Posté le : 31 déc. 2024 à 01:09:55
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Imshu III Sin-Namir Ă©tait arrivĂ© prĂ©occupĂ© Ă la Chambre, ce matin. Il rencontrait, depuis quelques temps, certaines... difficultĂ©s dans la gestion de son quartier. Une de ses patrouilles avait encore disparu dans Al-Matahatan, l'immense labyrinthe. C'Ă©tait, somme toute, chose assez courante : depuis des siĂšcles, le quartier ne cessait de croĂźtre, tant horizontalement que verticalement, et il s'agissait d'un vĂ©ritable dĂ©dale. Qu'une ou deux patrouilles, un peu trop zĂ©lĂ©es, sortent de leur sentier habituel et se perdent pour quelques jours, il n'y avait rien lĂ de choquant. Mais il avait le sentiment que ces disparitions se faisaient plus frĂ©quentes, et plus nombreuses. Il sentait un danger, mais ne parvenait pas Ă l'identifier. Ce qui le frustrait, et obsĂ©dait ses pensĂ©es. Il Ă©tait un homme qui, sans ĂȘtre totalement stupide, loin de lĂ , n'Ă©tait pas des plus brillant, et particuliĂšrement pieux avec ça. Il lui fallait du temps pour comprendre... Un temps sur lequel ses adversaires comptaient, et il s'en doutait. Restait Ă trouver qui Ă©taient les adversaires, et les preuves avec lesquelles les accuser.
Il passa la porte de la Chambre, accueillit par un serviteur qui le mena jusqu'Ă ses pairs. Il prit sa place, avec dans sa tĂȘte les recommandations de son Ă©pouse, Sahdina Al-Sameen. Puis il se dĂ©tendit : tant qu'il avait le Roc avec lui, tout allait bien... Et encore que la Maison Shamiran, en ce moment, Ă©tait en trĂšs bons termes avec les cousines d'en haut... Enfin, peu importait, la prioritĂ© Ă©tait la sĂ©ance du jour. Il Ă©couta attentivement les propositions de la Princesse, puis de son Excellence Chaar-Hachi d'Al-Kama, avant d'Ă©mettre quelques commentaires.
"Votre Majesté ? Il prit bien soin de ne pas la regarder directement dans les yeux, et d'attendre qu'elle l'invite à s'exprimer avant de reprendre la parole, comme l'exigeait le protocole. Voilà une chose que les barbares d'Al-Kama avaient oubliée depuis longtemps, le protocole. Si je puis me permettre, quel genre d'homologue étranger aurait le cran de vous interpeller ainsi, au mépris de tout protocole, pour exiger de vous des réponses quant à notre gestion interne et notre culture ? Il me semble qu'il s'agit là d'un oubli du protocole qui, s'il n'est pas impardonnable, mériterait quelque dédommagement. Il insista sur ces derniers mots, regardant du coin de l'oeil vers Chaar-Hachi.
Ensuite, et il s'adressa lĂ Ă tous, il me semble que nous ne devrions pas revenir sur la peine de mort. Votre AncĂȘtre, MajestĂ©, la TrĂšs Sainte ProphĂ©tesse elle-mĂȘme, s'Ă©tait autrefois prononcĂ©e en faveur des exĂ©cutions, pour ce que nous en disent les textes. Aussi, ne serait-ce pas aller contre sa volontĂ©, et par lĂ celle de Dieu, que d'y renoncer ? Non, il nous faut appliquer la loi divine, encore et encore, fusse-t-elle difficile. Rien ne nous oblige, en revanche, Ă le faire en public, et Ă exposer nos concitoyens Ă toute cette violence... LĂ encore, il regarda Chaar-Hachir. Celui-ci rencontrait des difficultĂ©s dans son quartier, plus encore qu'Imshu III, et il les rĂ©glait dans le sang. Si la ProphĂ©tesse avait autorisĂ© ces pratiques, dans le cadre de la loi, ce n'Ă©tait pas une chose qu'elle recommandait pourtant explicitement - exception faite des hĂ©rĂ©tiques -, il considĂ©rait donc que la dynastie d'Al-Kama dĂ©viait dangereusement, se rapprochant de l'hĂ©rĂ©sie du ghetto, dont elle Ă©tait voisine.
En revanche, en ce qui concerne la centralisation des textes de loi, il me semble qu'il s'agit lĂ d'une trĂšs riche idĂ©e, Votre MajestĂ©. Nos sujets mĂ©ritent de connaĂźtre leurs droits, et surtout leurs devoirs - nouveau regard vers le Chaar-Hachi, que l'humeur du seigneur d'Al-Matahatan transformait en la cible de toutes ses piques -, il est donc une bonne chose qu'ils puissent y avoir accĂšs facilement. Je sais d'expĂ©rience, venant moi-mĂȘme du Labyrinthe, qu'il est parfois difficile de se repĂ©rer, tant dans la vie que dans les enseignements de Dieu, aussi, un guide Ă©crit et consignĂ© serait tout Ă fait bĂ©nĂ©fique. Il ne faudrait cependant pas sombrer dans l'hĂ©rĂ©sie et se risquer Ă rĂ©Ă©crire les enseignements divins.
Il me semble avoir fait le tour de l'opinion d'Al-Matahatan, peut-ĂȘtre pourrions-nous entendre l'avis de quelqu'un d'autre ?"