11/05/2017
22:33:21
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Réunion stratégique de Vinola-Sylva

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Le grand jeu: POV Vinola


Le camp de la vallée de la Forge était perché à plus de 2 000 mètres d'altitude dans les contreforts des monts zagros, à la lisière du monde velsnien, celui des cités et de la plaine nourricière. Les Zagros, cela a toujours été LA frontière, cet espace à mis chemin entre la civilisation et la sauvagerie. Cela est aussi une barrière mentale qui sépare les velsniens du reste du monde, tout comme l'est la Manche Blanche sur le littoral est du pays. Dans l'Histoire, une seule armée a osé franchir ces montagnes: celle des achosiens du chef Erwys il y a des siècles de cela. Plus rien depuis, pas même les zélandiens. Alors, après les premiers accrochages ayant mis en évidence l'impossibilité pour Vinola de lutter de manière conventionnelle dans la plaine, c'était là le repli naturel idéal pour une armée épuisée. Pouvait-on seulement l'appeler "armée", une grosse troupe tout au mieux. Et ses officiers, des chefs de bande. A l’extérieur de la tente de commandement improvisé, Vinola humait l'air frais. Il se baissa et mit sa main droite dans la neige éternelle: cela procurait du réconfort de sentir quelque chose, même si c'était là désagréable. Il était en vie: mal rasé et fatigué, mais en vie.

Aujourd'hui était un jour spécial: le jour du plan, le jour où on décida si la lutte devait se poursuivre, en présence d'un nouveau conseiller spécialement dépêché d'un pays lointain. "Si on veut de nouvelles idées, il faut aller les chercher ailleurs" - se disait-il -. Une maigre escorte vint à la tente de commandement au bout d'une demi heure d'attente. Il était là, devant lui. Cet étranger. Les velsniens se méfiaient de lui, mais il n'était ni achosien ni zélandien, aussi ils l'acceptèrent, du moins temporairement, suivant la couleur des nuages qu'il apporterait avec lui et l'étendue de son génie. Il y avait là des régiments aux noms exotiques qui l'entouraient: "Les chevaliers de la liberté d'entreprendre", "les fils et les filles de la liberté"...pour la plupart des gardes civiques des cités ayant fait allégeance au triumvir, des hommes et des femmes qui ont une vie civile, des citoyens en armes conformément à la doctrine militaire velsnienne classique. Ils regardaient le sylvois passer devant eux, lui qui s'avançait vers leur triumvir.

Ce dernier tendit sa main pour le saluer. Il ne dit pas un mot pendant quelques instants, avant d'esquisser un rire et de briser le silence:
- Mon ami. Il va falloir que l'on parle de la prose de vos courriers. Vous auriez des leçons de rond de chapeaux à donner à beaucoup de sénateurs. Je vous en prie, entrez, mon état major vous attend. J'espère que vous ne vous attendiez pas à un grand luxe. Vous n'en aurez pas. Comment s'est passé votre voyage ?
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L'œil aiguisé, Luc parcourait du regard les alentours du camp à la recherche de tous les indices nécessaires pour affiner sa présentation. Il frissonnait dans son long imperméable descendant aux genoux, fabriqué pour supporter le vent et la pluie froide dans les hauteurs des mounlao en Sylva. C'était toutefois un peu trop léger pour la neige, mais ce n'est pas pour autant le froid qui le faisait trembler. C'était le stress, que Luc ressentait toujours avant une présentation. Officier et académicien impliqué dans les travaux théoriques de Sylva sur la question militaire, il avait participé à de nombreux exposés de retours d'expériences et analyses en tout genre des différents conflits du globe. Mais il était habitué à cette petite tension et savait la contenir.

Il retroussa sa capuche quand arriva Vinola, laissant la brise lui rafraîchir les joues. D'une poignée de main franche et brève, il répondit à la salutation de son interlocuteur.

-Vous me flattez, je tâcherai de faire une démonstration de mon savoir-faire militaire à la hauteur de mon écriture. Et quant à l'absence de luxe, Velsna a beau être parmi les plus confortables des nations, je n'aurais pas embrassé votre cause si c'était ce que je recherchais.

Il suivit son hôte dans la tente, analysant brièvement le visage de son auditoire. Il dégaina un classeur rempli de feuilles plastifiées, qu'il avait sorti de sa serviette devant les gardes l'ayant accueilli. C'est devant eux qu'il avait ouvert le contenant sécurisé et, en gage de confiance, avec expliqué son fonctionnement et laisser la sécurité le fouiller pour démontrer qu'il n'avait aucun moyen de reporter à l'extérieur d'éventuels actes d'espionnage. Impatient d'avoir des retours, il feuilleta son dossier et commença son exposé :

Luc a écrit :-Je vais commencer par les points à ma connaissance depuis mes analyses extérieures. Ce sera l'occasion d'expliquer les fondements de mon analyse et, plus important, de vous laisser apporter des correctifs pour améliorer mes propositions.

Déjà, nous avons d'un côté le premier rival, Scaela, secondé par Andrea Tomassino. Il dispose du plus gros des forces terrestres ainsi que le contrôle confirmé de Velsna, Velcal, Saliera, Hippo Regia et Vatluna, représentés en bleu sur la carte (en pointant sur un document plastifié de son classeur). Tomassino est connu pour favoriser la patience et la défense, mais a connu un revers avec cette méthode contre des doctrines plus agressives lors de la bataille de la Crête Rouge. Il est possible qu'il ai tiré des enseignements de ces échecs et cherchent davantage l'initiative, mais j'en doute et vous expliquerai pourquoi plus tard.

Nous avons ensuite Digrassi, solidement pourvu en troupe, avec le contrôle de la marine et retranché dans les territoires ultramarins. Il est connu pour être tant un excellent stratège que tacticien et privilégier l'offensive, chose connue en Velsna et que Scaela comme Tomassino prendront en compte. Il n'a toutefois aucun pied à terre en Velsna même. Les capacités de projection seront son principal point faible.

Puis, nous avons nos forces, maigres, et le soutien assumé de deux villes uniquement à ma connaissance : Umbra et Aula, en rouge sur la carte. Nous bénéficions cependant d'un repli très avantageux dans les montagnes, aisées à défendre, mais également isolés sur le plan de la logistique. Nourriture, carburant et munitions manqueront à terme si nous ne nous organisons pas en conséquence. Circuler au cœur de Velsna sera aussi complexe de par le contrôle de nœuds stratégiques par Scaela.

Concernant l'aviation, elle ne s'engage pas dans ce conflit, ce qui est un avantage inouï dans notre cas. Aucun adversaire ne profitera de la domination aérienne tant pour mener des opérations de reconnaissance que d'assaut ou soutien. Cela nous aidera énormément à agir.
Maintenant que j'ai pu vous exposer ce que j'ai à ma connaissance, je vais y apporter mes recommandations.

