04/10/2015
11:21:06
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Camarade ou pas camarade VIII - Rencontre UICS - PSP

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Camarade ou pas camarade VIII - Rencontre UICS - PSP

Tamotu Tuiaa
Tamotu Tuiaa

Pour sa première mission officielle au sein de l'organisation, on avait demandé à Tuiaa de s'occuper de la demande d'entretien du PSP, le Parti Socialiste Pal, originaire de Pal Pontaise et représentant les intérêts des Blêmes face à l’oppression des Polk. Tuiaa fut d'abord relativement circonspect devant sa nouvelle tâche. N'y a-t-il vraiment pas, au sein de l'immense bâtiment de l'UICS, un représentant ne serait-ce qu'un peu plus compétent sur la question Blême que moi, aborigène d'une île se trouvant à presque 15 000 km de la Pal Pontaise, qui ne connaît l'histoire de ce territoire que via des récits semi-fantastiques colportés originellement par des marins eurysiens en escale à Kinagi, et qui dépeignent les Blêmes comme des vampires silencieux, cruels et secrets ? pensa-t-il pendant plusieurs heures.

Mais consciencieux, et par envie de montrer une vision positive de Kinagi aux camarades de l'organisation, il avait réalisé un travail de recherche et de renseignement assez important sur la Pal Pontaise, l'histoire des Blêmes et les réalités économiques, politiques et sociales de ce territoire. Il s'entretint également au téléphone avec Paolo Gordini, un sénateur velsinien dont on lui avait dit qu'il avait été en Pal et qu'il avait même déjà rencontré Rafael Slack. Dire que Tuiaa fut fasciné par l'histoire et par les réalités qu'il était en train de découvrir serait un euphémisme tant il venait de mettre la main sur un sujet qui, aussi bien politiquement que personnellement, l'avait marqué. Cela lui semblait être une situation classique de domination coloniale et impérialiste, thème si central pour le parti mais également dans sa vie personnelle. Il avait lu toute la documentation sur la Pal présente au siège de l'UICS, fouillé des dizaines de rapports anthropologiques, des témoignages plus ou moins fiables de prétendus voyageurs, et il examina même les fameuses légendes noires qui entourent ce peuple Blême si mystérieux.

Pour lui, en Taihoraniste particulièrement convaincu, c'était une évidence : les Blêmes étaient sans aucun doute des frères de lutte. Il reconnaissait, dans la façon dont on les dépeignait en monstres et dont on ridiculisait leur culture, la façon dont on avait, pendant des décennies avant la Guerre Civile, représenté son propre peuple. Les Blêmes n'étaient pas plus des mages noirs que les Aborigènes kinagiens des cannibales sauvages. Il en venait, peut-être par erreur — il le découvrira — dans son for intérieur à nier tout défaut à ce peuple si opprimé : tous les préjugés négatifs, sans exception, qu'il avait entendus n'étaient que de la propagande Polk honteuse colportée par des ignares, dont il faisait partie il y a encore quelques jours, incapables d'analyser efficacement les rapports politiques internationaux et la réputation d'un peuple sous le prisme de la domination politique et idéologique impérialiste.

Mais il le savait, cela lui avait été bien spécifié : le but de cet entretien n'était pas de faire une séance de discussion enflammée sur la nécessité de la Révolution anti-impérialiste mondiale, mais d'étudier, au nom de l'UICS et de tous ses mouvements internes, le bien-fondé et le sérieux d'une demande formulée par une organisation politique. Ses considérations personnelles et sa pensée sur la question Blême devaient rester secondaires dans cet interrogatoire. Ses opinions, ainsi que son sentiment de culpabilité interne pour avoir cru si longtemps aux clichés du Blême surnaturel, en dépit de tout bon sens matérialiste, attendraient son auto-critique révolutionnaire annuelle pour être formulées officiellement. Il était donc rentré dans le bureau de la rencontre, en avance pour le préparer, avec une pensée simple et objective : bien réaliser cet interrogatoire. Après avoir installé des chaises, calibré les outils de traduction et préparé du café, il s'installa sur une des dites chaises en attendant l'arrivée prochaine de son interlocuteur.


