainsi des années de travail pour gagner leur confiance.

L’Iris d’Argent restera un mouvement ultra-minoritaire, diabolisé et dont les membres finiront malmenés sur les pavés des communes où ils s’installeront. Il n’y a rien de plus à dire : laissez donc le mouvement vivre, donnez à ceux qui m’ont dépêché ici l’illusion d’une victoire. Je pourrais même vous êtres utile. Vous serez par exemple intéressée d’apprendre que j’ai été approchée par la dirigeante de cette fameuse Section de Défense qui s’oppose si brutalement à nous…

Antigone Ornan-Munch,



Antigone,

Ma douce petite fasciste. Mon ultra de pacotille, incompétente, coincée dans une carrière de scribouilleuse. Dernière penseuse d’une idéologie médiocre qui n’existe encore que parce que telle les rats et les cafards, elle compose un genre vivant irréductiblement attaché à la vie. De cette crasse dont on ne peut exterminer que 99 % des membres, mais dont la survie justifie au moins le prochain nettoyage. Tu as bien conscience que toute ta lutte n’est, au final, qu’un outil qui justifie de maintenir et continuer la révolution, pas vrai ?

Tu penses peut-être avoir de quoi me faire tomber, mais personnellement je peux te renvoyer à la poussière. Donc sois bien attentive : ton Club n’a pas intérêt à se développer. S’il essaie d’entrer dans la légalité conventionnelle, je te liquide. Concernant le rapprochement avec la Section Défense, je ne m’occupe pas des affaires intérieures, et ne souhaite pas te prêter à l’Égide. Fais ce que tu veux.

J’entends aussi tes recommandations. Ne pas te dégager du sol de l’Union, te laisser le polluer encore un peu avant de te renvoyer en mission Eurysienne. Soit. De toute façon les blancs ne présentent pas de danger, j’ai peur que nos propres extrémistes soient plus problématiques. Je suis moi-même une radicale, alors j’ai mon mot à dire que la position des autres mouvements du genre. Cette Maiko, qui t’approche, je veux que tu deviennes sa familière et que tu me rapportes ses faits et gestes. Elle est immensément populaire, pour une arriviste. Elle va bientôt se prendre pour César. Et avec Meredith qui est à ça de se faire élire à Axis Mundis – c’est très clair, il y a trop de potentiels tyrans dans la convention à venir. Tu t’accroches à elle, mon petit, et tu ne la lâches pas.

(A propos tu serais disponible mercredi vers 20H ? Notre lieu habituel. Si tu veux je peux ramener des mignons pour rendre ça plus sympa.)

Styx Notario



Citoyenne Notario,

Reçu et compris. Je vais accepter de la rencontrer pour voir ce qu’elle veut. Je crois qu’elle me ressemble un peu, ça devrait être intéressant. Sa section défense ressemble énormément aux sections squadristes des premiers fascistes. On est loin du monarchisme poussiéreux kah-tanais, je parle du mouvement politique et futuriste que je défends dans les lignes du Condotierre et des publications Eurysiennes. C’est dangereux, car ces squadristes comptaient leur lot d’anarchistes, syndicalistes, anciens socialistes. En bref, je crois que c’est une mutation locale de cette variation d’ultra-nationalisme. Sa personnalité attire du monde, je pense aussi qu’elle peut s’improviser César. Ou peut-être, plutôt, Duce. Le lointain cousin dégénéré.

Je suppose que le temps nous permettra d’en juger ; Ou, dans votre cas, mes premiers rapports. Vous voyez que je suis plus utile ici que là-bas. Si le fascisme réapparaît au Grand Kah, il le fera sous les traits de la jeunesse, j’insiste pour dire que nous n’avons rien à craindre de la famille royale en elle-même.

(Je suis disponible, oui. Je pense que j’en ai besoin. Pas de mignons, rien que toi et moi. Le tabassage de l’avant-veille m’a un peu fatigué, j’aimerai un truc simple, si ça te va.)

Antigone Ornan-Munch,


À la citoyenne Meredith.

Chevalière-capitaine. Très heureux de recevoir de vos nouvelles. Vous semblez plus légère qu’à votre arrivée : je devine que le Grand Kah devait vous manquer. On ne peut pas échapper au mal du pays. Vous écris principalement parce que j’ai entendu parler de votre victoire. Vos concurrents se sont ralliés à votre candidature en vertu de votre personnalité. Sait que ça vous agace. Si ça peut vous rassurer je crois avant tout en votre plateforme, même si vous êtes aussi quelqu’un de bien et d’utile à la Révolution. Aie reçu votre copie du programme que vous entendez présenter aux élus modérés. À cette heure, vous avez sans doute entendu parler de leur propre programme. Pas irréconciliable avec votre proposition. Aie déjà dit que le kaki souillerait les sièges de l’assemblée aussi ne donnerais-je pas de conseil, la politique c’est l’affaire des élus de la Convention. Donc, c’est votre affaire. Si besoin peut tout de même vous mettre en relation avec le chef des modérés. Miloradovitch, ou Caucase comme ils disent, est une connaissance.

Amicalement,
Votre vieux camarade Atl.



Au citoyen-général Atl Mikami.

Mon vieil ami. Je me porte mieux, effectivement. Mais ce n’est pas lié à mon retour au Grand Kah. En tout cas je ne le pense pas. Il y a de multiples raisons qui sont pour la plupart de natures assez générales : les élections se passent relativement bien, les nouvelles de Kotios restent bonnes – en fait je crois que la commune est devenue ma terre de coeur, bien que l’Union reste celle où réside mon devoir. Tout de même, ma satisfaction se retrouve quelque-peu salie par certains évènements d’autant plus inquiétants qu’ils sont en lien direct avec ce que je vous écrivais au profit de mon retour au Grand Kah.

Vous n’êtes pas reclus, donc vous savez pour Ornan-Munch. Je ne parle pas de son arrestation – prévisible bien que dommageable. Pour être une imbécile, la petite n’est pas une criminelle. Même du temps où elle faisait de la politique elle restait sur la corde raide. Et pour une fasciste je n’ai pas encore lu un seul de ses écrits appelant au racisme ou à toute autre saloperie d’usage. La petite à la tête suffisamment bien faite pour rester irréprochable. Appelez-moi une modérée, mais si je ne me suis pas opposée aux purges révolutionnaires de Kotios, j’ai toujours pensé que celles-là devaient se limiter à cibler des fascistes d’actions, pas de mot. Ornan-Munch est la scribe, la caniche de la révolution brune. Elle lui survivra parce qu’elle ne prendra pas les armes. Ses écrits, putrides, sont un pan important de l’historiographie du mal. Je lui reconnais un talent et une précision qui font d’elle, qu’on le veuille ou non, une bonne auteure et une journaliste importante de cette époque.

Pour citer cet homme, je ne hais de toute façon pas la pécheresse, mais le pécher.

Donc, l’altercation violente qui a eu lieu après la réunion de son Comité interventionniste m’inquiète au plus haut point. Fait divers, me direz-vous probablement. C’est ce que me répètent les modérés. Fait divers. Fait divers.

Alt, mon vieil ami, savez-vous à quel point il est compliqué d’être prophète en son pays ? Dites que je suis présomptueuse, cela dégonflera mon égo et me fera un bien fou, car pour le moment j’ai la nette impression de nager au milieu d’une foule d’imbéciles. Il y a des modérés brillants, je n’en doute pas. Mais ils sont tous mous. Comme si la modération politique – c’est-à-dire le fait de peser les risques et les conséquences, et d’avoir la maturité nécessaire au fait de ne pas tout vouloir maintenant, mais de construire pas à pas un projet – était nécessairement accompagnée non pas d’une modération des passions, mais d’une mollesse pathétique. Pourtant il y a des représentants modérés brillants. Ils font de beaux discours, s’énervent pour les bonnes raisons et des bonnes manières. Certains des plus grands excités de Kotios, des plus grands héros de cette révolution que l’on trouve pourtant extrême et radicale, sont des modérés ! Car le modéré peut se comporter avec radicalité si les évènements rendent un tel comportement nécessaire, possible sans qu’il ne soit contre-productif ! Alors pourquoi au sein du Grand Kah, sont-ils tous aveugles ?

Je prends peut-être ça trop à cœur. Il n’en reste : Des citoyens de l’Union se sont réunis dans un local qui leur avait été légué dans ce but, et ont tenu une réunion politique. C’est normal en période électorale. Cette réunion avait pour thème l’interventionnisme. Je sais que ce mot sert de camouflage aux passions nationalistes, mais bien que nous le sachions, nous ne pouvons pas le prouver et il n’y a donc pas lieu d’intervenir. Ce pourquoi précisément l’Égide n’est pas intervenue. Et ces citoyens libres, non factieux, respectant nos accords de vie commune, ont été soumis à un tabassage en règle par un groupe organisé de brutes. Un groupe organisé de brutes se réclamant de l’héritage antifasciste. Pire ! De mon héritage !

Je n’aurai pas dû rejeter l’offre de la citoyenne Maiko. Elle voulait que je fasse campagne en leur sein, en qualité d’héroïne de Kotios. Elle m’a dit ; je vous retrouve sa lettre. « L’air du temps a changé », comme si j’y étais pour quelque-chose. J’ai été actrice d’une révolution. Certes. Les révolutions sont par nature une pièce d’ensemble : nous étions seize sur scène.

