26/11/2014
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Le Grand jeu - Rencontre Herdonia/Sylva

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Le Grand jeu: Rencontre Herdonia/Sylva



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"Ce sera la plus grande soirée de gala que ce pays aura vu. On va les faire passer pour des péquenauds, boss.". L'un des fidèles du nouvellement nommé ambassadeur Herdonia ne tarissait pas d'éloges devant ce qu'il avait sous les yeux. Cet endroit ressemblait désormais davantage à un palais qu'à une ambassade. La façade du bâtiment avait été entièrement ravalée pour lui donner des motifs inspirés des palazzios velsniens. Des colonnes ioniques décoratives avaient été placées le long de l'allée de jardin menant à la réception. Il y avait une sorte d'inspiration générale de l'architecture velsnienne classique, voire de l'antiquité leucytalienne. Non pas qu'Herdonia était une personne particulièrement nostalgique de quoi que ce soit, et il ne fallait pas y voir là l'expression d'une volonté politique. Herdonia était tout simplement trop occupé à gagner la direction du monde d'aujourd'hui pour tirer ses inspirations politiques d'un passé fantasmé. Il n'y avait pas là le besoin de devenir un nouveau Scaela. Pour Herdonia, l’esthétique était simplement d'expression de la puissance et de la richesse, rien de plus. Une richesse ostentatoire qu'il convenait de montrer à toutes et à tous. Herdonia ne savait pas ce qu'était une colonne ionique ou dorique avant que ses décorateurs ne lui montrent à quoi cela ressemblait. Puis il s'est souvenu l'avoir vu dans de vieux péplum, et cela lui a plu parce que c'était "terriblement classe". Il en allait de même pour les mosaïques aux contours rouge vifs qui ornaient les murs et les sols de la salle de réception. Herdonia se retourna vers son compère, en lui répondant ainsi:
- Tu vois mon p'tit Donny. T'es sans doute, de mémoire d'Homme, le plus grand lèche cul que la Terre ait jamais portée. Je t'ai pas vu être honnête une seule fois dans ta vie. Quand je dis que je préfère ma viande à point, du coup tu préfères aussi la viande à point. Tu répètes systématiquement ce que je te dis de répéter. T'as même changé la dernière syllabe de ton prénom pour que ça donne comme le mien. Je pourrais te demander de tuer ta mère que tu le ferais, mais tu sais quoi ? Ce soir j'ai l'impression que t'es sincère, Donny, et ça me touche.
- Merci patron. L'invitée arrive quand ?
- La présidente ? C'est une question de minutes je crois. Qu'elle prenne son temps. Au vu de ce qu'on lui prépare, il vaut mieux se maquiller non ?
- C'est quoi a suite du plan ?
- Putain mais t'écoutes jamais ce que je te dis ? On continue de placer, on investit...Sylva peut-être une mine d'or si on s'y prend correctement. Minerais, aérospatial, alcool, jeux...ce soir, je récolte les informations que j'entends avoir pour continuer. Le Sénat comprendra rien à ce qu'il vont voir, ils vont regretter de m'avoir envoyé dans ce trou, c'est moi qui te le dit. Sylva peut être une immense banque dans laquelle on va placer nos billets en attendant notre retour à Velsna. Et j'ai bien l'intention à ce qu'il soit fracassant. Ces socialistes nous auront pas comme ça. Mais passons. Montrons nos plus beaux sourires, ils vont arriver.


Toni Herdonia furetait parmi les invités jusqu'aux allées des grands jardins de l’ambassade, attendant patiemment la venue de ses invités, parmi lesquelles la nouvellement élue présidente de cet Etat duquel il était bien décidé un jour à repartir, et échappé au piège tendu par ses adversaires politiques à Velsna. Il y avait là une bonne partie du milieu d'affaire velsnien éprouvant de l’intérêt pour le continent platoterran, en d'autres choses, car ce pays était d'un interêt particulier dans ce voisinage presque entièrement gagné par le communalisme et d'autres régimes pour lesquels la diplomatie velsnienne n'a pas vraiment d’intérêt. Sylva est la clé de voûte de cette région du monde, et Herdonia n'entendait pas laisser un autre sénateur ouvrir la salle des coffres à sa place.
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Arrivèrent à la réception le gratin sylvois. L'évènement avait attiré l'attention de par les efforts observables qui avaient été déployés, ce qui fut dans l'ensemble bien vu. L'extravagance attirait toujours l'attention, et cet Herdonia avait porté beaucoup d'attention à rendre mémorable cette rencontre. Il exerçait qui plus est une espèce de fascination : celle de l'individu fortement déprécié mais dont on ne peut s'empêcher de porter l'oreille aux cancans qui orbitent autour de lui. Se présentèrent successivement la Présidente Bernadette Vougier légèrement en avance, dans une voiture de fonction somme toute modeste pour son poste, véritable volonté de présenter une certaine humilité en opposition totale avec l'œuvre d'Herdonia. Ladite voiture restait bien évidemment au-dessus des standards de confort, et surtout, de sécurité avec les quelques motards de police qui l'escortait. Elle fut d'abord agréablement surprise par la décoration qui tranchait et s'éloignait des tons monotones de l'art moderne outrageusement épuré et blanc (enfin, c'était très blanc, mais au moins, on n'était pas sur un espace vide). Son appréciation fut inverse avec les tenues : des costards, des trois pièces, monochromes, gris anthracite, ardoise, béton, télégris. Quel intérêt d'avoir une si belle maison si c'était pour avoir des vêtements aussi tristes, vides et ternes ? Ce n'était même pas des vêtements qu'elle aurait qualifiés de morts : est mort ce qui a vécu, ces vêtements n'ont jamais connu la vie, ils sont... inertes, stériles, symbole d'une mondialisation culturelle qui avait écrasé les traditions. C'est en ce sens qu'elle, était venue dans une robe créole large, colorée aux motifs madras avec de gros bijoux d'argent, bois et perles. C'était une masse colorée au milieu d'hôtes unicolores.

Vint ensuite Hélène Langoustine, pile à l'heure. Elle était arrivée à bord d'une limousine luxueuse et dans une robe longiligne rouge vif très classe selon des critères bien plus occidentaux. C'était à ce que l'on racontait une fonctionnaire à haute responsabilité avec beaucoup d'influence sur le poste de ses confrères. Beaucoup de promotions et rétrogradations étaient de son fait. Cela tranchait pourtant avec sa figure bien ingénue : jeune, à peine la trentaine, pas mal maquillée quand bien même c'était harmonieux et avec une coiffure élaborée.
Elle cligna des yeux en sortant de sa voiture : "Que c'est beau !" s'était elle exclamée "Monsieur Herdonia, permettez-moi de vous féliciter sur vos gouts en matière de décoration !"
Du haut de ses talons haut, elle captait l'attention avec un charme certain et surtout un mascara noir qui attirait immédiatement l'attention sur ses yeux attentifs d'un vert aussi profond que les forêts de Sylva.

