
Même si cela faisait maintenant plus d’un an – 534 jours pour être exact – qu’elle avait été nommée « Protectrice de la Mährenie », et que les textes de sa circulaire perpétuelle servaient d’ossature à la législation de la province, elle semblait encore se considérer comme une simple capitaine. En tout cas, ni le titre ni le pouvoir ne lui étaient montés à la tête de façon particulièrement perceptible, et en lieu et place d’un grand uniforme faisant écho au pompeux de son titre, elle portait encore un uniforme de terrain. Pour elle c’était clair, elle était une soldate en déploiement. Son béret sur la tête, un brassard à l’image du drapeau de l’Administration inquisitoriale passé autour du brad, elle incarnait une forme d’ordre.
Lorsqu’elle émergea de l’hélicoptère qui l’avait amené ici, un gros appareil qui avait transporté les véhicule de combat d'infanterie dans les terres montagneuses de l’ancien duché, c’était entouré d’officier médicaux auxquels elle donna quelques dernières instructions, leur indiquant d’un signe les contours du campement de déplacés. Rapidement, le personnel de l’Égide, qui s’était entouré pour l’occasion de volontaires issues de la société civile, se mirent à décharger des caisses de matériel. Médicaments, ration de nourriture, habits chauds, tandis que leurs chefs prenaient contacts avec l’administration du camp, cherchant à coordonner l’aide.
Godeliève Thiers, accompagnée d’un aide de camp, se dirigea plutôt en direction de l’endroit où il avait été convenu qu’elle rencontrerait ses interlocuteurs Tchérins.
« Hm.
– Capitaine ? »
Elle pencha la tête sur le côté, l’aide de camp suivit son regard. Les tentes du camp, les enfants émaciés. Une population qui avait fui un pays en guerre qui, maintenant, avait muté au point d’être méconnaissable. La protectrice de la Mährenie secoue la tête.
« Ils ne sont pas au bout de leur peine. »
Elle n’ajouta rien. L’homme qui l’accompagnait savait à quoi elle faisait référence. Le conflit Kaulthique n’était pas terminé. Il était simplement gelé. La solution Mährenienne à la crise pouvait leur permettre de retrouver une forme de paix, mais… Impossible de dire quand ils pourraient retourner chez eux. Si cette notion avait encore du sens. La guerre pouvait durer, la séparation des deux kaulthies s’éterniser pour plusieurs générations. Il y avait un risque réel de voir la crise se prolonger.
Les deux s'immobilisèrent ensuite, attendant l'arrivée des représentants locaux.