Panorama global et préliminaire sur les droits de l'Homme en Prima
Réalisé par le mouvement des Modernistes et sous la direction de Marie-Odile des Vaux-du-Fol
Introduction
Comme vous pouvez vous en doutez si, connaissant un peu le monde, vous avez entendu parler de Prima, ce pays n'a aucune connaissance des droits de l'Homme, et nous ne parlons pas seulement des articles, non, c'est le principe même de droits inhérents à l'Humain qui est n'est pas connus ni compris par la population. Sans parler des autorités, cléricales comme aristocratiques et même bourgeoises ( en partie), qui comprennent le principe des Droits Inhérent et Inaliénables mais qui le rejettent avec une rigueur absolue comme une hérésie, ce que les Droits Humains sont objectivement dans la pensée rétrograde de ces gens.
Le rapport que nous allons publier ici n'est pas le fruit de notre imagination, de notre hostilité ou même de notre ressentiment, il est simplement la mise en commun de nos histoires personnelles, à nous, opposants du régime en Prima, et pour la plupart en exil ou se cachant dans la quasi clandestinité. Notre méthode est simple, elle repose sur une technique éprouvée et solide : le croisement des témoignages. Évidemment, tout sera anonymisé pour ne pas mettre en danger les personnes qui seraient encore en Prima ou la famille de celles qui sont en exil.
En conséquence, je serais la seule, moi, Marie-Odile des Vaux-du-Fol que l'on connaît aussi sous mon ancien de religieuse :« sœur Julie » à parler à visage découvert. Je le fais parce que je suis en sûreté et que ma famille est d'une puissance telle qu'elle ne risque rien. Je parlerais donc pour tout les autres, dont cependant je vous assure l’existence, j'invite le comité central d'Amnistie Mondial a venir en Milouxitania et je vous les présenterais avec plaisir. Quant au non exilés, ils sont certes en danger mais ils l'assument et leur mission est la plus importante de toute : nous dire ce qui se passe vraiment dans ce pays. Pour ce qui regarde ces gens là, il faudra me croire sur parole. Notez cependant que Prima n'a pas besoin d’exagération de ma part pour être ce qu'elle est : une bulle rétrograde au milieu de l'Eurysie.
Les Droits de l'Homme en Prima, Article par Article
De l'article premier : Les hommes (humains) naissent et demeurent libres et égaux en droits. Aucun individu ne peut se permettre de priver d'autres individus du droit d'être libre et d'être égal à son prochain. En Prima, la naissance est le premier et un des principaux critères de discrimination. Ainsi nous appartenons à la caste de nos parents et cette caste va définir profondément nos relations sociales et notre éducation, en plus d'avoir des implications légales très concrètes. La naissance indique à quelles écoles vos parents vont pouvoir vous inscrire, les écoles pour la noblesse sont évidemment mieux dotées, quels comportements vous allez pouvoir adopter, les enfants de la noblesse jouissent évidemment de plus de droits ou plutôt de passe droit en terme comportemental que ceux du Tiers État. Et la situation se complique encore durant la vie adulte avec la couche ecclésiastique qui s'ajoute aux deux autres, elle même possédant ses interdits et ses privilèges.
En ce qui concerne l'égalité entre les sexes, évidemment comme on s'en doute, elle n’existe absolument pas, quel que soit votre age ou votre ordre, votre sexe changera du tout au tout votre condition de vie et vos droits. Une femme est toujours soumise à son mari ou défaut à son père. Seules exceptions notables : les abbesses et les matrones. Les premières dominent d'autres femmes comme des hommes auxquels elles se substituent et les secondes sont des veuves qui n'ont plus d'hommes pour les dominer mais qui dominent les filles de leur maison de la même manière qu'un patriarche.
En conclusion, il n'y a en Prima aucune égalité ni à la naissance ni après et sur aucun aspect, pas même la géographie puisque que le droit varie aussi selon les seigneuries et l'on n'est pas puni des mêmes choses à différents endroits, bien que les interdits, cependant, soient globalement les mêmes.