Elle m’a aussi expliquée qu’elle pensait que ce que « je » (comprendre, ce que « nous », les kah-tanais de Kotios) avais fais là-bas avait ouvert une nouvelle porte dans la politique Kah-tanaise. Une nouvelle forme de politique de masse, regroupant toutes les communes, adaptée par essence à la nature confédérale de la Convention. Elle s’est présentée à moi et m’a offert ses armes, me disant qu’ils étaient une force de l’avenir, s’offrant à moi. Une exaltée de plus. J’ai refusé, je vous en avais parlé je crois.

Je n’aurai pas dû. Cette fillette est manifestement à la recherche d’un maître, et je crois qu’elle en a finalement trouvé un en la personne d’Alcyon.

D’Alcyon est…

Il est dangereux. Vous m’excuserez mon pharois, mais il est même putain de dangereux. Inutile de revenir sur sa carrière. Je ne nie pas que c’est un génie, mais chez lui le génie ne côtoie pas la folie, il en fait partie intégrante. Son génie c’est justement qu’il ne pense pas normalement. Malheureusement il a aussi été fait talentueux.

Je ne crois pas que ses récents discours sur les colonies Listoniennes soient suivies d’acte. Je vois mal cette espèce d’imbécile heureux partir envahir quatre villes avec une bande de partisans. C’est du bravado de vieillard en perte de vitesse. Mais en attendant son discours à sorti de la tombe une frange franchement impérialiste du radicalisme Kah-tanais. Andrean Gabriel d’Alcyon est là depuis quarante ans, et ça fait quarante ans qu’il éructe maladivement toutes les idées politiques qui lui viennent. C’est le diapason de nos radicaux. La matrice de chaque Aquilons, de chaque Styx. Et il devient de plus en plus extrémiste.

Maintenant j’ai beaucoup de sympathie pour le citoyen Aquilon. Et je pense qu’on lui doit beaucoup – par exemple l’armée qu’il a recomposée avec votre aide. Vous me disiez vous-même qu’il était très correct. Mais Aquilon, pour un jeune exalté, et déjà de la génération précédente des radicaux. Les sept ans qu’il a passé au Comité l’ont éloigné du bouillon d’où ils émergent tous, et d’Alcyon il a jeté un nouvel ingrédient.

Et Maiko, privée de mon héritage, s’en est déjà saisie. Pire encore, je crois qu’elle a toujours été sur cette ligne, mais que maintenant elle a simplement le soutien d’une figure officielle, reconnue et appréciée. Elle surfe sur la vague de ce titan de notre littérature, et l’imbécile n’a d’yeux que pour sa propre gloire, alors il accepte cette compagnie. Il accepte de l’aider. Peut-être a-t-il conscience que si une fille telle que Maiko arrive ne serait-ce qu’au sein de l’hémicycle, alors toute l’Union commencera à sombre dans l’Impérialisme. Et qu’est-ce que a signifierait pour d’Alcyon ? Que ses volontaires et lui-même peuvent marcher sur les villes Listoniennes. Qu’ils seront soutenus.

J’en ai déjà parlé à Caucase, et il partage mon analyse. Ou une grande partie de celle-là. Mais contrairement à moi il pense que les citoyens de l’Union ont soif de paix, pas de violence. C’est un homme trop calme pour concevoir la soif de violence. Ce n’est pas une pulsion qui l’habite, c’est comme une couleur qu’il ne peut même pas percevoir. Pour cet homme, la violence est aussi visible qu’un infrarouge ; Alors pour le moment il croit que la ligne modérée peut vaincre sans combattre pied à pied les radicaux.

J’essaie de le convaincre. Nous avons peu de temps.

Salut et fraternité,
Meredith.


Ma chère amie,

Je l’ai appelé de mes vœux des décennies durant. Quoi qu’à l’échelle mythique des nations et des dieux politiques, on ne devrait peut-être pas s’abaisser à l’expression de termes si humains. La vérité c’est que j’en ai appelé à cette résolution des siècles durant, car c’est un besoin cosmique qui dépasse même l’attention que je lui porte, et les besoins du Grand Kah. Tu l’as bien compris, et ces jeunes gens qui te suivent aussi : ce n’est pas simplement marcher sur le pouvoir pour le sauver de lui-même. C’est une révolution d’un nouveau genre, on ne vient pas siéger au panthéon divin, mais en renverser la table, et y faire ce que l’on veut. Il s’agit de quelque-chose d’autre, assurément. Ce nouveau Cycle a pris son temps, on peut dire qu’il n’est pas prématuré.

Et je devrais t’en remercier, toi plus que tout autre, puisque tu es leur voix, et pour dire les choses franchement, leur âme. C’est un rôle important, central. Tu en as conscience, je le sais. L’accoucheuse de l’Histoire. Je le répète, car je sais comme tu attends mon approbation. Tu m’appelles courageusement maître, n’ayant pas honte de faire de toi mon élève, et de te placer dans la filiation d’une artiste à son aîné : je sais que ton art est strictement politique. Je ne m’en fais pas. Tu seras grande dans ton domaine, il n’est pas donné à chacun d’être mythique quoi qu’il fasse, et tu as bien ciblé la matière qu’il convient que tu sculpte. La politique, c’est l’art d’arriver au pouvoir, et le pouvoir, de métamorphoser le monde selon sa vision. Je te souhaite d’être aussi grande sculpteure du monde que tu l’es pour l’heure des passions.

Alors nous y sommes et je continuerai de te prêter de mon panache tant que nécessaire. Atteins les sommets, Maiko. Montre à cette convention poussiéreuse qu’un sang nouveau jaillis du cœur de l’Union. Que cette révolution de fantôme compte encore quelques vivants. Saisi la barre de ce pays et tire-le, quoi qu’il en pense, vers les eaux chaleureuses de la grandeur, où écume et bouillonne le sang de la jeunesse. La barre résistera, car elle est celle d’un pays qui s’est endormis depuis trop de temps sur ses succès. Il ne veut plus bouger. C’est une bête molle et stupide qu’il conviendra peut-être de frapper jusqu’à l’éveil. La tuer, s’il le faut, pour lui apporter un second souffle. Car la roue immortelle tourne sans cesse, et qu’on peut presser son action en agissant bien. Cette roue fut tant de fois alimentée par le sacrifice et le sang. Thanatos, ma fille. Vous vous sacrifiez déjà en vous lançant dans cette course au pouvoir. Maintenant, je n’attends de vous que la splendeur qui émane déjà sous vos haillons.

Mon enfant, tu vas faire de grande chose, et pour ça tu as tout mon soutien que je te renouvelle encore. Publie donc cette lettre dans ce journal que tes gens tiennent, je te prête ma voix, car je sais que vous ferez ce qui est nécessaire pour l’Union et pour le monde.

Moi, je serai bientôt au Nazum, et du Nazum je tirerai la force nécessaire à la création de ces cités mandataires libres et puissantes. Ma jeune amie c’est une aventure merveilleuse qui s’offre à moi, je n’ai pas peur de te le dire, une aventure merveilleuse. Et je ne crains certainement pas les critiques obscènes : nous allons y arriver. Nous allons y arriver. Je le répète une dernière fois : nous allons y arriver ; Le succès nous tend les bras avec tant de vivacité qu’on en oublierait presque qu’il nous faut le saisir. Nous allons pourtant le faire, et naîtra enfin l’union que les hommes attendent depuis qu’ils existent en tant qu’espèce.

Toi aussi, fais ton devoir envers l’Humanité en tant que genre. L’Histoire est une muse puissante et folle. Remplie ta part.

Nous en reparlerons.

Andrean Gabriel d’Alcyon.
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Fin des élections générales : le Parlement Général est entièrement recomposé.



Après plusieurs mois de campagne, de tractations et de débat, les élections générales se sont enfin terminées. Contrairement à ce à quoi s’attendaient la plupart des analystes politiques, il semblerait que ces élections n’aient pas amenées à un renouvellement idéologique radical du Parlement Général. Effectivement, la plupart des groupes politiques surreprésentés le restent, malgré quelques évolutions permettant de tirer certaines conclusions.

Affiliation estimée des députés élus, mandature 2007 - 2012 :
Sur 600 sièges

  • Confédération & Collaboration (12) ↓ -10
  • Mouvement Pirate (4) ↑ +4
  • Club de l'Impossible (41) ↑ +7
  • Club de l'Accélération (60) ↓ -7
  • Club de l'Ouverture (28) ↓ -8
  • Amicale Sociale-Démocratique (40) ↑ +1
  • Syndicat des Brigades (34) ↓ -1

  • Les Amies de la Commune (46) ↑ +4
  • Les Phalanstères (54) ↑ +6
  • Club du Temple (25) ↓ -17
  • Technocratie © (37) ↓ -4
  • Club de l'Avant-Garde (60) -
  • Groupe sur le Fédéralisme (4) ↓ -4
  • Section Défense (18) ↑ +18

  • Club des Splendides (50) ↓ -2
  • Les Horlogers (20) ↓ -1
  • La Conserve (42) ↑ +11
  • Club Un Un Un (18) ↑ +4
  • Un Esprit (7) ↓ -1


Premièrement on peut noter l'apparition de deux nouvelles idéologies au sein du Parlement Général. Déjà, le tout jeune Mouvement Pirate, discret lors des élections et émanant d'une séparation de Technocratie ©, fait son apparition dans le paysage politique Confédéral. Selon les analystes politiques c'est pas moins de quatre élus qui défendraient des positions idéologiquement très compatibles avec celle du Mouvement.

