11/05/2017
22:44:06
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[TERMINE] Vinola, Lucette Dumorne, et un séminaire sylvois

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Si l'hémisphère nord avait pleinement sombré dans l'hiver en ce début d'année 2013, Sylva entrait en plein dans l'hivernage. Si Vinola espérait quitter le froid de sa moitié supérieure du globe pour aller dans l'été de l'hémisphère sud, il allait être surpris : c'était en plein dans la saison des pluies.
L'arrivée en avion avait une ambiance particulière, au milieu des nuages et des averses battant la carlingue. Le paysage visible par les hublots était teinté de gris, presque brumeux. Les étendues de forêts se dévoilaient progressivement à mesure que l'aéronef approchait, teinté d'un vert en apparence plutôt terne sous l'éclairage. Si le temps était impitoyable, le transport se posa malgré tout sans encombre sur la piste.

L'horloge de l'aéroport indiquait Vingt et une heures, soit huit heures plus tôt qu'en Velsna avec le décalage horaire. Après un vol de quatorze heures, il allait sans dire que la journée de Vinola était particulièrement longue et éprouvante. Il fut réceptionné par Lucette elle-même :

-Monsieur Vittorio Vinola, je suis Lucette Dumorne, c'est avec moi que vous avez correspondu. C'est un plaisir de vous voir, vous avez fait bon voyage ? Suivez-moi, une voiture nous attend, je vais vous conduire aux appartements que l'on vous a réservés.

Après un trajet dans le paysage éthéré de la ville nocturne sous pluie battante, dans laquelle les éclairages publics dessinaient des kaléidoscopes de lumière. Un conducteur amenait la voiture et ses deux passagers à l'hôtel où sera hébergé Vinola, les laissant déjà discuter du planning du lendemain. La chambre à disposition était plus que confortable et le service de l'établissement très agréable. Là, le voyageur eu l'occasion de profiter du décalage horaire dans le bon sens : il n'eut aucune difficulté à s'endormir et se réveilla le lendemain à cinq heures, comme s'il avait fait une très grasse matinée.


Le séminaire se déroula dans l'agora des bois de rose, construit au début de la dynastie éponyme. C'était à l'origine un bâtiment de pierre et de marbre dans un style gothique, tout en colonne, voute et vitraux, avec une toiture acérée en ardoise. Des extensions avaient ensuite été ajoutées, en brique et en bois, dans un style typiquement sylvois. Le bâtiment avait de nombreux usages et était loué à chaque occasion à la mairie : théâtres, concerts, expositions, et séminaire dans ce cas-ci.
Le bâtiment était richement décoré, de statue de bronze, pierre et bois, de tapisseries, et, à l'occasion, de divers écrits encadrés sur les murs çà et là.

La journée se découpait en deux phases : une première avec des présentations effectuées par chaque groupe de penseur, et une seconde avec un grand débat entre les différents intervenants pour revenir sur les différents points impliqués.
Durant cette première partie, furent présentés diverses visions d'un modèle démocratique appliqué selon les réalités du Duché. Diffusion de l'information, éducation des citoyens, prises de décision à l'échelle locale et globale, mais également sur le plan sociétal et professionnel, tant de sujets furent abordés par les branches communistes, collectivistes, syndicalistes et autres formes de démocraties promues par les différents intervenants. Se dessinaient déjà les oppositions entre des sociétés centralisées ou non, planifiées ou au contraire très libérales, proches ou éloignées du modèle capitaliste. C'est durant cette première partie que Vinola eut, s'il l'avait souhaité, l'occasion d'exposer ses ambitions en Velsna notamment sur la question du suffrage censitaire.
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Première intervention :

Devant une petite audience, Vinola partageait une scène avec plusieurs autres intervenants aux opinions bien différentes de ses vues que la plupart qualifieraient de très libérales, tant sur le plan politique que sur le plan économique. Mais cela avait le mérite de constituer un grand changement, de converser avec ces individus aux idées socialistes dont il avait une certaine méfiance et qui à Velsna, étaient souvent frappés de l’opprobre publique. La parole se passait de fauteuil en fauteuil, et lorsque ce fut son moment de prendre le relais, Vinola en vient en premier lieu aux politesses et aux présentations :
- Tout d’abord, je tiens à remercier l’invitation qui m’a été faite de participer à ces journées. Un grand merci au personnel et aux organisateurs qui ont fait un travail fantastique, de ce que j’ai pu en voir.
Mon nom est Vittorio Vinola et je suis dans le regret de vous informer que je vais devoir énumérer la liste de mes fonctions ronflantes à cette audience.


(rires)

Je suis membre du Sénat de la Grande République de Velsna, ancien ambassadeur de Velsna en Zélandia, et accessoirement, je suis actuellement le détenteur d’un tiers du pouvoir législatif, exécutif et judiciaire au sein de mon pays. Je m’explique, avant que vous ne commenciez à frémir de terreur en criant au tyran loduarien.