Article deuxième : Tous peuvent se prévaloir de droits, quelque soit son sexe, sa couleur de peau, ses idées ou ses croyances. Un humain reste un humain, le réduire à ses idéaux, ses croyances ou autres est un irrespect de la valeur humaine. En Prima tout le monde à des droits et des devoirs, cela dit, le problème c'est que ce ne sont pas les mêmes. Pour ce qui est des discriminations sur le sexe et sur l'Ordre, elles existent mais on ne peut pas affirmer qu'il existe une situation sociale dans laquelle on a pas de droit, en ce sens le début de l'article est respecté. En ce qui concerne la couleur de peau, c'est à dire la race en gros la race, elle n’existe pas dans le système de Prima. En revanche les êtres humains peuvent tout a fait être condamnés pour leurs idées et leurs croyances, notamment à mort. La noblesse peut battre voir exécuter quelqu'un de politiquement déviant, quant aux bûchers pour « mœurs contre-nature » ou « hérésie », je pense qu'ils sont bien connus de tous. Globalement le régime archaïque de Prima est ennemi de toute forme de pluralisme qu'il punit avec férocité pour ne pas dire barbarie.
Article troisième : Chaque humain à le droit à la vie et à la sécurité, peu importe son sexe, sa couleur de peau, ses idées ou ses croyances. Laissons de coté le racisme, il n’existe pas en Prima qui du reste n'est pas une terre d’immigration mais d'émigration. Globalement la sûreté contre les incivilités, les crimes et les délits est assuré en Prima, on peut se promener dans la rue, on n'est pas agressé, de même les rues sont propres, non taguées et non dégradées. Ceux qu'ils faut craindre ce sont les nobles qui peuvent vous tuer ou vous battre si ils vous trouvent séditieux, le clergé qui peut faire la même chose si il vous trouve hérétique, ou encore votre mari, si vous êtes une femme, qui n'a pas théoriquement le droit de vous battre mais qui jouit d'une certaine tolérance et dont les mauvais traitements sont difficile à punir. Il va de soi qu'il n'y a aucune sécurité, c'est tout l'inverse, il y a danger mortel, quand on appartient à ce qu'il est interdit d'être : moderniste clairement affiché, féministe, homosexuel, athée, matérialistes et autres choses semblables.
Article quatrième : L'esclavage est un déni de la valeur humaine. Aucun humain ne peut être considéré comme un objet auprès d'autres humains. Le système obscurantiste de Prima est féodal et non pas esclavagiste, jamais un être humain n'est considéré comme un objet. Si, de mon coté j'ai bien eu le témoignage de rescapés d'un trafic de paysans entre seigneurs pour l'exploitation de terres ingrates, il s'agissait clairement d'un acte exceptionnel qui aurait été condamné si il avait été connu des autorités. Soyons honnêtes et objectifs, l'esclavage en tant que tel n'existe pas en Prima. Même la prostitution est structurée par un système de corporation encadrant sa pratique et faisant des dames des compagnons et des maîtres.
Article cinquième : La torture est un aspect dégradant la dignité humaine et la personne. Toute forme de torture va à l'encontre des principes de justice et de civilisation. La torture est légale et courante en Prima. Elle n'est pas systématique et contrairement à ce que l'on dit elle n'est pas déterminante pour obtenir des aveux, cela dit elle est pratiquée une fois la culpabilité établie et ce, en vue d'obtenir le nom de complices, c'est un procédé dont, hélas, nous pouvons certifier l’efficacité. Je ne connais pas toutes les techniques employées et je ne suis pas certaines que cette enquête soit le lieux pour en donner le détail, peut être en parlerons nous plus à fond dans un autre papier.