Inspiré par les théories du parasitisme Pharois, le Mouvement Pirate n'est pas un mouvement proprement marin, mais défend une position économique favorable à l'exploitation du capitalisme et à la libre circulation des informations et des biens. Ce qui n'aurait en soi rien de particulièrement surprenant si le Mouvement ne faisait de ce dernier aspect un point essentiel de la lutte émancipatrice. Très favorables à l'utilisation d'Internet, notamment, pour répandre des savoirs censurés ailleurs et permettre la libre acquisition de biens et de capital culturel, on peut attendre des députés proches de la piraterie qu'ils défendent des prises de positions extrêmement libertaires de la part du Grand Kah sur toutes les questions de droit d'auteur et de contrebande, ainsi qu'une expansion de la stratégie économique dite du "Capitalisme d'occasion", considérant l'emploi des failles du capitalisme comme une nécessité tant stratégique que morale. Ils sont aussi proches de certains mouvements culturels crypto-punks et ambitionnent ouvertement de placer le Grand Kah en tête de la course à la cybernétisation des moyens de défense, vantant les mérites du hacking et des drones.

Vient ensuite la Section Défense. Corpuscule politique milicien organisé sur des bases idéologiques floues, la Section Défense s'est faite l'avocate de l'action et du mouvement. Contrairement au Syndicat des Brigades ou au Club de l'Accélération, cependant, cette volonté d'action directe ne s'accompagne pas d'une idéologie politique solide, et ne semble pas tant s’intéresser à des notions de théories profonde qu'à des idées de fierté Kah-tanaise, de défense de l'Union ou d'exceptionnalisme communaliste. Se saisissant de tout un champ politique jusque-là délaissé par les clubs politiques traditionnels, la Section Défense a tout de même réussi à s'attirer les faveurs de plusieurs communes du Nord du Pays, inquiètes de la proximité de la Fédération de l'Alguanera, des récentes actions des pays membres de l'ONC, perçues comme impérialistes, et de l'humiliation militaire de l'Union. C'est un mouvement protéiforme qui semble plus tenir grâce aux peurs du moment et à la citoyenne Maiko, sa fondatrice, que sur la base d'un idéal capable de survivre à l'action du temps. Pour le moment il est impossible de déterminer s'il survivra à la transition parlementaire.

Du reste, on note un léger progrès des idées centralisatrices et de la modération en termes d'ouverture de l'Union, largement attribuable aux récentes déconvenues militaires de l'Union. Cette mutation de la sphère politique se fait au profit des mouvements les plus conservateurs et les moins radicaux, semblant témoigner d'un certain désir de calme et de consolidation. Cette évolution n'est cependant pas assez marquée pour permettre au camp modéré de dépasser en nombres d'alliés au Parlement celui des radicaux et révolutionnaires, qui conservent une légère avance. De manière générale, les juges de paix resteront les représentants proches des mouvements centristes, pouvant faire modifier les projets des autres camps.


Et maintenant ?

Maintenant la nouvelle législature du Parlement Général va entrer dans sa première session, durant laquelle sera nommé un Premier Orateur. Le rôle du Premier Orateur, extrêmement important, est rarement plus politique que lors d'une période de recomposition politique. C'est en effet à ce dernier que revient la mission de présider les débats et d'assister à la formation des commités parlementaires devant créer des propositions de programmes pour le futur nouveau Comité de Volonté Publique.

Une fois le Premier Orateur nommé, donc, le parlement aura un mois (maximum, cela peut être décidé plus rapidement si les députés se mettent d'accord) pour s'accorder que un programme pour le prochain Comité de Volonté Publique. Chaque proposition de programme doit être défendue par un Citoyen (pas nécessairement représentant au Parlement Généraln), qui s'en fera son avocat. Traditionnellement, ce citoyen-avocat est aussi le premier membre du Comité de Volonté Publique si le programme qu'il défend est choisi par les députés. Des modifications de programme sont possibles pour arriver à un consensus.

C'est donc une période extrêmement intense de débats qui va bientôt débuter, et dont dépendra la composition du prochain exécutif confédéral. Un exercice de style extrêmement important pour les représentants les plus ambitieux, qui ont ainsi l'occasion de s'offrir une tribune nationale le temps de quelques jours.
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Portrait des Avocats et de leurs Programmes pour l'Union

Des élus du parlement vont désormais être nommés pour proposer le programme du prochain Comité de Volonté Publique.




Citoyenne Meredith - DÉFENSE ET UNION
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"Nous pouvons écouter notre peur, ou nous pouvons écouter notre ambition. Celle de créer une union plus juste, plus brillante, d'élever le Grand Kah et le monde."

Surnommée La Voix de Kotios, la Citoyenne Mérédith est avant tout une professeure d’université et chercheuse en sciences-sociales spécialisée dans la dégradation des conditions de vie au sein des régimes oligarchiques et dictatoriaux. C’est ce domaine d’expertise qui lui valu d’être envoyé en Eurysie, en 2004, au sein d’un commité d’observateurs Kah-tanais venu étudier l’Empire Francisquien. Le groupe en question échoua finalement à Kotios suite à l’annulation de derrière minute de leur autorisation d’entrée sur le territoire impérial, et l’étude de la révolution évolua rapidement pour devenir une œuvre de lobbying visant à obtenir de l’aide kah-tanaise pour la jeune commune anarchiste. La carrière politique de Meredith a ainsi commencé de façon accidentelle. La réputation de Meredith au sein du Grand Kah fut celle d’une femme ayant réussie à créer un important mouvement communaliste en Eurysie, et ayant largement contribué à la défense de la ville lors de la tentative de putsch fasciste. Ses nombreux discours, prononcés lors de la guerre civile, furent largement retransmis au sein des communes et ses fréquentes rencontres avec les officieux kah-tanais déployés en eurysie défrayèrent la chronique.

Malgré une image d’idéologue volontariste et de femme de fer, proche des forces armées et profondément révolutionnaire, ce fut pour porter un message d’appaisement et de paix que la citoyenne revint au Grand Kah à l’occasion des élections. Soucieuse d’offrir une opposition politique sérieuse aux discours ultra-radicaux – qu’elle rejette – ou favorables à un troisième mandat du comité Estimable – dont elle juge les nombreuses erreurs impardonables, Meredith s’est faite la voix des pragmatiques Kah-tanais. Son programme sur le plan intérieur vise à une meilleure délimitatoin des pouvoirs communaux et confédérés et à la modernisation des infrastructures. Sur le plan extérieur, elle souhaite abandonner la ligne idéologique au profit d’une ligne pragmatique permettant en priorité des rentrées de capitaux au sein de l’Union en vue d’amorcer une modernisation massive des moyens industriels communaux. Son but est de rendre le Grand Kah imprenable militairement et inattaquable diplomatiquement, de préférence sans déclencher de crises ou de conflits.



Citoyen de Rivera - ESTIMABLE 2
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"Aujourd’hui il est évident que le Comité Estimable a pour plus grande force ce qui compose aussi sa principale faiblesse : il a un bilan. Nous savons d’où nous venons, ce que nous avons fait. La Convention reconnaîtra que nos erreurs ont été comprises, et nos succès indéniables."

Colonel de l’armée Kah-tanaise ayant démissionné lors de la restauration impériale, le Citoyen Maximus de Rivera fut pendant presque quinze ans la voix de la modération politique et du consensus. Surnommé « La Raison », il fut l’un des architectes de la recomposition politique post-révolution, et obtint la confiance du Parlement Général pour former le Comité de Volonté Publique Estimable, aujourd’hui démissionnaire. Reconnu pour son respect des institutions et de la valeur démocratique, Maximus de Rivera fut la tête de file de toute la modération politique kah-tanaise, désireuse de reconstruire l’Union et de ne pas s’engager dans de nouveaux conflits.

La politique de l’Estimable dépendait cependant d’une entente entre la sagesse de De Rivera et l’ambition des « jeunes kah-tanais » de la citoyenne Actée et des radicaux entrés massivement à la Convention. Aujourd’hui, Maximus de Rivera défend un programme dit Estimable 2, soit une continuation de la ligne mise en place durant les sept dernières années. Reconstruction du Grand Kah avec accent sur l’inclusion dans le tissu marchand mondial et l’industrie de très haute technologie, réarmement progressif des communes, ligne diplomatique teintée d’idéologie et renforcement des liens avec les alliés de l’Union. Une position centriste, qui souffre cependant des nombreuses erreurs ressenties du commité, et d’un abandon de la coalition de la part d’une partie des radicaux.


Citoyen Maiko - SECTIONNEL
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"Inutile de le nier : je suis comme les bêtes. Je sens l'air du temps."

