01/12/2014
06:41:36
Index du forum Continents Nazum Shuharri

Il était une fois dans l'Union

Voir fiche pays Voir sur la carte
28
Juste des histoires de gens au pif !
30935
Efua bii Ato Akenten, sortie entre amies


Alors que le bus s'arrête dans la rue, une partie apparaît éventrée : le tram est en cours de construction, ici aussi. Le quartier n'existait pas un an auparavant, maintenant, c'est sa maison. La rue est relativement large, permettant le trafic des véhicules, elle est entourée d'un ensemble d'immeubles de terre crue, de pierre, d'acier, de huit à dix étages quelques immeubles passent par-dessus cette rue sur des arches passerelles. Au niveau de la rue, se trouve des bars, restaurants, bureaux, ateliers, magasins, zones de distribution, locaux associatifs, lieux communautaires liés à une tribu, un groupe nomade, une communauté, une diaspora, l'on trouve même des fermes hydroponiques sur plusieurs étages. Le reste, c'est des logements. Derrière Efua, se trouve une place où l'on se réunit pour discuter, ou pour des fêtes. Elle a rarement vue une ville aussi dense de sa vie. Elle n'aurait jamais pensé vivre dedans. Elle sort du bus et longe des arches qui couvrent une partie de la rue sous des logements. La zone est ombragée et parcouru d'un vent assez fort. Au bout d'un moment, elle tourne à droite dans une des nombreuses ruelles qui nervent la ville autour des rues principales. Elles sont en général plutôt sombres, et striées de cours, de jardins, de petits ruisseaux, de fontaines, et de petites places et de parcs. L'eau manque ici, mais l'on s'arrange pour qu'il y ait toujours un point d'eau proche, souvent dans un lieu couvert d'où on peut récupérer l'eau qui s'évapore. Autant pour l'esthétique, pour l'ambiance, pour la fraîcheur, pour que des gens assoiffés puissent trouver à boire facilement, et pour que l'on ait un endroit pour pomper de l'eau quand un incendie se déclare. L’on n’y pense pas toujours, à quel point les ruelles étroites de cette ville conçue pour la chaleur shahilie ne permettent pas à un camion de pompiers de passer, l'urbanisme de la ville implique de repenser les secours. Les pompiers n'arrivent en général pas avec un réservoir d'eau, mais avec une pompe, et vont simplement prendre l'eau au point le plus proche. Des fois, on peut aussi les voir passer au-dessus des maisons en dirigeable. Elle croise sa voisine, Dede, qui part chercher des films au videoclub. Elles échangent quelques nouvelles sur l'état de santé du fils de Dede (qui va mieux depuis quelques jours, tant mieux parce que cette grippe inquiétait sa mère) et sur le travail d'Efua (elle a travaillé toute la journée dans une cale sèche à nettoyer les quartiers d'équipage d'un navire antérinien en mauvais état avec un collègue majeq en discutant de leur vie respective, et elle commence à bien l'aimer). Elle reprends son chemin, tourne à gauche dans une montée. Elle finit par s'engouffrer à travers une porte ouverte dans une passerelle qui mène vers une cour intérieure au centre duquel poussent deux jeunes dattiers. Autour, une rampe en terre cru monte en colimaçon autour d'un ensemble d'immeubles en différents matériaux, bordée de fenêtres aux volets de bois ou d'acier finement décorés. L'endroit est extrêmement calme étrangement, comme s'il n'y avait pas des milliers d'habitants autour d'elle. L'on entend quasiment que le vent et le murmure de la discussion d'un couple dans la cour. En passant la porte elle arrive sur la pièce à vivre qui traversait l'immeuble. Les fenêtres sont ouvertes, le vent traverse la pièce. Tant mieux, elle a eu beaucoup trop chaud aujourd'hui. La table qui se trouvait près des portes qui donnaient sur la cuisine et sur la salle de bain était parsemé de plusieurs dessins d'enfant. Ám̀ma devrait être là d'ailleurs. Et Kow aussi.

A Tumgao, les rue s'enchevêtrent en des motifs complexes et semblent former un biome entier

Kow est encore en train de travailler ? Il a pris des heures supplémentaires ? Pour quoi ? Efua fouille son sac à main à la recherche de son téléphone. Sans succès jusqu'à ce qu'elle fasse tomber son sac et que le téléphone tombe sur la table, atterrisse sur un dessin d'Ám̀ma, des buffles qui s'abritent sous un arbre. Efua en a la larme à l’œil. Elle se reprends. Ce n’est pas le moment. Elle prend le téléphone, et retrouve le contact de Kow. Elle appelle, elle entends la tonalité. Ça sonne de l'autre côté. Une fois. Une fois de plus. Une fois de nouveau. Et il décroche.

"Efua, ça va ?"

"Tu as encore pris des heures sup' ?"

