11/05/2017
22:37:12
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[Clovanie - Teyla] Deux nations opposées

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Photo du Premier ministre du Royaume de Teyla, Angel Rojas, prise lors d'une conférence sur l'avenir de l'économie du Royaume de Teyla au salon "Teyla 2035" a Gèvre, en présence de nombreuses personnalités du monde économique.
Premier ministre, Angel Rojas


- Bien que nos régimes soient vraiment différents et, je rajouterais, éloignés sur les mœurs, je m'étonne que le gouvernement d'Antoine Carbasier n'ait pas recherché à se rapprocher de la Clovanie, ou encore de nous depuis deux mille douze. Pierre Lore parlait froidement, à côté de lui se trouvait Yasmine Laval, la ministre de l'Intérieur. J'entends parfaitement que nos régimes ne sont pas compatibles en tout point, le mélange monarchie et république me dérange tout autant que vous. Soit, on est monarchiste, soit on est une république, ce n'est qu'une monarchie de pacotille. Mais je suis obligé d'observer, alors qu'il croisait ses jambes tout en fixant Angel Roja, son ami et le Premier ministre de Sa Majesté, que nous avons des intérêts communs, notamment sur la Loduarie Communiste qui doit préoccuper tout autant les autorités clovaniennes que nous.

Yasmine Laval, elle aussi amie proche des deux autres personnages d’État présents dans la pièce, semblait peser chaque mot qui s’échangeait, comme si elle analysait consciencieusement chaque mot qui s'échangeait dans cette pièce à l'aube d'une rencontre importante tant pour le Royaume de Teyla, que la Clovanie et que l'Eurysie de l'Ouest et peut-être même le monde, pensa intérieurement Yasmine. Alors que Pierre terminait sa phrase toujours sur un ton froid, elle ne put retenir un gloussement, un ricanement sorti de ses entrailles. Elle était désabusée par le comportement de son ami, lorsqu'on parlait affaires internationales et tout ce qui était rattaché au ministère de Pierre Lore, même en privé. Celui-ci ne montrait aucun geste amical ni le moindre signe d’affinité particulière. La seule marque laissant deviner une certaine complicité entre les trois individus résidait dans le fait que Pierre Lore avait échangé une bise. Elle finit par répondre :

- Certes, tes arguments sont plutôt bons. Et bien que je fasse partie de l'aile droite de ce gouvernement et du parti, je ne suis pas particulièrement pour rencontrer la Clovanie. J'ai eu beaucoup de mal quand tu es allé en Karty ou encore au sein de l'Union de Noyavik qui n'avait pas encore aboli l'esclavage. Elle renifla et croisa les bras, comme pour signifier que la suite ne lui plaisait guère. Mais je dois l'avouer, Pierre, la stratégie que tu as adoptée avec Angel Rojas fut la bonne. Vous avez obtenu d'énormes concessions de la part du Saint-Empire de Karty qui se lance dans une démocratisation lente, mais sereine. Pareil pour l'Union de Noyavik avec la précieuse aide de la République de Tanska. Abolition du servage, démocratisation du régime et j'en passe. Vous faites preuve d'un talent diplomatique rarement vu !

Pour autant, force est de constater que la Clovanie n'est pas l'un de ces régimes. C'est sûrement l'un des régimes conservateurs, réactionnaires les moins mauvais sur cette terre. Mais je doute que même la discussion, la négociation suffiront à obtenir des concessions sur certains sujets qui nous préoccupent comme les droits LGBTQ+, la liberté d'expression et j'en passe. Heureusement, ils n'autorisent pas l'esclavage eux, enfin des gens sensés dans ce monde.
L'assemblée gloussa abondamment à la suite de cette remarque. On va pouvoir former un club des nations réactionnaires que nous contactons si nous continuons sur ce chemin, je vous le dis. Et je ne suis pas la seule dans le parti que ça dérange.

- Oh, crois-moi, je sais bien que tu n'es pas la seule que ça dérange dans le parti. Le Premier ministre leva les yeux, fixant brièvement le plafond comme s’il cherchait à contenir un soupir. Il continua sur un ton conciliant. La rencontre est réalisée pour savoir si nous pouvons discuter avec la Clovanie justement et voir si nous pouvons trouver des terrains d'entente sur des sujets qui nous rassemblent, à savoir la montée de l'Eurycommuniste en Eurysie et dans le monde, entre autres. L'Eurycommuniste est une idéologie fortement belliqueuse, nous ne voulons donc pas de sa propagation pour pouvoir maintenir notre cadre sécuritaire qui nous permet la prospérité économique et d'autres avantages. Quant à ta remarque, Pierre, il me semble que le pacte de non-agression entre la Clovanie et la Loduarie, dont Fortuna est la garante, a réellement joué en notre faveur. En outre, on ne voyait pas l'intérêt de contacter la Clovanie étant donné qu'elle ne pourrait pas nous aider en cas d'attaque de la Loduarie Communiste à notre encontre.

- Je crois que c'était une erreur, dit Pierre Lore avec assurance. En outre, tu as raison : en cas de conflit, elle ne peut pas nous aider. Mais nous ne sommes pas en conflit ouvert avec la Loduarie Communiste actuellement. Nous sommes dans une guerre indirecte contre la Loduarie Communiste et les membres de l'Union Internationale du Communisme et du Socialisme. Nous ne le disons pas publiquement pour éviter qu'ils aient la mauvaise idée de faire de cette organisation une alliance militaire comme le souhaite l'Unita ou encore le P.E.V. Mais cela nous montre juste que ce n'est plus Lorenzo qui contrôle l'organisation, quand c'est un parti étranger qui doit faire tout l'effort de propagande. Tout ça pour dire que la Clovanie peut être utile et nous pouvons être utiles à la Clovanie tant qu'un conflit ouvert n'existe pas, si la proposition que nous allons faire à la Loduarie ne plaît pas à cette dernière.

Angel Rojas tapotait doucement ses doigts sur l’accoudoir de son siège tout en parcourant la pièce de son regard vif. Pierre Lore continuait de fixer avec froideur Angel Rojas, attendant une réponse de son supérieur hiérarchique et ami. La conversation était amicale, mais on pouvait sentir dans l'air le poids des convictions des personnages d'État présents. Yasmine Laval avait tout le mal du monde à négocier avec les régimes les plus à droite de la planète et peut-être en manque de démocratie. Elle pouvait concéder la discussion, la négociation avec ces régimes si cela aboutissait à des concessions. Pierre Lore était comme sa collègue de l'Intérieur, mais il recevait les ordres d'Angel Rojas et il devait admettre que l'influence communiste en Eurysie devenait préoccupante. Angel Rojas était le plus froid, le plus pragmatique face à la situation malgré son histoire personnelle. Il n'avait aucun mal à aller discuter avec les dictatures les plus softs du continent si ces discussions amenaient à une entente pouvant satisfaire les deux parties. Toutefois, Angel le savait : au Royaume de Teyla, le Premier ministre est dépendant du Parlement et il ne pouvait pas appliquer la politique diplomatique qu'il souhaitait sans le soutien de celui-ci, notamment parce que la ratification des traités revient au Parlement.

- Quoiqu'il arrive, on a déjà discuté de ce que nous voulons obtenir durant cette rencontre. Déjà, nous nous attendons à aucune chose concrète, que cela soit un accord écrit ou oral. Nous allons avoir besoin du temps pour apprendre à faire confiance à la Clovanie et l'inverse est sûrement vrai. Si nous obtenons un accord oral ou écrit lors de la première rencontre, alors nous serons plus que surpris et satisfaits. Je suis bien conscient que l'opposition au Parlement se fera une joie de démontrer que nous n'avons rien obtenu de la rencontre avec la Clovanie et qu'il n'était pas nécessaire de donner une visibilité aussi grande à ce régime. Mais je souhaite apporter de la nuance. Comme je l'ai signifié au-dessus, nous aurons d'autres armes pour nous défendre au Parlement, nous sommes toujours sur la dynamique des réussites auprès du Saint Empire de Karty et de l'Union de Novayik, cela se fera sur le temps long.

