11/11/2014
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[CLOVANIE-GRISOLIA] Correspondance épistolaire entre le Prince Louis Césarévitch et Sofia di Grisolia

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Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE

Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Legkibourg, le 1er mars 2014
Très chère Sofia,

Je n'oublierai jamais la douceur de nos conversations, lorsque le destin me conduisit à vos côtés à Torri le mois dernier. Nous tissâmes chez vous des liens qui m'étaient inconnus jusqu'alors, de ceux qui parviennent à faire frémir le corps et l'esprit de concert, sans que nous puissions retenir la douce vague de joie qui s'empare tout entier de nous. Les soucis qui agitent mon pays actuellement, combinés à la douleur de votre absence, me poussent à vous écrire cette lettre, moyen de m'évader un petit peu.
Des hérétiques sèment le trouble dans la quiétude qui dominait jadis la Clovanie, et j'espère de tout cœur que le calme se rétablira le plus vite possible. Il est une chose que j'espère tout autant : vous revoir. À vrai dire, ce désir me brûle depuis que nous nous sommes quittés, si bien que je ne puis le mettre sur le compte du climat politique clovanien. Quelqu'un entendit sûrement ma prière récemment, puisqu'on m'avertit hier de me préparer à revoir la terre grisolienne. Cette nouvelle m'enchante autant qu'elle ne m'étonne : la Famille Impériale est-elle tant préoccupée au point de faire de moi son unique représentant lors du mariage de votre frère ? Il me semble qu'un poids se dépose lourdement sur mes épaules, mais je suis prêt à l'accepter si cela me permet de retrouver la grâce de votre présence.
Mais je ne vous trouble pas plus par mes élucubrations mélancoliques, vous m'avez sûrement déjà oublié, tant occupée que vous êtes par des sujets plus élevés que ma simple personne. Répondez-moi seulement : pensez-vous à moi comme je pense à vous ?

Votre sincère et fidèle ami,

Prince Louis Césarévitch.
Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE


Torri, le 11 mars 2014

Mon cher Louis,

Vous ne pouvez imaginer à quel point votre lettre m’apaise. Depuis votre départ de Grisolia, je ne cesse de penser à vous, et au danger que vous courrez peut être en Clovanie.
Lorsque nous nous sommes salués sur le pont de Torri le mois dernier, j’ai cru que jamais je ne vous reparlerai, vous aviez l’air si absent quand vous m’avez baisé la main, sans un regard. Depuis plusieurs semaines je tente de vous oublier, mais recevoir cette lettre de votre part, révélant vos sentiments pour moi, m’a bouleversée et ravie au plus haut point.
C’est la toute première fois que je rencontre une personne avec qui je suis capable de discuter des heures et des heures durant, sans que les sujets se tarissent, sans que nos bavardages ne deviennent que peu intéressants. Lorsque votre regard se dépose sur moi, je perds d’abord tout sens de l’orientation, toute capacité à formuler des phrases, des mots qui ont du sens, puis, je retrouve mes esprits et j’ai envie de me confier à vous, et de tout savoir sur vous. Je me sens si bien à vos cotés, en sécurité, écoutée, et si j’ose dire, désirée.
Dès l'instant où j'ai appris votre venue au mariage de mon frère, je n'ai pu m'empêcher d'éprouver une joie intense, il me tardais de vous revoir. Mais lorsque j'ai su que vous viendrez seul, en tant que représentant de la Clovanie, j'ai compris que la situation de votre nation ne s'était pas améliorée. Racontez moi, que se passe-t-il en Clovanie ? Les informateurs de mon père ne donnent pas vraiment plus d'informations que les journaux, nous sommes au fait d'une messe noire qui aurait été célébrée lors de votre venue à Grisolia mais rien de plus.

Dans l'attente de vous revoir,

Sofia di Grisolia

Signature de Sofia di Grisolia
Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE

Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Legkibourg, le 20 mars 2014

Tres chère Sofia,

Vous ne pouvez concevoir la joie qui m'habita à la lecture de votre lettre. Ainsi ne suis-je donc pas seul à avoir ressenti une telle émotion le mois dernier... ni à en ressentir aujourd'hui le cruel manquement. Il semble que plus rien n'a vraiment de valeur loin de votre délicatesse, et que les plus beaux paysages du monde ne pourront jamais égaler la magnificence de votre chevelure. Votre parfum caresse parfois mes narines à des moments fortuits, dans les jardins ou dans mes songes, et l’embrasement qui germe en moi est aussitôt teinté d’une amère tristesse.

Maintenant que j’espère être assuré de vos bons sentiments à mon égard, il me faut vous avouer que j’ai moi-même fait la demande d’assister au mariage de votre frère Alfonso. Si la miséricorde que j’ai tant adorée en vous et que j’ai osé reconnaître dans votre délicate écriture vous reste fidèle, je sais que vous pourrez me pardonner cette indélicatesse. Je ne voulais pas profiter des tourments de ma famille pour m'échapper vers vous, mais simplement conjuguer mes devoirs et la tendance naturelle qui me pousse vers votre compagnie.

Priant chaque jour d’être le dernier sans vous voir,

Je vous adresse mes sentiments les plus affectueux.


