11/05/2017
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[CLOVANIE - GRISOLIA] Mariage de Sa Seigneurie Impériale Louis Ier et de Sofia di Grisolia

Marie-Hélène regardait d’un œil attendri la silhouette de son fils, dressé sur le quai du port de Legkibourg, attendant que le navire grisolien ne jette l’ancre. Les événements des dernières semaines étaient allés si vite pour elle, mère aimante dont le seul but était de préserver son fils du tourbillon mortel des jeux de pouvoir. Contre tous ses efforts et ses supplications, Louis avait été propulsé malgré son jeune âge au sommet du pouvoir clovanien, si bien qu’elle ne savait pas si elle devait se montrer fière du destin de son enfant ou inquiète des risques comportés dans cette immense charge. Il avait été décidé qu’il n’y aurait pas de régence avant la majorité de Louis, nouvelle déception pour Marie-Hélène Borisévitch qui aurait voulu minimiser l’exposition de son seul fils à la grande menace du pouvoir. Les Ministres Impériaux, Monsieur Bergé en particulier, avaient convaincu la mère de l’Empereur de l’importance du fait qu’il revête dès aujourd’hui la cape du pouvoir absolu. Ce choix importait à la Clovanie toute entière, à laquelle il fallait trouver un remède puissant pour la guérir de la guerre civile. Ce remède consistait en l’incarnation du pouvoir impérial par un seul homme, quitte à ce qu’il soit jeune, garantie que la souveraineté clovanienne ne s’éparpillerait pas entre les mains d’un groupe d’élites.

Ainsi, Marie-Hélène voyait son fils s’éloigner d’elle peu à peu, complètement absorbé par les réunions avec les Ministres Impériaux. Il signait déjà son premier décret il y a quelques jours, il allait aujourd’hui se marier. À seulement quatorze ans, Louis offrait déjà son corps, son âme et son cœur, disparaissant progressivement au profit du large spectre de la figure de l’Empereur, spectre qui s’empare de père en fils d’un homme désigné par l’impénétrable destin.

L’Empereur Louis se tenait donc en premier plan sur le quai, vêtu de l’uniforme traditionnel qu’on avait reproduit selon ses dimensions. Derrière lui, le Premier Ministre Impérial, Monsieur Bergé, attendait patiemment, en compagnie de plusieurs autres des Ministres clovaniens. Il y avait là aussi quelques hommes forts dont Monsieur Bergé s’était entouré pour garantir à l’exercice de sa charge des appuis solides dans le régime. Dans les rangs de ces alliés du pouvoir, on pouvait compter l’aide de camp Georges du Porche, qui avait grandement participé à la mise en place du procès de Marine, les maréchaux Plotin et Muradotte, ou encore les généraux Valencourt et Mastrignac. Surtout, le Grand Maréchal de Clovanie Paul Joffrin discutait à voix basse avec le Premier Ministre. En tant que second chef des armées derrière l’Empereur, il incarnait le troisième homme du régime et sa participation avait été très importante dans les décisions ayant suivi la mort de Pétroléon V, surtout dans celle concernant la régence. Tous les Ministres Impériaux s’étaient rangés du côté du Premier Ministre Impérial et du Grand Maréchal, et avaient appuyé leur décision de ne pas instaurer de régence. À vrai dire, il n’était un secret pour personne que ce choix était avant tout symbolique, et que chacun des Ministres avait une occasion inespérée de prouver sa valeur dans les prochaines années.

À mesure que le navire grisolien approchait, les regards se faisaient plus fréquents entre les personnalités présentes sur le quai. Les uns ajustaient leurs cols, les autres défroissaient encore leurs manches, seul l’Empereur Louis Ier gardait les yeux fixés sur le navire approchant, tentant d’apercevoir malgré la distance la silhouette de sa fiancée sur le pont du bateau.

Le navire en provenance de la Principauté accosta donc au port de Legkibourg, et la Famille Princière put poser le pied sur le sol d’une Clovanie nouvelle, transformée par les derniers événements. Seule Sofia avait pu découvrir le pays auparavant, le reste de l’illustre troupe n’avait jamais eu l’occasion de connaître cette douce nation. Une escorte cérémonielle entourait les membres de la famille du Prince, lequel s’avançait vers l’Empereur aux côtés de sa fille. Il savait qu’il repartirait sans elle du pays clovanien, et appréhendait déjà cet instant.