Article sixième : Tous les humains sont égaux face à la loi. Aucun individu ne peut être supérieur à un autre par rapport à la loi. Cet article ne fait, hélas, aucun sens en Prima. La société est entièrement hiérarchisée, la noblesse sur le Tiers- Etat, le Clergé sur la population, un plus grand noble sur un plus petit noble, l'homme sur la femme, la femme perpétuelle mineur (tant qu'elle n'est pas veuve ou abbesse). Il y aurait beaucoup à dire, mais il suffit de dire cette incroyable banalité si l'on est primaine ou que l'on connaît ce pays : personne n'est égal devant la loi.
Article septième : Tout individu est considéré comme innocent avant d'avoir été reconnu coupable. Aussi curieux que cela puisse paraître ce principe des Droits Humains est valable en Prima. Totalement valable. Cela dit, et ce n'est pas rien, la reconnaissance de culpabilité peut parfois prendre des formes auxquelles le monde extérieur n'est pas habitué et qui manifestement n'a pas été pensé dans cet article. Un noble de fort mauvaise humeur passe à coté de vous et vous, vous ne faites pas attention et manquez de déférence, vous voila reconnu immédiatement coupable d'insolence et abattu par ce noble vexé. J’exagère un peu, mais nous en avons tous vu ou entendu parler des mises à mort sommaires faites par des nobles tordus ou désaxés de certaines campagnes profondes du Sud. Cela dit, stricto sensu, le noble en question a reconnu la culpabilité du roturier avant de l'abattre. Notons cependant que c'est rare, que la plupart des comtes restreignent largement des punitions et exécutions immédiates et sans appel et que Prima règle ses problèmes par des tribunaux davantage que par des jugements sommaires. D'ailleurs, la société de Prima est extrêmement procédurière et il n'est pas rare de croiser des personnes qui sont dans plusieurs affaires de justice.
Article huitième : Aucun humain ne peut être arrêté, exilé ou exécuté arbitrairement, sans preuves. Comme je l'ai déjà dit ça et là, dans pas mal de cas le jugement peut se faire sans preuves bien que les autorités tendent, sans toujours beaucoup de succès, à limiter l'arbitraire. Sur cette question le fait du prince (et de ses vassaux) est total, il fait ce qu'il veut, la parole vaut plus que les faits, il faut dire que le noble féodal (et à plus forte raison le Roy) est le juge, les juges des tribunaux ne le sont que par une délégation de sa part. Par ailleurs, Prima fonctionne beaucoup sur un régime tribal, on s’intéresse plus à qui parle pour vous et vous soutien qu'à la recherche de preuves. Lesquelles preuves sont tout de même recevables, soyons justes, mais ne l'emporte pas toujours les cabales et emballement populaires dont nous avons tous et toutes été témoins au moins une fois. Notons cependant que les tribunaux ecclésiastiques sont, quant à eux, d'une méthodologie moderne et accordent une importance centrale à la preuve et plus largement à la vérité mais ils ne jugent que des questions de foi et quelques questions de mœurs.
Article Neuvième : Chaque individu à le droit de se déplacer dans son pays et de choisir son lieu de résidence, il a également le droit de sortir de son pays et y revenir. Je suis bien placée pour vous dire que tout départ des définitifs (sauf fait du prince). Pour le reste, on peut légalement quitter le territoire, l'émigration est légale, l’immigration en revanche, c'est à dire l'arrivé en Prima, est interdite, non seulement pour les primains, mais aussi pour tous hors autorisation. Sinon, depuis quelques siècles le servage est abolie mais les gens ne bougent pas de peur de ne pas retrouver de terre aussi les mouvements sont marginaux et les populations sédentaires.