Prince Louis Césarévitch
Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE


Torri, le 25 avril 2014

Mon cher Louis,

Votre absence à mes cotés est un lourd poids à porter, mais ne soyez pas si impatient, le mariage de mon frère se rapproche, plus que deux petites semaines nous séparent de nos retrouvailles à Grisolia.

Concernant votre aveux, je me trouve fort décontenancée. Je croyais à une faveur du ciel, Dieu aurait-il entendu mes prières ? Je souhaitais tant vous revoir et vous savoir éloigné du danger... Ainsi, vous auriez tout orchestré ? Il est vrai qu'il m'était difficile de croire que vous aviez été désigné par l'Empereur Pétroléon V, non pas que je doute de votre statut au sein de la Famille Impériale, mais un rôle d'une telle importance est rarement assumé par un si jeune homme.

Quoi qu'il en soit, vous semblez désolé de ce manège et vous avez raison, ma foi me pousse à vous accorder le pardon que vous me demandez. Faites attention tout de même, lors de votre venue, à remplir votre rôle de représentant de l'Empereur Pétroléon V avant tout. Nous aurons l'occasion de discuter, j'en suis sûre, mais si je devenais votre seul centre d'intérêt, alors je me sentirais coupable.

En attendant de vous revoir chez moi, parlez-moi un peu de votre nation, la Clovanie. Les seules images que j'en ait sont celles que je me suis faites à travers mes lectures ou des peintures. Comment vit-on chez vous ?

Dans l'attente de votre venue à Grisolia,

Sofia di Grisolia

Signature de Sofia di Grisolia
Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE

Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Legkibourg, le 29 avril 2014

Ma très chère Sofia,

Je comprends parfaitement votre surprise concernant ma venue individuelle au mariage de votre frère Alfonso. Son aspect inhabituel s'accorde tristement au climat actuel du pays : instable, redoutable et regorgé de mauvaises surprises. Vous m'interrogez sur la vie en Clovanie. Si vous m'aviez adressé cette demande il y a de cela quelques mois, je vous aurais répondu que la douceur de l'air apaise parfois la mélancolie qui pèse sur mon cœur, que l'optimisme régnant contraste avec la voix lancinante de mes mauvaises pensées, et que le parfum des fleurs apporte une saveur nouvelle à mes sens endormis. Je vous aurais sans doute parlé du sourire des passants, de la douce voix de mon instructeur, de l'odeur du pain frais et des grands dîners qui se tenaient alors dans le salon de ma mère. La Clovanie d'alors était fière, unie et travailleuse, amatrice des beaux arts et des belles lettres.

Mais, comme vous avez pu l'entendre récemment de la bouche des commentateurs internationaux, ou pu le lire dans les Une des journaux du monde, l'heure est à la violence et à la discorde en Clovanie. Les hérétiques ont pu se réjouir de la victoire du plus puissant des leurs, lorsqu'Achille de Malmon assassina son rival Alfred de Minski lors d'un duel clandestin. Depuis, le peuple se déchaîne contre les représentants du dogme nouveau. On brûle et pille leurs temples, on assassine leurs membres. Ma mère me déconseille très vivement de mettre les pieds au Palais de la Gloire, de peur qu'on utilise mon nom pour me rallier à une cause ou à une autre. Ainsi, je reste toute la journée dans le Palais Impérial de Gronski et dans ses jardins, là où je pense à vous et à votre regard envoûtant. Je reste cependant fermement attaché au culte ortholique, même si je crains de prendre parti, assistant aux dégâts auxquels peut conduire l'affrontement des religions. Il faudra tout de même bien que je choisisse mon camp et que je le soutienne. Mon appartenance à la Famille Impériale est un legs qu'il me faut honorer non pas en me cantonnant dans la couardise et la peur, mais en affirmant clairement mes convictions face aux semeurs de discorde et aux sacrilèges.

Sofia, que vous êtes cruelle de me faire penser à tout cela, alors même que je vous écris pour m'échapper de ce lourd climat ! Parlez-moi plutôt de votre terre où il semble faire si bon vivre, et dont je garde un souvenir idyllique, puisqu'il vous est attaché.

Toujours plus hâtif de vous retrouver, je vous transmets mes sentiments les plus sincères et demeure


Votre humble serviteur,

Prince Louis Césarévitch.
Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE


Torri, le 4 mai 2014

Mon cher Louis,

Le portrait que vous me faites de la Clovanie avant la montée en puissance des Dévotis me séduit. Si la situation chez vous n'était pas celle qu'elle est, j'aurais sauté dans le prochain bateau sans une hésitation. Vous m'auriez fait découvrir la douceur clovanienne et l'optimisme de vos concitoyens, le parfum des fleurs de votre terre et le chant des oiseaux de votre région, les grands artistes qui vous inspirent et vous m'auriez invitée aux grands dîners de votre mère où j'aurais tant appris sur l'aristocratie clovanienne. Mais à défaut de faire tout cela, promettez-moi de rester en sécurité malgré votre volonté d'affirmer vos positions ortholiques, protégez votre nom des accusations d'envieux, assurez-moi que je vous reverrai bien un jour.

