[Bâtiment du GEM, salle de réunion jouxtant le bureau de la Générale Bousquet, 16/07/2015.]
Juste après avoir accordé une interview, Matilda Emerson entra d’un bon pas dans la salle de réunion. Tous les membres déjà présents se levèrent et la saluèrent. Elle rendit un salut impeccable, la gouvernance du pays n'avait en rien effacé les réflexes d’une vie sous les drapeaux, et nombre des gens autour de la table redeviendraient ses supérieurs une fois ce cirque fini et Nebrownia remise sur le bon chemin. Elle ne pouvait s’empêcher d’appeler de ses vœux l’imminence de cet événement, mais pour l’heure, elle devait diriger cette réunion. Rapidement, elle prit place en bout de table, face à l’écran blanc sur lequel seraient projetés par les ordonnances de tout les officiers présents les informations synthétisées, les éventuels graphiques et autres documents nécessaires au bon déroulement de ladite réunion. A côté d’elle, à droite elle aussi en bout de table, Nadège Bousquet terminait de mettre en place sa zone de travail, aussi méticuleuse que dans les souvenirs de Matilda.
- Une fois par mois, alors ? demanda-t-elle
- Pardon ? demanda Matilda.
- Les interview répondit Nadège en souriant
- AH !! Oui, j’y trouve une certaine utilité aussi, ça m’aide à réfléchir tout en exposant aux journalistes, et au peuple, tout ce que nous faisons. Ainsi, ils voient que nous ne restons pas inactifs, même si les résultats des décisions prises depuis trois mois ne seront pas visibles avant quelques années pour certains. Elle a un petit rire et ajoute, Noroît appelle ces interview le “moment canard jaune”, mais je ne sais pas d’où il sort cette expression…
- Vous n’avez pas vraiment besoin de ce cirque pour que le peuple voie que vous travaillez, vous savez ? dit Nadège, tapotant son cahier avec son crayon, Les réseaux sociaux sont pleins de gens du peuple qui soutiennent vos actions. Même celle de la semaine dernière au Conseil des Sages.
- Je ne suis pas les réseaux sociaux, je trouve cela extrêmement perturbant.
- Je ne vous en blâme pas, c’est souvent un piège chronophage…
Tout en discutant avec Nadège, Matilda avait regardé les différents participants de la réunion. Il y avait, à sa gauche, son ancien supérieur direct, le récemment promu Général trois étoiles Jacob Llyne. Engagé un an après elle, il avait suivi la voie des parachutistes et avait été promu sur le champ de bataille, comme elle, lors de la campagne de 84 contre la Vietie, durant laquelle ils avaient combattu ensemble dans les montagnes Vietiques et avaient appris à s’apprécier professionnellement. En gravissant les échelons, il avait très souvent entraîné Matilda dans son sillage, vantant ses aptitudes au commandement qu’il avait vu à l'œuvre pendant la guerre. Matilda soupçonnait qu’il était à l’origine de sa nomination à la tête d’une des deux Brigades Mécanisées de la Garde Présidentielle, comme s’appelaient les unités en charge de la défense de la capitale. Il s’en était toujours défendu, mais le sourire satisfait qu’il affichait chaque fois qu’elle abordait le sujet montrait qu’il n’était pas mécontent de la situation. Au début de leur relation, Noroît considérait toujours Jacob comme étant le grand-frère de Matilda, bien qu’il soit un an plus jeune qu’elle. Voyant qu’elle faisait le tour de la table des yeux, il lui adressa un petit clin d'œil fraternel, alors que son ordonnance, une jeune femme aux cheveux d’un roux flamboyants portant les couleurs et les insignes de l’artillerie, lui présentait un rapport.
A côté de Jacob se tenait la Générale Ki Dong, une Joha Tsad de 53 ans récemment nommée à ce poste, son prédécesseur ayant fui avec Cuvilier. Matilda avait esquissé un sourire lorsqu’elle avait vu le callsign de la générale, une ancienne pilote de chasse. En effet, ses camarades de classe l’avaient affublée du callsign “Ding”, ce qui, couplé à son nom de famille, donnait “Ding” Dong. Les pilotes avaient un humour très particulier, parfois très potache en ce qui concernait les callsigns. La Générale Dong fronçait les sourcils en lisant les rapports tendus par son ordonnance, un jeune pilote de l’aéronavale, un bras en écharpe. La situation ne devait pas être des plus reluisante. Mais Matilda savait que Dong était une dure à cuire : elle avait été descendue deux fois en service durant la guerre de 82-84, dont une fois derrière les lignes ennemies. Elle n’avait jamais été capturée et s’était arrangée pour rejoindre les lignes alliées, après avoir libéré d’un convoi ennemi quatre autres pilotes alliés malgré une blessure au bras. Une battante qui allait avoir besoin de sa détermination.
En face de Jacob, de l’autre côté de la table, à droite de Nadège Bousquet, se trouvait l’Amiral Paul Demartin, 56 ans. Récemment interviewé lui aussi, il avait pour ainsi dire déjà fait part de son plan d’action pour la Marine, qu’il espérait de tout son cœur voir revivre. Cela se voyait, il était le seul à afficher un sourire franc et plein d’espoir. Il avait connu la guerre en mer contre la Vietie, et avait subi de plein fouet l’injuste courroux de Kellem à l’encontre de son arme, car la marine de Nebrownia n’avait pas démérité, et savait pertinemment que tout ce qui ressortirait de cette réunion serait bénéfique pour la Marine. Il était encadré de deux ordonnances, dont un se chargeait de la distribution des boissons à l’ensemble des membres de la réunion.
A la droite de l’Amiral se tenait un homme en civil, seul, une fenêtre ouverte derrière lui et un ventilateur soufflant dans sa direction. Les cheveux gris en brosse, affichant une cinquantaine sportive, une canne de marche se trouvait posée à sa droite. Observant l’assemblée lui aussi, il tirait régulièrement sur sa pipe, relâchant de temps en temps d’épais volutes de fumée qui, immédiatement, se trouvaient poussés par le ventilateur et happés par la fenêtre ouverte. Cet homme, elle le savait, était l’actuel chef en second du Service Nebrownien d’Information Fonctionnel, un nom pompeux et nébuleux qui désignait le renseignement de Nebrownia. Charles Montferrand, un faux nom, 55 ans, son âge officiel, cultivait l’art du mystère, de l’information et de la désinformation. Il avait commencé comme soldat d'infanterie, spécialisé dans la reconnaissance, et avait fait toute la guerre de 82-84 comme membre d’une unité de reco. Remarqué pour ses incroyables aptitudes à dénicher l’information, mais également à l’analyser, il avait été débauché par les services de renseignement après avoir été gravement blessé en service commandé. Matilda ignorait tout de sa carrière après ça, tout était classifié, et devrait le rester jusqu’à la mort de ses enfants. Voyant que le regard de Matilda s’était posé sur lui, il inclina poliment la tête, sans s’arrêter de tirer sur sa bouffarde.
Après une minute de silence, laissant le temps à Fira Mynooc, la lieutenant ordonnance de Matilda, de terminer la mise en place de la station de travail de sa supérieure et de la sienne, Nadège pris la parole :
- Bien… Tout le monde est là, nous allons pouvoir commencer dit-elle en allumant le projecteur au plafond pendant que son ordonnance y connectait son ordinateur. Comme vous le savez tous, une des premières actions de la Générale Emerson après sa prise de pouvoir, a été de lancer une grande enquête sur l’état de notre Armée, toutes Armes confondues. Un graphique apparaît. Voici ce dont nous devrions disposer si mon prédécesseur avait bien fait son travail. Ce que vous voyez ici sont les chiffres officiels de l’Armée la veille du coup d’Etat. 655 493 hommes et femmes sous les drapeaux, 3 865 235 armes d’infanterie de tous types, 2 621 chars d’assaut, 6 234 véhicules d’infanterie, 3 122 bouches à feu de gros calibre, 523 hélicoptères de tous types, 632 chasseurs et chasseurs bombardiers, des montagnes de munitions, etc. Sur le papier, notre armée est conséquente et nos soldats bien formés. Maintenant, nous allons passer à ce que notre enquête a dévoilé. Une autre diapositive s’affiche, Voilà la réalité… Sur le nombre de soldats affichés par mon prédécesseur, nous nous sommes rendus comptes que seuls 10 000 hommes et femmes environ pouvaient décemment être considérés comme des soldats, sur la pléthore de matériel énumérés dans le précédent graphique, nous considérons qu’une infime partie de ce chiffre est fonctionnel, quasiment aucun des véhicules n’est fonctionnel, à l’exception de 810 véhicules d’infanterie et 24 avions de chasse.
