19/11/2017
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[RP] La Révolution Kohliste : Reconstruire une Nation

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Un jour comme les autres.

Le 24 Février 2015, les trois-cents députés qui composent le Parlement National de l'État de Rimaurie se réunirent, comme à leur habitude, au Parlement afin de discuter et de débattre des nouveaux projets de lois : révision du code de la route, redéfinition du budget... La routine. Quelle ne fut pas leur surprise, lorsqu'une douzaine de minutes après leur entrée dans l'hémicycle, ils virent entrer le Führer Friedrich Sattler en personne, lui qui restait pourtant généralement à l'écart du Parlement et des discussions qui s'y tenait, l'air grave et sévère. À cet instant, chacun dans la grande salle senti son cœur battre plus fort. Chacun savait que le Parlement ne s'était pas réuni pour palabrer sur le montant des amendes à adresser aux mémères dont les chiens ne peuvent se retenir de se soulager sur les trottoirs ou pour déblatérer.

Le Führer monta sur l'estrade faisant face à la trois-centaine d'hommes et de femmes suants. Il se mit à parler d'une voix ferme et accusatrice, presque colérique, presque haineuse.


Cela fait désormais plus de trois semestres que je dirige ce noble et grande pays qu'est la Rimaurie et ce noble et grand peuple qu'est le peuple Rimaurien. En plus de dix-huit mois, notre nation, sous ma poigne, a fait des progrès incontestables, s'élevant d'un petit État ignoré des plus grands à une puissance en devenir que plus personne à travers le monde ne peut encore ignorer. Sous ma direction, l'État de Rimaurie s'est régénéré, il s'est enrichi, il s'est fortifié et pourtant, nombre de menaces pèsent encore sur nous, dans l'ombre ou la lumière, à l'intérieur ou à l'extérieur.
D'abord, la ville de Forren a été la cible de deux attentats, contre le Gouverneur du Forrenland Christopher Wasser puis contre la prison Käseglocke qui a coûté la vie à une centaine de personne. Si nous ne sommes pour l'heure pas en mesure de connaître les motivations derrière ces attaques, nos renseignements ont la certitude que le groupe terroriste derrière ces atrocités n'a pas pu agir sans un soutien de la part d'agent haut-placés de l'État.
Ensuite, nous avons étés témoins d'une reprise de confiance accompagnée d'une augmentation de l'activité antinationale de l'organisation terroriste autoproclamée Union Libertaire suite à son adhésion à l'organisation tout aussi terroriste de l'Union Internationale du Communisme et du Socialisme. Nos troupes, malgré leur force et leur courage, n'ont toujours pas été capables d'éliminer cette engeance pourtant bien plus faible qu'elles. Pourquoi ?
Plus tard, nos services de renseignements ont étés incapables de prévoir l'agression pourtant évidente de l'infâme Nation Communiste de Loduarie contre la Première Base Aérienne et de réagir en conséquence. Les responsables de cet échec devront assumer la mort de cinq de leurs compatriotes.
Enfin et pas des moindres, notre État-Major a jugé bon de fournir des armes et du matériel militaire à des factionnaires Ramchoures, aussi noble soit leur combat, mais surtout de convoyer des missiles balistiques au Chandekolza avant même que notre base locale ne soit prête à les accueillir. Il s'agit là rien de moins que du signe d'une incompétence flagrante de nos dirigeants militaires pourtant responsables de notre sécurité, de celle de notre peuple et de celle de notre nation toute entière. Il est hors de question de laisser de telles responsabilités à de parfaits incapables ! Leur incompétence nous a coûtée une crise diplomatique, la famine de cent-soixante de nos soldats et une décrédibilisation internationale alors que nous avions jurés de ne plus jamais nous laisser humilier !!!

Ainsi, je ne passerais pas par quatre chemin : nos institutions militaires et politiques sont totalement corrompues, occupées par de complets incompétents, si ce n'est des traîtres ou des espions à la solde de l'ennemi anarcho-communiste ou imperialo-capitaliste. Ces traîtres, je les renie ! Je les condamne ! Ces traîtres, c'est vous, les députés de ce Parlement qui affaiblissez la nation et reniez l'Idéologie Nationale Kohliste !

À tout les Loduaristes, vous qui prétendez libérer l'homme en lui retirant son humanité, en en faisant un objet, un outil de la collectivité, soumis à la collectivité, esclave d'une collectivité assistée et fainéante sans aucun amour du travail, sans aucune passion de la terre, sans aucun droit de démontrer ses richesses acquises par le sang et la sueur. Vous qui reniez l'individu pour l'inscrire dans une collectivité esclavagiste, comme des abeilles dans une ruche, comme de misérables insectes. Je vous condamne !

À tout ceux qui renient l'ordre pour une soit-disant liberté, cause de tout les maux de l'Homme depuis la nuit des temps. Vous qui croyez en la liberté d'exploiter votre prochain pour votre profit égoïste. vous qui croyez en la liberté de détester vos semblables et de les massacrer. Vous qui croyez en la liberté de saccager l'ordre utopique pour satisfaire votre soif d'insoumission aveugle. Vous qui oubliez que l'Homme est mauvais car il est libre d'être mauvais. Vous qui appelez à la révolution, à la violence et au mal pour défendre une aberration qui ne vous apporte ni nourriture ni toit ni chaleur. Je vous condamne !

À tout ceux qui voient en l'intelligence, la force et l'énergie de l'autre une ressource naturelle à exploiter comme du fer ou du blé. Vous qui mettez l'argent et la richesse des uns au dessus de la vie des autres. Vous qui vous nourrissez en affamant ceux qui vous apportent votre pitance. Vous qui ne croyez qu'au confort décadent d'une minorité et niez la satisfaction de tous. Je vous condamne !

À tout ceux qui imposent ou cherchent à imposer leur Dieu fictif. Vous qui voyez en la foi d'autrui votre richesse et votre pouvoir. Vous qui défendez des valeurs de paix, de fraternité et d'égalité tout en forçant vos fidèles à financer vos orgies sous peine de châtiment. Vous qui abrutissez la population par des fausses promesses, des faux préceptes et des fausses morales en la menaçant de damnation éternelle si elle ne les suit pas aveuglément. Vous qui utilisez la peur du surnaturel et le rejet de la science pour votre domination. Je vous condamne !

À tout ce qui refuse de voir le même cœur sous chaque peau et chaque sexe. Vous qui croyez et affirmez que tout Homme n'est pas égal par sa race, que certaines couleurs sont stupides et barbares quand d'autres sont éduquées et civilisées. Vous qui criez haut et fort votre mépris pour vos mères et celles de vos ancêtres. Vous qui appelez à la destruction ou à l'esclavage de la différence. Vous qui réfutez le principe même d'égalité, pourtant au fondement même de notre cause. Je vous condamne !


Soudain, l'écran géant, placé en face de l'auditoire et habituellement destiné à la retranscription des discours et des suffrages, s'allume. Des noms défilent, inlassablement, pendant de longues minutes, le Führer les déclare un par un à haute voix.

Kaleb Wach, Georg Boettcher, Karin Engberg...

Dans le fond de la salle, un député s'exclame.

Qu'est donc cette mascarade ? Que se passe-t-il ici ?

Le Führer ignore la remarque. Il continu sa lecture impitoyable. Les noms se suivent et s'enchaînent. Ce sont ceux des députés. 18, 26, 57, 85, 143. Après une dizaine de minute de lecture, deux-cent-vingt-quatre noms ont étés mentionnés. Ceux qui ont étés nommés transpirent, les autres, tous membres du Front Nationaliste, soufflent de soulagement.

Que tout ceux qui ont étés nommés se lèvent et quittent cette pièce. Vous êtes bannis, reniés, exclus ! Vous êtes condamnés pour trahison envers l'État, le peuple et l'Idéologie Nationale !

Vous n'avez pas le droit ! s'exclame un autre député dont le nom a comme bien d'autres été appelé Nous sommes élus du peuple, nous représentons sa volonté !

Votre parole n'a plus aucune valeur. Vous êtes un ennemi du peuple désormais, un traître un criminel. Vous n'avez pas été élus par le peuple mais par ses pires représentants. Vous êtes l'incarnation de notre échec, de notre honte.

Nous n'avons commis aucun crime ! Nous n'avons pas trahis le peuple !

Vous avez humiliez notre pays. Vous avez collaboré avec notre ennemis. Vous avez affaibli et détruit l'ordre initié par mon prédécesseur. Je pensais, en écrivant ces réformes démocratiques il y'a huit mois, que nos ennemis intérieurs, les ennemis du peuple, avaient étés vaincus. Je me trompais, j'ai fait une erreur, mais je peux encore la corriger. La Rimaurie ne finira pas comme Karty, corrompue par le capitalisme et le libéralisme, qui nous renie quand nous étions les seuls à l'accepter et s'acoquine avec les démocrates qui le briseront. Nous ne finirons pas comme ces barbares qui sacrifient leurs hommes pour leur honneur et leur honneur pour leur profit.
La Rimaurie ne finira pas non plus comme la Kartvélie, elle aussi menacée de l'intérieur, qui n'a pas pu résister à l'anarcho-collectivisme purulent et s'est effondrée, comme ça, d'un coup. Elle aussi était corrompue et infestée dans toutes ses largeurs et ne l'a jamais remarquée. Nous ne ferons pas la même erreur.

Ainsi, face aux échecs de nos alliés, face à l'incompétence, à l faiblesse et à la corruption de nos institutions, je dissous le Parlement, j'abolis la Constitution, j'abroge l'État de Rimaurie, je renie notre étendard, notre devise et notre hymne, symboles de notre échec. Je proclame l'établissement d'un État Nouveau, purgé, régénéré. Je m’attribue les pleins pouvoirs.


Vous n'avez pas le droit ! Vous êtes vous aussi soumis à la Constitution ! Vous n'avez pas le pouvoir de faire ce que vous affirmer !

Tentez de m'en empêcher. Vous ne pouvez pas. Le peuple me soutien, il me donnera raison. Il vous condamnera. Vous avez trop longtemps profité de votre poste pour lui cracher dessus. Maintenant travaillez pour lui.

Une vingtaine de soldats de la Militärpolizei pénètrent dans le bâtiment, arrêtant les deux-cent-vingt-quatre députés ayant eu la malchance d'entendre leur nom, les emmenant dans des fourgons jusqu'à la commissariat. De là, ils les trierons et les répartirons dans les différents camps de travaux forcés dispersés à travers le pays. Ils travailleront pour l'État qu'ils ont trahis, ou plutôt, ils travailleront pour un tout nouvel État : un État Nouveau.
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Un nouvel étendard.

Depuis le 24 Février, jour de la proclamation de l'État Nouveau, la Rimaurie ne disposait plus ni de drapeau ni de devise ni d'hymne, tout ses symboles ayant étés reniés et bannis le jour même, marquant ainsi la rupture entre l'État de Rimaurie décadent et l'État Nouveau régénéré. Cependant, une nation, un peuple quel qu'il soit, a besoin d'un étendard sous lequel se rassembler, une devise à laquelle se rattacher, un hymne à chanter. Ainsi, les penseurs kohlistes de toute la Rimaurie s'étaient rassemblés pour imaginer le drapeau Rimaurien de l'avenir, concentrant l'essence même de l'Idéologie Nationale Kohliste et le sang du peuple Rimaurien en un seul emblême.

Le 20 mars, après presque un mois passé sans qu'aucun fanion n'eu flotté au vent sur les façades des immeubles et dans les rues de toutes les grandes villes du pays, une nouvelle bannière était proposée au Führer lui même, seul homme assez clairvoyant pour juger de sa dignité et de son droit de représenter la patrie Rimaurienne devant le monde entier.


Drapeau de l'État Nouveau de Rimaurie

Accompagnée de celle-ci se trouvait une note explicitement sa forte symbolique.

Sur un fond aussi sombre que l'obscurantisme qui enveloppe le monde et aveugle les hommes, une croix d'or et de sang, symbole des peuple scandinaves en général et du peuple Rimaurien en particulier, couleurs respectives des anciens royaumes fondateurs de Forren et d'Hagkrona, éclaire le monde comme les Rimauriens au sang nordique libéreront le monde de ses maux en lui apportant la lumière de l'Idéologie Nationale Kholiste. L'écu Rimaurien, dont le taureau noir symbolise la force et l'insoumission de la population Rimaurienne, protège le peuple et sa mission face à tout ceux qui viendraient les menacer.

Au dessus de cette croix, haut et majestueux, moralement supérieur au peuple Rimaurien lui même, s'élève un phénix de feu, symbole même de la régénérescence et de la reconstruction par les flammes et les cendres que la Révolution Nationale propose, dont les deux têtes, regardant respectivement le passé, et donc l'héritage des anciens Rimauriens, et l'avenir, et donc l'espoir de voir un jour triompher le Kohlisme à l'échelle mondiale, représentent magistralement l'intemporalité de l'idéologie kohliste, traversant les âges sans jamais faiblir depuis déjà des siècles et pour tout autant sinon plus à venir encore.

Au cœur de ce phénix, au centre de ses amours et de ses convictions : l'Étoile Kohliste, symbole déjà ancien du Kholisme lui même emplie de symbolique.

Étoile Kohliste

D'une couleur rouge comme le sang versé et à verser pour la Révolution Kohliste, ses trois branches symbolisent à la fois les quatre grands principes du Kohlisme (l'Homme Régénéré, la Révolution Civilisationelle, l'Égalité Imposée et la Paix Mondiale), les trois qualités primordiales de l'Homme Régénéré (Obéissance, Pragmatisme, Humanisme et Primitivisme), les étapes de la Révolution Civilisationelle et de l'Égalité Imposée (égalité économique, égalité éducationelle, égalité politico-juridique et égalité morale), les quatre ordres économiques (ouvriers agricoles, ouvriers industriels, intellectuels et militaires), les quatre grands ennemis (Communisme, Républicanisme, Anarchisme et Capitalisme)... Au centre de l'étoile, le poing fermé et noir de suie et de boue expose la volonté du peuple travailleur : l'avènement du Kohlisme.

