Posté le : 07 avr. 2024 à 23:42:20
18976
CAXTA
Création : 01/05/1843
Dates clés : 28/09/1949 (devient la première société spécialisé dans la création de vêtements de luxe)
Fondateurs : Monoclior Caxta
Forme juridique : Société anonyme
Action : Caxta Valorem
Slogan : Vivre à travers son style
Siège social : Barba (Stérus)
Direction : Coriolanus Caxta
Actionnaires : Coriolanus Caxta 100 %
Produits : malles, sacs et bagages, ceintures, lunettes, montres, souliers, joaillerie, mode, prêt-à-porter masculin et féminin, parfums.
Sociétés mères : Unione et liberta
Activité : Vêtements de luxe, maroquinerie de luxe, joaillerie, parfumerie etc...
Effectif : 5 000 employés environ.
Biographie
.
Monoclior Caxta est un révolutionnaire pas comme les autres. S'il en possède certains traits - regard intense, barbe de bandit, tempérament fougueux -, son inclination pour une extravagance tout impériale, qui le porte au rang des hédonistes les plus accomplis du monde de la mode, suffit à souligner l'aspect contradictoire d'une telle comparaison. Au départ, le nom de Caxta évoque plutot un mode de vie Ancien Régime sous l'empire de Stérus. Mais peu d'événements sont moins prévisibles qu'une révolution et, sur ce terrain, Monoclior n'a rien à envier à Gabrielle Millenia, Cristiano Harnepus, Serena Fiducial, Hernesto Dingono ou Ilio Justurio, outsiders étrangers au monde de la mode, surgis de nulle part pour en réécrire l'histoire.
Pour lui, « un créateur de mode se doit d'enfreindre les règles et de renverser les barrières ». Et c'est en empruntant cette voie qu'il enrichit la mode d'une nouvelle grammaire, comme l'ont fait avant lui Gabrielle, Ilio et toutes ces figures qui ont su s'éloigner des chemins balisés et faire briller leur œuvre d'un éclat subversif.Chez Monoclior, la subversion drapée d'humour et généreuse d'esprit embrasse à pleine bouche la corporalité et la sexualité. Il teste avec bonheur les limites du goût, mettant au passage le snobisme de ses détracteurs à nu.
Monoclior a le défi joyeux. Omnivore, il assimile la culture la plus élitiste comme la plus populaire, incorporant simultanément la rigueur du classicisme, les mosaïques byzantines, l'art Renaissance, l'opéra et le ballet, autant que les excès d'une pop rococo et les scoops des tabloïds. Amoureux sans complexe de la célébrité, il courtise les stars du cinéma comme du rock qui le lui rendent bien, des Presidents de république à la famille consulaire. Toutes ces qualités font de Monoclior concurrence seulement par une vieille connaissance, Lucia ferdina la dame Loyale d'un monde de la mode que les années d'aprés empire ont vu se transformer en cirque planétaire.
Sans surprise, les controverses pleuvent. À l'entendre marteler que « la seule chose vraiment choquante, dans la vie, c'est la violence », on entrevoit la vigueur des critiques qui n'ont jamais manqué d'accueillir son travail. Nul, cependant, ne peut imaginer à quel point son propos est prémonitoire. En aout 1967, après avoir présenté une collection haute couture inhabituellement sombre et solennelle à Barba, il regagne la Casa patriae , sa demeure dans le Catloma, pour s'y reposer. C'est sur les marches du perron qu'il est abattu, le matin du 21 aout, par un tueur à la chaîne. Monoclior avait cinquante ans.
