11/05/2017
16:06:33
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[TERMINE] [Wanmiri - Côte d'Assad] Juste du négoce

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Juste du négoce

Un petit vent chaud soufflait sur l’aéroport de Sivagundi. Celui-ci était, définitivement, la marque de la réussite économique du Wanmiri et de son développement technologique rapide depuis la fin de la guerre civile en 2009. Il représentait tout ; un seul coup d’œil en ce lieu suffisait à donner l’ampleur des transformations à l’œuvre dans le pays. Qui aurait pu imaginer seulement quatre années plus tôt que cette petite nation du Sud-Est du Nazum, inconnue, insignifiante, arriérée, coincée au milieu du XIXème siècle, aurait pu se développer aussi rapidement, jusqu’à être capable de se doter d’un aéroport ? Personne. Personne ne le pouvait, car cela semblait impossible. Et pourtant - pourtant ! - ils l’avaient fait.

Il faisait chaud, mais l’air n’était pas lourd et suffocant. On touchait à la fin de la mousson d’été, et les pluies avaient grandement diminué au fur et à mesure que l’air s’asséchait et que les vents s’inversaient. Bientôt, on entrerait dans la mousson d’hiver, la saison sèche comme l’appelaient les Eurysiens. En somme, il ne faisait ni trop chaud, ni trop froid, l’humidité ambiante était supportable : tout allait pour le mieux au niveau du climat. Silakheri s’en réjouissait. Oh, pas qu’il soit douillet et préfère le confort de la saison sèche, loin de là : c’était un soldat, et il avait vécu bien pire que quelques gouttelettes. Mais il savait que pour des étrangers, cela pouvait être pour le moins déconcertant, voire désagréable. Et, par conséquent, il se réjouissait que la rencontre se passe en octobre, car ainsi ses interlocuteurs ne seraient pas incommodés, et seraient plus à leur aise pour discuter. Ce qui permettrait – du moins il l’espérait – un contrat de vente rapidement.

C’est que l’on voulait s’en débarrasser de ces armes. Déjà parce que la grande majorité étaient obsolètes d’une part, pour éviter qu’elles ne tombent dans la clandestinité et ne servent à alimenter les réseaux de contrebande et les gangs mafieux d’autre part. Et enfin, parce qu’elles étaient un poids mort économiquement. Elles coûtaient bien trop cher à l’entretien pour ce qu’elles servaient. Bref, on voulait les dégager au plus vite.
Les dégager, oui, mais pas n’importe comment. Car si on refusait d’armer nos propres criminels, ce n’était pas pour soutenir ceux du voisin non plus. Il était intolérable pour Silak’ de permettre à des individus malhonnêtes de perpétrer leurs crimes simplement car on n’avait pas pris le temps de les questionner.

Alors c’était pour ça qu’il était là. Pour jouer un rôle qui n’était pas le sien : celui de l’homme politique. Oh, comme il le détestait ce rôle. Lui avait toujours été un soldat, un militaire et un stratège dans l’âme. Il trouvait un problème, et il le résolvait. En revanche, il ne fallait pas lui demander de se montrer particulièrement courtois ou habile en négociations : il disait de toute façon tout ce qu’il pensait, sans se soucier des conséquences. Jusqu’ici, ça lui avait valu quelques problèmes, mais relativement peu au regard de ce qu’on son honnêteté lui avait offert : la place de Chef des Armées de la République Démocratique du Wanmiri.

Bon. De toute façon, il n’aurait pas à être particulièrement subtil aujourd’hui : on avait prévenu les Assadiens qu’on ne leur vendrait ces armes que s’il étaient en mesure de garantir qu’elles ne serviraient pas de façon déplacée. Restait encore à définir ce qui était déplacé et ce qui ne l’était pas mais, justement, on était là pour ça. Donc on pouvait se permettre d’y aller franchement : comme on l’avait dit aux translaves, on ne vendait pas d’armes à des bouchers, d’où qu’ils viennent et quelles que soient leurs raisons.