Une pause dans la salle. Les seuls sons pouvant être entendus sont les ventilateurs. Tous se regardent. Ils savaient que le résultat ne serait pas fameux, mais pas à ce point. Même l’Amiral Demartin tirait une drôle de tête. Il devait être venu en se disant qu’il serait le plus mal loti, et il se rendait compte que pas tant que ça, finalement. Nadège repris.
- Mesdames, Messieurs, nous avons devant nous une tâche immense. Nous ne pouvons pas nous permettre de laisser notre armée dans un tel niveau de déliquescence. La générale Emerson a remobilisé notre industrie de l’armement dès son accession au pouvoir, et les entreprises de munitions reprennent du service au fur et à mesure qu’elles réparent et modernisent leurs chaînes de production, mais ce n’est pas encore assez. Vous remplacez tous, à une exception prêt, des officiers ayant trahi la confiance de leurs hommes en suivant Cuvilier dans la fuite, et je sais que vous avez tous lancé des travaux et des bases de réflexion dès que la prise de pouvoir de la Générale Emerson vous en a donné l’occasion. Nous vous avons laissé un mois après ma nomination pour vous permettre de faire un point en interne de vos actions, besoins, projets, etc. Souvenez vous que nous sommes tous ici avec un seul but : servir au mieux la nation, et pas se tirer dans les pattes.
Nadège, une fois les choses mises au clair, non sans avoir tiré quelques sourires, se tourna vers l’Amiral Demartin.
- Amiral, nous avons tous ici lu une partie de vos projets, sachez que, pour ce que j’ai pu en lire dans Nebrownia News, vous avez mon soutien pour la remise à niveau de la Flotte. J’en ai aussi parlé avec vos homologues des Forces aériennes et terrestres, et vous récupérerez bientôt le contrôle des forces aéronavales et des troupes de Marine.
- Merci Générale Bousquet, dit l’Amiral, souriant aux anges.
- Vous avez d’autres projets pour la Marine je crois ?
- En effet, Générale, mais j’ai déjà obtenu ce pourquoi j’étais venu. Je vous en ferai part à la fin de la réunion, si nous avons le temps.
- Allons, Paul, c’est pas sympa de nous faire… mariner de la sorte, s’amusa Jacob.
- Tu ne te mouilles pas beaucoup avec cette vanne, Jacob, répliqua l’Amiral, rigolard.
- Puisque vous semblez désireux de prendre la parole, Général Llyne, nous vous la donnons, renchérit Nadège, un sourire en coin, faisant perdre le sien à Jacob, qui afficha un air du style “moi et ma grande gueule”.
Son ordonnance faisant visiblement des efforts pour ne pas rire, il haussa les épaules, saisit son ordinateur et le connecta au projecteur. Se raclant la gorge, il commença, après avoir bu une gorgée d’eau :
- Comme l’a fait remarquer la Générale Bousquet, la situation des troupes des Forces Terrestres n’est pas des plus reluisantes. Nous avions aussi constaté de graves lacunes en matière d’entraînement, et avons commencé à y remédier, mais c’est un processus qui prendra du temps. Il affiche un tableau vide, Nous avons donc un noyau dur de quelques 10 000 professionnels, et avons commencé le ré-entraînement de 8 600 soldats, le général clique et une première ligne du tableau se rempli en partie.
- Pourquoi si peu ? Demanda Matilda.
- Tu n’es pas sans savoir l’état de nos armements, n’est-ce pas ? Répondis Jacob, sans grande considération pour la hiérarchie du moment, Tu t’es battue avec, et contre aussi parfois. Nous avons des armes que nos grands parents auraient pu utiliser, et un taux de disponibilité qui est en gros ce qu’on pourrait attendre de telles antiquités. Entraîner un soldat avec un tromblon qui risque de lui éclater au visage dès qu’il réarme n’est pas vraiment une solution d’avenir, hein ? Il fallait d’abord s’assurer qu’on avait de quoi équiper nos professionnels dans de bonnes conditions avant de voir ce qu’on pouvait faire pour entraîner nos gars.
Matilda acquiesça. Elle saisissait mieux la logique à présent. Mais cela signifiait aussi que, sur les plusieurs millions d’armes à disposition, ils n’avaient pas été capables d’en réparer suffisamment pour entraîner plus de monde. Jacob poursuivit.
- Il y a aussi le problème de la disponibilité opérationnelle. C’est bien beau d'entraîner à nouveau des troufions, mais à condition que cela ne se fasse pas au détriment du rôle de l’armée, et de la disponibilité des unités. On est parti du principe qu’il fallait entre 5 et 10 formateurs par groupe de 100 soldats, ce qui signifie qu’on a dû retirer 860 officiers et sous-officiers expérimentés de notre pool de soldats pour entraîner les 8 600 actuellement en formation.
- Combien de temps durera cet entraînement ? Demanda la Générale Bousquet.
- On est parti sur une formation d’un an. répondit le Para, l'air de dire qu'à son avis ça serait tout juste suffisant.
- Comme s’ils venaient du civil ? s'étonna Nadège
- C’est quasiment le cas pour nombre d’entre eux. Savez vous depuis combien de temps certains n’avaient pas fait de manœuvres ? répliqua Jacob, l'air grave.
- Je n’en ai aucune idée mais je sens que je ne vais pas aimer la réponse
- Presque huit ans, en moyenne. Asséna le Général Llyne
- Mon dieu… souffle Nadège Bousquet.
- A côté de certaines unités des Forces terrestres, les marins pêcheurs de notre cher Paul sont de vrais soldats. Depuis qu’il est à son poste, il fait son possible pour qu’ils n’oublient pas qu’ils sont marins… Mon prédécesseur a oublié de faire comprendre aux gars que je commande qu’ils étaient des soldats…
- Cruelle vérité, soupira Matilda, se souvenant des difficultés qu’elle avait pour entraîner ses troupes lorsqu'elle n’était pas encore à la tête de la 2ème Brigade Mécanisée de la Garde.
- Mon prédécesseur n’est pas en reste… il ne regardait tout simplement pas les suppliques des officiers qui court-circuitaient leur hiérarchie pensant que le problème venait de là… mais nous somme rassemblés ici pour changer les choses n’est-ce pas ?
Jacob sourit et clique de nouveau, remplissant la dernière partie de la première ligne de son tableau.
- En effet. Nous avons exigé que les formateurs actuels envisagent de le rester après, de telle sorte que nous disposions rapidement d’un pool de formateurs expérimentés. Ainsi, si la courbe se confirme, on devrait être à même de former au moins 8 600 professionnels par an. Évidemment, notre objectif est d’en former davantage par an, mais nous ne devons pas négliger non plus la formation des réservistes et celle des conscrits.
Du curseur de sa souris, il entoura les deux valeurs qu’il entendait former à partir de l’année suivante, à savoir au moins 8 600 réservistes par an, avec un objectif total de 50 000 réservistes sur trois ans, et 78 000 conscrits tous les ans à compter de deux ans. Matilda Siffla.
- Ambitieux ton projet, Jacob… à ce stade, on ne sait pas encore si notre industrie de l'armement sera capable de reprendre les livraisons rapidement, il est fort probable que les besoins des autres armes ralentissent grandement ton plan de progression. Et tes 78 000 conscrits, tu comptes les équiper avec les rebuts ?
- A vrai dire, j’escomptais quelques achats d’armement étrangers, juste pour assurer une base. Je vous fais passer les estimations.