La symbolique de ce drapeau plu apparemment au Führer si bien qu'il s'empressa à peine sa lecture achevée d'ordonner à son secrétaire de le proclamer comme le nouvel étendard de la patrie Rimaurienne et d'organiser sa production en masse et d'en pavoiser tout les lieux désormais vidés de pavillon.
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Voir le monde.

L'État Nouveau étant désormais établi, son gouvernement avait désormais la lourde tâche de redéfinir la ligne géopolitique du pays, celle-ci s'étant révélée jusque là peu efficiente comme peut l'en attester les récents déboires avec le Jashuria et ses soutiens lors de la Crise du Chandekolza ou les moins récentes tensions avec la République Fédérale de Tanska en 2013 puis la Loduarie Communiste en 2014 et inversement les alliances peu concluantes contractées avec l'Empire de Karty ou l'ex-République de Kartvélie notamment.

Un travail d'importance capitale pour l'avenir de la diplomatie Rimaurienne dont les plus hauts dignitaires du régime Kohliste, parmi lesquels le Führer Friedrich Sattler, son plus proche conseiller Arnold Schottel, le Ministre des Affaires Étrangères Emanuel Wölfflin ou encore Armin Tiedemann, représentant du Front Nationaliste au Parlement, allaient poser les fondations en cet après-midi du 21 Mars 2015.


Friedrich Sattler : Messieurs, nous sommes ici réunis pour rien de moins que redéfinir la ligne diplomatique générale de l'État Nouveau et les relations qu'il entretiendra avec certaines nations en particuliers. Comme vous le savez certainement, ces bientôt deux ans d'ouverture sur le monde ne nous ont jusque là pas étés des plus lucratifs, nous croyions que la diplomatie et la fin de l'isolement nous permettrait de nous rapprocher de précieux alliés et partenaires qui sauraient nous soutenir de leurs moyens économiques et militaires afin d'un jour enfin permettre l'avènement de la Révolution Civilisationnelle Kohliste. Nous nous sommes trompés, nous n'avons rencontrés que des puissances fondamentalement hostiles à nos principes et nos valeurs, des pays qui nous ont menacés pour le seul motif de notre existence, des pays qui nous ont agressés pour nulle autre raison que notre refus de nous soumettre à leur volonté, des pays qui ont tout fait pour nous humilier nous, notre peuple et notre pays.

Ainsi, voilà ce que je propose : ramener notre diplomatie à des contacts avant tout Eurysien, nous n'avons à ce jour clairement pas les moyens matériels, humains et économiques pour nous lancer dans une politique mondialisée. Il faut que nous revenions à l'essentiel, à ce qui est à notre portée.

Arnold Schottel : Je pense qu'il faut aller encore plus loin qu'un retour à la seule Eurysie, Mein Führer. Je pense que, pour notre sécurité, nous devons couper tout lien avec le monde extérieur si ce n'est des relations économiques limitées à nos voisins, nordiques ou Eurysiens selon la taille que nous attribuons à notre voisinage. Je pense qu'il faut revenir à l'isolationnisme complet tel que défendu par feu le Glorieux Général Sprecher, votre prédécesseur. Après tout, l'État de Rimaurie, s'il était effectivement bien moins puissant qu'aujourd'hui, est resté ignoré des puissances étrangères mêmes voisines pendant cinq décennies malgré son attachement au Kohlisme, une idéologie incompréhensiblement reniées par la très grande majorité des États qui couvrent notre monde grâce à une politique de neutralité et même de pur isolationnisme.

Nous nous sommes offerts au monde mais le monde n'a pas voulu de nous. Il nous a humilié, menacé, souillé. Nous n'avons pas besoin de ce monde, nous devons le renier.

Emanuel Wölfflin : L'isolationnisme comme le préconisait Sprecher ne me semble pas être une idée judicieuse d'autant plus lorsque nous possédons déjà des ennemis qui ne se priverait pas de profiter de notre manque de partenaires fiables pour agresser notre pays et renverser notre régime. Non, il me semble que si limiter nos interactions à des États majoritairement Eurysiens est une bonne chose, il n'est pas nécessaire d'aller plus loin et j'oserais même dire que ce serait aller encore trop loin. Abandonner toutes nos relations diplomatiques avec les pays non-Eurysiens serait absurde et ne nous serait aucunement profitable. Je propose donc d'effectivement recentrer notre politique internationale sur les intérêts de notre nation en priorité, de nous rapprocher de nos voisins Eurysiens dans leur ensemble afin de se poser en puissance diplomatique Eurysienne et exclusivement Eurysienne et de n'intervenir en dehors du continent que de façon limitées et, de préférence, diplomatique afin de ne pas répéter nos erreurs du Jib-Outhi et de ne pas froisser à nouveau une puissance contre laquelle nous n'aurions aucun moyen de lutte.

Friedrich Sattler : Pourriez vous être plus clair ? Qu'entendez vous par "n'intervenir en dehors du continent que de façon limitée et diplomatique" ?

Emanuel Wölfflin : Eh bien je pense que nous devrions retenir les leçons de l'échec de l'intervention en Ramchourie et la Crise du Chandekolza avec le Jashuria qui en a découlé à savoir de ne plus intervenir dans les affaires internes d'États, aussi lointain d'autant en plus lorsque cet État connait une importante guerre civile, mais de plutôt privilégier des partenariats équitables, économiques voire militaires tant que cela ne présente aucun risque de nous attirer les foudres des puissances locales, et exclusivement de façon diplomatique sans essayer d'exercer la moindre influence sur la marche que ces pays devraient suivre ni soutenir des groupes internes favorables à notre régime.

Nous ne sommes pas près pour une politique mondialisée, nous devons le reconnaître, nous devons arrêter d'agir aussi naïvement et patienter. Notre heure viendra, mais pas maintenant.

Friedrich Sattler : Cela me semble en effet être la meilleure solution qui s'offre à nous. Qu'en pensez vous Tiedemann ? On ne vous entend pas beaucoup.

Armin Tiedemann : Quoi qu'il arrive, quoi que vous pensez être le plus juste, je me plierais à votre volonté, Mein Führer. Toujours.

Friedrich Sattler : Je suis heureux de l'entendre, Tiedemann. Votre loyauté vous honore. Et vous Schottel, avez vous quelque chose à ajouter ?

Arnold Schottel : Non, Mein Führer, je suivrais votre volonté jusqu'au bout.

Au fond, Schottel semblait déçu que le Führer priviligiait les propositions d'un simple ministre plutôt que les siennes, lui qui avait pourtant été le bras droit de Sprecher avant même que le nom de Friedrich Sattler ne soit connu, lui qui aurait dû être son héritier légitime. Enfin, il ne pouvait pas s'opposer à la volonté du Führer.

Friedrich Sattler : Bien, maintenant la question est de savoir de quels types de régimes devrions nous essayer de nous rapprocher, quelles idéologies devrions nous soutenir. Vous avez des propositions messieurs ?

Armin Tiedemann : Eh bien je pense tout d'abord que nous devrions arrêter tout rapprochement avec les régimes trop démocratiques et libéraux, d'autant plus quand ils sont dirigés par capitalistes exacerbés comme c'est le cas dans de trop nombreux pays, nous avons bien vue qu'en plus d'aller à l'encontre de nos valeurs, nos quelques relations avec des nations se déclarant démocratiques et libérales ne nous ont rien apportés d'autre que de faux espoirs comme le démontre parfaitement les retournements de veste de l'Empire de Karty et du Nordfolklande qui, se déclarant démocratiques alors qu'ils ne le sont aucunement, n'avaient d'autre ambition que de renier leurs propres valeurs pour leur profit personnel et égoïste, abandonnant de fait ce qu'ils avaient construits pour devenir ce qu'ils détestaient ouvertement il y'a de cela quelques mois à peine.

Je recommande donc de n'effectuer des rapprochements diplomatiques qu'avec les puissances fermement autoritaires et stables, partageant nos valeurs anti-libérales, anti-capitalistes et anti-anarchistes.

Emanuel Wölfflin : Monsieur Tiedemann, vous semblez oublier que ces États dont vous parlez, à savoir l'Empire de Karty et le Royaume de Nordfolklande, ne se cachaient justement pas de leur autoritarisme, de leur nationalisme acerbe et de leur anti-communisme jusqu'à récemment. Alors si nous aurions pu aisément prévoir ce retournement de situation, l'Empire de Karty étant depuis longtemps réputé pour l'instabilité et l'inconstance de sa politique étrangère autant que l'aléatoire de sa politique interne, là est la preuve que des États proches idéologiquement de notre fière nation peuvent, du jour au lendemain et sans aucune explication, prendre un virage à 90° et mettre définitivement fin à nos partenariats.

Il ne nous est donc à mon sens aucunement profitable d'aligner notre politique sur les corrélations idéologiques que nous pourrions rencontrer avec d'autres nations, celles-ci ne pouvant qu'être superficielles tant l'Idéologie Nationale Kohliste, pourtant supérieure à toute autre et en tout point, trouve du mal à se faire une place dans l'horizon politique des différents peuples qui parsèment notre planète. Je préconise de plutôt privilégier nos rapports diplomatiques en fonction de ce que chaque État peut nous apporter plutôt que nos accointances idéologiques.

Arnold Schottel : Vous avez peut-être raison, Monsieur Wölfflin, nous ne devrions pas nous rapprocher exclusivement d'États proches de notre idéologie puisqu'aucun ne l'est. En revanche, si nous devrions effectivement juger les autres nations avant tout sur ce que nos partenariats peuvent nous apporter, il n'est à mon sens pas question d'avoir le moindre contact avec nos ennemis naturels que sont les communistes, les capitalistes et les anarchistes. Il n'est pas question de supporter des États aussi ignobles et barbares que ceux-ci. Il n'est pas question de financer les excès, les abus et l'impérialisme de ces puissances. Quant aux démocraties, aux pays nationalistes, aux nations monarchiques, ennemis de moindre importance de notre idéologie, un rapprochement limité pourrait être envisageable, ceux-ci n'étant pas fondamentalement opposés à nos principes égalitaristes et humanistes.

Friedrich Sattler : Vous avez raison, Schottel, il est hors de question d'initier le moindre rapprochement avec les nations communistes ou anarchistes, celles-ci étant de toute façon déjà résolument hostiles à notre pays. En revanche, je soutiens la position de monsieur Wölfflin concernant nos relations : oui, nous devrions privilégier nos intérêts et donc ce que les autres pays peuvent nous apporter, que ce soit un soutien économique, scientifique, diplomatique ou militaire. Il nous est ainsi laissé le choix de nous rapprocher des puissances capitalistes, celles-ci étant, bien qu'absolument condamnables et ignobles dans leurs méthodes et leur doctrine économique fondées sur l'inégalité et les luttes intestines entre classes sociales, restent encore aujourd'hui très majoritaires dans notre monde. C'est malheureux mais si nous voulons espérer voir un jour triompher la Révolution Kohliste à l'échelle mondiale, nous n'avons d'autre choix que d'ignorer ces immondices pour nous trouver des alliés solides.

Nous n'avons pas choisi de naître dans un monde capitaliste et outrancièrement libéral. Ce sont les règles qui nous ont étés imposées, nous ne pouvons rien faire d'autre que les suivre. Mais un jour, nous réécrirons ces règles, je vous le garantis.

Bien, maintenant que nous avons redéfinis les grandes lignes de notre nouvelle diplomatie, il est temps de rentrer dans les détails : quel sera l'avenir de nos relations actuelles ? J'aimerais, si vous le voulez bien, entendre vos propositions concernant l'Empire de Karty, messieurs.

Arnold Schottel : Je pense sincèrement que la position que l'État Nouveau devrait adopter vis à vis de Karty ne devrait même pas être sujet à débat. Cette nation que nous croyions être notre allié, que nous croyions partager nos convictions et nos valeurs, ne s'est montré qu'un échec complet qui ne nous a strictement rien apporté si ce n'est la honte de nous associer à un pays aussi corrompu dirigé par des hommes aussi égocentriques qu'ils sont pathétiques comme le montre simplement la destruction d'appareils Kartiens par l'aviation Loduarienne en Océan d'Espérance qui aurait pu être facilement éviter en mettant de côté la fierté des officiers Kartiens pour privilégier la sécurité de leurs propres forces en acceptant l'interception Loduarienne. Mais non, le Gouvernement Kartien a préféré laisser mourir une quinzaine de leur pilote par pure ego. À quoi pensaient les autorités militaires Kartiennes lorsqu'elles ont ordonnées à leur poignée d'avions d'affronter toute une armée composée de navires et de dizaines de chasseurs bien plus performants ? C'était de la pure stupidité ! Et pire encore, non content de donner des ordres aberrants à ses hommes et de les envoyer à une mort certaine, le Gouvernement Kartien, tout aussi responsable de ce massacre que la Loduarie, chose qu'il m'est je vous l'assure douloureux à dire, a préférer rejeter sa seule faute sur l'organisation dont il était lui même à l'origine, le Bloc Nationaliste Eurysien, et sur nous même, l'État de Rimaurie.