Silak’ rêvassait, mais le temps passait. Soudain, l’avion assadien fut aperçu sur les radars de la tour de contrôle et, quelques minutes plus tard, on distinguait sa silhouette en visuel. Moins d’une dizaine de minutes plus tard, le Chef des Armées (devenu, donc, négociateur pour quelques heures) et la petite haie d’honneur qui avait été prévue s’approchaient de l’appareil, encadrant l’espace par lequel allaient sortir les représentants du régime afaréen. Dès que la porte s’ouvrit, les premières notes de l’hymne wanmirienne résonnèrent, jouées par la fanfare nationale. Qui avait eu l’idée d’une fanfare alors qu’on avait désespérément besoin d’argent, il n’en savait rien, mais il était bien obligé de s’y faire ; c’était pour le décorum.

Silak’ accueillit les représentants en se tenant au garde-à-vous (n’oublions pas qu’il s’agissait avant tout d’un combattant), mais leur épargna le salut militaire, se contentant du plus chaleureux salut traditionnel : index et majeur levés, les autres doigts repliés, partant du front en direction de la personne visée. Ceci signifiait peu ou prou « mes pensées vont à toi ». Voilà qui était bien ironique quand l’on pensait qu’il ne s’agissait au fond que de négoce et et de politique, surtout pour une vente d’armes, mais bon, ça faisait classe, et les gens appréciaient en général.

« Messieurs, je vous souhaite la bienvenue au Wanmiri. Votre voyage a-t-il été bon ? »
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Simplement des armes.


La délégation assadienne allait bientôt arriver après un long voyage de plusieurs jours. Pendant ce temps, le Chancelier feuilletait son journal préféré, Le Lion, comme à son habitude. Quant au Général, il s'adonnait à la tâche minutieuse de réorganiser les bataillons avec les nouvelles armes arrivées et celles en production. C'était une passion dévorante pour lui, une activité à laquelle il consacrait des heures chaque jour sans que personne, à part lui-même, ne sache vraiment combien de temps.

Alors que l'avion fendait les nuages, le Chancelier posa une question simple au Général :

"Pourquoi consacrez-vous autant de temps à cette tâche alors que vous pourriez la déléguer ? N'avez-vous personne pour s'en charger ? Et pourquoi intégrer ces fusils dans les bataillons alors que nous ne les avons pas encore achetés ?"

Le Général, réputé pour sa froideur, lui répondit :

"Ces armes ? Mes armes. Elles font partie intégrante du budget de l'armée. Quant aux bataillons, je passe mes journées à des réunions ennuyeuses. Quand j'ai enfin un moment de libre, je préfère me consacrer à ce que j'aime vraiment : travailler sur mon armée. Je prends le temps nécessaire parce que c'est ma passion, et je ne changerais cela pour rien au monde. Vous êtes jeune, vous ne comprenez peut-être pas, mais c'est ainsi."

Chancelier de Gauche: (réfléchissant un moment) Je vois. Vous êtes passionné par votre travail, Général. C'est une qualité rare et précieuse dans notre monde d'aujourd'hui.

Général Rahim Al-Nazir: (acquiesçant légèrement) C'est exactement cela, Chancelier. La défense de notre nation ne peut pas être simplement déléguée à d'autres. Chaque décision, chaque détail compte. C'est pourquoi je m'implique personnellement dans la gestion de nos ressources militaires.

Chancelier de Gauche: Je comprends mieux maintenant. Cette dévotion est admirable. Elle montre votre engagement envers la sécurité et la souveraineté de votre pays.

Général Rahim Al-Nazir: (observant l'horizon à travers le hublot) Nous devons être prêts à toute éventualité, Chancelier. Les menaces peuvent surgir à tout moment, de l'intérieur comme de l'extérieur. Nos forces doivent être à la hauteur, équipées des meilleures technologies disponibles.

Chancelier de Gauche: Et c'est pourquoi vous souhaitez inspecter personnellement nos armes avant de conclure l'accord.

Général Rahim Al-Nazir: Exactement. Nous avons besoin de nous assurer que ces armes répondent à nos normes rigoureuses en matière de performance et de fiabilité. Ce n'est pas seulement une question d'achat, mais de préparation stratégique pour l'avenir de notre défense nationale.

Chancelier de Gauche: Nous avons pris toutes les précautions nécessaires pour garantir que cette transaction soit transparente et conforme aux normes internationales. Notre objectif est de renforcer non seulement nos capacités de défense, mais aussi notre coopération avec la République Démocratique du Wanmiri.

Général Rahim Al-Nazir: (approuvant d'un signe de tête) C'est exactement ce que nous recherchons, Chancelier.