Comme les connaisseurs en géopolitique dans cette pièce doivent le savoir, il y a eu récemment des évènements à Velsna sur lesquels je ne m’étalerais pas. Et ces évènements ont conduit le Sénat à réactiver une magistrature dite exceptionnelle, crée précisément pour surmonter des états de crise internes ou externes et ce pour une durée de six mois. C’est ce que l’on appelle un Triumvirat, et par un concours de circonstances dont certaines m’échappent encore, j’ai été nommé membre de ce collège. Et pour une durée de six mois, moi, accompagné de deux autres magistrats partageons une situation de plein-pouvoir qui en théorie a été conçue pour régler tous les points de tension qui paralysent notre régime politique.

Et c’est à ce point où je suis censé vous dire que quelque chose cloche dans ce système, qui empêche de fait ce Triumvirat d’effectuer les réformes nécessaires à « réparer » notre pays : je ne suis pas du tout en accord politique avec les deux autres individus avec qui je partage ma fonction. J’ai la prétention de penser que j’ai identifié des failles de notre système qu’eux n’ont pas perçu, ou n’ont pas la volonté de résorber.

Pour ceux qui ne le savent pas ici, Velsna vit sous un système politique bien différent de ce que vous pouvez connaître. Si la Grande République n’est pas une dictature, loin de là, car aucun individu ou un petit groupe d’individus n’a la capacité d’assurer tous les pouvoirs sans rendre compte au Sénat, il ne s’agit pas d’une démocratie pour autant. Nous vivons dans une situation de suffrage censitaire, où le niveau de revenu d’un citoyen détermine l’importance de son vote. C’est en pratique beaucoup plus complexe que cela mais je vous passe les détails. Mais c’est là que se trouve mon principal point d’opposition avec mes confrères du Triumvirat : je pense que ce système doit disparaître pour que notre République retrouve son équilibre. Je m’explique.

Sans même évoquer la question d’éthique et du besoin naturel d’égalité en démocratie, ce avec quoi je suis également tout à fait en accord, je pense que le suffrage censitaire est une composante mortifère de notre système pour plusieurs raisons. Premièrement, j’estime qu’elle ne fait qu’éloigner les gouvernants des besoins réels de nos concitoyens car ils n’ont pour la plupart d’entre eux, aucun compte à leur rendre, ni aucun besoin de satisfaire leurs revendications politiques. Cette situation débouche sur des contestations sociales fortes. Sachez que chez nous, il n’est pas rare d’assister à deux voire trois manifestations dans la même semaine, et pour des raisons différentes. De manière générale, le suffrage censitaire a plongé notre pays dans une période insoluble de troubles civils, car les aspirations de ces individus ne sont pas satisfaites.

En second lieu, le suffrage censitaire part du principe que le mérite et l’argent ont un lien fondamental. Hors, je pense que ce n’est pas le cas. De fait, je pense que ce système sacrifie des talents dont nous n’avons pas l’opportunité de voir l’éclosion. Nous faisons ainsi une croix sur des forces vives tandis que nos voisins capitalisent sur cette classe moyenne éduquée d’où sortent régulièrement de grands esprits.

Dernièrement, il faut noter à quel point le suffrage censitaire a perverti les autres institutions de notre République. Ce système a de fait transformer notre Sénat en casino où les voix des citoyens s’achètent, et où les soutiens parlementaires s’obtiennent à coup de pots de vin. Et ces dernières années, un phénomène de concentration de richesses est venu aggraver encore un peu plus ce système qui est déjà moralement corrompu, car même parmi l’élite politique, de moins en moins de sénateurs ont les moyens financiers d’aspirer à la fonction suprême.

Pour conclure cette petite introduction de ma part, je ne vous conseille pas d’essayer ça chez vous.


(rires)

Si il y a des questions, n'hésitez pas.
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Les réactions furent très loin d'être hostiles envers l'invité. Après tout, des idées déjà très opposées avaient été exprimées, entre des gens incapables de se mettre d'accord. Et il y avait bien quelques libéraux parmi les intervenants. C'est le représentant présent du syndicalisme, Kévin Bleuazur, qui posa en premier une question à Vinola :

-Est-ce que vous qualifieriez la Grande République de Velsna de ploutocratique ? Après tout, l'influence politique est directement corrélée à la richesse, via des mécanismes officiels comme le suffrage censitaire, ou plus officieux comme la corruption et les pots-de-vin.

Lucette elle-même, qui avait libéré sa journée pour participer à ce séminaire, posa une seconde question :

-Comment s'est mis en place le suffrage censitaire ? Est-ce uniquement l'héritage d'une époque où dominait une certaine classe sociale, qui a alors établi des dispositifs pour assoir son autorité ? Ou est-ce que cela relevait d'un cheminement pratique, avec à l'époque un véritable bénéfice pour la société de Velsna ?