Bien sûr, Monoclior ne vient pas de nulle part. Son frère Fabio, et son fils Coriolanus et lui sont nés Sebeda du Monthor du sud, port situé à l'extrême sud de la grand république autonome. Comptant parmi les premières colonies des péres fondateurs, venu du sud ouest de l'eurysie, Sebeda - nommé Magnat temporalis par les Romaniques était autrefois le centre névralgique, économique et politique de la région. Par la suite, l'équilibre des pouvoirs se décalant vers le nord, le passage du temps s'est ajouté à l'isolement géographique pour faire de la ville un trou perdu dont le seul lien terrestre avec le reste de la fédération a consisté, jusqu'en 1946, en une simple route à une voie. Le Monthor du sud, certes, est d'une beauté naturelle et sauvage. Y brille ce soleil perpétuel dont le sud du pays a le secret, et les magnatias qui bordent le front de mer embaument de leur parfum doux et sensuel la promenade du soir des habitants de Sebeda. Mais la région entière passe pour indécrottablement provinciale aux yeux des Stérusiens, et les rares films des plus grandes productions projetés dans les trés rares cinémas du coin n'offrent qu'une maigre compensation à l'ennui des CAXTA. Ces distractions, entrouvrant des fenêtres sur des mondes autres, ont cependant pu nourrir les envies d'évasion du jeune rêveur qu'est Monoclior.
Peut-être comprend-il alors que passer de l'autre côté du miroir nécessite de l'entêtement et... un certain iconoclasme. L'iconoclasme, Monoclior l'a dans le sang. Très jeune, son grand-père maternel, Matenorio (en mémoire duquel il a été prénommé), rejoint le parti imperalis, ancêtre du parti traditionnaliste stérusien. Un tel penchant pour la politique impérial a de quoi scandaliser la république plutot social du ùmonthor du sud. Les deux homonymes partagent un don pour la provocation. Et Coriolanus fera preuve, son tour venu, d'un goût affirmé pour les extrêmes. L'histoire des CAXTA possède une indéniable dimension opératique, de leurs débuts modestes dans le monthor du sud aux glorieux sommets d'un empire mondial de la mode, de la mort de Monoclior au baptême du feu de Coriolanus a qui, lui succédant, ajoute au drame une coda de rédemption et de renaissance
- séquelle contemporaine d'une saga familiale du Quattrocento, digne des Carmieni ou des Bertinzlli. Monoclior, comme ses illustres prédécesseurs, commandite suffisamment de portraits aux plus grands artistes pour immortaliser ses proches et se célébrer lui-même. « Ce qu'il y a de bien, avec la famille, dit-il volontiers, c'est que se disputer a six heures du soir n'a jamais empêché de partager un bon diner à huit heures. »
Monoclior incarne l'idée selon laquelle toute création est, d'une manière ou d'une autre, autobiographique: un temps retrouvé, une forme de thérapie, l'exorcisme de vieux démons. Son père, Lino, est vendeur d'électroménager; sa mère, Charmina, styliste réputée à la tête d'un studio de quarante-cinq couturières, possède également une boutique où sont vendues ses créations. Son fils, peu attiré par les études, fuit le collège pour se réfugier dans son atelier, et y apprend en observant.
Après avoir arrêté l'école, il se met au service de celle qui « se signe toujours avant de commencer ses découpes ». Le couturier chérit tout particulièrement certains souvenirs, comme celui où il revoit sa mère draper une dénommée Signora dipeperoni dans du velours noir. « Maintenant, elle va raccourcir l'avant, laisser plus long derrière et transgresser les règles, faire quelque chose d'audacieux. »
Ce sont de tels gestes que lui-même entend perpétuer au long de sa carrière.
En janvier 1989, lorsqu'il décide de lancer sa propre collection de haute couture, il l'intitule « Atelier ». Il explique alors avoir choisi ce nom pour se démarquer d'un certain nombre d'habitudes aussi ancrées que des traditions. « Je trouve assez ridicule de se déplacer en Concorde et de fabriquer des tenues à la manière du xixe siècle. » Mais on peut aussi voir dans ce titre un somptueux hommage au creuset que constitua, pour lui, l'atelier de sa mère.
Avide d'expériences et de sensations, Monoclio trouve l'inspiration partout.