Louis Ier : Cher Prince, vous êtes le bienvenu, vous et toute votre Famille, en Clovanie.

Il porta son regard vers sa fiancée en souriant.

Louis Ier : Sofia, je suis très heureux de vous revoir, et je ne suis pas le seul.

L’ensemble des Ministres Impériaux et des officiers présents sur le quai adressèrent les salutations d’usage à tous leurs invités. Le Prince avait aussi amené avec lui quelques uns des Conseillers des Bulles de Grisolia, augurant de riches discussions dans tous les domaines concernés. La délégation embarqua dans un grand convoi d'automobiles officielles richement escortées par l'Armée Impériale, et se dirigea vers le Palais de la Gloire.

Après une longue visite de toutes les pièces du Palais, les femmes des deux familles entamèrent les discussions de préparation de la cérémonie de mariage.
Après que Louis Premier et Sofia di Grisolia aient exprimés leurs souhaits concernant la cérémonie de leur union, Marie-Hélène Borisévitch, la Princesse Héléna et la Princesse Chiara s’attelèrent au travail des détails.

Princesse Héléna : Par quoi commençons-nous ?

Marie-Hélène Borisévitch : Les menus ? Que vous ont proposé vos cuisiniers ?

Princesse Chiara : J’en ai plusieurs ici. En entrée, le premier menu propose une salade d’avocats à l’orange, suivi d’une aile de raie pochée à la graine de moutarde pour finir avec des soufflés gourmants à l’orange. Le deuxième menu commencerait avec des brochettes de saint-jacques lardées au beurre d’oranges avec une fondue au poireau, se poursuiverait avec un filet de saint-pierre rôti au beurre de noisette, une mousse d’oursin et un risotto pleurote, pour terminer avec une pièce montée composée de gâteaux aux parfums diverses. Concernant le troisième menu…

Marie-Hélène Borisévitch : Veuillez m’excuser de vous interompre, je trouve ce dernier menu parfait et n’épprouve pas le besoin d’entendre d’autres porpositions, qu’en pensez-vous ?

La Princesse Héléna et la Princesse Chiara exprimèrent le même avis et on commanda aux cuisiniers de leur préparer un échantitllon du menu pour qu’elles puissent y gouter. Bien entendu, les produits qui serviront à la concenption du repas sont entièrement d’origine Clovanienne et Grisolienne.

Princesse Héléna : Bien ! Concentrons-nous à présent sur les fleurs, je pensais installer d’immenses bouquets de lys dans toutes les grandes salles du palais, pour les plus petites, je pensais à des fleurs moins volumineuses.

Marie-Hélène Borisévitch : Comme des bouquets de roses et d’œillets ?

Princesse Héléna : Oui c’est le nom que je cherchais.

Princesse Chiara : Que diriez-vous de mettre un peu de couleur ?

Princesse Héléna : En restant sur du blanc on est sûr de ne pas faire d’erreur…

Marie-Hélène Borisévitch : À quoi pensez-vous ?

Princesse Chiara : Les oeillets des plus petits bouquets pourraient être rouges, je pense que ça apporterait du dynamisme aux bouquets. Étant donné qu’ils sont plus petits, ils seront moins visibles, de la couleur permettrait de les rendre plus majestueux.

Princesse Héléna : Alors peut-être pourrions ajouter des oeillets roses, ainsi ils ne seraient pas bicolores.

Marie-Hélène Borisévitch : Oui très bonne idée ! Monsieur Peristopaletov, veuillez nous préparer cela, afin que nous puissions mieux nous rendre compte du résultats.

Monsieur Peristopaletov : Bien sûr, Votre Seigneurie.

Bouquets de fleurs du mariage

Princesse Chiara : Passons maintenant au dressage de la table, Marie-Hélène, à quoi avez-vous pensé ?

Marie-Hélène Borisévitch : Je pensais disposer trois grandes tables le long de la pièce comme ceci, cela occupera bien la pièce. Et pour le couple des mariés ainsi que la famille proche et les témoins, nous pourrions décider de disposer une grande table ronde à l’extrémité de la pièce. Concernant le dressage de la table, je pensais rester plutôt simple en choisissant des napes et serviettes blanches et placer toute la fantaisie dans le magnifique service de feu l’Empereur Pétroléon.