A ces mots, la Générale Bousquet tiqua. Matilda savait bien que, à cause de ses contacts au sein des armées Lermandienne et Westalienne, de nombreuses voies disaient qu’elle allait hypothéquer l’indépendance du pays en terme d’armement, mais elle savait aussi qu’il n’en était rien, Nadège était une patriote. En parcourant les estimations du général des Forces Terrestres, Matilda aussi tiqua. Tout ce matériel qui était censé être dans les stocks manquait en fait aux soldats.
- Nous étudierons la demande, Jacob, mais nous ne pouvons rien vous promettre pour le moment, les priorités seront discutées plus tard.
- Je comprends, Générale Bousquet.
- Appelez moi Nadège, vous vous connaissez tous et vous appelez par vos prénoms, je me sentirai bizarre si vous ne le faites pas.
- Soit, Nadège. Il est vrai que nous nous croisions tous assez souvent, mais votre poste vous rendait quelque peu inatteignable. Ravi que ce ne soit plus le cas.
- Poursuivez, je vois que votre tableau est encore peu rempli reprit-elle, un sourire en coin.
- Je reprends donc. L’entraînement, ou le ré-entraînement, est la première partie du plan, la seconde (il clique encore, une ligne se rempli) est l’adaptation. En effet, le format que nous avons actuellement répondait à la mégalomanie de Kellem, et également aux intérêts qu’il avait de déstabiliser la région. A présent qu’il est sous les verrous, nous devons changer le format de notre armée. L’unité de base actuellement est la division. Trop massive et lourde, nous devons descendre d’un échelon, voire de deux pour disposer d’une force adaptative et à même d’être mobilisée rapidement.
- Tu veux une unité de base légère et mobile avec suffisamment de mordant pour être déployée partout rapidement, en somme ? demanda Matilda
- En effet.
- C’est le côté Para qui parle ? taquina l’Amiral Demartin.
Jacob tourna un regard rigolard vers l’Amiral. Sentant ce qui allait venir, Matilda leva la main pour interrompre la réplique de Jacob, souriant néanmoins, ravie de voir que les commandants des trois composantes de l’Armée ne cherchaient pas à se rabaisser, mais cultivaient juste une rivalité de façade, peut-être un brin potache.
- Poursuis, Jacob, dit-elle.
- D’accord… Mais je répondrais malgré tout en partie à Paul, le Para que je suis est bien conscient du casse-tête logistique que représente la projection d’une unité. Un parachutage ne peut pas se faire d’un claquement de doigt, il faut voyager léger sans pour autant sacrifier la puissance de feu et le ravitaillement.
- Un bateau n’a pas la même capacité de projection qu’un avion, fit remarquer le Marin
- Je sais, Paul… mais on ne va pas demander à un bateau de nous parachuter en pleine montagne non plus. L’idée est de trouver un juste milieu, un modèle standard mobilisable et déployable rapidement avec suffisamment de matériel et de logistique pour tenir entre deux ravitaillement. Libre à chaque arme de la modifier ensuite en fonction de ses impératifs stratégiques.
- Ah ! Tu proposes en fait un projet de discussion autour de ce nouveau format ? demanda l’Amiral Demartin
- Je n’ai pas dit que j’allais te mâcher le boulot, Paul, dit Jacob en souriant, Maintenant que tu as récupéré les troupes de Marine, tu dois aussi réfléchir à tes besoins en la matière.]/color]
- [color=MediumBlue]Certes… répondit l’Amiral, haussant un sourcil comme s’il n’y avait pas pensé avant.
- Et donc ? demanda Matilda, tentant derechef de recentrer la discussion qui menaçait à nouveau de s’écarter de l’axe principal de discussion, As-tu des propositions ?
Jacob se tourna vers elle, toujours affichant ce sourire qui ne le quittait plus depuis qu’il avait commencé à plaisanter avec l’Amiral Demartin.
- Nous avons plusieurs pistes, oui, mais il va nous falloir les tester toutes. (Il clique de nouveau, une troisième ligne se remplit) Cela constitue la troisième phase du plan, les tests. Une fois établi, il va nous falloir former des unités tests et les confronter, les comparer, les mettre à l’épreuve.
- Hmmmm… cela va demander du temps et un espace dédié, dit Nadège, songeuse.
- En effet, mais nous avons la chance d’avoir un endroit qui regroupe tous les types de terrains possible, et de surcroît suffisamment grand pour accueillir des troupes de taille conséquente, n’est-ce pas ? repris le Para
Nadège haussa un sourcil. Elle semblait voir ce dont le Para voulait parler, et Matilda devinait qu’elle réfléchissait déjà au problème logistique que poserait la remise en service de ce concept. Elle, qui avait depuis peu une autre casquette, voyait aussi d’autres problèmes potentiels.
- Nous voyons très bien de quoi tu veux parler, Jacob. Mais cela poserait de nombreux problèmes. Logistiques tout d’abord, car il faudrait remettre toutes les installations au goût du jour et fournir suffisamment de ravitaillement pour toutes les unités sur place, et tu sais qu’elles sont déjà nombreuses, sans compter celles en manœuvre.
- Si ma mémoire est bonne, la dernière utilisation de ce complexe remonte à vingt ans, au moins. Il faudrait déjà évaluer l’état des infrastructures… continua Nadège
- Ensuite, une arrivée aussi massive de troupes à cet endroit serait mal perçue par les États du pourtour du Golfe Cardinal, et la méfiance à notre égard, déjà très forte, augmenterait davantage enchaîna Matilda, poursuivant sur sa lancée, [/b]Certains y verraient une atteinte directe à leurs capacités commerciales. Et puis, tu sais aussi très bien que Kellem avait commencé à transformer l'île en destination touristique… souhaites-tu vraiment entraîner tes troupes au milieu de potentiels espions ?[/b]
- Nous ne parlons pas ici de potentialité, mais bien de fait, dit Montferrand, suçotant sa pipe.
- Vous savez qu’il y a des espions sur cette île ? demanda Nadège
- Nadège, y a-t-il une meilleure couverture que celle d’un touriste pour un agent ? Je peux vous assurer que non, et pour plusieurs raisons.
- Qui sont ?
- Un instant !! Nous discuterons des renseignements plus tard, ne nous éparpillons pas trop. Gardez cette question en tête, Nadège, et gardez votre réponse, Montferrand, nous en aurons besoin le moment opportun, dit Matilda, prenant rapidement des notes supplémentaires dans son carnet.
Jacob avait semblé pensif le temps de ce bref échange entre Nadège et Montferrand. Il n'avait visiblement pas envisagé la chose sous cet angle. Matilda soupira. Avant d’avoir les responsabilités qui étaient les siennes actuellement, elle se serait tout de suite rangée du côté du Para. Mais un tel acte alors qu’elle multipliait les appels à la confiance parmi les États voisins, qu’elle essayait de calmer les tensions posées par son prédécesseur, un tel acte aurait forcément été très mal perçu.
- Je regrette, Jacob, mais il va sûrement falloir construire un nouveau complexe de manœuvres ex-nihilo, dit Matilda, écrivant sur son carnet.
- Mais déjà nous savons ce qu’aimerait avoir notre ami Parachutiste… enchaîna Nadège, elle aussi prenant des notes, Nous avons une bonne base de départ pour sélectionner quelques sites potentiels.
- En effet… Il nous faudra peut-être même plusieurs complexes de ce style, éloignés afin de tester aussi les capacités de projection ? continua le Para, semblant comprendre où voulaient en venir les deux femmes.
- Nous en re-discuterons lors d’une réunion dédiée à ce sujet, je pense, dit Nadège en regardant Matilda, qui acquiesça. Poursuivez, Jacob.
- Bien. (Il clique de nouveau, la dernière ligne de son tableau se remplit.) La quatrième partie du plan consiste en une modernisation de l’armée. Nos armements sont vétustes et ne répondent plus aux besoins imposés par les conflits d’aujourd’hui, à quelques exceptions près. Nous avons réfléchi à ça et avons fait transmettre à votre intention plusieurs fiches, afin de pouvoir faire un pool de cahiers des charges à l’intention de nos entreprises.