Maiko est la voix de la colère, de l’échec et des ambitions frustrées du Grand Kah. Journaliste au Miroir Rouge, elle fut mise à la porte du Groupe sur le Fédéralisme à cause de ses positions trop interventionnistes et militaristes. Passant d’adulée par une partie des centristes à massivement rejetée par ces derniers, sa résurrection politique fut rendue possible par la récente destruction de l’armée de l’air Kah-tanaise, qui symbolisait pourtant sa fierté et ses récentes victoires eurysiennes. Redoublant de virulence dans ses discours interventionnistes, Maiko se fit le vecteur de toute une inquiétude de la population, qu’elle s’échina à rendre paranoïaque. Fondatrice de Sections de Défense, mouvements miliciens organisés sur le modèle des groupes d’auto-défense anarchistes de Kotios, elle voulut d’abord se ranger derrière la citoyenne Meredith avant d’être déçue par ses positions modérées. Ultra radicale, elle trouva finalement un important soutien de la part du Syndicat des Brigades, favorable à sa lecture de la situation internationale et à ses ambitions centralisatrices concernant la défense de l'Union, et au Club de l'Accélération, charmé par sa jeunesse et le caractère particulièrement brutal et anti-système de ses discours. Figure populiste et inquiétante pour les clubs politiques traditionnels, Maiko passe même pour quelque-chose de rare au sein du Grand Kah : une nationaliste. Forte d’une ascension fulgurante dans le monde politique, beaucoup s’attendent à ce que son éclat ne dure pas et s’éteigne en même temps que les récentes crises. Elle, au contraire, estime que la multiplication des crises internationales atteste d’une nécessité rapide d’action radicale. Son programme est l’un des plus centralisateurs. Elle veut entre-autre créer un poste de Premier Citoyen de l’Union, visant à présider le Comité de Volonté Publique « comme le fit le citoyen de Rivera bien qu’officieusement », et souhaite étendre les pouvoirs du Commissariat à la Paix de l’Union pour entièrement centraliser la défense du territoire communal et la gestion des milices d’auto-défense. Sa principale préoccupation est militaire, défensive et idéologique. Elle souhaite aussi une réforme de l’éducation visant à la militariser d’une part, et à mettre en avant une plus importante fierté kah-tanaise, exhumant par la même le vieux mythe de l’exceptionnalisme kah-tanais, oublié depuis au moins soixante ans.

Citoyen Caucase - PAIX ET DÉVELOPPEMENT
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"Ce que veulent les citoyens de l’Union… Ce qu’ils désirent, je le crois, c’est la paix. Aujourd’hui nous voulons du progrès, mais plus de chaos."

Énième avocat d’un programme modéré, Viktor Anastase Miloradovitch, surnommé Caucase, n’est pas un individu s’intéressant réellement à la politique confédérale. Membre actif de la vie publique et politique, à la réputation de calme irréductible et d'absence totale d'ambition personnelle, il a principalement évolué au sein des chambres communales, dont il devint le principal représentant auprès des commissions et commissariat de la Convention. En pratique, Caucase est surtout l’avocat efficace mais flexible de toute une partie du Grand Kah qu'on tend à oublier : celle des petites villes, des villages et des communautés agraires. Proche des mouvements phalanstères, c'est un homme sans prétention de technicité mais à la vision du monde précise : en bref il est de ceux ayant le courage de critique le Grand Kah non pas sur ses erreurs notables, mais sur ses manquements quotidiens. Manque d’infrastructure au sud et à l’Est du pays, déséquilibre dans la répartition des ressources confédérales, hypertrophie de la Confédération au détriment des communes… Son programme est définitivement agraire. Son principal objectif et de sauvegarder l’autarcie alimentaire de l’Union, d’améliorer les conditions de vie sur l’ensemble du territoire, plutôt qu’en priorisant les villes, et de retourner à un certain isolationnisme salutaire évitant toute intervention confédérale dans les affaires extérieures, sinon pour répondre à des nécessités économiques et diplomatique. Il représente en bref une grande partie des isolationnistes, des communaux, et plus généralement, la voix des inquiets qui ne souhaitent ni tomber dans l’ultra-radicalisme, ni dans l’inquiétude sourde des autres mouvements modérés.

Citoyen Borisov - DRAPEAU NOIR
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"Ou bien on assume être la Révolution, ou bien on accepte de ne plus rien être du tout. C'est un engagement qu'il faut prendre maintenant. Une balle pour chacun de nos ennemis, un fusil pour chacun de nos amis, et la liberté pour tous !"

Le programme Drapeau Noir, défendu par le citoyen Borisov, n'est pas exactement nouveau puisqu'il s'agit en fait de la traditionnelle ligne Anarchisante, appelant à la dissolution pure et simple de la Convention générale et de la Confédération en tant que telle. Cette dissolution, largement documentée et théorisée, doit se faire par processus de façon à ce que tous les pouvoirs délégués à ces échelons supérieurs soient retournés aux communes dans les plus brefs délais. Les anarchistes de l'Union, principalement représentés au sein du Club de l'Impossible et des Amis de la Commune, ne se font aucune illusion quant aux difficultés d'un tel programme à se faire admettre par l’organe même qu'il appelle à faire disparaître, et contient de nombreux autres éléments susceptibles d'être intégrés au programme d'un autre Comité. Drapeau Noir est ainsi en faveur de la piraterie, de l'utilisation du capitalisme contre lui, de la mise en place d'une importante politique de soutien des mouvements révolutionnaires à l'étranger, d'une intolérance diplomatique envers les régimes socialistes "dégénérés" et les monarchies, ainsi de suite. C'est un mouvement aux ambitions extrêmement radicales mais souhaitant procéder, paradoxalement, par ordre et réformes. Une voix surprenante, portée par un citoyen anonyme dont l'identité importe au final assez peu : pour ce qu'on en sait, Borisov serait l'alias d'un quelconque pirate agissant dans les eaux Nazuméennes. Tout un programme, donc.

Citoyenne Espérance - INCROYABLE (ET MERVEILLEUSE)
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"Le monde extérieur est abominable, le monde extérieur ne nous comprend pas, le monde extérieur n’est pas nous. Et ils virent que cela était bon. Entre le corps et les maladies, il y a la peau. Celle du Kah est bien trop fine. Nous voulons pouvoir danser sans qu'ils n'envoient la police !"

Incroyable (et merveilleuse) est un programme très largement défendu par les représentants proches du Club des Splendides. En témoigne l’accoutrement particulier d’Innée Espérance, son avocate au sein de la Convention. Jeune membre d'un collectif d'artistes-militants, Innée Espérance organise notamment des campagnes de vaccination dans des pays pauvres Afaréens, ainsi que des programmes d'échange culturel intercommunaux au sein de l'Union. Figure appréciée et relativement reconnue, elle s'est faite, dans la sphère politique, l'avocate d'un programme politique "esthétisant". En effet, incroyable (et merveilleuse) considère en bref que le Grand Kah est manifestement trop exceptionnel et splendide pour être réellement compris ou apprécié par le reste du monde. Soucieuse de protéger ce "joyau de la politique et de l'Histoire", le Comité Incroyable (et merveilleuse) aurait ainsi pour principale mission d'institutionnaliser la défense et la promotion de l'art et de la culture à travers le monde, tout en fixant des limites au budget militaire et industriel. Dégoûtés par les morts et ne croyant plus en la nature internationale de la révolution, les Splendides sont excentriques et nationalistes. Leur programme consiste en bref à arrêter une bonne fois pour toutes de s'intéresser à un monde inintéressant, et de lui envoyer, périodiquement, des objets culturels à étudier. Ils croient aussi en l’institutionnalisation de la dépravation via des programmes en faveur du sexe libre, l'organisation d'orgies publiques, et la création d'un Commissariat aux Questions Sensibles, visant à favoriser la création artistique "de tout ordre et susceptible de choquer la galerie". Un programme libertaire, individualiste et se moquant des principes de moralité.
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« On estime l’ampleur d’un échec à la différence entre le résultat obtenu et l’objectif fixé, lâcha finalement Actée, plongeant son regard dans celui d’Isabella Zeltzin. Ainsi je vous le demande : quels étaient vos objectifs, mon amie, pour décrire la situation comme un échec ? »

La discussion durait depuis déjà quelques minutes. C’était le dernier rassemblant du Comité de Volonté Publique dit Estimable. L’illustre formation politique issue d’une tentative des modérés de contrôler le débat public, et qui avait fini par faire une place de plus en plus importante aux idées radicales. Ses parents, la citoyenne Actée Iccauhtli et Edgar Alvaro Maximus, prenaient la situation avec un commun agacement, quoi que pas tout à fait porté par les mêmes raisons. La première considérait la situation politique de l’Union comme regrettable et les tentatives des citoyens pour s’en dédouaner pathétique. Le second, qui entretenait un mince espoir de sauver son héritage politique, trouvait simplement les tensions au sein du comité inutiles. Actée continua.

« Nous avons accepté la démission du comité en partant du principe qu’il fallait renouveler l’exécutif confédéral en réponse aux dernières crises.
Sauf que c’était votre point de vue . »

Quri Xen Suchong s’en voulut presque aussitôt d’avoir parlé, et s’enfonça dans son siège quand le regard froid de la citoyenne se tourna vers lui. Elle lui indiqua de continuer.

« Pardonnez-moi citoyenne, mais il me semble que pour les radicaux, il indiqua Aquilon et Styx Notario, qui souriait tranquillement, le but était surtout de sauver leur héritage politique. D’ailleurs je l’ai toujours dit.
Et vous, qui ne vous êtes pas opposés à cette dissolution du comité, qu’espériez-vous, exactement ? »

Il ne répondit pas immédiatement. Rai Sukaretto, sentant poindre l’occasion d’être odieuse, sauta sur l’occasion. Elle prit pour se faire son ton le plus doux.