Princesse Héléna : À quoi ressembe ce service s’il-vous-plait ?

Marie-Hélène Borisévitch : Voici une assiette. Elles sont d’un style assez épuré, vous voyez, des motifs bleus sur un fond blanc. Ces assiettes ont été peintees à la main par nos meilleurs artisans.

Princesse Chiara : Elles sont magnifiques…

Marie-Hélène Borisévitch : Concernant les bouquets à disposer sur la table, je pense que ceux dont nous avons parlé plus tôt se mariront très bien avec le dressage de la table.

Princesse Chiara : Je suis du même avis.

Menu et salle dans laquelle aura lieu le grand dîner de noces.

Princesse Hélène : Allons maintenant retrouver Sofia pour l’essayage de la robe de mariée !

Princesse Chiara : Oh oui j’ai tellement hâte, Marie-Hélène, venez avec nous !

Les trois femmes irent trouver Sofia et l’emmenèrent dans la salle d’essayage. La plus grande couturière de Grisolia s’étaient mise au travail il y a plusieurs semaine pour confectionner la robe de ses rêves. En effet, dès qu’elle fut fiancée, la Famille Princière passa commande auprès de Madame Paluzzi, la seule qui était alors au courant pour les fiançailles de Sofia di Grisolia. La robe de Sofia était si majestueuse et demandait tant de travail que c’était un exploit de l’avoir réalisée en si peu de temps, et toute seule qui plus est ! Dix milles sequins ont été utilisé pour le corset et cinq cent pour ses cahussures. Une traine de huits mètres cousue à la robe au niveau des jupons suivra Sofia partout ou elle ira. Comme bouquet de mariée, Sofia aura un bouquet de lys long de un mètre.

Sofia di Grisolia essayant sa robe de mariée
Après que la cérémonie matrimoniale ait été réglée jusque dans ses moindres détails, les deux souverains se donnèrent rendez-vous, avec tous leurs ministres, dans la grande salle de conférence du Palais. Une grande tâche reposait alors sur le dos du jeune Louis, alors que toute la Famille Princière était réunie à Legkibourg. C’était l’occasion rêvée de mettre au point ce qui ressemblait alors à la plus grande alliance jamais conclue par la Clovanie. L’amitié qui liait si fort les deux nations était sur le point de se concrétiser. Certes, Monsieur Razoumikhine n’y était pas pour rien, et le Grand Maréchal Joffrin avait aussi fortement appuyé cette grande entreprise, mais Louis Ier avait montré une grande maturité pendant les discussions préliminaires à la rencontre. De fait, il était maintenant le représentant de la Nation incarnée, c’était avec lui, directement, que le Prince Ludovico converserait à propos du destin de leurs deux peuples. Louis avait adopté ce rôle à la perfection. Son amitié quasiment filiale avec le Prince lui était d’une grande aide pour mener cette grande réunion.

On avait fixé au troisième jour du voyage des Grisoliens la réunion diplomatique, laquelle semblait presque aussi importante que le mariage impérial tant on avait réuni d’hommes d’État pour y participer. La salle de conférence du Palais de la Gloire était pleine à craquer, au centre y trônaient les deux souverains, dont on eût pu dire qu’ils avaient le même âge tant les yeux de Louis reflétaient la sagesse de son rang. Le jeune empereur, bien rôdé, savait exactement à quel moment il devait prendre la parole, quand souligner les propos de ses Ministres, et quand feindre de leur accorder la parole. Ludovico observait ce jeu de dupes s’établir devant lui avec bienveillance. Il savait que Louis Ier ne se trouvait pas au fondement de l’alliance qui s’établissait, mais il pouvait clairement constater qu’il la soutenait de tous ses vœux, et que son amour pour Grisolia relevait de quelque chose de physique, comme en témoignait la lueur qui brillait dans ses yeux à chaque mention de Sofia et du pays du Prince. Sans aucun doute, Louis faisait corps avec cette poussée clovanienne vers Grisolia et son Prince. S’il n’était pas au gouvernail des discussions, il était la voile qui guidait le navire national vers son nouvel allié, propulsé par les vents de l’histoire. Il s’exprimait par des phrases claires, sans jamais outrepasser les convenances malgré son amitié avec le Prince Ludovico, affirmant posément les grandes ambitions de son règne naissant.