C'est sur un ton un peu plus inquisiteur que Josette Bagasse, partisane communiste, interrogea à son tour :

-Demander si ce modèle pourrait être qualifié de ploutocratique est intéressant. Mais, est-ce que nous ne pourrions pas nous demander si ce système ne serait au final très proche du modèle démocratique capitaliste que l'on retrouve ? La chose n'est pas officialisée, mais de grandes fortunes peuvent disposer de leurs propres médias et communiquer massivement sur des sujets pour influer sur l'opinion publics. Et s'il n'y a pas de suffrage censitaire institutionnalisé, la corruption reste toujours possible, avec toutes sortes d'intérêts indirectes et de politiciens au final sponsorisés par des individus fortunés.
À partir de là, la vraie question est de savoir si "juste" abolir le suffrage censitaire aura une réelle conséquence, ou si ce ne sera qu'un simple artifice sans conséquences réelles ?
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A la question de Monsieur Bleuazur qui se signala en premier par sa question sur la nature du régime politique en vigueur à Velsna, le triumvir Vinola répondit de suite après avoir distingué les mots justes d'un accent sylvois auquel il n'a guère l'habitude

- C'est une question très intéressante que vous me posez là. Indéniablement il s'agit d'un régime que vous qualifieriez de ploutocratique. Tous les mécanismes du système politique dans lequel je me suis"glissé" un peu miraculeusement, sont caractérisés par le besoin d'exclure par le plus de moyens légaux possibles une masse, qui donc de fait n'a pas d'autre moyen pour exprimer ses ambitions politiques que les manifestations et des formes de violences de plus en plus poussées. Ce mode de gouvernement peut fonctionner dans un pays où le niveau d'éducation et de conscience politique est faible, ce qui met le gouvernement au pied du mur. Car nous assistons depuis plusieurs décennies dans notre pays à une véritable montée en puissance d'une classe moyenne: cadres, ouvriers qualifiés, professions intermédiaires, qui a les moyens de s'instruire et d'échanger à l'étranger, et qui donc est animée par des perspectives politiques nouvelles. Alors que dans le même temps, cette catégorie sociale est coincée politiquement par le suffrage censitaire, qui verrouille de fait un système d'ascension sociale et politique. Je ne sous-estime pas les catégories modestes et leurs capacités de mobilisation, loin de là. Mais force est de constater que ce sont les classes moyennes qui sont à la pointe de la lutte contre le système censitaire en ce moment, car ce sont eux qui pensent avoir le plus à gagner de sa fin éventuelle. Alors oui: pour faire court, nous sommes définitivement en présence d'un système ploutocratique, qui s'assume comme tel et qui n'a jamais nié être autre chose. Car dans l'esprit des personnes qui l'ont conçu il y a plusieurs siècles, un système politique est plus stable si les individus sont issus du même milieu, animé par les mêmes objectifs et surtout, le moins nombreux possibles.

Et c'est là que je peux répondre d'une pierre deux coups à la question de Lucette, et en venir à la faiblesse fondamentale du système républicain velsnien: c'est un mode de gouvernement qui a été conçu à une époque où ce problème d'éducation que j'ai évoqué ne se posait pas. Je ne suis pas historien et je suis certain que beaucoup de sénateurs velsniens sont plus au fait que moi sur la question, alors je vais faire court. Le système politique velsnien est vieux, il est trop vieux et c'est là son problème majeur. Je ne sais pas si vous êtes renseignés sur la façon dont la politique se fait à Fortuna par exemple. Et bien dites vous que c'est un système parent crée à peu de choses près à la même période. Les hommes politiques velsniens sont animés pour beaucoup par une croyance en une sorte...d'immobilisme politique, et ils ont une sainte horreur du concept d'instabilité. Il faut vous dire que les derniers vrais ajustements de ce système remontent au XVIème siècle, et on peut remonter ses aspects les plus archaïques au IXème siècle. Je ne sais pas si vous vous rendez compte de la chose. Cela doit vous paraître aberrent...eh bien pour les sénateurs velsniens, c'est tout à fait normal de vivre au sein d'un mode de fonctionnement qui n'a pas changé depuis environ cinq siècles.

Pour finir, je me dois de répondre à votre interrogation sur la pertinence d'une démocratie libérale, madame Bagasse. Qu'on se le dise: je ne suis pas de votre bord politique, certes. Mais il y a une différence fondamentale entre le système dans le lequel je vis et celui que vous dénoncez à tort ou à raison (ce n'est pas l'important). Le système démocratique peut-être défaillant, il peut être aliéné par des lobbys, par la main mise d'une classe sociale ou de groupes d’intérêts privés. Tout cela est tout à fait possible et se voit même dans certains pays. Il suffit de regarder l'Empire du Nord devenir ami comme cochon avec Samara pour se rendre compte de la chose. Mais la différence entre Velsna et une démocratie libérale est la suivante. A Velsna, l'exceptionnel, l'aberrant, la circonstance qui fait qu'un individu "banal" et peu fortuné puisse jouer un rôle de poids dans son système...tout cela n'existe pas. Ce système ne laisse pas de place à l'exception, on ne peut pas tricher avec, on ne peut pas exprimer son mécontentement par les urnes, même pour un candidat médiocre, car la différence de valeur entre le vote d'un homme en 10ème classe censitaire et un autre en 1ère classe, fait que de toute façon, ce dernier est inutile. En démocratie capitaliste, les dés sont pipés, mais on nous laisse les dés pour jouer. Et rien que cela, je pense que c'est une différence importante. La fin du suffrage censitaire est fondamentale, croyez moi.

Je m'excuse si j'ai dépassé un certain temps de parole, si celui-ci existe, mais je pense qu'il faut vraiment se rendre compte de certaines différences.
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En souriant, Lucette fut la première à répondre :

-Non, vous n'avez pas dépassé le temps qu'il vous était imparti.

