04/10/2015
10:59:21
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Camarade ou pas camarade VII - UICS-PCA (Antérinie)

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Les squatteurs (HRP: prend place après l'évènement de l'exercice d'alerte)



"Le moins que l'on puisse dire, c'est que toute cette histoire nous aura bien emmerder.". Devant la machine à café de la buvette, Piero Lardi, le représentant du PEV à l'UICS et membre du comité central n'était pas avare de plaintes auprès de ses camarades zélandiens. Certes, cette affaire d'alerte faisait partie des protocoles de sécurité des loduariens, mais sur le plan du travail, cette affaire équivalait à une journée perdue. Et l'UICS avait en ce moment besoin de tous les efforts de ses membres afin de répondre à la demande sans cesse grandissante d'organes de lutte à échelle internationale. Ces dernières semaines avaient été le lieu d'un regain d'activité important: d'une part parce que la géopolitique mondiale connaissait de nouveaux remous récents, notamment sur la question coloniale avec cette affaire gondolaise, et d'autre part parce que le nombre croissant d’adhérents à l'organisation faisant mécaniquement augmenter les demandes d'un tel ou d'un tel vis à vis de la délégation velsnienne, qui n'était pas fâchée que d'autres prennent parfois les dossiers en main. Aussi, Piero Lardi passait le plus clair de son temps à se plaindre de sa fatigue, et les pauses-café ont prit des allures de rituel où l'on retrouve les mêmes têtes, et en premier lieu les zélandiens qui ont l'air toujours là quelque soit l'heure. Il y a parfois les nazumi du Kinagi qui viennent se ressourcer vers 10h, les gondolais de l'AD sont souvent de passage peu après, tandis que les délégués du Negara Strana se pointent souvent après la fin de la session matinale des commissions du Conseil suprême. Piero Lardi connaît pour ainsi dire tout le monde...sauf peut-être...

Il y avait depuis plus de deux semaines trois types faisant le planton devant la machine à café, et curieusement...à chaque fois que Lardi venait s'attabler, il n'arrivait pas à mettre un nom sur ces visages. Les jours passent et cette question devient omniprésente dans son esprit à chaque pause. La curiosité amène Lardi à demander à ces trois hommes: "Excusez moi mais ça fait des jours et des jours que je vous croise mais j'ai aucune idée de qui vous êtes. Pourrais-je savoir à qui j'ai affaire ?". De suite, on lui répond "Armand Valin". Armand qui ? Bon, ce doit être un nom zélandien...attends une minute...

Lardi se penche à nouveau vers les étrangers:
- Ah mais c'est vous la candidature ! Toutes mes excuses messieurs, venez avec moi je vous prie. Nous avons rendez vous salle 4, étage 2. Les loduariens sont assez tatillons sur ce genre de choses.

Le début de cette réunion était pour le moins atypique, mais Lardi se disait qu'en avançant, cela irait tout seul...Il fit signe aux antériniens de prendre place en face de lui, dans ce qui était une petite salle de réunion aux décors tout loduariens et brutalistes. Ces derniers avaient assez poireauté:
- Mes bien chers camarades, bienvenue à l'UICS. C'est un plaisir de procéder à votre accueil aujourd'hui, mais entrons tout de suite dans le vif du sujet.

Cet entretien aura pour but de déterminer plusieurs choses: en premier lieu, nous voudrions apprendre à connaître votre mouvement. Les seules informations dont je dispose actuellement sont contenues dans cette lettre, et celle-ci demeure vague sur certains points. Aussi, ma première question est la suivante: comment s'organise la vue du PCA en interne ? Vous vous dites proches des doctrines de l'eurycommunisme, mais j'aimerais savoir de votre bouche ce que vous entendez par là. Comment se compose la direction de votre parti ? Comment vos fédérations, vos sections et vos militants occupent le terrain ? Quels sont vos axes programmatiques ?