La première chose que nous pouvons être sûr est que Digrassi cherchera l'initiative et attaquera en premier, tandis que Scaela a tout intérêt à se retrancher dans les villes et se défendre. Cela est conforté par la psychologie des chefs militaires (Digrassi et Tomassino) surtout le contexte. Scaela contrôle les grandes villes avec leur industrie et pouvoir politique, il a l'emprise sur le gros de Velsna et tout l'approvisionnement nécessaire. Rien ne presse pour lui, il a au contraire intérêt à laisser s'éterniser les choses. Nous ne pouvons nous pas rester éternellement cloitrés dans nos montagnes, et Digrassi ne gagnera pas la guerre en restant dans loin d'ici. Ce dernier va en effet très certainement se baser sur ses réussites passées et chercher la confrontation, peut-être pas frontalement, mais c'est lui qui viendra parce qu'il procède ainsi et, dans ce cas-ci, DOIT procéder comme cela, il n'a pas le choix.

Et c'est à partir de là que je peux proposer une doctrine simple : éviter à tout prix l'engagement dans un premier temps, économiser nos forces, et laisser nos deux rivaux se saigner. Bonne nouvelle, nous sommes insignifiants, considérés comme perdants d'emblée et n'inspirons pas la crainte. Pourquoi Scaela dépenserait-il des moyens à venir s'occuper de nous quand Digrassi a toutes les raisons du monde de venir le prendre à revers ?
C'est également pour ces raisons que nous ne devons pas nous attaquer maintenant à Hippo Reggia et Munda. Ce sont certes des nœuds logistiques d'importance stratégique à porté de nos camps, mais cela attirerait l'attention de Scaela qui pourrait tenter de les reprendre. Et à moins de vouloir offrir à Digrassi la victoire, c'est impensable.
Non, pour tenir cette guerre, il y a plusieurs deux à mes yeux en particulier à faire et j'attendrais vos avis sur ça :

-Établir des lignes de ravitaillement avec Aula. Nous ne pourrons surement pas en tirer des munitions, mais au moins des rations pour nous permettre sur la durée. Scaela attendra probablement que l'on meure de faim, préparons-nous à ça.

-Préparer le repli des troupes d'Umbra et peut-être même établir une ligne hors route entre la ville et nous. C'est une grande ville, et nous devons la tenir tant que possible MAIS nous ne pouvons pas nous permettre de le faire à des prix élevés. Si Scaela ou Digrassi déployaient les moyens pour s'en emparer, nous ne devrions pas chercher à tenir, quand bien même cela infligerait des pertes à l'assaillant, puisque ce serait offrir un avantage au rival non impliqué.
En fait, s'il s'avérait que nous ne pouvions pas établir de ravitaillement depuis Umbra, et qu'il était possible d'en déménager la garde civile, je serais tenté d'encourager à abandonner la cité pour en ponctionner les troupes. Je veux dire, si elle n'apporte pas d'intérêt immédiat et monopolise des troupes autrement mobilisables à des objectifs plus urgents, ce n'est pas intéressant. MAIS j'ai conscience de l'intérêt politique de conserver la seconde cité de Velsna et, conséquemment, ne défendrais pas plus que ça la proposition de l'abandonner sans vos retours.

Une fois que Digrassi aura engagé les affrontements avec Scaela et que les deux seront suffisamment affaiblis, nous pourrons organiser une "reconquête" pour récupérer une à une les villes en commençant par les nœuds logistiques que sont Munda et Hyppo Reggia avant d'étendre la campagne sur les côtes. Mais c'est là une vision sur le long terme, qui nécessitera de nombreuses adaptations dans les plans une fois le moment venu.

Maintenant, nous allons passer à l'aspect tactique, en commençant par la question des villes de Aula et Umbra. Comme dit, il est peu probable que Scaela s'évertue à vouloir s'en emparer, même Aula qui lui est proche, de par son intérêt et la prédisposition de Tomassino à rester sur la défensive. Nous devrons jouer sur ce point en fortifiant les villes avec des tranchées, des pièges et des positions d'artilleries de façon à rester dissuasif. Tomassino étant qui plus est connu pour sa patience et son attachement à économiser ses ressources, il serait tenté d'éviter des assauts frontaux contre les villes si elles étaient fortifiées. Ces lignes défensives devront se faire sous la forme d'un ensemble de bastions étendus sur la profondeur, de manière que plusieurs niveaux de défenseurs se succèdent. L'objectif est que les premières lignes excessivement exposées au contact puissent se replier, avec la couverture des lignes arrière, pour limiter nos pertes, amortir la charge adverse et affaiblir l'élan des assaillants.
De plus, des axes de retraite devront être prévus. Qu'importe que nous soyons vus comme des fuyards, du moment que nous pouvons conserver nos forces et laisser s'affaiblir nos rivaux.
Il en va de même pour Umbra qui doit avoir tant des défenses terrestres que sol-mer, mais ses troupes doivent rester prêtes à se replier par les champs si Digrassi comme Scaela y apprêtaient un assaut décisif.

Nous devrons jouer sur l'absence de moyens aériens chez nos adversaires pour camoufler nos défenses et surprendre d'autant plus leurs opérations de reconnaissance. Comme dit, l'objectif est de rester dissuasif, mais pas de tenir à des coûts élevés les villes. Des positions d'artilleries diverses et communicantes avec des moyens de dissimulation (broussailles, couvertures de camouflage) permettront à nos canons d'alterner leurs positions, d'opérer avec une sécurité accrue, et de se replier si besoin est.

Nous devrons aussi déployer de nombreuses petites unités de reconnaissance sur les routes et dans les champs, de façon à évaluer les axes de passage pour faire passer des ravitaillements depuis les villes ou des troupes se repliant, mais aussi pour surveiller l'absence de sentinelle adverse. Nous devons à tout prix éviter l'encerclement des villes avec nos troupes dedans, autrement nous en serions privés pour la suite des opérations. Ceci dit, j'insiste sur mes doutes quant à la volonté de Tomassino de prendre une ville si des pertes se faisaient sentir. Il miserait davantage sur un long siège qui aurait l'avantage de fixer ses troupes loin des points de débarquement de Digrassi.

Par contre, point important, nous devons dès maintenant préparer la reconquête des villes si elles venaient à être prises. Espions, partisans entrainés avec des caches d'armes, sabotage des éventuelles infrastructures défensives programmables dans notre fuite, tout ce qui facilitera la récupération de Aula et Umbra doit dès présentement être préparé.

