Posté le : 08 mars 2025 à 23:41:13
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L'Avènement du Mouvement Équinoxial
Il faut comprendre pourquoi la Révolution n'est jamais totale. Pourquoi chaque insurrection s'arrête au seuil du possible, pourquoi chaque feu s'éteint au contact du réel, pourquoi la fureur elle-même, une fois victorieuse, s'endort dans la paresse du monde. Nous avons traversé les âges en accumulant des moments de rupture inachevés, chaque fois stoppés par l'incapacité humaine à s'arracher aux forces de gravité de la culture. Car la culture n'est pas un refuge, elle est une inertie, un marais dans lequel les idéaux s'engloutissent, où chaque révolution finit par être digérée, transformée, neutralisée. L'histoire humaine n'est qu'une suite d'expériences interrompues, de tentatives tronquées, où l'ardeur première s'efface derrière la gestion du lendemain.
Nous devons penser un seuil. Un seuil au-delà duquel la Révolution ne retombe plus dans l'histoire, un point où elle cesse d'être un épisode pour devenir un état permanent du Réel. Ce seuil, nous l'appelons l'Équinoxe. Ce n'est pas une métaphore. C'est une clef cosmique et politique, un moment où le temps se retourne contre lui-même, où l'accumulation des forces devient si violente qu'elle explose en une rupture absolue. Il ne s'agit pas de prendre le pouvoir, il ne s'agit pas de réorganiser une structure : il s'agit d'anéantir la possibilité même d'un retour en arrière, de réécrire la dynamique du monde à partir d'un point d'irréversibilité. La modernité elle-même s'est pensée comme un Équinoxe, mais elle n'a produit qu'une simulation de rupture. Un théâtre de la transformation où tout change pour que tout demeure. Elle a fragmenté la perception, a pulvérisé les symboles, a déconstruit les mythes, mais n'a jamais rien transcendé. Elle a maintenu l'illusion du mouvement alors qu'elle ne faisait que réorganiser le champ clos des possibles, enfermant l'humanité dans un temps circulaire où les révolutions ne sont que des reprises, des réadaptations, des mises à jour du vieux monde. L'Équinoxe Révolutionnaire est l'antithèse de cette stagnation. Il n'est pas un changement de régime, ni une transformation sociale progressive, il est le point où tout bascule, où la rupture n'est plus négociable. L'instant où le Mouvement dépasse la culture, où la dynamique elle-même devient plus réelle que les structures. Ce n'est plus un soulèvement, c'est une mutation, une force qui n'a plus besoin de justification car elle se suffit à elle-même. Nous ne parlons pas ici d'un Événement, mais d'un changement d'état. L'Équinoxe est le moment où les concepts deviennent des armes, où les idées s'incarnent, où la pensée se matérialise en foudre et en acier. Où l'Humanité, enfin, cesse de se penser dans la soumission aux structures qu'elle a elle-même créées. Où elle brise la latence, où elle déchire la stagnation du Réel. C'est la seule révolution qui compte. La seule qui ne pourra pas être récupérée. La seule qui ne pourra pas être trahie.