Les questions économiques furent abordées avec entrain. Les ministres compétents échangèrent longuement sur les différents produits pouvant faire l’objet de mesures de libre-échange, et tout le monde se félicitait à mesure que la liste s’allongeait. On s’attela ensuite au sujet plus ardu du traitement des déchets nucléaires, sujet sur lequel on ne s’attarda pas de trop : chacun attendait en trépignant le point suivant. Cet aspect de l’alliance qui intéressait tous les Ministres plus que tous les autres, il s’agissait de l’aspect militaire. Les regards se firent alors plus durs, plus intéressés entre les nouveaux alliés. Les deux nations s’apprêtaient à conclure, chacun le savait, une alliance qui les engagerait à beaucoup, un pacte qui les lierait indéfectiblement pendant des années - c’était ici que la simultanéité de cette réunion avec le mariage de l’Empereur prenait tout son sens, comme une métaphore festive et miniature de l’immense engagement des deux peuples. Le Grand Maréchal, derrière ses petites lunettes rondes, examinait avec précision les remarques du Prince de Grisolia, les reformulait systématiquement à sa manière afin d’être sûr de bien les comprendre. Le pacte de non-agression allait de soi, mais la décision d’établir des bases navales clovaniennes en terre grisolienne était plus intéressante. On prêta surtout une grande attention à la question de la fourniture de navires militaires clovaniens à la Principauté, ainsi qu’à la formation de soldats grisoliens par leurs homologues clovaniens.

On finalisa les discussions par l’établissement d’un traité, long comme le bras, qui fut échangé entre les mains des deux souverains. Après avoir été lu par les principaux Ministres Impériaux et par le Grand Maréchal de Clovanie, Louis apposa sa signature au bas de la feuille. Ludovico, affichant un visage d’un grand sérieux, fit de même, scellant l’alliance éternelle des nations grisolienne et clovanienne.

Le traité ainsi signé scellait pour des décennies l'amitié de deux nations sœurs.
Le jour du mariage était enfin arrivé. Après avoir embrassé Louis une dernière fois avant la cérémonie, Sofia se dirigea vers les appartements du Palais de la Gloire que la famille Impériale avait mis à disposition d’elle et de sa famille. Elle devait retrouver la Famille Princière pour les derniers préparatifs la concernant. Coiffeurs, maquilleurs, couturiers, cordonniers, bijoutier… tout le gratin grisolien de la mise en beauté était également présent.

Lorsqu’elle pénétra dans la salle où l’attendait sa robe de mariée, tous les visages se tournèrent vers elle et les bouches se turent. On aurait cru prendre en flagrant délit une famille préparant une fête d’anniversaire surprise. Sofia fondit en larmes et se jeta dans les bras de ses parents. Les domestiques s’écartèrent puis quittèrent la pièce silencieusement tandis que Héléna, Alfonso et Aurora se rapprochèrent doucement de l’étreinte familliale. Un fois ses pleurs calmés, le Prince Ludovico XIV lui demanda, inquiet, s’il devait demander l’annulation de la cérémonie.

Sofia di Grisolia : Non, père, ne faîtes surtout pas ça ! Je vous en prie.

Héléna di Grisolia : Mais alors mon enfant, que se passe-t-il ?

Sofia di Grisolia : J’ai peur … J’aime Louis de tout mon coeur et je n’arrive même pas encore à croire que nous allons nous marier ! Ma robe, mes bijoux, mes chaussures, cet endroit, tout est si beau. Je ne pensais pas que j’aurais un jour le privilège de connaitre tout cela, je n’y crois pas.

Chiara di Grisolia : Ma chérie…

Sofia du Grisolia : Je ne serai jamais à la hauteur. Après ce qu’a fait l’Impératrice Marine… je ne pourrais jamais être aimée des Clovaniens, je ne pourrai jamais rattraper ses fautes si tant est que je n’en commette pas !

