Posté le : 13 sep. 2024 à 19:43:01
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Après avoir reçu la réponse positive du Prince Ludovico XIV, Louis prépare ses bagages avec hâte. Ce voyage est non seulement l’occasion de revoir sa bien aimée, mais il lui offre également l’opportunité de s’éloigner du climat pesant de la Clovanie.
Son avion arriva le 20 juillet au matin à l’aéroport de Torri. En descendant la rampe, l’air chaud de la mer caressa son visage, il était enfin de retour à Grisolia.
Louis fut accueilli très chaleureusement par la Famille Princière au grand complet. Tous étaient fort désolés de la situation dans laquelle le jeune homme se trouvait, mais ils redoublèrent d’effort pour ne pas renvoyer le Prince Louis à son malheur en laissant transparaître cette peine. Seule Sofia présentait parfois quelques signes d’inquiétude, et on voyait par là toute l’affection et la sollicitude qu’elle portait au Prince Louis. On attribua à ce dernier la plus grande suite du Palazzo dans l’aile réservée aux invités. Louis trouva les repas avec la Famille Princière fort agréables, tout le monde était détendu et plaisantait, si l’on ne prêtait pas attention à l’immense salle à manger dans laquelle les repas prenaient place, on pourrait avoir du mal à croire que cette famille était à la tête de Grisolia.
Pendant trois jours, le Prince Louis oublia, aux côtés de Sofia et de sa famille, les difficultés qui l’attendaient de l’autre côté de la mer. Avec le recul, Louis pensa presque que toutes les bontés et les attentions dont le comblaient les membres de la Famille Princière étaient faites exprès pour lui, pour le distraire des temps sombres agitant sa patrie.
Le 24 juillet au soir, avant que l’heure du dîner ne sonne, Louis se rapprocha du Prince Ludovico qui feuilletait le Grisolia Oggi dans le canapé de la grande salle pour lui demander un entretien privé après le dîner, le Prince Ludovico accepta après s’être assuré que ce n’était rien d’urgent à propos de la Clovanie. Le dîner se déroula comme à son habitude, on mangeait bien, on riait beaucoup, il régnait une ambiance chaleureuse. Après avoir salué Sofia et lui avoir souhaité une douce nuit, Louis se dirigea avec hâte dans le bureau du Prince. Il toqua à la porte.
Le Prince Ludovico XIV : Entrez
Louis pénétra dans son bureau et referma la porte derrière lui.
Le Prince Ludovico XIV : Ah, je vous attendais. Asseyez-vous, mettez-vous à l’aise.
Le Prince Louis : Merci.
Louis s’installe en face du Prince.
Le Prince Ludovico XIV : Tout d’abord, Louis, j’aimerais vous dire que nous sommes tous très heureux de vous compter parmi nous et, ainsi, de vous savoir en sécurité. En effet, nous sommes honorés de rendre ce service à l’Empereur Pétroléon et à la Clovanie, bien que votre présence nous ravit plus que ne nous pèse. J’ai assez parlé, dîtes-moi maintenant, sur quel sujet vouliez-vous vous entretenir avec moi ?
Le Prince Louis : Et bien Prince, tout d’abord permettez-moi de vous remercier pour votre accueil si chaleureux, vous ne savez pas à quel point je suis reconnaissant de ce que vous faîtes pour moi.
Le Prince Ludovico XIV : Mon enfant, c’est bien normal, comme je vous l’ai dit, votre présence nous est très agréable.
Le Prince Louis : Si je vous ai demandé cet entretien privé, c’est parce que j’ai quelque chose à vous demander.
Le Prince Louis déglutit.
Le Prince Louis : Je suis éperdument amoureux de Sofia, votre fille.
Louis marqua une pause avant de continuer.
Le Prince Louis : Je suis conscient de ma jeunesse, mais je suis sûr de mes sentiments envers Sofia. Depuis que nous nous sommes parlés lors de ma première visite à Grisolia, elle a envahi mes pensées, je ne pense qu’à elle, qu’à lui écrire. C’est pourquoi, Prince Ludovico XIV, je suis devant vous ce soir pour vous demander la main de votre fille.
Le Prince Ludovico XIV ne répondit pas tout de suite. Il était surpris, non par la demande de Louis, il s’y attendait, mais par l’assurance de son regard, de sa voix, lorsqu’il parlait de Sofia. Il l’aimait, le Prince n’avait aucun doute.
Le Prince Ludovico XIV, souriant : Je connais bien Sofia, je sais qu’elle est capable de faire les bons choix. Votre attachement réciproque n’est pas passé inaperçu, je me demandais quand est-ce que vous me feriez votre demande. Vous êtes encore très jeune, certes, mais je perçois en vous une grande maturité et les responsabilités que vous aurez bientôt à endosser ne feront que renforcer cette dernière.
Le visage sérieux de Louis se fendit d’un sourire. Remerciant le Prince Ludovico pour son audience, il prit congé de lui.