- Oui, nous en reparlerons plus tard dans cette réunion, lorsque nous aborderons le problème avec tout le monde, dit Nadège
- L’avantage de ton programme c’est que toutes les parties peuvent s’effectuer en parallèle, Jacob, dit Matilda.
- Oui et non, dit le Para. Il ne s’agit là que d’une préférence personnelle, mais j’aimerai que les trois premières parties s’effectuent avant la réelle mise en place de la dernière.
- Pourquoi cela ?
Le Para déconnecta son ordinateur du projecteur et le confia à son Ordonnance. La jeune femme le posa à côté d’elle et lança un autre programme, sans doute préparait-elle la suite de la réunion, lorsque serait abordée l’aspect Matériel. Jacob, pendant ce temps, enchaînait :
- Il vaut mieux éviter de trop se disperser. Les soldats et formateurs à niveau sont habitués à leur équipement, tout vétuste soit-il, ils en connaissent les forces et les faiblesses. Je pense qu’il est sage de se renforcer avec ce que l’on a avant d’introduire trop de changements. Les exercices autour des différents ORBATs vont déjà les perturber assez, n’aggravons pas la situation en introduisant une nouvelle plateforme d’équipement.
- Tu penses qu’il faut privilégier l’organisation à l’équipement ?
- Pour le moment oui, nous n’avons clairement pas les moyens de trop nous disperser. Nous devrons déjà assurer trois rôles avec le peu de troupes aptes que nous avons…
- Et puis il faut aussi du temps avant de décider du meilleur matériel, des tests doivent-être effectués, et pour ce faire, il nous faut mobiliser d’autres soldats, vous le savez.
- Or nous n’en avons plus les moyens termina le Para
- J’avais oublié ce détail. Je n’ai jamais été très au fait des décisions concernant les choix de matériel, juste mise devant le fait accompli, répondit Matilda.
- C’est un processus assez simple quand toutes les parties s’entendent, mais assez long. Vous verrez.
Matilda s’enfonça dans son siège, regardant le plafond. Elle n’était pas vraiment pressée de rencontrer les dirigeants des principales usines de production d'armes, qui avaient pour la plupart bénéficié des largesses de Kellem en produisant un matériel visiblement dépassé à l’heure actuelle. Mais elle ne pourrait pas y couper, hélas. A côté d’elle, Nadège terminait de prendre des notes.
- Vous avez fini, Jacob ? demanda-t-elle
- En effet, oui, nous pouvons donner la Parole à ma silencieuse voisine, dit Jacob, adressant un clin d'œil à la Générale Dong.
- Ki ? C’est à vous de nous faire part de vos réflexions concernant votre arme, dit Nadège, tandis que tous les regards se portaient sur l’ancienne pilote de chasse.
[RP Interne ; Défense] Réunions au Grand Etat Major
Posté le : 15 jan. 2025 à 14:50:12
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Posté le : 21 fév. 2025 à 15:39:45
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(Suite de la réunion au GEM du 16/07/2015)
L’ancienne pilote de chasse fit un signe de la main à son ordonnance qui connecta, maladroitement à cause de son bras blessé, l’ordinateur de sa supérieure au projecteur. Un clic plus tard, l’état des effectifs et du matériel apparu.
- Merci, Nadège. Tout d’abord, je voudrais rectifier un point. Mon rapport a, semble-t-il, été mal interprété : notre flotte d’avion est en assez bon état, la majorité des appareils sont en état de voler. Ce qui manque, en revanche, c’est le personnel qualifié pour assurer leur bon fonctionnement : pilotes, mécano, armuriers, électriciens/électroniciens, etc. En l’état actuel des effectifs et de leur formation, nous ne disposons que d'une quarantaine de pilotes, un peu moins de la moitié d'entre eux étant des instructeurs, et ne pouvons donc pouvons faire voler que 24 appareils.
- Pourquoi si peu de personnel formé si le matériel est en bon état ? Notre composante aérienne compte bien plus que les 800 militaires que recense votre tableau demanda Nadège.
- A cause des départs en retraite, répondit la générale des Forces Aériennes.Nos vétérans ont pris leur retraite en grand nombre ces dernières années, et nous n’avons eu ni les fonds, ni le temps de former leurs successeurs. Les 800 personnels que vous voyez représentés ici sont le noyau dur opérationnel de la composante aérienne, le reste sait tout juste armer un pistolet. Tout comme Jacob, nous avons dores et déjà lancé de nouveaux entraînements afin de disposer de nouveau de personnels de valeur
- J’avais l’impression que Cuvilier avait les Forces Aériennes à la bonne pourtant, dit Matilda.
- Disons que le budget n’est pas allé au bon endroit, répondit Ki “Ding” Dong, sarcastique, en pointant au mur face à elle un tas de cadres de photos, dont un représentait l’une des imposantes villas de son prédécesseur.
Matilda et Nadège soupirèrent de concert. Non seulement ces bâtiments avaient coûté monstrueusement cher, plombant visiblement le budget de la composante aérienne de l’armée, mais en plus, en l’état actuel, ils n’étaient même pas vendables. Trop chers, trop grands (car même les riches peuvent trouver un bâtiment trop grand) et trop laids, personne n’en voulait. Pour le moment du moins.
- Poursuivez, Ki, dit Nadège avant de boire une gorgée de café
- Merci. Donc, nous avons lancé une nouvelle campagne d’entraînement, ce qui a bien entendu ponctionné des éléments de valeurs de notre pool de 800 personnels. Fort heureusement pour nous, nos simulateurs sont très efficaces, et l’ouverture de notre pays nous a permi d’acquérir une bonne centaine de nouveaux simulateurs, sur lesquels nous avons adapté nos types de cockpits, ainsi, nos pilotes peuvent se former sans être obligés d’avoir une machine entre les mains.
- Et pour ce qui est des “G” ? demanda Matilda
- Les bonnes vieilles "essoreuses" sont là pour ça répondit Ki avec un sourire.
- N’est-ce pas un peu… lèger ? poursuivi Matilda
- Ça l'est, oui, mais nos pilotes disposent ainsi des bases avant de monter dans les engins d’entraînement, les “Espadons”. Une fois dans le cockpit de ces avions, leur maîtrise acquise lors des cessions “simu” calme l'appréhension du premier vrai vol. La suite vient assez naturellement, y compris pour les “G”. Elle clique, plusieurs photos apparaissent, montrant toutes des cockpits différents.
- Ce sont les cockpits de quels appareils ? demanda Matilda
- De nos avions d’entraînement, les fameux KM-96 “Espadon”. Comme vous le constatez, nous avons installé les cockpits de chaque avion en service dans nos forces aériennes dans ce modèle d’avion d’école, elle clique de nouveau, l’image d’un monomoteur à hélice apparaît, Juste avant que vous ne vous demandiez comment c’est possible, sachez que c’est une pratique courante de l’aviation militaire, la structure de cet aéronef a été pensée pour permettre aisément ce genre de modification.
- Est-il inclus dans vos chiffres, Générale ? demanda Nadège
- Non, c’est un avion d’école, je ne l’ai pas inclus dans les chiffres de l’aviation, répondit Ki pendant que Matilda et Nadège prenaient des notes.
- Poursuivez, Ki dit Nadège, terminant sa prise de note.
- Bien elle clique de nouveau, un nouveau tableau apparaît. Comme nous l’avons tous constaté, nos forces sont en piteux état. Mais nous pouvons tourner cet état de fait à notre avantage. En effet, elle clique, une ligne du tableau se remplit, les Forces Aériennes ont toujours fait face à un problème épineux : la taille de notre pays et de ses eaux territoriales, bien que ce dernier problème ne soit plus vraiment de mon ressort à présent, elle adresse un clin d’oeil amical à l’Amiral Demartin qui sourit, Nous avons déjà commencé à régler le problème en développant, depuis 1979, des avions capables d’opérer depuis des bases improvisées sur notre réseau routier elle clique de nouveau et deux modèles d’avions apparaissent, Voici nos deux principaux chevaux de batailles, le JO-35 “Malevelant” et le O-37 “Valiant”...