Je brûle d'envie de vous accueillir de nouveau à Grisolia et de vous faire découvrir la Principauté, il est vrai que les quelques jours que vous avez déjà passé sur nos terres ne suffisent guère pour que vous puissiez dire connaitre réellement notre belle nation. Comme vous le savez déjà, Grisolia est divisée en cinq provinces, Blonvillia, où se trouve le Palazzo di Grisolia, les Coltori, Ieri, Prolinio en Aleucie, et Baudouino en Afarée. La première chose que retiennent nos visiteurs est l'unité des Grisoliens, peu importe le continent sur lequel il se trouve, un Grisolien est un frère.

Blonvillia reste évidemment la province qui m'est la plus familière bien que j'ai eu l'occasion de me rendre dans chacune d'entre elles. La proximité de la mer et des montagnes, plus particulièrement le Monte, offre des paysages qui font partie des plus beaux au monde ainsi qu'un panel d'activités des plus larges que l'on connaisse. Le climat très clément participe indéniablement à la bonne humeur permanente qui règne dans la province Afaréenne. À Torri, les métiers traditionnels sont mis à l'honneur, les artisans qui tiennent leurs boutiques dans les rues de la capitale ajoutent au charme de la ville. En effet, on a l'impression de vivre hors du temps, loin de l'agitations des grandes villes modernes, les Blonvillais sont dynamiques, mais apaisés.

Les Coltori, qui sont la deuxième province la plus éminente de Grisolia, sont très différents. Orta surtout, représente la modernité dans toute sa splendeur. On y trouve tous les sièges des grandes entreprises grisoliennes, de grands ports, aéroports, gares, c'est la province de Grisolia la plus connectée au monde, si, bien sûr, on exclu le fait que mon père Ludovico XIV vit à Torri. Cette province, qui est également la plus grande et la plus habitée de toutes, accueille les plus grands élevages de chevaux connus. Les chevaux grisoliens gagnent de nombreuses compétitions de saut, dressage, courses et sont également réputés pour leur viande délicieuse. De plus, on trouve dans les Coltori d'excellents viticulteurs et vignerons, les vins des Coltori sont très prisés pour leur saveur si douce et fruitée, je vous encourage à y gouter.

Prolinio et Ieri sont des provinces beaucoup moins habitées. Prolinio, en Aleucie, est principalement recouverte par la forêt tropicale d'Aleucia au sein de laquelle vivent de nombreuses tribues autochtones. Nous échangeons avec eux de nombreuses ressources telles que du café et du cacao. Concernant Ieri, la province connait dernièrement une ascension économique et une amélioration du niveau de vie grâce au projet de reprise de la construction du canal, abandonné à cause de la guerre civile qui a secouée Grisolia en 1420.

Baudouino est une province spéciale par son caractère militaire, en effet, ce petit bout de terre grisolien en Afarée est dédié à l'armée. C'est notamment là-bas que les grisoliens âgés de dix-neuf ans doivent effectuer leur service militaire car on y trouve les principales bases militaires grisoliennes.

Vous l'aurez compris, Grisolia est une nation composée de cinq provinces toutes plus différentes les unes que les autres mais se complétant parfaitement. La solidarité des Grisoliens les uns avec les autres est la clef de la paix qui règne à Grisolia depuis maintenant de nombreuses années.

Peut-être un jour découvrirons-nous ensemble toutes les facettes de Grisolia au cours d'un long voyage dans nos cinq provinces ? En attendant, il me tarde de vous voir venir au Palazzo di Grisolia pour le mariage de mon frère qui se tient dans quatre jours.

En pensées avec vous,

Je vous transmets mes sentiments les plus sincères,

Sofia di Grisolia

Signature de Sofia di Grisolia
Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE

Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Legkibourg, le 1er juin 2014

Confus de ne pas vous avoir écrit plus tôt, je vous supplie de comprendre l'extrême tension qui agit ma patrie et qui m'a trop longtemps retenu loin de mon papier à lettres. Je trouve aujourd'hui mon bureau comme un refuge, lieu où je puis compenser la douleur de votre absence par quelques mots à votre égard.

Lorsque nous nous sommes vus, vous avez confirmé le sentiment qui germait en moi et que je redoutais de mettre uniquement sur votre compte. Il a fallu me rendre à l'évidence : je suis entièrement soumis à une autre personne, par des lois que je suis incapable d'expliquer. Cette personne, c'est vous, Sofia, que le bon Dieu a eu la torturante idée de placer à des milliers de kilomètres de moi. J'aurais voulu demeurer pour toujours à vos côtés, marchant dans les rues de Torri, humant le parfum de ces arbres dont vous connaissez tous les noms et discutant des prochaines visites que nous ferons à deux. J'ai honte de me l'avouer, mais j'espère vous flatter en vous confessant que j'ai goûté avec infiniment plus de plaisir les moments que nous partageâmes à deux que ceux passés durant le mariage de votre frère.

Je n'ose relire les bourdes que je commets : je porte bien sûr tout le respect du monde à votre frère et à son épouse. Tous les membres de votre famille sont pour moi des amis dont je chéris la nouvelle relation.

La situation en Clovanie explose au moment où je vous parle. Des émeutes ont lieu dans la capitale, jusque devant chez moi. Il y a des morts et des blessés, et on accuse l'Impératrice de tous les maux. Je déplore amèrement tous ces événements, mais je suis convaincu qu'ils sont l'effet d'un laxisme qu'il nous faut reconnaître. L'Armée Impériale doit frapper fort contre les devotis, elle qui a toujours incarné le nerf de notre pays.