Il est évident que le pays n'acceptera très certainement pas des réformes concernant les sujets qui nous préoccupent, à savoir les minorités et la démocratie. Nous pouvons intégrer ce sujet dans la rencontre, mais cela ne doit pas être le sujet principal de la rencontre. En outre, le sujet de la discussion doit être porté sur la montée du communisme en Eurysie et quelles réponses peuvent y être apportées.


Alors que le Premier ministre continuait son monologue, la rencontre entre le Premier ministre, la Ministre de l'Intérieur et le Ministre des Affaires Étrangères dura plusieurs heures encore.


Pierre Lore et Angel Rojas se tenaient côte à côte sur le tarmac de l’aéroport. Le vent chargé de l'odeur bitumée de l'aéroport faisait danser leurs cheveux et leurs longs manteaux noirs sous lesquels on pouvait voir apparaître un costume à trois pièces. Angel Rojas, comme à son habitude dans ces moments-là, observait le ballet des voitures et des avions défilant sous ses yeux d'homme prudent face à cet environnement. Ses mains jointes devant lui, il affichait un air sérieux et d'homme d'État gouvernant une nation. Pourtant, au fond de lui, il avait peur des actions que pouvait entreprendre la Loduarie à l'égard du Royaume de Teyla. Il avait peur d'une guerre dans la région, car il savait d'avance qui serait paniqué et perdu dans les décisions à prendre. Il avait espoir que si une guerre arrivait avec la Loduarie Communiste, l'État teylais et la nation seraient derrière lui pour le soutenir face à cette épreuve. Après tout, l'organisation de l'État teylais et du gouvernement avait été pensée pour éviter qu'un homme seul, comme le Premier ministre, ait tout le poids des décisions sur ses épaules et qu'il soit conseillé par les fonctionnaires. Chaque jour, il se rappelait, pour se rassurer, que Sa Majesté Catherine III partageait avec lui le rôle de chef des armées. Quoi qu'il arrive, cette rencontre devait réussir.

La confiance, il l'avait sur la scène intérieure. Il avait une vision pour le Royaume de Teyla, bien qu'il se garde de dire que cette vision diverge selon les besoins électoraux. Quant à Pierre Lore, le protecteur de la Couronne et de la Famille Royale, une situation connue publiquement, il avait les mains jointes mais derrière son dos, comme pour défier la posture de chef du gouvernement en voulant imposer une posture bien plus charismatique. Bien que cela pouvait donner cette impression, ce n'était qu'une impression. Pierre Lore se sentait tout simplement à l'aise dans cette situation, alors qu'il haussa un sourcil en voyant l'avion de la délégation étrangère se poser sur la piste. Il projetait sa peur de l'avion sur l'avion étranger, mais fort heureusement tout se passa bien.

Les deux hommes attendaient passivement au bout d'un long couloir formé par deux lignes de gardes royaux. Les gardes royaux, avec leurs mains gantées de blanc, avaient mis leur sabre devant leur visage, annonçant l'arrivée prochaine d'une délégation étrangère sur le sol teylais.
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Le vol avait été calme, et l'avion clovanien amorçait doucement sa descente en direction de la capitale teylaise. Confortablement assis sur son siège, le Ministre Impérial des Affaires Étrangères, Gaspard Razoumikhine, feuilletait le journal qu'il avait rechigné de consulter pendant le voyage. Pour la première fois depuis longtemps, il allait rencontrer les représentants d'un gouvernement étranger sans la présence de l'Empereur. Du haut de sa longue carrière diplomatique, il avait vu se conclure sous son regard et sa silencieuse égide les alliances qui avaient façonné le destin de la Clovanie ces dernières années. L'un de ces grands événements avait été le pacte contracté avec la Loduarie communiste, événement au cours duquel Razoumikhine avait brillé en apaisant de graves tensions frontalières qui inquiétaient sérieusement le peuple de Clovanie. Mais il ne lui avait que très rarement été confiée la direction d'une mission diplomatique solitaire. Il n'était entouré que d'éminents fonctionnaires de son ministère et de quelques gardes du corps distingués, mais tous ces hommes et toutes ces femmes lui étaient subordonnés.

Un gringalet aux cheveux impeccablement plaqués et à la barbe rasée de près était assoupi non loin du Ministre Impérial, la tête appuyée sur sa tablette. Razoumikhine le réveilla d'un coup de journal.

"Debout, Raymond. Nous arrivons bientôt. Je n'ai guère envie que nos hôtes vous rencontrent avec une trace rouge sur le front."

Raymond Dustel était un jeune secrétaire qui, bien que brillant et prometteur par ses facultés intellectuelles, avait la malédiction de s'endormir dans tous les véhicules qu'il empruntait.

"Vous vous rappelez bien de ce que vous devrez faire ?

- Oui, Monsieur le Ministre Impérial, rester en retrait et n'intervenir que sur votre demande.

- Bien. Surtout, ne montrez aucun signe de désaccord avec les Teylais : nous cherchons le com-pro-mis ! N'est-ce pas ? Alors, pas de grimace ni de sourire en coin, et évitez à tout prix le terrain de l'idéologie ou de la politique. Nous devons montrer aux Teylais que nous sommes contre le communisme, et donc que nous sommes avec eux, n'est-ce pas ? Les ennemis de nos ennemis, vous connaissez la chanson, n'est-ce pas Raymond ?

- Bien sûr."


Razoumikhine s'adressait à son subordonné comme s'il lui avait confié la mission de parler à sa place, alors qu'il venait de lui ordonner de ne l'ouvrir qu'en cas de nécessité première. En réalité, ses admonestations s'adressaient à lui-même.

Une légère secousse signifia au petit groupe que l'avion s'était posé sur la piste d'atterrissage. Gaspard Razoumikhine tenait à sortir en premier de l'avion et se positionna donc devant la porte en attendant le signal du pilote. Descendant l'escalier qui le menait au sol teylais, il reconnut en face de lui les deux silhouettes de messieurs Rojas et Lore, avec lequel il avait correspondu par écrit.

"Au nom de Sa Seigneurie Impériale, je suis ravi de vous rencontrer."
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Photo du Premier ministre du Royaume de Teyla, Angel Rojas, prise lors d'une conférence sur l'avenir de l'économie du Royaume de Teyla au salon "Teyla 2035" a Gèvre, en présence de nombreuses personnalités du monde économique.
Premier ministre, Angel Rojas


Le Premier ministre Angel Rojas tendit une main à Gaspard Razoumikhine à l'approche du ministre des Affaires Étrangères clovanien. C'était une première, se disait intérieurement le Premier ministre Angel Rojas. Une première parce qu'il s'agissait de la première rencontre diplomatique entre Teyla et la Clovanie sur le sol teylais dans l'histoire moderne des relations entre les deux nations. Il espérait sincèrement que cette rencontre donnerait lieu à un rapprochement entre les deux nations, qui ont, selon lui, plus d'intérêts communs que ne pourrait le laisser paraître la situation actuelle et les idéologies bien différentes des régimes. Il répondit à l'étranger sur un ton cordial :

- Votre Excellence, je suis à titre personnel tout autant ravi que vous de vous rencontrer. C'est un véritable honneur. Il est rare que nos nations se soient rencontrées durant la longue histoire de l'humanité et de nos nations. Il était temps de tordre cette bizarrerie, si vous me permettez ce mot.

- Oui, il était temps. C'est un honneur, Votre Excellence, de vous recevoir au Royaume de Teyla, dit Pierre Lore en se penchant un peu, comme s'il s'adressait à Sa Majesté Catherine III ou à tout autre monarque. Toutefois, Pierre Lore, contrairement à Angel, n'offrit pas sa main. Quelque chose pouvant être perturbant pour la délégation étrangère, qui pouvait y voir un signe d'impolitesse, mais le comportement de Pierre Lore pouvait laisser penser qu'il était mal à l'aise avec le contact humain, ironique pour un ministre des Affaires Étrangères.

