11/05/2017
16:13:15
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Camarades ou pas camarades V - rencontre UICS/PPB

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Camarades ou pas camarades V: Le PPB


Lyonnars est brumeuse, et les esprits des locataires du siège de l'UICS le sont tout autant. Il est 8h et comme à son habitude, Piero Lardi, membre du comité central du PEV et référent à l'UICS pour le parti, a le privilège d'ouvrir la permanence des eurycommunistes velsniens au quatrième étage de l'immeuble. C'est dans ce bureau que les membres de la délégation peaufinent leurs textes déclamés au Conseil suprême, et où se joue le jeu beaucoup plus politicien du comptage de voix en avance: quelle mesure est populaire ? Laquelle ne l'est pas ? Les délégués du PEV jaugent les aspirations et les besoins de leurs camarades des autres délégations, et adaptent les derniers détails de leurs argumentations. Les sujets sont larges et aucune journée ne ressemble à la précédente. Piero Lardi voit une pile de dossiers sur le bureau du secrétaire Géorgi Marcos. Il a la curiosité d'en piocher quelques uns au hasard, et s’enfonce dans le fauteuil qui d'habitude est le sien, en face du pupitre de Marcos. On dirait bien que le secrétaire a déjà planifié sa prochaine intervention sur le sujet de l'organe de développement économique de l'UICS, de même que ce dernier a déjà planifié son emploi du temps pour le reste du mois. Lardi passe d'un dossier à l'autre jusqu'à tomber sur un sujet intéressant: "PPB...qu'est-ce que c'est que ça...".

Piero Lardi ouvre le dossier, et lui saute aux yeux la date: 17 janvier 2015...quand bien même Marcos avait déjà autre chose de prévu aujourd'hui, une visite au parlement loduarien en compagnie du camarade Lorenzo. Se pourrait-il qu'il est donc oublier la réunion avec les délégués du PPB ? Peut-être que des membres d'autres délégations sont au courant...Lardi jette un coup d’œil dans le couloir. A côté se trouvait la permanence de la délégation eurycommuniste de Zélandia, avec laquelle les velsniens devaient organiser la réunion. Lardi frappa à la porte: pas de réponse. Se pourrait t-il que ceux-ci soient déjà sur place ? Naturellement, Piero Lardi se dirigea vers l'endroit où il y avait le plus de chances de croiser les délégués zélandiens à chaque heure de la journée: la buvette de premier étage. Là encore et de manière surprenante...rien.

On dirait bien que Lardi va devoir assumer l'intérim pour tout le monde. Il se dirigea donc vers la salle de réunion prévue pour l'accueil du PPB, dossier sous le bras. Il laissa la porte ouverte derrière lui de façon à signifier que les délégués de cet exotique parti socialiste du Nazum sachent qu'ils sont attendus. Lardi était donc planté là devant la porte, avec une très faible connaissance des individus à qui il allait faire face. Mais qui sait...peut-être que cette journée sera une bonne surprise.
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Le bureau politique du PBB avait hésité pendant de nombreuses heures lors des délibérations pour décider à qui reviendrait la tâche d'aller à la rencontre des responsables du l'UICS, fallait-il envoyer un idéologue, un expert en communication, un des nombreux académiciens à avoir rejoint la parti ces dernières années ou un des membres historiques de l'organisation ayant participer "à la Glorieuse Guerre". Finalement la figure qui semblât être la plus logique au vue de toutes ces interrogations fut celle de Raharjo Sugiarto, le Secrétaire Général de la section politique du parti, figure historique et respectée de ce dernier et dont on connaissait, de par son expérience d'avocat, une maitrise certaine pour l'art de la discussion , il était également celui qui avait dessiné les principales stratégies électorales qui semblaient tant porter leurs fruits aujourd'hui alors que le parti était aux portes du pouvoir. Sa présence servirait également à signifier aux cadres de l'UICS que la procédure d'entrée du parti dans l'organisation était tout à fait prise au sérieux.