Mais je ne trouble pas davantage votre tranquillité par mes sombres réflexions. Répondez-moi plutôt : quand visiterons-nous l'Église San Federico, dont vous m'avez promis la grande beauté lors du mariage de votre frère ? Voilà deux fois que je me rends dans votre magnifique capitale, et je n'ai toujours pas eu l'occasion d'y pénétrer.

Mes plus sincères amitiés,

Votre très cher Louis.
Signature de Louis Césarévitch
Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE


Torri, le 10 juin 2014

Mon très cher Louis,

Je reçois enfin une lettre de votre part ! Je commençais à m'inquiéter sans nouvelles de vous depuis le mariage de mon frère en mai, cependant je n'osais pas vous écrire de peur de vous déranger en des temps si troublés en Clovanie.

Cette deuxième rencontre entre vous et moi m'a confirmé quelque chose que je savais bien déjà, mais que je n'osais m'avouer. Une Sofia plus prudente s'interdirait d'écrire des choses pareilles, mais je ne veux plus garder mes sentiments pour moi. Ce que j'ai éprouvé pour vous lors de votre visite diplomatique à Grisolia n'a fait que grandir en moi, depuis des semaines je ne pense qu'à vous et j'aimerais vous écrire tous les jours pour combler le vide de votre absence. Il est vrai que les instants durant lesquels nous avons eu la chance de nous trouver seuls avaient une douceur particulière. Votre voix, me contant tous vos savoirs, me transporte hors du temps, et votre regard si puissant, posé sur moi, semble me promettre que rien ne m'arrivera si je reste à vos côtés.

La posture de la Clovanie me semble de plus en plus inquiétante...êtes-vous sûr d'être en sécurité face à cette colère qui gronde ? Pensez-vous que l'Armée Impériale agira bientôt contre les Dévotis ?

Il est vrai que je vous ai longtemps parlé de la beauté de l'Église San Federico, ancienne chapelle Princière de Grisolia. À l'origine, nous devions la visiter lors de votre venue avec l'Empereur Pétroléon V, mais votre départ précipité ne nous l'a pas permis. Quand vous reviendrez, nous consacrerons une après midi entière à cette Église. Nous gravirons d'abord les milles marches qui séparent d'elle le courageux qui s'apprête à escalader le Monte, puis, un guide touristique spécialisé partagera avec nous ses connaissances sur l'histoire de l'Église San Federico, enfin, nous pénètrerons dans son enceinte colorée et nous nous laisserons emporter par la magie du lieu.


Impatiente de vous revoir,

Sofia di Grisolia

Signature de Sofia di Grisolia
Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE

Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Legkibourg, le 21 juin 2014

Ma très chère Sofia,

Je vous écris dans un contexte si douloureux qu'il est difficile de répondre à votre dernière lettre par l'immense joie qu'elle mériterait. Les mots que vous m'écrivîtes ont troublé tout mon corps, pénétré mes membres jusqu'à me brûler le cœur. Le sentiment que je ressens à présent est indescriptible, c'est une chaleur qui connecte l'âme aux sens, brisant toutes les barrières et s'élevant si haut dans un ciel sans limite, tout en saisissant toutefois le corps d'un frissonnement bien réel. Il semble que mon esprit veuille s'envoler, rejoindre le vôtre afin que nous ne formions qu'un, et que mon cœur tambourine dans ma poitrine, suppliant que je le laisse s'évader de cette prison de chair. Ainsi, je ressens à la fois une légèreté immense et une lourdeur sidérante qui me rappelle la finitude de mon corps.

Non, vraiment Sofia, je n'ai jamais ressenti une pareille chose auparavant. Peut-être mettrez-vous cette fougue sur le compte de mon jeune âge, mais je puis vous jurer sur tout ce qu'il y a de plus sacré que je serai prêt à me soumettre à vos jugements pour l'éternité. C'en est fait de moi, Sofia ! Ma vie est entre vos douces mains. Faîtes ce qui vous plait de mon âme, je vous prierai seulement d'accorder à mon sort une place favorable parmi les amoureux éperdus.

Le chaos règne en Clovanie. Nous pensions que la guerre civile était terminée avec la victoire de Norient, mais les devotis ont récidivé par des attentats atroces et lâches, dont on dénombre encore les victime à l'heure où je vous écris. Je place toute ma confiance dans le Prince Clément, qui a personnellement participé aux combats de Norient. Lui seul peut à présent nous sauver de l'abîme, maintenant que le pouvoir est failli. Très chère Sofia, jurez-moi que je pourrais revenir vous voir à Grisolia lorsque cette tempête sera calmée... Nous pourrions visiter cette église dont vous me vantez les mérites, et dont la magnifique description que vous en faîtes me donne la larme à l'œil, tant elle me rappelle la douceur de votre pays. Par ailleurs, si vos sentiments en ma faveur sont toujours aussi brûlants que vous les avez décrits dans votre lettre, il faut absolument que nous nous voyions pour nous entretenir de notre avenir commun.

La flamme qui s'est allumée dans mon cœur au moment de notre rencontre ne doit pas s'éteindre, aussi vous supplié-je de tout faire avec moi pour qu'elle brûle à jamais.