"Oui, on n'a pas l'argent pour les courses"

"Quand je te demande d'aller chercher de la bouffe, je ne te parle pas de l'échanger ! Ne t’embête pas avec le marché ou les magasins, va au grenier ! Leur riz, il est très bien, tu trouveras des conserves sans problème, possiblement quelques légumes, et voilà, on a un repas !"

"Depuis quand on a accès à ça ?"

"Depuis que la ville existe si tu veux savoir ! Même les bandes nomades du coin viennent se servir ! En fait, même au village, si on était prêts à faire tout le trajet, on aurait pu juste prendre de la nourriture ici"

«On n’a jamais eu la fiche je te signale !"

"De un : on l'a reçue depuis une semaine. De deux : on en a pas besoin pour des céréales, des légumineuses, des trucs secs ou des conserves de base, et même parfois des produits frais qu'ils ont en trop ! Apprends à connaître où on vit, je peux pas tout gérer !"

"Dis, j'essaie déjà de nous sortir la tête de l'eau !"

"Alors, déjà, je bosse aussi et en plus, on a déjà sorti la tête hors de l'eau ! T'est en train de faire des heures sup' pour de la bouffe qu'on peut avoir gratuitement au grenier, merde ! D'ailleurs, elle est où Ám̀ma ? A la crèche ?"

"Plus maintenant, c'est Núm qui est allé la chercher, je crois qu'elles sont en train de manger une glace sur la Place Sangare ! Au pire, appelle-là, elle te dira"

"Là, je vais faire les courses que tu étais censé faire, mais on va discuter ce soir ! Arrête de faire comme si on avait absolument besoin que tu te sacrifie sang et eau ! Là, ce n’est pas au travail qu'on a besoin de toi !"

Elle raccroche, et souffle un bon coup. Alors qu'au-dehors, quelqu'un est en train de courir, et qu'Efua sait précisément qui : un des chats du coin. Núm est très appréciée d'eux par ailleurs. Elle passe rapidement un appel à cette dernière, qui confirme être avec Ám̀ma à visiter un peu Tumgao qu'elles aussi apprennent à découvrir. Elle prends ensuite le sac à roulettes et ressort pour rejoindre à nouveau la rue principale où se trouve le grenier.

A quoi ressemble un grenier ? C'est globalement, un entrepôt de nourriture avec des silos, des chambres froides, des stocks de nourriture en tout genre, et des cuisines pour transformer la nourriture sur le point d'expirer en produits cuisinés frais. Ça lui rappelait un souvenir à Efua d'ailleurs. Celle d'une ancienne amie qui avait un fils et une fille qui s'étaient tous les deux intéressés à la cuisine. Le fils était parti apprendre la cuisine dans une école de gastronomie à Fortuna, la fille était partie à Tumgao pour cuisiner en entrepôt. Quand les deux se sont retrouvé à la maison et ont essayé de faire un plat ensemble, c'est comme s'ils ne parlaient plus la même langue, ni ne partageaient les mêmes valeurs. Le résultat était, disons... Expérimental ! Il ne serait pas impossible qu'un jour, Efua revoie cette fille, en train de préparer un des centaines de plats que les cuisiniers d'entrepôt utilisaient pour réutiliser et conserver la nourriture au maximum. Globalement, si Tumgao n'est pas la meilleure ville pour sa gastronomie, elle est (et un peu toute l'union shuhe en fait) assez réputée pour sa nourriture industrielle. Les nomades et les marins le savent, et s'y arrêtent régulièrement pour faire le plein de conserves, de plats en fûts, de marinades, de citernes de boissons, de mélanges d'herbes, de produits séchés, à l'huile, en saumure, sous vide, de confiseries produites en masse. Il y avait aussi un artisanat culinaire en ville, elle avait pu goûter aux baklavas locaux par exemple, mais sur la nourriture industrielle, elle sent clairement la différence de qualité avec les pays environnants. Typiquement, on mange très bien dans un pays comme l'Althalj ou le Banairah, mais ce sont des pays où l'on promeut une alimentation naturelle et où parler de bouffe industrielle serait plutôt péjoratif. A Tumgao, pas du tout, la cuisine de masse est quasiment un art aussi valorisé que celui de l'artisan qui fait ses pains ou ses confiseries à la main. Alors qu'elle marche entre les tas de céréales avec un sac de tissu à choisir entre plusieurs variétés de riz, elle entend une musique, une mélodie fredonnée, avec une voix très familière. Awotwe, Visage-gribouillis (oui, elle ne sait pas se maquiller, c'est une catastrophe !), l'une des personnes qu'elle a connues quand elles étaient encore parmi le rang des réfugiés cherchant une maison dans la ville. Elle approche Efua lentement, souriant dans un salut silencieux. Les deux entament la conversation à voix basse tout en jetant un œil au tas de mil.