Sugiarto était une figure intrigante au sein du parti, ce qui rend encore plus impressionnante et intéressante son ascension. Comment un avocat, fils d'un père eurysien inconnu et d'une mère issue d'une famille plutôt aisée, avait-il réussi à intégrer et à gravir les marches, jusqu'au sommet, d'un parti taihoraniste historiquement enclin à favoriser la représentation, aux postes clés, des communautés aborigènes et des figures prolétaires ? Son respect et son crédit révolutionnaire il l'a fondé pendant la guerre civile où, en tant que jeune avocat, il accepta, malgré les menaces et les risques de représailles du Régime de défendre dans les tribunaux ou dans les médias des cadres de la guérilla communistes, des "terroristes" ou tout autre militant s'opposant à la ségrégation communautaire et à la dictature des Vimalais. Il était réputé pour ne refuser la défense à aucun membre du parti, du simple adhérant arrêté pour tractage illégal au guérillero le plus radical. Il a ainsi écrit une de ses plus belles victoires juridiques en arrivant à faire acquitter, après la guerre, les présumés responsables du massacre de Rawai où près de 840 Vimalais furent exécutés sommairement, action dont même le PBB s'était distancé en suspendant les accusés. Quand le Régime se durcit à la fin des années 80, il rejoignit la jungle, prit officiellement sa carte de membre et les armes. Le reste de sa carrière politique fut ensuite une longue montée en puissance qui le vit devenir Secrétaire Général pour la première fois en 2007, avant de se faire réélire à chaque congrès.

Il n'angoissait pas spécialement cette réunion, à la différence de certains de ses camarades qui craignait que son ton parfois légèrement provocateur et cynique issu de sa carrière juridique ne rebute ou ne heurte un officiel eurysien de l'organisation connaissant mal le franc-parlé qui caractérisait les Kinagiens. Il était accompagné d'un traducteur à qui on avait dit de ne pas hésiter à arrondir les angles en cas de "bon mot" de Sugiarto et d'un cadre franchement anonyme du parti qui servait autant à le conseiller qu'à analyser la réunion pour la rapporter au Bureau politique en cas d'échec des discussions.

Sugiarto entra d'un pas calme mais décidé, accompagnés de ses deux camarades, puis arrivé à la hauteur de Piero Lardi, lui tendit la main et prononça un simple mais cordial «Salutation camarade, c'est un plaisir de vous rencontrer». Laissant à son interlocuteur l'honneur de commencer les connaissances statutaires.

Raharjo Sugiarto
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Calahan Skogman
Matthias Spitzer, second du Secrétaire Général de l'U.C.Z.

Matthias Spitzer, mécanicien d’arme aux Chantiers Navals Syndiqués d’Amstergraaf de son état, d’origine Tanskienne, second du Secrétaire Général de l’Union Communiste de Zélandia : Ewan Finnegan ; est un homme de peu de mot. Ainsi, lorsque la grisaille s’installe dans le ciel de Lyonnars et que ses camarades filèrent tous, droit au “Barbelé” — bar réputé de la capitale du Prolétariat mondial, il ne put s’empêcher de sourire au fait qu’il pourra travailler seul dans son bureau et surtout, au calme.

Fermant sa porte à clef, il se mit alors dans ses deux dossiers les plus urgents : la rencontre avec les camarades du Partai Pertahanan Buruh ou P.P.B. et les élections fédérales Zélandiennes auxquelles il s’était présenté…


※ ※

Le nez toujours dans ses documents, Matthias ne vit pas l’heure tournée et se rendit compte dans un sursaut qu’il était en retard pour la rencontre avec le P.P.B. Prenant en vitesse les dossiers dont il aurait besoin, laissant le reste étalé sur son bureau — il rangera plus tard ; il prit cependant le temps de faire un léger détour par la machine à café avec un plateau, des sucrettes et des touillettes.