Si Vinola n'avait en effet pas dépassé son temps, il avait tout de même constaté l'enthousiasme de ses interlocuteurs régulièrement observés dans ce genre de débat. Entre les commentaires et interruption, cela demandait une certaine assurance et éloquence de mener à bout son argumentaire. Josette notamment, qui avait été particulièrement pénible durant l'intervention du velsnien, changea de ton pour être plus amicale quand ce fut à elle de parler :

-Ce que vous dites est assez intéressant puisque, tout aussi opposées sont nos idéologies, nous avons des constats communs. Vous aussi reprochez le manque de méritocratie en Velsna à cause du système immobiliste et ploutocratique en place (si je puis l'exprimer ainsi par clarté). Également, vous tenez les mêmes critiques vis-à-vis du modèle capitaliste et de ses faiblesses sur le plan démocratique. Là où nous divergeons, c'est sur les solutions apportées.

Kévin intervint à ce moment, voyant là l'occasion de promouvoir son mouvement :

-Le syndicalisme serait une solution plutôt intéressante pour Velsna qui permettrait de conserver son modèle libéral, et le concilier avec l'expression des citoyens. Les syndicats permettent de donner bien plus de voix aux honnêtes travailleurs, que ce soit sur le plan professionnel comme sociétal. Ce serait une alternative crédible aux manifestations.
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Vinola avait l'air de plus en plus à l'aise sur scène, les quelques mots de velsniens qui s'entendaient parfois dans son argumentaire se faisaient de plus en plus rares. Il se prenait à plaisanter bien davantage avec l'audience, ce qui est l'une de ses "marques de fabrique" lors de ses prises de parole au Sénat:

- Excusez moi encore de tous les mots que je prends, alors que finalement je vous explique un système qui au final paraît simple. Parmi les sénateurs on appelle juste ça une pause café à la buvette de l'assemblée. D'où je viens il n'est pas rare de devoir entendre des discours grandiloquents de trois heures pour justifier un changement de vitesse autorisée sur les routes.

(rires)

Lorsque Josette et Kévin interviennent pour tenter d'exprimer des désaccords fondamentaux sur leur approche de la démocratie libérale, Vinola répond avec ces mots:
- En ce qui concerne les syndicats, je pense que c'est une idée à creuser à Velsna, mais je pense qu'elle génère autant de potentialités que de problèmes. Ce mode d'organisation n'a jamais rencontré les conditions nécessaires à son bon développement par chez nous, pour la simple raison que d'autres types d'organisations occupent le terrain. Les syndicats existent déjà certes, mais ils ont une existence marginale et sont exclues des organes de décisions au sein des entreprises. Il y a pas de comités d'entreprises à Velsna par exemple, et les salaires sont négociés dans des collèges rassemblant des représentants des acteurs privés d'un secteur. Certains appelleraient ça un système corporatiste. Là encore, c'est un modèle que je considère comme ayant fait son temps et qui doit être réformer en profondeur. Il n'a pas été rare lors de ma carrière d'ambassadeur de Velsna en Zélandia, de devoir me reprendre à plusieurs fois pour expliquer la complexité pour les entreprises étrangères de devoir s'installer à Velsna, en négociant une convention avec les entreprises déjà présentes par exemple. Si je pense que le syndicalisme doit exister et que les salariés ont le droit à une réelle représentation, j'estime également qu'au même titre que le système ayant actuellement cours à Velsna, qu'il ne doit pas constituer un frein au développement économique de mon pays.

Car nous sommes dans un système d'économie-monde où les entrepreneurs vont où l'herbe est la plus verte, et je ne pense pas que des pays qui se considèrent comme des démocraties, comme l'Empire du Nord, Miridian, Teyla ou Tanska ne se privent pour favoriser le plus possible les entrepreneurs au profit des syndicats. C'est bien pour cela que je suis sceptique sur la social-démocratie. Après il y a d'autres modèles: les eurycommunistes de Loduarie ont trouvé la solution en centralisant toutes les décisions économiques et en limitant leurs échanges avec l'étranger pour ne pas être affectées par ce système d'économie-monde. Le Grand Kah et Communaterra ont trouvé la solution du municipalisme. Mais à titre personnel je n'ai pas le désir de vivre dans l'un de ces deux systèmes.
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-Remarques intéressantes, répondit Lucette, ce sont d'ailleurs des arguments qui même en Sylva sont exprimés à l'encontre du syndicalisme. C'est même l'une des raisons pour laquelle le collectivisme a bien plus de succès ici. Le syndicalisme entretient un certain statu quo en laissant en place les principales critiques envers le capitalisme, contre un semblant de représentation des travailleurs. Et la remarque sur la concurrence dans un marché libre est également pertinente, raison de plus encourageant les sylvois à se tourner des coopératives plutôt que de vouloir compter sur des entrepreneurs privés.
Cette dépendance aux investisseurs et propriétaires, qu'il faut à tout pris séduire à coup de défiscalisation voir subventions pour qu'ils restent, est vu comme une espèce d'assujettissement consenti par les mouvements collectivistes, d'où cette volonté de prendre l'initiative en développant notre propre économie autarcique.

