CYCLE PRÉLIMINAIRE - KARAIMU
Empire du Burujoa / République Nationale-Socialiste de Maronhi
けしきは見えず
「頓て死ぬ
Rien ne dit
Dans le chant de la cigale
Qu’elle est près de sa fin.
Awara Kouyouri, seconde Gran Man de Maronhi depuis 2002, avait accepté cette charge déléguée par son grand père alors qu'elle n'avait encore qu'une vingtaine d'années. S'il lui fallut bien de l'aide pour faire ses premiers pas en tant que politique et cheffe d'État, elle apprit rapidement à quel point les exploits de ses aïeuls provoquaient chez ses collaborateurs le plus grand respect à son égard. D'autant qu'il est vrai, et cela depuis tant de temps qu'il est difficile d'en estimer l'origine, que les Maronhiens accordent généralement une grande importance au nom et au sang de ceux qu'ils servent. Un de ces rares matins de juin ensoleillé de saison des pluies en Maronhi, Awara quitta tôt sa résidence pour se rendre à l'aéroport international de Siwa. Accueillie par des officiels du gouvernement et de l'aéroport, elle fut escortée jusqu'au salon VIP pour se préparer pour son vol. Après une brève réunion avec son équipe, la Gran Man embarqua dans l'avion privé réservé pour son voyage officiel. Depuis le début de son mandat, il s'agissait de sa deuxième visite à l'étranger, la première ayant eu lieu en 2008 au Grand Kah suite à une réouverture des relations entre les deux pays voisins. Elle prit place dans un fauteuil en cuir confortable, d'un blanc immaculé, et attacha sa ceinture de sécurité. Une fois que la délégation et les conseillers qui l'accompagnaient furent installés, l'équipage ferma la porte de l'avion et se mit à préparer le décollage. Awara ferma les yeux et se concentra sur sa respiration pour se détendre avant le vol, quelque peu soucieuse de faire un tel périple, d'autant plus pour se retrouver à la merci des Burujoa. Quelques instants plus tard, le jet privé décolla en douceur et prit rapidement de l'altitude. Awara observa par le hublot l'aéroport rétrécir peu à peu au fur et à mesure de leur ascension. Aux yeux de ses collaborateurs, elle semblait se réjouir à l'idée de prendre personnellement part à cette rencontre, espérant sans doute sincèrement que cette dernière mènerait à une coopération fructueuse entre leurs deux pays.
« Dame Kouyouri, puis-je vous poser une question ? », intervint alors un jeune conseiller gringalet qui tapait du pied.
« À vrai dire, c'est ton travail de répondre aux miennes. Mais je t'en prie.
– Qu'espérez-vous vraiment de ce rapprochement ?
– Tu n'approuves pas ?
– Ce n'est pas cela. Vous avez fait au mieux pour garder vos distances avec le fatras international jusqu'ici. Et puis quoi ? Vous vous laissez entraîner si loin pour faire ami-ami avec l'empereur ?
– Ne vois-tu donc pas que les choses changent Jibashi ?
– En quoi ?
– Le temps n'est plus favorable à ce que nous fassions encore la tortue recroquevillée dans sa carapace. Se cacher ne sera d'aucun secours. Alors soit, je peux volontiers défaire ce qui a été fait et reprendre là où il faut pour avancer dans la bonne direction.
– Mais le peuple... Ce pourquoi il s'est battu...
– Crois-tu vraiment les discours de mon grand-père ? Je ne te savais pas si naïf. Les petites gens n'ont que faire de la politique. Croire et manger, voilà leurs seuls besoins », ajouta-elle finalement, la tête penchée arborant deux yeux inquisiteurs.
Jibashi se tut alors et n'osa plus intervenir avant la fin du vol. Au bout de vingt longues heures et d'une escale à Tairopototo, après que Awara Kouyouri ait préalablement pris une partie du temps de vol pour travailler sur des documents importants avant la réunion ainsi qu'une autre partie pour se reposer et de se détendre, l'avion s'approcha de l'aéroport international de Karaimu. Alarmée, la Gran Man se leva de son siège pour jeter un œil par le hublot. Bien que consciente de l'importance de la capitale burujoise, cela ne l'empêcha pas de se montrer impressionnée par la vue de la ville depuis le ciel. Au moment de l'atterrissage, elle serra les accoudoirs de son siège en anticipant le choc des roues de l'appareil sur le sol. Elle sentit une secousse légère, puis l'avion ralentit progressivement jusqu'à s'arrêter complètement sur le tarmac de l'aéroport. Elle défit alors sa ceinture de sécurité et se leva de son siège pour se préparer à sortir de l'avion. Elle s'étira un peu pour détendre ses muscles et prit son sac à main posé sur le siège voisin. Awara vérifia rapidement son apparence, ajustant son tailleur et sa coiffure, et se dirigea vers la porte de l'avion. Lorsque celle-ci s'ouvrit, elle descendit lentement les marches, le regard concentré vers le point d'arrivée afin d'éviter tout faux pas, accompagnée de ses conseillers et des membres de sa délégation. Elle s'arrêta au bas des escaliers de l'avion, prenant une grande inspiration avant de redresser la tête et de se diriger vers la délégation burujoise qui l'attendait à quelques mètres de là.