L’imposante musculature par des années de travail sur les chantiers navals du camarade Zélandien se présenta dans l’encadrement de la porte de la pièce qui accueillait la rencontre ; les bras chargés de ses dossiers et d’un plateau, elle s’exprima en ces termes :

“ Veuillez excuser mon retard camarades. Mon pays traverse actuellement une période politique qui lui est importante et mes dossiers sur le sujet m’ont pris plus de temps que prévu. Je disais donc… Matthias Spitzer : de l’Union Communiste de Zélandia ou U.C.Z. et second de notre Secrétaire Général pour Lyonnars. Enchanté.

Café ? „
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Le fait que cet entretient soit réalisé par deux eurysiens n'était pas forcément la situation rêvée pour Sugiarto. L'idéologie du parti reposait en grande parti sur une interprétation assez stricte de la Théorie des Trois Mondes dont il savait qu'elle avait souvent tendance à vexer les occidentaux qui pouvaient y voir une forme de chauvinisme ou de rejet total des mouvements socialistes venus des continents historiquement liés au premier et au deuxième monde. Tant pis il fera avec. Il garda le flegme qui le caractérisait et répondit par un sourire teinté de bienveillance révolutionnaire pour répondre au camarade qui venait de rentrer en proposant si gentiment un café.

« Volontiers » répondit t-il après avoir salué son interlocuteur. Il s'approcha ensuite, café à la main, des sièges de réunions les plus proche, préparant les quelques fiches de notes qu'il avait à sa disposition, elles comportaient surtout des éléments de langages idéologiques à utiliser, en ce qui concernait la stratégie politique du parti personne ne la connaissait aussi bien que lui.
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Piero Lardi rendit bien ses salutations au représentant au représentant du bureau politique du PPB. Cette rencontre avec ce mouvement allait se révéler relativement atypique. En effet, si il y a déjà à l'UICS des formations politiques impliquées dans des activités de guérilla, il s'agit toujours d'un exercice sensible. Il fallait alors justifier la pertinence des actions de cette dernière sur base de son socle idéologique, tout en tirant un bilan de cette expérience. D'autant que le Kinagi demeurait un contexte relativement obscur et peu connu de la petite troupe de l'UICS qui servait aujourd'hui de comité de bienvenue. Le concours des camarades de l'U.C.Z n'allait pas être de trop;

Lardi fit signe aux invités de prendre place:
- Je vous en prie camarades, faites comme chez vous. Vous avez fait un long chemin.

Feuilletant une dernière fois son dossier, il remis ses lunettes sur son nez et prit une grande inspiration:
- Camarades. Nous allons procéder de la manière habituelle. En premier lieu, nous sommes avant tout là pour discuter et il n'y a guère de mauvaise réponse dans ce que vous nous direz. Nous sommes une organisation qui prône un syncrétisme d'idées. Peu nous importe la vision que vous vous faites du combat social tant que ce que vous visez est une abolition de la misère humaine sous toutes ses formes. Nous siégeons aux côtés d'eurycommunistes, de communalistes, d'anarchistes...aussi cela ne sera pas un critère de sélection aujourd'hui, vous pouvez vous en assurer. Nous sommes avant tout ici pour vous conseiller en plus de statuer sur la pertinence de votre candidature. Aussi, la cohérence de votre théorie sera davantage scrutée que ce qu'elle contient. Et c'est par cela que nous allons débuter cette discussion. Mais en premier lieu, j'aimerais vraiment entendre par votre bouche la façon dont vous décririez votre formation. Quel est le fondement de votre théorie ? Votre approche de la lutte des classes finalement... Comment s'organise votre parti ? Quelle est votre motivation à rejoindre cette organisation ? Bref...je voudrais bien entendre une rapide synthèse de tout ceci avant d'attaquer le vif du sujet.
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Une fois que son traducteur eut fini de lui traduire la longue question de son interlocuteur, il sourit, replaça ses lunettes comme en miroir de Lardi et commença l'exposé qu'on lui demanda.