Article Dixième : Face aux persécutions, chaque individu peut demander l'asile à un autre pays. Oui, si on ne se fait pas attraper avant, on peut, comme moi au Milouxitania, partir en exil. Je soupçonne les autorités de préférer nous voir partir plutôt que de nous tuer, mais j'idéalise peut être. Nous autres, modernistes en exil, nous militons pour que ceux qui sont considérés indésirables en Prima soient expulsés dans des pays étrangers et non plus exécutés. Évidemment cela impliquerait que des autorités nationales négocient avec Prima... Notons que la chose est implicite pour l'heure, je suis bien placée pour savoir que les autorités ne cherchent pas à nous empêcher d'atteindre le Milouxitania, mais ça irait mieux en le disant.
Articles Onzième et Douzièmes : Chaque individu a le droit à une nationalité et à une reconnaissance administrative et juridique ET Nul ne peut se trouver arbitrairement retiré de sa nationalité. Prima ne crée jamais d'apatrides, hélas …. Par exemple, si je ne jouissais d'une protection des autorités de Milouxitania, l'on pourrait se saisir de moi et me mettre en jugement en Prima, quoi que je fasse je ne peux pas perdre la nationalité primaine. Je n'ai pas dit que je voulais la perdre, mais je ne peux pas. Aussi Prima n'est pas concerné par cet article.
Article Treizième : Chaque individu, peu importe sa race, son sexe, ses idéaux ou ses croyances, a le droit à la propriété. Que dire ? Je dirais simplement que si vous avez un problème avec les autorités relativement à vos idéaux ou vos croyances, la question de vos biens n'est pas la première que vous vous posez … Pour la race, je n'ai déjà dit, elle est sans importance, pour le sexe en revanche, la femme est soumise à l'homme dans d'administration de ses biens (exception faite de son douaire et de sa dote).
Article Quatorzième : Nul homme ne peut être privé de sa propriété arbitrairement. Je répondrais comme pour les jugements sans preuves, l'arbiraire est légale en Prima, on peut donc être légalement privé de ses biens arbitrairement par le fait du Prince (ou d'un comte ou d'un baron), cela dit, et je le répéte, la chose tend à diminuer à mesure que les tribunaux gagnent en importance, surtout pour les affaires civiles.
Article Quinzième : Chaque individu à le droit à la liberté de pensée et à la religion, chaque homme peut changer de religion, en nier certaines, ou en accepter. Absolument pas. Ils interdisent tout cela, la religion d'état et la structure de l'état doivent être tenues par la population, la religion doit être impérativement pratiquée, la structure de la société respectée. Les peines et les châtiments sont très lourds en cas de non respect de tout cela.
Article Seizième : Chaque individu bénéficie du droit à la liberté d'expression et de l'opinion. Aucun homme ne peut se trouver menacé, arrêté ou tué pour ses idées. C'est tout l'inverse, je n'ai pas besoin de développer ….
Article Dix-septième : - Chaque individu bénéficie du droit à la réunion ou d'appartenir à une association pacifique. Non, en dehors d'une corporation ou d'un confrérie, lesquelles ont des statuts conforment à l'esprit archaïque de Prima, le droit d'association n'existe pas.
Article Dix-neuvième : La volonté du peuple est le fondement de l'autorité des pouvoirs publics ; cette volonté doit s'exprimer par des élections honnêtes qui doivent avoir lieu périodiquement, au suffrage universel égal et au vote secret ou suivant une procédure équivalente assurant la liberté du vote. En Prima, rien de tout cela n'existe. Il existe des élections corporatives pour le troisième Ordre et un peu dans le clergé mais ce ne sont pas des scrutins universels et ça n'a concerne que la vie des corporations ou des maisons religieuses. A Prima, on est pas citoyen et on ne vote pas couramment.