- A quoi correspondent ces initiales ? interrompit Nadège
- Oh, excusez moi… répondit la générale Dong, visiblement confuse, J’ai tendance à oublier que la nomenclature aérienne peut être nébuleuse pour les autres branches… concernant les Espadons, il s’agit des initiales de l’entreprise responsable de leur production, Kahlen Motors. Pour les JO et O, il s’agit de “Jurkad” et “Oya’karir”, qui signifie, comme tout le monde le sait, respectivement “Attaque” et “Chasse” en Joha Tsad.
- Donc, si je comprends bien, hormis pour les avions d’école, et je suppose également, de transport, les initiales représentent le rôle de l’avion au sein de nos Forces Aériennes ? dit Nadège
- En effet, ceci dit, nos avions de transport aussi ont des initiales : Lo, pour “logistique”.
Nadège prenait fébrilement des notes, tout comme la Lieutenant Mynooc, second de Matilda. Cette dernière souriait. Elle avait une fille au sein des Forces Aériennes, elle connaissait le jargon propre à cette composante de l’armée de Nebrownia, et s’en amusait régulièrement, taquinant sa fille au passage. Cette dernière avait initialement été formée pour piloter le O-37, mais elle avait été contrainte de passer la qualification sur JO-35. En effet, à cause des détournements massifs de fonds opérés par le prédécesseur de la Générale Dong, les O-37 avaient étés cloués au sol, car l’heure de vol sur ces avions coûtait trop cher, et les meilleurs pilotes seuls avaient été autorisés à voler, obligeant la plupart à repasser des qualifications sur des avions dont l’heure de vol était moins chère, comme le JO-35. Noria, la fille de Mathilda, n’aimait pas piloter le JO-35, qu’elle qualifiait de “Tacot”. Pourtant, elle appréciait la puissance de son moteur et la résistance des volets de cet avion, permettant des manœuvres que le O-37 ne pouvait pas suivre… tout comme certains pilotes, car ces manœuvres pouvaient imposer à ces derniers des contraintes supérieures à 10G, que même les combinaisons anti-g ne pouvaient pas soutenir. Les malaises occasionnés par ces actions avaient déjà entraîné des crashs mortels, contraignant les ingénieurs à concevoir un blocage dont la rupture impliquait systématiquement une révision complète de l’avion après atterrissage. Les “rampants”, à savoir le personnel qui entretenait les avions et les maintenaient en état de vol, n’aimaient donc pas non plus ce genre de manœuvre à cause des contraintes qu’elles imposaient à la structure même de l’avion, et du surplus de travail ainsi engendré.
- Poursuivez, Ki, dit Nadège, une fois sa prise de note terminée. Vous alliez évoquer la chance représentée par l’état de notre composante aérienne ?
- En effet, Nadège. Les différences entre nos deux chevaux de bataille actuels représentent l’évolution débutée en 1979, avant l’ère Kellem. Le JO-35 a été développé dans les années 1965, avant que notre réflexion opérationnelle n’évolue, le O-37 est le fruit de cette réflection, son premier vol date de 1981, juste après l’établissement de la dictature de Kellem. Elle clique et plusieurs photos du JO-35 apparaissent.Le JO-35 nécessite une infrastructure importante et une piste dédiée, même s’il est capable de décollages courts, il n’a pas été conçu pour opérer à partir d’une base improvisée. Or, les guerres de notre voisin Lermandie, tout comme la nôtre, avec feu la Vietie l’ont démontré, la composante aérienne n’est pas à négliger dans une bataille, et pour assurer la meilleure couverture possible, la proximité du champ de bataille est indispensable, ainsi qu’une logistique à même de favoriser cette opérabilité. Alors que Jacob acquiesce, appuyant de son approbation l’importance de l’appuis aérien pour les Forces Terrestres, Ki clique de nouveau, une série de photos de camions et de matériel d'entretien apparaît à l’écran, Voici ce qui est nécessaire d’avoir en terme de logistique pour faire fonctionner un JO-35 de manière optimale pour une journée de combat d’intensité moyenne. Rassemblés en camions, munitions non comprises, nous avons trois camions juste pour les outils d’entretien du moteur, de l’électronique et de l’avionique, ajoutons un à deux camions de pièces détachées et deux autres d’essence, nous en sommes donc à sept camions, juste pour l’entretien. Une logistique énorme juste pour faire fonctionner l’avion.
- Et si nous incluons les munitions ? demande Nadège
- La logistique explose à ce niveau, en grande partie parce que les munitions pèsent lourd. Mais prenez aussi en compte le fait que je n’ai parlé ici que de la logistique, je n’ai pas parlé d’infrastructure.
- Est-ce si important? demande Nadège, haussant un sourcil intriguée.
- Le gros problème du JO-35 est qu’il a les pattes courtes, comme disent nos amis pilotes, son autonomie est limitée, enchaîna Matilda, le nez dans ses notes. Et l’emport de réservoirs largables limite drastiquement la quantité de munitions emportées pour assurer un soutien aérien efficace. De plus, à cause de sa surface alaire plus réduite que sur d’autres avions, sa vitesse d’approche est trop élevée pour lui permettre de se poser sur des surfaces telles que les routes, les contraintes structurelles provoquées par l'atterrissage sur de telles surfaces peuvent, par exemple, provoquer une rupture du train d’atterrissage.
Le silence se fait dans la salle, tous les regards tournés vers Matilda. Cette dernière, étonnée par ce soudain silence, lève la tête de ses notes et, le sourcil levé, regarde les autres participants de la réunion, intriguée.
- Quoi ?
- C’est effectivement un des gros défauts de cet avion. Je suis surprise de vos connaissances en la matière, Matilda dit la générale Dong
- AH !! Noria a dû lui donner quelques cours du soir !! s’amuse Jacob, un large sourire venant ajouter quelques rides autour de ses yeux.
- Noria ? Oh !! La Lieutenant-Colonel Emerson !! Bien sûr… la générale Dong sourit, Je prêche donc une convertie.
- Ce qui n’est pas le cas de tout le monde ici, et j’avoue être loin d’avoir intégré ce qui semble être des concepts de base pour nos amis de la composante aérienne. Je compte donc sur vous pour me vulgariser quelques notions, Matilda, dit Nadège avec un clin d’oeil pour Matilda, avant de se retourner vers la Générale Dong, mais poursuivez, Ki, l’importance des infrastructures pour la composante aérienne et la chance représentée par la situation actuelle.
- Oui, elle clique de nouveau, faisant apparaître sur l’écran une carte de Nebrownia et les septs principales bases aériennes du pays, Voici les principales bases aériennes, et maintenant, elle clique de nouveau, des cercles apparaissent, ayant pour centre les bases aériennes, voici le rayon d’action du JO-35. Comme vous le constatez, il a juste assez pour assurer une couverture aérienne via des patrouilles d’une base à l’autre. La réflexion du plan de 1979, brièvement interrompue par l’avènement de Kellem, mais poursuivie après 1981, a été de modifier des portions de notre réseau routier afin de le rendre apte à accueillir des éléments de notre composante aérienne dessus, mais également de concevoir des avions apte à opérer à partir de routes d’une certaine longueur, permettant une plus grande flexibilité opérationnelle. Les retex de la guerre de 82-84 nous ont permi de recueillir de précieuses informations ayant donné naissance au O-37.
Nadège continue fébrilement sa prise de note alors que la générale Dong clique de nouveau, faisant apparaître plusieurs photos du O-37 et de ses besoins en terme de logistique. Nadège lève enfin les yeux.
- J’imagine que les camions représentent ce dont cet avion a besoin en terme de logistique ? dit Nadège
- En effet, comme vous le constatez, nous avons réduit ce nombre à trois, essence inclue, mais munitions non inclues. Ce nombre est le minimum atteignable à moins d’avoir des véhicules entièrement spécialisés, nos ingénieurs planchent sur le sujet depuis un moment, mais pour le moment, nous ne pouvons pas faire moins, précisa la Générale Dong.
- C’est déjà un progrès énorme. Pourquoi cet avion ne vole-t-il pas en ce moment ? s'étonna Nadège, acceptant du regard la tasse de café tendu par un aide de l'Amiral à sa droite.