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Rafael Slak avait quitté la Pal comme tout le monde : par un passage secret. S’il ne fallait pas surestimer les renseignements polk, en particulier à Gurapest, ville qui n’était pas la leur, le président du PSP se méfiait davantage des mouchards de la Transblêmie et ceux d’Apostol Pop. Deux adversaires très différents l’un de l’autre, mais dangereux chacun dans leur genre, et qui n’hésiteraient certainement pas à monter une cabale contre lui si on apprenait qu’avaient débuté des tractations secrètes avec l’UICS.

Officiellement, il avait la crève, ce qui justifierait bien une absence de deux jours. En plus c’était le week-end et les week-end, à gauche, c’était sacré. Il avait en réalité quitté la capitale à cheval tôt dans la matinée, grimé pour passer inaperçu, et avait rejoint plus au sud une petite station de train pour récupérer le Grand Meridion et descendre jusqu’à Port Ponant. Là, il lui avait été facile de s’embarquer jusqu’au point de rendez-vous et l’atteindre le lendemain matin, à l’aube.

Le temps de prendre une douche, d’avaler un croissant et de relire un coup ses dossiers, il avait été introduit au bureau des rencontres où l’attendait Tamotu Tuiaa, un Kinagien de cette lointaine île du sud-Nazum qu’il ne connaissait que de cartes. Si la conversation dérivait vers leurs nations respectives, il s’agirait d’improviser…

― Camarade Tuiaa, c’est un honneur.

Il lui offrit une poignée de main et prit place de l’autre côté du bureau.

― Je tenais avant tout à remercier l’Union pour cette entrevue et la prise au sérieux du message du PSP, votre aide sera précieuse dans le destin de la Pal. Comme je le disais, nous combattons sur de nombreux fronts, aussi bien idéologiques que militaires et sur chacun d’eux nous sommes pris en tenaille. La tentation fasciste que fait peser la Transblêmie sur nos terres fait craindre à mon parti une révolution réactionnaire si le peuple venait à se soulever, quant aux Polk ils nous maintiennent dans un état de dépendance objective qui fait craindre à ceux que cela révolte que les temps seraient pires si nous venions à les bouter hors de la Pal.

Il eut une moue préoccupée.

― Seule l’offre d’un espoir concret, tangible, est en mesure de mettre fin au fatalisme qui enchaîne une partie de la population, et de faire basculer la révolte dans le camp du progressisme. Nous avons besoin d’alliés pour permettre l’aboutissement de ces deux étapes révolutionnaires.
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Tuiaa écouta attentivement les paroles de son interlocuteur et commença très rapidement à prendre des notes. Il n'était pas question de montrer à son interlocuteur une seule once de relâchement au travail, ni lui faire croire que ses demandes n'étaient pas pris au sérieux. De plus il le savait, plus son rapport de réunion serait riche et précis plus Kinagi continuerait de justifier sa place au sein de l'appareil fonctionnel de l'UICS. Il acquiesça aux paroles de Slak et prit la parole calmement mais toujours avec cet air convaincu et déterminé qui le caractérise.

- Comme vous l'avez dit et comme cela a été indiqué dans notre réponse à votre demande, l'UICS prend très au sérieux votre demande ainsi que la situation tragique et révoltante de votre peuple. Nous ne pourrions décemment pas nous revendiquer comme une organisation socialiste si nous ne ressentions pas un lien de fraternité fort et clair avec votre lutte et votre combat. Nous sommes donc tout particulièrement satisfait de la prise de contact nécessaire entre votre mouvement, que nous estimons de la plus haute importance à la lutte naturelle de votre communauté contre l'oppression et l'humiliation coloniales et impérialistes que vous devez subir et notre organisation qui a comme une de ses valeurs centrales la libération des prolétaires et des peuples du monde entiers des griffes de la folie des tyrans impérialistes.

Ici, Tuiaa cherchait principalement à montrer que derrière toute la procédure, parfois austère sur laquelle reposait cette réunion, il, et par extension l'Organisation, ne perdaient pas de vue la caractère terrible et profondément révoltant de la situation dans laquelle se trouvait le PSP. Il avait conscience que le fait de devoir poser des questions techniques à un homme qui devait chercher principalement à attirer le soutien et la compassion révolutionnaire pouvait sembler froid ou profondément déconnecté. Mais il était également parfaitement au courant que ces entretiens étaient nécessaires au bon déroulé de la prise de décision qui devrait avoir lieu après cette réunion, ils permettaient de glaner des points d'arguments pour ou contre les mesures demandées et globalement de pouvoir juger de la cohérence interne et du sérieux de l'organisation candidate à l'entrée ou à une aide.

