04/10/2015
10:47:09
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Entrevue Estalie-Adélie [Mistohir]

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C'était en milieu de journée que l'avion gouvernement adélien avait débuté son approche vers l'aéroport international de Mistohir. Au moins, contrairement à certaines délégations qui choisissaient les saisons les plus rudes du climat estalien pour débarquer dans le pays et ouvrir des pourparlers, les Adéliens avaient eu la chance du beau temps. Cette journée de Mai était particulièrement ensoleillée, le printemps battait son plein, un printemps particulièrement doux, ce qui contraste avec les températures outrageusement basses des hivers estaliens. Les Adéliens ne seront pas dépaysés, du point en partie, à travers ce climat qui s'avère clément en cette journée de pourparlers.

Alors que l'avion débute son atterrissage sur la piste, le convoi fédéral en approche se positionne sur le quai où la tour de contrôle indique à l'avion adélien de se diriger après l'atterrissage. Du convoi sort directement la chef de la diplomatie estalienne, la Commissaire aux Relations Extérieures de la Fédération des Peuples Estaliens, Mme Volkiava. Intermédiaire direct entre la Fédération et les pays extérieurs, devenue une bête noire de la diplomatie autant pour certains étrangers que pour les Estaliens eux-mêmes, la réputation de diplomate de Volkiava avait su se construire petit à petit autour d'une reprise de la diplomatie active et, il faut le dire, interventionniste de l'Estalie après plusieurs décennies de contacts limités avec le monde extérieur, surtout quand la tradition diplomatique estalienne voulait que celle-ci soit gérée en priorité par des militaires. Elle était donc la rupture avec l'ancien temps, ce qui lui valait les louanges ou les insultes autant à l'étranger que dans le débat domestique.

Elle sortit alors de l'un des véhicules, accompagné du délégué en second de la réunion. C'était un protocole désormais bien établi au sein de la Commission, chaque délégation lors de pourparlers avec des nations étrangères devait s'accompagner d'un délégué principal nommé par le Commissaire (y compris la Commissaire elle-même, d'où sa présence aujourd'hui) et d'un délégué en second nommé par le Congrès et si possible membre d'un club différent de celui de la Commissaire. Aujourd'hui, celui qui sera dans les pattes de la Commissaire, ce sera Ivan Hiduyk, un délégué du Congrès, membre de l'ALO et donc en théorie opposant politique à Volkiava qui venait de l'AAR ; il était anciennement secrétaire de Maria Goduski, la déléguée principale de l'Estalie à l'UICS. Il était donc en position, selon le Congrès, pour à la fois soutenir Volkiava dans sa représentation nationale de l'Estalie et de ses intérêts mais également pour tâter le terrain pour l'UICS (même si rien ne lui prélavait d'une telle mission). Mais qu'importe pour elle, Hiduyk n'était pas un diplomate et de son point de vue, était un peu idiot selon elle. Comme les autres, elle pourrait imposer sa personnalité et sa vision des choses dès lors que cela relève de l'intérêt stratégique de la Fédération. Hiduyk soupira en voyant l'avion adélien atterrir :

"On n'accueille pas des communalistes ou des eurycommunistes aujourd'hui, tiens.
- Ils sont socialistes, c'est tolérable dans nos grilles de lecture.
- Cela reste un régime politique de bourgeois à mon sens.
- Chacun sa méthode d'atteindre le socialisme, camarade.
- C'est une démocratie représentative, je les trouve plutôt libéraux. Pour quelqu'un de l'AAR, vous devriez peut-être le savoir. Husak l'a écrit.
- L'idéologie ne fait jamais bon ménage avec la diplomatie, Ivan. Tenez vous face à nos invités ou je vous mettrais un rapport au cul.
- Très bien, très bien...
"

L'avion commença à entamer sa descente, ils allaient pouvoir enfin mettre des mots sur l'effet de la présence adélienne avec plus de précision.
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La délégation adélienne, emmenée par Florian Grëshjia, Président de la République Unie, et Manon Öshoz, descendit de l'avion et se dirigea vers les diplomates estaliens qui les attendaient.
Le Président était quelque peu inquiet. Il avait attendu la rencontre avec le Rosevosky avec impatience ; mais il avait eu le sentiment que ceux-ci étaient désintéressés de cet échange. Cela avait vite refroidit l'ardeur avec laquelle le Président pensait relancer la diplomatie extérieure.