Chancelier de Gauche: Nous sommes sur le point d'atterrir. Avant que la délégation n'arrive, avez-vous d'autres questions ou des points que vous souhaitez aborder ?

Général Rahim Al-Nazir: Pour le moment, tout semble être en ordre. J'attends avec impatience notre rencontre et la possibilité d'examiner les équipements proposés.

Chancelier de Gauche: Parfait. Préparons-nous alors à les accueillir dignement. Nous avons beaucoup à discuter et à accomplir ensemble.


...

Chancelier de Gauche : Messieurs, je vous remercie pour votre accueil chaleureux ici au Wanmiri. Le voyage s'est bien passé malgré quelques turbulences mineures en approchant de Sivagundi, mais rien de grave. En Côte d’Assad, ce temps serait considéré comme presque glacial à cette période de l'année.

Général Rahim Al-Nazir : Mais salutations, nous sommes impatients de discuter des affaires pour lesquelles nous sommes réunis aujourd'hui.

Général Rahim Al-Nazir : Monsieur Silakheri, si c'est bien cela, je souhaiterais pouvoir examiner une de ces armes. Ce serait extrêmement bénéfique pour nous d'examiner de près leurs fonctionnalités et leur état général. Nous vous faisons bien sûr confiance, mais c'est aussi pour cette raison que je souhaite les essayer. Nos propres armes produites en Côte d'Assad présentent souvent certains défauts. C'est l'une des principales raisons pour lesquelles nous envisageons cet achat. Nous souhaitons travailler rapidement sur ces armes afin de les améliorer. Elles serviront à diverses tâches militaires telles que des défilés ou des exercices, mais surtout pour renforcer nos capacités face à des menaces comme le terrorisme. Nous avons déjà effectué des tests, mais le matériel nous fait cruellement défaut. Le dernier test a impliqué près de 80% de l'armée assadienne, laissant certaines de nos bases presque vides, ce qui est décevant étant donné la réputation de nos militaires pour leur perspicacité. Avec ces nouvelles armes, nous serons mieux équipés pour tester et sécuriser notre territoire face à toute menace, intérieure ou extérieure. Elles nous permettront également d'attirer des recrues professionnelles de haut niveau, renforçant ainsi nos forces présentes sur le terrain.

Chancelier de Gauche : Vous qui n'êtes pas très loquace d'habitude, ce sujet semble vous tenir particulièrement à cœur, Général Al-Nazir. (S'adressant directement au général) Notre général a tout dit, et nous ne souhaitons pas perdre de temps pour vous, ni vous en faire perdre. Je comprends que, comme notre cher général, la négociation et les contacts ne sont peut-être pas vos domaines de prédilection. Passons maintenant aux aspects financiers. Le montant convenu est de 21 000 UI, avec un premier paiement de 15 000 UI déjà effectué, suivi de 6 000 UI après la livraison comme convenu. Nous sommes à votre disposition pour répondre à vos questions, mais nous en avons une pour vous.
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Ainsi donc, ils étaient deux à venir. Dans un autre lieu, un autre contexte, Silakheri aurait pu dire qu’il était en infériorité numérique, et que le combat serait rude. D’ailleurs, c’était effectivement ce à quoi il pensait. Les réflexes de survie avaient la peau dure, et ne l’avaient toujours pas quitté malgré le manque d’entraînement des dernières années.

« Peu importe leur nombre. Ce n’est pas un combat, même pas verbal. Allez, détends-toi. Tu es juste là pour vérifier qu’ils ne vont pas faire n’importe quoi avec ces armes. » se sermonna-t-il.

« Et bien, messieurs, je me réjouis de voir que votre voyage s’est bien passé et que vous semblez en pleine forme. J’espère que vous n’êtes pas trop touchés par le décalage horaire : les voyages sur des si longues distances sont toujours pénibles lorsque réalisés trop rapidement, et il serait regrettable que vous n’ayez pas les idées claires.

Pour ce qui est de la température, nous pouvons vous fournir des manteaux au besoin. Nous allons en effet rester en extérieur un petit moment. Je vous invite pour le moment à monter en voiture, nous allons nous rendre dans un lieu plus approprié. Enfin, si l’on peu dire. »


Silakheri s’approcha du véhicule en question et ouvrit la portière arrière. Il monta à bord, s’entretenant quelques instants avec le chauffeur, pendant que les officiels assadiens montaient à leur bord. Puis il referma la vitre séparant les deux parties du taxi, pour avoir un peu d’intimité et ne pas être espionnés par le conducteur.