- Avant de commencer je dois vous indiquer des formalités pour que vous puissiez comprendre les modalités de cette réunion. Lors de l'entretien que nous allons avoir dans les prochaines minutes, je vous poserai diverses questions sur votre mouvement, votre lutte, vos objectifs et votre motivation à rentrer en contact avec notre organisation. Ces informations nous permettront de mieux comprendre la situation, et d'en avoir une vision humaine et franche à l'inverse des rapports et des informations publiquement disponibles dont nous connaissons la tendance à n'être que des visions et des jugements exercés par l'autorité dominante polke; mais également de nous aider à prendre des décisions. Vous ne devez pas voir cela comme un interrogatoire ou un jugement, il n'y a techniquement pas de mauvaises réponses. Nous disposons déjà au sein de l’organisation de partis ou de mouvements très divers, certains sont illégaux dans leurs pays et persécutés quand d'autres sont aux pouvoirs, on y retrouve des idéologies qui vont du Loduarisme le plus orthodoxe à l'anarchisme. Nous ne jugeons donc pas les mouvements progressistes sur leur fonctionnement ou leur appartenance, aucunes lignes idéologique précises ne sont imposées, à part le souhait de dépassement sincère de la domination capitaliste. L'objectif des questions qui vont suivre est de répondre et d'éclaircir des interrogations, de comprendre et de mettre en avant la cohérence de votre approche progressiste et de définir avec vous les mesures qui seraient le plus adaptés afin d'assurer des liens forts et efficaces entre l'UICS et votre mouvement.

Maintenant que cela est clair, je pense que l'on peut passer à la première question : comment décririez vous votre mouvement ? En détail sur quelles bases idéologiques repose-t-il ? Et comment est-il organisé, notamment pour faire face à l'oppression du pouvoir Polk ?

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Rafael Slak signifia d'un mouvement de tête que tout était parfaitement clair en ce qui le concernait.

― C'est effectivement ce que mon parti est venu chercher à l'UICS : moins une structure idéologique que des alliés, dans leur diversité, et prêts à respecter la notre. Ce serait de toute façon mentir que de nier que les Blêmes ont leur propre particularisme, mais il est, je vous l'assure, bien loin des contes sordides que la propagande polk et transblême a pu laisser dire sur nous.

― Pour répondre à votre question maintenant : le Partidul Socialist Pal est une alliance intersyndicale de gauche, nous sommes donc à la fois un parti politique et une intersyndicale, nous trouvons notre origine dans le syndicalisme révolutionnaire que nous avons abandonné pour devenir une organisation politique visant la victoire électorale. Notre stratégie au siècle dernier a pendant longtemps été de rechercher des alliances avec les syndicats polk et une alliance contre nos bourgeoisies respectives mais cela a échoué pour de multiples raisons. La structuration raciale de la société en Polkême est l'une d'elle : même s'il est un prolétaire, le travailleur polk est toujours moins misérable que le travailleur blême et tire de l'exploitation des miens un part de son confort de vie, ainsi les hiérarchies en Polkême se maintiennent-elles parce que même le plus malheureux des Polk s'estime privilégié de ne pas être un Pal et préférera l'alliance avec les possédants, la bourgeoisie et les seigneurs féodaux, pour préserver ses privilèges, qu'une alliance entre prolétaires qui le rabaisserait.

On ne sentait pas spécialement de rancœur chez Rafael Slak en décrivant la situation dans son pays, la situation semblait avoir été digérée. Elle remontait après tout à près d'un siècle.

― Nous avons longtemps soutenu la lutte armée et l'action directe mais la création d'instances démocratiques consultatives en Pal ponantaise nous a fait abandonner cette stratégie. Nous espérions pouvoir obtenir des victoires par le vote, mais le parlement de Pal ponantaise s'est assez vite révélé inutile. Le mal était fait, nous avons perdu en politisation. Comme je l'expliquais à l'Union, le PSP s'est réuni en congrès secret il y a quelques semaines. Le mouvement social a été réprimé avec plusieurs blessés et on parle en Polkême de fermer le parlement inutile. De vous à moi ce ne serait pas un mal, si cela permet la radicalisation d'une partie des travailleurs. Le parlementarisme a causé beaucoup de tort à la lutte.