Mr. Grëshjia avança, la main tendue, vers la femme qui se trouvait devant lui :

Bonjour, Madame Volkiava. C'est un véritable honneur que de faire notre premier déplacement officiel chez vous. Je vous présente ma conseillère principale, Madame Manon Öshoz. Elle est jeune mais elle connaît les intérêts de notre nation. Je vous prie d'autant plus d'excuser l'absence de Madame Ana Teshë, notre Ministre de la Diplomatie Extérieure. Il se trouve qu'elle est également en mission diplomatique, mais à Lyonnars, avec l'UICS. C'est une journée des plus importantes pour nous.

Manon Öshoz salua à son tour.

Nous vous remercions de nous accueillir avec autant de zèle.
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Lorsque la délégation adélienne arriva, Volkiava fut d'abord surprise de ne pas apercevoir non pas la Ministre des Affaires Etrangères mais bien le Président en personne, le Chef d'Etat de l'Adélie, Florian Grëshjia qui avait décidé de mener personnellement cette entrevue. Ce n'était pas inhabituel en Eurysie que les Chefs d'Etats en personne se déplacent pour les entrevues diplomatiques mais pour les Estaliens, ce n'était aps la fonction du Chef d'Etat de participer personnellement aux entrevues diplomatiques : le roi d'Estalie ne participait que rarement aux rencontres diplomatiques et confiait cette tâche aux militaires, et aujourd'hui, le Président de la Fédération n'a pas l'autorité légale de le faire tout simplement.

Les Adéliens sont d'abord surpris de voir que la Commissaire et le délégué à ses côtés les saluent par un salut militaire, geste traditionnel dans la diplomatie estalienne longtemps dominé par des officiers militaires, avant que la Commissaire tende la main à son tour pour serrer la main à son homologue adélien.

"Bonjour M.Grëshjia, l'honneur est partagé, Monsieur le Président. Je vous excuse pour l'absence de votre Ministre, je comprends qu'une nation telle que la vôtre sortant de son isolement puisse encore prendre son temps pour organiser ses rencontres à l'étranger.
- Si Madame Teshë est à Lyonnars, il est probable qu'elle rencontre Maria Goduski, notre déléguée à l'UICS.
- Ah et je vous présente M.Hiduyk, anciennement secrétaire de la délégation estalienne à l'UICS et délégué du Congrès International des Travailleurs. Il est en effet probable que Madame Goduski se permette d'intervenir, elle qui a toujours été assez...glissante dans ses propos. En tout cas, Monsieur le Président, soyez le bienvenu en Estalie, terre d'accueil de la Révolution ! Nous avons beaucoup de choses à aborder, je vous prie de nous suivre.
"

La délégation estalienne mène la petite troupe adélienne jusqu'au convoi fédéral qui les attendent patiemment, les quatre personnages s'installant à l'arrière d'une limousine qui a été aménagée confortablement avec des sièges de bonne qualité et une table en son centre où se trouve quelques dossiers inscrits du sceau de la Commission aux Relations Extérieures, probablement en lien avec l'Adélie.

"Le voyage n'a pas été trop long, j'espère ? Heureusement, le trafic aérien s'est régularisé depuis plusieurs mois dans le ciel estalien, c'est moins anarchique que l'année dernière."
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Et bien non ça va. Ca faisait bien onze ans que je n'avais pas quitté le pays, et c'était mon premier voyage en avion depuis une décennie également. Votre accueil fait plaisir en tout cas. Mais je vous en prie, nous vous suivons !!
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Le convoi débuta alors sa route vers le centre-ville de la capitale en destination du Questan, le bâtiment principal où siégeait actuellement la Commission aux Relations Extérieures. Après de brefs paysages de campagne de situant dans les alentours de l'aéroport international, un peu éloigné de la capitale en elle-même, le convoi put enfin entrer dans la ville. Celui-ci était légèrement pris dans la circulation automobile de la ville : Mistohir devenait chaque jour une véritable fourmilière vivante qui changeait grandement de son activité toute fois modeste il y a près de deux ans de cela, lorsque le Fédération n'avait pas encore vu le jour.