Arriva en dernier avec un peu de retard Matilde Boisderose, la Ministre des Affaires Étrangères à bord d'une voiture tout terrain d'officiels sylvois, un 4x4 censé les accompagner même dans les discours au cœur des bois, dans les bourgades les plus marginales. L'engin était un mélange de rusticité inhérent à sa fonction et d'élégance d'une voiture de luxe.
Quant à son occupante, elle était ravissante dans une tenue de soirée typique de la noblesse sylvoise : une robe créole traditionnelle revisitée avec des éléments médiévaux d'occidentaux, le tout magnifié par des breloques dont raffolent les nobles, amateurs de détails. Elle avait une tenue violet sombre brodée de jaune.
Ayant déjà voyagé aux quatre coins du monde, elle était accoutumée à voir de nouveaux décors, de nouveaux styles d'aménagement. Elle ne trouva pas moins ravissant pour autant la décoration marmoréenne. Peut-être aurait-il fallu ajouter quelques touches de bois ? Ou au moins des dorures ? Probablement alterner les marbres de différentes couleurs ? Une statue cuivrée plutôt que blanche ici aurait été du plus bel effet.

Pour ce qui fut des échanges avec Herdonia, c'était... formel. Bernadette et Matilde étaient des plus courtoises mais sans non plus être chaleureuse. Elles étaient loin d'afficher leurs positions vis-à-vis d'Herdonia, qui était tout de même un ambassadeur, mais n'affichait pas plus que ça de sympathie. Mais Hélène, elle, était avenante et buvait les paroles d'Herdonia qu'elle avait l'air de voir comme un modèle d'entrepreneuriat, ce qu'il manquerait apparemment à Sylva :

"On raconte que vous avez enchainé les coups de génie, monsieur Herdonia. J'en déduis qu'il est des plus bénéfiques de vous avoir en Sylva, surtout après la Crise des Brouettes !"
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Naturellement, l'entrepreneur aime la flatterie et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'Herdonia appréciait la mise en valeur, au même titre que jouer avec le feu. Se drapant dans une fausse modestie (non) et un sourire enjôleur, il répondit à l'invitée la plus spéciale de la soirée (attention, il est fort probable qu'une grande part de ses déclarations soient des mensonges):
- Oh vous savez. Le secret de la réussite, c'est le flair et l'audace. Ce ne sont pas études et des diplômes qui m'ont amené là, il faut quelque chose de plus: le flair ! Et je sens bien qu'il se passe quelque chose en Sylva en ce moment qui mérite que je sois ici, des opportunités en or. Vous évoquez la crise des brouettes: ce fut une véritable tragédie qui a duré près d'un an, mais votre pays a sorti la tête de l'eau. Pourquoi ? Parce qu'il y a eu des sylvois talentueux et audacieux pour relever la barre. Et maintenant que cela est passé, et que Velsna en a terminé avec ses vieux démons, j'ai estimé que l'occasion était rêvée pour faire la demande de ce poste d'ambassadeur. Beaucoup m'ont prit pour un fou dans mon camp politique, que le Paltoterra n'était qu'une impasse condamnée par le socialisme. Mais heureusement, nous savons très bien que c'est faux, et je suis là pour le prouver à ces gens au Sénat qui sont plus occupés à faire leur sieste de l'après-midi en récoltant des rentes foncières. Des placements financiers de vieux croulant si vous voulez mon avis. Votre gouvernement l'a compris: exploitation minière, industrie spatiale, haute technologie... Vous semblez vous également, êtes peu avare en coups d'éclats et de génie. Aussi, je suis certain que nous n'allons bien nous entendre. Suivez moi mes chers.

La salle de réception dans laquelle les personnages firent leur entrée était le reflet de la réalité de la société velsnienne d'après-guerre. Insouciante, avide d'opportunités, une jeunesse à la recherche d'autres modèles que le conservatisme ambiant de la cité sur l'eau, et il se trouve que les velsniens ayant fait le déplacement: hommes d'affaires et investisseurs, diplomates, personnalités du monde de la culture...tous ces gens avaient semble t-il trouvé un nouveau champion. Quelque part, Herdonia était le résultat de ce qui se produisait lorsque tous les freins de la voiture étaient retirés: ce à quoi ressemblerait Velsna sans DiGrassi d'un côté, et sans les revendications sociales du PEV de l'autre. Herdonia n'était peut-être que l'avant-goût d'une société velsnienne sans la moindre entrave, permettant les plus grandes libertés comme les plus grands abus. Et quelque part, les eurysiens devaient peut-être remercier à la fois DiGrassi et le PEV d'exister pour empêcher cela de se produire.

Herdonia balade ses invités sylvois au travers du brouhaha et de la musique. Il fait chaud, et des serveurs s'empressent de proposer aux invités coupes de champagne et apéritifs devant prendre leur mal en patience. L'hôte excentrique se fend d'un commentaire: "Ne vous en faites pas, si vous n'aimez pas le fatras, nous pouvons nous éclipser plus au calme. Vous pensez bien que je ne vous ait pas invité simplement pour célébrer une amitié nouvelle. A votre convenance, nous pouvons faire cela, ou bien je peux vous laisser profiter des festivités en attendant mon petit discours. Vous verrez, je ne suis pas le pire des rhêteurs.". A l'instant où Herdonia évoqua son bureau, l'un de ses suivants, Donny, le pinça par la manche, ce que l'ambassadeur répondit par un regard noir:
- J'espère que t'as une bonne raison de froisser un Don Alterini tout neuf, Donny.
Le fidèle de l'entrepreneur se pencha à l'oreille d'Herdonia dans l'espoir que les invités sylvois ne l'entendent pas:
- Patron, on a un problème avec votre bureau. C'est à propos du jaguar...
- Comment ça ? Je croyais que t'avais réussi à le chopper !
- On a réussi à l'acculer dans votre bureau et on a fermé la porte, boss. Diedro a essayé de l’appâter avec de la bouffe mais il a faillit lui chiquer la jambe.
- T'as intérêt à me régler ça tout de suite, compris ?


Herdonia se tourna à nouveau vers les invités: "Bon. On dirait qu'il y a un problème de plomberie dans mon bureau, une fuite à cause de tous ces travaux. Aussi, nous pouvons nous parler plus en avant dans le boudoir, plutôt. Je vous prie d'accepter mes excuses pour ce contretemps. Sur ce, profitez donc de la fête et rejoignez moi là-bas quand vous voudrez discuter des affaires qui regardent nos deux grandes nations."


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Le visage d'un homme au courant qu'un jaguar incontrôlable est confiné dans une partie de la propriété

Alors qu'Herdonia s'éclipsait, l'un des membres de l'armée de serveurs qui quadrillaient la salle de réception aborda les membres de la délégation sylvoise, tout particulièrement la présidente:
- Excellence présidente, apparemment vous avez un admirateur. Un Homme qui prétendait vous connaître m'a chargé de vous offrir ce verre. Une fois ce vin d'excellence de Velcal terminé, je vous conseille de regarder en dessous, sait-on jamais, peut-être est-ce une déclaration d'amour.