« Ah oui, mince. J’aurais pu leur tenir la portière. Enfin, je ne suis pas un laquais, et il ne faudrait qu’ils me voient comme tel. »

« Bien. Parlons peu, parlons bien, et laissons les questions financières de côté pour le moment. Vous êtes ici car l’État-major et moi-même considérons qu’il serait intolérable de vendre des armes à des meurtriers. Pas que je le pense de vous, mais nous pensons qu’ils est nécessaire de définir clairement l’usage qu’auront ces armes. Vous avez déjà commencé à répondre à cette interrogation, mais… »

Un cahot sur la route le fit décoller de son siège et le coupa dans sa phrase.

« Maudite soit cette route mal bitumée. Je disais donc que vous aviez déjà commencé à répondre à cette interrogations, mais que j’apprécierais que vous détailliez un peu. Défilés et exercices, soit, mais si ce sont peut-être les utilisations les plus fréquentes, ce ne sont pas la première utilité. Une arme, ce n’est pas fait pour parader, mais pour éliminer, vous en conviendrez. Or, votre nation se trouve actuellement être en paix avec ses voisins, et ne semble pas être sujette aux attentats. Quel est donc alors votre besoin d’armes de huitième génération ? Auriez-vous des prétentions belliqueuses ? Comme je l’ai déjà dit, nous préparons la paix, pas la guerre. Les Translaves l’ont appris à leurs dépends. »

Note HRP : J’aurais pu continuer, mais il me semble important de marquer une pause ici pour te laisser répondre, étant donné que la réponse que tu apporteras ici va changer le déroulement du reste de la rencontre.
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Rahim Al-Nazir observa attentivement ses interlocuteurs, prenant un moment pour rassembler ses pensées avant de répondre dans un ton mesuré mais ferme, ajusté à la situation diplomatique délicate.

« Vous savez, en diplomatie, les apparences peuvent être trompeuses. Nous ne sommes pas ici pour un duel de mots ou de chiffres, mais pour clarifier nos positions respectives. »

Il marqua une pause, s'assurant que son message était clair avant de poursuivre.

« Quant à votre question sur les armes de huitième génération, permettez-moi d'être franc. Notre acquisition d'armements modernes ne vise aucunement des intentions belliqueuses. Au contraire, c'est une mesure de précaution pour renforcer notre capacité de défense nationale dans une région où la stabilité est fragile. Vous l'avez peut-être remarqué, mais plusieurs groupes terroristes opèrent dans certains pays, ainsi que des milices déclarées dangereuses par nos autorités. Nous devons donc travailler dès maintenant à renforcer notre armée pour assurer notre souveraineté. »

Rahim ajusta son regard, exprimant à la fois sérieux et conviction.

« Nous sommes engagés à maintenir la paix et à prévenir toute forme de conflit. Ces armes sont destinées à dissuader, non à agresser. Les Translaves ont subi des pertes douloureuses, et nous avons appris de leurs erreurs. C'est pourquoi nous cherchons à sécuriser notre territoire et à protéger nos citoyens avec les moyens les plus efficaces disponibles. »

Il fit une pause, laissant ses mots résonner tandis que les véhicules avançaient sur la route cahoteuse.

« En fin de compte, notre objectif commun est la stabilité et la sécurité régionales mais aussi internationale. Je suis confiant que nous pouvons parvenir à un accord mutuellement bénéfique qui respecte ces principes. »

Rahim Al-Nazir regarda ses interlocuteurs, prêt à poursuivre la discussion avec ouverture tout en restant vigilant quant aux intérêts fondamentaux de son pays.
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« Bon. De mon côté, une simple déclaration sur l’honneur suffit, je ne suis pas exigeant là-dessus. Je fais confiance aux gens, je tiens ma parole, et j’estime que les autres en font de même. Pour ce qui est de l’État-major en revanche, ils demanderont probablement plus de garanties. Des choses comme des compte-rendu de l’utilisation des armes, de leur nombre encore en service ou une demande d’approbation formelle de la part du Wanmiri dans le cas où vous souhaiteriez les vendre par la suite. Ce genre de choses. »

La voiture ralentit progressivement, et finit par s’arrêter. Ils restèrent quelques secondes à l’arrêt, pendant que le conducteur parlait avec un homme à l’extérieur. Devant eux, une barrière se leva, puis le chauffeur redémarra et ils passèrent entre deux miradors. Ils venaient d’entrer dans un site militaire. Ils roulèrent au pas durent deux petites minutes, passant entre des baraquements. Puis, ils arrivèrent sur un terrain vague, aplani, d’environ un hectare. Au delà s’étendait de la forêt. Ils descendirent de la voiture.