Je vous en prie, prenez votre temps. Nous en avons pour un moment de toute manière. Après cela, j'aurai quelques autres questions.
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Les squatteurs les libérateurs de Cafétarias…

Antoine Malo attendait depuis quelques jours sa rencontre, enfin plutot son entrevue, avec un représentant de l’U.I.S.C, si il avait connu quelques péripéties à Lyonnars, à commencer par un malheureux exercice de sécurité qui a failli devenir une seconde révolution prolétarienne, il n’en était pas moins motivé à intégrer l’organisation, afin de renforcer la position du Parti lors des congrès de gauche, peu nombreux, il faut l’avouer, en Antérinie. Ainsi lorsque Lardi les accompagna dans les sombres couloirs de l’U.I.S.C, il ne put s’empecher de constater que les camarades rimauriens lui lancaient des regards complices lorsqu’il passa devant les bureaux de la Libertaire Rimaurienne, enfin surtout lorsqu’il leva les yeux de son collier de trombones… Puis il vit les camarades gardes de la sécurité, qui se souvenaient visiblement de la furie des antériniens, au vu de leur attitude méfiante à leur égard. Puis lorsqu’ils arrivèrent devant la salle de réunion, ils virent le camarade Henri, tout penaud qui se promenait sans but dans les couloirs du Siège.

-Et ben alors qu’est ce que tu fous ? Fit Antoine.
-Oui c’est vrai, alors que le Camarade Antoine se battait pour la cause révolutionnaire, que moi je m’assurais de connaître les dossiers, toi tu t’amuse à aller discuter avec les camarades valinoréens ! Rappela le Camarade Jean Michel.
-Oui mais je m’étais perdu… Répondit le pauvre Henri.
-Bon c’est pas grave, accompagne-nous, le camarade Lardi va certainement s’impatienter, mais sache qu’on réglera ton cas plus tard. Fit Antoine l’air réprobateur.

Bonjour Camarade Lardi, firent les trois hommes en s’asseyant. Tous écoutèrent les questions du représentant du P.E.V et une fois qu’il eut terminé, Jean Michel prit la parole.

-Je vous remercie pour le temps que vous prenez avec nous camarade, alors commençons par le commencement. Qu’est ce qu’est l’Eurycommunisme ? Ce que l’on peut dire de ce mouvement se résume en quelques mots, le Loduarisme dur, nous voyons l’Eurycommunisme comme le système loduarien, c’est à dire adoptant un centralisme démocratique, que le camarade Marcos avait dévellopé dans l’un de ses manifestes ; débats internes réguliers, discipline militaire pour les militants, élections internes régulières et prises de décisions collectives le plus souvent possible. C’est en tout cas comme ça que nous voyons le système eurycomuniste.

Nous l’appliquons ainsi ; d’abord nous avons les syndicats, directement rattachés au Parti Communiste Antérinien, en effet, le contrôle d’un syndicat est réservé à un parti en particulier, ainsi il peut très bien y avoir des syndicats d’obédiences socialistes et anarchistes (notamment à Marcine) mais un changement de représentant en fonction de ses orientations politiques (ils sont élus chaque année) permet de faire basculer ce dernier vers un parti ou un autre, et la « possession » de syndicats devient un enjeu majeur dans chaque congrès annuel de la gauche, encore minoritaire en Antérinie, ainsi cette dernière est obligé de se fondre en un seul parti, les sociaux-démocrates ont du nous rejoindre durant les élections de 2014. Si je vous dit cela c’est pour vous permettre de mieux visualiser la situation, donc la possession d’un syndicat nous amène à réunir chaque année le Grand Conseil Syndical, institution qui rassemble les représentant syndicaux, élus par les syndiqués, pour que ces derniers élisent leurs représentants lorsqu’ils seront représentés au parti confédéral, un même système permettra donc aux élus confédéraux d’élire les représentants nationaux, qui siégeront au P.C.A, ces derniers ne sont pas pour autant les seuls élus à siéger ici, car ils appartiennent au Conseil Syndical, chargé de négocier à l’échelle impériale des accords avec le ministère de l’économie, une seconde instance représente cette fois-ci les militants, qui élisent leurs cadres, qui élisent ensuite les représentants des branches militantes au P.C.A, en suivant bien entendu les divisions administratives : D’abord les communes, ensuite les régions confédérées, puis élection au niveau nationale. Il va sans dire que cette instance militante, administre surtout les actions de propagande, tandis que les deux section se réunissent afin d’élire le Secrétaire Général, qui prends ses décisions avec ces deux instances. C’est ainsi que se traduit pour nous ce centralisme démocratique, les bases élisent les échelons d’au dessus, qui élisent eux-mêmes leurs représentants qui choisissent par l’élection les dirigeants du parti.