Cette simple déclaration fit évidemment un important débat et, la fatigue se faisant ressentir parmi les participants, le ton commençait à monter à mesure que s'amenuisait la patience de tenir une discussion apaisée. Pour éviter que ces esprits s'échauffant brutalement ne finissent par embraser une joute verbale qui aurait initié Vinola au kréole sylvois, il fut convenu de faire une pause. Les différents intervenants se livrèrent alors à un apéritif (avec des alcools à disposition).
Les sujets changèrent pour passer sur des affaires banales et des actualités en dehors de la politique. Profitant de cette accalmie, Lucette prit un peu à part Vinola pour échanger. Articulant méticuleusement ses phrases.

-Vos interventions ont été remarquables. C'était intéressant de confronter nos idéologies, d'autant que, déjà que nous avons bien des désaccords entre partisans du même bord politique, c'était encore plus intéressant avec une orientation diamétralement opposée.
Votre vision du monde, de la politique et de l'économie est sincèrement intéressante et je ne doute pas un seul instant de vos aptitudes à représenter Velsna, peut être même à des échelons plus importants qu'à l'heure actuelle.

Elle siffla son verre de planteur, avant de reprendre.

-Beaucoup de politiciens sylvois, nobles comme élus, suivent l'évolution des évènements à Velsna. Vous faites partis des nations d'Eurysie que l'on qualifierait de... hmm, raisonnable au milieu d'une foule de dictature et autres pays instables. Et, inutile de tourner autour du pot, vous êtes le seul candidat plaidant pour un rapprochement avec l'OND. C'est déjà un élément très favorable pour vous et, vous êtes suffisamment intelligent pour vous douter que cette simple invitation à un séminaire était déjà un acte politique.
Dès lors, nous sommes tacitement d'accords dans la Haute-Assemblée pour contribuer à vos chances dans les sélections à venir. Un premier pas serait déjà de normaliser les relations de Velsna avec Sylva, en passant par vous. Nous pourrions ensuite établir à votre convenance des partenariats plus approfondis. Avez-vous déjà quelque chose en tête à ce sujet ? Nous avions à l'esprit d'importer massivement des produits de consommation velsniens, dans un premier temps.
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Vinola fut peut-être quelque peu bousculé par des détracteurs en fin de cette première partie de conférence, mais il était sénateur confirmé, et habitué à de telles situations. Au contraire, il était drôle de penser que les échanges qui avaient lieu aujourd'hui étaient plus civilisés que ce à quoi il était accoutumé dans la cité sur l'eau. Il profita du moment de pause pour répondre à l'organisatrice principale de l'évènement, et à ses interrogations:

- Vous me flattez, il ne faut pas, cela empêcher de nous améliorer. Mais je dois bien avouer, cela constitue un exercice rafraichissant. Cela m'a rappelé les cours de rhétorique. Vous devriez assister à une séance du Sénat de Velsna un jour, vous vous rendrez compte que l'audience que j'avais en face de moi était très courtoise. Des bons discours sont parfois indispensables pour ne pas déboucher sur un chaos généralisé. Je n'ai rien de particulier à l'encontre des formations syndicales, mais je tenais à exprimer des paradoxes qui les fassent réfléchir sur la pertinence de leur action.

En revanche, je m'étonne de votre intérêt, ainsi que de celui des sylvois pour la politique d'un pays si éloigné qui de plus, n'a que peu d’interactions économiques avec Sylva. Quoi qu'il en soit, c'est avec plaisir que je ferai mon possible pour faire peser mon poids dans la formalisation des relations entre nos deux pays. Nous sommes toujours à la recherche de partenaires commerciaux fiables en Paltoterra, et si nous échangons avec le Gradn kah...je dois bien avouer que leurs méthodes m'inspirent une grande méfiance.
Toutefois je tiens à préciser une chose: ma voix seule ne suffira pas, car comme je vous l'ai expliqué, il me faut l'accord d'au moins un de mes deux autres confrères pour enclencher un tel processus. Je tiens à vous rassurer: si je pense que cela prendra un certain temps, je devrais finir par en convaincre un. Un acte politique, je m'en doutais certes, mais je ne sais pas si dans l'immédiat, cela aura une quelconque conséquence à Velsna. Une vitrine pour exposer mes idées à l'étranger, cela est sûr en revanche. Aussi, je pense que nous devrions travailler ensemble dans le cadre d'une réunion officielle si nous voulons donner du poids à l'échange que nous avons en ce moment.