Sur la surface herbeuse, il y avait diverses installations destinées à permettre l’entraînement des soldats. Ils étaient arrivés en face de ce qui devait être un stand de tir en extérieur. La zone était dégagée pour éviter tout accident, et un mur renforcé se situait à deux-cents mètres d’eux. Tout du long, sur les bords de la zone, se trouvaient des poteaux bétonnés. Entre ces poteaux étaient tendus des fils, sur lesquels étaient accrochés des plaques métalliques, permettant ainsi de disposer de cibles à différentes distances et hauteurs. Il y avait aussi des mannequins, lesquels étaient également renforcés aux zones les plus touchées. Quelques soldats étaient en position, et faisaient feu en visant l’une ou l’autre des plaques installées.

« Voilà. Il me semblait approprié de vous emmener sur un camp d’entraînement de notre armée. Ainsi, je n’aurais pas à répondre à vos questions concernant la qualité de nos armes : vous pourrez l’éprouver vous-même. »

Il s’approcha d’un homme, à gauche de la zone de tir, qui lui tendit une arme de huitième génération. Il la chargea, prit position, désenclencha la sécurité, visé et fit feu. Il fit mouche à deux-cents mètres de là. En plein dans le mille. Puis il réenclencha la sécurité de l’arme, et se tourna vers les deux officiels Assadiens. Il leur tendit le fusil, et leur dit :

« A vous d’essayer maintenant. Vous m’en direz des nouvelles. »
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Le Général Rahim Al-Nazir s'avança avec une démarche imposante, les yeux fixés sur le fusil de huitième génération tendu par l'homme. L'arme, d'une conception moderne et élégante, contrastait avec les modèles souvent vieillissants et capricieux qu'il avait utilisés auparavant. Rahim était réputé pour son habileté à manier des armes parfois peu fiables, et il n'avait jamais hésité à tirer le meilleur parti de ce qu'il avait sous la main. Cette nouvelle arme, bien plus sophistiquée, éveillait en lui une curiosité mêlée d'admiration. Le Général avait toujours servi l'armée avec ces armes de faible génération, des armes qui, dès les premiers tirs, n'étaient pour certaines plus capables de tirer. Elles étaient lourdes et très peu efficaces. C'est donc pour cela que, devant cette huitième génération, il comprit qu'il ne vendait pas des armes comme il avait connu auparavant. À force de se servir de ces armes lourdes et faibles, pour lui, une arme de huitième génération sans aucun défaut de fabrication serait simple à manier.

« Bon, vous savez, notre armée a une réputation en matière d'armement. On a souvent dû se débrouiller avec des modèles qui laissent à désirer. Mais ça, c'est notre quotidien. »

Il saisit l'arme, appréciant son poids et son équilibre, bien différents de ceux de ses anciens fusils. Rahim fit quelques gestes de vérification, puis chargea l'arme avec une aisance qui trahissait sa longue expérience. Il enleva la sécurité, ajusta sa prise et se plaça pour viser une des cibles à deux cents mètres. La zone était dégagée, les cibles en métal brillaient au soleil, leurs plaques métalliques vibrantes sous les impacts. Il était prêt, à ce moment précis il se rappela les premières fois où il avait tiré avec une arme.

« Vous parlez de déclarations sur l’honneur et de garanties. C’est simple, moi je comprends ça. On est des gens de parole, c’est notre code. Mais l'État-major, eux, ils veulent plus. Ils veulent des preuves, des comptes-rendus détaillés, savoir combien d'armes sont en service, comment elles sont utilisées, et s’assurer qu’on ne les vendra pas sans leur accord. C’est tout à fait normal. »

D'un geste décidé, Rahim pressa la détente. Le coup partit, sec, net, et la balle alla se loger en plein dans le centre de la cible, un éclat de poussière métallique se soulevant à l'impact. Rahim abaissa l'arme, le regard brillant de satisfaction.