Après cette brève discussion, les deux hommes d'État teylais invitèrent la délégation étrangère à monter dans le convoi. Pierre Lore, Angel Rojas et Gaspard Razoumikhine se retrouvèrent dans une même et unique voiture, un espace dans lequel les couleurs du Royaume de Teyla, un bleu royal magnifique, accompagnaient l'intérieur confortable et luxueux. La voiture, une berline noire aux lignes épurées et étudiées avec une grande minutie, incarnait l'excellence de l'ingénierie teylaise. Le groupe automobile qui l'avait conçue avait gardé une partie artisanale pour construire des voitures particulières et répondant à des besoins qui n'avaient pas une grande demande. Alors que le groupe conservait une partie importante de sa production de manière industrielle, on pouvait apercevoir rien qu'en regardant les lignes que cette voiture sortait des mains d'artisans ingénieurs et autres. Elle avait reçu l'amour de ses créateurs.

Et pour cause, le modèle "Régence Royale" était considéré comme l'un des fleurons de l'industrie automobile teylaise, un modèle fabriqué dans l'unique but de montrer que la monarchie teylaise et le Royaume de Teyla avaient retrouvé une puissance et un prestige autrefois perdus. Depuis sa sortie en deux mille huit, il en existait seulement huit exemplaires, dont sept furent vendus à la Couronne Teylaise et un fut vendu à la Résidence Faure, lieu de travail et de résidence du Premier ministre Teylais. Par ailleurs, la délégation clovanienne ne put manquer le C orné d'or qui ornait l'avant de la voiture. Un logo discret par sa taille mais chargé d'histoire et de tout un symbole. Il représentait sobrement le groupe automobile Courvoisier qui avait conçu la voiture de A à Z.

Ce nom Courvoisier n'était pas un simple nom de constructeur automobile de renom, mais bel et bien le nom de la Souveraine actuelle, Catherine III ou encore Catherine III Courvoisier, le nom de la dynastie régnant actuellement sur le Royaume de Teyla. L'histoire des Courvoisier dans l'automobile remontait au siècle dernier. La famille royale avait décidé d'investir dans l'industrie teylaise à la suite de la volonté du Parlement de réduire les crédits accordés à la famille royale. Cela devait permettre à la famille de maintenir son train de vie sans dépendre de l'État. Plusieurs branches de l'industrie ont vu s'intéresser les Courvoisier et les souverains du début du XIXᵉ siècle. L'automobile fut de très loin le domaine dans lequel les Courvoisier avaient le plus réussi, jusqu'à fournir l'armée en camions et autres matériels roulants. Dans les années soixante-dix et quatre-vingt, l'entreprise prit un tournant majeur et se dirigea vers la conception de voitures uniquement de luxe et les compétitions sportives. C'est donc tout naturellement que le groupe Courvoisier fournissait les voitures pour la monarchie royale et certaines branches du pouvoir.

Alors que la voiture glissait sur le sol jusqu'à la Résidence Faure, la voiture semblait silencieuse à l'intérieur de l'habitacle. Un sentiment qui pouvait être renforcé par le silence des personnes présentes. Manticore, la capitale qui défilait à travers les vitres de la berline noire, semblait sublimée par la teinte noire des vitres, renforçant cette sensation historique de se retrouver au cœur d'une capitale d'une nation autrefois puissante. L'architecture eurysienne se mélangeait avec les hauts immeubles vitrés ou encore avec les immeubles dont la façade faisait penser à des gratte-ciel de l'Aleucie du Nord. Depuis le boom économique sans précédent de deux mille onze, laissant dire que Catherine III était la reine de la Prospérité, la capitale entreprenait d'immenses chantiers de rénovation de ses immeubles et quartiers, avec la création d'un nouveau quartier d'affaires et d'innovation technologique. Les rénovations furent toutes terminées, laissant un sentiment de neuf dans Manticore.

Alors que la voiture s'engageait dans une avenue de la capitale, au loin on pouvait apercevoir la silhouette de la Résidence Faure. Une bâtisse imposante à l'allure futuriste. Est-ce vraiment une capitale d'une nation historique ? Les drapeaux flottants tout autour de la Résidence Faure le rappelaient, bien qu'on aurait pu en douter en regardant uniquement les lignes de la Résidence Faure. Toutefois, avant d'arriver à la Résidence Faure, le convoi imposant passa devant l'imposant immeuble en verre qui était aussi le siège de l'Organisation des Nations Démocratiques. Bien que l'architecture n'était pas futuriste, le design du bâtiment restait bien moderne vu de l'extérieur, alors qu'en face, on retrouvait un bâtiment tout à fait historique datant du XVIIIᵉ siècle. Les Teylais aimaient bien les contrastes dans l'urbanisme et cela se retrouvait partout, même à l'intérieur des bâtiments. Le siège de l'Organisation des Nations Démocratiques était sûrement le plus important symbole de la coopération internationale et sa position voulait que chaque convoi allant à la Résidence Faure passe devant.

En outre, cela n'était pas une obligation, mais depuis sa localisation, une consigne fut donnée pour que les délégations étrangères se rendant à la Résidence Faure passent devant ce symbole de coopération. Lorsque la voiture passa devant le siège de l'Organisation des Nations Démocratiques, un déclic se produisit chez le Premier ministre Angel Rojas. Son visage inexpressif se révéla dans un torrent d'émotions et d'expressions, signe que le bâtiment avait réveillé chez le Premier ministre nombre de souvenirs plus ou moins heureux. Il se pencha à la fenêtre pour suivre des yeux l'imposant bâtiment en verre. Alors qu'il ne vit plus le bâtiment, il remit son regard sur Gaspard Razoumikhine et finit par dire d'un ton nostalgique :

- Je dois avouer que ce fut une sacrée aventure, la création de l'Organisation des Nations Démocratiques. Comme vous le savez très certainement, à l'époque, je n'étais pas encore Premier ministre, c'était mon prédécesseur, Angel Rojas, avec le parti Les Royalistes. Toutefois, par chance, je crois, il n'avait pas la majorité absolue à l'Assemblée nationale. Ce qui a permis à mon parti, le Mouvement Royaliste et d'Union, de participer à la création de cette organisation. Bien évidemment, nous n'étions pas dans les réunions avec les autres nations, en tant que député, nous ne pouvons que contrôler l'action du gouvernement et ratifier les traités à l'époque, concernant la diplomatie. Mais ce fut malgré tout une sacrée aventure humaine.

- En tant que simple député à la commission des Affaires Extérieures à l'époque, je confirme les propos tenus, dit Pierre Lore sur un ton beaucoup moins nostalgique. C'est une sacrée réussite pour tous les États-membres et cela nous a protégés de la Loduarie Communiste. C'est une certitude que nous avons. Vu l'agressivité de la Loduarie Communiste, sa capacité à attaquer les nations moins fortes qu'elle, ce que nous étions à l'époque aussi bien économiquement que militairement, je ne vois pas comment nous aurions pu éviter un conflit armé avec la Loduarie Communiste, sauf si nous aurions dissous l'armée, ce qui était impensable. Nous sommes persuadés qu'ils ont tué deux Teylais qui avaient eu la mauvaise idée de traverser la frontière. Alors il aurait bien pu nous envahir franchement.

Mais dorénavant, la dynamique est favorable au Royaume de Teyla dans la région et surtout face à la Loduarie Communiste. La plupart des nations de l'Organisation des Nations Démocratiques dépassent la Loduarie Communiste militairement. Autant, nous pensons que la Loduarie Communiste sera défendue par tout le monde communiste si elle est attaquée. Mais si elle est attaquée, cela ne sera pas si sûr. De plus, les choix de l'appareil militaire loduarien ne permettent pas de satisfaire une confrontation contre Teyla. En outre, l'armée loduarienne a fait le choix de la masse concernant les véhicules terrestres. Sachant que notre frontière commune est avant tout montagneuse, cela n'est pas adapté pour combattre dans un tel terrain. L'aviation est à privilégier, ce que fait le Royaume de Teyla. De plus, la Loduarie Communiste aurait plus à gagner à privilégier l'infanterie à pied, parce que nous avons pour l'heure aucune ligne de chemin de fer, bien qu'on en construise actuellement. Mais tout cela pour dire qu'autant de véhicules sur un théâtre d'opération à l'étranger et notamment dans une zone montagneuse, cela demande énormément de logistique.