Bien, messieurs, je vous remercie pour votre attention et attends vos retours. Pour résumer, je préconise :
-D'établir des axes de circulation entre les villes et nos positions dans nos retranchements en montagne pour assurer des ravitaillements et le repli des troupes.
-Éviter les engagements couteux avec Scaela comme Digrassi pour les laisser mutuellement s'affaiblir avant que nous ne frappions.
-Ériger des défenses en profondeur dissuasives sur nos villes pour décourager les assauts frontaux (et jouer sur les tendances de Tomassino) tout en insistant sur la nécessité de faire battre en retraite auprès de nous les troupes en cas de menace trop pesante.
-Mettre en place des réseaux de patrouilles et de guets pour surveiller la progression des troupes adverses en campagne et éviter les encerclements impromptus des villes.
-Préparer la récupération de Umbra et Aula si nos ennemis s'obstinaient à les capturer.
-Et bien évidemment, fortifier nos camps retranchés dans les montagnes en profitant du terrain, pour pouvoir durer.
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Alors que Vinola semblait écouter attentivement la mise au point de l'étranger, l'un des officiers du Triumvir avait l’œil sceptique au fil du déroulé de l'explication. Vinola n'était pas un soldat, aussi il faisait pallier sa faiblesse d’expérience militaire par ces hommes qui lui suivaient comme son ombre. Par politesse, l'officier attendit la fin de l'exposé avant de mettre ses doutes au jour:

- Dans l'ensemble, je vous trouve mesuré et efficace, sylvien. Votre plan est plus ou moins proche que ce que nous avions en partie prévu.
Nous replier dans ces montagnes, maintenir le lien avec Aula et attendre l'évolution de la situation entre DiGrassi et Scaela. DiGrassi viendra, c'est chose certaine. Mais par où ? C'est là une question pertinente. Pour l'avoir connu en Achosie, je peux vous assurer que toutes les hypothèses peuvent être permises. Je l'ai vu donner l'ordre à des fusiliers marins d'escalader une falaise.

Je me dois de soulever également quelques unes de vos informations qui nous paraissent erronées. Nous n'avons d'ores et déjà plus aucune garnison à Umbra, toute notre armée est ici, dans les Zagros, excellence. Umbra a peut-être apporté un soutien de 1 000 hommes au triumvir Vinola, mais il ne faut pas présumer que ses magistrats nous feront la grâce de nous donner autre chose. Il suffit de voir l’accueil qu'ils ont réservé aux zélandiens. La garnison supplémentaire de 2 000 hommes qu'ils ont formé sur le tas n'a pas été mise à notre disposition, et ils refuseront de laisser partir ce personnel alors que Scaela est à leurs portes. Quant bien même, nous ne pourrions pas les faire venir ici sans qu'ils n'essuient des pertes. Ils devraient traverser toute la plaine de Velsna qui est sous contrôle des scaeliens. C'est du suicide, autant leur laisser ces hommes, quitte à faire perdre du temps à Scaela si il veut prendre la ville. Je suis partisan de laisser Umbra assurer sa propre défense le temps que DiGrassi arrive et concentre l'attention de Scaela.


Vous présumez également bien de la faiblesse de nos effectifs. Je pense qu'Aula peut pallier à cela en levant un ou deux mille hommes supplémentaires. Mais cela risque de prendre du temps que nous n'avons pas. La guérilla et les montagnes, c'est tout ce que nous avons à notre disposition. Je pense que nous allons appliquer vos recommandations dans ce sens. Nous devons nous fabriquer une forteresse improbable. Nous aviserons la suite du plan selon les mouvements deux deux hommes.


Une fois l'officier à nouveau posé sur sa chaise, Vinola intervient après sa longue réflexion, où il cogitait dans son coin de la tente:
- Excellence Boisdinde, je me dois également de vous prévenir que nous avons récemment reçu une demande de reddition conditionnelle de la part de DiGrassi. J'hésitais à la mettre directement à la corbeille dans un premier temps, mais je suppose que vous voudriez connaître la nature de sa demande. Une prose toujours aussi plate et ennuyeuse. Lisez par vous même.


Matteo DiGrassi a écrit :A toi, Vittorio Emiliano Vinola, triumvir de la Grande République de Velsna, je te salue.


Je te fais parvenir ce courrier avec la certitude que ton choix sera le bon. Si la guerre peut nous éloigner du bon sens et de la raison, j'ose espérer que tu mettras peut-être ces deux qualités en valeur, pour peu que tu tienne à la vie des courageux citoyens qui constituent ton armée.

En vertu de ta situation militaire actuelle, en sous-effectif et en sous-équipement, repliés de la plaine de Velsna sans véritable refuge, je me dois en toute conscience te faire part de cette demande que tu trouveras certainement osée de la part.

Je te demande ainsi solennellement de cesser le combat, du moins face à la perspective de mon arrivée. Je ne te fais pas l'affront de faire la demande d'une reddition humiliante . L'intégralité de ton personnel aura le droit de rester en armes et sous leurs drapeaux. Nul ne sera fait prisonnier et nul ne sera victime de châtiment injuste. Ta place à la tête de ces troupes ne sera pas non plus remise en question. Tu pourras continuer à participer aux opérations à l'encontre de Dino Scaela, mais sous mon commandement exclusif. Tes hommes auront le choix de continuer ou non à servir dans ces conditions, et libres aux autres de rentrer rejoindre leurs foyers. Éventuellement, et si l'occasion s'y prête, tu auras même voix au chapitre concernant la reconstitution d'un véritable gouvernement que mérite la Grande République. Mais tu dois mettre cette armée à ma disposition.

Sans quoi, et avec grand regret, je devrais te considérer avec la même hostilité que les troupes de Dino Scaela. Je te prie de réfléchir à cette proposition et de m'informer au plus vite de ta décision.


Ainsi a été fait ce courrier par le Triumvir, sénateur et amiral de la Marineria Matteo DiGrassi,
A la date du 2 aout 2013.