Alors que nous avions affirmés notre alliance avec l'Empire de Karty, alors que nous avions acceptés de former le BNE malgré la stratégie diplomatique incompréhensible de l'Empire, déjà connue et reconnue à l'époque, alors que nous avions mis fin à notre partenariat avec l'Union Économique Eurysienne afin de témoigner notre soutien lorsque Karty en était exclu, alors que nous avions jurés de le suivre dans ses velléités guerrières absurdes, alors que nous étions parfaitement près à lui venir en aide lorsque celui-ci était agressé malgré le risque évident que cela faisait peser sur notre nation, nous n'avons étés récompensés de notre loyauté que par du mépris, du dégoût et des insultes ! Il a mit fin à une alliance dont il était lui même à l'origine au motif des maux qu'elle lui aurait soit-disant apportée alors que lui seul en est responsable ! Il nous a trahis ! Nous avons tout fait, tout sacrifier pour l'Empire de Karty et il ne nous a récompensé qu'en nous humiliant, en nous accusant de ses échecs dont lui seul avait la responsabilité ! L'Empire de Karty, cette nation de guignols dirigée par des bouffons en costume ne nous mérite pas, nous n'avons plus rien à faire avec lui, nous devons le renier, ne plus jamais tenter le moindre rapprochement, ne plus jamais accepter le moindre partenariat, ne plus jamais lui apporter la moindre aide qu'importe le mal qui le frappe. J'irais même jusqu'à dire que son effondrement, sa misère, sa destruction totale ne me ferais pas sourciller une seule seconde, elle me réjouirais même au plus haut point pour ne rien vous cacher !

Armin Tiedemann : Je suis parfaitement d'accord avec vous, Monsieur Schottel, l'existence même de Karty est une honte, c'est une verrue en Eurysie, un bouton purulent sur la face du monde. Pour tout vous dire, ma haine de Karty est désormais encore plus forte que celle que j'éprouve envers la Loduarie. J'irais jusqu'à dire que l'annihilation de Karty est désormais un devoir, nous devons venger notre honneur souillé par cette vermine, nous brûler l'élite corrompue de cette monarchie décadente et, de ses cendres, y bâtir quelque chose de meilleur. Karty doit payer pour sa trahison.

Friedrich Sattler : Vous m'avez l'air en colère, messieurs, mais je dois avouer que je ne peux que vous comprendre. L'Empire de Karty, ou l'autoproclamé Saint Empire comme il se nomme eux même par fierté et vraisemblablement sans aucune idée de ce que le terme Saint Empire peut bien vouloir dire, dirigé par de parfaits attardés à la stratégie politique intérieure comme extérieure parfaitement incompréhensible, pour ne pas dire purement stupide, ne peut désormais plus être considéré comme un partenaire fiable tant l'inconsistance de sa diplomatie, basculant de l'alliance et de l'amitié au mépris et à l'hostilité du jour au lendemain et sans aucune raison, nous parait aujourd'hui plus qu'évidente. Nous ne pouvons donc pas nous permettre de risquer un nouvel échec en tentant un nouveau rapprochement. Pire que cela, nous devons, comme vous l'avez très bien dit, ne plus rien avoir à faire avec cette nation pestilente, ramassis d'hommes désormais définitivement vidés de bon sens, en admettant qu'il ait déjà été familier avec ce terme. Nous devons refuser systématiquement toute nouvelle proposition quelle qu'elle soit de la part de l'Empire de Karty et ne plus jamais le contacter pour aucune raison. Nous devons l'ignorer, l'effacer de nos cartes, le bannir de notre histoire. Karty doit disparaître de Rimaurie, pour toujours.

Vous avez quelque chose à rajouter Wölfflin ?

Emanuel Wölfflin : Non, Mein Führer. Je n'ai à redire.

Friedrich Sattler : Très bien, maintenant passons sans plus tarder au pays suivant : la Kartvélie. Comme vous le savez sans doute, la République de Kartvélie, anciennement un allié proche au sein du Bloc Nationaliste Eurysien, s'est effondrée le mois dernier suite à des émeutes pilotées par le renseignement Estalien et un Coup d'État militaire anarcho-communiste supporté là encore par les forces armées Estaliennes. Le régime républicain, allié de notre pays et de notre cause, a laissé place à un régime fantoche communaliste et husakiste pro-Estalien dirigé depuis Mistohir, autant dire que la reconnaissance de ce régime illégitime n'est pas à l'ordre du jour et que son renversement ne saurait que nous être profitable. Ainsi j'écoutes vos propositions : quelle position adopter vis à vis de la Kartvélie, que ce soit l'ancien régime ou le nouvel état fantoche, et surtout quelle position adopter vis à vis de l'Estalie ?

Pour ma part, je pense qu'une confrontation directe avec l'Estalie ne nous serait pour l'heure tout simplement pas possible, celle-ci étant dotée d'une armée convenable rivalisant apparemment avec nos forces, sans compter l'importance de ses moyens économiques lui permettant certainement de se militariser en cas de crise bien plus rapidement que la Rimaurie, ainsi que le soutien éventuel qu'elle tirerait de l'Union Internationale du Communisme et du Socialisme dont elle est membre et notamment de la Loduarie, bien que cette organisation ne constitue nullement une alliance militaire. Cela dit, si une neutralité apparente envers l'Estalie me semble le plus sage, nous pourrions éventuellement intervenir de façon officieuse dans le pays en soutenant divers partis ou mouvements anti-Estaliens, bien que la faiblesse de nos renseignements actuels ne nous le permette pas pour l'heure.

Arnold Schottel : Je ne vois rien à redire à vos propositions, Mein Führer, la République de Kartvélie était un allié loyal et solide et nous n'avons pas étés en capacités d'assurer sa défense tant son effondrement a été brusque. Il est donc de notre devoir de tout faire pour chasser les envahisseurs Estaliens et les putschistes husakistes de son territoire souverain, légitime et internationalement reconnu et de rétablir la République. Ainsi, le soutien et la coordination des organisations politiques mais plus probablement des groupes armés farouchement anti-estaliens, anti-husakistes et anti-anarchistes en général tout en privilégiant particulièrement ceux d'entre eux qui partagent au moins partiellement notre idéologie, afin de conduire à une contre-révolution et à l'établissement d'un régime kohliste pro-Rimaurien que nous contrôlerions au mieux ou à une nouvelle République anti-communiste et alliée à la Rimaurie au pire. Je suis parfaitement conscient de la faiblesse de nos services de renseignement en comparaison des services Estaliens ainsi une première étape à ce projet serait d'accueillir sur notre territoire des dissidents et autres opposants Kartvéliens au régime communaliste, de préférence jouissant déjà d'une certaine reconnaissance dans leur pays, afin de former un gouvernement en exil sous notre contrôle, permettant de fédérer l'opposition Kartvélienne sous celui-ci.

Friedrich Sattler : Un gouvernement en exil ? Cela me semble être une bonne idée et facilement réalisable qui plus est. Nos services étudierons cette question. Ainsi, si vous n'avez plus d'autre proposition concernant la Kartvélie je vous propose de passer à la suite. Personne ? Bon.

Vient ensuite la question de l'Empire Menkelt et du Bloc Nationaliste Eurysien dont il est, avec nous, le seul membre restant.

Emanuel Wölfflin : Je pense que le simple fait que Menkelt n'ait pas quitté le Bloc Nationaliste Eurysien malgré le départ de Karty puis du Nordfolklande et la chute de la République de Kartvélie devrait nous le faire considérer comme un allié fiable, loyal et durable. Ainsi je vous proposes de poursuivre notre rapprochement diplomatique initié par notre intégration commune au Bloc Nationaliste Eurysien par l'établissement de partenariats économiques, militaires et éventuellement scientifiques et académiques solides. L'Empire Menkelt nous a prouvé que nous pouvions compter sur lui et je pense que nous avons là la possibilité d'en faire notre meilleur allié en Eurysie, bien que ses valeurs résolument théistes, conservatrices, nationalistes et monarchistes ne coïncident que très peu avec l'Idéologie Nationale Kohliste dont l'égalité est au fondement même.

Quant au Bloc Nationaliste Eurysien qui, comme vous l'avez bien fait remarquer, ne compte désormais plus que deux membres, l'État Nouveau de Rimaurie et le Saint Empire Menkelt, et se rapproche de fait pour l'heure plus d'un traité bilatérale que d'une véritable organisation internationale ou même régionale comme nous l'avions pensée à l'origine, il me semble qu'une rencontre entre des délégations Rimauriennes et Menkiennes afin de redéfinir les axes de développement et les principes idéologiques de l'alliance et potentiellement réécrire son traité fondateur nous serait fortement profitable, permettant de fait de relancer l'organisation sur les chapeaux de roues, d'attirer de nouveaux membres selon des règles nouvellement définies selon notre volonté, nous étions par exemple opposés à l'impossibilité pour un parti politique ou pour un État non-Eurysien d'intégrer l'organisation, nous avons désormais les moyens de changer cela.

Arnold Schottel : Ce que vous proposez m'a l'air très intéressant mais pensez vous qu'il soit réellement utile de nous attacher à ce point à cette organisation qui ne nous a pour l'heure été que très peu profitable, d'autant plus que celle-ci prote encore l'héritage honteuse de la perfide Karty qui en était l'un des membres fondateurs. Ne serait-il pas mieux de nous concentrer sur notre relation bilatérale avec l'Empire Menkelt qui me parait bien plus prometteuse ? Car après tout, la Rimaurie a récemment intégrée la nouvellement formée Ligue de Velcal, assurant déjà de fait notre protection, alors qu'avons nous à gagner à intégrer une organisation supranationale limitant notre souveraineté au profit d'États ne partageant pas nos principes s'ils n'y sont pas tout bonnement hostiles.

Friedrich Sattler : Si je vous suis bien, Schottel, vous voulez quitter le Bloc Nationaliste Eurysien. C'est cela ? Et bien je pense que c'est une terrible idée, nous pourrions bien au contraire, comme l'a suggérer monsieur Wölfflin, réformer l'organisation, en collaboration bien sûr avec le Saint Empire Menkelt, afin de le rendre plus conforme à nos attentes et à nos intérêts plutôt qu'en ceux de l'Empire de Karty ou de l'ex-République de Kartvélie. Le Bloc Nationaliste Eurysien pourrait même devenir un moyen pour nous d'influence les éventuels futurs États ou partis membres de moindre importance pour les conformer à notre idéologie et en faire des moteurs de diffusion du Kohlisme à l'échelle Eurysienne voire mondiale. Nous n'avons pas besoin d'abandonner le Bloc Nationaliste Eurysien, notre création. Nous pouvons au contraire profiter du départ de Karty et de la chute de la Kartvélie pour la remodeler à notre image.

Quant à Menkelt, une coopération plus poussée en dehors du cadre du BNE me semble plus qu'envisageable autant que bénéfique pour nos deux nations. Nous penserons donc à initier un rapprochement plus poussé. Vous avez d'autres suggestions ? Non ?

Bien, puisque cette question est désormais réglée, nous pouvons parler, si vous le voulez bien, du problème Ramchoure. Comme vous le savez certainement, l'État de Rimaurie avait promis son soutien à l'Empire Ramchoure, faction belligérante souhaitant établir une monarchie absolue et centralisée et donc un état autoritaire et stable comme nous le préconisons. Nous avions donc envisagé un soutien matériel au mouvement par le biais d'une livraison d'armes depuis notre base au Chandekolza, livraison interceptée par l'armée Jashurienne et désormais rendue impossible. Ainsi, il me semble que notre relation avec l'Empire Ramchoure, toujours gardée secrète, soit maintenant compromise au vu de notre incapacité désormais claire à lui venir en aide. Aussi, comment devrions nous procéder avec l'Empire Ramchoure ? Quelle direction prendra nos relations ?

Armin Tiedemann : Nous nous fichons de ce que peuvent bien faire ou penser les Jashuriens ! Nous avons promis de venir en aide à l'Empire Ramchoure et nous le ferons, qu'importe les risques ! Je propose l'envoi d'un nouveau convoi armé mieux protégé. Le Jashuria impérialiste n'a pas à nous dicter notre conduite !

Emanuel Wölfflin : Monsieur Tiedemann, ayez un minimum de bon sens, nous ne sommes absolument pas en mesure de rivaliser avec le Jashuria et surtout pas sur le plan militaire. C'est triste à dire mais nous sommes pieds et poings liés, nous n'avons nullement les moyens de soutenir l'Empire Ramchoure de quelque façon que ce soit. Ainsi, je propose de tout simplement rompre notre relation avec cette faction et de garder nos communications passées strictement confidentielles, nous ne voulons pas nous attirer les foudres des autres puissances l'ayant combattue ou du futur gouvernement unifié si celui-ci n'est pas dirigé par l'Empereur Sue, chose qui semble aujourd'hui des plus probables.

Friedrich Sattler : Vous proposez donc d'abandonner l'Empire Ramchoure, de rompre la promesse que nous lui avons faite, de renier nos idéaux ?

Emanuel Wölfflin : C'est difficile je le conçois, honteux même, mais que voulez vous bien faire face à la puissance Jashurienne ? Nous n'avons aucun moyen de venir en aide à l'Empire Ramchoure, croyez bien que j'en suis autant attristé que vous. Ce n'est ni un choix ni une volonté, nous ne pouvons tout simplement rien faire.

Arnold Schottel : Je ne peux que soutenir monsieur Wölfflin sur ce sujet, Mein Führer, nous ne pouvons rien faire pour soutenir l'Empire Ramchoure. C'est comme ça.

Friedrich Sattler : Soit, soit, je suivrais vos conseils, l'État Nouveau n'entretiendra désormais plus aucune relation avec l'Empire Ramchoure et n'interviendra plus d'aucune manière dans le conflit civil en Ramchourie. Ainsi soit-il.