« Nous nous basons en très grande majorité sur les écrits de Harto Taihoran, je dirais, avec une forme de recul que nous en faisons une analyse assez orthodoxe. Il serait compliqué d'expliquer précisément, sans faire une revue chronologique du contexte social kinagien, les raisons pour lesquelles ses théories ont chez nous un succès si important, mais il semble évident que cela s'explique en grande partie par la réalité ségrégationniste et néo-colonialiste de notre pays lors de la création du PBB, la place de la paysannerie dans notre société et globalement la place de Kinagi dans la hiérarchie internationale des forces. Les thèmes portés par Taihoran raisonnent particulièrement chez nous, et je pense que tous nos camarades, ou au moins une large majorité d'entre eux, diraient que c'est la figure théorique qui leur a fait prendre conscience de la réalité de la lutte des classes et de la nécessité de la Révolution prolétarienne. Ce qui ne nous empêche pas, bien sûr, de lire et de rester ouverts à d'autres auteurs et penseurs, nos sections politiques ont par exemple longuement étudiés les thèses de Marcos, avec qui nous sommes d'ailleurs souvent en accord, mais je me sens forcé, par honnêteté intellectuelle, de dire que quand nous lisons des auteurs occidentaux, nous avons souvent une impression de lire des récits anthropologiques de contrée lointaines très intéressants et enrichissants mais qui décrivent des prises de consciences révolutionnaires et des axes de développements politiques et sociaux qui n'ont que très peu en commun avec nos expériences. C'est pour cela que nous estimons, dans une optique révolutionnaire internationale, qu'il y a une nécessité d'ouvertures des points de vus globaux, autant chez nous que chez vous, via la diffusion de nos théories et la prise en compte des points de vues post-coloniaux dans les théories marxistes internationales. J'estime qu'il s'agit d'une des raisons principales de notre volonté d'entrée dans l'UICS, au même titre que notre volonté sincère de fraternité révolutionnaire. »

Il s’arrêta momentanément pour prendre quelques gorgées de café et pour permettre au traducteur de finir la transmission de ses paroles. Il avait pris la décision, juste avant de commencer à parler, d'amener rapidement le sujet des différences dans l'expérience révolutionnaire sur la table, elle permettait d'établir rapidement les idées claires du taihoranisme en terme de relations entre le Troisème Monde et les deux autres tout en appuyant sur le respect et la compréhension nécessaires entre les révolutionnaires de tous les pays.

« En ce qui concerne le fonctionnement du parti, nous devons déjà signaler qu'il y a deux sections à l'intérieur de ce qu'on appel le communément le PPB, la Bagian Politik, que je dirige, qui regroupe tous les services liés à la production et à la diffusion de théorie, aux stratégies et aux nécessités électorales, à la formation populaire et à la présence culturelle et la Bagian Hukbong qui regroupe, dirige et organise les sections locales armées et les services de protection du parti. Notre section politique fonctionne sur un système de centralisme démocratique, les débats sur la ligne et les courants sont autorisées lors des congrès et en marge de ces derniers mais nous attendons de tout le monde, en dehors de ces périodes, un soutien de la ligne actuelle et un respect de l'unitarisme du parti. En résumé je dirai que nous sommes un parti de masse assez classique dans notre fonctionnement : les camarades votent la ligne et la section politique s'occupe de lui donner un cadre théorique et pratique. »

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Piero Lardi, prenait compte dans ses notes de chaque propos de son interlocuteur. Sans lever les yeux vers ce dernier, il ponctue la présentation par quelques mots:
- Oui je vois. L'importance de l'agrarisme est un trait commun parmi les tenants de la théorie de Taihoran. Même si il y a de grandes disparités. Vous serez pas sans savoir qu'on se revendique autant du Taihorisme lorsqu'on est dans une économie socialiste de amrché comme le Negara Strana, que lorsqu'on est au sein d'une communauté paysanne autonome. Mais si j'en crois vos paroles, vous seriez plutôt dans la seconde catégorie. Si cela peut vous rassurer, votre sensibilité politique est déjà très bien reporésentée dans nos rangs, en témoigne notre propre secrétaire général stranéenne. Ellis Halima, vous la connaissez sans doute...