Mais néanmoins, il faut savoir une chose importante, si ce n’est capitale, le P.C.A ne regroupe pas uniquement les communistes, mais au contraire un large panel allant des révolutionnaires extrémistes aux sociaux démocrates (que le Camarade Henri représente). Car oui il faut savoir que la gauche antérinienne est assez faible électoralement parlant, pour comprendre cette faiblesse, il faut se pencher sur le système électoral antérinien, d’abord, les députés ne sont pas élus par le peuple, mais par des ordres, chacun élisant ses propres représentants, ainsi les nobles élisent leurs députés, les clercs font de même et le tiers d’état la même chose. Mais il ne faut pas croire que l’Antérinie est une oligarchie dominée au deux tiers par une minorité, en effet les nobles obtiennent leurs particules par le mérite, et souvent en travaillant pour l’Empire, ainsi un fonctionnaire travaillant dans les ordures peut élire avec un riche chef d’entreprise son représentant, les clercs se concentrent plutot sur les professions de Cour, l’École, le Tribunal, l’Université… Quant au tiers d’état il représente les non fonctionnaires et les petites professions… Chacune de ces instances représente environ 33 % du corps électoral… Mais malheureusement, le corps électoral de fonctionnaires, gavés par l’état se montre peu réceptif à nos idées, les clercs, eux sont certes humanistes, mais ils ne sont pas communistes… Ainsi si la gauche veut peser, elle doit réussir à dépasser cette vision castrale et pour ce faire elle a du utiliser les compromissions avec le reste de la gauche pour espérer s’imposer au niveau des parlements. Donc oui, nous sommes dans les faits pas un parti communiste, mais plutot une alliance de partis à obédience communiste, environ 75 % des membres du comité central (celui qui réunit les cadres des syndicats et des couches militantes) sont affiliés au parti, dont environ 50 % sont alignés sur l’Eurycommunisme loduariens, tandis que les 25 % restants se rapproche des Tahoranistes, et que le reste peut être assimilé à une sorte de mélange de bâtard entre l’anarchisme et le communisme qui prends le nom de P.C.M.

Ainsi en sachant cela, il est nécessaire de voir les vues du P.C.A, qui est tiraillé entre l’ouvrier et le paysan comme l’atteste sa division entre le P.C.B (tahoraniste) mais reste plutot orienté vers le mouvement ouvrier, et ce pour des raisons essentiellement électorales. Pourtant la finalité reste la même entre les franges communistes, une abolition des classes, du prolétariat et du patronnat pour une égalité totale. En fait, ce qui fait débat au sein du parti concerne plutot les moyens à utiliser, le Parti Communiste Marcinois lui imagine qu’une prise de pouvoir par la voie de la démocratie est possible, le Part communiste Bahamanite laisse entrouverte la possibilité d’une prise de pouvoir par la force, tandis que nous, nous avons une vue assez pragmatique de la question, comme vous avez pu le constater dans notre missive, nous ne nous concentrons pas en priorité sur les moyens pratiques, car comme nous l’affirmons régulièrement, l’objectif n’est pas de faire une révolution quelqu’en soit le coût, l’objectif est d’imposer nos mesures socialistes, avec un penchant plus ou moins assuré pour une forme de « dictature » au sens ou l’entendent les bourgeois, c’est à dire en niant le centralisme démocratique. Ainsi, en constant que toute tentative de putsch risquerait de soulever une grande partie de la population antérinienne contre le Parti et de détruire notre réputation, ainsi en constant cela nous sommes forcés de nous imposer par la « démocratie ».