Mais abordons la question du Jashuria et du Chandekolza puisqu'elle est intrinsèquement liée à notre implication en Ramchourie. Comment devrions nous aborder le Jashuria à l'avenir ? Quel sera l'avenir de nos relations avec le Chandekolza et de notre base militaire sur son territoire ? Je pense qu'ils serait préférable d'éviter une nouvelle confrontation avec le Jashuria et donc de ne plus intervenir dans les affaires Nazuméennes afin d'éviter toute montée des tensions qui ne nous serait aucunement profitable. En revanche, si nous devons effectivement éviter à l'avenir de nous impliquer à nouveau au Nazum, qu'en est il de notre base de Jib-Outhi au Chandekolza ? Devrions nous la conserver ou rapatrier nos forces ?

Arnold Schottel : La base de Jib-Outhi, en plus d'être sous la menace constante d'une reprise de la crise avec le Jashuria qui y est également présent et s'y est déjà montré hostile, ne nous est désormais plus d'aucune utilité maintenant que notre soutien à l'Empire Ramchoure n'est plus et que nous avons pris la décision de ne plus intervenir au Nazum. Elle constitue de plus une perte de moyens parfaitement inutile pour nous via la location de son terrain au Royaume Démocratique du Chandekolza et nous apporte également d'importante complication logistique pour la relier à notre pays. Ainsi, en cumulant le coût et la pure inutilité de cette installation, je propose sa complète fermeture.

Emanuel Wölfflin : Il me semblerait plus judicieux d'au contraire maintenir cette installation autant par respect envers notre accord avec le Jashuria, prévoyant notamment le dédoublement de l'aide humanitaire au Chandekolza, que pour notre crédibilité internationale, l'image d'un pays humaniste et pacifiste qui, malgré les menaces des puissants, continu de soutenir les faibles quoi qu'il en coûte, quel que soit le risque. J'ajouterais également que cette base nous garanti un allié et qu'un allié nous sera toujours bénéfique et n'est pas à jeter et que cette base, si elle ne nous est pour l'heure que peu utile, pourrait se révéler à l'avenir un élément indispensable dans le cas d'une reprise, certes probablement lointaine, de nos opérations au Nazum.

Quant au jashuria, je pense qu'effectivement une politique de neutralité serait pour l'heure la meilleure des options qui s'offrent à nous aujourd'hui.

Friedrich Sattler : Très bien, nous conserverons donc la base de Jib-Outhi pour le moment mais un plan de rapatriement sera quand même préparé. Des objections ?

Armin Tiedemann : Je pense que tout a été dit, Mein Führer.

Friedrich Sattler : Bien. Ensuite, concernant la Transblêmie, allié potentiel avec qui nous entretenons pour l'heure une relation assez vague mais prometteuse. Je pense tout d'abord que la nature résolument absolutiste et anti-communiste de son gouvernement, nature que nous partageons, devrait nous pousser à entretenir des relations plus que cordiale voire une alliance en bonne et due forme mais néanmoins discrète et même secrète, la Transblêmie étant très mal vue de l'étranger, notre relation avec elle risquerait de nous apporter l'hostilité immédiate de la majeure partie des nations du globe.

Arnold Schottel : Je dois vous avouer que je ne suis pour ma part pas familier avec la Transblêmie et, si une alliance avec ce pays me semble parfaitement envisageable au vu de nos premiers rapports et de nos systèmes politiques autoritaires plus ou moins proches, il m'est difficile de voir ce qu'elle pourrait concrètement nous apporter si ce n'est les foudres de tout ses ennemis et Dieu sait qu'ils sont nombreux.

Emanuel Wölfflin : Je suis pour ma part plutôt d'accord avec monsieur Schottel. Si un rapprochement avec la Transblêmie, idéologiquement concordante avec notre pays, parait à première vue une bonne idée, j'avoue avoir du mal à voir en quoi cela serait bénéfique à notre nation, le pays étant très fermé je doute que nous puissions y exercer la moindre influence malgré une relation très proche et son armée, malgré une infanterie puissante et nombreuse, resterait globalement très faible dans le cas d'un conflit en dehors de ses frontières.

Friedrich Sattler : Bon, je pense que l'on peut considérer la question de nos relations avec la Transblêmie comme en suspens pour le moment. Ensuite, qu'en est-il de la toute nouvelle Ligue de Velcal dont la Rimaurie est l'un des membres fondateurs ? Je pense personnellement que celle-ci n'est à l'origine rien de moins qu'un outil permettant à la Grande République de Velsna de facilement se faire des alliés comme en atteste l'antiprosélytisme et la neutralité idéologique défendue par celle-ci, lui permettant d'attirer n'importe quel pays peu importe son système ou les valeurs qu'il défend, et son opposition formelle aux grandes organisations internationales que sont l'Organisation des Nations Commerçantes, l'Organisation des Nations Démocratiques et l'Internationale Libertaire, preuve évidente que cet antiprosélytisme n'est que superficiel et que Velsna ne cherche qu'à se protéger de ces alliances qu'elle croit menacer ses intérêts personnels. Comment expliquer autrement l'absence de la Loduarie, pourtant nation impérialiste et agressive par excellence, parmi les cibles de la Ligue ?

Emanuel Wölfflin : Heureusement que nos représentants ont pu ramener la Ligue sur le droit chemin en initiant, conjointement avec ceux de Guadaires et de Gallouèse, la suppression totale de la liste des alliances contre lesquelles s'applique le traité fondateur pour le rendre actif contre n'importe quel État. Autrement, j'aurais été parfaitement incapable de comprendre l'intérêt que nous aurions à rejoindre une organisation tournée spécifiquement contre des alliances qui ne nous menacent pas.

Friedrich Sattler : Oui, c'était du bon travail, de même que l'automatisation des interventions de la Ligue. Nous avons réussi à transformer une alliance de vassaux de Velsna tournée exclusivement contre ses ennemis personnels en une véritable organisation juste pour chacun de ses membres et surtout plus apte à répondre à nos attentes, soit nous protéger de la Loduarie qui n'était à l'origine, je le rappelle encore une fois, pas ciblée par le traité de Velcal. Ainsi si la Ligue de Velcal m’apparaît pour l'heure comme un soutien fiable, je garde des suspicions quant à Velsna, son initiateur, dont la volonté de dominer et de guider la ligue pour son seul profit ne me permet pas de le voir comme un allié sur qui compter. Je suggère ainsi de soutenir pleinement la Ligue et ses interventions mais de rester méfiant quant à Velsna. Vous avez d'autre suggestion ?

Arnold Schottel : Non, je pense que tout a été dit.

Friedrich Sattler : Dans ce cas, maintenant que nous avons pu définir l'avenir de nos alliances, je vous propose, si vous le voulez bien, de discuter de nos opposants et de nos adversaires, à commencer par notre voisin, la République Fédérale de Tanska, et par ses alliés de l'Organisation des Nations Démocratiques. Cela ne vous aura pas échappé mais je tiens tout de même à le rappeler, nos deux pays ont connus, entre Juillet et Octobre de l'an 2013, une importante période de crise ayant pour cause l'opposition fondamentale de leurs idéologies respectives et notamment leurs positions concernant la peine de mort. Cette crise s'était conclue par un accord commun, conduisant principalement au retrait de toutes les forces armées des deux côtés de la frontière et à la création d'une zone tampon de vingt kilomètres de large, et un apaisement des tensions. Cependant, malgré l’apaisement apparent, une seconde période de tension, trouvant ses origines dans des articles de notre journal officiel qualifiant Tanska de République Coloniale, a débutée en 2014 et une troisième menace de se déclencher à la suite de la proclamation de l'État Nouveau et du renforcement des forces armées de la province d'Halvø, frontalière de notre pays.

Ainsi, au vu de ces crises récurrentes et ce malgré un accord d’apaisement en Octobre 2013 et une proposition de rapprochement restée sans réponse en fin d'année 2014, quelle attitude devons nous adopter envers Tanska à l'avenir ?

Armin Tiedemann : Il est clair que Tanska complote contre notre pays. D'abord un déploiement militaire à notre frontière en 2013, chose que ses diplomates ont toujours niés en déclarant que des réservistes n'étaient pas des militaires, ha ha ha, j'en ri, puis un renforcement du dispositif sécuritaire prétextant l'instabilité croissante de notre pays contre laquelle nous sommes pourtant justement en train de lutte en proclamant l'État Nouveau. Non, il est évident que Tanska n'a aucune volonté pacifique envers notre nation et qu'elle se prépare en ce moment même à débuter une invasion à grande échelle de notre territoire depuis la province d'Halvø suite à un premier échec en 2013. Il est donc de notre devoir, afin de garantir la sécurité de notre peuple et de défendre nos principes idéologiques, de rester fermes face à la menace que Tanska représente en renforçant également et considérablement notre dispositif militaire à la frontière pour parer à toute tentative d'agression contre notre pays, de la même façon que nous avions magistralement procédés en 2013.

Emanuel Wölfflin : S'il vous plait, ne nous précipitons pas. Je ne pense pas que Tanska est réellement la volonté d'envahir la Rimaurie pour le moment et si quand bien même c'était le cas, un renforcement de notre frontière ne ferait que lui offrir un argument de plus et lui permettrait de prétexter une menace de notre part pour nous agresser. Un renforcement de notre frontière comme vous le proposez ne ferait qu'ajouter de l'huile sur le feu et conduirait inévitablement à la surenchère, à une course à l'armement et à une augmentation exponentielle des forces massées à la frontière jusqu'à la guerre. Je propose donc de ne rompre le traité Tansko-Rimaurien sous aucun prétexte et donc de ne pas remilitariser la frontière mais de plutôt faiblement augmenter les forces dont nous disposons au sud de notre territoire.

La réponse devra avant tout être diplomatique. Je préconise donc de continuer sur la voie de l’apaisement diplomatique en poursuivant la tentative de rapprochement initiée en décembre 2014 afin de non seulement s'assurer de la neutralité de Tanska mais également de toute l'Organisation des Nations Démocratiques dont elle est membre. Un rapprochement au delà de la neutralité me semble cependant peu envisageable pour le moment au vu de l'importance et de la récurrence de nos tentions et de l'évidente incompatibilité et même hostilité de nos principes idéologiques respectifs.

Friedrich Sattler : Cela me semble plus judicieux en effet. Je note donc : tenter un rapprochement ou du moins un apaisement diplomatique afin de nous assurer de la non-hostilité de la République Fédérale de Tanska et de l'Organisation des Nations Démocratiques, celle-ci pouvant même à terme nous être utile dans notre combat contre la Loduarie comme en atteste l'hostilité qu'éprouve certains de ses membres à l'égard de la puissance communiste.

Enfin, pour conclure cette réunion, j'aimerais aborder rapidement la question de la Loduarie : que faisons nous ? Un rapprochement ou même un apaisement des tensions me paraissent pour l'heure inenvisageables, aussi deux options s'offrent à nous : l'attente ou l'action. Doit on foncer tête baissée et nous attaquer à la Loduarie avec tout les moyens dont nous disposons pour peut-être espérer écarter cette menacer définitivement, voire renverser le régime Lorenziste pour y établir un gouvernement fantoche dirigé par les paramilitaires fascistes qui se révoltent déjà contre les forces communistes ou doit on au contraire l'ignorer et nous renforcer en attendant d'avoir le pouvoir de rivaliser avec elle et de l'empêcher de nous nuire à nouveau ?

Cette première option me parait utopique, irréaliste. La seconde me parait déjà bien plus à notre portée. Aussi je vous propose l'attente mais soyez sans crainte, notre heure viendra.

Les quatre hommes se levèrent de leur chaise comme s'ils n'en étaient qu'un seul et, avec la mème coordination robotique, quittèrent le petit bourreau où ils avaient passés leur journée pour mettre en pratique les théories qu'ils avaient élaborés ensemble.
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Dans l'ombre, une lumière...

P'tit coin chaleureux cosy

Dans la fraîcheur du soir d'un huit Avril, une maisonnette, non, un petit cabanon de bois bordant un lac du Kanmiera län aussi obscur que la nuit, comme si le ciel nocturne s'était mêlé à l'eau stagnante, s'éclaire soudainement comme un phare au milieu des ténèbres. Profitant de la pénombre, un silhouette à peine éclairée par le clair de Lune, s'approche furtivement de la bâtisse et frappe trois coup à la porte de sapin. De l'autre côté, une voix se fait entendre.

Stemme : Giallarhorn a-t-il parlé ?

Lerke : Une fois le cor d'Heimdallr a sonné.

Stemme : Entre camarade. Tu as vu le chiffon rouge à ma porte et le feu de ma cheminée ?

Aussi silencieusement qu'elle était arrivée, la silhouette pénétrait dans le cabanon tandis que son étrange hôte éteignait la cheminée, rarement utilisée comme de nos jours, encore moins pour sa lumière, mais néanmoins une bonne alternative dans ces coins reculés encore ignorés par le progrès, loin de la fée électricité, plongeant l'édifice dans la même noirceur que celle qui les entourait, rendant la construction parfaitement invisible aux yeux des curieux les moins avisés.

Les deux hommes s’installèrent à une table petite mais pas assez pour qu'ils ne se sentent pas à l'étroit, coincés entre les quatre murs de cette insignifiante construction. Tandis que l'hôte sortait quelques bouteilles de ce qui semblait être un vin mal vieilli poussiéreuses d'un placard délabré, comme si la silhouette sortie de l'ombre même lui était familière, il reprenait la discussion de la même manière que s'il était en présence d'un ami d'enfance qu'il n'avait plus revu depuis bien longtemps.


Stemme : Installe camarade, je suis Stemme. Et toi , quel est ton nom ?

Il jeta un œil sur un morceau de papier déchiré et froissé, glissé dans sa poche. Un mot avait été griffonné à l'encre noire sur la feuille grisâtre.

Lerke : Lerke.

Stemme : Alors camarade Lerke, que m'apportes-tu comme nouvelle ? Le Führer a-t-il perdu sa tête ?