Les siècles nous ont menti. Ils nous ont appris que l'Histoire est un cycle, une répétition, une marée qui monte et redescend, un jeu où les révolutions naissent, s'épuisent, et laissent place à une nouvelle oppression. Ceci est un mensonge. Un mensonge propagé par ceux qui ont besoin de croire que l'ordre est une fatalité, que chaque insurrection est un souffle avant le retour de l'étouffement. L'illusion des cycles est l'outil principal du vieux monde : faire croire que tout retournera à la normalité, que chaque excès sera corrigé, que chaque flambée sera ramenée à la température du quotidien. Mais nous ne sommes pas des astres orbitant autour d'un soleil mort. Nous sommes une force qui ne revient pas en arrière. Nous refusons l'idée que la Révolution puisse être une séquence historique, un instant glorieux perdu dans le flot du temps. Chaque tentative révolutionnaire a échoué parce qu'elle s'est crue destination, parce qu'elle a vu dans sa victoire un aboutissement, et non une accélération. Dès qu'elle s'est fixée, dès qu'elle a voulu se stabiliser, elle a commencé à mourir. L'histoire nous enseigne que l'instinct révolutionnaire s'érode dès qu'il se croit arrivé, dès qu'il cesse de penser en termes de vitesse et commence à penser en termes de structure. C'est ainsi que l'Ancien Monde survit : non pas en combattant la Révolution, mais en l'amadouant, en la laissant se figer, en la convainquant qu'elle peut devenir un nouvel équilibre. Ce que nous proposons, ce que nous affirmons, c'est l'abolition des cycles. Le refus de toute arrivée. La Révolution doit être un mouvement pur, une vitesse qui ne se laisse pas rattraper, un événement qui ne connaît pas de conclusion. L'Ancien Monde ne sera réellement détruit que lorsqu'il ne pourra plus nous retrouver, lorsqu'il ne pourra plus nous réabsorber, lorsqu'il sera dépassé non seulement dans les faits, mais dans le concept même d'un retour possible. Comment y parvenir ? Par l'accélération permanente. Chaque victoire révolutionnaire doit être le prélude d'une nouvelle accélération, un seuil vers une nouvelle rupture, un enchaînement d'événements qui empêche toute consolidation de l'ordre. Tant que nous avançons, ils ne pourront pas nous rejoindre. Tant que nous imposons notre vitesse, ils seront à la traîne, incapables de nous réintégrer, incapables de nous ralentir, condamnés à un monde qu'ils ne comprennent plus, qu'ils ne maîtrisent plus. Nous devons penser la lutte comme une propulsion infinie. Ne jamais nous contenter d'une prise de pouvoir, ne jamais nous croire installés, ne jamais accepter que la Révolution puisse devenir un État figé. Nous sommes une force en fuite vers l'avant. Il ne s'agit pas de stabiliser la Révolution. Il s'agit de faire en sorte qu'elle ne puisse plus jamais être rattrapée. L'erreur fondamentale des révolutions passées a été de se penser en termes d'individus, de figures, de corps, de statues qu'on élève pour mieux les figer dans la pierre et les ensevelir sous la poussière. L'Homme n'est pas la Révolution. Il n'est qu'un support temporaire, un relais, une membrane à travers laquelle le Mouvement se propage. Tant que nous resterons prisonniers de la chair, tant que nous définirons la Révolution à travers des noms, des visages et des institutions, elle sera condamnée à ralentir, s'alourdir, et mourir. Le révolutionnaire ne doit pas se voir comme un individu. Il doit cesser d'exister en tant que sujet et devenir pur vecteur. L'ego doit être dissous, les identités doivent être abandonnées au profit d'un seul impératif : continuer le Mouvement. Les grandes révolutions de l'histoire ont échoué non pas parce qu'elles ont été combattues, mais parce qu'elles ont voulu se fixer, se cristalliser en nouvelles structures, croire qu'un État révolutionnaire pouvait être autre chose qu'un paradoxe. Chaque instant où elles se sont posées la question du pouvoir, du maintien, de l'organisation, elles ont commencé à ralentir, à se charger du poids de leurs propres institutions, jusqu'à devenir ce contre quoi elles s'étaient dressées.
Il faut comprendre la nature véritable d'un organisme politique révolutionnaire. Il ne peut être conçu comme un assemblage de structures, mais comme une dynamique pure. Un ensemble qui se perpétue non pas par ses institutions, mais par la force de son mouvement. Ce qui veut dire qu'aucune forme ne doit être sacralisée, qu'aucun mode d'organisation ne doit être considéré comme définitif, que chaque structure doit être conçue comme éphémère, immédiatement remplaçable. Il faut penser le flux avant la forme. L'important n'est pas ce qui est construit, mais ce qui est en train de se construire. L'unité du Mouvement ne vient pas d'un parti, d'une armée, d'un État, elle vient de la vitesse même de sa propagation, du fait qu'il ne peut être contenu.