« Pas mal du tout. Je dois dire que je suis vraiment impressionné. » Il se tourna vers ses homologues, un sourire en coin. « Franchement, c'est du bon matériel. Bien mieux que ce qu’on a dans nos stocks, je dois le reconnaître. Nos armes, elles ont tendance à avoir quelques... défauts. Mais ça, c’est une autre histoire. »

Il observa le regard curieux de ses interlocuteurs et, dans un geste de confiance, leur tendit l'arme.

« Allez, faites un tour avec ça. Vous allez voir, c’est une autre histoire. »

Il observa les autres tenter leur chance avec l'arme, prêt à répondre à d'autres questions ou à affiner les propositions déjà sur la table.
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Silakheri les observa utiliser l’arme les uns après les autres. Ils étaient bons. Oh, pas autant que lui, mais ce n’était qu’une question d’habitude à utiliser l’arme. Probablement que si on leur en laissait une entre les mains durant quelques jours, ils s’y habitueraient totalement, et parviendraient à toucher comme lui. La seule chose qu’il avait sur eux avec cette arme, c’était l’expérience.

Ils devaient probablement utiliser depuis longtemps des armes de mauvaises factures pour arriver si bien à prendre en main celle-ci dès le premier tir. Une performance qu’il connaissait – il n’avait lui-même eu à disposition qu’un armement de piètre capacité lors de la guerre civile – et reconnaissait à sa juste valeur. « Bien. Très bien. Ils savent ce qu’est une arme, et à quoi elle sert. Et ils ont un code d’honneur. Ce ne sont pas des voyous sans foi ni loi. »

Une fois qu’ils eurent tous pu se servir au moins une fois de l’arme de huitième génération, il les amena vers une simple table qu’ils avaient dressé dans l’herbe. Il tira une chaise, et invita ses interlocuteurs à prendre place. Heureusement, le terrain était totalement aplani, évitant ainsi les nids de poule qui auraient été du plus mauvais effet, en plus d’être désagréables.

Un homme d’une trentaine d’années s’approcha, avec quelques papiers en main. « Tenez. Ce sont les demandes de l’état-major concernant les armes. » Silakheri prit la feuille, et la lut en diagonale.

« Hum… Compte-rendu annuel détaillé… Armes en service, armes déclassées… Bla bla bla… Demande officielle au Wanmiri avant de vendre les armes, mouais, fallait si attendre… Et, ah !? Étonnant celle-là. (Il redressa la tête, regardant les Assadiens droit dans les yeux.) Bon, il y a à peu près tout ce à quoi on pouvait s’attendre. De mon côté, je l’ai déjà dit, je vous fais confiance. Vous êtes des militaires, et des hommes d’honneur. Vous savez pour quoi on peut utiliser une arme, et pour quoi l’éthique nous l’interdit. Le reste, c’est uniquement des garanties, ce que veut l’état-major, soit à peu près tout ce que je vous avais déjà dit, et le droit d’utiliser la force si vous ne respectiez pas vos engagements. En l’état, il me semble qu’il s’agit d’une clause inutile, puisque vous ne rompriez pas votre parole. Et ils ont rajouté une mention. Nos usines sont désormais capables de produire des armes high-tech de dernière génération. Alors, pas beaucoup, certes, et c’est pourquoi nous ne vous en proposons pas aujourd’hui, mais si jamais vous reveniez vers nous, ils accepteraient de vous faire une réduction sur le matériel de haut niveau en échange du retour de l’ancien matériel. Encore une de leurs garanties je pense. »

Il leur tendit le document, et un stylo.

« Tenez. Prenez votre temps pour lire. Si cela vous convient, il y a juste à signer en bas. Le prix avait déjà été fixé, donc à moins que vous souhaitiez le négocier maintenant, nous partons sur le même. »

Traité de vente d’armes assado-wanmirien.

Article 1
Par le présent traité, la République Démocratique du Wanmiri s’engage à vendre au Royaume de la Côte d’Assad 10 000 armes légères d’infanterie de huitième génération, pour un coût de 8 000 unités monétaires internationales.
Article 2
Le Royaume de la Côte d’Assad s’engage à verser 6 000 unités monétaires internationales à la République Démocratique du Wanmiri, un versement de 2 000 umi ayant déjà été réalisé.
Article 3
1. Le Royaume de la Côte d’Assad s’engage à ne pas utiliser ces armes dans un objectif autre que celui de la défense du Royaume.