Si je devais vous donner des indications par lesquelles vous pourriez charmer le Sénat, nous avons l'habitude de proposer à tout partenaire économique des baisses de tarifs douaniers sur certains produits dans un premier temps, ainsi que des exonérations de tarifs d'amarrage pour nos acteurs privés. C'est en général le premier pas vers d'autres accords beaucoup plus ambitieux. Un échange inter-université est aussi toujours très apprécié: les idées s'échangent toujours plus vite que l'argent. Pour d'éventuelles importations, Velsna est avant tout une économie de service, mais nous disposons d'acteurs puissants dans l'industrie du luxe, de la construction navale et le transport maritime. Je pourrais peut-être vous mettre en contact avec des bons amis au sein des conseils d'administrations de ces groupes, qu'en pensez vous ? Et vous, que pensez vous que Sylva puisse offrir à Velsna ?
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Satisfaite de voir que Vinola allait dans son sens, et abordait même des points d'intérêts pour le Duché, elle poursuivit :

-Hé bien, je pourrais organiser une rencontre officielle avec la Duchesse ou la ministre des Affaires étrangères. Ce ne sera peut-être pas à la Haute Assemblée, mais aura tout le caractère formel requis pour donner de la crédibilité à vos arguments auprès de vos homologues.
Là, comme vous le proposez, nous aurons l'occasion de mettre en place des accords de libre échange avec les facilités douanière qui iraient avec. Les échanges universitaires seront très appréciés, Sylva accordant beaucoup d'importance à ce procédé qui est presque systématiquement établi avec ses partenaires. Ce sera d'ailleurs l'occasion d'autant plus exposer les citoyens de Velsna à des modèles sociétaux et politiques différents.

Elle prit un verre de jus de fruit, non alcoolisé cette fois-ci, avant de reprendre.

-Pour l'économie, Sylva aussi développe de gros efforts dans le naval. Si nos industriels ne seront pas d'accord pour importer des composants dans le domaine, ils seront ravis de faire des partenariats avec les vôtres pour développer conjointement de nouveaux éléments. Et concernant les produits de luxe, ils trouveront toujours leur place en Sylva.
Concernant votre économie de service, hé bien que diriez-vous de coopérations touristiques ? Des accords avec toutes les libertés de circulation requises, de façon à assurer l'accès de chaque citoyen à des vacances chez l'autre. Ce sera un axe supplémentaire pour exposer les velsniens à d'autres modes de vie public.
Et pour ce que Sylva peut offrir, nous sommes en train de massivement nous industrialiser et de développer les technologies de pointe. Que ce soit en électronique, outillage, mécanique, nous pouvons fournir de nombreux composants ou produits finis à votre économie. Nous entretenons également une coopération avec le Miridian et Teyla dans le domaine spatial, peut être Velsna serait intéressée à ce que nous lui vendions et mettions en orbite des satellites ?
Après il y a la question des armes mais... c'est plus délicat. Sylva a pour tradition de faire montre d'importants scrupules sur la question. La livraison effectuée dernièrement pour la Tcharnovie relève de l'exception, par l'urgence de chasser la Loduarie du Kolcovo où la guerre devrait sans elle être achevée. Autrement, nous n'en faisons qu'avec des partenaires de longue date et, de toute façon, nos industries sont actuellement mobilisées à moderniser notre armée.
Mais sur ces points déjà, est-ce qu'il y en a qui sauront vous donner du crédit en Velsna ?
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- Je suis bien d'accord avec vous. Il me faut une exposition complète et donc une véritable rencontre officielle. Vous n'êtes pas un État voyou, êtes une démocratie à bonne image sous tous rapports, ce qui devrait avoir au moins une conséquence sur l'image que l'on renvoie de moi. Néanmoins, j'ai bien peur que de simples accords avec un pays qui n'apparaît que peu dans les médias et la presse velsnienne n'aient une grande importance aux yeux de l'opinion publique. Mais cela devrait faire son effet au Sénat qui aime enorgueillir Velsna d'un statut de nation commerçante.

Nous avons d'ores et déjà des accords de coopération touristique avec des pays comme Esmea, ce type de traité ne nous est pas étranger et cela relèverait tout à fait du possible. Nous pourrions peut-être mettre au point un climat favorable au développement des compagnies d'aviation de nos deux pays dans le but de créer de nouvelles liaisons aériennes, ou bien une exonération des frais d'exploitation pour les entreprises touristiques s'installant à Sylva et inversement. Bref, nous avons déjà un arsenal juridique et commercial tout préparé pour ce type de tractation.

Concernant l'industrie aéro-spatiale, je ne pas dire que cela soit une priorité en ce moment pour notre gouvernement. Certes les travaux pour la création d'une agence officielle avancent, mais nous ne sommes pas pressés d'allouer un argent dont nous avons déjà cruellement besoin dans le secteur de l'armement par exemple, si je dois citer un secteur parmi ceux que l'on pourrait décrire en tension à Velsna. Mais ne vous en faites pas pour cette question, nous avons déjà des fournisseurs et notre carnet de commande est plein pour le moment. Je comprends que vos yeux soient sur l'Okaristan pour l'instant...ou le Kolcovo, étant donné que c'est son nouveau nom. Partout où la Loduarie passe doit être une priorité, je suis bien d'accord sur ce point. Cependant, je suis toujours ouvert à une proposition intéressante dans un futur éventuel si les relations entre nos deux pays basculeraient dans le domaine du partenariat.


Ce qui pourrait me donner du crédit à Velsna...eh bien un soutien officiel peut-être, assorti d'accords particulièrement médiatisés sur les points que nous avons évoqué et même plus, cela pourrait avoir un effet, même s'il cela serait mineur. Si vous voulez travailler cela plus en amont, je ne saurais conseiller au gouvernement de Sylva de contacter mon bureau.