Lerke : Je ne sais pas si on peut dire qu'il a un jour eu toute sa tête mais oui. Pas de la façon qu'on aurait espéré cependant.

Stemme : Qu'est-ce qu'il se passe dans le monde civilisé, si tant est que la Rimaurie est civilisée ? Je suis allé au village et j'ai entendu dire que les parlementaires avaient étés arrêtés. Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?

Lerke : Tu n'es vraiment pas au courant ? T'as pas une radio ou un truc du genre ? Bordel, tout le monde ne parle que de ça en ce moment !

Stemme posa son verre brusquement, laissant échapper quelques gouttes d'une gnôle frelatée, tachant le bois de la table nue. Son étrange visiteur aurait pu voir son air mécontent si la complète pénombre ne le rendait pas invisible à ses yeux. Qu'est-ce que c'était que ce jeune blanc bec qu'on lui envoyait ? Il fallait l'éduquer, lui apprendre comment ça marche ici.

Stemme : Pas assez discret, la Militärpolizei surveille les ondes. Non, le seul moyen que j'ai de communiquer, c'est le bouche à oreille ou des papiers remis en main propre. Notre cause ne tolère aucune fuite, aucune erreur, ne l'oublies jamais. Personne ne doit savoir que nous existons, nous devons diffuser notre message et disparaître aussi sec, nous devons devenir des fantômes, des parias, des étrangers dans notre propre pays. Ça fait six mois que je vis dans ce taudis sans aucun contact avec le monde extérieur, à part les estafettes comme toi qui vont et viennent et un village de paysans à trois kilomètres au nord. Deux-cent-cinquante âmes, un téléphone, trois fourgonnettes, la ville la plus proche est à cent kilomètres. Sur des milliards d'être humains c'est le seul semblant de civilisation qu'il me soit donné de voir et d'apprécier. Alors, qu'est-ce qu'il se passe dans le reste du pays bon Dieu ?

Lerke : Bon, bon, ne t'énerves pas, je disais juste ça comme ça. Enfin bref. Si tu veux tout savoir, il y'a un peu plus d'un mois, le Führer a fait arrêté presque tout les parlementaires pour les envoyer au travail forcé, a dissout le Parlement, a annoncé ni plus moins que des purges du Gouvernement et de l'Armée et s'est accordé les pleins pouvoirs, de lui même et sans aucun respect pour la Constitution. Le Comité pense que les opposants au régime les moins farouches vont enfin se sentir les couilles de rejoindre la guérilla. Ton rôle, c'est de recruter des membres, de créer un réseau et de coordonner les différents groupes insurgés de la région.

Stemme acheva rapidement son verre avant de reprendre.

Stemme : Très bien.

Lerke : Tu sais comment tu vas procéder ?

Il prit une profonde inspiration.

Stemme : Ça fait des années que je fais ce boulot, bien sûr que je sais comment je vais procéder. Y'a plein d'autres estafettes qui parcourent la région et sont en contact avec les branches insurgées et avec moi. Ils viennent me voir régulièrement et je leur transmet les ordres que la hiérarchie m'a fournie par le biais des gars comme toi. Je vais commencer par trouver un jeune type bourré de bonnes intentions et d'idéologie pour lui donner la mission de recruter des volontaires et les signaler à d'autres jeunes gars tout autant bourrés d'idéologie révolutionnaire qui se chargeront de les mettre en contact avec les branches insurgées dont je te parlais.

Lerke : Attends, pourquoi t'as besoin d'autant d'intermédiaires ? Un seul gars qui ferait le lien entre toi et les groupes rebelles, ça suffirait pas ?

Stemme : Pour éviter les agents de l'État. Si l'un de nos gars se fait prendre, il ne connaîtra rien des fondements de notre organisation et ne pourra donc pas dénoncer nos camarades. Maintenir nos propres hommes dans l'ignorance, faire qu'aucun d'entre eux ne soit important à lui seul, qu'aucune perte ne conduise à notre effondrement.

Lerke : C'est horrible. Tu abandonnes tes hommes ?

C'est ça la réalité de notre guerre. Tu vois souvent les guérilleros qui affrontent les troupes fascistes en leur tendant des embuscades ou en lançant des assauts massifs sur leurs bases. On ne retient que ceux qui se font massacrer publiquement pour leur cause. C'est pour ça que tu t'es engagé pas vrai ?

Lerke : Ben...

Stemme : La vérité c'est que nous n'avons pas les moyens de nous battre et de gagner. La vérité c'est que notre lutte, notre boulot de rebelles, c'est avant tout de construire des réseaux clandestins, de nous faire des alliés, d'avoir des yeux et des oreilles partout, de trouver des armes et des hommes, de savoir à l'avance quelles seront les prochaines actions de l'Armée Nationale pour les contrer et survivre et peut-être un jour avoir assez d'alliés, d'armes et de renseignement pour, avec de la chance, parvenir à gratter une insignifiante victoire. La vérité c'est que depuis cinquante ans que nous luttons, nous n'avons rien fait, nous n'avons pas progressé.

Il y'eu un silence assourdissant pendant quelques minutes, à peine brisé par le bruit du mauvais alcool coulant dans les gorges déshydratées.

Stemme : Bon, et t'as rien d'autre pour moi ?

Lerke : Si, quelques Marks, deux-cent. Ça peut toujours servir pour corrompre quelques fonctionnaires ou recruter des gens. Ou pour payer la boulangère. Ah, et ça aussi.

Lerke sortit un papier de la poche droit de sa veste et le tendit à son interlocuteur.

Stemme : Ça veut dire quoi ça : 12-12-12-12:R23 ?

Lerke : Je n'en ai aucune idée, désolé. Il faut que tu transmettes ça à tout les chefs de réseaux. On ne m'a pas donné plus d'explications. Bon, je pense qu'il va être temps que je m'en aille.

Lerke se leva de sa chaise, prit une dernière gorgée et se dirigea vers la sortie et, alors qu'il s'apprêtait à quitter le pas de la porte, il se retourna une dernière fois vers son hôte.

Lerke : Au fait, c'est quoi ton nom ? Ton vrai nom, je veux dire ?

Stemme : Il vaut mieux que tu ne le connaisses pas. Je te l'ai déjà dit : je suis un fantôme. Mon nom ne te sera d'aucune utilité, je suis officiellement mort. C'est l'une des qualifications requises pour faire mon boulot. Question de sécurité, tu comprends ? Dans tout les cas, ce n'est pas mon nom qui importe, c'est la cause que je défend.

À ces mots, Lerke s'éloigna sans un mot de la bâtisse, disparaissant à travers la nuit, avec la même furtivité qu'à son arrivée. Le regardant disparaître lentement dans les ténèbres, Stemme réfléchissait, que pouvait bien signifier l'étrange message codé que lui a fait parvenir le Comité ? Il y réfléchira plus tard. Rallumant son feu en prévision de la prochaine visite, il y jette le petit papier, causant son irrémédiable destruction, l'éloignant définitivement des mains indésirables des ennemis de la révolution, ne lui laissant d'existence que dans sa mémoire déjà chargée.
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Malgré l'abolition (ou la suspension, rien n'est encore sûr) de la Constitution de l'État de Rimaurie suite à la proclamation de l'État Nouveau en Février, en l'absence de nouvelles directives, les institutions définies par ladite Constitution continuaient en réalité à fonctionner de la même façon à l'exception du Parlement qui avaient été vidé de ses pouvoirs (et par la même de la presque intégralité de ses membres) au profit du Führer et du Gouvernement. Ainsi, la suppression de la Constitution n'avait que peu changée la vie des Rimauriens moyens : les Gouverneurs continuaient d'exécuter la loi à l'échelle de leur Comté et les Maires à l'échelle de leur Commune, les Syndicats continuaient de surveiller les ouvriers et, en bons prosélytes, de les convaincre des biens fondés de l'Idéologie Nationale Kohliste et du Front Nationaliste et autorisaient parfois les mécontents à se mettre en grève ou à partir manifester (bien qu'il soit vrai que les manifestations déjà peu nombreuses sous la Rimaurie d'avant Février étaient devenues d'autant plus rares aujourd'hui), l'Armée et la Militärpolizei restaient omniprésentes dans les rues des grandes villes et continuaient d’enrôler en masse une jeunesse endoctrinée par cinquante années de propagande, atteignant d'ailleurs la barre des quarante-mille hommes au début du mois d'Août, l'Opération Endspiel, débutée l'année précédente, ne cessait pas malgré quelques ralentissements... En bref, la société Rimaurienne ne percevait que peu de différence entre leur vie sous l'État Nouveau et celle sous l'État "Ancien". Cela allait changer.

En effet, le 7 Septembre 2015, le Gouvernement Rimaurien se réunit une nouvelle fois afin d'établir et de proclamer une nouvelle constitution spéciale à durée indéterminée afin de juguler la crise qui touche le pays, d'éliminer les éléments nocifs des institutions étatiques, de mettre fin à la menace révolutionnaire... En bref et pour faire simple : remettre la Rimaurie sur le droit chemin de l'Idéologie Nationale Kohliste et de la Révolution Civilisationnelle en éliminant tout ce qui pourrait nuire à son grand et glorieux projet. Êtes vous prêt à endosser ces lourdes responsabilités ?


Friedrich Sattler : Messieurs. Comme vous le savez, notre Révolution Kohliste, ce projet de reconstruction nationale, avance péniblement et lentement, bien trop lentement. Il est clair que l'absence de Constitution nous ralentit fortement en obligeant les institutions politiques, en l'absence de directive plus claire, à déterminer d'elles mêmes le rôle qu'elles doivent jouer dans le fonctionnement de notre grande nation. Prenons par exemple le Parlement qui, depuis Février, ne dispose plus d'aucun pouvoir, pas même celui de consultation, et comparons le au Führer qui, concentrant tout le pouvoir législatif dans ses seules mains, doit assumer à lui seul l'écriture de l'intégralité des lois de notre pays. Une tâche bien trop importante pour un seul homme vous ne pensez pas ? Cette situation ne peut plus continuer ! Il est grand temps de proclamer une nouvelle constitution en commençant par redéfinir les pouvoirs du chef de notre pays : moi.

Tout d'abord, compte tenu de la corruption omniprésente parmi les plus hautes sphères de notre régime et de la collusion entre certains de nos plus proches collaborateurs avec l'ennemi anarchiste, le système de particratie mis en place par feu mon prédécesseur, le regretté Leonhard Sprecher, a nettement démontré ses nombreux dysfonctionnements et prouvé sa totale obsolescence. De ce fait, le pouvoir doit rester concentré dans les mains d'un nombre réduit à une poignée d'individu si ce n'est un seul homme fort.

Armin Tiedemann : Hmmm... Et que proposez vous pour faire clair ?

Friedrich Sattler : Moi, le Guide de la Nation Rimaurienne, conserverait les pleins pouvoirs que je me suis exceptionnellement octroyé avec l'accord de tout le peuple et pour sa protection jusqu'à ce que toutes les menaces qui pèsent sur nous soient définitivement anéanties jusqu'à la dernière. Le peuple a besoin d'un meneur pour le conduire jusqu'à la victoire finale contre le socialisme et le libéralisme outranciers qui portera le Kohlisme à la tête du monde. Je serai ce meneur et j'assumerai la tâche qui m'incombe jusqu'au bout, que je vaincs ou que je meurs.

Arnold Schottel : Pensez vous pouvoir assumer seul la lourde responsabilité de la gouvernance de notre pays ? Ne disiez vous pas vous même il y'a un instant à peine qu'il était absolument impossible que la gestion d'une nation entière repose sur un seul dirigeant aussi autoritaire et appliqué qu'il soit ?

Friedrich Sattler : J'y venais justement. Je suis en pleine conscience de mes capacité et de leurs limites et je sais que ni moi ni aucun autre homme ne serait capable de s'approprier pour lui seul tant de responsabilités. Aussi, je suggère de diluer la charge qui incombe au Führer dans un nouveau poste aux pouvoirs étendus bien que toujours inférieur. Le Chef d'État conservera un pouvoir de décision suprême sur tout les sujets mais sera désormais secondé par un conseiller qui disposera des mêmes pouvoirs que le Führer mais lui rester hiérarchiquement inférieur et ne pourra donc pas aller à l'encontre de ses décisions. En somme et pour résumer rapidement, le Führer conservera ses pleins pouvoirs mais sera désormais secondé d'un "conseiller" qui pourra prendre des décisions urgentes en cas d’absence ou d'incapacité du Führer, accélérant de fait le processus décisionnel de notre régime.

Arnold Schottel : Et à qui pensez vous pour remplir ce nouveau rôle ?

Friedrich Sattler : À vous, Schottel, en tant que Commandant Honorable et mon plus proche confident, vous ne m'avez jamais déçu et avez toujours su vous montrer appliqué dans votre travail à la tête de nos renseignements et de la Militärpolizei et dans la répression de la menace anarcho-communiste grandissante. Vous m'avez mainte fois démontré votre loyauté et je vous fais pleinement confiance.

Schottel prit un bref instant avant de répondre. Obtenir les pouvoirs du Führer ? L'autorité suprême et incontestable sur toute la politique du pays qu'il attendait son entrée au Front Nationaliste il y'a plus de trente ans désormais ? Enfin, "incontestable" cela était inexacte, il resterait éternellement soumit à ce satané Sattler mais il ne s'en faisait pas de cet état pour l'instant. L'offre qu'on lui faisait était bien trop alléchante pour qu'il refuse.

Arnold Schottel : Ce serait un honneur de servir l'État Nouveau à un plus haut niveau que la lutte contre le terrorisme et la déviance idéologique. J'accepte la proposition que vous me faites, Mein Führer, et j'espère sincèrement être en capacité de mener à bien les missions qui viendront avec ces nouvelles responsabilités.