Si le personnage de JeanJean retourne le verre, elle se rendra compte qu'un petit papier rectangulaire y est collé, et où il est inscrit la note suivante:
"Excellence, si vous entendez faire la lumière sur l'affaire Herdonia, je vous prie de me retrouver au balcon de l'ambassade, au premier étage. Il semblerait que nous ayons le même but."
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La remarque sur le socialisme arracha un léger sourire en coin à madame Vougier, particulièrement satisfaite de la dynamique qu'adoptait maintenant le Paltoterra une fois les komunteranos calmés. Et quand arriva la déclaration du serveur, Matilde et Hélène la regardèrent d'un air taquin face à cette possible lettre d'amour. La lisant discrètement, Bernadette leur expliqua rapidement le contenu, ce qui sembla presque décevoir l'ambassadrice, ravie d'apprendre un commérage. Hélène était par contre très intriguée, aussi dit-elle à la présidente :

-Rendez-vous à cette invitation, je m'occupe de cuisine Herdonia.

-Et moi ? Demanda Matilde.

-Remplissez votre fonction de Ministre des Affaires étrangères. Faites illusion.

Une réponse qui parut ne convenir que trop peu à la Boisderose, mais elle s'y plia. Ainsi, Bernadette allait au balcon pour retrouver le mystérieux admirateur, bien qu'elle se montrait plutôt méfiante. Herdonia devait se savoir traqué, était-ce un piège de son fait pour la retrouver là-haut et confirmer ses soupçons ?
Quant à Matilde et Hélène, elles allèrent profiter un moment des festivités (tout en se montrant très réservées sur l'alcool, il fallait qu'elles conservent leurs esprits). Hélène était avant tout impatiente de retrouver Herdonia pour lui tirer les vers du nez. Cette mission sortait en effet de l'ordinaire que lui réservaient les renseignements sylvois.
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Loin du bruit et de la musique, un Homme attendait patiemment, quelque peu tendu toutefois, sur un balcon qui lui permettait de voir qui entrait ou sortait de la réception. Il était penché à son perchoir, au dessus de son petit monde qu'il pouvait voir, mais que dans la nuit, dont la présence ne pouvait être décelée. Son visage exprima un soupir de soulagement lorsqu'il réalisa que la sylvoise avait répondu à son message, aussi s'empressa t-il de lui serrer la main:
- Madame la présidente, c'est un plaisir. Veuillez m'excuser de cette manière un peu théâtrale de vous convier, mais les gorilles de Toni Herdonia me conaissent bien trop pour que je puisse me permettre d'attirer leur attention en abordant votre personne à leur réception. Mais où sont mes manières...je me présente: Riccardo Pedretti, ambassadeur de la Grande République auprès du Grand Kah. Et il se trouve que nous avons ce soir les mêmes intérêts. Il se trouve que le Conseil Communal de Velsna a peut-être décidé que les clowneries d'Herdonia avaient assez duré. Qu'il était peut-être temps d'avancer sur cette affaire et de sortir définitivement cet individu de la vie politique de quelque pays que ce soit, mais surtout du nôtre...

Il vient se pencher au balcon et invita la sylvoise à faire de même:
- Regardez moi tout ça... ce type sait que chacun de ses pas est peut-être un piège tendu par nous-même pour le sortir, et quelle est la première chose qu'il fait une fois arrivé à Sylva ? Il transforme notre ambassade en palais au goût architectural...pour le moins...inhabituel. Je doit lui reconnaître son audace, mais'est clairement une provocation, et il y a des gens à Velsna que cela ne fait pas du tout rire. La Maîtresse du Grand Commerce, son excellence Julia Cavalli, et le Maître de l'Arsenal DiGrassi me l'ont clairement signifié: Herdonia, d'une manière ou d'une autre, doit être sorti, quelque soit la manière afin de sauvegarder la crédibilité politique de notre illustre assemblée, mais également parce que le personnage, vous l'aurez deviné, est clairement dangereux. Ne vous fiez pas à ses sourires, nous avons toutes les raisons de croire que ce type est la pire chose qui soit arrivée sur Terre depuis l'invention de l'Achosie. Au passage, on m'a clairement fait comprendre que mon propre poste est en jeu dans l'affaire. Vous imaginez donc mon empressement à aider vos autorités dans l'appréhension de...ce type.

Ce faisant, considérez moi comme un allié de circonstance, je vous prie, car ce que j'ai à vous dire vous aidera sûrement. Vous comme moi, si votre ruse est à la hauteur de votre poste, vous demandez sûrement comment Herdonia a pu mobiliser ses capitaux de façon aussi massive dans les activités économiques de votre pays ces dernières semaines, non ? Je veux dire...regardez cet endroit, il y a de l'argent partout. Il en est venu à incruster des dorures dans la peinture des murs des toilettes de la réception. Le portefeuille, c'est son arme, aussi je vous propose de le frapper là où ça fait mal. Nous devons identifier le fonds d'investissement à partir duquel il peut mobilisé ses capitaux et investir dans autant de structures à la fois. Une chose est sûre: il a tout vidé à Velsna: comptes personnels, comptes de société, nous avons tout passé au crible. Il a sentit le coup venir, tout s'est volatilisé. Hors, si nous pouvons localiser l'emplacement de ses fonds, il sera possible de retracer certains de ses placements avec l'aide des autorités locales, et nul doute qu'il y aura de quoi se rincer l’œil. Nous avons des suspicions de blanchiment d'argent concernant les activités de la Fondation Herdonia et vous, madame la présidente, tout comme les kah-tanais, voulez certainement le même Homme pour rendre compte du trafic d'être humains ayant eu lieu l'année dernière entre Communaterra et Sylva pendant la guerre du Kah. Si je vous dis que ce soir, il y a une chance non négligeable d'avancer dans ce sens, cela vous intéresse ?


L'ambassadeur Pedretti fait une pause, sirotant son verre de gin qui traînait sur la rembarre du balcon, avant de reprendre:
- Pour être honnête, moi aussi j'ai un interêt à la perte de ce type, en dehors des suspicions de trafics d'êtres humains. Si Herdonia sortait...je pourrais récupérer l'ambassade de Sylva pour devenir le seul interlocuteur de Velsna dans tout le Paltoterra. Vous imaginez bien que c'est une position recherchée qui pourrait conduire à de bien meilleures relations entre notre gouvernement et le vôtre. Mais bref, retournons à nos moutons, maintenant que j'ai essayé de faire montre de ma franchise pour vous amadouer "honteusement". Si activité bancaire il y a, alors trace informatique ou écrite il devrait également y avoir. Vous voyez où je veux en venir ? Et Herdonia est assez confiant et imbu de lui-même pour laisser traîner cela ici, vous ne pensez pas ?