Dans l'impatience de vous revoir bientôt,


Je vous adresse mes sentiments les plus sincères.

Prince Louis Césarévitch
Signature de Louis Césarévitch
Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE


Torri, le 30 juin 2014

Mon très cher Louis,

Malgré votre jeune âge vous maniez notre langue avec perfection, et ainsi, me faîtes parvenir toute l'intensité de vos sentiments. Ces mots que vous tracez sur le papier, forment plus que des phrases, ils sont semblables à une douce mélodie qui me va droit au coeur. Parfois, cette mélodie s'emballe lorsque vous décrivez avec tant de passion l'amour qui nous lie et m'effraie tant nos sentiments sont puissants. Je rêve trop souvent d'être à vos côtés et la douleur que me cause la distance qui nous sépare est inouïe.

Je suis inquiète de vous savoir en si grand danger chez vous. D'abord des débordements de manifestations, un affrontement armé et maintenant des attentats ! Je n'en dors plus, mes nuits ne sont plus que cauchemars et insomnies. Rejoignez moi, venez à Grisolia vous mettre en sécurité. Mon père est bien au courant du malheur qui a envahie la Clovanie et donnerait bien plus que son accord pour vous loger au Palazzo di Grisolia.


Mon amour, retrouvons-nous.

Sofia di Grisolia

Signature de Sofia di Grisolia
Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE

Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Legkibourg, le 12 juillet 2014

Très chère Sofia,

Votre réponse me comble d'émotion : ainsi partagez-vous ce sentiment ardent qui me lie à vous ! Pardonnez-moi de ne pas avoir répondu plus tôt à votre dernière lettre, je voulais m'assurer qu'il m'était permis de vous rendre visite à Grisolia. Ne voulant pas vous causer de fausse joie, je pris le soin de m'entretenir avec ma mère, afin qu'elle m'assurât qu'il était sans risque pour moi de vous rendre visite. Je craignais aussi de montrer de la lâcheté en quittant la Clovanie au moment où elle a le plus besoin de ses dirigeants. Mais, à vrai dire, ma mère fut même rassurée de me voir m'éloigner du conflit que nous déplorons. Je m'assurai aussi du consentement de votre père le Prince Ludovico, qui agréa à ma demande sans réserve, acceptant de m'accueillir dans votre Palazzo bien-aimé.

Votre Famille est digne de louanges, et je chéris le ciel de m'avoir conduit à vous connaître, vous et les vôtres, Sofia. Mon arrivée est prévue pour le 20 à Torri. La douceur de vos mots me prouvent que la lumière peut toujours être trouvée, même dans les moments les plus sombres. J'ai le pressentiment d'être amené à prendre de plus en plus de responsabilités dans la Famille, et les moments passés avec vous me retiennent dans un univers d'innocence et de beauté, loin des obligations matérielles de la politique. Sofia, il nous faut concilier cette beauté que nous portons en nous avec le poids des choses de ce monde que le temps, dans son cours inéluctable, nous amène. Voilà pourquoi je désire tant vous voir.

Exultant à l'idée de sentir à nouveau la douceur de votre chevelure,


Je vous adresse mes sentiments les plus affectueux.

Prince Louis Césarévitch.

Signature de Louis Césarévitch
PS : Putain de merde mais je t'aime quoi, putain mais quoi ?? mais je t'aime, merdeeeuuh putain...
Après avoir reçu la réponse positive du Prince Ludovico XIV, Louis prépare ses bagages avec hâte. Ce voyage est non seulement l’occasion de revoir sa bien aimée, mais il lui offre également l’opportunité de s’éloigner du climat pesant de la Clovanie.

Son avion arriva le 20 juillet au matin à l’aéroport de Torri. En descendant la rampe, l’air chaud de la mer caressa son visage, il était enfin de retour à Grisolia.

Louis fut accueilli très chaleureusement par la Famille Princière au grand complet. Tous étaient fort désolés de la situation dans laquelle le jeune homme se trouvait, mais ils redoublèrent d’effort pour ne pas renvoyer le Prince Louis à son malheur en laissant transparaître cette peine. Seule Sofia présentait parfois quelques signes d’inquiétude, et on voyait par là toute l’affection et la sollicitude qu’elle portait au Prince Louis. On attribua à ce dernier la plus grande suite du Palazzo dans l’aile réservée aux invités. Louis trouva les repas avec la Famille Princière fort agréables, tout le monde était détendu et plaisantait, si l’on ne prêtait pas attention à l’immense salle à manger dans laquelle les repas prenaient place, on pourrait avoir du mal à croire que cette famille était à la tête de Grisolia.

Pendant trois jours, le Prince Louis oublia, aux côtés de Sofia et de sa famille, les difficultés qui l’attendaient de l’autre côté de la mer. Avec le recul, Louis pensa presque que toutes les bontés et les attentions dont le comblaient les membres de la Famille Princière étaient faites exprès pour lui, pour le distraire des temps sombres agitant sa patrie.

Le 24 juillet au soir, avant que l’heure du dîner ne sonne, Louis se rapprocha du Prince Ludovico qui feuilletait le Grisolia Oggi dans le canapé de la grande salle pour lui demander un entretien privé après le dîner, le Prince Ludovico accepta après s’être assuré que ce n’était rien d’urgent à propos de la Clovanie. Le dîner se déroula comme à son habitude, on mangeait bien, on riait beaucoup, il régnait une ambiance chaleureuse. Après avoir salué Sofia et lui avoir souhaité une douce nuit, Louis se dirigea avec hâte dans le bureau du Prince. Il toqua à la porte.