« Je crois… Non, je me trompe peut-être, mais je crois que ça doit être dans les minutes de la séance numéro... 
Citoyens. »

Maximus de Rivera, la "Raison", tapa le plat de sa main sur le bord de la table de réunion. Le silence obtenu, il se racla la gorge. « Les membres de ce comité étaient d’accord pour organiser la dissolution et les élections générales. Les raisons importent peu. Actée, qu’est-ce qui vous dérange ?

« Rien, Maximus. Je voulais simplement m’assurer que ce Comité était encore sur une même ligne politique.
Nous vous écoutons, mon amie.
Bien. » Elle soupira et lança un regard en coin à Zeltzin et Suchong. « Il semble que la ligne modérée se soit fracturée au sein du Comité. Aujourd’hui la citoyenne Zeltzin parle de ces élections comme d’un échec pour l’Union.
Je ne démens pas. Ces élections ont donné la parole à des courants populistes extrêmement dangereux. »

Tous acquisèrent, y compris les deux radicaux.

« Seulement notre ojectif était d’amener à une réorganisation politique de l’Union, capable de prendre en compte la nouvelle donnée que représente la création par l’Estimable d’une force armée conférée. N’est-ce pas exact ? »

Bref silence. On acquiesça à nouveau, quoi qu’avec moins d’entrain.

« Eh bien. Actée haussa les épaules. C’est chose faite. Vous êtes surpris que ceux s’intéressant aux fusils soient avant tout des radicaux ?
Ridicule. La citoyenne Zeltzin secoua la tête. Il existe une place pour un discours militaire modéré à la Convention. Et vous le savez.
Les programmes modérés présentés sont insatisfaisants.
Selon vous, une fois encore.
Non. De manière générale. La citoyenne Meredith surf sur une popularité dangereuse risquant d’en faire une figure trop importante. Quant au programme Paix et Développement, si je ne doute pas des qualités du citoyen Caucase, il est un pur et simple rejet de tout ce que nous avons construits. La modernisation technologique, l’industrialisation, la militarisation, l’ouverture internationale. C’est bien simple : le Comité Estimable devait créer la ligne politique de l’Union pour les vingt prochaines années. La proposition de Caucase consiste purement et simplement à la refuser.

Elle tapotait désormais la surface de la table de ses ongles, ses traits se faisaient de plus en plus sombres. Rais Sukaretto approcha pour lui servir un peu de thé, et lui tapota doucement le dos.

« Allons, tout n’est pas si catastrophique. »

Un soupir, elle laissa cependant la citoyenne faire avant de se redresser. Aquilon Mayhuasca toussota dans sa main.

« Actée, vous oubliez la proposition modérée faite par le citoyen De Rivera.
Estimable 2. » Elle ricana. « Oui, ce projet aurait une chance d’être choisi par la Convention. Si les membres de ce Comité n’avaient pas déjà commencé à travailler à leur inclusion au sein d’autres programmes. » Silence. « Eh bien ? Vous pensiez que je ne le savais pas ? Maximus, dites-leur.
Ce n’est pas le sujet. Chaque citoyen est libre de…
De foutre en l’air dix années de travail ? De trahir silencieusement le mandat de votre nomination à ce poste ? Tranquillement ? Comme si de rien était ? Et vous avez l’audace de revenir siéger ici quand vous faites la cours à Meredith, Caucase, Espérance ?
Espérance n’est pas une modérée.
Oh fermez-la Aquilon. Nous avions des accords et en retournant chez les Splendides vous les trahissez. Votre belle armée ne servira à rien s’ils sont nommés, et vous le savez. Ne venez pas me parlez d’échec quand vous en êtes les architectes, vous tous. »

Quri Xen Suchong secoua la tête.

«  C’est ridicule. Ce comité est fini. Nous sommes libres de défendre d’autres lignes. »

Isabella Zeltzin hocha doucement la tête.

« Oui. Et vous savez que la convention ne crachera pas sur notre héritage, même si Estimable deux n’est pas le programme choisi. Déjà ce serait structurellement infaisable. Ensuite le discours modéré est toujours très inspiré par le citoyen De Rivera.
– Merci.
– Mais c’est vrai. La seule raison pour laquelle ils ne se liguent pas autour de vous c’est qu’Estimable compte plusieurs radicaux, que les clubs considèrent responsables de nos erreurs.
– Bah. »
Styx Notario leva les yeux au ciel. « C’est si simple, d’oublier que ce comité a pris chaque décision de façon consensuelle.
Hm. » Rai Sukaretto lui lança un sourire poli. « Sauf sur les questions des services secrets. Je crois même que l’Egide était venue nous rendre visite à ce sujet ?
C’est pas que j’en ai marre qu’on me fatigue avec ça, mais je suis un peu fatiguée. »

Aquilon haussa les épaules.

« Peut-être que la solution se trouve du côté des décisions radicales ? Je ne suis pas particulièrement fan de ce que représente la citoyenne Maiko. Même pour moi son nationalisme est trop… Exalté.
– Elle ne porte pas de veste baroque, camarade ? C’est ça le souci ?

Suchong, sachez que je respecte les engagements et le système. Ce qu’elle ne fait pas. Non, je pensais surtout à la possibilité de faire nommer des partisans d’Espérance et de Drapeau noir. Leur incompatibilité neutraliserait le danger respectif qu’ils représentent.
Ah. Actée semblait sincèrement déçue. Donc pour vous c’est une question de manipulation.
Non, non. Je déteste la manipulation. Mais si la situation l’exige, nos mains ne seraient plus liées. »

Il en resta là. Maximus de Rivera se passa une main sur le visage puis acquiesça.

« Accordons-nous sur un désaccord. Ce comité n’a pas à décider du nom de ses remplaçants. Je crois que nous devons accepter la situation pour ce qu’elle est, et envisager, tous, notre utilité pour l’Union selon les différents cas de figure.
Soit. » Actée termina son thé et se leva. « Dans ce cas nous devrions y aller. Il n’y a vraiment plus rien que nous puissions faire. »

Et s’approchant de la porte.

« Citoyens, citoyennes, ces années furent intéressantes. Salut et fraternité. »

Les autres suivirent progressivement. Edgar Alvaro Maximus de Rivera, la raison de l’Estimable, fut le dernier à partir, éteignant les lumières de la salle de réunion, tirant le rideau sur une longue ère politique de l’Union.
19504
31 décembre 2007. Le Grand Kah tout entier se prépare aux festivités du nouvel an. Dans cette animation d’autant plus électrique ici qu’ailleurs qu’il ne s’agit pas de célébrations solitaires, ou familiale, mais d’une de ces nombreuses occasions que la culture communaliste a changées en immense messe populaire. Bien entendu on trouvait toujours les éternels rabat-joie, soucieux de rappeler que cette nouvelle année était celle d’un calendrier religieux qui ne concernait en somme qu’une partie de la population. Et les autres qui souhaitaient que l’on utilise le calendrier républicain. Mais cette nouvelle année, tout de même, était célébrée partout sur terre. La fête n’était que plus belle si elle était vécue sous chaque latitude. Et les communes, elles, étaient trop heureuses de changer l’évènement en concours permanent : qui, quel pays, gouvernement, saurait organiser les plus belles festivités ? Donner au monde les plus belles images de liesse ?

Comme le voulait la tradition kah-tanais, inspirée en ça par les coutumes autochtones d’avant la colonisation, on passait la journée à manger, mais jamais chez les mêmes personnes. Les gens naviguaient de maisons en hall. D’assemblée communale en place occupée pour l’occasion. C’était une migration constante de fêtards, et même les organisateurs, ceux dont la mission était d’assurer que la nourriture et les boissons coulent à flots, changeaient, laissant leurs casquettes à d’autres.

En période électorale, l’occasion était devenue hautement politique, et les députés de la Convention Générale changeaient ces fêtes et libations en autant de conciliabules. C’était d’un de ceux-là que revenait la voiture électrique qui, bravant la neige qui avait paralysé Lac-Rouge une bonne partie de la journée, se dirigeait vers les majestueux appartements du fronton nord, bordant directement les champs flottants et la Place d’Armes.. Brièvement, elle ralentit à cause des conditions climatiques, ce qui laissa le temps à deux fêtards éméchés de s’accrocher à son flan pour observer qui s’y trouver. Ils repartirent en riant, grinçant. Deux visages qu’ils connaissaient bien.

La citoyenne Meredith se retourna vers sa passagère. La citoyenne Actée haussa les épaules.

« On raconte déjà que l’on se voit.
Qu’ils parlent donc. Ils n’ont pas tort.
Vous pensez ? »

Elle n’ajouta rien. La voiture s’engageait désormais sur la place d’Arme, où se tenait une petite foule de fêtard. De l’autre côté se trouvait le complexe d’immeubles. Anciens. Le vieux Lac-Rouge. C’était le quartier général du programme Défense et Union. De ces anciens hôtels particuliers, Meredith menait sa campagne pour l’âme du Grand Kah. La voiture passa la grille, qui se referma sur elle, puis se gara à la place qu’occupèrent jadis les carrosses de la noblesse coloniale. Deux hommes en tenue de milicien émergèrent du bâtiment, bravant le vent et la neige épaisse, tendant des parapluies aux citoyennes et les escortant à l’intérieur.