La question suivante se pose : Sommes-nous toujours la cible principale de la Loduarie Communiste ? Le Secrétaire, c'est une télé-réalité, vous savez. Suivez ses discours à la télé et vous avez ce qu'a en tête ce personnage principal de cette émission quotidienne. Fut un temps, l'Organisation des Nations Démocratiques était au cœur des discours du Secrétaire général, pour notre plus grand plaisir. Il renforçait, ainsi dire, notre image chez les démocraties, alors forcément, nous ne nous en sommes pas plaints. Mais dernièrement, la Loduarie Communiste s'inquiète de la République d'Antares. Phénomène que nous pouvons désormais apercevoir tant dans ses discours que dans les missives échangées. La livraison d'armes du complexe militaro-industriel teylais à la République d'Antares inquiète fortement la Loduarie Communiste. C'est sûrement pour cela qu'ils ont fait un contrôle d'un navire marchand antarien.

Je sais que votre nation a un pacte de non-agression avec la Loduarie Communiste. Toutefois, j'espère que nous pourrons trouver une voix et une voie commune afin d'éviter un conflit en Eurysie de l'Ouest. Cette rencontre, du point de vue teylais, est réalisée pour savoir si nous pouvons trouver une voix commune concernant l'attitude de la Loduarie Communiste vis-à-vis de la République d'Antares, une démocratie qui n'a rien demandé dans cette histoire, vous en conviendrez. Nous avons eu la certitude des Antariens qu'ils n'attaqueront pas la Loduarie. J'ai envie de les croire, maintenant il faut convaincre, contraindre peut-être, la Loduarie de ne pas attaquer Antares. Comprenez que le Royaume de Teyla ne laissera pas une telle guerre se dérouler à quelques mètres de chez nous. Que cela soit Antares ou la Loduarie qui attaque en premier.


Sur ces mots, les deux Teylais se turent, laissant un silence pesant s'installer dans la voiture luxueuse. Angel Rojas et Pierre Lore regardèrent le ministre des Affaires Étrangères clovanien en attendant une réponse, alors que la voiture allait bientôt atteindre la Résidence Faure, ce qui annonçait aux participants que la rencontre allait bientôt s'accélérer. Dehors, la ville continuait de défiler, indifférente aux tensions qui se jouaient dans cette berline noire. Les rues étaient plongées d’une lumière vive et mouvante, projetée par les gyrophares des véhicules d’escorte qui encadraient le convoi. Les faisceaux lumineux bleutés et jaunâtres donnaient un aspect particulier à la scène de l'extérieur. Le temps n'était pas suspendu, mais au contraire semblait s'accélérer alors que les motards de la Police Royale criaient des ordres aux passants et aux automobilistes.


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Gaspard Razoumikhine profitait du confort de la superbe voiture teylaise et des beaux paysages qui défilaient au travers des vitres teintées pour se replonger dans les raisons qui l'avaient conduit pour la première fois dans ce pays. Les relations de la République Impériales n'avaient pas toujours été des plus fournies, et les Clovaniens conservaient un sentiment étrange vis-à-vis de leurs voisins Teylais. À peine cinq cents kilomètres séparaient les deux territoires, et pas une fois les deux peuples n'avaient esquissé le moindre contact officiel. Les Teylais étaient cependant, tout comme le gouvernement Impérial, très actifs sur le terrain diplomatique, et on n'eût pu dire qu'il s'agissaient de deux nations fermées. Simplement, elles avaient toutes deux emprunté des chemins différents. Razoumikhine avait toutefois fait un pas vers le Royaume il y a trois ans, à l'heure où Pétroléon V prévoyait de pacifier la région par un grand pacte de non-agression. Cette tentative était restée lettre morte et avait définitivement été enterrée avec son promoteur. Mais aujourd'hui, les Teylais attendaient quelque chose de la Clovanie et avaient visiblement mis de côté leur appréhensions idéologiques à son égard pour un plus grand dessein.

Monsieur Rojas prit alors la parole. Souriant à l'évocation des frasques du chef loduarien, le Ministre Impérial des Affaires Étrangères répondit d'un ton amusé :

"Il est certain qu'on a toujours l'impression de marcher sur des œufs avec Monsieur Geraert-Wojtkowiak. Dommage que ces œufs puissent exploser et plonger l'Eurysie de l'Ouest dans les flammes. Nous avons su nous accommoder de ce voisinage tempétueux, adoucissant notre ton et sacrifiant parfois les impératifs de l'honneur et de la droiture face à ceux que la concorde exige. Dieu m'en veut certainement beaucoup d'avoir poliment répondu à celui dont le principal intérêt se trouve dans blasphème de Ses lois et de toute forme de beauté terrestre, mais je sais qu'une poignée de main, même d'un homme abhorré, peut soulager des millions d'êtres d'une inquiétude glaçante.
La Providence a voulu placer le Royaume de Teyla et la Clovanie, États glorieux et prospères aux gouvernements avisés, à quelques pas d'un régime de terreur assoiffé de crimes. Il nous faut pardonner cette bigarrure géopolitique et la considérer avec justesse, car elle nous a permis de comprendre les lois de la diplomatie. En effet, qui sait converser avec Geraert-Wojtkowiak peut s'entretenir sans problème avec n'importe qui. Nous avons su adopter un esprit prévoyant, et c'est pour cela que nous sommes réunis dans cette belle voiture, n'est-ce pas ?
Nous avons très vite été inquiétés de la tournure que prenait les rapports entre l'admirable gouvernement d'Antares et les communistes de Loduarie. Mais notre sens infaillible du dialogue nous a permis une compréhension aiguisée du problème et de ses solutions. Ainsi, nous avons pris langue avec les représentants de la République d'Antares, suivant l'appel du bon sens qui nous guidait vers cette illustre nation prise en tenaille dans les griffes du diable. Une entrevue s'est tenue à Margaux, au cours de laquelle nous avons constaté l'excellence de la civilisation antarienne ainsi que les motifs irrépressibles nous poussant à soutenir cette nation en cas de danger.


Razoumikhine marqua un silence. Les mots qu'il s'apprêtait à formuler allaient peser gros dans la discussion.

"Vous le savez, nous combattons le communisme comme le pire fléau qui n'ait jamais pu affliger cette planète. C'est ce qui a provoqué le basculement de la Loduarie dans la barbarie étatisée, et c'est encore cette abomination qui sème sang et braises au Gondo. Nous projetons nos forces les plus vives dans la bataille contre le communisme mondial et nous sommes persuadés que votre opinion - ou à défaut vos ambitions pacifiques - se retrouvent dans cette lutte. En somme, le combat que nous menons au Gondo est le même que celui que nous menons pour la paix en Eurysie, et il vous préoccupe tout autant puisque vous envoyâtes un contingent humanitaire sur le territoire de notre allié afaréen. Nous sommes liés à la Loduarie par un pacte de non-agression, mais sachez que cette disposition de fait ne survivrait pas à l'idéal de liberté qui guide nos âmes, si nous faisons front ensemble contre les ennemis du genre humain, où qu'ils se trouvent sur la planète."
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Photo du Premier ministre du Royaume de Teyla, Angel Rojas, prise lors d'une conférence sur l'avenir de l'économie du Royaume de Teyla au salon "Teyla 2035" a Gèvre, en présence de nombreuses personnalités du monde économique.
Premier ministre, Angel Rojas


C'est Pierre Lore qui répondit au Ministre Impérial des Affaires Étrangères dans un premier temps. Les nombreuses références à Dieu gênaient forcément Pierre Lore, une nation aussi laïque que Teyla jugeait fortement ce qui plaçait Dieu partout et dans n'importe quel contexte. Mais il concédait à son interlocuteur qu'on n'était pas dans n'importe quel contexte. Il lui était concevable qu'à des postes aussi hauts, les Hommes s'en remettent à Dieu pour s'assurer de la fiabilité de leurs actions. Il dut avouer que l'étranger avait une manière de bien parler. Le ton qu'employait Pierre Lore, pour répondre à son interlocuteur, était cordial :

- Oui, nos États sont prospères, notamment le vôtre qui a récemment eu un boom économique. Nous ne pouvons que vous féliciter pour cela. Mais fort heureusement, notre prospérité nous permet d'engager des moyens importants pour contrecarrer l'influence de la Loduarie Communiste et son dirigeant qui ne souhaite faire aucune concession. Le premier échange diplomatique que j'ai eu avec lui, par missive, était disons inhabituel au regard de la hauteur de nos postes. Le Secrétaire général de la Loduarie Communiste m'a carrément insulté personnellement, après lui avoir rappelé les torts de son régime et son attitude inacceptable pour le Royaume de Teyla. Tout en disant, je l'avoue, que le comportement de Lorenzo en personne affaiblit la légitimité de ce dernier en tant qu'interlocuteur fiable. Il a fait une petite crise tout en accusant le Royaume de vouloir rompre les relations, alors que nous avons certifié l'inverse. M'enfin, cela n'est qu'un comportement d'enfant auquel nous nous sommes habitués, je dois dire avec quelque peu de lassitude.

