11/05/2017
16:08:42
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[Wanmiri / Jashuria] Séance plénière du Daryl autour des concessions d'hydrocarbures

« Srijan, est-ce que mon sari est bien ajusté ? Mes cheveux, c’est bon ? »

Le ton inquiet de la Quatrième Ambassadrice trahissait l’ampleur de sa tâche. A ses côtés, son premier lieutenant et aide de camp s’affairait à la rassurer et réajusta un peu son chignon perlé. Enveloppé dans un impeccable professionnalisme, Srijan Marzani était au service de Parvati Mathai depuis maintenant 3 ans et jusqu’à présent, ses conseils avisés avaient largement permis d’épauler la jeune ambassadrice dans ses fonctions. D’aucuns estimaient que derrière son sourire affable et ses manières discrètes et polies, il était une véritable éminence grise qui avait le bras si long qu’il pouvait remonter jusqu’au Cercle Intérieur.

« Ne vous inquiétez pas, ambassadrice. Vous êtes parfaite. Encore une fois, le Daryl ne reçoit qu’en cas d’extrême nécessité les intervenants extérieurs. S’ils ont accepté de vous rencontrer aujourd’hui, c’est que vos mots ont plus de poids que la couleur de votre sari. »

Il ne faisait que répéter ce que tout le monde dans l’antichambre savait, mais ses mots étaient parfaitement pesés et avaient le don de rassurer son entourage. A l’autre bout de l’antichambre, monsieur Sidhi Chalerm, directeur de la Porte Dorée, pianotait nerveusement sur l’accoudoir de sa chaise. L’homme, d’ordinaire impassible et serein, semblait préoccupé à l’idée de ferrailler avec le Daryl. A ses côtés, en train de parfaire son maquillage, la représentante de ATMA Energies : Parvati Serin. A l’âge de 42 ans, cette professionnelle des hydrocarbures avait acquis une réputation de femme d’affaire redoutable. Désignée par le consortium pour représenter les intérêts d’ATMA Energies, la dame était réputée pour faire partie de la Table de Bouddha, l’une des organisations privées les plus influentes de la région. Elle n’avait même pas besoin le verbaliser, le simple fait qu’elle puisse en faire partie était déjà un atout non négligeable dans sa manche.

Les trois représentants envoyés par la Troisième République du Jashuria étaient là pour une excellente raison : négocier avec le Daryl les droits d’exploitation des hydrocarbures découverts par les expéditions jashuriennes dans l’archipel des Isteal. Cette découverte, à quelques encablures des zones jashuriennes, avait attiré bien des convoitises, notamment celle du Jashuria, qui entendait bien positionner ses pions. Il y avait un intérêt stratégique à s’assurer de livraisons d’hydrocarbures dans les prochaines années, si possible au plus près de la nation jashurienne et de ses partenaires des Accords de Sokcho.

La concurrence était cependant rude. Malgré les fonds jashuriens émis lors de l’annonce du projet Renaisans, de nombreux pays s’étaient jetés comme des vautours sur les appels d’offres wanmiriens, leur permettant d’acquérir une influence certaine et une popularité qui talonnait celle des Jashuriens dans certaines localités. La République des Deux Océans ne pouvait pas se permettre de laisser des pays tiers acquérir autant d’influence dans la région, sous peine de voir ses efforts réduits à néant. Les Eurysiens n’arrivaient déjà pas à gérer les problèmes chez eux, il n'était nul besoin de les importer chez les Nazuméens. C’était dans cette optique que la Quatrième Ambassadrice entendait bien faire comprendre aux Wanmiriens l’intérêt de traiter directement avec le Jashuria et non avec le Rasken ou ses petits copains outre-mer. Elle avait emmené dans ses bagages la grosse artillerie, en la personne de la représentante de ATMA Energies et du directeur de la Porte Dorée. Avec de telles personnalités – connues du Daryl -, nul doute qu’elle parviendrait à infléchir les Wanmiriens vers son projet.