- L’heure de vol est plus chère que sur le JO-35, et au vu des finances actuelles, nous ne pouvons pas nous permettre une telle dépense.
- Le budget a pourtant été revu à la hausse… vous avez tant de dépenses à couvrir ?
- Les infrastructures et le projet O-X ont dores et déjà englouti le budget de l’année… mais normalement, la part allouée aux infrastructures devrait diminuer drastiquement l’année prochaine, car nous en aurons des rénovées de frais, ça ne sera plus que de l’entretien régulier, donc moins cher.
- Le projet O-X ?
- Le projet du nouveau chasseur/intercepteur de Nebrownia, il a été lancé il y a trois ans. Matilda regarde le plafond. Noria avait été très motivée pour faire partie du projet comme pilote d’essai, mais elle n’avait pas été retenue. Officiellement à cause de son inexpérience comme pilote, officieusement, Matilda le sentait, car elle était une femme. Le gouvernement Kellem parlait en effet à l’époque de la place de la femme dans la société, et donc dans l’armée. Si je ne m’abuse, un prototype devait voler cette année, non?
La générale Dong affiche un sourire mi-contrit, mi-amusé. Elle clique et apparaît alors à l’écran l’état actuel du projet O-X. Elle semblait avoir prévu que le sujet apparaîtrait à ce moment de la réunion. Matilda leva un sourcil intrigué. L’autre surnom de la Générale Dong, sa fille le lui avait appris récemment, était Flying Fox ou Foxxie. Ce surnom n’était visiblement pas usurpé.
- Juste après mon accession à ce poste, j’ai poussé les ingénieurs à me donner leur avis sur la faisabilité du vol de présentation dans l’état actuel de l’avancement. Ils m’ont tous dit que ce n’était pas faisable. Le cahier des charges n’est rempli qu’au niveau du moteur, de la cellule et de l’opérabilité à partir de terrains improvisés. Mais concernant l’avionique et l’électronique liée aux armements, tout le programme est aux fraises. Nous avons pris un retard technologique considérable de ce côté, à cause de notre isolement durant l’ère Kellem. Ce que nous considérions comme un progrès considérable il y a deux ans, était alors déjà dépassé à l’échelle du monde.
La générale Dong fait une pause, laissant à tout le monde le temps de digérer la nouvelle. Matilda, sentant le regard de Nadège sur elle, se tourne. Les yeux comme des soucoupes, Nadège était blême.
-Si j’ai bien compris, nous allons devoir baser notre défense sur des avions complètement dépassés encore pour quelques années ? demanda-t-elle à sa voisine de gauche.
- C’est exact. répondit Matilda.
- J'ai du mal à voir un avantage dans la situation actuelle, je l'avoue dit Nadège, reprenant quelques couleurs.
Matilda tourna son regard vers la générale Dong. Cette dernière clique encore une fois, et un diagramme apparaît, la structuration des Forces aériennes. Elle clique de nouveau et l'ensemble du diagramme est barré d'une épaisse croix rouge.
-Vu que l'actuelle structure est complètement aux fraises elle aussi, c'est l'occasion rêvée de la revoir intégralement. J'ai quelques idées en tête qui pourraient nous permettre, sur le papier, d'avoir une plus grande souplesse opérationnelle, mais il me faudrait plus d'effectifs pour lancer des tests, ce n'est donc pas possible pour le moment. De plus, nos seuls rapports opérationnels sont ceux de notre dernière guerre, il nous faut plus d'informations concernant les opérations aériennes menées de par le monde. Nous avons également besoin de mener des exercices communs avec nos amis Lermandiens et Westaliens, de cette façon, nous saurons mieux où nous nous situons, technologiquement et matériellement parlant. Le cumul des informations et retex nous permettra à plus ou moins long terme de mieux nous situer et rattraper notre retard asséna la générale Dong
-J’en prends bonne note, générale, répondi Nadège, avant de relire brièvement ses notes. Si vous me le permettez, je vais vous résumer ce que j’ai compris de la situation actuelle et de votre programme pour les Forces aériennes : pour l’heure, notre défense aérienne ne repose que sur une quarantaine de pilotes et 24 avions au rayon d’action trop faible pour pouvoir assurer une couverture aérienne constante du territoire. La majeure partie des pilotes sont retournés en formation à cause d’un nombre d’heures de vol trop réduit et c’est le seul frein à une couverture aérienne plus étoffée car sinon, notre parc aérien a été globalement bien entretenu. Pour l’année à venir, les axes principaux pour vous sont la rénovation des infrastructures, la re-formation des personnels jugés insuffisamment formés, l'étude d'une restructuration des Forces Aériennes, le lancement d’exercices en commun avec nos amis Lermandiens et Westaliens en vue de retex nous permettant de poursuivre le programme O-X.
-En effet, Nadège. C’est beaucoup parler pour peu de résultats, mais je pense qu’il était nécessaire de vous présenter aussi les grandes lignes de notre doctrine aérienne. Nous allons sans doute la faire évoluer au contact de nos voisins, mais ne mettons pas la charrue avant les boeufs…
Nadège se frotta les tempes. Matilda, souriante, remercia intérieurement les heures de discussions passées avec sa fille pilote, pour tenter de comprendre la passion qui l'animait lorsqu’elle parlait de l’aviation.
-Bien… Je crois qu’il est temps de passer à vous, Montferrand, et à votre service, dit Matilda au seul fumeur de la pièce, tirant toujours sur sa bouffarde.
L’ancienne pilote de chasse fit un signe de la main à son ordonnance qui connecta, maladroitement à cause de son bras blessé, l’ordinateur de sa supérieure au projecteur. Un clic plus tard, l’état des effectifs et du matériel apparu.
- Merci, Nadège. Tout d’abord, je voudrais rectifier un point. Mon rapport a, semble-t-il, été mal interprété : notre flotte d’avion est en assez bon état, la majorité des appareils sont en état de voler. Ce qui manque, en revanche, c’est le personnel qualifié pour assurer leur bon fonctionnement : pilotes, mécano, armuriers, électriciens/électroniciens, etc. En l’état actuel des effectifs et de leur formation, nous ne disposons que d'une quarantaine de pilotes, un peu moins de la moitié d'entre eux étant des instructeurs, et ne pouvons donc pouvons faire voler que 24 appareils.
- Pourquoi si peu de personnel formé si le matériel est en bon état ? Notre composante aérienne compte bien plus que les 800 militaires que recense votre tableau demanda Nadège.
- A cause des départs en retraite, répondit la générale des Forces Aériennes.Nos vétérans ont pris leur retraite en grand nombre ces dernières années, et nous n’avons eu ni les fonds, ni le temps de former leurs successeurs. Les 800 personnels que vous voyez représentés ici sont le noyau dur opérationnel de la composante aérienne, le reste sait tout juste armer un pistolet. Tout comme Jacob, nous avons dores et déjà lancé de nouveaux entraînements afin de disposer de nouveau de personnels de valeur
- J’avais l’impression que Cuvilier avait les Forces Aériennes à la bonne pourtant, dit Matilda.
- Disons que le budget n’est pas allé au bon endroit, répondit Ki “Ding” Dong, sarcastique, en pointant au mur face à elle un tas de cadres de photos, dont un représentait l’une des imposantes villas de son prédécesseur.
Matilda et Nadège soupirèrent de concert. Non seulement ces bâtiments avaient coûté monstrueusement cher, plombant visiblement le budget de la composante aérienne de l’armée, mais en plus, en l’état actuel, ils n’étaient même pas vendables. Trop chers, trop grands (car même les riches peuvent trouver un bâtiment trop grand) et trop laids, personne n’en voulait. Pour le moment du moins.
- Poursuivez, Ki, dit Nadège avant de boire une gorgée de café
- Merci. Donc, nous avons lancé une nouvelle campagne d’entraînement, ce qui a bien entendu ponctionné des éléments de valeurs de notre pool de 800 personnels. Fort heureusement pour nous, nos simulateurs sont très efficaces, et l’ouverture de notre pays nous a permi d’acquérir une bonne centaine de nouveaux simulateurs, sur lesquels nous avons adapté nos types de cockpits, ainsi, nos pilotes peuvent se former sans être obligés d’avoir une machine entre les mains.