Mais en revanche, il y a deux trois positions assez curieuses venant de la part d'une formation de votre orientation politique. Non pas que je vous en tienne rigueur, loin de là. Mais c'est peu commun de trouver des organisations taihoristes qui s'appuient sur le principe de centralisme démocratique. Nonobstant, je pense que vos explications sont rassurantes quant à votre sérieux. Je pense que nous pouvons passer au sujet suivant.

Sortons un peu de la théorie et entrons dans la pratique. J'aimerais maintenant entendre en quoi consiste votre stratégie électorale. Y-en a t-il une, pour commencer ? Ne m'en voulez pas, mais je suis assez peu renseigné sur le contexte politique dans lequel évolue votre pays. Tablez vous sur une prise de pouvoir de manière démocratique ? Ou bien est-ce simplement une vitrine pour promouvoir des idéaux révolutionnaires ? Je suppose qu'en dehors de votre service d'ordre, il n'y a aucun projet de lutte armée de votre côté ? Encore une fois, il n'y a pas de mauvaise réponse
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« Actuellement oui notre organisation se dirige vers une prise de pouvoir de façon démocratique. Ce n'était pas l'objectif lors de la formation de la guérilla, mais le contexte de notre pays après la chute de la dictature nous a plus ou moins forcé la main. Notre pays venait de sortir de plus d'un siècle d'oppression ségrégationniste néo-coloniale violente et de 40 ans de guerre civile, nous avions les moyens de continuer les combats pendant encore quelques années, ce qui nous aurait très certainement permis de prendre le pouvoir, mais il semblait clair pour tous le monde que la vague de violence devait prendre fin, que toute autre victime kinagienne de plus ne serait qu'un nouveau pas en arrière dans notre lutte pour l'émancipation et la révolution. Dès lors, à la chute de la ségrégation, nous avons mis en place une alliance provisoire avec les libéraux, participer au modelage d'un système politique d'apaisement tout en transformant ce qui avait été une guérilla pendant plusieurs décennies en un véritable parti de masse dédié à la formation d'une avant-garde, au développement des idées et à la prise non-violente du pouvoir. »

Il savait maintenant qu'il devait aborder un nouveau thème difficile à expliquer et à faire comprendre. Il prit une gorgée de café et reprit sa narration.

« Quand nous serons au pouvoir nous mettrons fin à la République, elle sera remplacée tout d'abord par une "Nouvelle Démocratie Révolutionnaire" qui reposera sur une alliance entre les prolétaires, les paysans, les citadins et la bourgeoisie nationale. Son objectif, et sa principale différence avec la République actuelle, sera la suppression figurée de la bourgeoisie compradore, le ralliement du prolétariat vimalais à la cause révolutionnaire, la liquidation des influences impérialistes et de l'héritage colonial et le développement matériel et social nécessaire à une transition vers la dictature du prolétariat. Cette étape supplémentaire que nous avons théorisé repose sur le fait que notre pays ne dispose pas des caractéristiques matérielles et sociales héritées des révolutions bourgeoises occidentales. La grande partie de notre économie est maintenue dans les mains de petits chefs néo-féodaux, qui règnent comme des seigneurs sur des grands domaines agricoles héritées de la période coloniale, qui disposent de milices communautaires, qui exploitent les paysans et qui ne rêvent que de voir Kinagi retourner dans le giron colonial du Fujiwa. Notre industrie est faible, les villes vivent surtout autour d'un petit artisanat, d'une petite bourgeoisie nationale ou alors d'entreprises étrangères. Nous ne disposons pas des conditions qui nous permettent de passer dès aujourd'hui à la dictature du prolétariat. Nous cherchons ainsi à mettre en place un système qui nous permet de mettre en place les conditions nécessaires à cette dernière tout empêchant le développement d'un système généralisé d'exploitation du prolétariat comme cela a été le cas en occident après la réussite des révolutions bourgeoises. En sommes nous remplaçons la révolution bourgeoise et ses acquis, que la plupart des auteurs communistes se sont accordés à définir comme crucial dans le développement d'une société sans classe, par une période de transition communiste vers l'autre étape transitoire que représente la dictature du prolétariat. »