"De ce que j'ai appris récemment d'ailleurs, j'ai cru comprendre qu'un attentat vous avait récemment touché. C'était des royalistes, je crois ? En tout cas, mes condoléances pour votre pays. De ce que j'ai cru comprendre, votre nation avait beaucoup de mal à gérer ces éléments extrémistes. Même si votre régime semble bien implanté du fait de sa longévité, près de neuf ans tout de même, il ne faudrait pas sous-estimer ces terroristes : vous seriez surpris de ce qu'un terroriste un peu plus malin que les autres peut faire pour renverser un gouvernement s'il s'en donne les moyens.
- Surtout dans une région aussi instable que l'Eurysie orientale : les régimes autoritaires fusent dans tous les coins et avec elle, c'est la corruption qui gangrène les sociétés de cette région. Corruption qui engendre le trafic d'armes pour les mouvements terroristes.
- Exactement. C'est donc encore plus grave dans votre cas.
"
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Manon Öshoz prit la parole :

Nous ne sous-estimons pas ces attaques terroristes. Stupide serait celui ou celle qui croirait en la disparition de ces ingrats. Le royalisme est un cancer que nous devons éradiquer dans notre pays. En effet, les royalistes adéliens ne sont pas pour le retour d'une monarchie douce et aimante ; la plupart sont des adorateurs du culte des Bëshir.

Le Président poursuivit :

Mais je vois que vous voulez en venir quelque part. Je suis impatient de le savoir !
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Enfin, le convoi arriva devant le Questan. Là aussi, si le bâtiment n'avait pas changé d'un poil, celui-ci continuant de mêler architecture royale du XIXe siècle et symboles anarchistes du pouvoir en place. Quelle étrange vue pour les étrangers, certainement, un peu moins pour les ambassadeurs étrangers qui faisaient de plus en plus leur apparition à l'occasion au siège de la Commission aux Relations Extérieures. En tout cas, le palais restait imposant d'une certaine manière.

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La Commissaire fit signe à la petite délégation adélienne de la suivre lui et son compère. Une fois à l'intérieur, les Adéliens se rendirent compte du labyrinthe que pourrait être ce palais et même s'il n'avait pas été conçu initialement pour être aussi complexe lors de sa construction, sa complexité intérieure fut d'une grande aide lors de la prise de Mistohir en 1869, ce bâtiment fut le dernier baroud d'honneur des troupes royales encerclées dans la ville par les Kartaliens. Une tragédie héroïque comme l'histoire estalienne en raffolait tellement ce genre de scènes était très (trop) fréquente dans les livres d'histoire estaliens. Les Estaliens prenaient donc soin d'accueillir leurs compères étrangers dans un bâtiment regorgé d'histoire, et aussi un peu de sang, pour l'Estalie, un bâtiment très symbolique en somme, autant pour les Estaliens eux-mêmes que pour les étrangers qui y posaient le pied. Ils savaient qu'ils ne venaient pas en terrain conquis. Les deux délégations purent ensuite prendre place dans une salle de conférence du palais, visiblement un ancien salon de la noblesse reconverti en salle de discussion. Vu le petit comité, de grandes salles étaient bien inutiles, celles-ci étaient de toute manière réquisitionnées depuis bien longtemps par des équipes entières prêtes à pondre rapport sur rapport au Congrès et aux services fédéraux.