La légende CAXTA veut que Chamina ait habillé les « professionnelles » de Sebeda, qui impressionnaient son fils par l'impudence de leur style: leurs jupes crayon, leur amour de la couleur, les broderies d'or et les pierres colorées qui enjolivaient leurs tenues. Plus tard, lors de sa première visite à Leonis, en 1946, il s'éprend de la manière dont s'accoutrent les gamins des environs, « combinant des éléments romantiques avec du cuir et des chaines ». De retour au monthor, il s'inspire de ce mélange dans une collection qu'il dessine pour Beclio.
C'est son premier grand succès.
Braver l'orthodoxie, telle est la voie des iconoclastes. Monoclior aime détonner, depuis ses debuts, quand son recours à l'asymétrie témoigne déja de son affection pour l'imperfection intentionnelle. Après avoir joué des connotations punks du cuir et des chaines, il en adopte bientôt la dimension SM. Au début des années 1990, son flirt avec le bondage - il sangle les corps de ses mannequins - donne lieu à la plus controversée de ses propositions. Celle-ci est assez éloignée de ce que l'on appelle habituellement « haute couture », et beaucoup lui en tiennent alors rigueur. Avoir réussi à introduire des éléments aussi inattendus dans le vocabulaire de la mode n'est pas le moindre de ses exploits. Ses créations ne brillent pas par leur subtilité? Qu'importe : les cuirs aux reflets sensuels, les imprimés de soie tape-a-l'œil, les pièces savamment brodées de toiles de grand peintre et de couvertures de grands magasines n'en accèdent pas moins au statut de nouveaux classiques.
Son arme secrète réside dans sa maîtrise des savoir-faire de la mode.
L'incontournable Christina Felice, de Rocolo "grand magazine de mode du pays), peut ainsi écrire qu'elle n'a jamais vu quiconque arranger une robe aussi adroitement ni aussi rapidement que lui, c'est-à-dire comme seuls les vrais couturiers savent le faire. Lui aime dire qu'il a acquis cette technique toute particulière en observant le travail de Chamina auprès de ses clientes. Mais le tombé ne fait pas tout, il y a aussi la coupe - et l'innovation constante. La quintessence de CAXTA, on la trouve dans un tissu onduleux en maille de métal alliant art et technologie. S'inspirant des gants portés par les bouchers, Monoclior crée, avec l'aide d'un artisan eurysien, une maille suffisamment fine pour draper le corps, et consistante pour conserver sa forme.
L'effet en est sculptural, à la fois classique et avant-gardiste. La matière s'ancre dans un passé lointain pour anticiper un monde nouveau.
Le logo de CAXTA représente la tête du lion de némée,de la mythologie romanique/héllénique dont les cheveux sont une criniére et dont le regard change les hommes en cadavre ambulant. Son lion, Monoclior le trouve en 1961 sur le heurtoir de la porte cochère du palazzo de la montagna Riclés, à Yan, devenu par la suite sa propre maison et le siège de son entreprise. Cette figure - classique, séductrice, mortelle -, outre qu'elle lui rappelle les temples romanique du monthor du sud, apparaît immédiatement au jeune créateur comme la déclaration d'intention idéale. Il lui incorpore par la suite d'autres motifs classiques, telle la frise héllénique que l'on retrouve sur tant de vêtements CAXTA. Ajoutez à cela des notions de peintures , les prostituées de Sebeda et le plastique de la couture pop la plus futuriste, et vous obtiendrez le monstre du Frankenstein de la mode qu'est Monoclior.
Le créateur prend la tête d'une longue lignée d'artistes qui, chacune et chacun à sa manière, tissent en retour un lien tout particulier avec lui.