Chiara di Grisolia : Ma Sofia, tu n’as pas à porter sur tes épaules la trahison de cette femme. Les Clovaniens savent bien que vous n’êtes pas la même personne, ils n’attendront pas de toi que tu compenses par tes actes le mal qu’elle a infligé à la Clovanie. Ce n’est pas ton rôle.

Ludovico XIV : Ta mère a raison ma chérie, tu vas aujourd’hui épouser Louis Premier et devenir Impératrice de Clovanie, cette journée marque le début d’une nouvelle ère. Et puis ne te fais pas tant de soucis, les Clovaniens en attendront bien plus de Louis que de toi !

Sofia di Grisolia : Merci père, merci mère. Vous avez toujours les mots pour me réconforter.

Tous s’étreignirent. Un instant plus tard, les domestiques pénétrèrent de nouveau dans la salle et l’agitation reprit. Il fallait habiller, coiffer et maquiller Sofia et les membres de la Famille princière. Une fois les dernière retouches apportées à sa robe, le dernier baisé déposé sur les joues des membres de sa famille, elle alla se rendre à son carrosse.
Clovaniens et Grisoliens attendaient impatiemment l’arrivée de Louis Premier d’abord, puis de Sofia di Grisolia. Ils formaient ainsi une immense et même foule qui entourait la Sainte Créopole et qui s’étendait jusque dans les rues voisines à la grande place où s’élevait la cathédrale. Lorsque le bruit de sabots des chevaux du carrosse de Louis Ier commença à se faire entendre, un mouvement d’agitation parcourut la foule et devança le carrosse jusqu’à atteindre la Sainte Créopole. Quatre chevaux blancs tiraient le carrosse rouge et or dans lequel se trouvait le tout jeune Empereur, pourtant sur le point de se marier. La foule l’acclamait, la joie et l’excitation se lisaient sur tous les visages que Louis Ier apercevait depuis sa fenêtre et auxquels il répondait par des saluts. Une fois arrivé devant la cathédrale, la porte du carrosse s’ouvrit et Louis Ier descendit le marche-pied de celui-ci avant de passer sous la grande arche de la Sainte Créopole pour se diriger vers l’autel.

Les sièges de la Sainte Créopole étaient tous occupés, soit par les membres de la Famille Impériale et de la Famille Princière, soit par les grands personnages clovaniens et grisoliens, ou encore par les dirigeants alliés aux nations des deux futurs mariés. Seuls restaient des places pour Sofia di Grisolia et son père, le Prince Ludovico XIV, qui sera celui qui l’escorterait de son carrosse à l’autel.

Un dizaine de minutes plus tard, de nouveaux bruits de sabots frappant les pavés retentirent. Un deuxième carrosse Impérial fit son apparition entre les deux pans de la foule qui bordait le chemin dégagé jusqu’à la cathédrale. Le carrosse d’un bleu sombre aux gravures d’or était tiré par six chevaux d’un noir profond dont la robe renvoyait les reflets d’un soleil naissant à l’horison. Le Prince Ludovico XIV tenait dans sa main celle de sa fille, qui saluait la foule avec un sourire timide, comme si elle avait peur d’en faire trop. Une fois le carrosse stationné, le Prince Ludovico XIV descendit en premier et présenta sa main à Sofia di Grisolia pour l’aider à descendre, ce qui n’était pas une mince affaire étant donné la longueur de sa traîne. En quelques secondes, les enfants de cœur, six Grisoliens et six Clovaniens, avaient positionné l’immense traîne de manière à exposer sa beauté aux yeux de tous.