"Bien, maintenant que nous sommes installés, nous allons pouvoir discuter sérieusement des quelques sujets qui devraient, je pense, occuper la majorité de notre entrevue.
Volkiava se tourna vers Hiduyk pour lui faire grâce d'introduire le premier sujet.
- En effet. Comme nous l'avons appris, votre pays est déjà en passe d'intégrer l'UICS, ce sur quoi nous nous félicitons d'avance. Néanmoins, même si l'enthousiasme d'une telle adhésion n'a pas d'équivalent pour être décrit, nous devons tout de même vous avertir des quelques limites de l'organisation. Celle-ci n'est pas une alliance militaire et elle est encore vaguement politique, son fonctionnement reste encore celui d'une plateforme de dialogue commun entre les différents courants du socialisme et du communisme. Le dialogue est une bonne chose mais la géopolitique ne peut se contenter du débat idéologique de quelques intellectuels planqués à Lyonnars et votre situation régionale en est l'archétype. De ce fait, si l'UICS est une première étape, la véritable concrétisation de la coopération entre vous et le monde socialiste devra encore se faire par des accords bilatéraux.
- Et c'est exactement le type de partenariat que nous recherchons avec l'Adélie. Vous avez vos propres défis en tant que jeune nation sur la scène internationale et nous voulons y répondre en vous assistant au mieux, notamment par la coopération économique, politique et militaire. Comme vous le savez, vous avez un voisinage très instable, on a de cesse de vous le rappeler maintenant. Or, qu'en est-il des solutions apportées ? On ne peut évidemment pas enlever le problème initial, c'est-à-dire raser ces nations comme bon nous semble, mais on peut prévenir les dégâts éventuels qui peuvent être causés. Le Rosevosky est une nation autoritariste qui doit tourner son peuple vers une menace extérieure pour se maintenir au pouvoir, il n'est pas certain que ce régime soit à la longue très vivace et il est plus probable qu'il s'effondre sur lui-même d'ici là. Les Polks sont une toute autre affaire car ce sont bien les seuls dans la région à avoir compris l'intérêt de jouer sur plusieurs tableaux différents en multipliant les courbettes à gauche mais surtout à droite, vers Velsna et l'OND principalement. Et au milieu, il y a...vous.
- En bref, ce que nous vous proposons, ni plus ni moins, c'est de débuter un semblant de coordination militaire et opérationnelle entre nos deux nations dans un premier temps. On ne vous demande pas d'accueillir des dizaines de milliers de combattants estaliens, bien entendu, mais bien à apprendre les Adéliens à se défendre et à s'armer à travers des instructeurs militaires, une commission de réforme militaire, des conseillers militaires, des experts de l'industrie de la défense, etc. En bref, de quoi acquérir ce qu'une nation prend plusieurs années à créer, surtout quand elle sort d'un long coma diplomatique : du savoir-faire militaire.
"
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Le Président écoutait attentivement. Tandis que Manon prenait des notes à toute allure au point d'en faire tomber son bras, lui dresser une carte mentale dans son esprit de toutes les informations apportées par son homologue.

Florian comprit bien rapidement qu'il allait falloir trouver un juste milieu. Il n'était pas question de donner les rênes du pays à l'Estalie, ni de devenir un puppet state. Ses conseillers lui avaient vivement prévenu d'être méfiants ; malgré toutes leurs bonnes intentions, les Estaliens restaient l'une des puissances économiques les plus importantes du monde, ce qui a souvent comme finalité un égo surdimensionné. La renaissance de l'Adélie en tant que république socialiste ne pouvait se faire que de manière indépendante. Il était primordial de maintenir une ligne rouge à ne pas franchir.

Madame, je suis enthousiasmé en constatant votre attachement à la fois à la stabilité régionale et à l'épanouissement de notre idéologie. Vous avez complètement raison concernant l'UICS ; nous ne comptons pas trop nous fier, militairement voire même économiquement parlant, à des régimes peu démocratiques ou soucieux des droits humains. Nous pensons fermement que le socialisme ne doit pas être la mort de la liberté, ni des droits humains. Une réflexion qui pourrait bien me valoir la haine de certains dirigeants de pays membres de l'organisation, mais cela en vaut tellement la peine.

Manon, qui n'avait quasiment pas pipé mot depuis l'arrivée en Estalie, prit enfin la parole :

Nous sommes également persuadés qu'un développement rapide et efficace de notre arsenal militaire, ainsi que la formation de nos forces, est vital pour notre développement économique, dans un cadre régional peu envieux. Mais nous ne désirons pas non plus convertir l'Adélie en une dictature militaire, ni donner trop de pouvoirs aux forces militaires. La Révolution nous a à de maintes reprises prouvé qu'un trop grand pouvoir accordé aux forces militaires peut se révéler néfaste.