- Et pour ce qui est des “G” ? demanda Matilda
- Les bonnes vieilles "essoreuses" sont là pour ça répondit Ki avec un sourire.
- N’est-ce pas un peu… lèger ? poursuivi Matilda
- Ça l'est, oui, mais nos pilotes disposent ainsi des bases avant de monter dans les engins d’entraînement, les “Espadons”. Une fois dans le cockpit de ces avions, leur maîtrise acquise lors des cessions “simu” calme l'appréhension du premier vrai vol. La suite vient assez naturellement, y compris pour les “G”. Elle clique, plusieurs photos apparaissent, montrant toutes des cockpits différents.
- Ce sont les cockpits de quels appareils ? demanda Matilda
- De nos avions d’entraînement, les fameux KM-96 “Espadon”. Comme vous le constatez, nous avons installé les cockpits de chaque avion en service dans nos forces aériennes dans ce modèle d’avion d’école, elle clique de nouveau, l’image d’un monomoteur à hélice apparaît, Juste avant que vous ne vous demandiez comment c’est possible, sachez que c’est une pratique courante de l’aviation militaire, la structure de cet aéronef a été pensée pour permettre aisément ce genre de modification.
- Est-il inclus dans vos chiffres, Générale ? demanda Nadège
- Non, c’est un avion d’école, je ne l’ai pas inclus dans les chiffres de l’aviation, répondit Ki pendant que Matilda et Nadège prenaient des notes.
- Poursuivez, Ki dit Nadège, terminant sa prise de note.
- Bien elle clique de nouveau, un nouveau tableau apparaît. Comme nous l’avons tous constaté, nos forces sont en piteux état. Mais nous pouvons tourner cet état de fait à notre avantage. En effet, elle clique, une ligne du tableau se remplit, les Forces Aériennes ont toujours fait face à un problème épineux : la taille de notre pays et de ses eaux territoriales, bien que ce dernier problème ne soit plus vraiment de mon ressort à présent, elle adresse un clin d’oeil amical à l’Amiral Demartin qui sourit, Nous avons déjà commencé à régler le problème en développant, depuis 1979, des avions capables d’opérer depuis des bases improvisées sur notre réseau routier elle clique de nouveau et deux modèles d’avions apparaissent, Voici nos deux principaux chevaux de batailles, le JO-35 “Malevelant” et le O-37 “Valiant”...
- A quoi correspondent ces initiales ? interrompit Nadège
- Oh, excusez moi… répondit la générale Dong, visiblement confuse, J’ai tendance à oublier que la nomenclature aérienne peut être nébuleuse pour les autres branches… concernant les Espadons, il s’agit des initiales de l’entreprise responsable de leur production, Kahlen Motors. Pour les JO et O, il s’agit de “Jurkad” et “Oya’karir”, qui signifie, comme tout le monde le sait, respectivement “Attaque” et “Chasse” en Joha Tsad.
- Donc, si je comprends bien, hormis pour les avions d’école, et je suppose également, de transport, les initiales représentent le rôle de l’avion au sein de nos Forces Aériennes ? dit Nadège
- En effet, ceci dit, nos avions de transport aussi ont des initiales : Lo, pour “logistique”.
Nadège prenait fébrilement des notes, tout comme la Lieutenant Mynooc, second de Matilda. Cette dernière souriait. Elle avait une fille au sein des Forces Aériennes, elle connaissait le jargon propre à cette composante de l’armée de Nebrownia, et s’en amusait régulièrement, taquinant sa fille au passage. Cette dernière avait initialement été formée pour piloter le O-37, mais elle avait été contrainte de passer la qualification sur JO-35. En effet, à cause des détournements massifs de fonds opérés par le prédécesseur de la Générale Dong, les O-37 avaient étés cloués au sol, car l’heure de vol sur ces avions coûtait trop cher, et les meilleurs pilotes seuls avaient été autorisés à voler, obligeant la plupart à repasser des qualifications sur des avions dont l’heure de vol était moins chère, comme le JO-35. Noria, la fille de Mathilda, n’aimait pas piloter le JO-35, qu’elle qualifiait de “Tacot”. Pourtant, elle appréciait la puissance de son moteur et la résistance des volets de cet avion, permettant des manœuvres que le O-37 ne pouvait pas suivre… tout comme certains pilotes, car ces manœuvres pouvaient imposer à ces derniers des contraintes supérieures à 10G, que même les combinaisons anti-g ne pouvaient pas soutenir. Les malaises occasionnés par ces actions avaient déjà entraîné des crashs mortels, contraignant les ingénieurs à concevoir un blocage dont la rupture impliquait systématiquement une révision complète de l’avion après atterrissage. Les “rampants”, à savoir le personnel qui entretenait les avions et les maintenaient en état de vol, n’aimaient donc pas non plus ce genre de manœuvre à cause des contraintes qu’elles imposaient à la structure même de l’avion, et du surplus de travail ainsi engendré.
- Poursuivez, Ki, dit Nadège, une fois sa prise de note terminée. Vous alliez évoquer la chance représentée par l’état de notre composante aérienne ?
- En effet, Nadège. Les différences entre nos deux chevaux de bataille actuels représentent l’évolution débutée en 1979, avant l’ère Kellem. Le JO-35 a été développé dans les années 1965, avant que notre réflexion opérationnelle n’évolue, le O-37 est le fruit de cette réflection, son premier vol date de 1981, juste après l’établissement de la dictature de Kellem. Elle clique et plusieurs photos du JO-35 apparaissent.Le JO-35 nécessite une infrastructure importante et une piste dédiée, même s’il est capable de décollages courts, il n’a pas été conçu pour opérer à partir d’une base improvisée. Or, les guerres de notre voisin Lermandie, tout comme la nôtre, avec feu la Vietie l’ont démontré, la composante aérienne n’est pas à négliger dans une bataille, et pour assurer la meilleure couverture possible, la proximité du champ de bataille est indispensable, ainsi qu’une logistique à même de favoriser cette opérabilité. Alors que Jacob acquiesce, appuyant de son approbation l’importance de l’appuis aérien pour les Forces Terrestres, Ki clique de nouveau, une série de photos de camions et de matériel d'entretien apparaît à l’écran, Voici ce qui est nécessaire d’avoir en terme de logistique pour faire fonctionner un JO-35 de manière optimale pour une journée de combat d’intensité moyenne. Rassemblés en camions, munitions non comprises, nous avons trois camions juste pour les outils d’entretien du moteur, de l’électronique et de l’avionique, ajoutons un à deux camions de pièces détachées et deux autres d’essence, nous en sommes donc à sept camions, juste pour l’entretien. Une logistique énorme juste pour faire fonctionner l’avion.
- Et si nous incluons les munitions ? demande Nadège
- La logistique explose à ce niveau, en grande partie parce que les munitions pèsent lourd. Mais prenez aussi en compte le fait que je n’ai parlé ici que de la logistique, je n’ai pas parlé d’infrastructure.
- Est-ce si important? demande Nadège, haussant un sourcil intriguée.
- Le gros problème du JO-35 est qu’il a les pattes courtes, comme disent nos amis pilotes, son autonomie est limitée, enchaîna Matilda, le nez dans ses notes. Et l’emport de réservoirs largables limite drastiquement la quantité de munitions emportées pour assurer un soutien aérien efficace. De plus, à cause de sa surface alaire plus réduite que sur d’autres avions, sa vitesse d’approche est trop élevée pour lui permettre de se poser sur des surfaces telles que les routes, les contraintes structurelles provoquées par l'atterrissage sur de telles surfaces peuvent, par exemple, provoquer une rupture du train d’atterrissage.
Le silence se fait dans la salle, tous les regards tournés vers Matilda. Cette dernière, étonnée par ce soudain silence, lève la tête de ses notes et, le sourcil levé, regarde les autres participants de la réunion, intriguée.
- Quoi ?