Le Prince Ludovico XIV : Entrez

Louis pénétra dans son bureau et referma la porte derrière lui.

Le Prince Ludovico XIV : Ah, je vous attendais. Asseyez-vous, mettez-vous à l’aise.

Le Prince Louis : Merci.

Louis s’installe en face du Prince.

Le Prince Ludovico XIV : Tout d’abord, Louis, j’aimerais vous dire que nous sommes tous très heureux de vous compter parmi nous et, ainsi, de vous savoir en sécurité. En effet, nous sommes honorés de rendre ce service à l’Empereur Pétroléon et à la Clovanie, bien que votre présence nous ravit plus que ne nous pèse. J’ai assez parlé, dîtes-moi maintenant, sur quel sujet vouliez-vous vous entretenir avec moi ?

Le Prince Louis : Et bien Prince, tout d’abord permettez-moi de vous remercier pour votre accueil si chaleureux, vous ne savez pas à quel point je suis reconnaissant de ce que vous faîtes pour moi.

Le Prince Ludovico XIV : Mon enfant, c’est bien normal, comme je vous l’ai dit, votre présence nous est très agréable.

Le Prince Louis : Si je vous ai demandé cet entretien privé, c’est parce que j’ai quelque chose à vous demander.

Le Prince Louis déglutit.

Le Prince Louis : Je suis éperdument amoureux de Sofia, votre fille.

Louis marqua une pause avant de continuer.

Le Prince Louis : Je suis conscient de ma jeunesse, mais je suis sûr de mes sentiments envers Sofia. Depuis que nous nous sommes parlés lors de ma première visite à Grisolia, elle a envahi mes pensées, je ne pense qu’à elle, qu’à lui écrire. C’est pourquoi, Prince Ludovico XIV, je suis devant vous ce soir pour vous demander la main de votre fille.

Le Prince Ludovico XIV ne répondit pas tout de suite. Il était surpris, non par la demande de Louis, il s’y attendait, mais par l’assurance de son regard, de sa voix, lorsqu’il parlait de Sofia. Il l’aimait, le Prince n’avait aucun doute.

Le Prince Ludovico XIV, souriant : Je connais bien Sofia, je sais qu’elle est capable de faire les bons choix. Votre attachement réciproque n’est pas passé inaperçu, je me demandais quand est-ce que vous me feriez votre demande. Vous êtes encore très jeune, certes, mais je perçois en vous une grande maturité et les responsabilités que vous aurez bientôt à endosser ne feront que renforcer cette dernière.

Le visage sérieux de Louis se fendit d’un sourire. Remerciant le Prince Ludovico pour son audience, il prit congé de lui.

En se dirigeant vers sa suite, il se retenait de sautiller de joie dans le couloir, mais une fois arrivé dans ses appartements, l’anxiété s’empara de lui. Toutes sortes de pensées lui traversèrent l’esprit : comment allait-il s’y prendre ? Sofia allait-elle bien réagir ? Et que faire si tout ne se déroulait pas comme prévu ? Il s’asseya alors sur son lit pour maitriser le flôt de pensés qui traversait son âme et réfléchir. Sofia l’aimait, elle le lui a écrit, et c’est tout ce qui comptait. Il alla se coucher plus serein, sans s’être toute fois débarrassé de toutes ses appréhensions.

Le lendemain, Sofia et Louis allèrent visiter l’église San Federico. Située sur le Monte, cette église n’est accessible qu’après avoir grimpé un escalier de mille marches, ce qui en fait un endroit féérique, isolé du monde, domaine réservé à Dieu et à ses plus fervents adorateurs. Sofia et Louis s’étaient promis de visiter l’église, et ils escaladèrent cet immense escalier sans la moindre fatigue, comme portés par la magie de l’instant. Une fois parvenu devant l’immense édifice, Louis comprit silencieusement les louanges que Sofia lui en avait faites. La façade seule suffisait à monter toutes ces marches !

Louis : S’il y avait une telle église en Clovanie, je pourrais vous jurer que nous serions noyés par un océan de touristes ! Le calme qui règne ici est presque perturbant.

Regrettant d’avoir rompu le silence majestueux des lieux, Louis arrêta quelques instants de marcher. Les amoureux échangèrent un sourire et pénétrèrent dans l’église. Une lumière innonda le regard de Louis, pénétrant par de magnifiques vitraux ouvragés et dessinant avec une justesse infinie la forme de l’autel. Louis et Sofia marchèrent calmement le long du chemin de croix, illustré par de magnifiques gravures. Des tableaux de maître illustraient aussi la gloire du Christ, tandis que le tout était rehaussé par un subtil agencement de dalles.

Sofia : Voulez-vous savoir le secret de cette église, Louis ? C’est le mélange de teintes sur les dalles, comme on peut le voir aussi à l’extérieur. Vous voyez, ce bleu turquoise qui ressort parfaitement sur le fond marron, cela passe inaperçu au premier abord, mais c’est ce qui fait tout le charme du bâtiment. Tommaso, l’architecte, était un maître dans l’art d’équilibrer les couleurs.