Vinola, soucieux, s’affaissa dans sa chaise avant de mettre les pieds sur la table, comme pour cacher une certaine anxiété par un semblant de détente affichée. Il demanda alors à l'étranger:
- Alors ? Que pensez vous de cette missive ? Dois-je la mettre au feu à votre avis ?
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Luc a écrit :Luc eut un rictus au "sylvien" mais ne s'y attarda pas, il y avait après tout d'autres urgences :

-Pour commencer, je vous remercie pour ces précieux apports. La question d'Umbra par exemple est réglée : nous n'aurons pas à y "allouer" de ressources ni pouvoir en tirer. Il y a toutefois un élément à craindre que j'ai oublié de préciser : Aula est très vulnérable à un siège. Elle est cloisonnée et peut facilement être isolée, Tomassino n'aura aucunement à envahir la ville, juste en bloquer l'accès, et nous ne pourrons plus en profiter. Dès lors, si cela arrivait, il faudrait mener une campagne de harcèlement pour décourager cette posture, notamment en s'attaquant à leurs propres ravitaillements.
Pour ce qui est de faire venir des hommes supplémentaires de cette ville, il y a également la possibilité et j'aurais besoin de votre connaissance de Tomassino et des us velsniens en général pour proposer quelque chose. Digrassi vous propose là d'intégrer ses forces, est-ce chose commune, et quelles mesures de sécurités sont appliquées pour éviter les coups de poignards ? Je demande puisqu'en l'état, il peut être intéressant de laisser des partisans fidèles proposer de se joindre à Scaela s'il venait à tenter d'envahir la ville. Nous aurons ainsi des complices pour la reconquête à venir directement au cœur de la ville.
Mais cela peut se faire ainsi uniquement si nous avons la certitude que ces partisans disposeront d'un degré d'action et renseignement suffisant. S'ils sont mutés dans une autre ville, assimilés à d'autres régiments, voir purement et simplement désarmés, alors il vaut mieux procéder autrement. Dans ce cas-là, autant les laisser cacher leurs armes en ville, se fondre dans la foule, et reprendre les combats de l'intérieur lorsque nous prendrons d'assaut la ville.
Bien évidemment, ces suggestions se valent seulement si Aula était assiégée et capturée par Tomassino, dans le cas contraire juste sécuriser la ville et en tirer des ravitaillements suffirait.

-Pour en revenir à Digrassi et son angle d'attaque, c'est une excellente question. Les moyens de projection navals de Velsna sont encore limités à, à ma connaissance, un cargo et un transport de chaland. Il ne s'agit pas de quoi lancer une offensive d'ampleur en un unique voyage. S'il passe par la mer, il devra faire plusieurs trajets, et ce, sous les aléas de la région (piraterie, acteurs étrangers impliqués) entre lesquels les troupes débarqués en Velsna seront susceptibles d'être encerclés.
Passer par la terre a son lot de contrainte : trajet long, ravitaillement complexes, et absence de surprise puisqu'il est inenvisageable qu'aucun fermier ne relais ce qu'il puisse voir dans les pays traversés. Il est également bon de se demander par quel côté il arriverait depuis la terre. Par les montagnes où le trajet sera le plus complexe ? Par le sud et donc Teyla ?
Combiner voyage terrestre et maritime n'est pas exclue. Il peut décider d'amasser des troupes dans un territoire côtier à proximité, pour réduire la durée des allez-retours et permettre un débarquement en force. Ou inversement débarquer ses troupes à terre à proximité de Velsna mais hors des frontières, puis les faire voyager par route.
Il n'y a aucun moyen de prévoir avec précision quel chemin il empruntera et c'est pourquoi je ne saurai tenir qu'une recommandation : établir un réseau de renseignement performant. S'il passe par la terre, cela se verra et sera relayé. Nous devrons rester à l'écoute des actualités dans les pays voisins. De même, par la mer, la Manche Blanche est fréquentée et une force de débarquement sera probablement remarquée.
Et concernant sa lettre...

Il prit le temps de faire une pause. C'était un sujet politique plutôt que militaire, mais toujours dans un contexte stratégique.

-Plusieurs questions doivent être étudiées avec cette missive.
Quel est votre état final recherché ? Gouverner seul Velsna en excluant du pouvoir vos deux rivaux, ou le partager avec Digrassi ?
Quelles sont les motivations de Digrassi derrière cette lettre ? L'inquiétez-vous ? Est-ce qu'il souhaite sincèrement éviter les morts ? Craint-il de ne pas pouvoir battre seul Scaela et encore moins de vous battre tous les deux consécutivement ?
Est-ce qu'il sera honnête et respectera ses engagements, ou vous plantera un poignard dans le dos au moment voulu ?
Mes observations sont les suivantes :
Digrassi aurait anéanti Scaela s'il n'avait pas Tomassino de son côté. Maintenant, il se retrouve à devoir envahir un pays occupé par deux belligérants avec des moyens de projection limité et en face un excellent planificateur de défense. Le savait-il déjà quand il a envoyé la lettre ? Oui ou non, sa tâche est immense et il est probable qu'une victoire contre Scaela ne saurait se faire sans terribles pertes pour lui.
Les us et coutumes velsniens dans le milieu politique... donne assez peu de garantie sur le traitement que réservera Digrassi. Réciproquement, nous pouvons, nous aussi, en profiter pour distribuer des coups de poignard. L'important n'est pas d'être honorable mais de garder l'approbation et confiance des citoyens et politiciens. Nos rivaux, eux, nous n'avons pas le luxe de lésiner sur les moyens pour nous en débarrasser.
Présentement, la grande question est de savoir si Digrassi pourra suffisamment affaiblir Scaela pour que nous puissions seuls l'achever le moment voulu ?
En conclusion, je pense que nous devrions accepter la demande de Digrassi uniquement si nous pourrons nous assurer des points suivants dans votre intérêt :
-Il ne devra pas y avoir de conséquences sur le long terme à votre réputation ou statut qui vous empêchera d'accéder au pouvoir ultérieurement.
-Nous devons approuver dans l'optique de le laisser se concentrer sur Scaela pour que les deux s'affaiblissent. S'il le faut, nous devrons engager des accrochages mesurés pour conforter Digrassi, mais il est capital qu'il fasse le gros du travail et en assume les coûts humains et matériels. Il faudra probablement mentir sur les pertes, simuler des désertions, de façon à ce que Digrassi et Scaela pensent que nous soyons terriblement affaiblis et plus du tout menaçant, pour qu'ils se concentrent l'un sur l'autre. Tout cela devra être du théâtre, une guerre de l'information.
-Répondre à son commandement ne devra pas nous contraindre dans les deux points cités, notamment pour ce qui est de nous éviter les pertes et simuler les désertions. Si nos troupes sont amenées à combattre côte à côte, nous ne devrons l'approuver qu'après nous être assurés que nous pourrons replier nos forces pour laisser Digrassi agir.