«Concernant les sections locales armées elles ne servent pas que de service d'ordre. Leur principal but est la protection des terres Aborigènes et des rares collectives agricoles prolétaires face à la prédation des grandes exploitations agricoles et de leurs milices. Il est vrai cependant qu'elles ne sont plus dirigées vers une lutte armée contre le pouvoir, ce qui était le cas du temps de la guérilla. »
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Piero Lardi avait cet air à la fois fasciné, tout en essayant de rester détaché et dépassionné vis à vis des propos de son homologue. Il devait rester analytique et impartial. Mais cette conversation allait dans le bon sens. Il ne fallait cependant pas l'éterniser, au risque de lasser un interlocuteur qui ne devait pas prendre ceci pour un interrogatoire. Il était peut-être temps de rendre un verdict:
- Camarade Surgiarto. Nous sommes désormais l'un en face de l'autre depuis de longues minutes, et mes premières observations sont somme toute rassurantes, très rassurantes. Lorsque je vous écoute, j'ai effectivement l'impression d'écouter la description d'un mouvement doté d'une solide base idéologique et programmatique, en plus d'une feuille de route relativement claire. Je ne doute pas que ce mouvement ait un bon avenir. De plus, les observations dont vous me faites part sur la situation matérielle qui impose des contraintes très précises, est proche de ce que certains de nos autres camarades connaissent en Eurysie de l'est, en Palteoterra et en Afarée: une société agraire qui n'a pas encore mutée de manière pleine et entière vers un modèle capitaliste que nous avons eu en occident eurysien.

Je pense que votre mouvement est donc mûr pour être intégré. Et je donnerai donc un avis favorable à votre adhésion à l'UICS. Vous m'avez convaincu. Cependant, j'ai encore une question, elle, purement pratique. Qu'attendez vous de nous en termes de soutien concret que nous pouvons apporter à votre cause ? Nous avons plusieurs programmes de soutien, notamment une aide au développement des organisations membres, que ce soit par la propagande ou le soutien financier. Ce faisant, si vous avez une demande particulière à nous fournir, n'hésitez pas à vous exprimer au sein du Conseil Suprême de l'UICS.

Nous vous inviterons également à enrichir le corpus idéologique commun que nous construisons progressivement à l'UICS, de même que toute adhésion à l'organe de propagande de l'UICS sera le bienvenue de votre part. Bref, je pense que vos possibilités et vos moyens seront grandement élargis. Et j'imagine que mon camarade zélandien ici présent sera du même avis...
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Il sourit quand on lui traduisit les mots de son interlocuteur, son flegme habituel s'était mis de coté l'espace de quelques secondes. Il reprit ensuite sa posture sans cacher sa satisfaction prononcée.

« Il est clair que ces programmes de soutiens pourraient être bénéfiques au développement humain de notre pays. Nous avons d'énormes progrès à faire dans énormément de domaines et ce serait un profond mensonge de dire qu'une forme d'aide venues de camarades serait un luxe ou même quelque chose que l'on pourrait refuser.