C'est pourquoi je vais avoir besoin de votre aide ce soir, un coup de main ne serait pas de refus, et comme nous avons tous deux les mêmes intérêts... Une histoire de vol de données à une soirée pour la bonne cause à une soirée scandaleusement ostentatoire, cela vous dit ? Qu'en pensez vous ?
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Bernadette était à la fois circonspecte et captivée par les déclarations de son interlocuteur. C'était là une intrigue qui allait loin et, quand bien même, elle était consciente de la profondeur de la chose, elle en saisissait l'ampleur que maintenant. Elle savait évidemment que les enjeux étaient internationaux et que plusieurs acteurs recherchaient Herdonia, c'est plutôt à l'échelle nationale de Velsna qu'elle était surprise et surtout de l'implication d'un ambassadeur et ses plans pour les relations entre sa nation et un continent entier. Elle tourna la tête de gauche à droite pour vérifier l'absence d'oreilles indiscrètes, avec une légère paranoïa nourrie par le contexte, puis répondit :

-Nos objectifs sont en effet partagés et nous déployons déjà des efforts pour faire corréler des informations supplémentaires obtenues de cet individu avec d'autres preuves collectées lors de notre dernière crise avec les libertariens. Nous avons ici même un agent sur place chargé d'interroger subtilement Herdonia pour lui tirer les vers du nez, sur le long terme s'il le faut. Sans vous en dire trop, bien que vous devez vite voir de qui il s'agit, cet agent va inviter Herdonia à investir en Sylva via diverses bourses et fonds d'investissements qui se chargeront de retracer les transactions d'Herdonia. Ce qu'il placera ici sera sous notre contrôle, et permettra de remonter à une source. La source est un intermédiaire impossible à identifier ? Ne vous inquiétez pas pour cet agent, suffisamment compétent pour orienter Herdonia vers ce que nous voulons. Du moment qu'un intermédiaire est identifiable, on pourra retracer d'où il a tiré les fonds.
Concernant votre plan... je me vois contrainte de vous faire confiance. Voulez vous que je simule un malaise pour attirer l'attention de la sécurité et vous laisser champ libre jusqu'aux bureaux ?

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Hélène quant à elle recherchait Herdonia pour reprendre la conversation et le faire parler. La tactique était simple : le flatter et l'inviter à discuter avec la simple mais efficace méthode du "répéter ce que l'autre dit sous forme de questions" comme :
-Je compte investir en Sylva savez-vous ?
-Comme c'est fascinant ! Vous voulez investir ici ?
-Oui, je m'intéresse à certains secteurs en particulier.
-Oh, certains secteurs précisément ?

C'était en apparence une méthode archaïque et grossière mais force est de constater qu'elle est rudement efficace avec un individu mis en confiance, et que c'est un excellent tremplin pour orienter une discussion. Elle maitrisait parfaitement les méthodes d'ingénierie sociale de par sa véritable fonction et, d'un caractère naturellement avenant, excellait à tisser des liens de confiance et tirer des informations.
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Pedretti était anxieux avant cette discussion. Aucun moyen de savoir si les sylvois seraient à même de collaborer avec lui, ni de savoir à quel point ces derniers seraient efficaces si d’aventure, ceux-ci acceptaient d’être partie prenante dans la chute d’Herdonia. Mais au moins, la réponse de la présidente a eu le mérite d’écarter la première de ces deux craintes. Pedretti était pour ainsi dire seul depuis presque un an sur ce dossier, et on ne pouvait pas dire que le gouvernement du Conseil Communal velsnien lui avait fourni beaucoup de moyens, en premier lieu parce qu’historiquement, les velsniens n’avaient pas l’habitude de financer eux même le train de vie de leurs ambassadeurs, qui devaient pour ainsi dire être quasi-autonomes sur le terrain de leur mission. Mais également parce qu’autant DiGrassi que Cavalli, avaient peu confiance dans les renseignements velsniens. Aussi, ce soutien eut été un soulagement, et l’ambassadeur velsnien au « pays des pyramides » le fit savoir :
- Parfait. On m’avait dit du bien de vous, je suis content de ne pas avoir été déçu comme trop souvent. Le Paltoterra est un endroit dangereux, aussi je suis ravi de voir que du soutien se manifeste de votre part. Mais retournons à nos affaires. Comme je le disais, Herdonia est un type aussi imprévisible qu’imprudent, et avec un peu de chance, tout ce qui est nécessaire à son arrestation se trouve ici. Je sais reconnaître un Homme qui commence à prendre ses aises. Et ce que nous cherchons pourrait bien être dans la partie privée de l’ambassade, comme vous l’avez suggéré. Vous pensez à ce que je pense : il nous faut envoyer quelqu’un fouiner dans son bureau. Il y a peut-être des traces de ses activités bancaires à Saint Marquise, ou même quelque chose qui pourrait le lier aux agissements des libertariens de Pointe-Mogan. Mais la grande question pour nous c’est : qui devons-nous envoyer ? Si on me voyait faire quoi que ce soit, on me reconnaîtrait sans doute et quant à vous, vous êtes devenue une personnalité bien trop reconnaissable. Je dispose de plusieurs éléments sur le terrain, je pourrais en envoyer un pendant que vous faites tout pour dissuader notre Homme de retourner à ses quartiers, tout en permettant à notre agent de passer la sécurité sans encombre. OU BIEN…on fait l’inverse et c’est l’un des vôtres qui s’occupe de la paperasse pendant que nous faisons diversion. A vous de voir. Vous êtes venu avec une collègue à ce que je vois, je pense qu’elle pourrait faire un bon appât, et comme vous le dites, elle pourrait même en apprendre sur les éléments de ce que nous recherchons. D’ailleurs je me demande comment elle s’en sort…

Au même moment, la conversation entre Hélène et « l’Homme de la soirée » se poursuivait. Toni Herdonia était certes un escroc, doublé du titre peu enviable de responsable d’un certain nombre de crimes présumés dans divers pays, mais il y avait là un charme peu commun. Peut-être l’une des raisons qui expliquait la facilité qu’il avait eu à obtenir certaines choses. L’Okaristan, le Wanmiri, Communaterra, Pointe-Mogan…autant d’endroits où il avait misé sur sa bonne étoile qui semblait le suivre partout. Avide de compliments et de flatteries, il ne s’arraîtait plus de parler lorsqu’on lui en adressait (HRP : jet de dés 100 : réussite pour Hélène) :
- Dans quoi je compte investir ? Vous savez. Je ne suis un spécialiste d’aucun secteur, je ne suis pas un capitaine d’industrie ma chère, un citoyen du monde si vous préférez. Je vois ce qui potentiellement peut rapporter, et je pose mes billes dessus. Le peuple veut des t-shirts à pas cher, je peux leur fournir. Ils veulent de l’essence pour faire marcher leur voiture ? Je suis là. Sylva est un paradis pour les investisseurs depuis la fin de la crise des brouettes, et je compte bien avoir ma part. J’ai d’ores et déjà placé dans le secteur des minerais, et le secteur pétrolier sylvois me paraît très prometteur. Bien éloigné d’Apex, cette entreprise d’Etat socialiste que mon gouvernement semble vouloir s’évertuer à protéger. Et je suis persuadé de pouvoir, si je devenais intermédiaire d’une entreprise pétrolière sylvoise, écouler l’or noir en Eurysie pour bien moins cher qu’Apex. Mais en dehors de cela, il est vrai que j’ai des péchés mignons comme tout le monde, et de ce point de vue là, vous me percez à jour ma chère. Et cela tombe très bien que vous abordez ce sujet. Il y a deux choses dont je ne me lasserai jamais dans cette vie : le risque et l’océan. Aussi, je me demandais si vous pouviez me renseigner : le secteur du jeu est-il réglementé par chez vous ? Y a-t-il des activités liées au jeu qui seraient défiscalisées. Pareil, concernant le droit de la mer : y-a-t-il des démarches particulières auprès de l’Etat qu’il faudrait faire, si par hasard, je voulais racheter ou créer une entreprise de transport maritime ?