Bien avant d'accéder aux sphères de la haute couture en 1969, il voit plus de vingt expositions muséales lui être consacrées. Collaborant avec des théâtres, des opéras et des compagnies de danse partout à travers le monde, il se compare volontiers à l'un de ses célèbres compatriotes, le fondateur Enrico cornogelio qui, comme lui, a su « traverser et mélanger les cultures ». Son processus créatif distille des références éclectiques, allant du chorégraphe Jean Duchardin au dramaturge Pierre mimai en passant par l'écrivain Gerard deuxpardeux ou le photographe Francois poland.
Ce dernier nous ramène a l'atelier de Chiamena, lieu séminal s'il en fut. Monoclior, adolescent, trainant dans le studio, feuillette des magazines de mode et tombe sur les clichés du photographe Galine Nilega. Le gamin adore ces images, au point qu'au moment de lancer sa propre marque, il dépense l'intégralité du budget communication prévu en engageant Galine pour sa première campagne publicitaire, en 1959. La relation entre le photographe et CAXTA va durer vingt ans. « Il faut maîtriser ses classiques avant de pouvoir se lancer dans les trucs vraiment marrants », observe le jeune Monoclior avec lucidité. Et en effet, si les premières campagnes signées
Galine Nilega reflètent ce que les tenues peuvent avoir de plus classiquement discret, Monockior se lance rapidement dans les « trucs vraiment marrants », le langage photographique de Galine évoluant tout au long des années 1960 pour aboutir aux splendides enchevêtrements polymorphes d'hommes et de femmes de leurs dernières campagnes. D'un érotisme sauvage propre à repousser les limites de la bienséance, ces publicités incrustent dans l'imagination populaire l'idée d'une mode CAXTA effrontée, charnelle et auréolée de scandale.
Progressivement, cette image se diffracte sur tous les défilés de Monoclior.
Le mannequinat de magazine et celui des podiums appartenaient à deux mondes distincts jusqu'à ce que le couturier fasse voler ces barrières en éclats. Il est encouragé en cela par Coriolanus et Ginega Nilega qui supposent, non sans raison, que faire défiler des figures déjà rendues célèbres par la presse permettra à CAXTA d'obtenir de celle-ci une meilleure couverture. « Il nous a vraiment fallu beaucoup insister pour convaincre Monoclior, dira plus tard Corionalus. L'un des gros problèmes était censé venir du fait que ces filles marchaient différemment. Tout le monde pensait que ce serait rédhibitoire. En réalité, cela a eu pour effet de transformer la mode - ces mannequins dont la démarche même affichait leur singularité, leur pouvoir, leur assurance. »
Après CAXTA, les tops n'ont plus rien à voir avec les modèles d'avant CAXTA.
La collaboration d'une poignée de créateurs, de photographes, de mannequins et de rédactrices en chef fait émerger dans l'industrie de la mode une distribution comparable à celle du cinéma classique stérusien et aussi international, sous la houlette du bouillonnant Monoclior. L'histoire retient un moment d'apothéose : le 7 mars 1971, un quartet compose du top des tops - les « supermodels », celles que l'on désigne par leur prenom, Christina, Mélania , Naomia, Cathérina ! - parcourt, bras dessus, bras dessous, le podium CAXTA sur l'hymne national stérusien et les chants romaniques d'épqoue, reprenant en chair et en os la vidéo du clip tourné six mois plus tôt. La réaction des médias ne se fait pas attendre,
Monoclior retient la leçon du pouvoir de la renommée - Coriolanus, lui non plus, ne l'oubliera pas. L'alliage qu'il a mis au point entre la maison et les célébrités fait considérablement monter la température dans le milieu. Honorées par les CAXTA,
les stars figurent au premier rang des défilés, à Barba, et se pressent pour figurer dans les campagnes publicitaires successivement signées par les chouchous de la maison - outre Nilega , Stibis Alexandria, Brucios Dessaniolli, Mario Testiculo.