La salle de réception avait des airs de rangement. Il s’y trouvait encore des objets en tout genre. Meubles anciens, toiles modernes, biens et cadeaux que Meredith et ses suivants ramenaient de Kotios ou de chez eux, et qui attendaient désormais, empaquetés dans la salle de style baroque. Au centre se trouvait une table. On y avait mis deux couverts. Des plats attendaient sous des cloches. A l’écart se trouvaient encore les fauteuils style Impériale, dans une section séparée du reste de la salle par plusieurs meubles de rangement. Un fumoir, faisant directement face aux fenêtres. La cheminée était éteinte. Malgré les apparences, les lieux jouissaient de tout le confort que la modernité pouvait offrir : il y faisait chaud.

« Je tiens à m’excuser pour le désordre. » Meredith se dirigea vers la table. Elle avait un pas un peu raide, militaire, presque. « Nous avons emménagé depuis peu.
Ce n’est rien.
En fait nous étions à Chan-Chimu, pour négocier avec les sections locales. À notre retour l’emménagement n’avait pas avancé. L’hôtel était sous scellé. Mais je ne vous apprends rien.
Il se raconte que je sais tout. »

C’était probablement une plaisanterie. En tout cas Actée y mit les formes, retroussant ses lèvres en un sourire un peu froid. La joie, chez elle, sonnait fausse. C’était de nature. Elle approcha de la table, souleva une à une les cloches, mimant différents degrés d’admiration.

« Soupe à l'ajiaco, Pirarucú en tartare, asperges à l'impériale...
C’est une sauce républicaine, citoyenne.
Vous étiez bien sûre de vous en m’invitant à dîner, chez Caucase.
Maintenant nous y sommes. Installez-vous. »

Meredith prit place, fixant Actée qui resta debout, le fixant sans rien dire.

« Avez-vous remarqué comme il s’escrimait à nous tenir à l’écart ?
C’était risible. La moitié des modérés de la ville m’ont tenu la jambe. Sauf celle qui m’intéressait.
Il était temps que nous ayons un peu de temps seules à seules. Je vous sers ? »

Actée émis un grognement et secoua la tête. Elle n’avait pas faim. Plutôt que de répondre à la question, elle approcha des fenêtres. Il lui semblait entendre de l’agitation, dehors. La foule, toujours elle. Cette immanquable actrice de la politique Kah-tanaise. Elle n’avait pas envahi le parlement depuis des années, mais la menace demeurait. L’invasion était un mode opératoire comme un autre. Dehors, on avait allumé des flambeaux, comme de coutume en cette période de l’année. La neige avait cessé.

« Il était temps, oui. Mais nous en avons peu.
Vous pressé ?
J’ai rendez-vous chez… Non, pas exactement chez elle. Mais la princesse rouge veut absolument me présenter à ses amis du mode culturel.
Vous êtes une artiste, vous aussi.
Je suis une universitaire. Comme vous. Ne m’insultez pas.
Les fêtes de Rai Sukaretto se prolongent toutes la nuit. Si tard qu'elles finissent systématiquement tôt. Elle ne vous en voudra pas d’arriver l’an prochain.
Et puis il y a la foule. »

Meredith, qui avait commencé à remplir son assiette, s’immobilisa pour fixer Actée.

« Nous avons été identifiés. Ces gens pourraient se demander ce que nous faisons. Et l’alcool aidant...
La foule se moque bien de savoir ce que nous faisons de notre temps libre.
Je pourrais ouvrir la fenêtre et l’appeler à venir. » Elle pivota vers Meredith. « C’est tentant.
Soyez adulte, venez manger.
Je veux que nous parlions efficacement. »

Elle s’écarta tout de même de la fenêtre, après un dernier regard sur la place d’arme. L’étrange agitation n’avait pas quitté la masse. Arrivée derrière le dossier de sa chaise, Actée se contenta de fixer Meredith. Celle-là feignait l’indifférence, dévorant ses asperges, son poisson, d’autres plats d’un raffinement qui n’aurait pas dénoté à l’époque ou les lieux étaient hantés par la noblesse. Elle l’invita à s’installer, d’un geste, lui offrant même un sourire généreux.

« C’est délicieux vous savez. C’est un ami qui fait la cuisine.
Vous en avez peu, des amis.
En cette période ils sont tous précieux.
Mais à qui le dites-vous. » Elle concéda enfin à s’asseoir, observant les couverts, les flûtes, les plats, acquiesçant pour elle-même. Enfin, elle entra dans le vif du sujet.

« Défense et Union ne sera pas choisi par la députation.
Non, non. Aucun programme n’a la possibilité d’être nommé seul. C’est le cours normal des choses. Vous prendrez à boire ?
Non merci. Ce pourquoi vous venez me cherchez. Vous espérez rallier Estimable 2. Seulement je suppose que vous avez déjà approché de Rivera, et que ses conditions ne vous convenaient pas. Ce qui vous ramène, une fois encore, à moi. Je suis votre option, ou plutôt votre seule brèche pour affaiblir Estimable 2 et assure que le choix des dépurés se porte sur votre programme.
Finement observée, citoyenne. » Elle eut un petit rire et fit passer une pleine bouchée de tartare par une brève gorgée de vin, puis secoua la tête et reposa bruyamment son verre sur la table, se redressant d’un coup. « Mais faux. Totalement faux. Vous êtes la première que j’approche. Je dirai même c’est vous que j’approche. Je ne veux pas d’Estimable 2. Estimable a failli.
En quoi, précisément ?
Citoyenne. Vraiment ? » Elle poussa un léger soupir. « Vous le savez tout autant que le reste du Grand Kah.
Mettons que je suis plus bête qu’on ne veuille bien le dire. »

Cette fois, Actée remplie son verre. Comme pour se préparer à endurer l’exposé de ses échecs, la jeune femme attrapa aussi les plats, qu’elle ouvrit, se servant d’un air appliqué, lançant de temps à autre un regard en coin à Meredith. Celle-là secouait la tête.

« Moi je ne parle pas de l’incident qui nous a coûté l’Armée de l’air. Ce n’était que l’opportunité pour mettre un terme à de comité.
L’opportunité pour qui ? Si mes souvenirs sont bons le comité s’est dissous de lui-même. Hm. Vous avez raison, c’est très bon. Comment vous disiez que votre ami s’appelle, déjà ?
Le comité s’est dissous par ce qu’il ne pouvait plus gouverner après un tel échec. C’était suivre la politique voulue par les cellules ou ne plus rien diriger. Mais ça ne m’intéresse pas. Ce que je critique, au fond, c’est tout le reste.
La reconstruction du Grand Kah ?
Votre second mandat, au cours duquel vous avez pris des libertés. 
Ah ! »

Un Ah ironique, théâtrale, ouvertement moqueur. Celui d’un tribun. Cela ne venait pas d’Actée, c’était sans doute qu’elle avait inconsciemment volée à Aquilon, ou à un autre beau-parleur de l’Estimable. En tout cas il agaça légèrement Meredith, qui marqua un bref silence.

« Pour la foule Estimable est en cause.
Vous avez peut-être raison. Je vais aller lui demander.
Ne faites pas l’idiote. Nous avons encore des choses à discuter.
Meredith, allons, je veux simplement illustrer simplement vos propos ! »

Aucune des deux ne bougea. Maintenant c’était Actée qui mangeait. La qualité des plats lui avait ouvert l’appétit. Meredith, pour sa part, constatait que la jeune femme lui imposait comme un goût amer. Dans ces conditions elle ne voulait pas avaler
une bouchée de plus. Le silence se prolongea un peu. Finalement, Meredith repris la parole.

« Pour vous, donc, qu’elle est la situation ?
Vous ne m’avez pas répondu sur le nom de votre ami cuisinier, vous savez.
Zeltocxc Salamanca. Il est ingénieur, il cuisine en amateur.
La situation est la suivante. Nous sommes ici, à parler à deux de l’avenir du Grand Kah comme les pontifes dégénérés d’une quelconque oligarchie. Je ne trouve pas que ce soit normal ou souhaitable.
Il est encore temps pour vous de partir. Pourquoi avoir accepté cette entrevue en premier lieu ?
J’ai accepté de dîner avec vous. » Elle se tut, puis reposa ses couverts. La foule ne faisait plus un bruit, dehors. « Quel silence. Je vais vous dire, Meredith. Je reconnais une erreur à l’Estimable. C’est d’avoir divisé le camp des modérés en s’alliant à quelques radicaux et en leur confiant certaines missions sensibles. Maintenant il y a trois propositions de programme modérés plus ou moins interchangeables sur certains points. Les points restant les rendent cependant hautement incompatibles de telle façon que pour assurer la victoire d’un programme modéré, il faudra fatalement qu’un autre se sacrifie en revenant sur les positions le différenciant avec l’autre.
Vous pensez que c’est impossible ?
Je pense que ce n’est pas l’esprit de la démocratie. Il ne doit pas y avoir de renoncement, mais un consensus. Maintenant à vous. Que souhaitez-vous ?
Qu’aucun Sectionnel n’ait accès au Comité. Que Drapeau Noir se limite à ses domaines de compétences, et que la citoyenne Espérance et les siens en soient réduits à des postes où ils ne pourront pas refermer l’Union sur elle-même.
J’aime beaucoup. On dirait du Caucase.
Ou du Maximus de Rivera. Vous devez bien comprendre que le camp de la modération politique a tout à gagner à travailler ensemble. »

Actée secoua la tête et repoussa doucement son assiette, quittant sa chaise pour approcher, à nouveau, des fenêtres. Le silence l’inquiétait.

« Qu’est-ce que c’est, la modération politique ?
La capacité à faire des compromis.
Si c’est ce que vous pensez alors vous êtes une idiote. »

Elle était désormais face à la fenêtre. Meredith, qui ne voyait plus que son dos, s’impatienta de son silence.