Sur ce, il y a t-il une suite au programme de cette journée ?
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-Bien, nous sommes d'accords sur l'ensemble des points. Pour ce qui est de l'agenda de la journée, le débat va reprendre mais il est fort probable qu'il se recentre sur les positions des autres mouvements sylvois.

Le reste de la discussion entre les différents partisans politiques ne fut pas aussi mémorable que la première partie. Chacun campait ses positions et Vinola avait bien moins l'occasion d'intervenir, tant le sujet était maintenant moins tourné sur la question démocratique que la supériorité de la politique d'untel pour atteindre les objectifs souhaités. Définir lesdits objectifs était d'ailleurs une part entière du débat, la seule partie de cette seconde moitié où l'invité de Velsna eut l'occasion de toucher un mot, avant que les échanges ne reprennent sur le ton précédent.

Après ça fut tenu un diner collectif assez copieux, tandis que Lucette prit le temps d'organiser pour le lendemain même une rencontre avec la Duchesse Alexandra Boisderose. C'est après une nuit de repos bien mérité (d'autant que le décalage horaire se faisait toujours sentir) que Vinola aborda cette troisième journée. Là Vinola eut quartier libre pour visiter la capitale, avant d'initier le rendez-vous avec la matriarche de Sylva en début d'après midi.

C'est à l'Ambassade des Mahoganys que se fit la rencontre, bâtiment imposant et luxueux dédié à l'ensemble des affaires étrangères. En plus de l'architecture déjà chaleureuse, des habillages de bois et des œuvres d'art donnaient une ambiance très apaisée au petit salon où se tenaient les discussions. Que ce soit des scènes oniriques de paysages sylvois, ou des peintures abstraites avec des lignes douces et des couleurs froides, les tableaux aux murs étaient poignants et appelaient à la rêverie.
Après diverses politesses d'usage et discussions sur les peintures, furent abordés l'ensemble des points évoqués avec Lucette durant la journée précédente. Après avoir énuméré les différents sujets avant qu'Alexandra ne demande à Vinola s'il avait des ajouts à faire :

-... ainsi que des accords touristiques, académiques et économiques. Bien, ce sont des points très intéressants qui contribueront aussi bien à l'intérêt de chacun qu'à un rapprochement mutuel.

Elle présenta des ébauches écrites de ces accords évoqués, somme toute standard avec les spécifications habituelles.

-Je vous laisse déjà consulter ces résumés. Est-ce qu'il y a des éléments d'importance à clarifier selon vous pour assurer une entente solide ? Que ce soit par rapport aux spécificités velsniennes ou des points qui pourraient être approfondis, je vous invite à suggérer tout ce qui aurait de l'importance.
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Une fois arrivé au siège du gouvernement et les salutations protocolaires effectuées auprès de la Duchesse Boisderose, les deux s'entretinrent sur les différents aspects qu'un traité aurait à rapporter aux deux parties. Lorsque la duchesse lui demanda les détails d'autres demandes, Vittorio lui fit parvenir un document typiquement velsnien: un traité de coopération économique:

- Excellence, je me permets de vous donner ceci. Cela vient directement de Velsna, tout chaud. J'ai eu le temps de contacter mon bureau et nous avons eu le temps de travailler sur des propositions. Lisez vous même. Si vous avez la moindre interrogation ou demande de rajout, n'hésitez pas. Toutes les clauses de ce traité sont négociables.

Vittorio Vinola a écrit :
Traité de coopération économique et de non-agression Boisderose-Vinola




Préambule :
Par ce présent traité, les représentants du Duché de Sylva et de la Grande République de Velsna s'engagent à respecter les termes suivants pour une durée indéterminée dans un esprit de coopération et d'entente commerciale durable:

Article 1 :
Le Triumvir Vittorio Angelo Vinola et la Duchesse Alexandre Boisderose s'engagent à encourager la réunion d'acteurs économiques de leurs pays respectifs et du secteur concerné en vue d'une entente impliquant des accords de branche concernant des baisses de taxes de douane, et devant permettre l'implantation d'acteurs privés des deux parties sur leurs territoires sans mettre en danger leur écosystème économique.

Article 2 :
Les deux parties s'engagent, dans la lignée de l'article 1, à octroyer à l'autre partie un privilège exclusif de tarif de douane allégé de l'ordre de 20% le standard du réseau routier, fluvial et portuaire des deux nations.

Article 3 :
Les parties s'engagent à développer des services facilitant l'existence des ressortissants en circulation et de la diaspora installée définitivement dans l’État de l'autre parti (développement de services linguistiques, lycées étrangers etc...).

Article 4 :
Les parties s'engagent dans la création d'un programme d'échange étudiant, en facilitant l'accès aux filières et écoles de leurs nations respectives sur le plan financier et culturel. Les deux parties doivent se donner les moyens financiers de telles mesures.

Article 5 :
Les deux parties s'engagent dans un pacte de non-agression à durée indéterminée.

Article 6 :
Dans l'éventualité d'une agression extérieure de la Loduarie communiste, le duché de Sylva prend l'engagement, à défaut de pouvoir apporter une aide matérielle à la Grande République de Velsna, à procéder à des condamnations à l'international de l'attitude des dirigeants de la Loduarie.