Vous avez raison, si vous êtes ici, c'est en partie pour cela, et nous aimerions vous parler d'un projet qu'entreprend le Royaume de Teyla vis-à-vis de la Loduarie Communiste afin d'avoir votre position et, pourquoi pas, que le Royaume de Teyla prenne en compte votre position.

Concernant la République d'Antares, notre position est simple et similaire à la vôtre. Nous ne tolérons aucune guerre, aucun conflit armé ni aucune pression mise aux frontières effectuée par la Loduarie Communiste envers la République. Bien que nos régimes aient des valeurs différentes, notamment au niveau de la laïcité, nous savons très bien que la République d'Antares reste un régime démocratique. En dehors de cela, aucune attaque ne serait légitime, même si Antares était un régime non démocratique.


Angel Rojas reprit le leadership de la conversation côté teylais et dit sur un ton neutre, mais pointant vers la cordialité :

- Là est l'une de nos différences, dit-il en gloussant. Nous ne sommes pas hostiles au communisme dans le monde, tant que celui-ci n'est pas impérialiste. Nous entretenons de bonnes relations avec le Grand-Kah. À ce titre, le Royaume de Teyla vous adresse ses sincères et profondes condoléances pour la perte de plusieurs avions et hommes au Gondo. Même les nations eurycommunistes, en dehors de la Loduarie bien entendu, nous ne les voyons pas comme ouvertement hostiles. Nous regardons leurs actions. Je crois que ces nations sont soumises à la Loduarie Communiste qui ne voit pas des alliés, mais des vassaux, soyons clairs. Mais nous observons si ces nations eurycommunistes souhaitent se confronter d'une manière ou d'une autre au Royaume de Teyla.

Après un geste de la main montrant son ouverture, il reprit :

Mais je dois avouer que nous nous retrouvons d'une certaine manière dans votre combat.

Alors qu'Angel Rojas arrêtait sa phrase, la voiture s'engageait dans l'allée menant à la Résidence Faure. Il s'arrêta de parler pour laisser le temps à son interlocuteur de formuler une réponse. La façade du bâtiment avait une allure futuriste, donnant un certain charme au bâtiment. Lorsque le véhicule Courvoisier s’immobilisa devant l’entrée, un majordome en tenue impeccable s’approcha, ouvrant la portière avec délicatesse et un geste lent. Deux gardes gardaient la porte d'entrée du bâtiment, faite de verre et de métal, aux allures futuristes. De l'extérieur et à travers la porte, le ministre impérial pouvait apercevoir que les Teylais aimaient le modernisme architectural, mais aussi les contrastes. Les meubles quasi futuristes, exposant des objets parfois anciens, parfois modernes, mais représentant l'avenir à leur époque, côtoyaient les fresques peintes à l'ancienne et représentant des scènes historiques, ayant fait la gloire du Royaume de Teyla.

Les deux gardes gardant la porte étaient aussi remplis de contraste. Leur uniforme impeccable, d’un bleu profond orné de dorures, évoquait la tradition et la prestance des forces armées du Royaume de Teyla. Leur long sabre, tenu fermement par des mains de guerrier, rappelait l'époque de la Renaissance. Cependant, les pistolets suspendus à leur ceinture, aux angles anguleux et aux couleurs ternes, rappelaient subtilement l'année deux mille quinze. Alors que les gardes se mirent au garde-à-vous, dans un geste brusque mais soyeux à la fois, le Premier ministre sourit aux deux hommes et entra avec l'étranger et Pierre Lore dans la Résidence Faure. Les trois hommes, indiquant en rien la position de la femme au Royaume de Teyla, tant elles étaient présentes dans les hauts postes à responsabilité politique, Manticore avait une maire, marchèrent jusqu'à atteindre le salon doré.

Contrairement à ce que son nom pouvait laisser penser, le Salon doré n'était pas une salle d'apparat, mais une pièce intime pour les Hommes et les nombreux Premiers ministres de Sa Majesté Catherine III. L’éclairage, diffusé par des panneaux LED encastrés et des bandes lumineuses intégrées aux angles de la pièce, s’adaptait automatiquement à l’ambiance souhaitée. Le plafond, quant à lui, retenait les lustres de tomber sous l'effet de la gravité. Les lustres étaient l'un des rares objets anciens de la pièce. Au centre de la pièce trônait une table basse en verre noir, sur laquelle étaient posées des boissons et de la nourriture.

Angel Rojas invita d'un geste de la main Gaspard Razoumikhine à s'asseoir sur l'un des canapés autour de la table basse. Soudainement, alors que tout le monde était installé autour de la table basse, la lumière changea de ton, passant d'un blanc sec à un bleu royal et sombre pouvant rappeler le bleu du Royaume de Teyla et de la Clovanie. Angel Rojas brisa le silence de la pièce "intime" :

- Nous avons tant à discuter, Votre Excellence. Cela sera long, mais j'en suis sûr, nous saurons trouver un temps plus calme et divertissant.

Angel Rojas regarda Pierre Lore. Ce dernier comprit que c'était à son tour :

- Quelle est la situation de la Loduarie Communiste, Votre Excellence ? Du point de vue de Teyla, elle est vraiment très compliquée, par leur faute. Mais quand on regarde avec objectivité la situation, nous ne pouvons qu'admettre que la Loduarie fait face à un encerclement de puissances étrangères hostiles à elle. En outre, elle est encerclée par le Duché de Gallouèse, la nation la moins hostile à la Loduarie, mais tout de même. La République d'Antares, seconde nation la moins hostile à la Loduarie Communiste sans doute, mais cette dernière reste résolument hostile à la Loduarie Communiste, uniquement par la faute de la Loduarie Communiste qui déteste les démocraties et donc les a menacées et contrôle leurs convois en toute illégalité. Il y a le Royaume de Teyla et la République Impériale Pétroléonienne qui sont les deux nations les plus hostiles à la Loduarie.

Si nous étions les dirigeants loduariens, nous serions très inquiets par la situation et nous verrions la situation comme un encerclement qui pourrait très mal finir. Fort heureusement, par la force militaire de nos nations combinées et l'Organisation des Nations Démocratiques, pour le Royaume de Teyla, est telle qu'une attaque loduarienne provoquerait à terme la chute de la Loduarie. Elle aurait sans doute accès à de l'aide extérieure, mais je doute qu'elle puisse atteindre la Loduarie. Nos forces aériennes et maritimes combinées empêcheraient tout cela. L'état-major doit bien émettre les mêmes observations que nous en cas de guerre. Je crois que nous pouvons exclure une situation de guerre, mais toutefois, le Secrétaire général cherchera une victoire diplomatique qu'il pourra brandir.


Il vaut mieux contrôler la victoire que la Loduarie recherche, selon notre avis. Admettons que nous sommes tous d'accord sur ce point. Quoi de mieux qu'un sommet commun entre la Loduarie, Teyla, Antares et Gallouèse ? Nous excluons la Clovanie parce qu'elle a un pacte de non-agression et que la paix est sûre entre la Loduarie et la Clovanie. Bien que nous attendions une réponse, nous avons proposé un sommet à la Loduarie communiste dont le but serait de négocier un ralentissement de la massification des armes aux frontières et peut-être figer les alliances, bien que cela ne sera jamais accepté et c'est un peu le but à vrai dire, dit-il avec malice. Le but est avant tout de montrer que le Royaume de Teyla est ouvert à toutes les options. Si la Loduarie refuse le sommet, elle montre aux yeux du monde qu'elle n'en a rien à faire de la paix et que seuls comptent les intérêts personnels des hommes en place au sein de l'administration.