― En ce qui concerne nos méthodes, une partie reste à réinventer comme je vous l'ai dit nous n'avons acté la reprise de la lutte armée que récemment. Avant la création du parlement certains de nos syndicats possédaient tout simplement une branche armée, nous allons en refonder une seule pour le PSP. Le reste... reste à faire. Mon peuple n'est toutefois pas démuni en matière d'organisation secrète de la lutte, catacombes et bosquets de pins sont nos maquis historiques, le pays est truffé d'anciens tunnels, galeries et mines abandonnées qui nous permettent de nous déplacer assez librement sans être vu. De manière générale, l'autorité Polk ne dispose pour l'heure que d'une armée estimée à 40 000 hommes et seuls un quart sont déployés en Pal ponantaise. Sans minimiser leur menace, ce n'est pas assez pour surveiller tout un pays, Gurapest, la capitale échappe par exemple à leur influence, tout comme la steppe profonde.

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La femme arriva un peu après tout le monde. En uniforme, avec un lourd dossier à la main, son arrivée relevait plus de la surprise qu'autre chose. Jusqu'à maintenant, on avait pas vu les Loduariens s'intéresser à beaucoup de candidatures, non, les Loduariens géraient l'aspect administratif. Mais pas les candidatures. Ça de mémoire d'homme, jamais ils ne s'en étaient chargés. Pourtant on savait qu'ils avaient surveillé, jusqu'à maintenant.

Bonjour à vous, camarade Tuiaa. Pendant que j'y pense, le bureau de liaison des communications de l'union tient à vous voir, ils ont des problèmes avec vos informations téléphoniques. Enfin, je n'ai pas bien compris mais ils demandent juste à vous voir. Pas maintenant, hein, quand vous serez disponible. Leurs magouilles attendront que nous aillons fini avec les sujets d'intérêt. Bonjour à vous, camarade Slak, par ailleurs. Contente de voir que vous avez réussi à arriver jusqu'ici. Par ailleurs, désolé pour le retard, mais je viens de recevoir un rapport du secrétariat général, qui vous concerne directement, camarade Slak.

Elle désigna le dossier qu'elle avait apporté.

Je pense que vous allez apprécier son contenu. Bref, je suis la lieutenante Ava Joll, du bureau militaire Loduarien dédié à l'Union Internationale du Communsime et du Socialisme. Nous sommes ici pour étudier votre dernière demande, et sachez que, indépendamment de tout ce que l'Union pourra décider par la suite, le Camarade Secrétaire Général a donné son accord personnel pour un soutien armé de votre cause. Ce qui est noté dans mon dossier. Je suis arrivé néanmoins assez tôt pour entendre quelques choses à travers la porte, et ce que j'entends est de bon augure. Au niveau militaire seulement, attention. C'est pourquoi je vous poserais une seule question avant de continuer et si mon camarade veut bien entendu me laisser accéder à votre réponse. La lutte armée, comment et à quel niveau comptez vous l'utiliser ? Que nous puissions savoir comment nous pouvons vous soutenir si nécessaire.
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Rafael Slak venait tout juste de finir de parler lorsque la porte s'ouvrit promptement, laissant entrer une soldate, dossier sous le bras, qui s'exprimait avec un fort accent français. Par réflexe, le Blême porta la main à son poignard, avant de se souvenir qu'il n'avait pas pu passer la douane loduarienne avec. Heureusement, sans doute, ç'aurait été malvenu de menacer un hôte en sursautant.

Un peu confus et ayant saisi que la nouvelle venue n'était pas menaçante, il se leva pour lui serrer poliment la main tout en la laissant s'expliquer. Elle mentionna rapidement le secrétariat général ce qui correspondait au sommet du gouvernement communiste Loduarien. Ce n'était pas rien.

Il fut si surpris de se voir annoncer de but en blanc que la Loduarie acceptait de fournir unilatéralement le PSP en armes qu'il passa complètement outre l'incongruité d'imaginer cette officier en train d'écouter par le trou de la serrure un instant plus tôt.