Articles Vingtième et Vingt-et-unième : : Tout individu a le droit à un travail, de bénéficier du chômage, de posséder des conditions de travail satisfaisantes et de toucher un salaire égal pour un poste égal face à un autre individu peu importe sa race, son sexe, ses idées ou ses croyances ET Chaque individu a droit au repos peu importe sa race, son sexe, ses idées ou ses croyances (congés). En Prima, il n'y a pas de chômage, ceux qui n'ont pas de travail doivent opter pour l'asile de misérable ou l'émigration, et tout ce qui a trait aux conditions de travail, y compris les congés, relève des corporations, lesquelles ont un fonctionnement globalement démocratiques. Cela dit, pour ce qui est des discriminations sur le sexe, les opinions et les croyances, elles sont sur ce point comme sur les autres : Totales.
Article Vingt-deuxième : Chaque individu a droit à l'éducation peu importe sa race, son sexe, ses idées ou ses croyances. Le clergé assure une instruction fondamentale et générale à toute la population, pour tout les ordres et pour les deux sexes...Pour l'instruction professionnelle, elle dépend des corporations. Il va de soi que cette éducation est incroyablement genrée et gentrifiée mais elle existe et tout ceux qui en sont capables savent lire, écrire et compter ainsi qu'un métier au niveau de commis ou de compagnon.
Voilà, ainsi s’achève ce trop court panorama, mais aller plus à fond nous ferait nous perdre dans des détails inutiles pour saisir l'état global de la situation, cela dit, il est évident que chaque article mériterait que l'on s'y arrête. Vous pouvez compter sur nous, les modernistes de Prima, pour vous informer au mieux de ce qui se passe dans notre pauvre pays qui ne parvient pas à évoluer. Nous tenons aussi à informer les autres membres d'Amnistie Mondiale que la situation en Prima ne doit pas être le prétexte à ce que l'on tolère les insultes racistes et xénophobes qui frappent trop souvent les réfugiés primains ainsi que les trop nombreux et trop permanents actes d'exclusion et de marginalisation qui touchent bien trop souvent les immigrés de nationalité primaine qui pour la plupart sont paisibles et veulent s'intégrer.
La"lesbophobie systémique par invisibilisation" pratiquée en Prima (et dans les endroits où ses coutumes s'appliquent)
Réalisé par le mouvement des Modernistes et sous la direction de Marie-Odile des Vaux-du-Fol
Si il y a un sujet sur lequel on nous interroge souvent, et par nous j’entends surtout moi (ainsi que les autres lesbiennes primaines en exil), c'est bien celui de la lesbophobie particulière en vigueur implicitement en Prima. Comme je suis lasse de répéter continuellement les mêmes choses sans pour autant d'ailleurs être toujours bien comprise, et étant donné que ce sujet regarde aussi les droits fondamentaux et par là même Amnistie Mondiale, que l'on me permette d'exposer une fois pour toute ce sujet délicat, important et souvent trop mal compris.
Évidemment, je n'apprendrais rien à personne en disant qu'il n'y a en Prima aucun droit pour les minorités sexuelles et que « Queer », c'est à dire « Bizarre » en primain, est synonyme dans le Royaume au mieux de folie, sinon de satanisme, et ceux qui se trouvent dans la situation d'être condamnés par la parole publique ou populaire à porter ce qualitatif deviennent clients bien malgré eux soit de la psychiatrie soit du bûchers, tout cela dépendant en bonne partie de la personne concernée, sa famille, le lieu et le contexte de l'accusation. Tout cela est su et c'est une bonne chose car c'est bien l'exacte vérité concernant Prima. C'est exact, certes, mais ce n'est encore qu'une approche superficielle des réalités de mon pays de cœur et de sang (je tiens d'ailleurs à rappeler que les archaïsmes et horreurs que pratique mon pays ne donnent pas à ceux qui ne le connaissent pas le droit de l'insulter, lui ou son peuple, beaucoup de choses sont excessives mais Prima est tellement plus que ces vieilleries que l'on déplore toutes et tous).