HRP : Herdonia semble peu méfiant pour l’instant. Mais gare aux surprises, il peut cacher son jeu.
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"Ne prenons pas de risque, Herdonia souhaite m'en mettre plein la vue, peut-être même avoir mes faveurs politiques ? Il sera surement plus tolérant face à un écart de ma part et je pourrais jouer à l'ingénue en prétextant m'être perdu en cherchant les toilettes ou que sais-je.
Et quant à mes consœurs, oui, elles pourront être utiles. Hélène est... en effet là pour s'occuper d'Herdonia. (Vérifiant ses angles morts, elle poursuivit) Nous ne vous avons pas attendu pour préparer une enquête envers cet individu. Vous, soyez discret, ou au contraire, attirez le regard des gardes du corps comme si vous étiez un concurrent flânant dans une magnifique fête où vous vous étiez invité. Parlez fort et dansez comme si vous étiez soul, même.
Pour assurer mes arrières, je peux également demander à madame Matilde Boisderose de m'accompagner pour surveiller les alentours. Elle aussi pourrait faire diversion si des agents d'Herdonia ou lui-même convergeaient vers le bureau. Elle pourrait prétendre faire un malaise, m'alertant et attirant l'attention des gardes malvenus pour me permettre de fuir rapidement. Qu'en pensez-vous jusqu'à présent ?"
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Le visage d'Hélène s'illumina :

"Monsieur Herdonia, vous êtes un sacré veinard, je connais justement plusieurs industriels dans le domaine maritime dont un qui saura concilier les jeux : les sociétés de croisière et celles de frett, adaptables pour le personnel."

Elle savait très bien qu'en bon escroc exploitant les mouvements de populations miséreuses, il avait surement en tête de faire transiter des populations clandestinement. Il fallait maintenant l'orienter et l'hameçonner rapidement.

"Nous pourrions les rencontrer dès demain soir, histoire d'avoir le temps de récupérer de cette soirée-ci qui s'annonce mémorable, j'en suis certaine ! Nous avons notamment une entente touristique avec une société stranéenne au nom de "Boyaji!". Le Negara Strana, vous connaissez ? Au sud du Nazum, à côté du Wanmiri et Jashuria. Cela assure des débouchés importants et une hausse du marché touristique, et avec lui de l'hôtellerie... et conséquemment des casinos ! Cela vous ouvrirait également les portes des paris sportifs en tout genre, autrement dit que je peux vous dénicher un bon nombre d'opportunités. Et en plus des éléments purement touristiques, oui, nous comptons plusieurs entreprises florissantes enregistrées en bourse dans le domaine du transport même. En temps normal, nous sommes procéduriers sur la question mais... le Duché souhaite se rapprocher de Velsna, un acteur économique de plus en plus important d'Eurysie, incontournable, oserais-je même dire ! Et je serais prête à faire quelques écarts de conduite, si vous voyez ce que je veux dire, si cela m'assurait vos bonnes grâces auprès de Velsna. Imaginez que vous retourniez chez vous en ayant développé de fructueux accords avec le Duché, quelle meilleure publicité pour vous ? Cela vous ouvrirait des portes en politique si j'ai bien compris le fonctionnement velsnien et vous pourriez poursuivre les dynamiques de rapprochements entre le Sylva et Velsna.
Bref, je parle beaucoup, cela vous intéressait-il d'être mis en relation avec des responsables très conciliants dans le domaine ? Vous pourriez rapidement vous faire une place avec ma tutelle, si vous me garantissez de rendre la pareille à Sylva en temps voulu ! Vous me le promettez ?"
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L'ambassadeur Pedretti acquiesça en signe d'approbation devant la proposition de la sylvoise:
- Très bien. Un complice issu de mes services tâchera de faire diversion pendant que vous vous faufilez dans son bureau. Moi, eh bien comme je vous l'ai expliqué, je suis on ne peut plus connu d'Herdonia, peut-être trop pour vous être directement utile. Il me rassure que vos autorités aient déjà été tenu au fait de la dangerosité du personnage... Bon, il est temps de mettre la machine en route. J'envoie mon associé faire du grabuge en réception, et madame Boiderose se charge de notre client. Nous sommes bons ?

Pedretti tape frénétiquement sur son téléphone, faisant signe à son associé par le biais d'un message laconique. "T'as le feu vert.". Sa main droite était quelque peu tremblante lorsqu'il raccrocha. Il prononça juste ces mots avant de jouer sa partition: "Qu'est-ce que je ferais pas pour les beaux yeux de ce putain de Sénat... Aller, en piste.". Peu après qu'il se soit éclipsé, Hélène pu entendre le début d'un raffut dans la salle de réception au rez de chaussée. L'un des serveurs qu'elle avait aperçu en arrivant sur les lieux commença à se comporter, avec la démarche d'un homme ivre. Avec son plateau de coupes de champagnes, il feignit de trébucher sur l'un des invités et renversa une bonne part du contenant sur sa chemise, provoquant un certain brouhaha:
- Nan mais tu peux pas regarder où tu vas !? C'est un Scerpa tout neuf à 4 000 florius que tu viens de salir !
Visiblement, le "serveur" avait cherché la bonne personne, puisque "son excellence", probablement un éminent homme d'affaires velsnien, était prompt au scandale, et s'empressa de le prendre par le col.
- Toutes mes excuses monsieur, c'est mon premier jour... -feignit de d'excuser le complice de Pedretti, qui en essuyant la chemise avec une torchon, ne réussi qu'à étaler un peu plus -
- Arrête ça espèce d'idiot ! Donne moi cette putain de serviette. - hurla un peu plus sa "victime", lui arrachant la serviette des mains -
Mission réussie pour le serveur qui s'est sacrifié pour la bonne cause, les deux vigiles qui gardaient l'entrée de l'aile privée de l'ambassade arrivèrent presque immédiatement, laissant cette dernière sans surveillance:
- Il y a un problème monsieur ?
- Oui, et pas qu'un peu ! Vous les trouvez où vos serveurs ? A l'école de cirque de Velsna ? Regardez moi ça ! C'est irrattrapable !