En sortant de l’église, les deux amants marchaient d’un pas lent. Il semblait que, par le rythme de leurs pas, ils parvenaient à régler le monde entier sur leur cadence. Le vent, le chant des oiseaux, le bruissement lointain des feuilles des arbres alentour, tout s’accordait avec la plénitude immense qui habitait Louis et Sofia. La nature éternelle avait pris ces deux mortels en affection et avait ordonné que rien ne vienne perturber ce moment enchanteur. Cheffe d’orchestre divine dédiée à notre monde, elle avait trouvé dans les deux amants ses plus ardents admirateurs, humains destinés à la tempête politique qui avaient décidé de ne pas perdre une goutte des moments d’innocence qui leur étaient encore réservés.
Rompant le délicieux concert du feuillage et du vent, Louis se tourna vers Sofia, affichant un air sérieux qui ne parvenait pas à dissimuler le coin d’un sourire.

Louis : Sofia, vous connaissez maintenant les sentiments que je vous porte. La demande que je vais vous faire ne vous surprendra donc pas, mais je vous conjure de me laisser le plaisir de la prononcer… L’amour qui a pris forme entre nous depuis des mois, et qui me brûle aujourd’hui l’esprit tout autant qu’il me l’apaise, m’était un sentiment totalement inconnu auparavant. Mais vous savez tout autant que moi que la vie ne me réserve pas un sort très calme. Vous êtes vous-même promise à un grand destin. Il est donc absolument nécessaire, si nous voulons que notre amour perdure à jamais, de le sceller par une promesse officielle. Non que je doute de votre engagement : nous portons sur nos frêles épaules le destin de deux immenses dynasties, de deux grandes Nations. Sofia, il est tant d’inscrire notre amour dans l’histoire.

Le Prince Louis s’agenouille et plonge la main dans la poche intérieure de sa veste. Il en sort une bague qu’il tend à Sofia.

Louis : Sofia, voulez-vous m’épouser ?

Sofia le contemple avec des yeux embués de larmes, et attend quelques secondes avant répondre, comme si elle voulait faire perdurer le plus possible ce moment d’éternité, en goûter chaque seconde avant de le clore d’un seul mot.

Sofia : Oui, mon cher Louis… oui, oui, oui !

Louis et Sofia s’embrassèrent tendrement, sous les yeux attendris des rossignols enjoués.

Le 27 juillet, en fin d'après-midi, le Prince Louis monta dans son avion en direction de la Clovanie. Avec Sofia, ils se sont mis d'accord, ils ne parleraient pas de leur fiançailles tant que la situation clovanienne ne serait pas réglée.
Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE

Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Legkibourg, le 1er août 2014

Ma très chère Sofia,

Je vous joins aujourd'hui le cœur lourd, brusquement appelé par le tourbillon de mon destin. Vous l'avez certainement appris, le Prince Clément et son neveu le Prince Éric ont été tués dans un énième attentat à la sortie du procès de l'Impératrice. Il faut que ces atrocités cessent au plus vite, que les devotis soient mis hors d'état de nuire le plus vite possible. Malheureusement, je ne pensais pas être si tôt appelé à mettre en actes mes volontés pour le pays. La mort de ces deux Princes, dont ma vertu individuelle ne pourra jamais égaler la moindre parcelle des leurs, m'a propulsé en première place dans la liste de succession au trône de l'Empire.

Vous connaissiez l'état de faiblesse mentale et physique de notre Empereur, le déclin de son brillant esprit affligeait toute la Famille Impériale. Il a été hier soir rappelé auprès de ses illustres ancêtres, dans la paix et le calme. Chacun s'attristait doucement de cette immense perte, dont on ressentait déjà la douleur avant que Pétroléon V ne décède. Je suis heureux que la responsabilité de Marine Olivérovitch ait été éclaircie par son procès avant que l'Empereur rende son âme au Créateur de toute chose.

Ainsi, vous avez compris la conséquence de ces événements tragiques. Moi, jeune Prince qui n'étais destiné qu'à graviter autour du pouvoir où à mener une vie oisive sous les lustres des palais, suis brusquement projeté à la tête d'un peuple, au sommet du pouvoir clovanien. Bientôt, on m'appellera Empereur, je devrai employer le Nous Impérial si lourd à employer, faisant de moi l'incarnation d'une dynastie, d'un peuple qui a traversé les âges pour se trouver demain sous ma gouvernance.

Je ne réalise pas encore les implications de ce bouleversement dans ma vie. Il m'a semblé ces derniers jours voir tranquillement la possibilité de gouverner s'approcher, comme le dénouement d'une fatale tragédie. Tant de cadavres se sont amoncelés pour permettre aujourd'hui que je gouverne le pays... Il est grand temps que cela cesse. Je pressens que ma jeunesse conférera à mon pouvoir une envergure de faiblesse, qu'on pensera qu'un adolescent de quatorze ans ne pourra jamais exercer le pouvoir convenablement. Mais je sais que je suis prêt, la crise m'a fait longuement réfléchir sur la politique à adopter pour revenir à la paix et guider la Clovanie sur les chemins de la prospérité. Je sais de quels hommes m'entourer, de quels ministres me doter. Je fais pour l'instant confiance aux talents d'Aurélien Bergé, qui assure la régence en attendant mon sacre.