Friedrich Sattler : Je suis heureux de l'apprendre. Bien, passons à la suite : le Parlement. Celui-ci a vu, comme vous le savez déjà tous, tous ses pouvoirs confisqués en Février dernier et les sièges occupés par les forces anti-nationales ont étés réattribués au Front Nationaliste, décidément seul parti apte à gouverner notre pays. La question reste ouverte quant à savoir si la suspension de ce Parlement doit cesser et si oui dans quelle mesure devrions nous lui restituer ses pouvoirs législatifs. Tiedemann, en tant que Président du Parlement, vous êtes le principal concerné, j'écoute donc vos suggestions.

Tiedemann réfléchit pendant un instant. Était-ce un test ? S'il disait vouloir réattribuer ses pouvoirs au Parlement, le Führer ne verrait-il pas cette réponse comme une preuve de son incapacité à diriger le pays ? Et s'il disait l'inverse, le Führer ne l'accuserait-il pas de vouloir affaiblir l'État Nouveau en rechignant à faciliter le processus législatif ? Le Sattler n'avait en réalité besoin d'aucune des quelques personnes réunies autour de lui pour décider de l'avenir de la Rimaurie, c'était seulement un moyen pour lui de mieux cerner ceux avec qui il travaille, d'observer la sueur couler sur les fronts des hommes à qui il s'adresse et les mains trembler à chacune de ces questions dont il connait déjà la réponse. Un mot de travers, une parole qui s'écarterait à peine trop de la droite ligne fasciste de l'autocrate pourrait condamner n'importe lequel des officiers assis à sa table au peloton et au déshonneur peu importe leur grade. La terreur est une arme que le régime aime à utiliser autant contre sa population que contre lui même.

Armin Tiedemann : Je pense que, dans l'objectif d’accélérer la création et la proclamation de lois, il serait judicieux d'abréger la suspension du Parlement et de lui réattribuer ses pouvoirs tout en interdisant bien sûr le retour des partis d'opposition. Ainsi, toutes les lois écrites et votées par le Parlement, composé exclusivement de membres loyaux et assidus du Front Nationaliste, spécialistes de la théorie Kohliste, nommés par les instances de décision du Parti, seront des purs produits de la Doctrine Officielle et non pas l'objet bâtard et sans fondement d'un groupement d'idéologies incompatibles et archaïques qui ne mènerait notre nation qu'à sa ruine.

Pendant un bref moment, Tiedemann put voir dans les yeux de Sattler une légère insatisfaction. Avait-il donné la mauvaise réponse ? Ses doutes furent très vite balayés.

Friedrich Sattler : Effectivement, le Parlement doit recouvrer une partie de ses pouvoirs. Cela me semble une évidence. Cependant, j'émet néanmoins quelques réserves quant à la capacité de nos députés à n'écrire et voter que des lois absolument justes et sensées. C'est pourquoi je suggère de rétablir le droit de véto du Chef d'État sur toutes les décisions du Parlement comme c'était le cas jusqu'à l'année dernière mais, également et surtout, chaque loi votée devra faire l'objet d'un contrôle du Führer ou de son Conseiller, seuls êtres en ce monde dotés d'assez de clairvoyance et de perception pour voir les tenants et aboutissants de n'importe quelle loi et constater leur alignement avec la doctrine Kohliste, et ne pourra être proclamée et mise en application que par le premier ou le second. Nul autre. Ainsi, l'éventualité de voir une décision irréfléchie entrer en application devient inenvisageable.

Arnold Schottel : Cela me parait être la meilleure des solutions. Le Parlement a, nous l'avons tous vu il y'a quelques mois, prouvés son inefficacité et sa collusion avec l'ennemi révolutionnaires, rappelez vous, messieurs, les critiques virulentes de certains députés à l'égard de notre immaculé Führer. Ces actes inexcusables et proprement anti-patriotiques démontrent parfaitement l'incompétence, si ce n'est la corruption, du Parlement et de ses élus et la nécessité que nous avons de diminuer son autonomie pour le bien de la Nation, du Peuple et du Kohlisme.

Armin Tiedemann : Si vous êtes tous les deux d'accords, Excellences, je ne vois pas de raison de m'opposer à cette refonte que vous proposez (et n'en ai de toute façon pas les moyens).

Friedrich Sattler : Très bien. Puisque nous sommes tous d'accords sur ce point, nous pouvons passer au troisième sujet que nous avions à traiter aujourd'hui : le cas des syndicats, grèves et manifestations ouvrières. En effet, les syndicats ont vu leurs activités suspendues avec la Proclamation de l'État Nouveau et, de fait, les grèves et les manifestations sont depuis formellement interdites. Cependant, nous savons que la colère gronde et que le prolétariat se sent aujourd'hui abandonné par ses dirigeants.

Arnold Schottel : Comment faire pour y remédier ? Nous ne pouvons tout de même ré-autoriser les grèves et les manifestations, pas en ce moment et dans cette période de fortes tensions. Les socialistes sont partout et notamment chez les travailleurs qu'ils instrumentalisent à coup de promesses intenables pour parvenir à leurs fins : la chute de notre régime. Une manifestation ouvrière, c'est une manifestation contre le régime et donc une mise en cause de la politique que nous menons qui ne ferait que mettre plus d'huile sur un feu déjà ardent.

Friedrich Sattler : J'en suis parfaitement conscient et je n'ai, rassurez vous Schottel, pas l'intention de revenir sur l'interdiction de manifester ou de se regrouper en faction politique ou idéologique. Cependant, si la politique de l'État Nouveau n'est plus ouvertement contestée, cela ne change rien au problèmes : les travailleurs veulent exprimer leurs problèmes et ne le peuvent pas. Ainsi, je propose, au lieu de rétablir le droit à la grève et à la manifestation, de mettre un terme à la suspension de l'activité syndicale. Les syndicats pourront désormais recueillir les demandes des ouvriers et les transmettre à la direction de l'entreprise, permettant de rectifier les erreurs de gestion sans nécessiter d'exposer ces erreurs aux yeux de tous, Rimauriens comme étrangers. J'ai parlé.

Arnold Schottel : Très bien, Mein Führer, si là est votre volonté.

Friedrich Sattler : Vient ensuite la question de la langue et de la culture. Mes prédécesseurs, que ce soit sous la Monarchie, sous la République ou sous l'État Ancien, ont toujours eu à cœur de défendre le multiethnisme et le multilinguisme de notre pays, arguant que la nation Rimaurienne s'est fondée sur l'unification de peuplades disparates qui n'avaient nul autre point commun que leur sang nordique et leur sincère attirance pour le projet que nos glorieux ancêtres leur avait exposé. Cependant, je ne raisonne pas de cette façon et je ne crois pas que des populations aussi différentes et nombreuses puissent coexister sans qu'aucune velléité ethnonationaliste ou séparatiste n'apparaisse et vienne briser leur harmonie. Nous en avons eu la preuve l'année dernière avec la formation inattendue du parti Liberté Gammelgård qui prône l'autonomie voire l'indépendance de cette région Finnophone. Si ce mouvement ne semble pour le moment n'être que peu suivi, il n'en reste pas moins la preuve que le multilinguisme, puisqu'il s'agit bien là d'un nationalisme linguistique, est un frein à l'unité nationale.

Armin Tiedemann : Où voulez vous en venir ?

Friedrich Sattler : La population Rimaurienne doit être unifiée sous une culture commune et unique à commencer par une langue unique. Je suggère donc d'abandonner ces aberrations que sont les langues régionales, porte voix des nationalismes alternatifs au peuple Rimaurien et des séparatismes régionaux. La population Rimaurienne doit enfin devenir culturellement homogène.

Arnold Schottel : Mein Führer, si je puis me permettre, ne pensez vous pas que tout cela est inutile ? Les langues régionales à l'exception du Finnois ne sont presque plus parlées de nos jours et la majorité de la population suit déjà la même culture. Et puis, n'oubliez pas que notre pays possède non pas d'une mais de deux langues officielles qui sont chacune parlée par une moitié des Rimauriens. Il me semble donc difficile de convaincre la moitié de notre peuple d'abandonner la langue qu'il parle depuis des siècles..

Friedrich Sattler : Bon, dans ce cas, que l'on conserve l'Allemand Forrenien et le Suédois Hagkronien comme seules langues officielles et reconnues en Rimaurie et que l'on supprime l'enseignement des langues régionales, y compris dans le Gammelgård län.

Armin Tiedemann : Ne craignez vous pas que cela irrite les locaux de devoir subitement apprendre une autre langue ?

Friedrich Sattler : Ma décision est prise et elle est irrévocable. Maintenant silence ! Le débat est clos ! Maintenant que ces points ont étés traités, nous pouvons mettre un point final à cette discussion.

Les trois hommes et leurs greffiers attitrés s'en retirèrent donc et retournèrent vaquer à leurs occupations habituelles ou à leurs postes de travail. Pendant une semaine, les fidèles scribouillards et juristes du Front Nationalistes s'appliquèrent à élaborer une nouvelle Constitution spéciale en suivant à la lettre les instructions de leur cher et adoré Führer.

Celle-ci fut officiellement proclamée le 14 Septembre de l'an 2015.


Nouvelle Constitution Spéciale (version simplifiée)
Constitution Spéciale de l'État Nouveau de Rimaurie
Proclamée à titre temporaire pour une durée indéterminée le 14 Septembre 2015.
La présente Constitution n'annule pas la Constitution Nationale du 12 Septembre 1963 réformée le 14 Mai 2014 mais la supplante. Pour les institutions politiques inchangées par la présente Constitution Spéciale, référez vous à ladite Constitution de 1963.
Version abrégée.

Titre 1 : Des symboles)

Le nom officiel du pays est État Nouveau de Rimaurie ou État de Rimaurie ou Rimaurie ou État Nouveau. Toute autre appellation est incorrecte.

La Capitale de l'État Nouveau est Hahnemann. Aucune autre ville ni aucun autre lieu ne saurait accueillir le siège de la Nation Rimaurienne.

Les seules langues officielles de l'État Nouveau sont l'Allemand Forrenien et le Suédois Hagkronien. Aucune autre langue n'est reconnue de quelque façon que ce soit.

Le drapeau officiel et unique de l'État Nouveau est la bannière noire à croire or et sang sur laquelle est apposée le blason officiel de l'État Nouveau. Le Phénix Kohliste peut facultativement lui être posé en chef. Aucun autre drapeau, pas même le tricolore sang-or-sang usité jusqu'en Février 2015, ne saurait représenter l'État Nouveau de Rimaurie.

Les devises officielles de la Nation Rimaurienne est Un Peuple, Une Nation et celle de l'État Nouveau est Des flammes et des cendres, nous nous élevons. Aucune autre maxime ni aucune autre devise ne saurait représenter l'État Nouveau de Rimaurie.

L'hymne officiel de l'État de Rimaurie est Le Revenant. Aucun autre hymne ni aucun autre champ populaire, pas même La Marche Glorieuse usitée jusqu'en Février 2015, ne saurait représenter l'État Nouveau de Rimaurie.

Le Parti Unique et officiel de l'État Nouveau de Rimaurie est le Front Nationaliste. Aucune autre formation politique, même dépendante du Front Nationaliste, ne saurait être autorisée.

L'idéologie officielle de l'État Nouveau de Rimaurie est le Kohlisme sous toutes ses dénominations et ses courants. Aucune autre doctrine ni aucune autre idéologie ne saurait être tolérée.

Titre 2 : Des institutions)

Le Chef d'État est l'Oberführer qui remplace le grade de Führer. Il est nommé par son prédécesseur direct ou élu par le Comité de Direction du Front Nationaliste parmi ses membres dans le cas où l'Oberführer précédent n'aurait pas désigné d'héritier avant sa mort. Il dispose d'un pouvoir suprême, complet et incontestable. Il ne peut être ni renversé ni condamné de quelque façon que ce soit. Il est le représentant du Peuple Rimaurien et sa volonté est celle de la Nation Rimaurienne toute entière.

L'Unterführer est le second de l'Oberführer et remplace le grade de Commandant Honorable. Il dispose des mêmes pouvoirs que l'Oberführer qu'il supplée mais lui reste néanmoins hiérarchiquement inférieur, dépend de son jugement et ne peut le supplanter ou le contredire d'aucune manière dans ses directives. Il ne peut être renversé ou condamné que par le Führer.

Le Parlement est composé de 300 députés élus par le Comité de Direction du Front Nationaliste. Chacun de ces 300 députés peut être déchu de ses fonctions sur ordre de l'Oberführer ou de l'Unterführer. Le Parlement n'a qu'un rôle consultatif : il propose et vote les lois mais ne peut pas les proclamer. Les lois votées par le Parlement doivent être approuvées par l'Oberführer, l'Unterführer ou leur délégué compétant avant mise en application.L'Oberführer et l'Unterführer peuvent, à loisir, faire passer une loi en force sans l'aval du Parlement.

Les Gouverneurs de Comté et les Maires de Communes conservent leurs pouvoirs et leurs modalités telles que décrites dans la Constitution de 1963 à ceci près qu'ils seront désormais nommés par l'Oberführer ou l'Unterführer pour les Gouverneurs et élus par le Comité de Direction du Front Nationaliste pour les Maires. Les Gouverneurs et les Maires peuvent être déchus de leurs fonctions sur décision de l'Oberführer ou de l'Unterführer.

Toutes les autres institutions sont conservées selon les modalités de fonctionnement définies par la Constitution de 1963.

Gloire à l'État Nouveau ! Gloire au Kohlisme ! Longue vie à la Rimaurie !