Ce business man avait beau ne pas être dans le coup, il jouait sa partition à merveille.

Au même moment, Herdonia était absorbé par une conversation dont il n'avait pas envisagé la durée:

- Le Negara Strana...je n'ai jamais eu le plaisir d'y aller. On dit que ce pays est gangréné par un régime socialisant, empétré dans un océan de normes et de règles. Autant faire affaire avec le Grand Kah à ce compte là j'ai envie de dire...mais je note votre proposition. (HRP: Herdonia, s'il n'est pas encore suspicieux, semble sensiblement se désintéresser. Tu as évoqué un pays qu'il ne tient pas en grande estime)

Herdonia esquisse un léger rire:
- Des jeux d'argent chez les coco, quelle drôle d'idée...mais revenons à des sujets sérieux voulez vous. Le Wanmiri...maintenant que vous m'en parler, cela me donne tout de suite plus envie de vous suivre. J'adore ce pays, les gens qui y vivent sont d'une simplicité...presque innocente. Vous savez, j'ai encore quelques uns de ces mugs qui datent de l'époque de la disparition de ce journaliste velsnien là bas, au moment de la terrible éruption qui a ruiné ces gens. Je me demande ce que ce type est devenu...pourtant les locaux sont d'une grande générosité. J'ai pu moi même m'en rendre compte en m'y rendant l'année dernière. Les gens y sont travailleurs, sérieux, ils veulent sérieusement s'en sortirent, pas comme tous ces feignants qui veulent passer aux 46h à Velsna... C'est pour ces gens là que j'ai investi dans autant de causes humanitaires. Les eurysiens sont devenus oisifs, ils ne veulent juste faire leurs trois heures de sieste en après-midi, et toucher leur "salaire minimum", encore une ineptie pour des individus sans envergure ni ambition. Les wanmiriens, voilà l'exemple que nous devrions prendre.

Mais revenons à nos affaires. "Tutelle", "promesses"...je n'aime pas ces mots, ce ne sont pas ceux de quelqu'un qui désire vraiment conclure de bonnes affaires. Ils devraient être bannis du langage de gentilshommes tels que nous, il n'y a que les capitaux dont nous devrions nous permettre d'être dépendants, pas des "promesses". Mais je vois où vous voulez en venir. Si je veux investir à Sylva ? Et comment ! Soyez plus précise je vous prie, que me proposez vous ? Quels placements et quels "services" ?



Drapeau
Un homme définitivement versé dans l'humanitaire


Malgré la suspicion qui émerge quelque peu chez le flamboyant Herdonia, la distraction dur serveur engagé par Pedretti a donné une fenêtre inespérée afin de se glisser d'une aile à l'autre...
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Ne perdant pas de temps, Bernadette Vougier alla chercher Matilde Boisderose pour lui expliquer la situation. Elles se mirent rapidement en route en profitant de l'attention accaparée par la maladresse du "serveur", avançant prudemment dans les locaux jusqu'au bureau.

"Attendez !" Intervint Matilde "Il y a peut-être quelqu'un dans le bureau, évitons les maladresses !"

Et sur ce, elle vida sa coupe de champagne pour l'appliquer contre la porte et écouter, ce qui ne marcha que très moyennement vu la forme du verre et son pied qui gênait. Un peu embarrassée, la ministre des Affaires étrangères abandonna tandis que Bernadette se contenta de répondre : "De toute manière, nous n'aurions jamais entendu quelqu'un silencieux, simplement assis par exemple".
Et sur ce, elle ouvrit doucement la porte pour vérifier à l'intérieur tout en pensant intérieurement "Cela sent le fauve à l'intérieur, il ferait mieux d'aérer son bureau à l'occasion cet Herdonia !"
Et Bernadette entra tandis que Matilde surveillait l'entrée. Objectif, si la présidente ne se faisait pas bouffer : fouiller l'ordinateur, notamment une éventuelle fenêtre mail, et tout transférer (en prenant soin de supprimer après de l'historique les mails transférés aux organismes ducaux). Et au passage, fouiller sur l'ordinateur d'éventuels comptes à transmettre et, une fois fait, voir dans les archives papiers s'il y a des choses à photographier.
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Hélène n'en démordait pas de son côté et s'obstinait à agripper son interlocuteur :

-Oh, tutelle n'était pas le mot approprié, "guide" l'aurait davantage été, afin de vous orienter dans le marché boursier sylvois et ses spécificités. Et comme je vous le disais, on a plusieurs hôtels qui vont ouvrir pour accueillir les touristes à venir, quatre plus précisément, le secteur étant en hausse. Et trois de ces hôtels compteront des casinos et autres infrastructures festives pour un public avertis.
Pour le sport, j'ai des contacts qui m'indiquent que le Duché prévoit sous peu de mener une politique favorable dans le domaine, avec le financement de club et d'évènements. Les paris seront légaux et représenteront conséquemment un avenir. Je peux dès lors vous orienter pour ouvrir des entreprises dans le domaine.
Et concernant les services... je pourrais vous faire passer outre les politiques protectionnistes communistes du Duché pour investir sans limites et contraintes. Et en échange, il faudrait que je puisse permettre à d'autres investisseurs sylvois en temps et en heure de s'implanter en Velsna réciproquement. Qu'en dites-vous ?
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Par chance, les sbires de Herdonia qui étaient supposés faire en sorte que personne ne s'aventure dans l'aile privée, n'avaient pas remarqué les deux personnes s'étant faufilées derrière leur dos...mais peut-être n'était-ce pas tant une bonne nouvelle que cela, puisque ces individus étaient spécifiquement là pour maîtriser l'animal que ces derniers avaient réussi à confiner dans le bureau de l'ambassadeur. Lorsque Boisderose entra dans le bureau, elle pu de suite constater que quelque chose n'allait pas. En premier lieu, une odeur qui n'était pas humaine, en second lieu, le fait que le bureau semblait avoir été mis sans dessus-dessous par...quelque chose. Des papiers...ils y en avait des tonnes par terre, pour beaucoup déchirés et mis en pièce par...quelque chose. Il y avait aussi une odeur...d'alcool ?

Le fait d'infiltrer un endroit où elle n'était pas supposer être était déjà assez étrange comme ça. Mais définitivement, Boisderose se rendait compte qu'elle n'était pas seule, que ce n'était ni Herdonia ni ses sbires qui étaient coupables du fait que des portes dossiers soient renversés au sol comme si une lutte acharnée avait eu lieu ici (Herdonia n'était coupable que d'avoir accroché dans toute la pièce des portraits de lui-même, qui soit dit en passant étaient eux aussi renversés au sol et portaient des traces de griffures profondes). Et puis, Mathilde se retourna, et pu voir sur le canapé dans un coin de la pièce, une immense silhouette allongée dans le canapé, sur son dos et de tout son long. Un jaguar ? Malgré la pénombre, la sylvoise pu reconnaître la nature de ce qui trouvait en face d'elle. Aux pieds du canapé, c'est sans doute de cette gamelle qu'émanait une odeur d'alcool, sans doute du rhum, avait avait été mélangé à la nourriture de la bête par les gardes d'Herdonia pour endormir cette dernière. Quelqu'un avait également pensé bon de mettre un nœud papillon de smoking autour su cou de la bête, ce qui lui donnait un air étrangement élégant.