« Vous avez quelque-chose à ajouter ?
La foule ?
Quoi, la foule ? »

La foule s’était massée le long des grilles. On les avait reconnus. Le mot avait couru que cette réunion avait lieu. La masse attendait désormais.

« Nous avons moins de temps encore. N’en perdons pas plus que nécessaire. Il n’y aura pas d’émeutes, mais il vaut mieux se montrer prudente.
Pour des raisons politiques, vous voulez dire ?
S’ils ne nous décapitent pas, ça viendra de la Convention Générale. Vous considérez-vous comme une modérée politique, Meredith ?
Au même titre que vous, oui. Sur la plupart des aspects.
Pourtant je ne suis pas comparable au fameux citoyen de Rivera. Je suis de la jeune garde, lui de la vieille. C’est une différence qui nous sépare plus sûrement que notre modération ne saurait nous rapprocher. Non ?
Sur certaines questions uniquement. La différence que nous faisons entre les modérés et les radicaux et plus centrale. Elle tient au comportement même. Dans le fond, vous et De Rivera tenez des discours différents mais partant des mêmes informations pour arriver aux mêmes conclusions. Vos divergences sont minimes, sur les plans les plus fondamentaux.
Personne, Meredith, personne ne vous voit comme une modérée. »

Elle se retourna pour la fixer. L’autre haussa simplement un sourcil puis secoua la tête.

« Je suis revenue au sein du Grand Kah pour limiter le pouvoir des radicaux, si ça ne vous suffit pas, alors je n'y peux rien.
Nous y reviendrons. La modération politique, en tout cas, ce n’est pas ça. La modération politique c’est la défense d’un statu-quo. Dans une nation révolutionnaire par essence ça a assez peu de sens, mais il s’en trouve quelques-uns. Maintenant il faut le dire : nous sommes tous des radicaux, quoi que de différente manière. » Elle se racla la gorge. « Il fait soif.
J’ai du whisky.
Rien de plus léger ? Non, ça fera l’affaire. Asseyons-nous. »

Elle se dirigea vers l’ancien espace fumeur, où elle prit place dans un confortable canapé. Meredith déposa deux verres sur la table basse, puis les remplit d’un liquide ambré avant de se placer sur un fauteuil, face à Actée. Celle-là attrapa son verre, mais plus pour l’emphase qu’en vue de le vider.

« Voilà. Vous, Meredith, êtes une législatrice. C’est votre programme qui le veut. Vous voulez codifier, institutionnaliser les pouvoirs, acter certaines séparations qui n’existent pas, parfois à dessein. Accessoirement, vous êtes politiquement une imbécile, ce pourquoi je me suis toujours opposée à Défense et Union malgré les quelques bonnes idées s’y trouvant.
Une imbécile politiquement ? Je ne me sens pas insultée, je veux juste comprendre le sens de cette formule.
Eh bien d’une vous n’avez manifestement pas la moindre imagination, et vos succès ont été ceux d’une guerrière en temps de guerre. C’est une image que vous détestez, je suppose, mais c’est comme ça. On utilise pas un sabre pour écrire des lois.
La guerre n’est qu’une infime partie de l’histoire de Kotios. Mais je vous accorde que je n’ai pas d’imagination. C’est peut-être pour ça que vous et vos amis radicaux ne m’aimez pas. Je ne me projette pas dans le fantasme d’une révolution qui ne viendra jamais. Et contrairement à vous je sais qu’une guerre, même victorieuse, même opposant des forces clairement bénéfiques et clairement malfaisante, n’est jamais glorieuse. C’est un échec, un effondrement de ce que nous appelons la société. Tout ce que je vois, comme résultat, c’est un ensemble de morts, de veuves, d’orphelins et de parents en pleur.
C’est très beau, Meredith.
Vous pouvez rire, mais mon plan est de maintenir le Kah dans la paix, et d’assurer qu’il ne soit jamais sujet à la guerre. Jamais.
Mais les gens vous aiment parce que vous êtes une icône révolutionnaire, mon amie.
Nous avons fait le nécessaire. La guerre s’est imposée à nous, n’allez pas croire que nous l’avons cherché.
Parce qu’Estimable 2 est évidemment un programme militariste.
C’est le programme de ceux qui ont manqué de provoquer notre extinction. Alors oui.
Hm. » Elle avala sa première gorgée d’alcool, et grimaça fermement. « Touché. »

Puis elle reposa le verre, doucement.

« Vous avez, il va recommencer à neiger. Et la foule, eh bien, elle va se disperser.
Même le climat est contre-révolutionnaire. »

Meredith tapota doucement le côté de son verre, le tintement remplit brièvement l’espace vide du salon, puis s’éteint. Elle soupira.

« Il y a de bonnes idées dans Estimable 2. Notamment tout ce qui concerne l’économie. Sur le principe je suis aussi plus proche de cette position que du tout-communal de Caucase.
Oui. Sauf qu’une industrie lourde signifie aussi plus de capacité militaire qui, un jour ou l’autre, finira entre les mains d’un commissaire radical. Vous devriez vraiment faire coalition avec Paix et développement. Selon moi ce programme est bien plus proche du vôtre que celui de Rivera.
Ce n’est pas à Rivera que je parle. C’est à vous.
Vous voulez me garder au commissariat aux affaires extérieures.
Non. Je veux simplement que vous laissiez Estimable 2 s’effondrer. Si vous me rejoignez, négocier avec Caucase sera beaucoup plus compliqué, en vue de ses positions isolationnistes.
Que vous désirez pourtant éviter.
Peut-être. » Elle avala à son tour une gorgée d’alcool. « J’ai plus peur de la guerre que de l’isolation. Qu’en pensez-vous ? 
Je ne désire pas conserver les affaires extérieures. »

Il y eut un moment de silence, que Meredith mit à profit pour se redresser dans son fauteuil. Actée, de son côté, s’était étendue tranquillement, fixant les fenêtres à travers lesquelles on pouvait maintenant apercevoir une épaisse neige tombant du ciel.

« Quelle heure est-il ?
On approche de minuit.
Je ne veux pas récupérer les affaires extérieures pour la simple et bonne raison que ça ne sera plus mon domaine réservé. J’avais acquis ce privilège en vertu de mon accord avec Rivera, lorsqu’il avait besoin des jeunes kah-tanais. On ne me refera plus jamais d’offre aussi généreuse, par conséquent je ne suis plus intéressée.
Estimable 2 ?...
Ne passera qu’avec vous. Et sous un accord clairement défavorable, si vous voulez tout savoir. Les jeunes kah-tanais sont partis. Les radicaux Rivera-compatibles aussi. C’est une coquille vide, un bateau sans-équipage.
Vous devriez me rejoindre.
Et non, Meredith. Parce que vous restez, selon moi, dangereuse et imbécile. »

Actée se leva d’un bond, approchant des fenêtres en quelques enjambées, et les ouvrant d’un coup sec.

« Il fait trop chaud, ici ! »

Dehors, la foule était toujours massée. D’une patience d’animale. Actée cria à son adresse.

« Alors ! Alors ?! Qu’attendez-vous donc ? »

On la fixa. Elle referma brusquement les battants, traversant à nouveau la pièce.

« Parce que cette situation, Meredith, c’est à vous et à vous seule que nous la devons. Estimable 2 était une possibilité, et une possibilité réelle. Avant votre retour. Et vous...
La démocratie est ainsi faite, citoyenne.
Vous ne comprenez pas. Vous êtes un pantin, dans l’affaire. Un pion. Une jeune fasciste de placard reprend les codes et le nom de votre mouvement Kotioïtes, vous demande explicitement de venir et qu’est-ce que vous faites ?
Comment savez-vous qu’elle ma demandée une chose pareille ?
Nous surveillons tous les exaltés dangereux depuis les menaces d'attentat et le meurtre du communaliste kaulth. Je ne vous apprends rien.
Alors quoi ? Vous auriez préféré que je reste à Kotios ? Que je la laisse salir mon nom, l’œuvre du Grand Kah ? Elle aurait profitée de ma popularité, les Sectionnels auraient été d’autant plus dangereux !
Et d’autant plus faciles à contenir qu’il y aurait eu un front uni à leur opposer. Estimable 2 et Drapeau Noir, ou Incroyable et Merveilleuse. Peut-être même un accord avec Caucase, qui aurait compris que c’était nous, la diplomatie normale,
ou la diplomatie voulue par cette exaltée ! Et vous, Meredith, vous êtes accourue, avez ouvert un contre-feu sans réfléchir une seule seconde aux implications, à la nature, la situation politique du Grand Kah. Vous avez fait imploser la modération politique, comme une sotte. Et maintenant vous refusez de revenir sur vos positions.
 »

Elle la fixait d’un air sévère, ou la tristesse dépassait largement l’agacement. Actée se passa une main sur le visage, et grogna simplement.

« Il n’y a plus de retour en arrière possible. Estimable 2 n’est pas en mesure de gagner. Vous pouvez le faire à condition de trouver de bons compromis à la Convention générale ; Ce qui signifie un programme moins modéré qu’il n’aurait dû l’être.
Vous avez accepté de venir ici pour me dire ça ? »

Actée commença par acquiescer, avant de s’interrompre. Elle semblait réfléchir. Meredith termina son verre, sans la quitter des yeux.