Sur la question des idées... Comme vous l'avez dit je pense que nous avons d'excellents idéologues qui aideraient non-seulement les pays qui disposent de caractéristiques similaires au notre mais plus globalement même aux pays qui ont un stade de progrès révolutionnaire plus élevé que nous. Ces dernières années nous avons réussi à faire éclore une jeune génération de chercheurs et d'auteurs qui ne cessent de penser et d'écrire pour élargir notre corpus idéologique de référence. Ils ont développés en à peine 5 ans, ce que ma génération et celle d'après n'a pas pu faire en 40 ans. Nous avons préparé des éléments qui seront capables de s'emparer des universités et de les rendre absolument centrales dans la prise de conscience collective et dans la véritable révolution culturelle nécessaire qui s'annonce. Je pense que dire que nous avons, au sein de notre parti, un fourmillement idéologique serait une forme de sous-estimation du développement des idées et des concepts qui se déroule chez nous. Je ferai, bien évidemment, en sorte que des travaux de traductions soient mis en place dès notre entrée dans l'organisation. »


La fierté de Sugiarto concernant ce sujet était particulièrement visible, bien plus que quand il parlait de la prise de pouvoir imminente de son parti. Il avait été le grand théoricien de cette politique de développement intellectuel, il avait longuement bataillé avec ceux qui voyaient dans ce projet la création d'une élite intellectuelle déconnectée des masses, il affirmait de son coté que sans victoire intellectuelle, la propagation culturelle de la conscience de classe ne pourrait jamais être obtenue. Mais au delà cette approche stratégique il y avait surtout une démarche résultant d'une peine personnelle, lui, le petit bourgeois qui avait développé sa conscience révolutionnaire via des auteurs occidentaux, était, lors de ses premières années de luttes, particulièrement circonspect du manque de connaissances de ses camarades dans les cades théoriques de base du marxisme. Ils ne connaissaient que les thèses de Taihoran et évitaient minutieusement de parler des nombreux angles morts de ses théories. Pour Sugiarto il fallait, tout en évitant le révisionnisme, enrichir le taihoranisme pour le faire devenir une branche importante au sein de l'espace communiste et le propager.

Il attendait maintenant la réponse et le point de vu du camarade zélandien, particulièrement satisfait de son entretient, ce qui semblait être partagé par ses accompagnants à ses cotés.
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Matthias était peu, très peu bavard ; et avait attendu sagement que son camarade Velsnien : Piero Lardi le sollicite. Nonobstant il n’était pas resté passif, le nez dans son carnet à prendre des notes de la discussion stylo en main. Son visage s’éclaircit même à la mention par Sugiarto de la formation idéologique des membres du P.P.B. ainsi que de la révolution culturelle. Lui le Loduariste modéré ; le néophyte de la doctrine formé aux thèses eurycommunistes sur les chantiers navals entre deux pauses par des camarades-citoyens plus vieux avait une attirance pour le sujet qu’était l’éducation. Pouvoir ouvrir les yeux des plus jeunes sur leurs droits comme on lui a ouvert les siens dans la société ultra-capitaliste de sa ville natale : Amstergraaf.

Reprenant une gorgée de son café, il répondit à la sollicitation du Velsnien :

À dire vrai, je ne pense pas que le parti dans lequel je suis s’opposera à votre admission dans l'Union. Je m'y engage personnellement. D'autant plus que l'expertise du P.P.B. dans la théorisation des idéaux socialistes et, dans notre cas, communistes, ne pourra nous être que bénéfique. J'appuierai aussi sur l'avantage d'avoir un parti qui ose clairement exprimer le point de vue d'un socialisme moins. . . “occidental”, si vous me passez l'expressions, qui nous permettra au sein de l'Union d'avoir accès à des visions et des problématiques différentes ; amenant à une meilleure compréhension de nos mouvements sur l'ensemble du globe et par conséquent une meilleure unité entre les prolétaires de tous les pays, comme le dit l'adage.
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