La sylvoise se précipitait sur ce qui pouvait être sauvé des papiers et documents de l'ambassadeur, pour ceux qui avaient survécu. Par chance, le jaguar n'avait pas trop chahuté l'ordinateur portable, pas suffisamment pour casser l'appareil, mais juste assez pour pour briser une partie de l'écran. Bien évidemment, celui-ci était protégé par un mot de passe, au dessous duquel il n'y avait aucun indice pour se le remémorer. Peut-être va t-il falloir fouiller plus en avant la pièce...


Pendant ce temps, la fête bat son plein, et Herdonia était toujours aux prises avec une jeune femme plus insistante que prévu.
- Cela commence à être intéressant. Cela dit, je pense que vous sur-estimez grandement mon influence dans la cité sur l'eau. J'ai quelques portes à vous ouvrir à Velsna, mais elles ne concernent que les entreprises dans lesquelles j'ai déjà des placements. La Fondation Herdonia possède une branche "jeux et paris", et si vous le souhaitez, je serais ravi de vous céder une fraction de son capital en échange d'une arrivée de ma fondation sur le marché sylvois. Cela pourrait être possible dans ces conditions. Qu'en pensez vous ?

L’hôtellerie...ça me rappelle la dernière où j'ai tenté communiquer avec les autorités du Grand Kah, à mon grand regret. Ces derniers n'ont définitivement pas le sens de l'entreprise comme nous autres. C'était à l'époque de la chute de la Communaterra: je leur avait proposé l'ouverture d'une gamme d'hôtels particuliers pour stimuler l'attrait touristique de la région. Je n'ai jamais eu de réponse...une sacrée histoire. Mais bref...j'ai un discours à donner, veuillez m'excuser. Cette conversation a été des plus intéressantes, mais j'ai des obligations. Je vous laisse réfléchir si vous avez d'autres propositions, on se reverra sans doute dans la soirée.


Le velsnien rejoignit la salle de réception où l'attendaient ses invités:
- Messieurs, mesdames. J'espère que cette soirée est à votre goût !
Herdonia fut accueillit par cette audience déjà acquise à ses pensées par des applaudissements et de vives approbations.
- J'ai devant moi des entrepreneurs, des rêveurs, des apôtres de l'économie libre, non régulée et non faussée par les réglementations et la bureaucratie qui se sont emparés de notre beau pays. Vous pensiez peut-être que j'allais me laisser abattre lorsqu'on m'a envoyé à Sylva en tant qu'ambassadeur ? Comme pour m'envoyer loin de cet enfer socialiste qu'est devenu Velsna ? Non, bien sûr que non. Je me suis battu et j'ai réinvesti ailleurs, car aucune loi, aucune régulation ne me fera plier. Vous voulez m'obliger à doter mes groupes de comités d'entreprise ? Essayez donc, et le lendemain, tous mes avoirs seront transférés là où le soleil est plus chaud et où le temps est plus beau. Vous voulez taxer cet argent que j'ai mis si longtemps à accumulé, au prix de mes efforts et de mon travail ? Non, vous ne l'aurez pas, et je préfère tout dilapider dans la rénovation d'une stupide ambassade plutôt que de vous le donner. Alors venez me chercher !

Il était inquiétant de voir que la grande majorité des velsniesn présents dans la pièce buvaient ses paroles comme du petit lait:
- DiGrassi nous a plumé, mes amis. A coup de lois de 47 heures par semaine qui rendent nos employés oisifs et leur donne envie de faire la sieste l'après midi. Le gouvernement Visconti a nivelé le monde du travail par le bas depuis les élections, et que l'on me dise pas que je n'avais pas prévenu des dangers socialistes qui couraient sur notre République. Qui parmi vous ont dû renoncer à leurs achats urgents à cause de la taxe des 2% du patrimoine que ce gouvernement a osé faire passer ? Levez la main.

Les sylvois présents dans la pièce, s'il y en a, seront surpris de voir que la plupart des mains se lèvent, et que même certaines voix s'élèvent à l'unisson avec le maître de cérémonie: "J'ai pas pu acquérir mon cinquième yacht pour l'offrir à mon fils pas plus tard que la semaine dernière !", "Je devais participer à une OPA hostile sur le capital de Laurenti Alfonso. Mais à cause du gouvernement Visconti, je vais devoir attendre plusieurs mois avant de la faire !"...Herdonia était en terrain conquis qu'il avait lui-même préparé, et il enchaîna de plus belle:
- Messieurs, medames. Ce soir, je vous offre l'occasion de vous venger en deux manières: en premier lieu, d'investir massivement dans le fond spéculatif que j'ai fait ouvrir à Drovolski, si vous êtes à l'affut d'une valeur stable et qui vous mettre à l'abri de toutes les fluctuations possibles et imaginables du marché. Ce titre je vous le garantit, vous rendra riche.

En second lieu, je suppose que vous voudriez adresser personnellement votre affection au gouvernement actuel de notre Grande République. Et si je vous disais que parmi nous, ce soir, il y avait des interlocuteurs directs de notre gouvernement, autre que votre fidèle serviteur, bien entendu, et à qui vous pourriez exprimer tout l'amour qui leur est dû. Je vais vous proposer un jeu: nous allons essayer de le trouver. J'appelle à la barre son excellence Riccardo Pedretti, le très illustres ambassadeur de la Grande République pour le Kah socialiste !


Le nom de l'ambassadeur fut acceulli par un enflement d'huées venues du cœur des entrepreneurs présents dans la pièce.

- Oui, c'est ça. Faites lui entendre à quel point son gouvernement nous a fait souffrir, nous, les gens qui abattent le dur labeur à la sueur de leur front. Nous, les patrons. Pour toit Riccardo, car je sais que tu es là, pour toi, je te laisse entendre à quel point le monde de la finance velsnien a tourné le dos à vos réformes dignes de la Loduarie communiste ! Tous ces gens sont avec moi, Riccardo, et vous au Sénat, vous êtes seuls. Ce n'est pas vous qui m'avez exilé de Velsna, vous avez chassé Velsna. Et je puis vous jurer que mon retour dans notre cité sera des plus fracassants !

La foule applaudit encore une fois en masse, peut-être assez pour être entendue dans tout le voisinage, et les sbires de Herdonia firent passer parmi eux des cartes d'entreprise de la Fondation Herdonia, invitant les investisseurs à placer des actifs dans le fond spéculatif crée à Drovolski.