En se dirigeant vers sa suite, il se retenait de sautiller de joie dans le couloir, mais une fois arrivé dans ses appartements, l’anxiété s’empara de lui. Toutes sortes de pensées lui traversèrent l’esprit : comment allait-il s’y prendre ? Sofia allait-elle bien réagir ? Et que faire si tout ne se déroulait pas comme prévu ? Il s’asseya alors sur son lit pour maitriser le flôt de pensés qui traversait son âme et réfléchir. Sofia l’aimait, elle le lui a écrit, et c’est tout ce qui comptait. Il alla se coucher plus serein, sans s’être toute fois débarrassé de toutes ses appréhensions.
Le lendemain, Sofia et Louis allèrent visiter l’église San Federico. Située sur le Monte, cette église n’est accessible qu’après avoir grimpé un escalier de mille marches, ce qui en fait un endroit féérique, isolé du monde, domaine réservé à Dieu et à ses plus fervents adorateurs. Sofia et Louis s’étaient promis de visiter l’église, et ils escaladèrent cet immense escalier sans la moindre fatigue, comme portés par la magie de l’instant. Une fois parvenu devant l’immense édifice, Louis comprit silencieusement les louanges que Sofia lui en avait faites. La façade seule suffisait à monter toutes ces marches !
Louis : S’il y avait une telle église en Clovanie, je pourrais vous jurer que nous serions noyés par un océan de touristes ! Le calme qui règne ici est presque perturbant.
Regrettant d’avoir rompu le silence majestueux des lieux, Louis arrêta quelques instants de marcher. Les amoureux échangèrent un sourire et pénétrèrent dans l’église. Une lumière innonda le regard de Louis, pénétrant par de magnifiques vitraux ouvragés et dessinant avec une justesse infinie la forme de l’autel. Louis et Sofia marchèrent calmement le long du chemin de croix, illustré par de magnifiques gravures. Des tableaux de maître illustraient aussi la gloire du Christ, tandis que le tout était rehaussé par un subtil agencement de dalles.
Sofia : Voulez-vous savoir le secret de cette église, Louis ? C’est le mélange de teintes sur les dalles, comme on peut le voir aussi à l’extérieur. Vous voyez, ce bleu turquoise qui ressort parfaitement sur le fond marron, cela passe inaperçu au premier abord, mais c’est ce qui fait tout le charme du bâtiment. Tommaso, l’architecte, était un maître dans l’art d’équilibrer les couleurs.
En sortant de l’église, les deux amants marchaient d’un pas lent. Il semblait que, par le rythme de leurs pas, ils parvenaient à régler le monde entier sur leur cadence. Le vent, le chant des oiseaux, le bruissement lointain des feuilles des arbres alentour, tout s’accordait avec la plénitude immense qui habitait Louis et Sofia. La nature éternelle avait pris ces deux mortels en affection et avait ordonné que rien ne vienne perturber ce moment enchanteur. Cheffe d’orchestre divine dédiée à notre monde, elle avait trouvé dans les deux amants ses plus ardents admirateurs, humains destinés à la tempête politique qui avaient décidé de ne pas perdre une goutte des moments d’innocence qui leur étaient encore réservés.
Rompant le délicieux concert du feuillage et du vent, Louis se tourna vers Sofia, affichant un air sérieux qui ne parvenait pas à dissimuler le coin d’un sourire.
Louis : Sofia, vous connaissez maintenant les sentiments que je vous porte. La demande que je vais vous faire ne vous surprendra donc pas, mais je vous conjure de me laisser le plaisir de la prononcer… L’amour qui a pris forme entre nous depuis des mois, et qui me brûle aujourd’hui l’esprit tout autant qu’il me l’apaise, m’était un sentiment totalement inconnu auparavant. Mais vous savez tout autant que moi que la vie ne me réserve pas un sort très calme. Vous êtes vous-même promise à un grand destin. Il est donc absolument nécessaire, si nous voulons que notre amour perdure à jamais, de le sceller par une promesse officielle. Non que je doute de votre engagement : nous portons sur nos frêles épaules le destin de deux immenses dynasties, de deux grandes Nations. Sofia, il est tant d’inscrire notre amour dans l’histoire.
Le Prince Louis s’agenouille et plonge la main dans la poche intérieure de sa veste. Il en sort une bague qu’il tend à Sofia.
Louis : Sofia, voulez-vous m’épouser ?
Sofia le contemple avec des yeux embués de larmes, et attend quelques secondes avant répondre, comme si elle voulait faire perdurer le plus possible ce moment d’éternité, en goûter chaque seconde avant de le clore d’un seul mot.
Sofia : Oui, mon cher Louis… oui, oui, oui !
Louis et Sofia s’embrassèrent tendrement, sous les yeux attendris des rossignols enjoués.
Le 27 juillet, en fin d'après-midi, le Prince Louis monta dans son avion en direction de la Clovanie. Avec Sofia, ils se sont mis d'accord, ils ne parleraient pas de leur fiançailles tant que la situation clovanienne ne serait pas réglée.