2. Le Royaume de la Côte d’Assad s’engage à ne pas utiliser ces armes contre des populations civiles.

3. Le Royaume de la Côte d’Assad s’engage à ne pas fournir une quelconque organisation terroriste par ces armes.

Article 4
Pour toutes ces raisons, le Royaume de la Côte d’Assad s’engage à fournir un compte-rendu annuel à la République Démocratique du Wanmiri concernant le nombre d’armes encore en service actif, celles en service passif (réserve) ainsi que celles ayant été déclassées.
Article 5
1. Dans l’hypothèse où le Royaume de la Côte d’Assad souhaiterait se débarrasser de ces armes en les vendant, il devrait préalablement prévenir la République Démocratique du Wanmiri.

2. Cette missive a valeur de demande d’autorisation. Le Royaume de la Côte d’Assad s’engage à ne pas vendre ces armes sans l’approbation formelle de la République Démocratique du Wanmiri.

3. Par conséquent, le Royaume de la Côte d’Assad se doit d’indiquer le nom et la nature de l’entité à qui il souhaiterait vendre lesdites armes à la République Démocratique du Wanmiri, sans pouvoir invoquer le secret commercial.

Article 6
1. Si le Royaume de la Côte d’Assad souhaitait par le futur continuer d’armer correctement son armée, dans un but de défense national, la République Démocratique du Wanmiri s’engagerait à l’y aider.

2. La République Démocratique du Wanmiri s’engage donc à réaliser une réduction substantielle sur la vente d’armes de onzième génération au Royaume de la Côte d’Assad, si celui-ci s’engage à restituer les armes de huitième génération vendues dans le cadre de ce traité.

3. Cet engagement n’est valable que tant que le Royaume de la Côte d’Assad respecte les siens.

Article 7
1. Dans le cas où le Royaume de la Côte d’Assad ne respecterait pas ses engagements des articles 2, 3, 4 et 5, il devrait payer une compensation de 5 000 unités monétaires internationales à la République du Wanmiri, et serait sanctionné économiquement.

2. Ceci est réciproque : dans le cas où la République Démocratique du Wanmiri ne respecterait pas son engagement du 6e article, elle se devrait de dédommager le Royaume de la Côte d’Assad à hauteur de 5 000 unités monétaires internationales.

3. La République Démocratique du Wanmiri se réserve le droit d’utiliser la force dans le cas où les engagements du Royaume de la Côte d’Assad ne seraient pas tenus. Ceci n’est pas réciproque, compte-tenu du fait que les engagements de la République Démocratique du Wanmiri ne concernent qu’un rabais à la vente, alors que ceux du Royaume de la Côte d’Assad concernent la préservation de la paix mondiale et de la sécurité de civils.
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Le Général Rahim Al-Nazir : Merci pour votre retour détaillé. Après avoir pris le temps de lire le document, je dois dire que tout me semble clair et acceptable. Vous avez raison, il est évident que les garanties proposées sont surtout pour rassurer tout le monde et pour nous protéger mutuellement dans cette transaction. Le traité est bien rédigé, et les conditions nous conviennent. Nous allons signer le document comme proposé. Nous apprécions particulièrement la possibilité d'une réduction future sur les armes de dernière génération et la flexibilité offerte pour le retour de l’ancien matériel. Nous allons procéder à la signature du traité et nous vous ferons parvenir le document signé rapidement. En attendant, si vous avez d'autres points à discuter ou des questions, n'hésitez pas à nous le faire savoir. Merci pour votre collaboration et votre professionnalisme. À très bientôt.



Traité de vente d’armes assado-wanmirien.


Article 1
Par le présent traité, la République Démocratique du Wanmiri s’engage à vendre au Royaume de la Côte d’Assad 10 000 armes légères d’infanterie de huitième génération, pour un coût de 8 000 unités monétaires internationales.

Article 2
Le Royaume de la Côte d’Assad s’engage à verser 6 000 unités monétaires internationales à la République Démocratique du Wanmiri, un versement de 2 000 umi ayant déjà été réalisé.

Article 3
1. Le Royaume de la Côte d’Assad s’engage à ne pas utiliser ces armes dans un objectif autre que celui de la défense du Royaume.