-Il n'y a que si ces trois points peuvent être garantis et que vous soyez prêt à planter un poignard dans le dos de Digrassi que vous pourrez, selon moi, approuver sa proposition.
Pour ce qui serait d'accepter l'offre de façon sincère, il serait là encore selon moi trop risqué de le faire sans garantie de ne pas être éjecté une fois devenu "inutile".
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L'officier se tenant aux côté du Patrice répondit à Boisdinde de suite à sa proposition concernant Aula:

- Ami sylvois, il n'est pas question de laisser Aula se faire assiéger. Il s'agit de l'un de nos seuls viviers de recrutement accessible, et s'il venait à l’assiéger, ce la voudrait dire que nous serions dans une situation catastrophique. Recourir à l'infiltration, cela serait un recours désespéré et efficace, mais je ne pense pas que Scaela, et surtout Tomassino, ne fasse du recrutement à tour de bras dans les cités conquises, à moins que les magistrats de ces dernières ne se soumettent dans leur ensemble. Le général Tomassino a réussi à créer, semble t-il, une armée relativement homogène dont la majeure partie du personnel vient de Velsna ou de sa cité natale de Vatluna. Il n'a pas l'air de faire confiance à d'autres cités libres ayant prêté allégeance à Scaela...et il a raison. Les fidélités sont versatiles: certains alignements ne se jouent qu'à la voix près dans les sénats locaux. Tomassino en a conscience, et c'est pour cela qu'il ne sollicite pas Velcal, Nowa Fortuna et d'autres villes outre mesure. Alors, le vieil homme pourrait mordre à l’hameçon avec des recrues faciles à Aula ? Je ne pense pas. DiGrassi peut-être, pas lui.

Conçernant DiGrassi, je pense surtout qu'il ne veut pas perdre du temps à nous combattre et d'avoir deux fronts. Vous pourriez avoir raison sur un point: DiGrassi a toutes les raisons pour nous voir que comme un dos d'âne sur la route de Velsna, et bien que je ne connaisse pas en détail l'étendue de ses forces, il a toutes les raisons de le penser...


Alors que le sujet DiGrassi était déroulé par l'officier, Vinola fit une intervention à ce propos:
- Je connais Matteo DiGrassi bien mieux que vous tous. Ce genre de fourberie n'est pas de ses habitudes. S'il voulait me tuer, il le ferait en me regardant dans les yeux, pas dans mon sommeil, et je l'en pense sincèrement capable. Peut-être a t-il l'idée que Scaela est un danger plus grand encore pour le régime qu'il défend que moi-même, en plus de son inimitié personnelle. En revanche, si nous nous rallions à, lui, à coup sûr nous serions le "partenaire minoritaire" de cet accord. Peut-être je pourrais faire passer certaines mesures de mon corpus politique, mais ce sera tout. Mais j'aurais un plan pour négocier "d'égal à égal" sans disposer des mêmes forces que lui.

Vous me parlez de rester en retrait des combats en cas d'alliance, monsieur Boisdinde. Justement, je ne pense pas que cela nous aidera à conforter DiGrassi dans son choix de s'encombrer de notre présence. Il n'est pas idiot au point de nous laisser nous prélasser en arrière garde. Nous parlons d'une force deux à trois fois supérieure à la nôtre. Sans vouloir m'imposer au vu de mon statut de "néophyte de la guerre", j'ai rarement vu dans une guerre moderne des armées avoir des pertes de 50% d'effectifs. Il y a fort à parier que DiGrassi, même en sortant d'un affrontement avec Tomassino aura encore des forces bien capables de s'occuper de nous. Soyons réalistes, nous ne pouvons pas porter la coupe tout seuls. MAIS...il y a un moyen qui forcerait DiGrassi à négocier avec nous, un moyen qui fait qu'il ne pourra pas nous éviter. Dans un premier temps, je suis d'accord de nous maintenir dans ces montagnes comme l'a suggéré monsieur Boisdinde. Mais nous n'aurons rien à monnayer plus tard si nous y restons. Non, nous devons prendre Velsna avant DiGrassi. Vous pensez ça possible, comito ?


Le politicien posait la question à son officier, qui était quelque peu sonné par la proposition du triumvir. Il eut un moment de réflexion, et ses yeux changèrent d'expression, passant de la stupeur à...la malice:
- C'est audacieux. Monsieur Boisdinde a raison sur ceci: il faut les laisser frapper en premier. Où que DiGrassi frappe Tomassino, il y a fort à parier qu'il va y concentrer des troupes qui laisseront d'autres endroits de son front dégarnis. C'est à cet instant que nous pourrions frapper. Mettons que DiGrassi débarque à l'est. Tomassino dégarnira à l'ouest pour contenir la bête. Et nous pourrions faire une percée jusqu'à Velsna, en espérant que Tomassino engage beaucoup de troupes. Une fois la ville sous contrôle, si DiGrassi gagne de son côté, je ne pense pas qu'il voudra faire de Velsna une ruine. Il sera obligé de monnayer sa prise de pouvoir avec nous. Cela pourrait marcher.
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Luc a écrit :
-Pour Aula, dans ce cas, nous devrons compter sur l'esprit de préservation et la patience de Tomassino. Un siège sans assaut frontal étant le plus probable de sa part, comme dit précédemment, et nous pourrons harceler ses lignes. J'insiste d'ailleurs sur l'avantage que nous offre l'absence d'aviation. Il est alors bien plus aisé de faire se faufiler des troupes dans l'obscurité, sans optronique infrarouge dans les airs.

-Pour Digrassi, je me suis mal exprimé. L'objectif n'est pas de se tenir en retrait, chose grossière et visible, mais de profiter des affrontements frontaux dans lesquels il se lancera pour simuler la désertion massive de nos forces. L'objectif final de cette manœuvre est de pousser Digrassi à un combat direct et couteux avec Scaela tout en préservant nos forces.
Cela demanderait mine de rien de la préparation et cette idée sera forcément à affiner. Je parle de simuler une désertion, mais je n'ai pas pu réfléchir davantage à l'idée, et les problèmes commencent honnêtement déjà à se poser dans mon esprit en delà de toutes les considérations politiques.
La pertinence de ce plan est d'autant plus réduite si Digrassi s'avère réellement honnête.

-Dès lors, l'unique question que nous devons nous poser est de savoir si nous pourrons acquérir et exploiter des avantages lors de la confrontation entre Digrassi et Scaela. Ce premier a des forces très importantes mais tel que déjà évoqué, qu'en est-il de ses capacités de projection ? Pourra-t-il exploiter son avantage numérique et espérer disposer d'une grande armée pour soutenir sa doctrine agressive ? C'est sans compter sur les questions du ravitaillement en matériel, munition, pièces de rechange ou nourriture. Cet amiral dispose d'atout, mais ils s'accompagnent de contraintes extrêmes. Scaela a ses troupes sur le terrain, à proximité. Elles peuvent rapidement rallier un point ou l'autre de Velsna. Digrassi doit également en avoir conscience.
Le plus probable si nous restons éloigné de Digrassi est que celui ci débarque progressivement ses troupes, laissant Tomassino établir des réseaux de défense pour les encercler. Beaucoup de scénarios sont alors possibles :
-Tomassino n'ose pas exploiter le désavantage au niveau de la projection de son adversaire, le laissant amasser des troupes.
-Ou au contraire, il fait montre d'un esprit offensif et s'attaque immédiatement aux unités de Digrassi trop peu nombreuses.
-Ou alors, Digrassi parvient à mobiliser d'importantes capacités de projection et déploie en effet une armée complète capable de soutenir sa progression.