Dame Mathai entendait non seulement s’assurer des droits à la construction et à l’exploitation des hydrocarbures au nom de l’Etat wanmirien, mais aussi de racheter à l’Etat wanmirien les droits sur les concessions d’APEX Energy. La compagnie raskenoise avait trop tendance à prendre ses aises quand il s’agissait des opérations nazuméennes et il fallait s’assurer qu’elle ne mette pas le pied au Nazum plus que de raison. ATMA Energies et la Porte Dorée allaient veiller à ce que ça ne soit pas le cas. Le Daryl et les représentants jashuriens entretenaient une amitié de longue date, mais celle-ci avait besoin d’être entretenue avec des partenariats de ce type. Nombre de concitoyens jashuriens possédaient de la famille au Wanmiri et vice-versa, tant et si bien que la frontière administrative qui séparait les deux pays était perçue par beaucoup comme une simple construction mentale. Parvati elle-même devait jouer sur cette fibre des peuples-frères si elle voulait atteindre le cœur du Daryl … mais aussi parler gros sous. Le Jashuria s’était fait une fierté de créer des partenariats gagnant-gagnant avec ses contractants. Il était normal que le Wanmiri, un des plus vieux alliés du Jashuria, participe lui-aussi à la création de cet espace de prospérité commune que le pays appelait sans cesse de ses vœux.

La porte s’ouvrit en grand. Deux gardes du Daryl, en habits officiels, leur annoncèrent que l’assemblée était prête à les recevoir. Acquiesçant vivement, l’ambassadrice se pressa avec ses trois comparses dans la chambre d’audition. L’ambiance, silencieux, contrastait avec le nombre de représentants. S’installant à la tribune des intervenants extérieurs, la jeune femme tapota quelques instants sur le micro pour en vérifier le son avant de s’éclaircir la voix. Devant elle, plusieurs centaines d’élus de la République du Wanmiri se tenaient assis, leurs yeux dévorant les quatre Jashuriens.

« Estimés représentants élus de la République Démocratique du Wanmiri, moi, dame Parvati Mathaï, en ma qualité de Quatrième Ambassadrice de la Troisième République du Jashuria, vous remercie au nom des Quatre Cercles et des citoyens du Jashuria pour avoir accepté de nous recevoir aujourd’hui lors de votre séance plénière. Se tiennent à mes côtés madame Parvati Serin, représentante de ATMA Energies, consortium énergétique jashurien ; ainsi que monsieur Sidhi Chalerm, directeur de la Porte Dorée ; et pour finir monsieur Srijan Marzani, attaché aux affaires diplomatiques relatives aux Accords de Sokcho. Nous sommes honorés d’être parmi vous pour discuter de ce sujet des plus stratégiques qu’est l’établissement des droits à la construction pour l’exploitation des hydrocarbures de la région des Isteal ainsi que du rachat des concessions découvertes par APEX Energy. Notre enjeu du jour est de parvenir à un accord autour de ces deux questions afin que nous puissions dessiner des perspectives encourageantes pour le développement de nos relations et de la région dans son ensemble. »
Au Daryl, à seulement une dizaine de minutes de l'ouverture de la rencontre, c'était l'effervescence. Chacun courait de partout, interpellait tel ou tel député, espérant lui faire passer une note ou lui communiquer une information de dernière minute avant le début de la séance. La salle était une fourmilière. A l'avant, des sièges vides attendaient les membres de l'Enea ; au centre, pas une chaise qui n'accueille - pour le moment - le bon propriétaire ; les escaliers étaient grouillant de monde, chacun se faufilant comme il le pouvait, tantôt pour rejoindre sa place, tantôt pour rattraper quelqu'un ; le fond de la pièce avait été transformé pour quelques instants en un immense salon de coiffure. L'ensemble reflétait à la fois un aspect sérieux et affairé, tout en ne pouvant se départir d'un côté comique, voire risible. C'était la première fois depuis la fin de la guerre que Wanmiriens et Jashuriens se rencontraient, et cela avait un certain impact au Daryl.