Par conséquent nous devons compter sur une base militante active, le militantisme étant bien évidemment encadré et discipliné pour conserver et diffuser l’image d’un parti propre et net, qui n’est en rien une menace pour les valeurs antériniennes, très conservatrices, le Christianisme catholique, la Monarchie et la Démocratie au sens bourgeois du terme et il faut avouer que si on encourage nos militants à ne pas se laisser marcher sur les pieds et ne pas hésiter à se battre si nécessaire… Mais nous devons rappeler une chose importante, pour rendre le militantisme du P.C.A efficace, nous tentons avant tout d’occuper le terrain, la propagande sur place se traduisant par du tractage et par une activité qui se doit d’etre apaisante et rassurante, permettre à l’électorat prolétaire de ne pas nous considérer comme une menace pour leur confort personnel. Mais malheureusement, notre influence sur le web est assez réduite et les partis d’oppositions, conservateurs et autonomistes, réussissent à invisibiliser nos militants tandis que les médias se font une joie de montrer à l’écran les moindres bavures, qui sont de plus en plus rares suite à une répression sévère des manques à la discipline. En effet, nous sommes attachés à la discipline et tout manque mène régulièrement à des sanctions relativement sévères, par exemple, si un cadre est coupable d’une bavure, une rixe injustifiable, un mot de trop en publique, mène à une dégradation (avec accord des militants locaux)… L’objectif est de devenir respectable et de dépasser une image souvent transmise dans la presse, notamment à cause de présumés liens avec les « dictatures » communistes.

Quant au niveau du programme, il est assez simple à saisir, nous tentons de détruire les classes sociales, mais bien sur que cela n’est pas possible dans un mandat législatif de cinq ans, de pouvoir établir la démocratie communiste dans toute sa splendeur, centralisme démocratique, et en appliquant le concept d’avant gardisme, l’éducation, enfin je préfère utiliser le terme « éveil » de la classe ouvrière en investissant massivement dans l’éducation des ouvriers pour leurs permettre de prendre conscience, de découvrir que leur place, que leur rôle, mérite d’être reconsidéré, mérite d’etre relevée et ainsi pouvoir leur permettre de devenir un véritable rivale pour la bourgeoise qui abuse et qui retourne le principe de la méritocratie antérinienne pour la retourner contre elle même. Ainsi l’objectif du P.C.A serait de faire apparaître une « élite ouvrière », qui supplantera l’élite bourgeoise dans un temps plus ou moins espacé.

Je sais que ce résumé est assez long, et qu’il peut se révéler à la fois trop précis, mais à la fois trop vague, ainsi l’objectif primaire était de vous permettre de visualiser la situation, de vous permettre de voir que l’Antérinie n’est pas une démocratie bourgeoise au sens littéral du terme et que notre programme, comme beaucoup d’autres, doit s’adapter à la situation locale.
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Piero Lardi faisait comme à son habitude: tout en tendant l'oreille à ses interlocuteurs, il griffonnait frénétiquement sur son carnet, qu'il couvrait d'écritures qui partaient dans tous les sens. Parfois, il acquiescait, d'autres fois il grimaçait. Mais il n'était pas indifférent, ce qui était assurément le plus important. L'exposé fut long, et scolaire...mais ce n'était pas forcément un reproche. Antoine Malo avait l'air d'un militant sérieux qui évite les extravagances, et la formation politique qu'il décrivait était à la fois familière et curieuse. Finalement, Lardi reprit la parole, la voix plus haute qu'auparavant, ce qui indiquait une certaine curiosité et des questionnements:
- Bien. Je vous remercie de ce premier éclaircissement. En vous entendant, j'ai l'impression de voir le récit d'une formation politique aux fondations bien bâties, ce qui est déjà un premier élément rassurant, camarade Malo. Votre approche a définitivement des points en commun avec ce que les membres de notre organisation considèrent comme relevant d'un parti eurycommuniste classique. Centralisme démocratique, avant-garde...bref, je ne vais pas vous faire un dessin, vous avez l'air d'avoir compris l'essentiel.