Refuser le sommet serait se mettre une véritable balle dans le pied. Parce qu'en l'occurrence, elle pourra mettre tous les sujets sur la table, le but étant à terme que ce format soit répété à chaque crise régionale. De plus, la présence du Duché de Gallouèse assure aux autorités loduariennes de ne pas être en sous-nombre. Le Duché n'hésitera pas à avoir les mêmes positions que la Loduarie sur certains sujets, surtout si le Duché estime que le Royaume de Teyla est complètement subjectif ou autre. Notre question est simple, Votre Excellence, en partant du principe que chaque sujet pourra être mis sur la table, quelles sont les positions de la République Impériale Pétroléonienne sur les frontières, figer les alliances, la création d'un format pour régler les crises diplomatiques, etc ?

Il est évident que, pour le premier sommet, afin que la Loduarie soit à égalité, nous ne pouvons inviter la République Impériale Pétroléonienne et nous nous excusons par avance. Mais nous pouvons nous mettre d'accord sur des positions communes. Il est évident aussi qu'en cas de répétition du format, nous proposerons d'inviter la République Impériale Pétroléonienne.



Pierre Lore se tut, laissant planer un silence pesant. Angel Rojas relisait ses fiches avant de prendre la parole. Le sujet qu'allait évoquer Angel était forcément complexe et délicat, mais le Royaume de Teyla espérait bien amener la paix dans une région du monde lointaine des territoires du Royaume de Teyla. Angel Rojas posa doucement ses fiches sur la table en verre noir avant de se redresser dans le canapé en cuir.

- Excellence, comme nous l'avons dit, la montée du communisme au niveau mondial nous inquiète fortement. Le Grand-Kah, de jour en jour, montre son impérialisme, alors que des puissances majeures comme l'Alguarena observent pour l'instant la situation sans qu'on puisse prédire leurs actions futures. Toutefois, face à la situation, le Royaume de Teyla estime qu'il existe une fenêtre d'opportunité pour agir. Mais attention, la victoire n'est pas forcément militaire. Certes, c'est un plus pour permettre des négociations en votre faveur. Bien que la dynamique militaire ne soit pour l'instant pas favorable au camp que vous soutenez, il me semble pertinent de souligner que vous avez le soutien populaire. Enfin, pas la République Impériale Pétroléonienne au sens propre, mais la faction soutenue par votre nation.

Bien entendu, cela n'est que la vision du Royaume de Teyla, mais si nous étions à votre place, nous hésiterions entre deux options. La première est bien entendu celle de la temporisation. Contacter le Grand-Kah pour des négociations uniquement bilatérales sur le Gondo. À côté, vous contactez vos alliés de CITADELLE et vous montez une opération d'ampleur pour contre-attaquer les forces kah-tanaises, notamment au niveau aérien. Bien que nous estimions les conflits armés parfois nécessaires, nous ne sommes pas sûrs que cela soit nécessaire dans la situation actuelle.

Soit vous vous montrez ouvert à une négociation et une médiation dans un communiqué et dans un message envoyé au Grand-Kah. En outre, le soutien de la population et la présence militaire sont là actuellement et vous offrent une position qui, je le crains, ne sera pas présente longtemps pour vous offrir des avantages confortables pour négocier avec le Grand-Kah. À partir de là, trois choix s'offrent à vous selon nous. Soit vous vous montrez ouvert à une médiation faite sous l'égide de l'Organisation des Nations Démocratiques. L'organisation dont nous sommes membres a une puissance diplomatique inégalée et les membres entretiennent de très bonnes relations avec le Grand-Kah. Soit entre l'Organisation des Nations Démocratiques et l'Internationale libertaire pour s'assurer que le Grand-Kah dise oui. Mais le risque de non-objectivité de l'Internationale lors des négociations est fort, mais contrebalancé par la présence de l'Organisation des Nations Démocratiques. Soit vous vous prononcez favorablement pour une médiation menée par le Royaume de Teyla et une nation afaréenne.

De plus, si nous étions à votre place, nous aurions d'ores et déjà fortement condamné les actes d'Ateh et de l'Ouwanlida qui n'a pas la force armée pour faire quoi que ce soit dans un monde normal. La Grande République de Velsna est venue voir le Royaume en indiquant que nous pourrions arriver à calmer l'Ouwanlida, parce que le leader du pays aurait une sorte d'amour éternel pour Sa Majesté Catherine III. Outre l'aspect insultant pour Sa Majesté, nous sommes d'accord pour user de cela de la meilleure des façons afin de garantir la paix.

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Le Ministre Impérial était satisfait de trouver en la parole de Monsieur Lore un premier point de concorde au sujet de la situation loduaro-antarienne. Que le Royaume de Teyla assure son soutien en cas de menace de la République d'Antares apportait une sécurité indéniable dans la situation. Les communistes de Loduarie ne pourraient rien contre une coalition tripartite menaçant conjointement ses trois frontières. Cette assurance conférait également un poids substantiel à la proposition de sommet émanant d'Angel Rojas. Il semblait effectivement difficile pour le chef de guerre loduarien de refuser la tenue d'un tel événement, et, partant, des résolutions qui y seraient prises.

Razoumikhine tiqua intérieurement lorsque Monsieur Rojas exprima son opinion à propos du communisme et ne put s'empêcher de glisser une courte réponse.

"Vous dites ne pas haïr le communisme tant qu'il n'est pas impérialiste... Mais le communisme est par essence belliqueux, et son internationalisme lui confère des velléités expansionnistes dont nous faisons les frais chaque jour. Mais laissons là nos quelques divergences idéologiques, nous vous contredisons simplement pour l'amour du beau verbe, du dialogue et de l'échange ! Car nous sommes ici avant tout pour échanger.

Pour ce qui est de l'organisation du sommet dont vous faites mention, nous saluons très bas votre ambition et nous y voyons un moyen certain de résoudre la situation géopolitique de notre région. Vous avez parfaitement raison de ne pas nous convier pour une première édition de ce rassemblement diplomatique, et les motifs de ce choix sont tout à fait légitimes. Sa Seigneurie Impériale attacherait cependant une grande importance à sa présence lors d'une prochaine occurence. La concorde ne peut naître que des voix conjointes de tous les États de la région, et la Clovanie porte une voix singulière sur la question. Tout autant que votre admirable Royaume, elle a recherché l'établissement de la paix et contribué à ce que les douces vagues de la diplomatie viennent caresser de leur bruissement apaisant, comme lors d'une marée de fin d'après-midi, le sable de l'Eurysie de l'ouest, recouvrant progressivement les ardentes braises du communisme."


Satisfait de sa romantique figure de style, Gaspard Razoumikhine poussa un soupir en s'affaissant sur son fauteuil. Après un court instant, il se reprit. Malgré que l'ambiance intimiste du lieu dans lequel avait pris place la conversation disposait l'esprit aux envolées poétiques, l'heure était à l'évocation de sujets on ne peut plus sérieux. Après avoir engagé la question loduarienne sur un paisible chemin, il fallait maintenant répondre aux Teylais sur le sujet du Gondo, à propos duquel le Ministre Impérial avait rencontré quelque réticence chez ses interlocuteurs. Il semblait clair que le Royaume de Teyla n'avait aucune envie de tremper le petit doigt dans la fourmilière gondolaise, et que l'aide qu'ils avaient envoyée ne devait se cantonner qu'à une œuvre de charité.