"Raja ! Les résultats de la dernière expédition !", s'exclamait-on par ici. "Asha ! Asha ! On a revu le dernier article hier, voilà la nouvelle version..." pour l'Alliance Tradition et Progrès ; "Où est passée Eddonna ? Vous l'avez vue ? - Non. - Elle ne viendrait pas ? - Si, elle a confirmé qu'elle serait là..." chez les socialistes, "Et Ethrasyl ? Où est-il passé ? Il ne devait pas faire un discours pour introduire la séance ?" s'enquérissait-on un peu plus au centre, "Non, il paraît qu'il sera là en tant que chef de parti aujourd'hui. - Ah ! Pas de Chef d'Etat, donc ? - Oh, il changera sans doute de casquette au moment opportun, tu le connais...".

Soudain, des coups frappés sur le pupitre central ramenèrent le calme. Sumit Dalavi, le Chef de l'Enea pour six ans, venait de réclamer le silence.

"Mesdames, messieurs, bonjour. Je vous prierai de vous taire, cela serait des plus agréable. Nous recevrons, comme vous le savez, ses Excellences représentantes du Jashuria dans quelques instants, dans le but de négocier la question des droits d'exploitations des gisements d'hydrocarbures qui ont été découverts au large des Isteal, dans le cadre de l'Operasi Renaisans. Aussi, il serait de bon ton de faire bonne impression et bonne image. Aussi, vous serez aimables de rejoindre vos sièges, et de n'émettre aucun son durant, a minima, le prochain quart d'heure."

Si le rôle de cet homme, issu de l'Union Révolutionnaire de Libération (URL), parti centriste connu pour ses positions pro-Jashuria, était en temps normal assez limité, et même presque représentatif, il avait aujourd'hui la charge de présider la séance ; le président habituel - Keshav Chadda - ayant annoncé qu'il rejoindrait aujourd'hui les rangs des députés.


Discussion préalable entre les Tymeri, sans grande importance"Ethrasyl...
- Oui Eddonna ?
- Ma tenue est conforme ?
- Nous avons déjà eu cette discussion, sœurette...
- Je te repose la question : suis-je parfaitement présentable ? Sari ? Coiffure ? Maquillage ?
- Eh, détends-toi. Tu ne vas pas me refaire le coup de la crise d'angoisse d'il y a quatre ans quand on est allé au NS, non ? Stranéens ou Jashuriens, ça ne change rien. Et je t'ai vu affronter bien pire que ça...
- Oui, oui, je sais, les négociations avec les Pharois, la prise de ce fort à côté d'Aaethalio... Tu me ressors sans cesse les mêmes exemples.
- Tu contesterais leur pertinence ?
- Non, mais...
- Non mais quoi ? Écoute, sœurette, tu as toujours eu un don pour ça, les négociations, alors je ne comprends pas pourquoi tu te stresses autant à chaque fois. Respire un coup, replace ce-ci...,
dit-il en lui replaçant un pan du sari en même temps, et voilà, tu es prête.
- Tu vois qu'il était mal arrangé...
Il ne lui répondit pas, et se contenta de lui tirer la langue.
- Tu éviteras ça devant les Jashuriens, lui rétorqua-t-elle, l'air amusée, je doute que ça les fasse rire.
- Ah, au diable les convenances !
S'exclama-t-il tout en arborant ce sourire qui signifie que, si, il s'en préoccupait, et qu'il ne se permettait ce genre de choses que parce qu'il savait qu'il n'était qu'avec elle. Il y eut un léger flottement dans la pièce, avant qu'Eddonna ne reprenne la parole :
- Je suppose que l'URL va approuver toutes les mesures du jour ?
- Peut-être. Peut-être pas. Je ne leur dicte pas leur conduite.
Elle le regarda dans les yeux, l'air de dire qu'elle n'en croyait pas un traître mot.
- Ne te moque pas de moi. Tu sais qu'ils voteront comme toi. Il y eut un silence. Alors ?
- Tout dépendra de la nature du traité, mais oui, nous y sommes favorables. Apex Energy est un partenaire fiable, mais il attire les foudres du peuple. Et il vient de l'Empire raskenois, qui n'est ni stable, ni apprécié.
Il marqua une pause. Les Jashuriens ont, pour leur part, l'avantage d'être plus proches de nous, tant géographiquement que culturellement, et d'incarner une nation stable et prospère dans la région. Que demande le peuple ?
- Bon... Il y a moyen que nous trouvions un accord sur ce point alors.
- Nous avons déjà un accord...
- Oui, oui... mais tu sais comment c'est : tu fais un beau discours et ils te suivent tous, moi il me faut les convaincre par petits groupes. Je ne maîtrise pas aussi bien que toi mon parti.
S'étant rapproché de la porte, il se tourna vers elle, une main sur la poignée. Il lui sourit, l'air confiant.
- Je n'ai aucun doute quant à tes capacités à les convaincre. Allez, viens, c'est l'heure, ils nous attendent déjà tous."