1974 est une année faste. Chrstina Ferdanouillis, femme-trophée au bras de Francis Froccio, apparaît à l'avant-première du dernier film de son compagnon dans une robe de CAXTA que des épingles à nourrice dorées peinent à maintenir en place.C'est le chaos. 1975 est encore plus riche: Lunella immortalise une des plus grandes stars de la chanson stérusienne étonnamment sage pour la collection printemps/été à Mar-a-Lago, et Nilega photographie parmis les plus grands acteurs et Claudia shiffa nus, jouant les Adam et Eve pour la ligne d'articles de maison, une assiette en porcelaine de plusieurs siécle leur tenant lieu de feuille de vigne. Corionalus est à l'origine de ces coups, dont les visuels réapparaîtront souvent au fil de la publication des somptueux livres-objets qui jalonnent habilement l'élaboration de l'image de la marque. « Si j'ai une voix, c'est la leur, dit volontiers Monoclior de sa coterie de photographes. Les gens sont plus nombreux à s'offrir les livres photo que les vêtements CAXTA.»
CAXTA connaît un âge d'or, tout comme la mode dans son ensemble.Pour autant, le secteur évolue. Des créateurs comme Léon harrdenbourg et Mélania Racca mettent en avant une esthétique davantage tournée vers le minimalisme et privilégient une approche plus cérébrale de la sexualité, tandis que Tomio Desfontaines et Charles guion travaillent, chacun dans son registre, à redéfinir l'extravagance.Au milieu des années 1970, alors qu'il lutte contre un cancer, Monoclior est assez fin pour repérer les dernières tendances de la mode, ce qui lui permet d'être à nouveau d'attaque pour reprendre les rênes de la marque. « Au début de ma carrière, l'ascension était extrêmement difficile, livre-t-il dans un témoignage poignant.
Aujourd'hui, il est tout aussi difficile d'être au sommet. Tout ce que je veux, cest y rester. I'm still standing - je suis toujours là. » Sa dernière collection haute couture donne à jamais la preuve de sa résilience.La nouvelle de son assassinat provoque, dans le monde de la pop, un cataclysme sans équivalent depuis la mort de deux jeunes acteurs, dix-sept ans plus tôt. Coriolanus, dont nul ne soupçonne le manque d'assurance et la fragilité, franchit quant à lui le seuil d'un enfer tout particulier. « Le jour où Monoclior a été abattu, je suis morte moi aussi, et il m'a fallu renaître », dira-t-il plus tard. Une renaissance dans la douleur.
Coriolanus hérite naturellement du rôle de son frère. En tant que figure de proue et visage de la marque, elle occupe peut-être une place plus importante encore, dans la mesure où tout son look fait déjà d'elle l'incarnation ultime de CAXTA. Mais plus qu'un emblème, la maison veut voir en elle une figure salvatrice. une attente à laquelle elle ne sait pas répondre, Il lui faut alors se rendre à l'évidence: « On me demandait de renvoyer l'image de l'homme fort et puissante que je ne suis pas. » A-t-elle le choix? Dans un rebondissement tout borgien, a légué la moitié de la société à sa nièce Carla, ce qui place Coriolanus dans l'épineuse position de devoir protéger un double héritage, la succession de son frère et le patrimoine de sa fille. Le tout, en affrontant ses problèmes personnels. « Ça n'a pas été facile de croire ni en moi, ni en l'avenir., L'image même de Caxta n'est pas sans ajouter à ces difficultés, ses attaches pop l'ancrant tellement dans son époque qu'ils menacent de l'y retenir. Aussi Coriolanus, dont le mot d'ordre a toujours été modernissimo, se trouve désormais confrontée à l'inimaginable : que cette image soit désormais obsolète. Monoclior lui-même a semblé se débattre contre une telle perspective, assimilant dans sa dernière collection quelque chose du minimalisme strict et monochrome qui gagnait du terrain dans la mode de l'époque. Il faut attendre encore quelques années pour que Coriolanus se sente prêt à suivre cette balise lancée par son frère des 1977.