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Ambiance

Valknut

Valknut

Quatre ans. Plus de quatre ans se sont écoulé depuis que le 11 Août 2013, Christopher Wasser, Gouverneur du Comté de Forrenland, a échappé à une tentative d'assassinat contre sa personne. Plus de quatre ans que les coupables, alors suspectés d'appartenir à l'Union Libertaire Rimaurienne, ont étés appréhendés sans donner la moindre information pertinente quant à leurs motivations. Plus de quatre ans que ces mêmes coupables ont étés tués, le 20 Mai 2014, dans l'attaque du Käseglocke, où ils étaient enfermés pour leurs crimes, par un commando armé qui échoua à les libérer et fut entièrement anéantie par l'intervention de la Militärpolizei. Puis... Plus rien. Aussi vite que le chaos s'était abattu sur Forren, le calme était revenu. Plus aucune attaque signalée. On avait presque oublié ces évènements que personne ne comprenait.

Bien sûr, des pistes furent suivis, des indices analysés, des suspects mis aux arrêts et interrogés, de nombreuses hypothèses proposées mais, très vite, on abandonna l'idée d'une action révolutionnaire de l'Union Libertaire ou du Mouvement Royaliste. Ça ne leur correspondait pas. Le commando du Käseglocke était trop bien armé et entraîné et pouvait compter sur des renseignements importants et une expertise stratégique dont les rebelles ne se sont jamais montrés capables comme en témoigne sa capacité à prendre brutalement le contrôle d'un bâtiment aussi sécurisé qu'une prison et à résister plusieurs heures à un adversaire près de dix fois supérieur en nombre et réputé pour sa férocité, sa loyauté inébranlable et son efficacité au combat, l'élite de l'armée Rimaurienne, le bras armé du Kohlisme.
Il était évident que les assaillants avaient reçu le soutien d'un contact au sein de l'armée au vu de l'équipement de qualité dont ils disposaient et certainement un accès à des informations confidentielles du Ministère de l'Intérieur concernant le plan du bâtiment et la localisation de leur cible, une poignée de prisonniers vraisemblablement membres du même groupe, qu'ils devaient faire évader, probablement pour les empêcher de révéler les complots et les machinations de leur organisation secrète.
Dans un sens, ils ont réussi : ils n'ont plus jamais parlé, tués dans l'assaut de la Militärpolizei ou exécutés par leurs libérateurs avant qu'eux même ne mettent tous fin à leurs jours d'une balle dans la tête. Ils ont préféré mourir plutôt que de se rendre. Une preuve de loyauté qui force l'admiration et le respect, mais de la loyauté envers qui... ou quoi ?

Onze des quatorze corps identifiés comme étant ceux des assaillants du Käseglocke ont étés reconnus comme étant ceux de militaires ou d'anciens militaires, appartenant ou ayant appartenu à divers unités dont la plupart étaient stationnées dans la région. On ne leur connaissait aucune dérive idéologique, certains étant même connus comme de farouches partisans du Kohlisme. Ils n'avaient jamais contesté aucun ordre ni commis aucune infraction. En bref, ils n'avaient jamais étés suspectés de quoi que ce soit. Mais il y'avait autre chose... Tous les cadavres portaient un tatouage similaire à l'avant-bras : trois triangles noués. Aucun de tous ceux qui les avaient côtoyés de leur vivant ne se souvenait avoir vu ce symbole. Peut-être ne se sont-ils tatoués que peu avant leur mort ? Ça voudrait dire qu'ils n'avaient jamais eu l'intention de réapparaître publiquement en vie ? Qu'ils n'avaient aucun espoir de faire évader leurs camarades prisonniers et que leur véritable objectif était, dès le départ, de les éliminer purement et simplement dans une attaque suicide ?

La vérification de l'équipement récupéré sur les corps des commandos ne donna rien : le marquage numérique de chaque arme (unique et devant à l'origine permettre aux forces Rimauriennes de déterminer à quelle unité et à quelle installation l'armement utilisé par les insurgés était rattaché et, par extension, d'où il a été détourné afin de procéder à des réajustements de la sécurité des entrepôts) avait été limé pour éviter son traçage. Un indice de plus du professionnalisme et de la connaissance du fonctionnement de l'Armée Nationale Rimaurienne, rendant de plus en plus évident un complot interne à celle-ci.
Wasser est un leurreLes agents de la Militärpolizei eurent cependant plus de succès en vérifiant les effectifs et les comptes des bases et casernes militaires de la région de Forren. Ils se rendirent en effet compte, en recensant les armes et véhicules de ces installations, que bon nombre d'équipements manquaient sans que leur disparition n'eut été ni justifiée ni consignée et que plusieurs missions d'apparence routinière avaient étés ordonnées sans qu'aucun rapport ne soit remis à l'État-major des armées. On put ainsi déterminer un premier suspect, en la personne de Jacob Steiner, Commandant en Second du Cinquième District Militaire Ouest et responsable de plusieurs opérations non-déclarées. En plein milieu de la nuit du 24 au 25 Juillet 2014, une équipe de la Militärpolizei fut dépêchée au domicile de Steiner pour l'appréhender. Étonnamment, ce dernier ne laissa paraître aucune surprise et se révéla même des plus coopératifs, ne faisant aucune difficulté lorsque les agents lui demandèrent de les suivre. Plus étrange encore, il était, au moment de leur arrivée sur les lieux, déjà affublé de son uniforme officiel et semblait les attendre en regardant un documentaire sur la Guerre Civile à la télévision. L'absence de son épouse et de ses enfants, dont on apprendra plus tard qu'ils étaient partis rendre visite à la belle-famille de Steiner deux jours plus tôt à peine, fut également notifiée et considérée comme une preuve de plus que Jacob Steiner était au courant des suspicions dont il faisait l'objet. Suspicions confirmées à son arrivée au Quartier Général de la Militärpolizei à Hahnemann où fut constatée la présence, une fois encore, du même tatouage porté par les agresseurs du Käseglocke sur son pectoral gauche.

Interrogé et probablement torturé à de nombreuses reprises pendant plusieurs mois, Jacob Steiner ne dira pas un mot pendant plus d'un an, ne niant ni n'avouant jamais sa culpabilité dans les attentats de Forren ou sa participation à un complot contre l'État, se contentant de répondre aux questions des agents de Settler par de longs silences toujours accompagnés par un regard appuyé pénétrant à travers leurs yeux comme s'il essayait de lire dans leur esprit. En Janvier 2016 cependant, Jacob Steiner se décide soudainement à parler à ses geôliers :
Un canon sur votre tempe
Retranscritpion de l'interrogatoire de J. Steiner n°36 par J. Kehlmann - 04/01/2016


Le bloc interrogatoire est composé de deux pièces adjacentes séparées par un miroir sans tain. La pièce A est éclairée et ne contient pour seul mobilier qu'une chaise et un microphone en position allumée placée en son centre. La pièce B est assombrie et contient, outre les classeurs à paperasse et autres fournitures, une table de bureau, un fauteuil, un microphone et un interphone, tous deux en position éteinte. Des haut-parleurs placés dans les deux pièces permettent la communication orale entre les pièces A et les pièces B.

11:14 - Les gardiens T. Wilhelm et G. Karlsson se présentent devant la cellule du suspect J. Steiner afin de procéder à une fouille puis l'escortent jusqu'au bloc interrogatoire.

11:19 - L'agent J. Kehlmann prend place dans le bureau de la pièce B et consulte la fiche de renseignement du suspect J. Steiner et les retranscriptions des interrogatoire du suspect J. Steiner n° 33, 34 et 35.

11 : 27 - Les gardiens T. Wilhelm et G. Karlsson se présente devant la porte de la pièce A en compagnie du suspect J. Steiner. Le suspect J. Steiner entre seul et prend place sur la chaise.

11 : 29 - L'agent J. Kehlmann allume son microphone et lance l'interrogatoire.


J. Kehlmann : Steiner ?

J. Steiner : ...

J. Kehlmann : Steiner ? Vous m'entendez ?

J. Steiner : Je vous entends.

J. Kehlmann : Vous êtes Jacob Steiner. Vous êtes né le 6 Juillet 1969 à Forren. Vous êtes Commandant en Second du Cinquième District Militaire dit "Ouest" basé à Forren avec le grade de Lieutenant-Général depuis 2008. Vous résidez au 14 Avenue Philip Scheuermann avec votre épouse Rachel Steiner, née Buckler le 11 Octobre 1970 à Forren, et vos deux fils Laurenz, né en 2002 et Reinhold, né en 2006. Est-ce que vous confirmez ?

J. Steiner : ...

J. Kehlmann : Est-ce que vous confirmez ?!

J. Steiner : Bon boulot, félicitations, vous avez bien mené votre petite enquête.

J. Kehlmann : Je vais prendre ça pour un oui... Jacob Steiner, vous êtes accusé de comploter contre l'État Rimaurien, d'avoir participé ou été à l'origine de l'organisation et de l'exécution de plusieurs attentats dans la ville de Forren à l'encontre du Gouverneur Christopher Wasser et du Centre Pénitentiaire de Forren dit "Käseglocke" ayant provoqués plus d'une centaine de morts au total, d'avoir falsifié le recensement des équipements militaires sous votre responsabilité, d'avoir détourné et fait disparaître ces mêmes équipements militaires vers une destinations et dans un but encore non élucidés, d'avoir organisé plusieurs missions sans en informer vos supérieurs, d'avoir caché, détruit ou falsifié les rapports de cesdites missions et d'avoir refusé de répondre aux questions de vos interrogateurs. Reconnaissez vous ces crimes ?

J. Steiner : ...oui...

Note : Le suspect J. Steiner reconnait pour la première fois les crimes dont il est accusé. Penser à l'interroger quant aux raisons de ce revirement.

J. Kehlmann : Vous reconnaissez être à l'origine d'un complot visant à déstabiliser l'État Rimaurien en vu d'une prise de pouvoir ?
Kohl, Seeliger, Sprecher, Sattler, Schottel
J. Steiner : Oui.

J. Kehlmann : Êtes vous membre ou allié de l'Union Libertaire ou du Mouvement pour la Restauration de la Monarchie ?

J. Steiner : Non. L'Union Libertaire et le Mouvement Royaliste ne sont que des bandes de gamins fiévreux qui ont besoin de se raccrocher à quelque chose de différent de l'Idéologie-Nationale pour se sentir exister en dehors de la masse. Ils voient leurs compatriotes embrasser pleinement l'idéologie Kohliste sans se remettre en question, ils les croient abrutis par la propagande, endoctrinés. Ils ne veulent pas finir comme eux, ils ne veulent pas être des anonymes perdus dans une masse d'individus qui pensent tous la même chose et qui ne parlent que d'une seule voix. Ils croient que tous ces gens ont perdus leur libre arbitre mais c'est faux : ils ne l'ont pas perdus, ils s'en sont débarrassé parce que la liberté est un fléau. Ils croient que le Kohlisme met le collectif au dessus de tout et que ce collectif écrase l'individu et, dans leur désir d'indépendance et de différenciation, ils ne trouvent rien de mieux que de proposer un individu placé au dessus du collectif, au dessus de tout. Ils veulent que chacun soit libre car ils pensent qu'il n'y a qu'en étant libre que l'on peut être heureux mais ils ont tort sur tous les points : le collectif n'écrase pas l'individu, le collectif c'est l'ensemble des individus unis dans un objectif commun et lorsque le collectif atteint cet objectif, toutes ses composantes en récoltent les fruits. Pas qu'une poignée triée au volet. Ils ne veulent pas finir anonymes, oubliés, ignorés, alors ils mettent des masques et abandonnent leurs identités pour défendre une cause qui a déjà échouée. Ils disent combattre pour la démocratie et la liberté tout en fondant leur légitimité et en s'inspirant de régimes qui ont étés, à un moment de leur existence, aussi autoritaires que celui qu'ils disent combattre. Ils articulent leur propagande et leurs mensonges autour d'idées communément rejetées par le peuple dont ils prétendent être le porte-voix. Ils n'ont aucun projet, aucune cohérence idéologique, aucune idée de ce qu'ils feront s'ils prennent un jour le pouvoir car ils ne se sont fondés qu'en opposition à un régime. Ils n'existent que pour combattre le Kohlisme mais ne proposent rien de concret pour le remplacer. NOUS VOYONS

L'Union Libertaire et le Mouvement Royaliste n'ont aucune chance de prendre un jour le pouvoir : ils n'ont ni arme ni légitimité, ils sont haïs par une grande majorité de Rimauriens et ils n'ont aucun projet d'avenir. Ce ne sont que des leurres, des coquillages : l'extérieur est joli et solide mais à l'intérieur, il n'y a qu'une masse molle et informe. Ils sont creux, ils sont vides, mais ils font une bonne diversion.

J. Kehlmann : Une diversion ?
Décapiter la tête doréeJ. Steiner : L'Union Libertaire et le Mouvement Royaliste n'ont jamais cachés leurs actions, au contraire. Ils les revendiquent, ils en réclament la paternité, ils crient haut et fort pour que tout le monde les entende, pour rappeler qu'ils existent, qu'une opposition existe, que le régime n'est pas un absolu immuable et éternel, qu'il peut tomber, qu'un autre monde est possible. En soixante-dix ans, le pouvoir Kohliste n'a jamais fait mine de fléchir un seul instant, aucun des coups portés par les insurgés à son encontre n'a jamais menacé une seule seconde la survie de l'État Nouveau ou la pérennité de l'Idéologie Nationale. Pourtant, cela fait soixante-dix ans que ces mêmes insurgés luttent sans cesse, se trouvent de nouvelles recrues, de nouvelles armes parce que cela fait soixante-dix ans que chaque coup porté au régime, aussi peu destructeur pour la continuation de l'État soit-il, rappelle qu'ils existent.