Cependant, c'est en se penchant sur les détails que l'on peut voir émerger certaines différences, et c'est avant tout sur cela que je vais vous poser quelques questions. En premier lieu, vous me dites que votre parti est directement lié à des syndicats. C'est déjà une bonne initiative, car il ne faut jamais oublier que c'est souvent des formations syndicales que naissent les revendications qui pourront plus tard être reprises dans votre programme. Nous partons du principe que les idées naissent du bas et partent vers le haut où elles pourront être adaptées à notre logiciel politique. Mais là où vous vous distinguez est le fait que vous assumez un contrôle direct de ces organisations. Cela dit, je comprends les enjeux électoraux qu'il y a autour de cela.

D'autre part, le contexte politique dans lequel vous vous situez attire mon attention, et cela me permet de rebondir sur la question suivante qui est celle des moyens par lesquels votre formation pourrait prétendre accéder au pouvoir. Vous êtes donc en coalition avec d'autres formations politiques de la gauche antérienne...intéressant. Si cela peut vous rassurer, ce n'est pas du tout proscrit si vous estimez que vous partenaires servent vos intérêts. Mais au vu du caractère verrouillé du système politique que vous décrivez, prendre le pouvoir par des élections me paraît hautement optimiste, vous ne pensez pas ? Dans un système démocratique complet où le poids de l'oligarchie dans les décisions politiques ne serait pas aussi important, vous pourriez arriver au pouvoir... mais dans ce cadre-ci, vous devriez songer à d'autres pistes. Vous devriez vous investir dans le débat public, par le moyen des réseaux sociaux, et de manière massive. De même, je pense que votre renforcement passe avant tout par celui des syndicats sur lesquels vous vous reposez.

Mais bref, ce sont là que des conseils, libre à vous d'en faire ce que vous en pensez. J'ai une dernière question, toute simple: qu'attendez de l'UICS au vu de votre situation ? Pour notre part, nous disposons d'un organe de propagande à l'UICS qui pourrait vous aider à diffuser vos idées, à la fois chez vous et à l'Internationale. Votre situation fait également de vous le candidat idéal pour souscrire à l'ODSC, qui est notre organe de soutiens à des mouvements tels que le votre, spécifiquement conçu pour aider les formations dans un contexte politique défavorable. Je vous encourage donc vivement à y adhérer.
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Antoine écoutait attentivement la réponse de Lardi, la nouvelle volée de questions était cette fois-ci moins généraliste, elle se portait dorénavant sur un modèle plus précis qui avait attrait au fonctionnement du Parti. Ainsi, lui qui appartenait aux souches militantes et qui n’avait qu’une maitrise réduite sur les questions syndicales fit un coup de coude au camarade Jean Michel, qui attendait visiblement ce genre de demandes.

Ce dernier était d’ailleurs ravi de la réponse du Camarade Piero, en effet cela s’avérait rassurant et il savait qu’Antoine avait réussi à intéresser le Velsnien, et les questions du membre du P.E.V allaient dans son sens, et les interrogations sur les relations entre syndicats et partis, et notamment les enjeux électoraux qui planent autour. Jean Michel y répondrait sans trop de soucis, il est lui même cadre du Grand Conseil Syndical, et a une bien meilleure maîtrise sur ce genre de sujet que son ami militant.

Quant à la dernière question, il savait que c’est un sujet complexe qui mérite quelques éclaircissements, à commencer sur les grandes controverses qui agitèrent le Parti Communiste Antérinien au début des années 2010, et déjà il sentait que la réponse n’allait pas être aisée à formuler, ainsi il fit discrètement signe à Antoine tout en écrivant sur un petit bout de papier : « Faudra que tu te charge de la dernière question du camarade Lardi, essaie d’être précis, c’est avant tout toi qui a été chargé par Valin de te charger de ce genre de question. ». Puis il prit la parole :

« Je vous remercie camarade pour vos commentaires encourageants, en effet, comme vous avez pu le constater, le camarade Antoine est très investi et maîtrise assez bien les fondements idéologiques et politiques du parti, mais néanmoins il appartient à la seconde branche, celle qui concerne les instances militantes, alors que moi même je gère les regroupements syndicaux, ainsi je répondrai dans un premier temps à votre première question, qui mérite quelques éclaircissements.