"Comprenez bien que la paix et l'État de droit au Gondo est en jeu en ce moment, et que laisser ce peuple aux mains du communisme reviendrait à le plonger dans les flammes, en plus de briser la promesse que nous fîmes à la nation gondolaise en 2010. Nous pourrions nous engager dans la voie de la diplomatie à l'égard du Grand Kah, mais non sans l'appui d'une puissance telle que la vôtre capable de faire respecter les promesses qui seraient formulées. En l'état, la restitution de Cap Franc au gouvernement légitime du Gondo est une condition sine qua non d'un échange d'engagements, sans laquelle la voie militaire sera privilégiée."
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Photo du Premier ministre du Royaume de Teyla, Angel Rojas, prise lors d'une conférence sur l'avenir de l'économie du Royaume de Teyla au salon "Teyla 2035" a Gèvre, en présence de nombreuses personnalités du monde économique.
Premier ministre, Angel Rojas


Le Premier ministre sourit en voyant le ministre impérial défendre la théorie selon laquelle le communisme était par nature impérialiste. Non pas qu'il se moquait de son interlocuteur, bien au contraire, il appréciait que celui-ci entre dans le débat. Un débat qui était l'un des nombreux débats existant depuis la nuit des temps. En outre, Angel Rojas était en accord avec les propos tenus par le ministre impérial, mais cela était bien plus nuancé que cela, selon Angel Rojas.

- Oh, vous savez, nous pouvons aussi débattre. Le débat participe à grandir les Hommes et nous dissocie des animaux, j'aime à croire. En outre, je vous rejoins sur la nature impérialiste du communisme. Mais vous savez très bien que la pratique peut être différente de la théorie. Bien que l'impérialisme soit intrinsèque à toutes les nations, même pour le Royaume, que cela soit fait de manière consciente ou non, son niveau varie selon les nations. Celui de la Loduarie est élevé et l'impérialisme du Grand-Kah semble augmenter de jour en jour, ce qui est inquiétant. Si on part du constat que toute nation est impérialiste, alors on accepte jusqu'à un certain point un type d'impérialisme parce qu'il correspond à nos valeurs, parce qu'il ne met pas en danger la nation que nous gouvernons ou pour toutes autres raisons, Votre Excellence.

Angel Rojas et Pierre Lore étaient tous les deux soulagés que le ministre impérial ne prenne pas mal la non-invitation au sommet que le Royaume de Teyla tentait de construire autour de la Loduarie Communiste et des nations régionales. Le Royaume de Teyla ne voulait pas se fâcher avec une nation tout aussi hostile à la Loduarie qu'est le Royaume. Cela serait contre-productif, avait fini par dire Angel Rojas dans une réunion interministérielle.

Je suis ravi d'entendre que la non-invitation ne pose aucun problème à la République. Concernant vos potentielles inquiétudes sur les prochains sommets, nous voulons vous rassurer. Comme nous l'avons déjà signifié, le Royaume de Teyla vous invitera et n'envisagera pas une seconde édition sans la République Impériale Pétroléonienne. Le Royaume de Teyla étudie les pistes pour inviter une autre nation pour que la Loduarie ne se sente pas en minorité. Nous voyons potentiellement la Grande République de Velsna, dont le Parti Eurycommuniste est fort, mais ne gouverne pas. Tout cela reste en suspens de la réponse de la Loduarie, ne nous projetons pas trop, bien que prévoir permette une bonne diplomatie.

Angel Rojas continua à parler, alors qu'il commençait sa réponse sur le Gondo, montrant que le Royaume avait compris toute l'importance du Gondo pour la République. Du moins, c'est ce qu'il croyait. Il ne pouvait savoir s'il était dans l'erreur ou non.

Votre Excellence, nous sommes conscients que nos mots ne sont pas forcément agréables à entendre après les moyens que votre nation a engagés. Nous savons les sacrifices consentis, les décisions difficiles prises et vos attentes envers le Gondo. Mais c'est parce que nous mesurons la hauteur de vos efforts et de vos sacrifices que nous nous sommes permis d'engager le sujet, bien qu'il soit difficile. Nous ne vous demandons pas d'abandonner votre vision, vos objectifs ou encore de renier les intérêts que pourrait avoir votre nation. Cela serait malpoli. Et si vous voulez continuer votre opération militaire, nous ne vous en empêcherons pas, soyons clairs.

Mais je crois que, pour que vous parveniez à vos objectifs, la guerre n'est pas le meilleur moyen pour y parvenir dans le contexte actuel. Le soutien militaire kah-tanais est pour l'instant bien trop conséquent pour que vous puissiez y faire face tout seul. La récente perte de Cap-Franc est une perte conséquente qui est observée par toute la communauté internationale. Mais comme le Royaume l'a déjà souligné, vous êtes encore dans une bonne situation. En cas de négociation, vous aurez une influence importante et vous pourriez imposer ou refuser des demandes.

Concernant le soutien d'une nation comme celle du Royaume de Teyla, si nous vous parlons de solution diplomatique, comprenez que vous aurez tout le soutien diplomatique du Royaume de Teyla, tant que la voie diplomatique sera privilégiée. J'entends la restitution de Cap-Franc, il est vrai que cela est une bonne base, mais qu'êtes-vous prêt à concéder en échange ? Une non-militarisation de la ville par l'armée impériale, mais l'administration passe sous contrôle du gouvernement légitime gondolais ? Si vous êtes prêt à cela, c'est un bon début, il me semble.
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"Nous serions prêts à démilitariser la ville, si les communistes sont astreints à leurs engagements par une puissance coercitive suffisamment forte. Ce serait un honneur de vous voir présider des négociations entre les forces légitimes du Gondo et les forces rouges. Je pense que seule la surveillance impartiale d'une entité supérieure et extérieure au conflit peut faire en sorte qu'ils tiennent leurs promesses. J'oubliais cependant une conditions très importante sur laquelle Sa Seigneurie Impériale ne pourra transiger, à savoir la restitution de tout le matériel militaire clovanien volé par les séparatistes.

Le Ministre Impériale des Affaires Étrangères se tut quelques instant, avant de réajuster sa cravate en réorientant la conversation.

"Mais, chers messieurs, je ne suis pas ici pour faire la liste des vœux de la Clovanie, et je ne saurais davantage vous importuner en impliquant un Royaume aussi tranquille que le vôtre dans les méandres de la guerre civile gondolaise. Je transmettrai sans faute vos excellents conseils à Sa Seigneurie Impériale. Pour répondre à votre question sur les revendications de la Clovanie à propos de la Loduarie, nous soutenons de tous nos vœux la formation d'un système d'alliance rendant impossible tout éclatement de conflit dans notre région. Les frontières de la Loduarie doivent être conservées, pour le bien de chacun de nos peuples. Cependant, il est tout à fait clair qu'en cas d'agression de la part des communistes de Loduarie, nous devrons agir de concert et montrer que nous pouvons les battre sur tous les fronts. Ainsi, pour revenir sur le sujet des alliances, si alliance il doit y avoir, elle ne saurait s'établir qu'entre votre Royaume, la République d'Antares, Gallouèse et la République Impériale. Nous ne pourrions nouer un quelconque lien avec les communistes de Loduarie. Qu'en pensez-vous ?"
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Photo du Premier ministre du Royaume de Teyla, Angel Rojas, prise lors d'une conférence sur l'avenir de l'économie du Royaume de Teyla au salon "Teyla 2035" a Gèvre, en présence de nombreuses personnalités du monde économique.
Premier ministre, Angel Rojas


Le silence s’étira, pesant, presque solennel. Angel, le Premier ministre, fixait le ministre impérial avec une attention minutieuse, cherchant dans l’expression de son interlocuteur le moindre signe d’arrière-pensée. La rencontre était cruciale pour la paix et convaincre la Clovanie des bienfaits de la paix était une nécessité absolue. Pour le Gouvernement de Sa Majesté, avec la Clovanie, ce qui allait être le plus dur allait être de les convaincre que les hostilités n'allaient pas reprendre par l'armée démocratique. Cela était la même chose pour l'armée démocratique et les Kah-tanais. Le ministre impérial n'avait pas compris visiblement que le Royaume de Teyla souhaitait s'impliquer au Gondo, ce qu'Angel trouva dommage. Mais il ne lui en voulait pas, après tout le Royaume de Teyla n'avait rien à faire au Gondo, pas plus que le Grand-Kah ou encore la Clovanie.