-Dans tous les cas, ces éventualités vont dans notre sens à condition que Digrassi débarque suffisamment loin de Velsna. Il doit d'ailleurs lui aussi se poser de nombreuses questions en se demandant notamment : quel sera l'emplacement le moins défendu. Velsna est en longueur, prêt de six centaines de kilomètres dans un sens, pour moins de deux dans l'autre. Pour espérer atteindre Velsna en des délais raisonnables, il devra y débarquer avec une certaine proximité. Tomassino doit raisonner de la même façon et concentrer ses défenses au nord est... d'ailleurs, quid de nos réseaux de renseignement ? Avons-nous des espions disséminés dans les différentes villes pour estimer la densité des troupes qui s'y trouvent ? Digrassi a surement un réseau de reconnaissance qui l'aidera à frapper la zone la moins défendue. Tant qu'il n'aura pas de tête de point, il sera en position de faiblesse pour mener une offensive d'ampleur.

-Monsieur Vinola, ma conclusion pour le moment est la suivante : l'intégralité de notre plan va devoir se baser sur la réaction et l'adaptation des mouvements de nos rivaux. Il y a une très grande probabilité que les combats se concentrent à proximité du point de débarquement de Digrassi, et j'ai dès lors deux cas de figure en tête :
-Il débarque prêt de Velsna, situation pessimiste puisque la zone sera rapidement bondée de troupes et défenses au fil de la guerre. Prendre Velsna sera alors difficile. Mais il est toujours possible d'intensifier des mouvements de troupes plus au sud avec une petite part de nos armées, en menant des actions de reconnaissance, suppression des systèmes de surveillance et harcèlement, présageant d'une offensive à venir.
-Ou au contraire favorisera une offensive plus éloignée, rejoignant la remarque de monsieur... monsieur ? (Il demandait en regardant le dernier officier s'étant exprimé.) Comme vous le dites, nous pourrons déplacer nos troupes du côté de Aula, à moins de deux cent kilomètres de Vesna. Là, une fois la ville dégarnie pour aller contenir Digrassi, nous pourrons fondre dessus en quelques heures au moment opportun.

-Maintenant, il y a un élément à garder à l'esprit : nous anticipons sur des choses sur lesquelles nous n'avons aucune certitude. C'est important de prévoir et réfléchir aux potentielles actions de notre adversaire, mais la priorité est d'avoir un plan qui s'adaptera à la situation à venir. Et là déjà, il y a une certitude : une fois que Digrassi posera pieds sur terre, nous devrons bouger pour concentrer nos forces à l'opposée dans les montagnes pour à terme assaillir les zones dégarnies.

-Ah, et dernier point que j'allais oublier alors qu'il est le plus capital : les fleuves. Avez-vous des ponts mobiles ? Nous devons catégoriquement constituer une unité de saboteurs mobiles et discrets, capables de se faufiler à travers les lignes ennemies pour saboter les ponts, notamment au-dessus des fleuves de La Léandra. Si Digrassi attaque au sud, nous attendrons que Scaela ai envoyé suffisamment d'hommes là-bas pour les exploser et coincer leurs armées de manière à nous laisser prendre Velsna. Si Digrassi attaque trop proche de Velsna, nous l'attirerons avec si nécessaire des insultes personnelles avant de faire exploser les ponts et prendre la capitale. J'aurais même été tenté de laisser courir des rumeurs sur la présence de membres de l'AIAN dans le sud, mais au-delà d'être peu crédible, cela affecterait notre réputation. Nous pourrons même faire exploser les ponts de Arna, pour renforcer la thèse d'une offensive sur Saliera et Umbra dont l'accès par des renforts serait compliqué. Je suis même certain que Digrassi, dans un excès de confiance, mobilisera sa flotte en nombre pour envoyer des renforts en se disant que l'explosion des ponts n'est qu'une désespérée tentative de le ralentir. Peut-être même que nous pourrions nous risquer à saboter les ports de Umbra et Saliera ? Avons-nous des unités de saboteurs ? Il s'agira d'avoir des explosifs dissimulés et des soldats déguisés en civils, avec des véhicules banalisés. Je pourrais vous accompagner pour planifier ces opérations de sabotage.
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- Veuillez m’excusez, mon nom est Freddo D’Angelo, colonel du 1er régiment civique d’Aula, les « chevaliers de la liberté d’entreprendre », ceux qui vont ont ouvert le chemin dans les montagnes. Sénateur d’Aula accessoirement.

D’Angelo était de ces citoyens-soldats dont l’armée velsnienne était constituée en grande partie avec un service militaire en poche, tout comme l’était l’intégralité de son régiment qu’il avait lui-même levé à la demande des magistrats d’Aula pour rejoindre Vinola. Dans la vie, il n’était que le directeur de la succursale locale du groupe bancaire Laurenti Alfonso, aujourd’hui il dirigeait un régiment de 1 000 soldats. Tel était le devoir des citoyens. Il reprit à la suite de Boisdinde :
- Je suis bien d’accord avec vous : nous n’allons pas nous amuser à prendre la capitale si des troupes importantes se situent là-bas. En revanche, s’ils n’y sont pas au moment où l’offensive se déclenche, nous aurons tout le loisir de longer la côte nord jusqu’à la capitale et la cueillir sans trop d’efforts.

Vinola ajouta son sel de son côté à propos de DiGrassi :
- Que nous ne fassions rien ou quelque chose, je pense que DiGrassi va s’empresser d’attaquer Scaela aussitôt arrivé, alors je pense que nous n’avons que peu de soucis à nous faire de ce point de vue-là. Dans l’éventualité d’une confrontation avec nos forces, j’estime que ses troupes n’auront pas assez d’usure suite aux combats avec Scaela, d’autant que le vainqueur de ce duel fera sans doute main basse sur le matériel de l’autre. Rester en retrait, simuler une désertion…à mon avis, nous pouvons l’oublier. Et cet idiot est incapable de mentir sans déglutir à chaque phrase, donc oui, je pense qu’il est sincère. Voici ma position actuelle : on prend Velsna si la garnison de Scaela est faible, on applique vos doctrines de guérilla si Tomassino sent le coup venir.