- C’est effectivement un des gros défauts de cet avion. Je suis surprise de vos connaissances en la matière, Matilda dit la générale Dong
- AH !! Noria a dû lui donner quelques cours du soir !! s’amuse Jacob, un large sourire venant ajouter quelques rides autour de ses yeux.
- Noria ? Oh !! La Lieutenant-Colonel Emerson !! Bien sûr… la générale Dong sourit, Je prêche donc une convertie.
- Ce qui n’est pas le cas de tout le monde ici, et j’avoue être loin d’avoir intégré ce qui semble être des concepts de base pour nos amis de la composante aérienne. Je compte donc sur vous pour me vulgariser quelques notions, Matilda, dit Nadège avec un clin d’oeil pour Matilda, avant de se retourner vers la Générale Dong, mais poursuivez, Ki, l’importance des infrastructures pour la composante aérienne et la chance représentée par la situation actuelle.
- Oui, elle clique de nouveau, faisant apparaître sur l’écran une carte de Nebrownia et les septs principales bases aériennes du pays, Voici les principales bases aériennes, et maintenant, elle clique de nouveau, des cercles apparaissent, ayant pour centre les bases aériennes, voici le rayon d’action du JO-35. Comme vous le constatez, il a juste assez pour assurer une couverture aérienne via des patrouilles d’une base à l’autre. La réflexion du plan de 1979, brièvement interrompue par l’avènement de Kellem, mais poursuivie après 1981, a été de modifier des portions de notre réseau routier afin de le rendre apte à accueillir des éléments de notre composante aérienne dessus, mais également de concevoir des avions apte à opérer à partir de routes d’une certaine longueur, permettant une plus grande flexibilité opérationnelle. Les retex de la guerre de 82-84 nous ont permi de recueillir de précieuses informations ayant donné naissance au O-37.
Nadège continue fébrilement sa prise de note alors que la générale Dong clique de nouveau, faisant apparaître plusieurs photos du O-37 et de ses besoins en terme de logistique. Nadège lève enfin les yeux.
- J’imagine que les camions représentent ce dont cet avion a besoin en terme de logistique ? dit Nadège
- En effet, comme vous le constatez, nous avons réduit ce nombre à trois, essence inclue, mais munitions non inclues. Ce nombre est le minimum atteignable à moins d’avoir des véhicules entièrement spécialisés, nos ingénieurs planchent sur le sujet depuis un moment, mais pour le moment, nous ne pouvons pas faire moins, précisa la Générale Dong.
- C’est déjà un progrès énorme. Pourquoi cet avion ne vole-t-il pas en ce moment ? s'étonna Nadège, acceptant du regard la tasse de café tendu par un aide de l'Amiral à sa droite.
- L’heure de vol est plus chère que sur le JO-35, et au vu des finances actuelles, nous ne pouvons pas nous permettre une telle dépense.
- Le budget a pourtant été revu à la hausse… vous avez tant de dépenses à couvrir ?
- Les infrastructures et le projet O-X ont dores et déjà englouti le budget de l’année… mais normalement, la part allouée aux infrastructures devrait diminuer drastiquement l’année prochaine, car nous en aurons des rénovées de frais, ça ne sera plus que de l’entretien régulier, donc moins cher.
- Le projet O-X ?
- Le projet du nouveau chasseur/intercepteur de Nebrownia, il a été lancé il y a trois ans. Matilda regarde le plafond. Noria avait été très motivée pour faire partie du projet comme pilote d’essai, mais elle n’avait pas été retenue. Officiellement à cause de son inexpérience comme pilote, officieusement, Matilda le sentait, car elle était une femme. Le gouvernement Kellem parlait en effet à l’époque de la place de la femme dans la société, et donc dans l’armée. Si je ne m’abuse, un prototype devait voler cette année, non?
La générale Dong affiche un sourire mi-contrit, mi-amusé. Elle clique et apparaît alors à l’écran l’état actuel du projet O-X. Elle semblait avoir prévu que le sujet apparaîtrait à ce moment de la réunion. Matilda leva un sourcil intrigué. L’autre surnom de la Générale Dong, sa fille le lui avait appris récemment, était Flying Fox ou Foxxie. Ce surnom n’était visiblement pas usurpé.
- Juste après mon accession à ce poste, j’ai poussé les ingénieurs à me donner leur avis sur la faisabilité du vol de présentation dans l’état actuel de l’avancement. Ils m’ont tous dit que ce n’était pas faisable. Le cahier des charges n’est rempli qu’au niveau du moteur, de la cellule et de l’opérabilité à partir de terrains improvisés. Mais concernant l’avionique et l’électronique liée aux armements, tout le programme est aux fraises. Nous avons pris un retard technologique considérable de ce côté, à cause de notre isolement durant l’ère Kellem. Ce que nous considérions comme un progrès considérable il y a deux ans, était alors déjà dépassé à l’échelle du monde.
La générale Dong fait une pause, laissant à tout le monde le temps de digérer la nouvelle. Matilda, sentant le regard de Nadège sur elle, se tourne. Les yeux comme des soucoupes, Nadège était blême.
-Si j’ai bien compris, nous allons devoir baser notre défense sur des avions complètement dépassés encore pour quelques années ? demanda-t-elle à sa voisine de gauche.
- C’est exact. répondit Matilda.
- J'ai du mal à voir un avantage dans la situation actuelle, je l'avoue dit Nadège, reprenant quelques couleurs.
Matilda tourna son regard vers la générale Dong. Cette dernière clique encore une fois, et un diagramme apparaît, la structuration des Forces aériennes. Elle clique de nouveau et l'ensemble du diagramme est barré d'une épaisse croix rouge.
-Vu que l'actuelle structure est complètement aux fraises elle aussi, c'est l'occasion rêvée de la revoir intégralement. J'ai quelques idées en tête qui pourraient nous permettre, sur le papier, d'avoir une plus grande souplesse opérationnelle, mais il me faudrait plus d'effectifs pour lancer des tests, ce n'est donc pas possible pour le moment. De plus, nos seuls rapports opérationnels sont ceux de notre dernière guerre, il nous faut plus d'informations concernant les opérations aériennes menées de par le monde. Nous avons également besoin de mener des exercices communs avec nos amis Lermandiens et Westaliens, de cette façon, nous saurons mieux où nous nous situons, technologiquement et matériellement parlant. Le cumul des informations et retex nous permettra à plus ou moins long terme de mieux nous situer et rattraper notre retard asséna la générale Dong
-J’en prends bonne note, générale, répondi Nadège, avant de relire brièvement ses notes. Si vous me le permettez, je vais vous résumer ce que j’ai compris de la situation actuelle et de votre programme pour les Forces aériennes : pour l’heure, notre défense aérienne ne repose que sur une quarantaine de pilotes et 24 avions au rayon d’action trop faible pour pouvoir assurer une couverture aérienne constante du territoire. La majeure partie des pilotes sont retournés en formation à cause d’un nombre d’heures de vol trop réduit et c’est le seul frein à une couverture aérienne plus étoffée car sinon, notre parc aérien a été globalement bien entretenu. Pour l’année à venir, les axes principaux pour vous sont la rénovation des infrastructures, la re-formation des personnels jugés insuffisamment formés, l'étude d'une restructuration des Forces Aériennes, le lancement d’exercices en commun avec nos amis Lermandiens et Westaliens en vue de retex nous permettant de poursuivre le programme O-X.
-En effet, Nadège. C’est beaucoup parler pour peu de résultats, mais je pense qu’il était nécessaire de vous présenter aussi les grandes lignes de notre doctrine aérienne. Nous allons sans doute la faire évoluer au contact de nos voisins, mais ne mettons pas la charrue avant les boeufs…
Nadège se frotta les tempes. Matilda, souriante, remercia intérieurement les heures de discussions passées avec sa fille pilote, pour tenter de comprendre la passion qui l'animait lorsqu’elle parlait de l’aviation.
-Bien… Je crois qu’il est temps de passer à vous, Montferrand, et à votre service, dit Matilda au seul fumeur de la pièce, tirant toujours sur sa bouffarde.