"Le chef de mon atkinde a encore voulu couper l'électricité aux Nkrumah ! On lui a dit que ce n’est pas possible, et que c'est pas son pouvoir. Il accuse Afiríyie d'avoir trompé sa femme sans vraiment de base et lui en veut vraiment, et je ne sais même pas ce qu'il veut de lui. Le mettre sous pression ? Pour quoi ? Bref, c'est un connard"

"Je n’en voudrais pas comme chef de kinde ou de clan ! On ne choisit pas ses politiciens on dirait"

"Il faudrait que j'en parle aux joomyan du kinde, mais je crois qu'il y en a un qui ne m’aime vraiment pas. Un peu ma faute en vérité, j'ai été pas tendre avec sa fille"

"Tu peux toujours t'adresser aux autres, comme s’ils n’avaient pas autre chose à faire que de gérer les rancœurs d'un joom"

"Il y a eu quelques altercations avec les majeqa du voisinage, à cause d'un gars qui a voulu faire des modifications à une arrivée d'eau qu’il n’avait pas vu qu'elle était commune. Il y a eu des discussions, ça se tasse, mais ça retombe tout juste, ça reste un peu tendu"

Elles marchent dans la section des conserves sans rationnement. Efua cherche une conserve de mafé qui lui donnerait envie. Une légère brise souffle entre les rayons. Le crépuscule arrive, mais il fait encore chaud. La saison des pluies n'arrivera pas avant des mois, et elle n'est jamais bien longue dans la région de Tumgao, le Sahra n'est pas loin, on le sent. Il faudrait aller bien à l'Est, vers la Côte d'Assad et le Sogho pour trouver de grandes étendues shahilies, et un Shaheel plus humide.

"Tu as eu l'occasion de retourner au village dernièrement ?"

"Malheureusement, non, j'ai un peu hâte que la ville se dise qu'il serait temps de mettre des rails dans l'arrière-pays, que je puisse remonter"

"C'est un peu une demande forte, non"

"Je crois qu'ils font tranquillement leur projet, mais c'est pas bien haut dans la liste des priorités"

"Aussi, ils ont décidé de construire une ville entière pour lancer des fusées. Je sais qu'il y a des enthousiastes ici, mais j'aurais préféré qu'ils envoient ces gens en plus à Tumgao, on aurait bien besoin de plus de construction"

"Je comprends aussi qu’ils ne veulent pas concentrer tout le monde à Tumgao, il y a quand même des limites à ce qu'on peut construire d'un coup au même endroit"

"Oui, enfin, là, on sait que c'est pour mettre des trucs dans l'espace, comme si on n’avait pas déjà assez à faire sur Terre ! Tu as des Cendrés qui veulent partir dans l'espace dans la région et la mairie dit oui alors que c'est la crise ici ? Qu'est-ce qui leur est passé par la tête ?"

"Ce qui leur est passé par la tête ? C'est le seul pas de tir en construction de toute l'Afarée ! Ils se sont dit que c'était un moyen de faire survivre cette région qui n’est pas grande, c'est pas comme si on avait du pétrole comme la moitié des pays de ce continent !"

"Tchrr ! Ils ne nous font pas confiance on dirait ! Une zone qu'un nomade peut traverser librement, ça suffit ! Un endroit où on a à manger, ça suffit ! Pour le reste, on sait trouver des choses à faire. C'est nous qui faisons vivre la région. Pas besoin d'un astroport ou je ne sais pas quoi !"

"Franchement, je préfère autant avoir les Cendrés comme alliés que le Banairah ou l'Althalj, ou la Cémétie comme puissance dominante. Ils veulent une Afarée unie, selon leurs conditions. On a déjà vu comme on a été inclus dans leur forum, comme on est écouté dans tout ce qui a trait à la décolonisation. Les gouvernement afaréens veulent une décolonisation mais pas notre avis ? Très bien, on a des alliés assez débrouillards qui eux nous écoutent. On peut aussi leur tenir tête parce qu’on n’est pas seuls"

"Tu crois qu’ils ne vont pas essayer de nous dominer ? Rêve pas, ils sont là pour leurs intérêts"

"Déjà, bonne chance pour mettre les Cendrés d'accord sur comment nous dominer. Là-dessus, je craindrais plus Hohhothaï, mais ils sont déjà bien aussi occupés avec leur ville que nous avec la nôtre, et on parle d’un million et demi de gens, ce n’est pas l'Althalj ou le Banairah !"

"Crois-moi que ça suffit ! Tu crois qu'il vient d'où le pas de tir ? On pourrait faire nos propres trucs à la place"

"La mairie veut des usines, elle demande aux Cendrés et aux Nazumis, et voilà qu'on a les matériaux et les formations pour à peu près ce qu'on veut. Les chantiers navals, on ne les construirait pas seuls. Les usines textiles non plus. Encore moins l'usine à trains prévue dans quelques années"

"On pourrait, c'est juste la mairie qui choisit la solution de facilité ! Au bout d'un moment, si on veut être indépendants, il faut se battre pour ça !"