Les deux hommes se renvoient la parole comme on s’envoie une balle. C’est le colonel qui reprend le sylvois, à propos de ses capacités de projection et des propres capacités logistiques et de subterfuge de Vinola, cette fois ci :
- Difficile à dire. Dans tous les cas, avant la guerre l’armée velsnienne n’était ni en manque de camions de transports ou de camions citerne. Au niveau du transport maritime et aérien, c’est là que ça se corse. Certes, vous avez raison sur la faiblesse de la capacité de transport, mais nous ne sommes pas à l’abri d’une surprise. Sur le terrain, j’estime que DiGrassi fait plus ou moins jeu égal avec les forces de Tomassino, mais ce n’est qu’une supposition. Le strombolain aura l’avantage de la surprise dans un premier temps, jusqu’à ce que Tomassino puisse amasser ses forces au point de contact. Au niveau du ravitaillement, j’ai déjà vu DiGrassi faire vivre ses troupes de la terre en Achosie. S’il n’a pas assez de ravitaillement, il se reposera sur la population des territoires qu’il occupe. Mais il privilégiera sont propre ravitaillement et cela m’étonnerait qu’il ait recours à cette extrémité sauf situation désespérée.
Pour ce qui est du renseignement. Nous n’en disposons que pour Tomassino de source fiable. Vos suppositions sont fondées : Scaela est tellement terrorisé par une éventuelle arrivée du strombolain qu’il aurait amasser une grande partir des troupes sur les côtes, en particulier la région de Velsna. C’est difficile d’avoir un chiffre précis, mais je tablerais sur 8 000 hommes au minimum. En prenant compte des mercenaires fortunéens et landrins qui ont débarqué récemment. Ceux là aussi nous poserons problème. Scaela a fait venir beaucoup de ses amis réactionnaires du sud.

Enfin pour répondre à votre question, non, nous n’avons pas de ponts mobiles. Ce genre de matériel n’est pas dévolu aux régiments de garde civique qui ont rejoint notre parti malheureusement. Mais j’ai entendu dire avant la guerre qu’il y en avait un stocké dans l’Arsenal de Velsna. J’ignore où il se situe actuellement. Le plus logique serait qu’une unité d’infanterie spécialisée se le soit accaparé dans tout ce fatras. Mais qui ? Bonne question. Nos espions n’en ont pas vu circulé non plus. Cependant, je dois émettre des doutes sur la pertinence d’insulter le triumvir DiGrassi. C’est là un stratagème…étrange, si vous voulez mon avis. De même, personne ne va croire que des terroristes achosiens se promènent à Saliera ou où que ce soit dans la métropole velsnienne. Nous ne sommes pas en Achosie. Si DiGrassi débarque au sud de l’Arna, faire sauter les ponts pourraient être une bonne idée pour le ralentir par exemple, mais j’ignore encore si nous avons assez d’explosifs et de mines pour accomplir une telle entreprise. S’il débarque au nord comme vous en faites l’hypothèse…je ne sais pas je suis sceptique. J’ignore s’il se fera avoir par cette opération. Si les ponts lui sont bloqués il se contentera de débarquer ses troupes de l’autre côté avec des chalands. Le cours de l’Arna est suffisamment profond pour effectuer de la navigation fluviale. Bref, cela le ralentira quelques jours peut-être, pas plus. Mais nous pouvons essayer. Va pour l’unité de saboteurs je suppose.

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Luc a écrit :
Après avoir attentivement écouté ses homologues, Luc prit le temps de réfléchir. Il semblait avoir fait le tour de l'analyse et obtenu un schéma des deux issues les plus bénéfiques sur lesquelles s'orienter. Le choix appartenait à Vinola, et la raison criait d'approuver l'offre de Digrassi pour se voir garantir la victoire. "Mieux vaut un maintenant que deux tu auras". Mais Luc avait lui aussi ses intérêts : obtenir son moment de gloire et peut-être même s'élever socialement. Simplement accepter cet assujettissement implicite à Digrassi ne lui apporterait aucune renommée, et quelque peu inconscient par son manque d'expérience (aussi impliqués fussent-ils dans les académies), il s'avérait très confiant. Une confiance assez flagrante et mal placée chez les officiers sylvois suite aux retours d'expériences des guerres d'Eurysie, où on voyait des armées lancer des opérations à l'improviste avec une mauvaise planification et des états finals recherchés très vague. Il était aisé de juger les défauts de ces manœuvres lorsque l'on en avait le recul nécessaire et toutes les cartes en main, il restait à voir si lui sera capable d'amener les forces de Vinola à faire mieux.

-Bien. Je prends notes de toutes vos remarques. Mes propositions peuvent sembler stupides, amateurs même, mais nous sommes en position d'infériorité et préfère dès maintenant envisager tous les axes qui s'offrent à nous. Les provocations ou les rumeurs concernant l'AIAN sont donc à oublier, ainsi que les mensonges. Il nous reste donc à viser Velsna au meilleur moment.
Sur l'invitation de Digrassi, telle est ma recommandation finale : la refuser. Sans remettre en doute votre palmarès, le sien est clairement supérieur et sera d'autant plus magnifié quand il mènera le gros de la reconquête contre Scaela. Quelles que soient les garanties qu'il vous fournit, il aura toujours davantage d'approbation auprès des sénateurs et autres acteurs de par sa prestance. Ce qui ressemblerait à une victoire garantie en se ralliant à lui serait, selon moi, plutôt un abandon.
Nous en revenons donc à la proposition finale que je fais à partir de tous les éléments développés : attendre que Digrassi applique ses habituelles doctrines offensives et attaquer Velsna une fois que la ville sera dégarnie par Tomassino pour aller le stopper, tout en sabotant les ponts.

-Maintenant revenons à la simulation des attaques au sud pour y attirer si nécessaire l'attention des forces en Velsna. Si nous n'avons pas la certitude de pouvoir saboter tous les ponts, alors conservons nos explosifs pour ceux bloquant l'accès de Velsna plutôt que des villes sud. Nous pourrons toujours simuler les planifications d'une offensive en harcelant guetteurs et patrouilleurs, et en visant les réseaux de communication. Ce seront de petites unités mobiles qui devront se charger de ça tandis que le gros de notre puissance de feu bougera vers le nord par les montagnes, tout en ralliant si possible des renforts de Aula. Attention toutefois à ne pas directement passer par Aula ! Notre opération repose sur la surprise, et si des espions adverses voient nos armées y passer, notre plan échouera !
Pour ce qui est des alternatives à Digrassi ou Scaela pour franchir le fleuve, il y en aura forcément. L'objectif est surtout de compliquer la progression plus que de la bloquer.

-Aurez-vous par ailleurs un ordre de grandeur à me fournir pour les effectifs à notre disposition ? Il faudrait que je puisse me faire à l'idée l'état de nos forces pour également réfléchir à la bataille de Velsna à venir. Cette question concerne notamment le plan tactique.
Niveau stratégique, je n'ai rien de plus à dire à moins que vous ayez des choses à ajouter.
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Vittorio Vinola et Freddo Dangelo étaient dans le silence, ils fixèrent Boisdinde, puis se regardèrent. Le triumvir demanda au colonel:
- Une observation sur ce que vient de dire notre collègue ici présent ? Nous pourrions gagner seuls ?