― Et bien c'est... inattendu, et extrêmement généreux de la part de votre nation, c'est évident. Votre aide sera à n'en pas douter d'un grand secours pour notre cause, la l'armée loduarienne est réputée, son concours est en mesure d'inverser le rapport de force jusque là en notre défaveur.

Tout dépendait en fait de ce que le camarade Lorenzo était prêt à lâcher, mais ce n'était pas encore le temps des compte d'apothicaire, un soutien militaire était déjà plus que ce qu'il avait espéré dans l'immédiat.

― A vrai dire, la stratégie militaire est assez simple en Pal ponantaise : il faut défendre Gurapest et assiéger Port Ponant où se trouve le gros de la garnison polk. Les Vol Drek enverront leurs cosaques pour reprendre les villes et mettre la steppe à feu et à sang, ce sera donc un combat urbain qui se jouera. Il faut que Port Ponant tombe avant que les cosaques polk ne la rallie, s'ils ne tiennent aucune cité ils sont coincés dans la steppe, à découverts. Alors soit nous les forçons soit à négocier, soit nous les forçons à nous assiéger et dans ce second cas, la population se soulèvera contre eux voyant que nous remportons des victoires.

Il balaya tout cela d'un geste de la main.

― Cela peut sembler un plan un peu grossier présenté ainsi, je ne suis pas chef de guerre ni général, comme dans toute guerre civile ce qui compte c'est de savoir si le peuple se soulèvera avec nous ou non, et s'il le fait, nous devrons lui fournir assez de fusil pour constituer en quelques jours une levée de masse qui obligera les Polk à se retrancher.
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Tuiaa avait semblé un peu décontenancé par l'arrivée soudaine de cette représentante Loduarienne qu'il n'avait jamais vu et dont il n'avait jamais entendu parler. Il n'était même pas spécialement au courant de l'existence de ce Bureau ni de l'acceptation unilatérale de participation militaire. Mais bon il mit rapidement cette surprise de coté et se reconcentra sur la prise de note et la préparation des questions. Il n'avait de toute façon pas à rentrer en contradiction avec les intérêts militaires individuels de la Loduarie. Il écouta avec attention ce résumé de la position militaire en Pal Ponantaise. Il profita d'un rapprochement entre les thèmes à la fin de la réponse de Slak pour glisser rapidement sa question.

De quelle manière imaginez-vous la construction de votre État après la révolte et le retranchement de l'armée Polk ? Par quel processus pensez vous mettre en place vos idées ? Et d'ailleurs quelles sont-elles ? Comment comptez-vous traiter avec les colons polks ? Avec les Blêmes fidèles à la Transblêmie ? Pensez-vous qu'un rapprochement entre la Transblêmie et la Pal Ponantaise soit une réalité souhaitable pour la majorité de votre peuple ?

Il aimait beaucoup ces enchainements de questions, elles forçaient l’interrogé à réfléchir à l'articulation de ses idées et de ses arguments. Elles mettaient en évidence avec une efficacité radicale les possibles incohérences dans un discours. C'était une méthode utilisé par le PPB dans ses séances d'auto-critiques révolutionnaire si plébiscités par la direction du parti. Si ici l'objectif et le contexte étaient différents puisqu'il ne s'agissait pas de faire avouer des erreurs mais plutôt de comprendre une vision, l'effet était le même : une mise en avant presque automatique des incohérences et la capacité rapide d'étudier le sérieux de l'interlocuteur.

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Rafael Slak se retourna vers son hôte Kinagien, sans parvenir à bien savoir si la proposition d'aide militaire loduarienne était conditionné à la décision de Tuiaa ou s'il négociait maintenant une sorte de bonus.

― Je ne voudrais pas avoir l'air d'esquiver la question mais je pense que la forme de l'Etat social Blême devra émaner de ses instances représentatives, en cela je ne peux que m'exprimer sur le processus qui aboutira à la construction de cet Etat, non sur ses modalités finales de gouvernance. Cependant nous nous appuyons sur les forces intersyndicales blêmiennes qui sont, par ailleurs, dans nos projections, notre principal vivier en matière de recrutement militaire. La Pal ne possède pas de troupes à l'heure actuelle, mais elle est forte d'un maillage de solidarités ouvrières anciennes que nous mobiliserons. Je pense pouvoir dire que le rôle que joueront les travailleurs sera nécessairement déterminant dans une guerre de libération et devrait les placer dans une position favorable pour former une assemblée constituante. Pour ma part, mon parti et ses cadres revendiquent humblement de former un gouvernement provisoire, mais nous sommes et demeurons avant tout les obligés du peuple.