- Messieurs, je vous remercie de votre attention. Ce fond spéculatif est notre salut à tous, alors foncez-y, n'hésitez pas, avant que les socialistes ne nous prennent aussi ça. Restez, car nous aurons une grande surprise pour vous dans le jardin plus tard dans la soirée.

Herdonia s'en alla rejoindre quelques-uns de ses suivantes, lesquels lui dirent:
- Boss, je pense pas que le jaguar soit prêt.
- Comment ça pas prêt, c'est censé être notre surprise non ?
- Comment dire...Tonio a dû improviser pour qu'on puisse l'approcher. Du coup après qu'on l'ait enfermé dans votre bureau, on a peut-être un peu trop forcé sur le rhum. On avait que ça sous la main.
- Vous avez donné de l'alcool au jaguar ? Vous vous foutez de moi ! Va falloir me le réveiller si il est dans les vapes. Il doit être prêt pour dans une demi-heure, pas plus. Vous m'avez compris
- Ouais boss...on va faire ce qu'on peut.
- Vous allez pas faire ce que vous pouvez, vous allez le faire, point barre. Pas de discours de perdant chez moi !


Mathilde Boisderose n'a pas tout son temps...
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Était-ce l'intimidante présence du fauve, l'excitation de faire quelque chose d'interdit, une véritable opération spéciale d'agent secret, ou le simple fait qu'elle était à l'improviste totale, mais la présidente Bernadette Vougier fit quelque chose de complètement débile : elle attrapa l'ordinateur et le brisa méticuleusement à la jonction écran – clavier contre la table. Doucement, en utilisant l'arrête comme point de pression, elle le pliait dans le mauvais sens jusqu'à la rupture puis déposa l'écran décapité prêt du jaguar tandis qu'elle dissimula le clavier (où se trouve communément la carte mémoire) et les documents entiers... dans sa robe créole bien large. Pour le moment, elle le tenait activement avec ses mains à travers le tissu. Quant aux documents trop abimés pour être utilisé, elle les posa à côté du fauve et s'en alla rejoindre la Ministre Matilde Boisderose en lui lançant un "Rejoignez-moi aux toilettes".
Matilde ne comprit évidemment pas immédiatement et Bernadette se montra plus pressante "Vite ! J'ai des éléments importants dans ma robe, mais je ne pourrais pas passer la soirée comme ça ! Accompagnez-moi aux toilettes !"
Là, la Ministre fit définitivement de grands yeux ronds, mais s'exécuta. Une fois dans un peu d'intimité des toilettes, c'était la séance bricolage des plus embarrassantes. Que faire avec cette moitié d'ordinateur et des papiers maintenant ? Bernadette se sentait stupide, surtout qu'elle aurait juste pu photographier les papiers avec son téléphone portable. Elle avait bien une petite sacoche, mais elle craignait que ce soit trop peu discret de mettre les papiers dedans, et ne suffisait pas pour le clavier.

"Votre idée de le mettre sous la robe n'était pas une bonne idée, on va l'attacher à vos jambes avec mon écharpe, tenez votre robe."

"Pardon ?!" Bernadette devint ostentatoirement rouge malgré son teint métissée. "Et puis quoi encore ?!"

"Ne faites pas votre mijaurée, nous n'avons pas tellement d'autres solutions !"

"Bah accrochez ça à vos jambes !"

"Ma robe est trop moulante, on le verra alors qu'avec votre machin vieillot, vous pourriez dissimuler une famille entière."

"Oh ! Bon ben, donnez-moi votre foulard et laissez-moi faire alors !"

"Vous êtes sûr ?"

"Évidemment, allez sor..."

On entendit parler, d'autres dames étaient rentrées dans les toilettes et attendirent. Cela ressemblait à de l'italien auquel les deux sylvoises ne comprenaient que des bribes. Bernadette sentait un fou rire monter sous la pression, l'embarras et le burlesque de la scène, il aurait suffi que Matilde sorte mais on aurait vu avec elle la présidente et ça aurait été si étrange. Mais les arrivantes commençaient à chahuter, s'impatientant apparemment à en croire le peu qui était compris. Madame Vougier commençaient à tourner zinzolin à se retenir de respirer pour ne pas éclater de rire. Matilde prit les devants et ouvrit un peu la porte pis et gueula à travers l'entrebâillement :

"Nou pa jin pé chanjé on tampon en pé Tonè ?!"

Les velsniennes sursautèrent et se turent enfin. Là les deux sylvoises attachèrent prestement les preuves aux jambes de Bernadettes avec les foulards à disposition pis sortirent comme des reines devant les velsniennes qui ne semblaient pas avoir compris quoique ce soit.
Bernadette était tendue, tâtant en permanence le clavier à travers sa robe bouffante. Il n'était pas visible, mais elle faisait attention à ne pas trop remuer par crainte qu'il glisse, aussi solidement fut-il attaché. Par contre, elle se rendit vite compte qu'aussi léger était-ce, garder ça en permanence jusqu'à la fin de la soirée allait la peser, et il fallait définitivement qu'elle trouve à la première occasion une opportunité pour s'en débarrasser.

Hélène était quant à elle à la fois satisfaite et contrariée. Elle avait eu l'attention d'Herdonia et disposait d'une opportunité de l'hameçonner mais rien n'était garantie, et pire encore... elle voulait verrouiller toutes les portes puis incendier l'ambassade. Elle n'était pas spécialement de gauche, au contraire, elle suivant pas mal le courant général de la société sylvoise allant dans le sens de la monarchie parlementaire. Mais Herdonia était à un tel extrême dans son discours qu'elle se sentait devenir partisane kah-tanaise, de la même manière qu'écouter un aspirant bachelier et révolutionnaire de salon sur son temps libre l'aurait fait voter pour la plus réactionnaire des candidates sylvoises aux prochaines élections.
Mais soit, il fallait faire avec, et cela ne lui donnait que plus de motivation à coincer ce "libatardé" comme elle l'appelait dans sa tête. Là, elle remarqua la Ministre et la Présidente qui allaient en direction du parking et les rejoignit :

"Vous allez quelque part ? Vous avez visité des choses intéressantes ?"

Bernadette sursauta : "Oh, oui, restez là-bas, vous aussi, madame la ministre ! Je vais juste déposer quelque chose à ma voiture attitrée !"

"Je ne vous accompagne pas ?" Demanda Matilde.

"Nul besoin d'être deux ou trois, au contraire, restez là pour qu'on n'attire pas trop l'attention, allez vite ! Je vous rejoins !"

Allant ensuite au parking, la présidente Bernadette Vougier prétendit aux éventuels voituriers qu'elle devait chercher quelques maquillages dans sa voiture. Une fois trouvée et à l'intérieur à l'abri des regards, elle se débarrassa enfin de son pesant fardeau, le cachant sous les fauteuils pour rejoindre ses compatriotes dans la suite de la réception une fois verrouillée sa voiture.
Elle se sentait enfin plus légère, et surtout moins tendue quand bien même, elle restait inquiète, mais ça devrait à partir de maintenant aller.
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