En effet, la « possession » de syndicat est un enjeu capital, si un parti ne réussit pas à prendre le contrôle d’un syndicat, aucun siège ne lui sera accordé lors des négociations qui concerneront les élections législatives, ainsi, un syndicat peut être associé à un siège et signifié la prédominance d’un parti au sein de la gauche. Cela vous avez l’air de l’avoir compris, mais néanmoins,vous soulevez un point intéressant qui pourrait se traduire par la question suivante : « Qui fait le programme, les cadres ou les syndiqués ? », je vous répondrais dans un premier temps par la première réponse ; les cadres, en effet, ces derniers doivent prendre plusieurs facteurs en compte, d’abord les tendances conservatrices de la monarchie antérinienne et sa société, ainsi toute proposition « révolutionnaire » peut être mal-vue par la population, et bien souvent nous sommes obligés de diluer les demandes des syndicats, mais pour autant, il ne faut pas croire que nous sommes élus pour déplaire aux syndicats, en effet moi même je tache de rappeler au comité central que l’électoralisme passe après les intérêts des travailleurs, et des débats sont encore en cours sur le sujet. Mais pourtant, c’est bel et bien les syndicats qui dictent la conduite des communistes du Comité central.

En effet, sinon nous arriverions à une situation digne des pires démocraties bourgeoises, les élus ne prennent en compte les intérêts du peuple qui les a pourtant élu… Situation intolérable pour nous autres du P.C.A qui considérons que la compromission politique n’a pas lieu d’être. Ainsi si les instances de direction édulcorent le programme, le principal est sauf, et là ou les débats ont lieu pour savoir à quel nous devons diluer les revendications de ces derniers. Mais les principales mesures, les principales idées viennent bien entendu des syndicats, les cadres de ces derniers sont d’ailleurs élus pour leurs idées et ne représentent pas tous des partis, ainsi lorsque les délégués syndicaux nomment leurs représentants à l’échelle supérieure, le programme pour lequel ils furent élus passe ainsi dans les hautes sphères de la direction du P.C.A, et bien entendu les débats sont récurrents pour tenter de rester fidèle aux intérêts des syndicats sans pour autant mettre en péril les possibilités électorales, bien entendu je peux comprendre que cette vision pragmatique ne reflétant pas l’intégralité des intérêts des travailleurs puisse vous paraître franchement surprenante, mais il faut avouer que la loi politique prime même si vous l’aurez compris syndicats et partis sont intrasèquement liés, et dans le monde politique de la gauche antérinienne nous ne pouvons dissocier les deux entités, car la première permet à la seconde de devenir prédominante au sein de la gauche.

Quant à la seconde remarque, je peux comprendre vos doutes, en effet l’Antérinie n’appartient pas aux démocraties classiques, mais plutot à un état semi-oligarchique ou le pouvoir est transmis de manière plus ou moins démocratique. Mais là ou cela diffère des états oligarchiques comme le Drovoloski ou seule une élite gouverne et profite de l’or qu’ils accumulent aux dépens des travailleurs, et qui se transmets de père en fils. Mais pourtant, en Antérinie la situation est différente, les hautes élites politiques se partagent le pouvoir grâce à la richesse qu’il possède, ils peuvent ainsi éduquer leurs enfants dans les grandes écoles antériniennes, bien trop sélectives, et ainsi perpétuer des dynasties politiques. Ainsi la classe ouvrière est implicitement exclue de la vie politique, un peu sur le modèle velsnien, pourtant ce phénomène n’est pas une fatalité, il arrive que quelques ouvriers réussissent à accéder à de hautes fonctions politiques ou économiques. Rendant justement cette boucle moins palpable, notamment lorsque l’état providence antérinien permets d’offrir des conditions de vie décentes aux plus pauvres, allégeant ainsi le ressentiment de la classe ouvrière contre la classe politique, ainsi bien sur que la colère gronde, mais elle n’est pas assez puissante pour nous permettre d’envisager une révolution, et soyons franc, vous savez pertinemment que l’Antérinie est bien trop conservatrice pour se laisser happer par un changement communiste, ainsi, la voies des urnes est la seule qui nous permettrait d’envisager une victoire.