Un certain nombre de fruits et légumes frais pas loin de l'expiration sont exposés sur un rayonnage à qui veut les prendre avant qu'ils ne partent à la cuisine. Un tas de mangues fait de l’œil à Awotwe, qui en prends une pour vérifier la fraîcheur ! Elle devrait faire un certain tri pour manger la mangue, mais pour cuisiner, c'est très bien. Efua décide de sortir sa fiche de rationnement et d'aller prendre des gombos dans le rayon des produits frais. C'est le kinde qui gère le grenier et qui rationne la nourriture, et Efua aimerait demander plus de produits frais, pas forcément pour en manger plus, mais pour moins s'en inquiéter.

Il semblerait à son visage qu'une idée ait traversé Awotwe. D'un coup, elle demande

"Ça te dirait qu'on découche ?"

La proposition surprend Efua
"Vraiment ? Non, je ne peux pas, je dois j'ai une famille qui m'attends et du travail demain"

"Demain soir, on fait ça ! J'ai toujours ma tente de nomade à la maison !"

"Tu étais nomade avant ?"

"Oui, pas toi ?"

"Non, villageoise"

"Je t'apprendrais quelques trucs de nomades ! Demain, on part en hauteur, on installe la tente et on fait la fête ! Je vais aussi inviter Nsĩã et Dúnu. Tu viens ?"

"Peut-être. Je vais y réfléchir"

"On aura de quoi boire, manger, et danser, et on regardera les étoiles. Et Nsĩã et Dúnu sont chouettes ! Et tu peux inviter des amies !"

"J'ai ton numéro, si tu ne l’as pas changé dernièrement. Je te rappelle demain"

"Tu me dis demain, je te prévois déjà"

"Je te dis demain"

A la sortie du grenier, Awotwe et Efua se disent au-revoir et se font signe. Efua se retrouve dans une ville bien calme. Elle remonte la rue pour retourner dans les ruelles désormais familières. Elle se perds dans ses pensées.

Tumgao tient sur des accords assez précaires entre des peuples très différents, dans la région, et entre les continents. Ça peut sauter du jour au lendemain, et alors, qu'est-ce qu'on devient. Il n'y aurait même pas besoin d'une tempête pour souffler la ville. Juste un désaccord insoluble, au mouvais moment, et la discorde se répands comme un incendie de brousse. Et on ne peut pas dire que tout le monde est d'accord. Comment ça tient ?

Au-delà de l'organisation que je devrais avoir avec ma famille, est-ce que j'ai vraiment envie de sortir ? Une journée à la maison, c'est bien aussi

Comment on élève des enfants dans une ville de 400 000 personnes ? J'imagine que pas comme dans un village. Surtout qu'Ám̀ma aurait envie d'y retourner j'ai l'impression. Même pour Núm, c'est un gros changement. Par exemple, elle ne connaît pas tous ses enseignants, qui au fil des jours leur expliquent des choses différentes. Elle était curieuse de savoir ce qu'on apprenait à Núm et à ses camarades. C'est quelque chose qui se décidait à l'échelle du clan normalement, et je crois qu'un minimum est attendu à une échelle encore plus large, pour que tout le monde puisse accéder à une éducation supérieure dans tout le pays, voire à l'étranger. J'ai du mal à voir dans quoi j'ai moi-même mis les pieds, comment je pourrais y guider mes enfants ?

Et si l'Eurysie implosait ? Que deviendrait l'Afarée du Nord ? Et si la région de Tumgao devenait une enclave dans un monde morcelé ? On deviendrait des Cendrés ?

Et quand Ám̀ma serait grande, est-ce que sa vie serait même comparable avec ce que moi j'ai connu ?

En arrivant à la maison. Il était prévu que Kow et Efua aient une petite discussion. Ou en d'autres termes, une grosse dispute. Finalement, aucun des deux n'en a la force. Alors, les deux se regardent, et essaient tant bien que mal d'échanger quelque chose. Finalement, Kow finit par trouver des mots.

"Je n’en reviens pas qu'on soit toujours là, et qu'on soit juste là. Je ne me fais toujours pas à l'idée que demain, on est toujours là. Et après-demain aussi. Maintenant, on fait quoi ?"

"Je ne sais pas. Vivre, c'est bien non ?"