A vrai dire, nous préférons rester isoler, tant que possible, des conflits régionaux. Nous avons d'ores et déjà été contacté par les Polks. Nous ne sommes pas idiots, nous savons qu'ils pourraient tout tenter pour nous rallier à leur cause. Mais nous avons déjà également reçu les Rosevoskyens. Nous n'avons pas beaucoup de sympathie pour ce régime autoritariste, comme vous dîtes, mais maintenir une bonne dynamique avec nos voisins se révélera précieux dans les prochaines années. Nous ne souhaitons pas vraiment attirer l'attention de quelques états querelleurs qui ne comprennent pas que le bien des peuples passe, avant tout, par la paix.


Le Président reprit.

Mais nous sommes également conscients de notre faiblesse en matière de formation militaire. Et si nous pouvons compter sur l'aide précieuse d'alliés avec de réelles bonnes intentions... Nous ne pouvons qu'être reconnaissants. Pour le dire concrètement, nous serions ravis d'accepter votre proposition en matière de formation. Mais je vais prendre la liberté de vous poser une question franche : pourquoi l'Estalie, en sa qualité de grande puissance économique, a-t-elle autant à coeur de se rapprocher d'une nation comme l'Adélie qui n'a, honnêtement, pas grand-chose à lui offrir ? Est-ce par simple bonté de coeur, ou simplement pour défendre une noble idéologie ? Ne croyez pas que je voie le mal partout ; mais mes concitoyens, et notamment les députés, se questionnent.
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La question était franche, peut-être un peu trop d'ailleurs. Il était évident que ces Adéliens se doutaient de quelque chose dans les intentions estaliennes. C'était compréhensible. Volkiava s'était rapidement remémoré le sort de la Kartvélie quatre mois plus tôt et comment le SRR avait pris l'initiative de contrôler toutes les structures kartvéliennes une à une au lieu de laisser la Révolution y suivre son cours normal. Elle avait perdu le contrôle sur la politique étrangère estalienne dans ce secteur, elle devait le regagner et les méthodes douteuses du SRR n'étaient pas pour l'aider, elle qui souhaitait davantage satisfaire les intérêts communs des nations en toute intelligence au lieu de profiter de l'ascendant militaire, politique ou économique de l'Estalie pour favoriser une politique impérialiste. La franchise adélienne, qui cachait une forme de méfiance, n'était donc pas dénuée de sens à vrai dire. Ce n'était pas pour les beaux yeux de l'idéologie qu'on faisait de la géopolitique, en général.

"A vrai dire, Monsieur le Président, il y a effectivement des raisons sous-jacentes à nos avances diplomatiques mais ça, je pense que vous vous en doutiez, la diplomatie moderne fonctionne toujours ainsi. Contrairement à ce que vous pouvez croire, votre nation a plus à offrir à l'Estalie qu'elle ne le croit. Tout d'abord, votre gouvernement est pour ainsi dire un des seuls gouvernements qui nous soient amicaux dans la région, avec la DCT. Je pense donc que si l'Estalie ne veut pas perdre le peu d'alliés qu'elle a dans cette région du monde, elle doit favoriser leur capacité à se défendre et à résister aux ingérences capitalistes et despotiques étrangères, ni plus ni moins.
- En bref, nous souhaitons éviter l'isolement diplomatique dans cette partie du monde, je pense que vous devrez comprendre que cette raison en dit déjà long.
- Exact mais ce n'est pas tout. Votre position géographique est également un facteur à prendre en compte. Comme vous le savez peut-être, l'Estalie est une nation enclavée, elle n'a pas d'accès à la mer et pourtant, notre économie est en pleine expansion. la surproduction structurelle de l'industrie estalienne doit être déboursée dans l'exportation à l'étranger si nous voulons poursuivre la montée en puissance économique de notre pays et l'amélioration du niveau de vie de nos concitoyens. Il est donc impératif que nous trouvions des débouchés commerciaux. La Translavie est déjà en train de le devenir, la SCP se charge actuellement de construire un des plus longs chemins de fer de l'Histoire entre l'Estalie et la DCT.
- Bien sûr, en économie, vous devez savoir qu'on ne met pas tous ses oeufs dans le même panier. La Translavie est notre seul accès maritime pour le commerce.
- Voilà. Donc vous comprendrez que nous avons besoin d'un deuxième accès, afin de diminuer les risques de rupture des lignes commerciales avec nos partenaires extra-eurysiens. C'est là où j'en reviens à la proposition militaire : nous souhaitons que vous puissiez vous défendre étant donné que nous ne souhaitons pas perdre par un conflit quelconque un éventuel débouché commercial. Il est de toute évidence nécessaire, dans le domaine militaire, de faire preuve de prévention. Compte tenu de votre voisinage, votre armée joue un rôle dissuasif, elle évitera un conflit régional par sa simple démonstration de force et sa capacité à faire appel à de nombreuses ressources en cas de conflit, qu'elles soient nationales ou étrangères.
"