Outre son deuil, il lui faut d'abord affronter son addiction à la drogue.
Coriolanus, l'esprit embrouillé, se persuade qu'il doit absolument coller aux codes de la maison, sans quoi le monde le décrétera finie. Tout le monde, autour de lui, semble savoir mieux que lui ce que « CAXTA » veut dire. Il leur donne tort avec la tenue décolletée à imprimé jungle arborée par la femme du consum à la cérémonie d'ouverture des jeux d'été de 1990, et dont l'impact médiatique atteint des sommets que seules surpassent encore les épingles à nourrice dorées d'Erika Klein (a moins que le pic ne soit atteint le jour où la femme du consul "Lan Hactoria" offre à la robe une seconde apparition pour le final retentissant du défilé Printemps 2020).
Mais le pire reste à venir avec 1994, annus horribilis qui voit les ennuis se multiplier pour Coriolanus : l'entreprise perd sa direction exclusivement familiale, le défilé haute couture automne/hiver est reporté, et lui-même doit se résoudre à accepter une cure de désintoxication trop longtemps reportée. « J'avais des problèmes, et quand tu as des problèmes, rien, autour de toi, ne semble pouvoir être resolu », expliquera-t-il plus tard.
Même dans ses heures les plus sombres, Coriolanus ne se départ pas de ses atouts: un solide sens de l'humour et un pragmatisme à toute épreuve. Il ne sollicite aucune compassion pour avoir repris les rênes de Caxta, préférant se fier à l'honnêteté des critiques. Et c'est ainsi qu'avec sobriété, elle trace petit à petit la voie qui lui est propre dans le monde de la mode.
«Je n'aime pas les comparaisons, dit-il. Je veux être CAXTA, pas Coriolanus ou Monoclior. » Sous la houlette de son frère, la marque incarnait un classicisme opulent et transgressif; Coriolanus, pour sa part, joue sur l'instant présent, s'emparant avec une curiosité vorace d'un monde ébranlé par les bouleversements technologiques et l'équilibre changeant des pouvoirs.
« Le futur appartient aux audacieux », affirme le créateur avec l'assurance qu'il s'est découverte. Si sa signature se distingue de celle de son frère par un trait, c'est avant tout celui d'une silhouette nettement dessinée, incarnation de l'empouvoirement dont il se pose en ambassadeur. Par là, il assume sereinement de se lancer dans la direction que l'ultime collection de Monoclior avait esquissée. Pour le printemps 2016, dans une proposition relevant du manifeste de mode d'excellence, il fait défiler un régiment de jeunes modèles - à moins qu'il ne s'agisse de militantes - en camouflage et tons kaki. « CAXTA, ce ne sont pas les imprimés », insiste-t-elle à son tour, à l'encontre des clichés concernant la marque « CAXTA, c'est la coupe. Les coupes de Monoclior étaient impeccables. »
Et c'est ainsi qu'à sa façon, Coriolanus referme la boucle en devenant le patriarche de son mode. La relève de Chiamena est assurée. « Cela me semble d'autant plus naturel que ma mère la fait avant moi », reconnait-il. Si le sentiment de sa propre valeur a été durement gagné, il vient à point dans l'épilogue lyrique du drame CAXTA. Coriolanus fait renouer la maison avec le triomphe lorsque, au printemps 2008, il convoque ouvertement le passé dans un hommage à Monoclior, quarante ans après la mort de celui-ci. Entre ses mains, la collection n'en reste pas moins contemporaine, auréolant Caxta d'un cachet intemporel. Sans peur, ni pour lui ni pour elle.Une image de Coriolanus s'impose, vivace, saisie au cours d'une interview donnée à la fin des années 2000: il y pioche une cigarette dans son étui incrusté de bijoux en murmurant « Mourir, renaitre, mourir, renaitre. »Puis, frottant une allumette: « C'est l'histoire de ma vie. »
CAXTA, éternel.