Le Papriarche Zosime XII, le visage marqué de fatigue par les récents événements qui n’avaient pas ménagé son grand âge, se dirigea vers le centre de l’autel. À la surprise générale, il ne disposait pas de notes pour le discours qu’il allait prononcer. Il s’apprêtais pourtant à accomplir un des actes les plus important dans la vie de la Nation : le mariage de l’Empereur, et le couronnement de l’Impératrice.
“Vous me croirez certainement si je vous confesse qu’il y a quelques semaines, mon esprit augurait de sombres heures pour la Clovanie. Nous avons traversé des épreuves tragiques, qui ont mis notre espoir à rude épreuve, attendrissant notre volonté et affaiblissant notre fermeté d’âme. Mais, mes chers fils et filles, qui croirait, à voir vos sourires de maintenant, que nous venons de surmonter l’une des plus graves crises de notre histoire ? Après la tempête, et du seul fait de notre implacable volonté collective, il semble que la providence guide désormais notre nation vers des temps heureux.
Oui, nos larmes ont abondamment abreuvé la terre clovanienne, et Dieu seul sait à quel point ce sol est fertile ! De nos pleurs amers ont germé, d’une jeunesse fougueuse, les prémices d’un avenir flamboyant. Notre nouvel Empereur rayonne sur le monde, la majesté de son prédécesseur se retrouve déjà dans la grande noblesse de son regard. Nous célébrions il y a peu son couronnement dans la joie et dans la paix, affranchis de nos peurs et prêts à balayer la crise des hérétiques d’un revers de main. Nous entamons aujourd’hui la cérémonie de son mariage.
Oui, un vent nouveau souffle sur la grande Patrie de nos ancêtres, un vent chaleureux et joueur auquel nos grands alliés de Grisolia ne semblent pas être étrangers. Oui, dans le même temps que nous célébrons le retour à la paix et l’avènement de notre nouveau souverain, nous acclamons l’accomplissement de la grande alliance avec nos frères grisoliens. Alliance de deux nations, mais aussi alliance de deux sangs, de deux nobles dynasties. Deux fleuves éternels joignent devant vos yeux leurs eaux pures, prêts à se jeter humblement dans le grand océan de l’Histoire.
Sofia di Grisolia, la Nation place sur vos jeunes épaules sa confiance toute entière. Ne vous effrayez point des déboires de votre prédécesseure, ne voyez pas ses actes comme une malédiction. Considérez plutôt la grandeur du titre qui va vous être décerné. La couronne d’Impératrice est lourde, en elle reposent les grandes valeurs de dignité, de vertu et de pureté d’âme que votre peuple et votre époux attendent de vous, mais elle sera aisément portée par une femme telle que vous, dont la conscience et les volontés n’ont d’autre horizon que la grande majesté de la Clovanie.
En vous couronnant Impératrice de Clovanie, nous refermons une plaie douloureuse qui a meurtri la communauté ortholique. Il vous incombe, jeune Sofia, la formidable tâche de vous imposer comme mère de la Nation, modèle de chaque femme qui verrait le jour sous votre règne. Cette tâche est celle d’une vie, et nous espérons que votre destin sera aussi fécond que vos entrailles. Nous espérons que votre destin commun avec notre Empereur Louis sera guidé par la bienveillante main du Seigneur. Une fois le temps béni de votre sexe arrivé, nous prions pour que vous fassiez fleurir comme vous le devez les branches du grand arbre dynastique, que vous soigniez ses pousses jusqu’à ce qu’elle prennent un jour votre place.
Sofia di Grisolia, Votre Seigneurie Impériale Louis Ier, veuillez approcher à présent, que je vous accorde ma bénédiction et que votre union soit inscrite au plus haut des cieux.”

Le chef spirituel sanctifia selon l’usage les deux époux, avant de déposer solennellement la couronne d’impératrice, restée orpheline depuis quelques semaines, sur les cheveux magnifiquement coiffés de la nouvelle souveraine clovanienne. Une grande clameur se fit entendre lorsque les mariés s’embrassèrent. Les festivités se déroulèrent alors dans la joie la plus complète, il semblait que les invités profitaient de ce moment de relâchement pour déverser toutes les émotions accumulées lors de cet immense événement.

Pinacle de cette splendide semaine, Louis Ier profita de ce moment de grâce pour prendre encore une fois la parole. Il déclama, dans une fougue qui trahissait son jeune âge, un fervent discours portant sur l’amitié qui liait maintenant Clovaniens et Grisoliens, énumérant les liens historiques qui s’étaient tissés ces derniers jours entre les deux peuples et qu’il est inutile de rappeler ici, puisque nous venons d’en dresser la narration. En conclusion de cela et à la surprise de ses invités, il décora lui-même l’homme qui était maintenant son beau père de la médaille de l’Honneur Étranger, distinction rarissime accordée uniquement aux étrangers les plus admirables aux yeux de l’Empereur. Depuis son instauration en 2010, cette distinction n’avait connu que trois titulaires, Sa Majesté Ludovico XIV en était le quatrième.
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