Hiduyk nota quelques points dans ses notes avant d'enchaîner après les explications de sa collègue.

"Bien sûr, le renforcement militaire doit rester proportionnel aux forces en présence chez vos voisins, nous ne proposons ni un surarmement, ni une escalade par une course aux armements. De plus, si certains militaires adéliens profitent de ce renforcement pour faire avancer un agenda plus politique, nous pourrions vous aider à vous en occuper. Tant que cela préserve la démocratie et évite un putsch militaire quelconque, l'Estalie sera toujours en second plan pour soutenir votre gouvernement face aux éléments subversifs. Personne à Mistohir ne souhaite voir éclore une seconde Rosevosky."
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Florian avait été plus explicite que voulu dans ses propos. Mais l'Estalie touchait indirectement un point essentiel qu'il avait failli oublier : le simple fait d'avoir l'alliance d'un pays comme l'Estalie pourrait être précieux dans de possibles campagnes de dissuasion dans l'avenir.

Nous comprenons cela. A vrai dire les débouchés maritimes de l'Adélie sont très restreints, mais nous possédons un port très dynamiques : Port Shjabenji, devenu il y a peu la deuxième ville en termes de population du pays. Malheureusement, la croissance démographique et économique très soutenue n'a pas pu être suivi par une développement efficace des infrastructures du port qui se retrouve vite surchargé. Et à vrai dire, il est difficile, dans un pays en reconstruction, de trouver les fonds nécessaires pour rénover un port qui aurait bien besoin de l'être. Sachez que nous sommes prêts à accorder aux Estaliens un accès privilégié si ceux-ci peuvent assurer une partie, au moins, de la rénovation, et même plus, si j'ose, au développement de Port-Shjabenji. Il est déjà difficile de gérer les problèmes de logements et de circulations consécutifs au véritable exode rural que nous avons connu...

Je suis personnellement conscient que l'alliance avec une puissance telle que la vôtre, sans volonté de flatteries inutiles, peut se révéler très efficace quand il s'agit de dissuasion. Je pense que les députés ne s'opposeront pas, au contraire, pour commencer, à un accord défensif entre nos deux nations. Et si l'Estalie se propose de nous apporter son aide en matière de formation militaire... je serais détesté de tous si je refusais une telle aubaine. Il est vrai que nous faisons preuve de méfiance, mais je dois dire que personnellement, je pense que l'Adélie a tout à gagner à faire de l'Estalie une alliée, une nation amie, de premier ordre.