"C'est vaste. Il y a tellement de façons de vivre que je me les représente pas"

"Qu'importe tant qu'on vit"

"Non, ça importe"

"Je ne sais pas. On se posera la question plus tard. Tu pourrais passer plus de temps avec nous déjà"

"J'aimerais en tout cas"

"La bonne nouvelle : tu peux. Il suffit de demander et en général, on te l'accorde. Crois-moi qu'aucun bureau de construction ne veut se mettre un atkinde à dos, ce serait juste absurde"

"J'ai vu autrement plus absurde sur les chantiers où j'ai travaillé. Une fois, j'étais sous contrat au Shibh Jazirat Alriyh, j'ai vu un mec peindre à répétition un mur déjà peint. En fait, il accumulait un manque de sommeil depuis des semaines, au point qu'il doutait avoir déjà passé une deuxième couche. Dans le doute, il en repassait une, et ainsi de suite. Un autre a failli se prendre une pastèque qui tombait d'un échafaudage à trente mètres de haut. A cette hauteur, c'est un boulet de canon quand ça arrive en bas. Ça lui est vraiment passé à trente centimètres, il a failli y passer, il a rien vu venir, il a même pas réagi. Je pense qu'après quelques années de travail éreintant, il était désensibilisé de tout"

"Si jamais tu sens que ça ne va pas, tu en parles, on forme une famille, on n’est pas seuls. On a besoin de toi ici, d'accord ? Je t'aime et je veux te voir, et les enfants aussi"

"Oui, on fera au mieux, je m'arrangerai avec le travail"

"Pas seulement faire au mieux. C'est trop vague. J'ai besoin de toi, il faut que je puisse compter sur toi. Si tu me dis que tu vas faire les courses, il faut qu'on ait à manger au prochain repas"

"Concrètement, je sais que demain, je serais à la maison"

"C'est un bon départ"

Pour manger, ce soir, c'est très simple : faites cuire du riz (Kow le fait pilaf, avec de l'oignon et une conserve de bouillon de poulet, puis il met la boîte de conserve de verre de côté, la consigne s'échange contre des aliments rationnés), faites chauffer une conserve de mafé, mettez le mafé chaud sur le riz cuit, et pouf, voilà un plat !

En arrière fond, la radio, qui captait la fréquence FM de la station "Radio Leeuru", qui avait l'avantage de parler pular, diffusait de la musique

Autour de la table, la famille parlait peu. Personne n'avait envie de lancer la conversation, et franchement, il n'y en avait pas besoin. Le son de la musique se mêlait à celui du vent. Le souffle du vent portait les odeurs d'épices et de cacahuète. Le goût du mafé, du riz et de l'eau se mélangeaient pour créer une expérience gustative commune. Leurs couleurs se mêlaient à celle de la table et de la pièce pour former un grand motif coloré. Ám̀ma mettait du riz et de la sauce de partout, sauf dans la bouche, donc Efua l'aidait. Globalement, la famille profitait d'un moment de calme.

Le jour s'est levé, et le Soleil a redoublé d'intensité, comme s'il essayait de brûler ce qui se trouvait en-dessous de lui. Efua et sa binôme, cette fois une Pèlè du nom de Nyankómàgó passe de cabine en cabine, les nettoyant autant que possible. Dans les faits, il faudrait retirer tous les meubles, poncer les murs, passer la pièce au nettoyeur haute pression, puis une fois que tout est sec, repasser une couche de peinture antirouille, puis une fois que les deux couches sèchent, on remettrait des meubles en bon état. La compagnie souhaite faire le carénage minimum pour que ce bateau puisse flotter mais pas plus. Une lyre reste une lyre. Globalement, c'est vendredi, les musulmans ne travaillent pas, la plupart du travail est assuré par les animistes et les athées, qui reçoivent d'autres jours de repos en échange. Au bout d'un moment les deux femmes s'entendent sur le fait qu'elles ont trop marché alors elle décide de monter sur le pont prendre une pause. Elles se posent sous le soleil et prennent un café ensemble. Cela fait quelques mois qu'elles travaillent, et elles s'entendent plutôt bien. L'une sert le café à l'autre, Efua pose une question

"Comment tu te sens ici dans cette ville ? Tu es arrivée depuis longtemps ?"

"Ça fait quelques années oui, je m'y fais"

"Ça n'a pas été facile, je me trompe ?"

"Honnêtement, pas du tout. J'étais nomade auparavant, j'y pense encore parfois. C'est une vie que je ne retrouverai pas, et c'est un peu triste. Je pense que mon fils se plaît mieux en ville que sur les steppes, mais moi, ma famille et mon troupeau me manquent. J'aimerais retourner dans les steppes et même le désert"

"Tu ne vois plus ta famille ?"

"Si, si, il m'arrive de les voir, ils passent souvent à Tumgao, aussi bien pour me voir, que parce que c'est un endroit accessible, où l'on peut se reposer. Le problème, c'est que à partir du moment où on ne partage plus une vie commune, ce n'est plus du tout les mêmes relations"

"J’ai été villageoise, j'ai peur de perdre toute relation avec ma famille, j'ai peur qu'on finisse par considérer que je on fait plus partie du village où j'ai grandi, et il est possible que je ne puisse rien y faire"

"On ne coupe pas une relation familiale comme ça, la relation change forcément, mais il existe toujours. Avec ma famille on s'apprécie, et même si je me rends compte au fil du temps que nos valeurs sont de plus en plus différentes. On apprend à se redécouvrir mutuellement au fil du temps. C'est difficile, mais pas inintéressant"

"Comment tu penses que tes valeurs ont changé ?"