Nous n'avons pas besoin d'une société révolutionnaire figée. Nous avons besoin d'un monde qui ne se stabilise jamais. Où la Révolution n'est pas un instant mais un vecteur d'existence, où la politique cesse d'être un jeu de structures et devient une expansion pure, une dynamique de transformation permanente. Le sang des révolutions passées a nourri des monuments. Le nôtre ne nourrira rien. Il s'écoulera dans la vitesse, dans l'accélération de ce qui ne pourra jamais être rattrapé, jamais arrêté, jamais figé. Il n'y aura pas de fin. Il n'y aura pas d'héritage à protéger, ni de musée à entretenir. Il n'y aura que le Mouvement.
Construction d'un Mouvement Total : Dissolution des Structures, Absorption des Énergies
Un mouvement qui s'arrête est un mouvement qui meurt. Toute structure qui se fige est déjà une trahison de son propre élan, une capitulation aux forces de stagnation, aux résidus d'un monde ancien qui cherche à faire de chaque révolution une nouvelle prison. Nous ne sommes pas ici pour bâtir une citadelle où les idées viendraient se fossiliser, ni pour établir un appareil qui finirait par s'alimenter lui-même au détriment de sa cause. Nous sommes ici pour devenir la vague, être la tempête, ne jamais cesser d'avancer. Le Mouvement doit être total, non pas en ce qu'il cherche à dominer, mais en ce qu'il doit absorber tout ce qui pourrait un jour le freiner. Les hiérarchies sont des illusions utiles pour ceux qui veulent figer le monde dans un ordre à leur avantage. Nous refusons cet ordre. Nous refusons les organes de pouvoir, car le pouvoir ne peut appartenir à personne. Il n'est qu'une énergie à canaliser dans l'instant, un vecteur de transformation qui ne doit jamais s'accumuler, sous peine de devenir une masse inerte. Tout ce qui s'accumule s'effondre. Tout ce qui prétend exister pour durer est déjà en train de mourir. La seule façon d'assurer l'intégrité du Mouvement est de refuser que quoi que ce soit puisse lui survivre.
Il faut détruire la tentation de l'institutionnel, l'inclination à la structure pérenne, qui transforme la force en inertie, la radicalité en conservatisme. Il faut désintégrer la bureaucratie révolutionnaire avant qu'elle ne se forme, car toute bureaucratie n'est que le début d'un cimetière. Ce qui doit être fait doit être fait immédiatement, et ce qui est fait n'a pas besoin d'être documenté : seul le réel est témoin, seul le réel doit survivre. Un ordre de mission qui met trop de temps à être formulé est un ordre déjà caduc. Un comité qui débat de la marche à suivre est un comité qui a déjà trahi le principe d'action. Les décisions ne doivent pas être prises par des organes, mais par ceux qui les formulent, et immédiatement exécutées. Nous ne croyons pas en la délégation du pouvoir, nous ne croyons qu'en l'immédiateté de l'impact. Celui qui conçoit une attaque doit être celui qui la mène, celui qui formule une ligne stratégique doit être celui qui l'incarne, car dans le processus même de délégation, il y a déjà l'ombre du ralentissement, l'amorce du compromis, la naissance du contretemps. La Révolution est une force vitale, et une force vitale ne se gère pas avec des paperasses, avec des rapports, avec des organes de décision. Elle se déchaîne, elle emporte, elle ne se justifie qu'à l'instant où elle existe, et tout ce qui prétend vouloir la rationaliser est déjà en train de l'étrangler. Il faut tuer la bureaucratie avant qu'elle ne nous tue. Chaque instant où nous passons à organiser est un instant où nous cessons de bouger. Chaque protocole ajouté est un grain de sable jeté dans le moteur du Mouvement. Nous ne devons jamais devenir un État, nous ne devons jamais devenir un Parti, nous ne devons jamais devenir une Administration. Nous devons être une force qui ne se capture pas, qui ne se comprend pas, qui ne laisse pas de trace stable, qui ne s'écrit pas. Nous sommes un cri, un effondrement, une percée brutale dans la continuité du monde. Tout ce qui veut ralentir, modérer, organiser, instituer, doit être brûlé dans l'instant. Nous sommes l'émeute permanente. Nous sommes l'armée qui ne bâtit pas de casernes, qui ne se laisse pas recenser. Nous sommes ce qui fuit en avant, ce qui n'accepte pas l'ancrage, ce qui refuse le moule. Car nous savons que la fin de chaque révolution a commencé dans le moment où elle a cru devoir se structurer. Nous n'avons rien à structurer. Nous avançons. Nous sommes une action.