Article 7 :
Le Duché de Sylva et la Grande République de Velsna s'engagent à garantir à l'autre partie une exonération totale du droit de mouillage et d'amarrage, illimitée dans la durée, ce dans le but de garantir un développement plein et non bridé du commerce entre les deux Etats.

Article 8 :
La Grande République de Velsna et le Duché de Sylva s'engagent à l'ouverture de la liaison aérienne suivante par le biais d'acteurs privés ou public et à la multiplication des dessertes sur cette ligne. Un audit sera effectué dans les deux pays afin de déterminer les deux compagnies qui auront la charge d'exploitation de la ligne (une compagnie velsnienne, une compagnie sylvoise)
Lignes aérienne demandée :
Velsna - Mahoganys

Article 9 :
Les parties s'engagent à n’émettre aucune taxe d'exploitation aux entreprises investissant sur la liaison aérienne sus-nommée afin de garantir l'attrait économique de ces investissements, ce pour une durée de 10 années révolues.

Article 10 :
Les parties s'engagent à favoriser l'implantation d'entreprises hôtelières et d'agences de tourisme sur leurs territoires respectifs et à n’émettre aucune taxe d'exploitation aux compagnies concernées, ce pour une durée de 10 années révolues.

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Alexandra prit minutieusement le temps de lire chaque ligne du document qui, à son grand soulagement, était assez résumé et loin des standards de l'OND en terme d'épaisseur. Un conseiller administratif l'accompagnait dans la tâche, prise très au sérieux.
Le premier point à frapper les deux fut l'entête et l'article 5 : Un pacte de non-agression ? Pourquoi Velsna en voyait l'utilité ? Craignait-elle une guerre avec Sylva ? Ou était-ce simplement une coutume politique typique du pays ? Elle préféra là mettre cette maladresse (selon les standards sylvois) sur le compte de l'incompétence plutôt que de la malveillance.
Vinrent ensuite toutes les questions d'allègements fiscaux pour encourager l'implantation d'industries. C'était inévitable pour passer ces accords mais à l'heure où Sylva augmentait ses impôts, elle voyait déjà venir les réponses outrées des membres de la Haute-Assemblée.
Et enfin l'article 6 lui fit au début hausser un sourcil, jusqu'à ce qu'elle lise la suite. "Condamner sans rien faire, voilà qui est dans les cordes du Duché".

-Bien, l'ensemble des termes sont approuvés par le Duché, il y en a juste un que je souhaiterais proposer : mettre en place des facilités sur la question des échanges culturels et médiatiques : films, musiques, livres, tout ce genre de chose. Cela nécessiterait essentiellement de respecter les règles en vigueur sur la question, et mettre en place des organismes de traduction si nécessaire. Qu'en pensez-vous ?
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Devant la perplexité de l'interlocutrice, Vinola essaya de rassurer (et de se rassurer):

- Certains articles pourront peut-être vous sembler incongrus ou inutiles. Mais ce n'est pas le cas, du moins je l'espère. Prenez l'article qui établit le devoir de condamnation diplomatique de votre part en cas d'agression. De prime abord cela peut paraître tout à fait futile, mais nous comptons sur le fait que votre voix à l'international puisse peser, et de fait nous pensons que c'est le cas. Nous nous faisons guère d'illusions sur votre capacité à nous fournir toute autre forme d'aide: vous êtes beaucoup trop éloignés du théâtre d'opérations et si drame il y a , nous savons pertinemment que vous arriveriez bien trop tard, tout en ayant ni la conviction ni les moyens d'être efficace. Disons que pour le symbole, il est toujours bon d'avoir l'appui d'une puissance ayant un rôle important sur la scène géopolitique mondiale.

En ce qui concerne un pacte de non agression, là aussi c'est une forme de routine qui garantit au Sénat de Velsna un traité réussit. Nul doute que nous n'aurons jamais l'usage véritable de cet article. Bref, pour le spectacle, il est toujours bon d'avoir quelques cartes dans sa main, et à Velsna il faut toujours s'assurer que le spectacle continue.

J'entends bien là l'oubli que nous avons fait en matière de politique culturelle. Votre proposition d'ajout est pertinente. J'attends donc votre proposition d'article à inclure dans ce traité, car pour l'instant je trouve encore cela assez flou. Concrètement, quelles actions voulez vous effectuer afin de promouvoir la diffusion mutuelle de produits culturels ?
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-Bien, merci pour ces éclaircissements, nous pouvons garder les deux éléments. Monsieur Louis, je vous laisse formuler cet article ?

Loin d'être son domaine de compétence, tout ce qui touchait au droit ennuyait profondément la Duchesse qui le déléguait dès que possible, évitant ces excès de formalité dans lesquels elle se perdait.

-Oui madame. L'article pourrait prendre cette forme : Les partis s'engagent à laisser circuler librement les œuvres culturelles de leurs pays, dans la limite du respect de lois en vigueur (droit d'auteur, liberté d'expression et interdiction du négationnisme ou appel à la haine, et cætera).

-Bien, cela vous semble cohérent, monsieur Vinola ?
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