Alors ils franchirent la petite porte située à la gauche de la tribune (vu depuis les gradins), et rejoignirent leurs places à l'avant du Daryl.


Une fois que tous furent installés, et le silence établi, les portes s'ouvrirent, pile à l'heure. Des gardes en tenue officielle guidèrent les trois membres de la délégation jashurienne jusqu'à l'estrade, où Sumit Dalavi leur adressa le salut traditionnel et leur signifia qu'il dirigerait le séance en tant que président provisoire du Daryl. On joua quelques notes de musique - le début de l'hymne wanmirienne - sur lesquelles une majorité de députés se mirent à chanter, avant de retrouver le calme. Parvathi Mathaï prit alors la parole dans un silence de mort, scrutée par plus de cinq-cents paires d'yeux, la très grande partie des député ayant choisit d'assister à la séance.

Tous écoutèrent attentivement ses propos, qui étaient somme toute très banals et ne faisaient que remplacer le discours qu'on aurait pu attendre de la part de Sumit Dalavi ou d'Ethrasyl Tymeri, mais que ceux-ci avaient choisis de décliner, le premier par manque d'expérience, et le second... sans doute par manque d'envie, puisqu'il en était arrivé au point de rappeler la Constitution pour échapper à ceci, en arguant que ce n'était pas dans ses prérogatives, puisqu'il arborait aujourd'hui la casquette de chef de parti. Certains s'étaient d'ailleurs noté de faire modifier quelques points de loi pour empêcher le cumul des mandats, mais cela n'a pas de rapport avec le potiron du jour. Le président provisoire du Daryl remercia les délégués Jashuriens, puis invita à s'exprimer en premier les membres de l'URL, qui était le parti dominant de l'assemblée. Ethrasyl se leva donc, assumant cette fois-ci de s'exprimer. :

"Vos Excellences, moi, Ethrasyl Tymeri, en tant que Chef d'Etat de la République Démocratique du Wanmiri et au nom du Daryl, et par lui, du peuple wanmirien, j'accepte vos remerciements, et vous en adresse en retour, pour avoir accepté que la rencontre se tienne ici, et d'avoir réalisé le déplacement. Je vous parlerai par la suite, et durant a priori toute la durée de cette séance plénière, en tant que député et chef de parti, et non plus en tant que Chef d'Etat.

En ce qui concerne les propositions que vous évoquez. Pour ce qui est de la première, la position de mon parti est simple, et n'a pas changée depuis l'ouverture de l'Operasi Renaisans. Il me semble d'ailleurs pouvoir affirmer qu'il y a une forme de consensus dans cette pièce, aussi je me permettrai de parler au nom de tous.
Il se tourna vers la salle. Que l'on me reprenne si ce n'est pas le cas pour un autre parti, bien évidemment, ce à quoi lui répondit le silence. Bien. En ce qui concerne la première question, donc, il semble assez clair que l’établissement de droits d'exploitation des hydrocarbures trouvés au large des Isteal pour la Troisième République du Jashuria va de soit. Il a toujours été clairement affirmé que les nations ayant financé des expéditions de prospection seraient prioritaires à l'exploitation de ces gisements, et personne ici ne compte revenir sur cette affirmation. Il se tourna à nouveau vers la salle, avant de regarder à nouveau les Jashuriens après avoir constaté que personne ne le reprenait aucunement. Il reste bien évidemment à définir dans quelle mesure ces exploitations pourront se faire, et quelle part des productions, et des revenus de ces productions, reviendront à chaque acteur, mais nous y reviendrons plus tard, avec l'avis éclairé de madame Parvati Serin sur la question, je n'en doute pas.