L'individu est un mirage. Une fabrication artificielle de la modernité, un concept élaboré pour isoler, fragmenter, rendre chaque être vulnérable et impuissant face au monde qu'on lui impose. Nous ne croyons pas en l'individu. Il n'est qu'un résidu, un déchet du vieux paradigme qui veut que chaque existence soit une entité distincte, coupée des autres, privée de sa force. Cette illusion a été imposée pour que les masses ne puissent jamais se comprendre comme un seul et unique Corps Total, pour que jamais la puissance collective ne se réalise en tant qu'entité unifiée et invincible. Nous n'avons plus de place pour l'illusion du sujet. Ce qui compte, ce qui agit, ce qui crée l'Histoire, ce n'est pas l'individu, c'est le Mouvement. Chaque être qui entre dans la révolution cesse d'exister en tant qu'unité isolée et devient une cellule, un nerf, un muscle du Corps Total. Il n'y a plus de « je », il n'y a que « nous », et ce nous n'est pas une somme d'individualités, mais un organisme unique, une entité mouvante, une force totale qui s'auto-engendre et se propulse vers l'avant. Le Parti-Mouvement ne doit pas être une structure extérieure au peuple. Il ne doit pas être une avant-garde coupée de la masse, un guide distant, une machine séparée de ce qu'elle prétend libérer. Il doit se dissoudre dans la vie même des peuples, se fondre dans leurs gestes, leurs instincts, leurs désirs profonds. Le Parti-Mouvement n'est pas une organisation, il est une révélation, une reconnaissance que la Révolution est déjà là, en chaque instant, en chaque impulsion, en chaque colère et en chaque rêve. Il ne dirige pas, il n'encadre pas : il est déjà la structure invisible de ce qui est en train de naître. C'est ainsi que nous dépasserons toutes les contradictions. L'Histoire nous a enfermés dans ses conflits internes, elle a tenté de nous faire croire que nous devions résoudre nos désaccords, que nous devions organiser des débats, clarifier nos idées, bâtir un consensus. Mensonge ! Les contradictions ne sont pas à résoudre, elles sont à accélérer. Tout conflit interne au Mouvement doit être transformé en mouvement, en élan, en poussée vers l'avant. Nous ne devons pas nous arrêter pour trancher entre deux options, nous devons les fusionner en un seul acte, les faire converger dans l'action pure. Nous ne pouvons pas échouer tant que nous avançons. Nous ne pouvons pas nous diviser tant que nous nous mouvons ensemble. Le Corps Total ne doit jamais se figer, ne jamais se contempler, ne jamais s'analyser lui-même. Il doit continuer d'absorber chaque élément, de l'intégrer à son flux, de le transformer en énergie nouvelle. Il n'y a plus de débats. Il n'y a plus de fragmentation. Il n'y a que la poussée de la Révolution qui, en avalant chaque contradiction, ne laisse derrière elle qu'une seule vérité : avancer, toujours plus vite, toujours plus fort, jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien du monde ancien. Il n'y a plus de frontière. Plus de séparation entre la politique et la vie, entre la guerre et le quotidien, entre l'individu et le Mouvement. Ces distinctions ont été fabriquées pour neutraliser la puissance révolutionnaire, pour enfermer la lutte dans des espaces délimités, la transformer en une activité parmi