A la question du sort des Polk, Rafael Slak prit le temps de joindre ses mains avant de répondre posément.

― J'ose bien sûr espérer que ce que je dis dans cette pièce n'en sortira pas. La bourgeoisie Polk et ses subordonnés ne sont pas nos amis et à en juger leur esprit raciste, je doute qu'ils le deviennent à courts termes. Cependant nous sommes frères par notre humanité et nombreux sont les membres du PSP a penser que la décolonisation Blême ne doit pas s'arrêter aux frontières de la Pal mais libérer également, si elle le peut, la classe ouvrière polk qui se retrouvera privée de notre exploitation et sera donc en mesure de conscientiser son appartenance de classe. Nous pensons commencer par adopter une position intransigeante sur la présence des élites Polk en Pal ponantaise, position qui pourra être nuancée dans le cadre des négociations qui adviendront avec la Polkême et pourront servir de concessions. Les Polk possèdent et possèderont encore dans les prochaines années, même en cas de victoire de notre camp, une manne agricole et minière dont ne peut se passer la Pal ponantaise. Bien que nous espérons beaucoup des liens que nous nouerons avec les nations socialistes voisines, on ne tranche pas mille ans de liens économiques d'un seul coup, il faudra que la Pal et la Polkême négocient leurs nouvelles relations.

La question de la Transblêmie, en revanche, lui fit froncer les sourcils.

― Il n'y a aucun lien possible avec la Transblêmie, j'en ai peur. Le Grand-Duché est l'allié objectif du gouvernement féodal de la Polkême, il divise les travailleurs et les maintient dans un état de conscience archaïque et dans la pensée magique. Mais la Transblêmie vit de ce qu'elle est une promesse politique, de souveraineté et de dignité revancharde. Si nous montrons que nous sommes en mesure d'atteindre ses objectifs mieux qu'elle par l'émancipation des Blêmes, nul doute que son influence disparaitra rapidement.

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Tamotu Tuiaa semblait satisfait des réponses de son interlocuteur. Il n'y avait pas dessellé d'incohérences majeures et les principaux thèmes qu'il souhaitait voir abordés l'avait été. Il avait encore quelques questions à poser autour des caractéristiques du PSP avant de passer à des questions plus précises sur la relation souhaitée entre le mouvement Blême et l'organisation. Mais d'abord il souhaita, suite à sa remarque, rassurer son interlocuteur sur la portée de ces discussions.

- Bien évidemment tout ce qui est dit dans le cadre de ces discussions, ainsi que les notes que nous prenons, n'ont pas vocation à quitter l'UICS. Les informations que vous nous donnez servent uniquement à comprendre les portées politiques et stratégiques de la collaboration entre votre mouvement, votre peuple; et l'organisation. Vous pouvez répondre aux questions avec la plus grande transparence et tranquillité.

Il attendit quelques secondes pour voir si sa camarade Lodurienne n'avait rien à ajouter puis commença ensuite à poser sa nouvelle question.

- Maintenant que tout cela à été mit au clair, je pense que nous pouvons passer à autre chose. Comme vous le dites, la base de votre force politique et mobilisatrice repose sur l'intersyndicale des ouvriers blêmes. Pouvez-vous nous faire un résumé rapide des différents mouvements principaux qui composent cette intersyndicale ? Il y a t-il des différences idéologiques majeurs entre plusieurs mouvements ou courants ? Si oui est-ce une cause de tensions entre ces derniers ? Nous avons vu plusieurs fois dans l'histoire, des mouvements, reposants sur des alliances établies entre des acteurs progressistes mais ayant des intérêts, des histoires ou des objectifs divergents, être affaibli par un manque de communication, de compréhension et d'entente entre ses forces. Il y a t'il donc au sein du PSP, et de ses mouvements proches, une politique de mise en commun des stratégies et des objectifs ou laissez-vous une certaines indépendance à vos courants membres ?
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