« Pas uniquement ça. Je ne soutiendrais pas votre campagne imbécile et je me moque de savoir par quel moyen vous arriverez à obtenir la confiance de la Convention.
Mais ?
Mais puisque vous manquez d’expérience politique, je veux bien vous prêter la mienne à une condition.
Les pleins-pouvoirs sur la diplomatie sont à exclure. J’ai mon propre programme.
Je veux le dossier Aumérinois, Pharois et Paltoterran. »

Il y eut un long silence, que Meredith passa d’abord à réfléchir, avant d’être interrompue par le soudain son de cloches. Des cloches qui résonnaient à travers toute la ville. Toute l’union, même. Les douze coups de minuit. Déjà des lanternes de papier s’envolaient des berges du lac, formant une somptueuse cathédrale de lumière, à laquelle s’ajouterait bientôt un remarquable feu d’artifice. Actée se plaça aux fenêtres, où Meredith l’a rejoint. Elles observèrent dans un silence contemplatif le ciel de la cité s’allumer, puis se remplir de fleurs, d’explosions ; de pétarades et de cris de joie.

« Bonne année, citoyenne.
Je l’espère. À vous de même.
Et pour votre propositions.
Oui ?
Nous en reparlerons.
Je vais me rendre chez Rai Sukaretto. Vous voudrez peut-être m’accompagner, il ne fait pas bon rester seule ici.
Soit. Je suppose que nous avons encore des choses à nous dire.
Tout à fait.  »

Dehors, les dernières fusées achevaient d'éclairer le ciel.
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RÉSULTATS DÉFINITIFS DES ÉLECTIONS GÉNÉRALES



Habemus concilium !


Après plusieurs mois de délibération, la Convention Générale a décidé d'accepter la mise en place d'un programme issu d'un accord de principe entre Défense et Union, porté par la citoyenne Meredith, et Paix et Développement, défendu par le citoyen Viktor Anastase Miloradovitch, dit Caucase. Ce consensus, loin d'être innatendu, a cependant été compliqué à développer. Notamment du fait du relatif équilibre de force entre les partisans des deux principaux programmes modérés. La question de la place à apporter aux idées radicales dans le prochain comité de Volonté Public a aussi été longuement discutée par la députation : si l'ensemble de la Convention acceptait la place et l'importance indéniable des idées révolutionnaires et interventionnistes dans la société Kah-tanaise, il convenait de trouver une configuration politique permettant au gouvernement confédéral de les intégrer aux programmes favoris sans pour autant que cela n'amène à un sabotage des ambitions modérées.

La configuration privilégiée a été celle d'un Comité de Volonté Publique dit Défense et Développement. Dors-et-déjà surnommé le "Comité de Renouvellement", les ambitions isolationnistes portées par les agraires de Caucase a été abandonnée au profit de la politique étrangère voulue par la citoyenne Meredith. Visant à créer un réseau d'alliances et un tissu économique rendant inenvisageable pour les principales puissances impérialistes d'attaquer le Grand Kah, sans pour autant couper ce dernier du monde. Cependant, les réformes structurelles souhaitées par la citoyenne Meredith, consistant entre-autre à proposer un nouveau texte codifiant les rapports entre la Convention Générale et les Communes, a été modéré au profit de réformes jugées plus pressantes, notamment sur l'attribution des aides confédérales aux communes les plus isolées et la modernisation des infrastructures du sud de l'Union. Enfin, et c'est ce qui fait de ce comité un genre de grand rabibochage des modérés pourtant si mal partis au début de cette période électorale, la citoyenne Meredith s'est clairement placée dans l'héritage de l'action du Comité Estimable, revenant sur plusieurs de ses propos les plus sulfureux quant aux erreurs du précédent comité de Volonté Public et insistant sur les récents succès de l'Union, notamment sur la fondation du Liberalintern et le miracle économique Kah-tanais.

Cette décision, qui n'allait pas de choix, s'est faite pour éviter l'autre cas de figure le plus probable : celui d'une adoption par la convention d'un programme de compromis entre celui porté par le citoyen Caucase et celui porté par la citoyenne Espérance, les deux partageant un même désir d'isoler l'Union, malgré des analyses politiques très différentes. Si un tel programme n'aurait pu être nommé par la Convention, encore largement modérée, qu'au profit de nombreux changement, la situation aurait tout de même poussée le pays dans une direction directement opposée à celle souhaitée par une grande partis des modérés d'une part, et la majorité des radicaux de l'autre.

La question de la représentation de la radicalité au sein du Comité a justement été traitée via un compromis élégant. Refusant de pactiser avec la Citoyenne Maiko, avocate du programme dit Sectionnelle et se réclamant justement de l'héritage politique kotioïte de la citoyenne Meredith, celle-là a ouvert aux partisans de l'interventionnisme politique et de la révolution permanente la possibilité d'un Comité de Salut Public ne rechignant pas sur ses obligations historiques. Cette formule floue, sans doute à dessein, semble faire du pied aux "jeunes kah-tanais", jeunes radicaux présents au sein du précédent comité et ayant largement manœuvrés la politique extérieure de l'Union. Cette approche fut accompagnée par quelques rectifications du programme Défense et Développement y intégrant les revendications des représentants communaux les plus militaristes et revanchistes, mais sous condition et dans des formes largement modérées par la nécessité du consensus. Cet accord fut jugé satisfaisant au point que la citoyenne Espérance, elle pourtant avocate d'un certain isolationnisme, revint sur les positions du programme Incroyable (et merveilleuse), dans un retournement surprenant mais pas inattendu chez les poseurs du Club des Sublimes, plus intéressés par les apparences et "l'aspect" de l'exceptionnalisme Kah-tanais que par une quelconque idéologie solide.

Notons que la question de la radicalité était d'autant plus centrale que l'une des raisons désormais bien comprise de la dissolution du Comité Estimable était la nécessité de discuter de la ligne militaire du Grand Kah en vue de la création d'un commissariat dédié à la question. L'influence de ce prochain Comité sur la question sera ainsi primordiale.

Le programme rectifié, intitulé Paix et Développement a donc été choisi par la Convention Générale. Après soumission aux communes, il fut révisé une dernière fois pour intégrer leurs demandes, puis enfin nommé pour de bon.

La composition du Comité de Volonté Public dit de Renouvellement est la suivante :

  • Meredith "La Voix" : universitaire modérée, héroïne révolutionnaire et légiste implacable.
  • Viktor Anastase Miloradovitch, dit Caucase, "l'avocat des communes" : grand représentant des communes les plus isolées et partisans de l’agrarisme.
  • Arko Acheampong "le chiffre" : économiste proche du club Confédération & Collaboration, a érigé tout le pan économique du programme Défense et Union.
  • Aquilon Mayhuasca "le radical" : proche du club des splendides, architecte du réarmement de l'Union et fervent révolutionnaire.
  • Kisa Ixchet "madame des pavés" : vétérane est barricade estudiantine proche du Club de l'Avant-Garde.
  • Styx Notario "la cryptique" : communarde reconnue, proche du syndicat des brigades, co-auteure de la théorie de la subversion moderne.
  • Rai Itzel Sukaretto "la princesse rouge" : amie des artistes, des pontes étrangères, des punks à chien et de tout ce qui prétend faire de l'art.
  • Sakeh Ngobila "l'ordonnateur" : influent élu des communes afaréennes, entre-autre nommé en vertu de ses discours anti-impérialistes modérés, jugés capables de parler aux sensibilités libérales.

Cette recomposition est d'autant plus frappante qu'on retrouve au sein du Renouvellement deux figures extrêmement importantes des jeunes Kah-tanais. Aquilon Mayhuasca et Styx Notario, bien qu'étant respectivement crédités de recomposition de l'armée du Grand Kah et de la refondation totale de ses services secrets, sont par certains aspects tenus responsables des dernières débâcles militaires de l'Union. Il semble cependant que le citoyen Mayhuasca ait été imposé aux par les radicaux, auprès desquels il est immensément populaire, espérant sans doute qu'il obtienne par ses pairs la mission d'organiser l'hypothétique futur commissariat devant s'occuper des affaires militaires. La présence de la citoyenne Notario est plus mystérieuse, mais a aussi soulevée moins de questions, sa nouvelle nomination s'intégrant dans une proposition visant à conserver plusieurs autres membres à leur place comme nous allons le voir.

La citoyenne Sukaretto a pour sa part été invitée à reprendre ses fonctions du fait de sa très large popularité auprès des communes et de ses liens à l'étranger jugés extrêmement précieux par la Convention. Elle est aussi considérée comme la plus plus à même de représenter les milieux culturels Kah-tanais lors des réunion du futur comité.

Enfin, on note la disparition du citoyen Maximus de Rivera, pourtant invité à conserver sa position mais l'ayant refusé, considérant que sa mission avait été celle du bon fonctionnement du comité précédent, mission qui était donc terminée, et celle de la citoyenne Actée Iccauhtli, que personne ne voyait quitter ses fonctions diplomatiques mais qui a expressément appelé à ne pas être nommée par la Convention. Des rumeurs laissent cependant entendre qu'elle conserverait des fonctions, encore inconnues, au sein de la Chambre Hyperstructure.

Comme convenu, les membres du nouveau Comité rencontreront bientôt ceux du précédent lors d'une cérémonie de passation de pouvoir publique, à laquelle suivra un discours de la citoyenne Meredith.

Union, gloire, liberté ou la mort !
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