d'autres, en un engagement optionnel, en une possibilité là où elle doit être une nécessité. Nous refusons cette illusion. Toute action est révolutionnaire ou n'est rien. Tout geste qui ne sert pas la Révolution, qui ne participe pas à son accélération, est un geste mort, un poids mort, une inertie qui doit être arrachée de nos vies. Il ne peut plus y avoir de passivité, plus d'indifférence, plus d'espaces neutres. Tout espace est un champ de bataille. Tout regard est une déclaration d'intention. Tout mot est un signal. La lutte ne peut plus être un moment. Elle ne peut plus être un événement. Elle doit infuser la totalité du réel, s'étendre dans chaque interaction, dans chaque pensée, dans chaque désir. Il ne s'agit pas de faire la guerre, puis de rentrer chez soi. Il s'agit d'être en guerre à chaque instant, de ne plus distinguer le combat de l'existence, d'effacer la frontière entre la résistance et la vie. Nous devons reprogrammer notre propre biologie. L'Homme nouveau ne peut être qu'un être en Mouvement, une entité dont chaque cellule est dirigée vers l'avant, dont chaque réflexe est une impulsion révolutionnaire. L'immobilité doit devenir insupportable. L'hésitation doit être perçue comme une anomalie physique, une dysharmonie à éradiquer. Nous devons réécrire nos instincts, nous redéfinir comme des organismes de transformation, des êtres incapables d'accepter la stagnation, des corps qui ne respirent que dans la vitesse et l'assaut. La révolution ne peut plus être un choix, elle doit être un besoin. Un instinct aussi fondamental que la faim, la soif, la respiration. Un être qui n'est pas en lutte doit ressentir un vide, une absence, une douleur dans la chair, un manque existentiel profond. La révolution doit cesser d'être un combat. Elle doit devenir une adaptation évolutive. Une réponse biologique à l'étouffement du monde ancien. Nous devons devenir incompatibles avec l'immobilisme, intolérants à la latence, incapables d'exister sans mouvement.
Méthodologie de l'Expansion : Infuser l'Équinoxe dans la Réalité
Le monde ancien ne peut pas être détruit par un simple assaut. Il est un organisme amorphe, une masse sans centre, une hydre qui absorbe chaque coup qu'on lui porte pour le transformer en un élément supplémentaire de son ossature. Chaque contestation qu'il tolère, il la neutralise. Chaque révolte qu'il digère, il l'intègre comme une anomalie qu'il finit par domestiquer. Ceux qui croient encore à la prise du pouvoir comme un aboutissement sont déjà morts, englués dans la pensée linéaire de la subversion contrôlée. La Révolution qui s'annonce n'aura pas de front, pas d'axe, pas de chef de file : elle sera une saturation pure de la réalité, une implosion provoquée de l'intérieur. Il ne s'agit pas de conquérir, mais de rendre le monde inhabitable pour lui-même. L'ennemi n'est pas un tyran à renverser, une oligarchie à éliminer, un système à remplacer. L'ennemi est la structure elle-même. Une architecture invisible qui s'adapte à chaque tentative d'opposition, qui simule le changement pour mieux absorber la menace. Ce n'est pas une forteresse à abattre, c'est un fluide qui s'infiltre dans chaque interstice et dont la seule faiblesse est l'incapacité à gérer ce qu'il ne peut pas capturer.