2. Le Royaume de la Côte d’Assad s’engage à ne pas utiliser ces armes contre des populations civiles.

3. Le Royaume de la Côte d’Assad s’engage à ne pas fournir une quelconque organisation terroriste par ces armes.

Article 4
Pour toutes ces raisons, le Royaume de la Côte d’Assad s’engage à fournir un compte-rendu annuel à la République Démocratique du Wanmiri concernant le nombre d’armes encore en service actif, celles en service passif (réserve) ainsi que celles ayant été déclassées.

Article 5
1. Dans l’hypothèse où le Royaume de la Côte d’Assad souhaiterait se débarrasser de ces armes en les vendant, il devrait préalablement prévenir la République Démocratique du Wanmiri.

2. Cette missive a valeur de demande d’autorisation. Le Royaume de la Côte d’Assad s’engage à ne pas vendre ces armes sans l’approbation formelle de la République Démocratique du Wanmiri.

3. Par conséquent, le Royaume de la Côte d’Assad se doit d’indiquer le nom et la nature de l’entité à qui il souhaiterait vendre lesdites armes à la République Démocratique du Wanmiri, sans pouvoir invoquer le secret commercial.

Article 6
1. Si le Royaume de la Côte d’Assad souhaitait par le futur continuer d’armer correctement son armée, dans un but de défense national, la République Démocratique du Wanmiri s’engagerait à l’y aider.

2. La République Démocratique du Wanmiri s’engage donc à réaliser une réduction substantielle sur la vente d’armes de onzième génération au Royaume de la Côte d’Assad, si celui-ci s’engage à restituer les armes de huitième génération vendues dans le cadre de ce traité.

3. Cet engagement n’est valable que tant que le Royaume de la Côte d’Assad respecte les siens.

Article 7
1. Dans le cas où le Royaume de la Côte d’Assad ne respecterait pas ses engagements des articles 3, 4 et 5, il devrait payer une compensation de 5 000 unités monétaires internationales à la République du Wanmiri, et serait sanctionné économiquement.

2. Ceci est réciproque : dans le cas où la République Démocratique du Wanmiri ne respecterait pas son engagement du 6e article, elle se devrait de dédommager le Royaume de la Côte d’Assad à hauteur de 5 000 unités monétaires internationales.

3. La République Démocratique du Wanmiri se réserve le droit d’utiliser la force dans le cas où les engagements du Royaume de la Côte d’Assad ne seraient pas tenus. Ceci n’est pas réciproque, compte-tenu du fait que les engagements de la République Démocratique du Wanmiri ne concernent qu’un rabais à la vente, alors que ceux du Royaume de la Côte d’Assad concernent la préservation de la paix mondiale et de la sécurité de civils.

SIGNATURE
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"Lu et approuvé"
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Silakheri prit le traité que lui tendait son homologue Assadien, et signa également au bas de la page. Il faudrait encore que le Daryl ratifie la chose, mais cela ne saurait tarder. Toutes les demandes de l’État-major – et par là-même le Daryl – avaient été respectées, il n’y avait donc aucune raison que la vente soit refusée. Ensuite, il se leva.

Il accompagna les représentants de la Côte d’Assad jusqu’au véhicule qui les avait amené ici, en profitant pour leur faire visiter l’intégralité du camp, et commentant les installations. Il voulait que ce pays sache que leur armée était bien entraînée. On ne savait jamais : peut-être qu’ils devraient coopérer de façon plus approfondie dans un futur proche, ou au contraire devrait-on leur rappeler leurs engagements. Peu importait la raison : il voulait leur montrer, point. C’était sa fierté, cette armée.

Enfin, ils arrivèrent jusqu’à la voiture, dans laquelle ils montèrent, puis reprirent le chemin de l’aller en sens inverse. La route, toujours cabossée, n’était pas des plus agréable, mais ils étaient tous des soldats habitués à ce genre de traitements ; cela ne les dérangeait pas outre mesure. Finalement, ils arrivèrent à l’aéroport, où les Assadiens montèrent dans leur appareil. Silakheri remercia les représentants étrangers pour ces discussions prometteuses, et leur assura le départ des armes dans les jour qui suivraient. Il en profita une dernière fois pour leur rappeler que les Industries Helia, à qui le gouvernement wanmirien achetait déjà beaucoup, seraient ravies de leur faire un rabais sur leur prochain achat, en signe de bonne volonté. Puis, il leur fit le salut traditionnel wanmirien, et les laissa décoller pour rentrer dans leur pays.
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