Car en faits, la société n’est pas prête pour l’établissement d’un régime socialiste, en premier lieu à cause de l’éducation, prenons un exemple simple : la Monarchie, aujourd’hui rares sont les républicains convaincus, pourquoi ? La réponse est simple : une histoire qui a imposé l’idée de monarchie et un système scolaire qui a établit cette dernière dans les faits, les élèves naissent avec la Monarchie, ils sont éduqués dans ce monde monarchique qui se veut rassurant, ces élèves mourront dans la Monarchie, leurs enfants grandiront avec et ainsi de suite. Et c’est exactement le même système pour le libéralisme, l’état qui se rapproche d’une proto social démocratie, encourage ainsi les fils d’ouvriers en leur présentant un état prospère, qu’ils développeront et dont ils profiteront, ne parlons même pas des encouragements qui maintiennent la capitalisme en place, à commencer par la devise et l’hymne que tout antérinien connaît, « qui ne tente rien, n’a rien » ou encore la Catholique chant O combien anti-révolutionnaire, ainsi ils grandissent dans une atmosphère libérale qui rassure, tandis que les dérapages de la gauche, ou du moins des partis s’en voulant, servent à marginaliser cette dernière ; prenons pour exemple Indépendance pour Tous et ses propos absolument terrifiants sur la guerre d’indépendance en ex-Nouvelle Antérinie. Donc imaginez si une guerre civile suite à une révolution ratée se déclare ? Les fascistes/factions conservatrices seraient largement plus nombreux que nous, sans parler du manque évident de soutien qui nous proviendra de la presse…

Mais néanmoins, nos scores progressent, la gauche en général gagne 70 sièges de plus que lors des élections législatives de 2010, et la décentralisation nous permets d’envisager des victoires plus frappantes, notamment à Marcine, ou la principale d’opposition au P.P.A est d’obédience anarcho-royaliste, gagne presque la moitié des sièges… Mais il est bien entendu certains que si nous ne continuons pas nos développements sur les réseaux sociaux, la pérennisation de nos idées sur l’espace public pourrait être remise en question et nous faire reculer, ainsi cela nous mène à notre dernier point, le rôle que jouerait l’U.I.S.C. D’abord une intégration au sein de l’Union apporterait un prestige significatif pour le P.C.A, prestige qui a manqué pour le P.C.M, le parti communiste marcinois qui perds la moitié de ses sièges à cause de ce manque de prestige lors de l’élection marcinoise. Mais une entrée à l’U.I.S.C ne ferait pas qu’augmenter le prestige du P.C.A, qui jouirait par extension de la bénédiction de la gauche internationale et donc de pouvoir encourager les électeurs les moins décidé à voter pour un parti paraissant international. D’un autre coté, l’U.I.S.C pourrait apporter un soutien plus terre à terre, à commencer notamment par des fonds.

En effet, comme vous le savez, l’Antérinie adopte des politiques des plus économes, à commencer par la suppression des fonds publics pour les campagnes législatives, ainsi permettant implicitement de priver les partis de l’opposition, qui apporteraient un souffle révolutionnaire et réformateur, de bases solides lors de leurs campagnes législatives, et surtout des capacités pour financer la communication, ainsi, lorsque des partis de droite s’opposant aux idéaux progressistes se présentent, les banques financent sans se poser de questions et finalement le rapport de force en devient mathématique, plus un parti possède d’argent, plus ses capacités à lancer des campagnes de communications efficaces sont fortes… A contrario, les partis sans financement, mis à part quelques dons de vieux philanthropes et des campagnes organisés par les militants, ont du mal à s’imposer, ainsi cela nous permettrait de compter sur de véritables sources de financements… J’espère que vous voyez ou je veux en venir. Quant à votre organe de propagande, il nous serait très utile, voyez-vous, les journalistes qualifiés et surtout engagés manquent et propager des articles écrits par quelques aventuriers avides d’argent reste problématique pour une campagne électorale et vous comprenez que quelques articles de bonnes qualités ainsi que des journalistes engagés serviraient réellement notre cause.