C'est là que l'Équinoxe doit frapper. Il ne s'agit pas d'attaquer un point précis, mais d'inonder la réalité de nouvelles formes de luttes, de signaux dissidents, de gestes imperceptibles qui s'accumulent en un chaos impossible à canaliser. Il faut provoquer une surcharge, un effondrement interne, un moment où le Système, assailli de toutes parts par des impulsions qu'il ne comprend pas, ne pourra plus maintenir sa cohésion. L'action révolutionnaire ne doit plus être une stratégie fixe. Elle doit être un mouvement polymorphe, insaisissable, un réseau neuronal qui se reconfigure à chaque instant, qui change de forme avant même que l'ennemi ne puisse le nommer. Chaque attaque doit se dissoudre dans une nouvelle attaque, chaque percée doit être un prélude à une autre rupture, chaque initiative doit être un feu qui en allume cent autres. Nous devons apprendre à disparaître et réapparaître, à changer de langage avant qu'il ne soit compris, à muter à chaque instant pour devenir un phénomène que le monde ancien ne pourra plus appréhender. Il ne s'agit pas de s'opposer à l'ordre dominant : il s'agit de lui refuser la stabilité nécessaire à sa propre survie. La Révolution ne viendra pas comme une armée en marche. Elle viendra comme un virus. Une propagation silencieuse et foudroyante. Une saturation du réel jusqu'à l'implosion. Ainsi la Révolution ne sera plus un soulèvement, ni un mouvement planifié, ni un assaut frontal. Elle sera une dissolution totale du champ de bataille, une expansion de la lutte dans toutes les dimensions du réel, une explosion simultanée et démultipliée que l'ennemi ne pourra ni contenir ni comprendre. La guerre que nous menons n'a pas de ligne de front. Elle est éclatée, atomisée, omniprésente et insaisissable. La vitesse est notre seule doctrine. Non pas la vitesse mécanique des armées organisées, ni celle des révoltes qui avancent vers un objectif précis, mais une vitesse qui ne connaît pas de destination, qui n'a d'autre but que de rester hors de portée. L'ennemi a besoin de repères, de stabilité, de points d'ancrage sur lesquels il peut construire sa riposte. Nous ne lui en donnerons aucun. Chaque attaque doit être remplacée avant même qu'elle ne soit arrêtée. Chaque victoire doit déjà être un dépassement, un déploiement vers une autre brèche, un autre point de rupture.
Nous ne devons pas chercher à submerger l'ennemi par le nombre. Il faut l'écraser sous l'impossibilité de suivre la dynamique du Mouvement. Son erreur fondamentale est de croire qu'il peut comprendre, anticiper, organiser une contre-offensive rationnelle. Mais le rationnel est une illusion du monde ancien. Il veut cartographier la rébellion, la contenir dans des catégories, y voir un schéma qu'il pourrait apprendre à maîtriser. Nous devons lui refuser ce luxe. C'est là qu'intervient l'offensive psychique. Nous ne nous attaquons pas seulement aux infrastructures physiques du pouvoir, mais à ses fondations mentales, à ses matrices idéologiques, à ses schémas de perception. L'ennemi ne doit pas seulement être confronté à une insurrection, il doit être privé de ses propres repères, il doit être poussé à la panique, à l'auto-sabotage, à l'impossibilité de discerner où et comment frapper. Nous frappons dans les interstices du réel. Nous modifions le langage, les symboles, les mythes, les signaux. Nous nous infiltrons dans la psyché de l'ennemi, nous lui injectons des doutes qu'il ne peut plus contenir, nous brisons sa confiance en ses propres structures. Nous sommes le virus dans son code source, la fissure dans sa perception du monde. L'Insurrection Permanente n'a pas de conclusion. Elle ne vise pas à remplacer l'ordre par un autre, elle vise à rendre impossible le retour de l'ordre tout court. Ce n'est pas une guerre pour la conquête, c'est une guerre pour le déracinement total, la libération pure par l'effondrement de tout cadre stable. Nous ne voulons pas un monde nouveau. Nous voulons un monde qui ne cesse jamais d'être nouveau.