"Difficile à dire, franchement. J'ai remarqué par exemple qu'on n'a plus les mêmes sujets de conversation, voir même plus le même langage. Il arrive assez fréquemment que l'on n'arrive pas à se comprendre, des références qui nous paraissent évidentes et que l'autre n'a pas. Je sais que ma famille a souvent du mal à suivre quand que je parle de ce qu'il se passe en Eurysie ou au Nazum. De même que, les conversations de nomades que j'ai connues, sur ce qu'il se passe sur les steppes, je ne les comprends plus forcément. Il m’est arrivé également de me faire méchamment sermonner quand je tenais un propos qui apparaissaient irrespectueux envers les nobles, c'est une stratification sociale que l'on n'a pas en ville, j'ai oublié beaucoup d'usages à ce propos"

"D'un côté, j'aurais tendance à dire que c'est plutôt une bonne chose de se passer de nobles. Franchement ils ne servent à rien"

"Je serais plutôt d'accord, une des valeurs qui a changé chez moi depuis que j'habite en ville"

"J’imagine que ta famille n'est pas tout à fait d'accord"

"On va dire que ça divise"

En discutant, les deux femmes regardent en direction de l'océan à l'horizon, l'odeur d'iode est forte, et le vent quand il se met à souffler fort amène parfois des gouttelettes d'eau salée.

"Je n'ai jamais vécu aussi près de l'océan. Mes parents ont dit, que quand j'étais petite, j'adorais me baigner, j'aurais pu passer des heures dans l'eau. C'était assez rare qu'on aille en ville, mais quand on faisait, il passait toujours par la plage. Je n'en ai pas réellement de souvenirs"

"Des plages j'en ai vu des tas de différentes. En général je préfère me baigner loin de la ville, peut-être un jour, je m'imagine bien reprendre le nomadisme pour ma retraite, je retournerai dans ma famille, je suis contente d'avoir encore de la famille nomade"

"Dis, j’ai une amie qui m’a invité à passer ce soir à faire la fête à la belle étoile. Elle m'a proposé d'inviter des amies. Est-ce que tu souhaiterais te joindre ?"

"Franchement, oui, j’aimerais"

"Ça me fera plaisir d'y aller avec toi"

Le nettoyage du navire est fini dans la journée. Le soleil a entamé sa longue descente vers le crépuscule, et l'air ondule au-dessus du métal quand les deux femmes sortent enfin sur le quai. Il se trouve que plusieurs employés du client se reposaient à cet endroit, des matelots wanmiriens payés au lance-pierre en profitant de l'absence de régulation maritime à l'échelle internationale. Comme dit, une lyre est une lyre. Les marins se montrent très curieux vis-à-vis des deux femmes tumgaones qui viennent d'émerger d'un navire qui leur sert de maison pendant ces longs mois à naviguer avec des centaines de conteneurs sur à peu près tous les océans du monde. Quelques marins essaient tant bien que mal de bredouiller quelques mots en français, en espérant initier un semblant de contact. Ni Efua, ni Nyankómàgó ne parlent français, et quand elles comprennent que plusieurs marins essayent de les inviter à boire un coup avec leur groupe, aucune d’elles réellement à l'aise à l'idée de se retrouver entourée d'un groupe d'hommes avec qui elle n'arrive même pas à parler, et qui cherchent probablement autant à voir des femmes que des Tumgaones. Les deux tentent d'exprimer un refus poli par les gestes qu'elles trouvent et partent du quai avant que les hommes ne puissent discuter leur refus. Elles arrivent dans le bureau des carénages de Soncoro 2, pour voir Yoofi, qui croule sous les demandes de carénage, pour lui signaler qu’un navire est prêt à reprendre le voyage, et un quai à être libéré. Celui-ci les remercie grandement d’avoir fait un aussi bon travail, annonce que bien sûr, il s’assurera que la ville n’oublie pas l’accord avec leur clan, notamment sur le poisson frais, et demande ce qu’elles, personnellement, souhaiteraient en retour. Un paiement en Naïs irait très bien pour Efua (monnaie utilisée dans le commerce pèlè, reconnue par la plupart des clans qui opèrent dans la ville, ainsi que par la mairie, ce qui fait que même des Majeqa et d’autres groupes peuvent l’accepter). Elle aimerait bien se procurer quelques vêtements en plus que ne proposent pas son atkinde, Nyankómàgó aimerait plutôt de l’aide accéder à un livre dont Efua n’avait aucune connaissance, ce pour quoi Yoofi propose des contacts. Efua, après avoir rangé soigneusement sa paye dans son sac, souhaite à Nyankómàgó de la revoir tout à l’heure avant de sortir dans une des rues mouvementées qui relient le quartier Soncoro au port. Elle prévient Awotwe qu’elle allait venir dans la soirée, avec une amie. Awotwe répondit que comme elle en avait prévu deux, ça ferait toujours ça de plus à manger et à boire pour les autres. A Efua, il reste à prévenir la famille. A côté d’elle, le cuisinier d’un kiosque découpe une carpe rouge avec de grands gestes pour attirer les regards et montrer ses dons de cuisinier à quiconque passerait par là. Les prix de la brochette de poisson épicée sont affichés dans six monnaies différentes, et une pancarte porte la fameuse mention typiquement tumgaone : "je sais avec qui on s’entend", destinée aux gens qui viendraient manger à l’œil. En gros, cette phrase signifie simplement que le vendeur fait partie d’un groupe qui a passé des accords avec d’autres groupes (kinde, clan, tribu, association, commune, voire gouvernement local), qui peuvent venir obtenir des brochettes gratuites, à prix réduits, et d’autres services. Évidemment, n’importe qui pourrait se prétendre comme faisant partie d’un groupe disposant d’un tel accord pour obtenir du poisson gratuit, ce qui est en général plutôt mal vu. La phrase "On sait avec qui on s’entend" incite autant les clients à faire valoir leurs accords qu’à ne pas prendre le vendeur pour un poisson en mentant sur ses affiliations et en imaginant qu’il ne va pas deviner. Pour Efua, c’est l’une des parties les plus compliquées à maitriser de la vie dans cette région, savoir naviguer entre toute la couche d’accords entre factions, groupes, peuples et institutions qui cimentent l’économie de la ville (et de toute l’union shuharrie de ce qu’elle avait compris). Cette fois, elle a la bonne idée de demander au vendeur s’il a des accords avec le kinde d’Efua pour apprendre qu’en fait, il fait partie du même clan qu’elle, et que donc forcément il y a des accords globaux, et qu’on s’entend pour se nourrir les uns les autres. Concrètement, ça se traduit par Efua, toute contente, qui repart avec sa brochette de carpe gratuite en remerciant le vendeur.