Mais je dois vous faire parvenir une information importante. Les élections présidentielles se dérouleront l'année prochaine et je ne puis me représenter, j'en suis à mon deuxième mandat consécutif. Cela ne signifie nullement un changement radical de cap de l'Adélie, le futur président sera vraisemblablement un socialiste de mon camp, ou sinon, mais ça serait quand même étonnant, un communiste. Après, le Président ne possède en réalité quasiment aucun pouvoir décisionnaire. Mais il me semble approprié de vous signaler que vous ne converserez bientôt plus avec moi.
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Hiduyk regarda Volkiava un instant, la Commissaire avait compris ce que voulait dire le regard de son collègue. Ils avaient trouvés ce qu'ils cherchaient. C'est déjà ça, la réunion n'aura pas été inutile et l'invitation estalienne aura porté ses fruits. Maintenant, étant donné que les deux camps semblaient d'accord sur le principe, il fallait bien entendu en arriver aux modalités.

"Je comprends tout à fait que vous ne disposiez pas forcément des infrastructures portuaires nécessaires pour accueillir une telle activité commerciale et un flux de marchandises probablement très élevé compte tenu de la taille de l'économie et de celle de ses partenaires. Il est donc évident qu'en dépit de votre capacité de chargement actuel, Port Shjabenji ne soit pas complètement apte à répondre aux besoins estaliens et, dans un avenir proche, à vos propres besoins étant donné que nous sommes certains que l'économie adélienne a aussi de belles perspectives de croissance. Dans un intérêt commun de prévoir sur le long terme un tel projet d'afflux de marchandises à Port Shjabenji, nous pouvons vous proposer un plan d'investissement commun quant aux infrastructures portuaires de la ville.
- En somme, nous pourrions largement financer une bonne partie du projet, apporter notre expertise en la matière et tout le matériel nécessaire à l'agrandissement des infrastructures mais il est bien entendu nécessaire que l'Estalie, en échange, puisse obtenir des garanties afin que le commerce ne soit pas entravé et que les droits des coopératives exportatrices estaliennes soient respectées.
- Même si nous ne doutons pas, par ailleurs, que l'Adélie continuera de suivre la voie du socialisme même après les élections, nous ne voudrions tout de même pas que l'argent des Estaliens soit inutilement dépensé. Vous comprendrez que la situation de dépendance qu'un tel projet créait nécessite quelques garanties de protection pour l'Estalie, j'espère que vous comprenez.
"

Volkiava termina sa phrase avant de reprendre, se doutant bien qu'elle avait oubliée quelque chose.

"Ah et en ce qui concerne un accord de défense mutuelle entre nos deux nations, c'est exactement ce que nous cherchons pour l'instant. Libre à nos gouvernements d'étendre cet accord à l'avenir si des affinités se développent mais je pense qu'initialement, un tel accord est une base solide pour nos relations mutuelles."
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Le Président hocha la tête.

Je comprends. Ecoutez, ce que je vous propose, mais là encore tout texte, accord ou alliance discuté ici devra être soumis au vote de l'assemblée... Nous nous engageons sur une période de dix ans à offrir à l'Estalie des frais de douane drastiquement réduits, ainsi qu'une utilisation quasiment libre du port de Port-Shjabenji. Vous comprendrez également que, en tant que Président adélien, je préfère prévoir le pire, et si l'Estalie, dans les prochaines années, viendrait à changer de cap pour je ne sais quelle raison, je préfère ne pas donner des libertés sans limite non plus. Mais en signant un tel accord, aucun gouvernement adélien, aussi royaliste puisse-t-il être, ne pourra pas remettre en cause ledit accord, si il est signé par l'assemblée nationale, bien sûr. Cela dit, sans vouloir faire de la voyance, un refus serait plus qu'étonnant...

Nous aimerions, qui plus est, joindre à ce projet la rénovation de la ligne ferroviaire qui relie Port-Shjabenji à Tirës, dans l'ouest, et faire en sorte que cette ligne puisse joindre l'Estalie, afin de préparer les routes commerciales futures. De cela, le gouvernement adélien peut s'en charger intégralement, les voies ferroviaires en Adélie sont plutôt en bon état.
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"Bien entendu. Le greffier vous apportera l'accord en globalité entre vos mains à la fin de l'entrevue, libre à vous de le soumettre ensuite à votre assemblée afin qu'elle valide les accords conclus ou non."

Volkiava prit quelques notes avant de les donner à Hiduyk qui regarda la note, qui hocha la tête envers la Commissaire avant de s'excuser et de sortir de la pièce afin d'informer les greffiers des quelques instructions de la Maîtresse des lieux. Volkiava se tourna de nouveau vers ses invités.