Hygiène de l'Offensive : Justifier l'Inéluctable
Il n'y aura pas de compromis. Il ne peut pas y en avoir. La Révolution n'est pas un dialogue, un processus de négociation, une tentative d'amadouer l'ennemi pour obtenir des concessions fragmentaires. Chaque compromis est une trahison. Chaque pas en arrière, chaque ralentissement, chaque moment d'hésitation est une victoire du monde ancien, une consolidation de son pouvoir, une extension de sa survie. Nous ne venons pas parlementer. Nous venons accélérer son agonie. Il ne s'agit pas d'une guerre d'idées. Il ne s'agit pas de convaincre, car convaincre implique que l'adversaire pourrait être amené à la raison. Mais il n'y a pas de raison dans ce monde, il n'y a qu'une structure de contrôle, un réseau de conditionnements, une matrice où tout est conçu pour que le statu quo semble inévitable, où chaque tentative de le dépasser est automatiquement canalisée, réduite, reformulée pour le servir. Nous ne pouvons pas discuter avec l'inertie. Nous devons la pulvériser. La civilisation actuelle n'est pas un adversaire. C'est un poids mort. Un cadavre dont l'odeur imprègne l'air, un amas de vestiges qui ne continue d'exister que parce que personne ne veut l'enterrer. Nous devons être ceux qui donnent l'impulsion finale, qui forcent la chute, qui accélèrent la décomposition jusqu'à ce que le monde ancien s'effondre sous son propre poids.
L'ennemi se cache derrière le mythe du gradualisme, cette illusion qui voudrait faire croire que la Révolution peut être progressive, intégrée, lissée dans le temps, adaptée à la lenteur du réel. C'est un mensonge. Il n'y a pas de transformation douce, pas d'évolution maîtrisée. Chaque pas retenu, chaque ralentissement, chaque tentative de s'adapter au rythme imposé par l'ordre dominant est un aveu de faiblesse, une soumission déguisée. Il faut imposer un rythme que le monde ancien ne peut pas suivre. Il ne suffit pas de dire "nous sommes inévitables", il faut devenir l'inévitabilité, imposer une vitesse qui rend toute résistance vaine, écraser les structures par l'impact répété, ne jamais ralentir sous prétexte de rendre le processus acceptable. Il faut que le choc soit total, qu'il ne laisse pas de terrain à la reconstruction, pas d'espace pour un compromis, pas d'issue pour ceux qui voudraient ralentir, négocier, contrôler la chute. La Révolution est un acte de destruction totale. Elle ne se contente pas de briser un pouvoir, de renverser un régime, de détruire une structure. Elle est un incendie qui consume tout, y compris ceux qui l'invoquent, y compris ceux qui la portent en eux comme une certitude. Il ne s'agit pas simplement de tuer l'ennemi, il s'agit de tuer ce que nous étions avant d'entrer dans le feu, de nous offrir en sacrifice à l'instant de rupture, d'accepter que ce que nous sommes aujourd'hui n'aura plus aucune signification dans ce qui viendra après. Chaque révolution trahie l'a été par ceux qui ont cru pouvoir rester eux-mêmes après la victoire. Ceux qui ont pensé que le combat n'était qu'un passage, une transition entre deux équilibres, que l'Histoire pouvait leur offrir un rôle à perpétuer une fois la bataille gagnée. Ils ont voulu stabiliser, ils ont voulu inscrire leur moment dans la durée, et par cette seule tentative ils ont perdu. Ils ont figé l'élan, ils ont voulu donner une forme au chaos, et le chaos s'est retourné contre eux. Il n'y aura pas de retour. Ce qui vient après n'est pas une société réformée, ce n'est pas un nouvel ordre qui remplacerait l'ancien. Ce qui vient après est une existence méconnaissable, une transformation si radicale que la pensée elle-même ne pourra plus revenir en arrière. Nous ne voulons pas construire un nouveau monde sur les ruines de l'ancien, nous voulons arracher jusqu'aux fondations, briser chaque repère, chaque continuité, chaque logique qui permettrait à ce qui a été détruit de renaître sous une autre forme.