La cuisine de rue est tout autant un lieu ou former des liens sociaux voire diplomatiques, où l'on apprends à s'entendre entre des peuples très différents, qu'un lieu où l'on vient simplement chercher à manger

La ville est construite sur une pente irrégulière au pied de falaises qui mènent vers des plateaux d’Agara (ou plateau des Trois sœurs Sow pour les Pèlès animistes). Le centre-ville est sur la zone la plus plate de la ville, et ensuite, c’est beaucoup de reliefs irréguliers. Vers l’Est, ça monte jusqu’à rejoindre le plateau. La côte est d’ailleurs l’un des moyens dont disposent les gens qui viennent en ville pour descendre la falaise sur des pentes plus douces. C’est par là qu’Efua était venue quand elle est arrivée en ville. Une partie de la pente est construite, et une ligne qui constitue le début d’un réseau ferré a été terrassée. A l’Ouest, il y a une montée vers le plateau, mais impraticable car traversée de crevasses creusées pendant des millions d’années par les pluies successives. Construire un nouveau quartier là-bas implique en général de construire des ponts en premier. Ce soir-là, cinq amies ont pris le bus vers l’Est pour arriver aussi près du sommet de la falaise que possible, puis ont continué à marcher jusqu’en haut. Elles ont ensuite longé la falaise au nord le plateau étant principalement occupé par des steppes, la ville s’étendant dans sa cuvette en contrebas, hérissées de chantiers dans tous les sens pour construire plus loin, et plus haut. Des lignes de téléphérique sont aussi en projet pour mener les gens de bas en haut de la falaise (et construire au sommet). Elles se sont installées dans un endroit qui leur apparaissait satisfaisant.

Le groupe s’est installé à l’ombre d’un marula, dont les fruits commencent à être mûrs et à tomber au sol, ce qui est une des raisons d’avoir choisi cet endroit. Les nomades du groupe apprennent aux sédentaires à poser l’armature de bois de la tente, avant d’y mettre les tissus, et normalement, de poser un lit portable.

"Imagine ça, sauf que tu dois surveiller un troupeau" s’en amuse Nyankómàgó, qui a visiblement quelques souvenirs qui remontent

"Et quand en plus, tu te prends de la poussière dans le visage ! Si tu ne gardes pas ta concentration, à la fin, la tente, elle ne ressemble à rien. C’est assez drôle tant que tu ne veux pas dormir dedans !"