En ce qui concerne le second point que vous évoquez, les positions de chacun ici présent sont plus mitigées, aussi je ne m'exprimerai qu'au nom de mon parti ici, les autres venant compléter par la suite si mes propos n'ont pas exprimé leur pensée. Il nous apparaît que le rachat des parts des concessions d'APEX Energy - qui je la rappelle a participé au financement des mêmes expéditions que que la République des Deux Océans -, s'il est d'un point de vue stratégique tout a fait pertinent, notamment dans le cadre du renforcement de la coopération régionale par le biais des Accords de Sokcho, pourrait se révéler d'un point de vue tant moral que légal plus... problématique. Vous conviendrez, je n'en doute pas, que ce genre d'actions est peut-être chose commune en Eurysie, mais qu'au Nazum, il est de bon ton d'obtenir l'avis des deux protagonistes. Le fait que des représentants d'APEX Energy n'aient pas été invités, et que, par conséquent, ce rachat se fasse sans leur consentement, pose quelques questions. Il me semble pour ma part qu'il s'agit là de notre droit, puisque -
et il se tourna vers toute l'assemblée pour le dire, insistant sur ses mots - le fait d'avoir financé une expédition ne donne pas droit à l'exploitation des hydrocarbures trouvés, mais donne simplement plus de légitimité à cette demande. Aussi, s'il ne s'agit pas de la propriété d'APEX Energy, mais de celle de l'Etat wanmirien, il est normal que celui-ci soit seul décideur, bien que cela ne fasse pas consensus ici, termina-t-il en se retournant vers les Jashuriens. Je laisse maintenant la parole à ses Excellences du Jashuria, s'ils veulent réagir à ceci, et peut-être proposer les idées qu'ils pourraient avoir sur l'un, l'autre, voire les deux points abordés."
Lorsque le Chef d’Etat de la République Démocratique du Wanmiri eut fini de s’exprimer, des murmures parcourent la salle. Visiblement, même si l’URL dominait l’assemblée du Wanmiri, les factions entendaient bien faire porter leurs voix. Toutefois, la souveraineté du Wanmiri faisait visiblement peu débat au sein des parlementaires : elle devait prévaloir sur toutes autres considérations politiques, ce qui était, Parvati le concédait de bonne grâce, la meilleure voie à suivre. Ainsi, la défense d’Ethrasyl Tymeri semblait faire consensus. Le Wanmirir cherchait à défendre ses intérêts et c’était la moindre des choses. Il revenait à Parvati et à son équipe de trouver un moyen de faire concorder la défense des intérêts jashuriens et wanmiriens. Et elle était la bonne personne pour cela.

« Je vous remercie pour cette prise de parole, monsieur Tymeri. Il va de soi que la définition des exploitations est un sujet à part, que nous préférons laisser aux exploitants et aux compagnies d’hydrocarbures, bien plus à même de dessiner l’architecture de cette concession. Nous avons hâte que ce partenariat se concrétise et qu’il soit à la hauteur de vos espérances et de nos investissements. Je suis ravie de voir que la parole de la République Démocratique du Wanmiri est d’or et que les engagements pris lors de l’Operasi Renaisans seront maintenus. Cela ne fait que confirmer que nous avons eu raison de voir en votre assemblée des partenaires de confiance et vous pouvez être assurés que la Troisième République du Jashuria saura s’en souvenir. »

Il était toujours bon de brosser les chefs de partis dans le sens du poil, mais il n’y avait nulle malice dans les propos de Parvati Mathai. Les Jashuriens respectaient les Wanmiriens et espéraient que cette confiance était réciproque. Les deux peuples vivaient côte à côte et partageaient plus qu’une frontière. Nombreux étaient les Jashuriens qui pouvaient justifier d’un cousin ou d’un ancêtre wanmirien et réciproquement, tant et si bien que malgré les errances politiques wanmiriennes, le Jashuria avait toujours vu dans le pays un allié de confiance et un partenaire historique. Mais Parvati Mathai pouvait comprendre qu’une partie de la classe politique wanmirienne soit méfiante. Les démonstrations d’amitié pouvaient souvent cacher des lames bien acérées et si le Jashuria ne s’adonnait pas à de telles bassesses, l’histoire récente du Wanmiri pouvait justifier une certaine méfiance à l’égard de voisins trop souriants.