Angel Rojas regarda Pierre Lore puis fit la moue et réfléchit pendant plusieurs secondes. Il finit enfin par dire :

- Vous savez, Votre Excellence, si nous avons parlé du sujet, c'est parce qu'il nous intéresse et que nous envisageons bien plus que la paix. Nous voyons plus loin. Si nous souhaitons la paix, c'est parce que nous estimons qu'une fois qu'elle sera établie, nous aurons le meilleur des contextes pour commencer une coopération avec la République Impériale Pétroléonienne au Gondo pour renforcer la position des démocraties libérales. Il était hésitant dans ses mots, montrant qu'il ne croyait pas vraiment que la Clovanie était une démocratie libérale.

Concernant la paix, je pense que vous avez observé que le Royaume à un plan précis et qu'il est assez organisé. Nous contacterons les différentes parties sous peu pour proposer notre vision de la paix. Si nous pouvons y contribuer, cela sera une merveilleuse nouvelle. Le fait que la Clovanie est une nation eurysienne nous légitime de fait comme un acteur pour être un médiateur et un garant de la paix, si elle vient. En outre, pour l'autorité légitime du Gondo, Angel Rojas prit bien le soin de ne donner aucun nom précis. Nous donnerons des garanties de défense en cas d'attaque extérieure et intérieure, s'ils l'acceptent bien entendu. Nous donnerons les mêmes garanties à chacune des factions qui prennent part aux combats dans la guerre civile. Nous avons plusieurs étapes en tête. La première sera d'obtenir un cessez-le-feu, la seconde de faire en sorte que toutes ces factions s'entendent pour construire un état gondolais solide et le construire ensemble.

Pierre Lore se raidit sur son siège alors que la Clovanie parla d'alliance entre des nations similaires, mais parfois bien différentes. Le fait que la Gallouèse soit nommée par le ministre impérial surprit fortement Pierre Lore, qui ne voyait pas le Duché entrer en guerre contre la Loduarie, mais peut-être les biais teylais sur la Gallouèse jouaient beaucoup. Il relisait ses notes pendant qu'Angel Rojas répondait sur la partie Gondolaise, tout en écoutant la ministre impériale. Alors qu'Angel Rojas termina sa réponse, Pierre Lore enchaîna tout de suite :

- Ainsi, c'est votre ambition ? Je vois. Le Royaume de Teyla imagine mal le Duché de Gallouèse prendre une position officiellement à ce point anti-loduarienne. Bien que nous nous soyons trompés sur notre vision du Duché de Gallouèse, nous savons pertinemment que le pays veut être perçu comme une nation neutre. De ce fait, il ne cherche pas à entrer dans le jeu des grandes alliances. Je pense que la proposition sera refusée par le Duché de Gallouèse, mais je ne veux préempter de rien, Votre Excellence. Concernant l'alliance que vous proposez, le Royaume de Teyla est dubitatif. En outre, nous avons déjà l'Organisation des Nations Démocratiques qui nous protège d'une agression de la Loduarie Communiste, mais dans une optique purement régionale, c'est une bonne proposition donc nous y resterons ouverts bien entendu. Nous attendons de voir la forme finale qui est proposée avant de nous prononcer pleinement.

De plus, le timing de cette alliance risque de crisper la Loduarie Communiste alors qu'elle n'a toujours pas répondu sur le sommet. Si cette alliance se forme avant le sommet, la Loduarie Communiste refusera sans doute l'idée d'un sommet régional pour régler nos différents diplomatiquement. Nous vous recommandons d'émettre l'idée de cette alliance publiquement après le premier sommet organisé. Ainsi, toutes les parties s'étant engagées dans un sommet, il sera difficile de ne plus y participer même en cas d'avènement d'une nouvelle alliance en terre eurysienne. De plus, après ce premier sommet, si la Loduarie Communiste refuse de figer les alliances, ce qui sera le cas, cela démontrera qu'elle a tout intérêt à prendre en compte les propositions des membres du sommet.
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Gaspard Razoumikhine écoutait ses interlocuteurs avec la plus grande attention, tâchant de retenir les positions émises par les Teylais sur les sujets gondolais et loduarien. Parler du Gondo n'était pas initialement à l'ordre du jour, mais les éventualités qui se profilaient actuellement n'étaient pas sans intéresser le Ministre Impérial. À bien y réfléchir, les arguments de Monsieur Lore sonnaient juste. La position du Grand Kah allait sans cesse en s'affermissant, et l'Armée Impériale avait tout intérêt à un figement de la situation.

"Pardonnez-moi, messieurs, si je vous formule cette invitation à brûle-pourpoint, mais il me semble que les plus fermes convictions trouvent parfois leur germe dans les plus fougueuses inspirations. Il m'apparaît présentement nécessaire d'organiser un sommet pour la paix au Gondo, dans lequel vous tiendriez une première place, c'est-à-dire une place d'arbitre. Cette rencontre avec vous a confirmé mon sentiment selon lequel un dialogue peut influencer de beaucoup le destin d'un homme. Aujourd'hui, deux nations ont discuté, et le destin du Gondo peut être sauvé. Votre appétence évidente pour la paix, rejoignant nos idéaux, nous a mené sur les chemins de l'entente. Seriez-vous prêts à faire le déplacement jusqu'au Gondo ? Ou bien le sommet doit-il se tenir sur votre terre, si fertile en décision pacificatrices ? En tout cas, nous ne saurions que trop vous remercier pour votre sollicitude.

Je suis aussi tout à fait de votre avis sur la question loduarienne. La Clovanie adoptera la conduite que vous jugez bonne pour la préservation de la concorde en Eurysie de l'Ouest, et se montre prête à intervenir en se faveur en cas de besoin."
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Photo du Premier ministre du Royaume de Teyla, Angel Rojas, prise lors d'une conférence sur l'avenir de l'économie du Royaume de Teyla au salon "Teyla 2035" a Gèvre, en présence de nombreuses personnalités du monde économique.
Premier ministre, Angel Rojas


Le Premier ministre plissa des yeux à la réponse de son interlocuteur, ne voyant pas trop pourquoi il posait une telle question. Tout d'abord, la réponse semblait évidente, mais que comptait-il gagner avec la visite du Premier ministre teylais au Gondo ? Le Royaume de Teyla pouvait peut-être avoir un prestige sur la scène internationale, mais Angel Rojas était dubitatif du prestige du Royaume en Afarée et auprès des acteurs du Gondo, outre les nations eurysiennes. L'Armée démocratique, au regard de ses alliés, devait se contre-foutre des avis de Teyla sur le Gondo. Mais soit, il se devait de se montrer conciliant pour que cette proposition de cessez-le-feu réussisse et ne soit pas un échec criant. Ce qui risquait d'être fort le cas pourtant !

Enfin, tenir le sommet au Gondo allait demander une certaine logistique et adaptation pour la délégation teylaise, mais cela n'était rien. La diplomatie teylaise était professionnelle, dont les membres et les effectifs du ministère des Affaires Étrangères étaient issus d'un cursus universitaire. Quoi qu'il arrive, Angel Rojas était content de la rencontre avec les Clovaniens. Il s'attendait à une rencontre bien plus fermée, il eut une rencontre avec un interlocuteur ouvert !

- Nous vous en remercions. Si le Royaume de Teyla peut convenir d'un pôle eurysien hors de l'Organisation des Nations Démocratiques, dans le but de se prémunir de la Loduarie Communiste, nous en serions satisfaits. Par ailleurs, si l'idée du sommet est rejetée par la Loduarie, rien n'interdit de le faire sans la Loduarie Communiste pour convenir d'une stratégie diplomatique contre la Loduarie. Redire au monde notre unité face à la Loduarie Communiste. Vous en pensez quoi ?

Enfin, concernant le Gondo et votre proposition, je n'y suis pas opposé si cela peut permettre d'obtenir un cessez-le-feu. Il est évident qu'un tel déplacement devra être préparé en amont, mais je suis prêt à me déplacer au Gondo, bien entendu. Le lieu du sommet a peu d'importance, étant donné qu'il s'agit d'un conflit afaréen, il serait normal que ce sommet se tienne au Gondo ou en Afarée dans le meilleur des cas. Nous avons à cœur de parler aux nations afaréennes en temps voulu.
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