Le vent varie entre une brise légère et de violentes bourrasques, alors que la lumière du Soleil qui atteint l’horizon se fait quasiment rouge. L’on entend relativement peu la ville de là où elles sont alors qu’à quelques mètres à vol d’oiseau, s’étendent déjà des immeubles. La quasi-absence de voitures a de quoi étonner toute personnes habituées aux villes de pays voisins, c’est aussi ce qui attire les nomades ici. Il est plus simple de gérer un troupeau quand il n’y a pas des dizaines de véhicules à moteur pour les effrayer. Et tant qu’à devoir s’installer dans une ville, autant que ce soit la ville dans laquelle l’on a appris à se sentir un peu détendu, et où l’on a souvent des amis. Vue du haut des falaises, la ville ressemble à une masse ocre à brune de bâtiments qui donnent une texture rugueuse à la zone à peu près plate en contrebas. Alors que le groupe termine de poser le tissu sur le toit, la lumière à quasiment viré au pourpre, et la ville commence à émettre une faible lueur au fil des lumières qui s’allument. Les amies se regardent entre elles, alors qu’Awotwe allume une lanterne. Cette lampe sera la différence entre la fête et l’obscurité.

Dans une vraie fête à Tumgao, on danse, on danse, on danse…

Et comme dans ces longues nuits près de frontières, disons… En tension, pas de feu au campement, on danse pour rester au chaud, éveillé, à veiller sur nos frères et sœurs qui dorment. La musique crie moins fort que la lumière d’un feu, que la chaleur qui tape sur la caméra infrarouge d’un drone. Pas besoin de crier dans le paysage pour danser. Mais aujourd’hui, personne ne dort, donc pas d’écouteur : on la laisse se répandre dans l'air depuis la radio. On la laisse emporter tout le monde dans une mélodie commune, un rythme qui coordonne la danse jusqu’à faire des cinq amies, un groupe. Tout le monde ne se connaissaient pas entre elles le matin même. A un moment, une personne emporte la lanterne pour aller uriner dans la steppe. Les autres femmes s’arrêtent de danser : personne n’irait quand même danser dans le noir jusqu’à ce que la falaise ne les emporte en ville. Alors, les quatre silhouettes se réunissent près de la tente, et se posent, en sueur dans le froid nocturne, la musique toujours présente, prête à guider les voyageurs dans le noir.

"Ici, ce sera la ville un jour, tu imagines toute la région devenir une ville ?"
Personne ne sait qui dit quoi, et ce n’est pas grave

"Alors, on dansera en terrasse, et on énervera un millier de voisins !"

"C’est parfait ! Emmerdons la ville un peu !"

"Montons le volume, et emmerdons l’Afarée entière !"

"Emmerdons le monde à travers les océans !"

Derrière la tente, une lumière s’agite, les silhouette devienne des ombres noires palpitantes sur le sur le blanc mouvant du tissu. C’est Ackon qui se ramène avec la lampe, découvrant un groupe couvert de poussière.

Et l’on retourne danser main dans la main. L’on veut rester ensemble. Même si seulement pour une nuit. Qui sait quand le Soleil se lèvera. Qui a encore une notion du temps dans cette soirée. L’heure est un souvenir de ces lueurs en contrebas. Il pourrait bien se lever dans cent ans, qu’est-ce que ça change. Pour le moment, c’est le domaine des étoiles, et de cinq amies qui dansent. La seule chose qui finit par arrêter la danse continue, c’est la fatigue qui commence à peser sur tout les muscles du corps. Il arrive un moment où les amies finissent par poser leur corps sur le tissu qui recouvre le sol de la tente, à éteindre la musique, puis la lampe. Finalement, il est temps que l’obscurité ait sa place. Il est temps d’accepter son étrangeté, possiblement pour quelques heures. Et on retournera danser.

"Efua, tu dors ?" chuchote une voix dans la tente

C’était la voix d’Awotwe, enfin, normalement
"Toujours pas, pourquoi ?"

"Maintenant que tu es posée en ville, tu te vois faire quoi dans vingt ans ?"

"Je ne sais pas, et toi ?"

"J’y réfléchis depuis quelques mois. C’est étrange de se dire que l’avenir qu’on s’imaginait est juste impossible"

"Danser peut-être ? Ça m’irait si la danse était mon futur. Les crises existentielles, c’est pour demain, d’accord ?"

"Demain, il n’y aura plus de crise existentielle ! On ne peut pas se laisser achever comme ça !"

"Alors, on dansera. Bonne nuit"

La nuit a été courte, il semblerait. Alors que l'aurore pointe sur l'horizon, une amie d’Awotwe, Píèsíe, est déjà levée, à regarder le lever de soleil, la bouteille de bissap à la main. Efua se pose à côté, les deux femmes se sourient, et ensemble, regardent la nuit disparaître pour la journée. La tête des deux femmes semble indiquer qu’elles se sont couchées très tard, ou très tôt. Efua réalise qu’il va falloir faire le chemin en sens inverse pour revenir en ville, ce à quoi Píèsíe réponds :

"Oui, justement, c’est ça qui est sympa. On ne sort pas de la fête sans une marche, comme quand on était sur les steppes"

"Du coup, c’est toujours la fête ?"

"On est toujours ensemble, non ?"
Haut de page