J’espère ne pas avoir été trop long, et surtout d’avoir été assez précis. »


Puis il vit Antoine lui adresser un petit papier : « T’aurais du me laisser aborder la question révolutionnaire, j’espère surtout que tu ne l’a pas endormit avec tes bêtises ! » et un regard plein de reproches.
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"Sur ce point, je suis d'accord avec vous...l'Antérinie n'est pas prête à ce type de modèle." réagissait Piero Lardi, laconique, à propos de la situation décrite par son interlocuteur au sujet de son pays. Il tapotait encore et toujours sur son carnet avec son stylo, et au bout d'une petite minute de réflexion, il ouvrit de nouveau la bouche. L'heure était à la décision:
- Vous avez l'air d'avoir un programme tout tracé, camarade. C'est une bonne nouvelle. Néanmoins, vous devriez songer aux remarques que je vois ai adressé. Le PEV évolue dans un cadre similaire au vôtre, celui d'une démocratie illibérale. Aussi, nous connaissons des difficultés similaires aux vôtres. Le développement de votre parti dans l'espace public et dans les médias nouveaux: réseaux sociaux, fils d'informations etc... ne doit pas cacher le fait que vous vous heurterez tôt ou tard à un plafond de verre. Vos adversaires politiques n'auront de cesse de vous "corneriser" et le système a l'habitude de se défendre des discours comme les nôtres. Je vous conseille de ne pas voir l'élection comme une fin en soi, mais comme un moyen comme un autre de véhiculer vos thèses, car vos adversaires trouveront toujours le moyen de vous faire perdre: on ne peut pas échouer à la roulette quand on a le banquier dans sa poche après tout. Dans ce cadre, je vous enjoint à continuer vos efforts de propagation de votre discours par tous les moyens possibles. De ce point de vue, c'est une très bonne initiative que vous prenez.

Enfin, le velsnien ferme les pages de son carnet et le pose sur la table. Il abandonne son air stoïque pour un sourire chaleureux:
- Camarades, je crois que nous avons fait le tour. Du moins, je n'ai pas d'autres questions. Aussi, il est temps de rendre mon verdicte qui pour le coup, est des plus favorables. Antoine Malo, j'estime que vous avez fait preuve d'un grand sérieux dans la construction de votre discours, et si c'est là le reflet du degré de professionnalisme de votre formation politique, c'est donc avec un grand plaisir que nous prenons acte de votre adhésion dans l'Union Internationale du Communisme et du Socialisme.

Il sert la main aux antériniens, une poigne ferme, mais pleine de bons sentiments:
- Maintenant, passons au menu des réjouissances, à savoir vos droits en tant qu'entité adhérente de l'UICS. A compter d'aujourd'hui, en votre qualité de formation politique, vous serez représentez au Conseil Suprême de l'Union par cinq représentants, lesquels auront leur avis sur la direction générale que prendra l'organisation sur le plan interne. En effet, si les Etats-membres de notre organisation composant le Présidium sont eux, chargés de prendre des décisions ayant attrait à la géopolitique, le Conseil Suprême a son mot à dire sur nos orientations idéologiques et la manière dont nous nous gouvernons. Nous avons grand hâte de vous y croiser.

Mais ce n'est pas tout, puisqu'il existe un éventail d'organes au sein desquels vous pourriez contribuer à votre échelle, ou bénéficier d'avantages dans le cadre d'une éventuelle prise du pouvoir dans votre pays. Ainsi, vos organes de presse sont ainsi désormais reconnus comme étant soutenus par l'UICS. Ce faisant, vous pouvez désormais publier vos articles dans la Presse de l'UICS, ce qui leur assureront une plus grande visibilité. Dans le même temps, vous pouvez quérir de la part de l'OCSC un soutien financier et logistique dans toutes vos campagnes électorales ou opérations de propagande dans votre pays. Soyez également libre de subventionner tout projet de développement de l'OCDU, qui accompagne les régimes socialistes en cours de construction. Enfin, il existe toute une flopée de programmes mineurs auxquels vous pourriez participer, à l'image des casques rouges pour les opérations humanitaires.


Le velsnien se lève de sa chaise en resserant les boutons de sa chemise.
- Mes bien chers camarades, bienvenue dans l'UICS.
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