Et en rappelant sans cesse qu'ils existent, ils effacent tous les autres, plus discrets. Chaque fois qu'un événement anodin se produit, une bombe qui explose, des rafales de mitraillettes, les coupables sont tout désigné : l'Union Libertaire ou le Mouvement Royaliste. Le régime les condamne et eux même ne peuvent pas le nier : leur organisation est tellement décentralisée et étendue en une multitude de cellules autonomes qu'ils n'ont aucun moyen de savoir s'ils sont responsables ou non des nombreuses attaques dont ils sont accusés et même s'ils se dédouanaient de toute responsabilité, nul ne les croirait car ils sont, aux yeux de tous, les seuls coupables potentiels, les seuls à s'élever contre le Kohlisme, les seuls à rappeler qu'un autre monde est possible.

Et nous prospérons dans l'ombre sans que personne n'ait la moindre idée de notre existence...

J. Kehlmann : Votre discours ressemble beaucoup à ce que pourrait dire le plus fervent de tous les Kohliste. J'en déduis que vous faites partie d'un réseau clandestin issu de la branche conservatrice du Front Nationaliste hostile aux récentes évolutions de l'Idéologie Nationale et que vous cherchez à renverser l'Oberführer Fredrich Sattler pour revenir au système de l'ère Sprecher. La question que je me pose désormais est : quel est votre rôle dans ce réseau ? Et d'ailleurs, ce réseau a-t-il un nom ? Ça serait plus simple pour la suite.

J. Steiner : Vous déduisez mal, agent : ni moi ni la cause que je défends n'ont le moindre rapport avec Sigmund Kohl ou ses idées. Ce "réseau", comme vous l'appelez dans votre profonde ignorance, est une organisation vaste et puissante bien plus ancienne que le Kohlisme ou que le Front Nationaliste, très largement antérieure à la chute de la monarchie et à la naissance de la république. En fait, nous ne sommes pas une scission du Kohlisme parmi tant d'autres, cherchant à s'accaparer plus de pouvoir et de prestige pour imposer aux autres sa vision des écrits de Kohl, c'est le Kohlisme qui s'est inspiré de nous, il a toujours, dès sa fondation, été inspiré, noyauté par nous. Encore aujourd'hui, nous avons des hommes à tous les niveaux de l'administration, civile comme militaire. Partout où il y'a une hiérarchie, partout où il y'a une quelconque forme d'autorité, dans l'armée, la police, les ministères, les écoles, les syndicats de travailleurs, les directions d'entreprises, les laboratoires scientifiques, même les hôpitaux ou les casernes de pompiers, vous pouvez être certains qu'il y'aura des hommes à nous. Prenez moi en exemple.

Pour ce qui est du nom de cette organisation, je ne peux pas répondre à cette question pour la simple et bonne raison qu'elle n'en a aucun. Après tout, quelle logique y'a-t-il à nommer une chose secrète dont personne n'est censé ne jamais ne serait-ce que mentionner l'existence ? Et quand bien même nous en aurions un, ce serait comme demander à un homme qui porte un masque qui il est vraiment, et s'attendre à ce qu'il réponde honnêtement et diligemment.

L'agent J. Kehlmann semble esquisser un sourire amusé, de ceux que font les gens qui entendent des énormités dont ils ne peuvent s'empêcher de rire tant elles sont grotesques.

J. Kehlmann : Je ne vous crois pas, ce que vous dites est délirant. Deux ou trois agents sur une vaste administration de plusieurs milliers d'individus passeraient encore, nos services de renseignements en attrapent de temps en temps, mais avec des enquêteurs aussi parano- enfin... disons aussi méticuleux que les nôtres qui passent des semaines entières à vérifier et revérifier les agissements, les travaux, les machins et les faits et gestes de toute personne sur laquelle pèserait le moindre soupçon de corruption, d'écart doctrinal ou de fainéantise au travail, comment expliquez vous qu'en plus de soixante ans nous n'ayons jamais trouvé un seul espion sur les quelques centaines d'infiltrés que vous dites avoir.

J. Steiner : Et vos enquêteurs ? Vous les surveillez ? Je vous l'ai déjà dit : nous avons infiltré TOUS les niveaux de l'administration Kohliste. Et puis non, le terme n'est pas le bon : nous n'avons pas infiltré l'État, nous l'avons créé. Nous étions là depuis le début, nous l'avons façonné selon notre volonté. Nos hommes n'ont pas besoin de se cacher, ils n'ont pas peur d'être découverts en plein méfait par des agents des renseignements internes parce qu'ils ne commettent pas de méfait, ils se contentent de travailler et de vivre normalement en attendant un ordre qui ne viendra peut être jamais. Et si un jour il leur fallait faire disparaître quelques armes dans un entrepôt ou déboulonner quelques écrous sur une ligne d'assemblage, en admettant qu'ils soient pris sur le vif, ils affirmeraient appartenir à l'Union Libertaire ou au Mouvement Royaliste et personne ne trouverait rien a y redire.

J. Kehlmann : Vous vous foutez de moi ? Vous êtes restés invisibles pendant des décennies et maintenant vous balancez toutes vos petites combines et stratégies pour ne pas vous faire repérer et révélez un vaste complot interne impliquant des centaines de conspirateurs dans toutes les fondations de notre État Nouveau et visant à... À quoi d'ailleurs ? À quoi servirait ce complot ? Vous dites déjà diriger le pays. Que voulez vous de plus ? Pourquoi vouloir assassiner Wasser ?Sattler ?

J. Steiner : Christopher Wasser n'a aucune sorte d'importance à nos yeux. Ce n'était qu'un test. Nous voulions voir dans quelle mesure il était possible d'assassiner un laquais de l'entourage de l'Oberführer et comment les autorités réagiraient à cela. C'était aussi un message : plusieurs généraux de l'Armée Nationale, parfois même très haut gradés et réputés proches du pouvoir, ont déjà étés assassinés par les insurgés au cours des dernières décennies mais un gouverneur de comté, jamais, ce sont des cibles généralement considérées comme hors de la portée d'une bande de pouilleux des campagnes comme l'ULR ou le MRM. Tuer l'un d'entre eux prouverait aux membres du cercle restreint de Sattler qu'ils ne sont pas intouchables et qu'ils devront désormais vivre chaque jour avec la peur d'être assassinés dans l'heure qui vient. C'est ça mon rôle : instaurer la paranoïa au sein des institutions Rimauriennes. En vous révélant tous nos secrets, je vous apprends à craindre vos collègues, vos amis, vos chefs. Vous mettrez tous vos efforts à débusquer nos partisans dans vos rangs en vain, vous arrêterez vos fidèles à la moindre erreur involontaire, au moindre écart de conduite et lorsque vous serez occupés à vous étriper, nous, sur qui nul soupçon ne pèsera jamais, nous frapperons.
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J. Kehlmann : C'en est assez ! Il est évident que cet échange ne mènera à rien qui ne soit pas une farce stupide et je n'ai aucune envie de vous entendre déblatérer vos conneries plus longtemps. Cet interrogatoire est terminé !

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L'agent J. Kehlmann allume son interphone.

J. Kehlmann : Gardiens, veuillez reconduire le susp-

J. Steiner : Non, Kehlmann ! Je n'en ai pas fini avec vous. Maintenant c'est moi qui pose les questions.

J. Kehlmann : Qu- Comment vous m'avez ap- Pour qui vous vous prenez ?! Vous n'êtes plus à l'armée, Jacob Steiner, ici c'est moi qui donne les ordres. Alors lorsque je dis que cet interrogatoire est terminé, ça veut dire que cet interrogatoire est terminé et qu'il ne vous reste plus qu'à fermer votre sale gueule de ragondin comme on vous le demande ! Vous allez être reconduit sous peu dans votre cellule, que cela vous plaise ou non !

J. Steiner : Vous n'avez donc rien écouté, Kehlmann ? NOUS sommes l'autorité. NOUS donnons les ordres ! Ici comme partout en Rimaurie, c'est NOUS qui commandons. Vous ne savez pas lire entre les lignes, Kehlmann ? Je vous pensais plus malin. Nous avons tout planifié, nous avons des agents ici avec des ordres bien à eux. Si vous appelez les gardiens maintenant, ils ne viendront pas pour me remettre en cellule mais pour vous tirer une balle dans votre tête butée. Si vous quittez cette pièce sans que je ne vous en donne la permission, vous êtes mort ! Vous avez un canon vissé sur votre nuque, Kehlmann ! Vous comprenez ce que je veux dire ?

J. Kehlmann : Ne me menacez pas, Steiner !

J. Steiner : Je ne vous menace pas, je vous donne des garanties. De toute façon, quoi qu'il arrive, vous êtes déjà un homme mort, Josef Kehlmann, mais si vous faites exactement ce que je vous dis, vous pourrez peut-être épargner votre famille.

J. Kehlmann : Comment vous connaissez mon nom ? Et que vient faire ma famille dans cette histoire ?

J. Steiner : Nous avons des yeux partout, Josef Kehlmann, ne l'oubliez jamais. Nous avons épluché les dossiers de centaines, de milliers de fonctionnaires de l'appareil d'État et nous avons trouvé le votre intéressant pour nos projets. Vous êtes né à Hahnemann le 2 Juillet 1986, dans une famille longtemps connue pour ses accointances avec les socialistes, votre grand-père maternel ayant été engagé volontaire dans une milice paramilitaire communiste formée par l'Armée Populaire Républicaine pendant la guerre civile. Vous même avez été suspecté de déviance idéologique pendant votre jeunesse, c'est pourquoi, malgré votre réhabilitation et vos années au service de la Branche Renseignement de la Militärpolizei, vous ne monterez jamais en grade, qu'importe les efforts que vous y mettez. Vous finirez votre vie cloîtrée derrière ce bureau et ce verre sans tain qui m'empêche d'apprécier l'expression de surprise sans doute mêlée de terreur que doit afficher votre visage en cet instant. Oui, Kehlmann, moi aussi j'ai mené ma petite enquête à votre sujet. Moi aussi j'ai fait du bon boulot.

Mais ça n'est pas grave, vous n'avez jamais eu de très grandes ambitions de toute façon, vous êtes un homme simple. Vous êtes heureux parce que, même si votre travail ne vous enchante guère, même si vous savez qu'il y'a peu de chance que votre situation s'améliore un jour, vous savez que, lorsque vous rentrerez chez vous ce soir, vous pourrez retrouver ceux que vous aimez : votre femme, Elsa, et votre toute petite fille Laura, née en Novembre dernier. Vous avez cette chance que je n'ai pas de pouvoir les revoir. Vous avez cette chance d'être présent avec votre fille le jour de son premier anniversaire. Vous avez la chance qu'elle puisse un jour avoir son premier anniversaire et qu'il ne soit que le premier d'une très longue liste. Vous avez de la chance, Kehlmann.

J. Kehlmann : Qu'est-ce que vous voulez que je fasse ?

J. Steiner : D'abord, cet échange entre nous doit rester secret, il vous faudra donc supprimer les dernières minutes de l'enregistrement audio de notre discussion avant de le remettre à vos patrons. Vous pouvez faire ça pour moi, Kehlmann ? Ou pour Laura si vous préférez.

J. Kehlmann : Je- Je peux essayer.

J. Steiner : Parfait, ce sera tout.

J. Kehlmann : Ce sera tout ?

J. Steiner : Pour l'instant, oui. Vous pouvez reprendre votre travail ingrat et retrouver votre famille. Vous pouvez recommencer à vivre normalement. Mais rassurez vous, vous recevrez bientôt de nouveaux ordres. Bienvenue parmi nous, Josef Kehlmann. Nous allons faire de grandes choses grâce à vous !


Conclusion : Le suspect J. Steiner continu de s'enfermer dans ses mensonges et ses simagrées et invente de toute pièce une toute nouvelle force politique soit disant centenaire, hégémonique et omnipotente pour protéger le reste de la cabale Forrenienne. La piste d'un complot interne au Front Nationaliste orchestré par une faction dissidente de Kohlistes conservateurs visant à prendre le pouvoir en Rimaurie est jusqu'ici l'hypothèse la plus crédible. Recommandons de programmer un nouvel interrogatoire prochainement afin d'explorer cette théorie plus en profondeur.

Rapport n°36 terminé, signé et classé par J. Kehlmann.

Quelques heures plus tard, alors qu'il était en chemin vers le bureau de ses supérieurs pour leur remettre son rapport fraîchement imprimé, observant d'un œil suspicieux les gardiens de la Militärpolizei, rendus anonymes par les fameuses cagoules qui masquent les visages des soldats d'élites Rimauriens et les font paraître comme des démons sans peur ni émotion aux yeux de leurs ennemis, en se demandant lesquels étaient impliqués dans ce complot, lesquels le surveillaient, lesquels avaient l'ordre de le tuer et qu'est-ce qu'il ferait s'il parvenait à les démasquer, s'il aurait le courage de les dénoncer, si même ils le laisseraient faire, Kehlmann fut surpris par l'agitation qui régnait soudainement dans les couloirs. En suivant les bruits des bottes des soldats et des infirmiers qui courraient précipitamment dans les couloirs, il atterrit dans le bloc cellulaire où il trouva, étendu sur son lit, le corps de Steiner, apparemment tué par l'ingestion d'une capsule de cyanure. Et alors que les médecins légistes se demandaient comment un homme enfermé et surveillé vingt-quatre heures sur vingt-quatre depuis presque 18 mois avait pu se procurer un tel objet de mort, Josef Kehlmann toisait à nouveau les masques des gardiens, se demandant ce qu'il pouvait bien y'avoir derrière, cherchant dans les petits yeux sombres qui ressortaient du tissu signe un quelconque signe de culpabilité, balayant son regard de visage en visage seulement pour se rendre compte qu'il n'y en a pas. Ni nom, ni face, seulement des marionnettes inertes et sans âme lancées dans une guerre qui les dépasse.
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