Un profond sentiment me gagne, Sofia, je sens dans tout mon corps un grand vertige : mon existence s'apprête à basculer. Ma vie ne sera plus ma vie, mais celle de la Clovanie toute entière. J'espère que vous êtes prête à vous engager dans cette voie, et je compte plus que tout sur votre amour pour m'assister dans cette immense quête. Je vous aimerai toujours, Sofia, peu importe la portée de mon pouvoir, mais votre vie à mes côtés ne sera plus jamais la même. Si vous acceptez de tenir votre promesse, vous devez absolument me rejoindre à Legkibourg pour le moment de mon sacre. La Clovanie doit vous connaître. Vous serez Impératrice, et vous savez les fautes que votre prédécesseure a commise, et la trahison par laquelle elle a déshonoré son peuple et son Empereur. Vous incarnerez, j'en suis sûr, le renouveau dont ma Patrie a besoin.

À très vite, je l'espère.

Votre Louis qui vous aime.
Signature de Louis Césarévitch
Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE


Torri, le 2 août 2014

Mon Louis,

Quel choc ! Nous nous fiancions il y a à peine quelques jours, et j'apprends aujourd’hui que vous allez devenir Empereur ! Je me suis presque évanouie en lisant votre lettre, l'émotion m'a envahie au point que je ne sentais plus mes membres, que je respirais à peine. Louis, vous qui n'avez que quatorze années derrière vous, je suis convaincue de votre maturité à gouverner. J'ai senti votre hâte de laisser votre trace dans ce monde, vous rêvez de grandes choses, vous voilà en possession d'un pouvoir inestimé ! Dieu vous a choisi, vous, pour succéder à Pétroléon V en tant qu'Empereur de la Clovanie. Vous serez celui qui redresserez la Clovanie après cette effroyable drame, vous sauverez les Clovaniens des hérétiques qui ont fait tant de morts en quelques mois, vous réaffirmerez l'autorité de l'État sur le peuple et montrerez que vous savez faire régner la paix sur vos terres. J'ai toute confiance en vous.

Que va-t-il advenir de moi ? Vous ne pouvez m'épouser, vous devez aux Clovaniens une Impératrice qui aura le même sang que le leur. Aucune jeune femme n'a donc été préparée à être Impératrice de Clovanie ? Que vont-ils penser si nous nous marions ? Comment voulez-vous faire régner la paix après une telle tempête en me choisissant pour vous épauler ? Je n'ai pas été préparée pour ce destin, mon frère, en tant qu'ainé, a lui été élevé pour devenir Prince de Grisolia. Toute notre enfance, j'ai été comme son ombre car, évidemment, par précaution, je devais être capable de prendre la tête de la nation s'il décédait et que son premier enfant n'est pas assez âgé. Je n'ai fait que suivre les mêmes cours que lui, mais on m'a toujours épargnée la pression qu'on lui faisait subir. Aujourd'hui il se sent prêt, comme vous, mais pour ma part je ne pense pas être à la hauteur d'une telle responsabilité.

Je suis de tout coeur avec vous dans ce moment difficile. Je sais qu'aujourd'hui se tiendront les obsèques de l'Empereur ainsi que des Princes Clément et Éric, si injustement sacrifiés dans cette lutte contre les dévotis. Je ne connais pas la douleur que l'on ressent lorsque l'on perd un proche trop tôt, j'ai cette chance. Cependant je veux vous accompagner dans votre deuil, si vous en ressentez le besoin. Je souhaite être toujours présente pour vous.


Je vous adresse ma plus sincère affection,

Sofia di Grisolia

Signature de Sofia di Grisolia
Mademoiselle Sofia di Grisolia,
Palazzo di Grisolia, Torri, GRISOLIA


Prince Louis Césarévitch,
Palais Impérial de Gronski,
6, Place de Gronski, 15001, Legkibourg, CLOVANIE


Torri, le 9 août 2014

Mon très cher Louis,

Si vous saviez comme je ne pense qu'à vous depuis que je suis rentrée à Grisolia. Comme j'aurais aimé que vous soyez à mes côtés lorsque j'ai annoncé nos fiançailles aux Grisoliens, j'ai ressenti une telle émotion en annonçant notre amour à cette foule ! Mais bien sûr je sais que vous avez beaucoup à faire en Clovanie.

Vous savez bien que je suis très attachée à Grisolia, mon pays de naissance. Je sais que vous appréciez également beaucoup vous y rendre. Évidemment, nos noces se dérouleront en Clovanie, car je serai également sacrée Impératrice lors de celles-ci. Ma mère, ma grand-mère et ma soeur ont tellement hâte d'orchestrer l'organisation de notre mariage, si vous les voyiez vous ririez beaucoup. Mais c'est à ce propos que j'ai une requête à vous faire. Pourrions-nous revenir à Grisolia pour notre voyage de noces ? Voudriez-vous que nous nous isolions dans un coin de nature que je connais bien et que j'affectionne particulièrement ? Nous serions tranquilles, loin de tout et de tout le monde, avant de retourner à nos vies normales et à nos obligations. Qu'en dîtes-vous ?


Amoureusement,

Sofia di Grisolia

Signature de Sofia di Grisolia
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