Dangela était quelque peu gêné de devoir répondre ce qu'il allait prononcer, mais il se devait d'être honnête:
- On a déjà vu des armées plus modestes l'emporter même si dans ce rapport à 1 contre 3 auquel nous ferons face, cela sera difficile. Mais là, le problème est d'une toute autre envergure. Je ne parle pas seulement du militaire, je parle du politique et de l'opinion. Le fait est, triumvir, que nous n'avons pas le peuple de notre côté, nous ne l'avons jamais eu. Admettons que nous remportions la victoire. Très bien. Et ensuite quoi ? Nous sauterions à la première élection sénatoriale et nous ne pourrions même pas appliquer un début de réforme. Alors si nous nous débarrassons de DiGrassi, j'espère que vous serez prêt à tirer sur la foule dans les rues de Velsna parce qu'il y aura des émeutes...je doute que cela soit pour cela que nous nous battons. Nous sommes dans cette tente pour abolir sur le long terme le principe de suffrage censitaire, pas pour planifier nos futurs assassinats par des velsniens en colère. Ce type...il est populaire à Velsna.
Ce que nous pourrions répondre au strombolain, ce sont justement nos revendications, nos conditions de ralliement. La longue liste de tout ce qui ne va pas à Velsna, la liste de ce pourquoi nous nous battons. S'il accepte, alors nous pourrons plus facilement tenir Velsna si nous la prenons, étant donné que cela se fera en partie en son nom. Mais c'est nous qui fixerons le prix du ticket d'entrée quand il se pointera. Je doute qu'il veuille tirer au canon sur Velsna, nous ne sommes pas en Achosie ici. Nous avons l'opportunité de jeter les bases d'un nouveau contrat social à Velsna, autant que cela ne se fasse pas dans le sang, ou sinon nous pourrions le regretter amèrement par la suite.


(HRP: Vinola écoute les conseils de son colonel plutôt que ceux de Boisdinde pour les raisons suivantes: le soutien politique à Vinola est trop faible (17 points seulement), l'armée de Vinola est perçue comme trop faible.)

Vinola s'enfonce dans sa chaise, visiblement fatigué. Il s'adresse aux deux hommes, en soupirant. Est-ce de la fatigue ou un renoncement ?
- Très bien. Faisons ainsi. Le gros passe est notre priorité. Colonel, donnez à notre invité ce qu'il demande. Les effectifs.

liste des effectifs a écrit :

Infanterie: 3 000 hommes
- 1er régiment des gardes civiques d'Aula "Les enfants de la liberté": 1 000 hommes, ali 6
- 2ème régiment des gardes civiques d'Aula "Les chevaliers de la liberté d'entreprendre": 1 000 hommes, ali 6
- 1er régiment des gardes civiques d'Umbra "Les démons de Dame Fortune": 1 000 hommes, ali 6

- Matériel: 460 mitrailleuses (350 nv1, 450 nv6), 700 mortiers légers (350 nv1, 350 nv6), 330 lances roquettes (200 nv7, 130nv3), 370 lance missile anti char (35 nv9, 50nv7, 250nv5, 35nv1)


Artillerie:
600 hommes répartis en un régiment, divisé en deux compagnies (non complet)
- 3ème régiment d'artillerie de campagne
- 1ère compagnie d'artillerie tractée "Les chasseurs de Scaela": 400 hommes pour 46 pièces d'artillerie (23nv1, 23nv6)
- 1ère compagnie d'artillerie mobile "Les artilleurs du front de mer": 200 hommes pour 14 pièces d'artillerie mobile


Matériel motorisé: 800 hommes répartis dans un régiment
- 2er régiment de cavalerie de Velsna "Les flèches du champ de course": 800 hommes pour 16 Véhicules blindés légers (10 lv5, 6nv1), 25 Transports de troupes blindés (10 nv5, 15nv1), 10 véhicules de combat d'infanterie (10 nv4), 12 chars légers nv4, 5 chars d'assaut nv3


Logistique:
- 3ème régiment du génie velsnien "Les passeurs de montagnes": 600 hommes pour 35 camions de transport nv2, 15 camions citernes, 1 bulldozer, 1 véhicules de déminage, 2 véhicules de transmission radio, 3 véhicules radars.

Autre:
350 mines antipersonnelles nv10, 250 mines antichars.
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Luc a écrit :
-Bien, cette proposition est raisonnable et je n'y vois aucun inconvénient. Soit Digrassi approuve nos revendications et nous donne du poids politique, soit nous prenons Velsna et aurons des arguments pour la suite tant avec Digrassi que nos réputations auprès du peuple.
Concernant les effectifs, ils permettront quelques tactiques. Je regrette surtout le manque de radios mobiles. Comme dit, voila déjà une succession de préconisations :
-Faute d'appui aérien, c'est sur les blindés légers qu'il faudra compter pour la reconnaissance. De plus, en cas de nécessité de faire diversion au sud pour y attirer des forces et dégarnir Velsna, ce sont ces engins que nous pourrons employer.
-Il faudra mettre à profit les véhicules radios pour bien assurer la communication entre les forces blindées au contact et nos batteries d'artilleries. Quand la cavalerie rencontrera de la résistance, elle devra pouvoir rapidement transmettre les coordonnées de la position à pilonner à l'artillerie. L'objectif est d'avoir des forces mobiles, souples et capables d'initiative, s'adaptant rapidement à l'évolution du front.
-Les véhicules radars devront servir de radars de contrebatterie, pour détecter la trajectoire des obus adverses et interpréter la position de leur artillerie, et ainsi coordonner nos canons pour faire de la contrebatterie. Ce sera nécessaire pour appuyer la progression de nos blindés.
-L'assaut de Velsna sera délicat. La ville sera surement fortifiée avec des barricades et mines, il nous faudra progresser méthodiquement en ayant une avant-garde d'infanterie et véhicules légers pour identifier les zones de résistance et démanteler les pièges, pour ensuite guider les forces de cavalerie ou artillerie.
-La campagne alentour de Velsna devra bien être fouillée et des patrouilleurs devront y rester lors de l'assaut. Nous devons avoir la certitude qu'aucun renfort n'arrivera. Les véhicules blindés seront également sollicités pour atteindre les ponts à miner.

-Il n'y a en l'état pas grand-chose d'autre à ajouter. Nous devrons adapter le reste de nos plans en fonction du contexte, tel que déjà abordé en fonction des mouvements de Digrassi. Pour l'heure, je n'ai rien à ajouter.
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