Pour bien comprendre la politique de Prima en termes de mœurs, il faut bien comprendre que les vices et les vertus y sont compris par le prisme de la religion mais surtout de la Tradition. Pour le dire autrement, les primains ne connaissent que ce qu'ils peuvent rencontrer dans leurs coutumes, leurs œuvres poétiques ou religieuses ou encore leur histoire. Le lesbianisme n'est guère abordée dans tout cela, contrairement à la sodomie, ou mœurs sodomites, qui sont explicitées de nombreuses fois un peu partout.
Songez que les simples mots de lesbienne et lesbianisme sont presque en eux-même déjà un signe de ralliement et qu'ils sont presque inconnus de tous hors de quelques milieux très particuliers que mon inclination personnelle m'a faite naturellement côtoyer : pensionnats de filles, maisons religieuses féminines. Est-ce à dire que ces instructions sont lesbiennes ou majoritairement lesbiennes et que le reste de la société ne l'est pas ? Non, ce n'est pas ce que je dis. Il va de soi de soi que ces institutions sont majoritairement hétérosexuelles (et sur ce point aussi j'aurai des choses à dire si c'était le sujet de ce papier), mais si il est un endroit où le lesbianisme est surtout vécu et, en un sens et dans une certaine mesure, toléré, c'est bien dans ces établissements. Mais dans l'absolu vous vous doutez bien que nous sommes partout et qu'on peut nous trouver dans tout les milieux et conditions.
Pour ma part, je qualifierais la lesbophobie en Prima de modérée et surtout je la qualifierais de lesbophobie involontaire et modérée par invisibilisation. Le lesbianisme n'est pas tant persécuté qu'il n'est ignoré et inconnu, c'est bien d'ailleurs là la principale réticence, le principal frein, qui me pousse à ne pas trop avancer publiquement la cause lesbienne en Prima : éviter que l'on en viennent à persécuter mes sœurs d'inclination comme l'on persécute violemment et mortellement les gays en Prima. A ce sujet il faudra bien que j'écrive un de ces jours sur les fameux buchers, bien que, pour des raisons évidentes, c'est un sujet de que connais moins bien, moins intimement en tout cas.
Pour en revenir au lesbianisme, et sans vouloir entrer dans des détails touchant l'intime et devenant scabreux si on en parle trop publiquement, sachez que je suis bien placée pour vous dire qu'il est possible pour une femme lesbienne de bien vivre en Prima. Il faut pour cela être discrète, prudente et donner le change. La voix religieuse est fortement pratiquée en ce sens, les autorités monastiques féminines étant assez permissives en la matière du moment que tout reste secret. Je connais nombre de personnes, amies et compagnes de lutte, qui mènent ou ont menée une vie sexuelle et affective lesbienne épanouie et presque normale. Évidemment, cela implique de passer sa vie à mentir et se dissimuler, ce que font d'ailleurs très bien nombre de personnes que je connais ou que j'ai très bien connue, et qui sont parfois très éminentes dans la société, et que je ne nommerais évidemment pas pour ne pas les mettre en danger. Pour ma part je dois avouer que si je n'avais pas été acculée par quelques indiscrétions et maladresse de ma part (je ne développerais pas, en dehors de Prima l'on appelle ça la vie privée !), je ne serais sans doute pas partie en exil et j'aurais poursuivie ma vie de lesbienne active mais discrète, et sereine, en Prima.
Voici donc la conclusion de ce court mais, je crois, nécessaire rapport, ainsi que ma proposition d'action dans le cadre humanitaire d'Amnistie mondiale : Il ne faut absolument pas chercher à faire de la sensibilisation sur la question lesbienne en Prima, nos efforts doivent se concentrer sur l'entretien et l'amélioration des filières de sortie de Prima. La porte de sortie de ce pays d'émigration est grande ouverte, notre travail, que mon groupe mène déjà activement, est de faciliter l'installation en exil de celles qui, comme moi, sont en indélicatesse avec le pouvoir archaïque et réactionnaire de Prima. A ce titre nous tenons à remercier le Milouxitania pour l'aide inestimable qu'il nous apporte.