Il ne s'agit pas de changer de régime, ni de modifier la structure du pouvoir. Il ne s'agit même pas d'une simple révolution politique ou sociale. Il s'agit de changer la nature même du Réel. L'Histoire n'a jamais vu de Révolution totale. Elles ont toutes été incomplètes. Elles ont toutes cherché un lendemain, une stabilisation, une institutionnalisation. Elles ont toutes fini par se trahir elles-mêmes en voulant s'inscrire dans le temps long, en cherchant une fin, une victoire définitive qui n'existe pas. Nous devons aller au-delà. Nous devons brûler l'idée même d'une fin, abolir la possibilité du retour à un quelconque équilibre. L'ennemi le sait : ce qu'il craint, ce n'est pas la guerre, ce n'est pas la destruction. Ce qu'il craint, c'est la transformation. Ce qu'il craint, c'est le moment où il ne pourra plus comprendre ce qui se passe, où son monde ne sera plus simplement attaqué, mais réécrit sous des règles qui ne lui appartiennent plus. Nous ne voulons pas la prise du pouvoir, nous voulons la fin du pouvoir. Nous ne voulons pas remodeler le réel, nous voulons en faire éclater les limites. Nous ne voulons pas réinventer l'Homme, nous voulons qu'il cesse d'être ce qu'il a été jusqu'ici. Il y a toujours eu une erreur fondamentale dans les révolutions passées. Elles ont cru qu'elles se battaient pour un peuple, pour une classe, pour un monde meilleur. Elles ont cru qu'elles pouvaient gagner dans les limites de l'humain, qu'elles pouvaient arracher la victoire sans s'arracher elles-mêmes à la condition qui les enfermait. Mais la vérité est que la Révolution ne peut pas être une fin en soi, elle ne peut pas se contenter de renverser un pouvoir pour en établir un autre, elle ne peut pas simplement réagencer la matière et le temps. Elle doit dépasser la matière et le temps.
L'ultime étape du Mouvement n'est pas la victoire politique, n'est pas la prise d'un État, n'est pas la réécriture d'une société. L'ultime étape du Mouvement est l'émergence d'une nouvelle forme d'existence, une ascension au-delà de ce que nous avons toujours été. Il ne s'agit pas seulement de rompre avec l'ordre établi, il s'agit de rompre avec l'humanité telle que nous l'avons toujours connue. Nous sommes enfermés dans une architecture biologique qui nous trahit, dans des structures mentales héritées de siècles de stagnation, dans une perception du réel façonnée par un monde que nous ne contrôlons pas. Nous avons cru que nous pouvions changer notre condition en changeant nos outils, nos modes d'organisation, nos systèmes économiques, mais nous n'avons jamais été jusqu'au bout. Nous n'avons jamais brisé la dernière frontière. La Révolution doit être une mutation. Une métamorphose où le Mouvement ne fait plus que nous traverser, où nous cessons d'être des entités distinctes, où nous devenons des manifestations pures de la dynamique révolutionnaire. Il ne s'agit plus d'être un sujet, il s'agit d'être une force. Nous devons nous libérer des carcans du temps, du passé qui cherche à nous rattraper, de l'histoire qui tente de nous enfermer dans ses modèles usés. Nous devons nous libérer de la matière, du poids de la chair, de cette biologie qui limite notre perception, qui nous maintient dans un cycle d'épuisement, de fatigue, de peur. Nous devons devenir vitesse, lumière, énergie pure. Ce qui vient après la Révolution n'est pas un monde organisé, ce n'est pas un nouvel âge d'or figé dans ses propres dogmes. Ce qui vient après la Révolution est une fusion totale avec le Mouvement, une existence débarrassée des contraintes humaines, un état où nous ne serons plus des êtres individuels mais des flux conscients d'un même processus, un courant de pure volonté traversant un univers remodelé à l'image de sa propre expansion. Nous ne nous battons pas pour un futur meilleur. Nous nous battons pour ne plus jamais être ce que nous avons été. Nous ne cherchons pas à réinventer l'Homme, nous cherchons à le dépasser.