"Très bien. Quant à la ligne entre Port-Shjabenji et Tirës, je pense que cela ne posera aucun problème aux projets futurs qui devront être mis en oeuvre. Néanmoins, si vous souhaitez vous en occuper, très bien, nous pouvons concéder sur ce point.

Au-delà de la coopération économique, afin de renforcer toujours plus les liens entre nos deux nations, nous pourrions négocier la mise en place d'accords bilatéraux secondaires afin de favoriser cette coopération. Ainsi, nous pourrions par exemple former un programme d'échange universitaire entre l'Estalie et l'Adélie afin que des étudiants de nos deux nations puissent effectuer des échanges entre les universités et permettre notamment d'obtenir des compétences spécifiques dans lesquelles nos pays peuvent potentiellement être en retard en terme d'instruction et d'apprentissage. Le programme pourrait également concerner les enseignants afin que ceux-ci puissent être formés et ainsi acquérir des compétences supplémentaires en territoire étranger et peut-être ainsi donner un aperçu de la pédagogie scolaire différente. Cela aura au moins l'avantage de ne pas cantonner l'innovation de l'éducation à nos pays respectifs et de favoriser la créativité pédagogique des enseignants et ainsi renforcer l'efficacité respective de nos systèmes éducatifs. Qu'en pensez-vous ?
"
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Je suis complètement d'accord. Il y a un point sur lequel nous sommes assez fiers, c'est notre expertise en matière d'archéologie. Nous ne sommes pas encore très reconnus pour des raisons évidentes, mais l'Université d'Archéologie de Cité-Rouge a formé les plus prestigieux archéologues adéliens. L'Adélie est riche d'un passé antique et médiéval. J'avoue que je ne sais pas exactement ce qu'il en est en Estalie... et, de manière générale, les études historiques ont leur renommée en Adélie.
C'est une excellente idée.

J'aimerais aller plus loin avec l'ouverture d'une ligne aérienne régulière entre Fushjendija, la plus grande ville de notre pays, et vôtre capitale, afin de favoriser les échanges et le tourisme. Cela pourrait s'accompagner également d'une liaison aérienne avec Port-Shjabenji, ce aurait pour effet de favoriser le tourisme dans la région.

Excusez-moi si je m'emporte un peu, mais...
il parla avec une voix un peu plus basse comme si les murs avaient des oreilles cette rencontre se passe tellement bien par rapport à la venue des Rosevoskyens...
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"Rassurez-vous, l'histoire médiévale estalienne est toute aussi intéressante et je suis sûr que nous aurons beaucoup à partager sur le plan historique au sein du corps universitaire. Je pense donc d'ailleurs que dans cette optique, d'animer les recherches archéologiques et historiographiques entre nos nations, une base de données commune qui permettrait la traduction des textes et des sources historiographiques dans nos langues respectives peut être un atout précieux dans l'avancée dans ce domaine. Nous laisserons bien entendu la porte ouverte à nos universités respectives afin d'amener leurs propres initiatives mais nos accords en ce jour devront surtout leur ouvrir la voie à une telle coopération.

Quant à la ligne aérienne entre Fushjendija et Mistohir, cela me semble raisonnable comme proposition. Je crois sans mal que ce sera bénéfique d'établir une telle ligne, autant pour le fret commercial de marchandises entre nos deux nations ainsi que pour le transport de passagers et l'essor du tourisme. Votre climat étant plus bénéfique que le nôtre, j'en n'en doute pas, cela vous assurera certainement des revenus substantiels. Quant à nous, nous trouverons bien un moyen de rendre cet échange intéressant de différentes manières dans biens des domaines.
"

La Commissaire ne put s'empêcher d'esquisser un léger rire à la remarque du président adélien, essayant de rester quand même un peu sérieuse malgré la remarque de son homologue adélien.

"Je veux bien vous croire sur parole sur ce coup ! Il faut croire que ce pays a un sens assez particulier du mot "diplomatie"."
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