Tymeri venait pourtant d’ouvrir une porte dans laquelle Parvati Mathai allait pouvoir s’engouffrer. Et c’était bien sur la fibre souverainiste qu’elle entendait faire valoir ses positions et damer le pion à APEX Energy.

« Monsieur Tymeri, vous avez souligné très justement que les financements utilisés jusqu’à présents avaient servi à la prospection dans les Isteal, permettant de découvrir des gisements d’hydrocarbures jusque-là inexploités. L’Operasi Renaisans est à ce titre une réussite pleine et entière. Vous avez aussi souligné que les résultats de la prospection ne donnaient pas automatiquement un droit d’exploitation, ce que nous concevons parfaitement. Après tout, le contrat stipulait clairement que la mission était une mission de prospection. S’il est tout à fait concevable le prospecteur se positionne par la suite pour négocier avec l’Etat wanmirien l’exploitation et la création des infrastructures pétrolières et gazières, vous avez très justement souligné que la décision appartenait à l’Etat wanmirien au terme d’une consultation publique. C’est pourquoi, la Troisième République du Jashuria, accompagnée par ses compagnies référentes, souhaiterait pouvoir se positionner afin de proposer les meilleures prestations à l’Etat wanmirien sur l’exploitation des hydrocarbures découverts. »

Concurrence et libre marché étaient des domaines où les Jashuriens excellaient. Il était donc tout naturel que Parvati Mathai en appelle au respect des contrats et des règles des consultations publiques, là où les entreprises jashuriennes, par leur proximité avec l’Etat wanmirien, avaient le plus de chance de proposer des contrats alléchants. Mais il ne suffisait pas d’en appeler au respect froid des contrats. Il fallait aussi jouer sur une fibre plus … sentimentale.

« Vous avez aussi rappelé un enjeu important : celui du positionnement stratégique du Wanmiri, aussi bien dans les Accords de Sokcho qu’au Nazum. La souveraineté du Wanmiri est au cœur de l’Operasi Renaisans et ne saurait être contestée. Mesdames et messieurs les députés, je souhaiterai souligner que l’intégration du Wanmiri dans les Accords de Sokcho est une opportunité unique de clamer aux yeux du monde entier que le Nazum méridional n’est pas le terrain de jeux de puissances étrangères prédatrices. Qu’il s’agisse du Grand Kah, du Fujiwa ou du Jashuria, nous œuvrons pour la stabilité du Nazum et pour faire de cette région un havre de paix et de prospérité. Cet objectif, que partage le Wanmiri, ne peut se réaliser qu’au travers d’une attention renouvelée vis-à-vis des instincts prédateurs d’entreprises eurysiennes. Si nous tenons collectivement aux Accords de Sokcho et si nous souhaitons les faire prospérer, alors il nous appartient collectivement de décider que l’indépendance énergétique de nos pays doit passer par des entreprises membres des Accords de Sokcho. Quelle indépendance stratégique pourrons-nous faire valoir dans les prochaines années si le gaz et le pétrole sont exploités par des entreprises eurysiennes ? Devons-nous être encore à la merci d’entreprises à l’autre bout du monde, qui nous voient comme leurs dépotoirs ? C’est pourquoi, mesdames et messieurs les députés, je vous demande de considérer l’offre jashurienne comme un moyen de consolider les Accords de Sokcho et d’être certain que l’exploitation des hydrocarbures ne profite pas à des prédateurs issus d’autres continents, qui auront tôt fait de revenir sur leurs engagements une fois le mal fait. »
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