
Simón Velázquez, Conseiller fédéral aux affaires étrangères de la Fédération d’Alguarena, se tenait là au milieu, fendant l'air issu des brises marines portées par le large.
Au département des affaires étrangères, certains stagiaires s'étaient enorgueillis de toujours railler la bévue du conseiller fédéral qui, à l'occasion d'une ouverture diplomatique avec le Saint Empire de Karty, s'était vu fauter par méconnaissance dans son propos, dénommant la nation de son homologue sous les termes de Kartvélie. Un lapsus peut-être pas révélateur mais bien dommageable pour les relations naissantes entre les deux nations, mais que le diplomate cherchait instamment à corriger. Accueil à l'arrivée à l'aéroport, interprétation des hymnes nationaux, échanges de cadeaux diplomatiques, autant de marques d'intérêts plus souvent affichées pour la rencontre officielle entre deux dirigeants sur le sol alguareno.
A noter tout de même, que les cadeaux diplomatiques souffraient d'une certaine sobriété en la présence d'un sombrero. Un sombrero de la marque Valdèz soulignerait toutefois un expert, qui n'est autre que la marque des produits issus de l'une des dernières chapelleries artisanales de l'arrondissement d'Aserjuco, dont un exemplaire de cette manufacture pouvait raisonnablement être vendu 460 pesetas alguarenas, soit 0,46 unité monétaire internationale. Une somme non négligeable pour les ménages modestes alguarenos, qui touchent en moyenne et mensuellement, près de 1 200 pesetas alguarenas, soit 1,2 unité monétaire internationale
Une démonstration de raffinement mêlée à la sobriété fonctionnelle du présent, qui devait simultanément gager de l'intérêt alguareno pour la visite kartienne, mais aussi démontrer à la population le choix mesuré des axes de dépenses liés à la diplomatie étrangère. La présidence fédérale de Mazeri Abrogara, très critiquée dans sa politique économique des trois dernières années, pour ne pas avoir su relancer la croissance économique nationale, a voulu cultiver l'image d'un gouvernement à la recherche des dépenses inutiles. Suivie de près par les médias et journalistes à un an de la présidentielle fédérale, Mazeri Abrogara et son gouvernement viennent là travailler un bilan de fin de mandat que beaucoup éplucheront dans les mois à venir avec un regard accusateur.
Mais jusqu'ici, le corps diplomatique alguareno s'était convaincu d'entretenir les bonnes notes, dirigeant la délégation kartienne vers les bâtiments des institutions officielles du pays au travers d'un convoi terrestre traversant la capitale d'Aserjuco. Une fois chacun arrivé au siège du département aux affaires étrangères, un cadre plus formel avait été donné à la rencontre diplomatique, des hôtesses venant diriger les deux officiels et leurs délégations au sein d'une salle aux vitres fumées où le vif des sujets pourrait être abordé.

Simón Velázquez
Conseiller fédéral aux affaires étrangères de la Fédération d’Alguarena.
"Kantsler Yaromir Ernaï, prenez place je vous prie et acceptez une fois encore mes plus vifs remerciements pour vous être fait la voix de l'intérêt kartien pour cet échange, sur lequel nous ne manquerons pas de capitaliser au terme de cette rencontre. Il ne vous a d'ailleurs pas échappé que le trajet depuis l'aéroport pour joindre notre département a fait un rapide détour par le quartier dans lequel nous envisagerions, avec votre entier consentement, l'ouverture de l'ambassade kartienne à Aserjuco.
Le Saint Empire de Karty, installé sur le pourtour leucytaléen, au coeur de l'Eurysie centrale, est effectivement un acteur de premier plan, qui "s'affirme de plus en plus sur la scène internationale" s'il m'est permis de vous paraphraser. Cette visibilité, dans un contexte de tensions croissantes sur le vieux continent, avec le risque d'un conflit armé dans les régions autonomes de Kresetchnie, éveille notre conscience dans la nécessité d'ouvrir des axes de coopérations avec le Saint Empire de Karty. Une coopération établie, de sorte à pérenniser le commerce international, au travers d'une autorité stable et la plus à même de pacifier la région en cas d'embrasement général.
Abritant de nombreuses et grandes sociétés, osons le terme, firmes transnationales, le Saint Empire de Karty a effectivement des atouts manifestes, également défendus par une présence côtière étendue et une souveraineté légitime sur ses eaux territoriales directes en Leucytalée. Un espace côtier important qui gage de sa nécessité, de sa capacité, à régir les principaux flux d'importations entrants et sortants d'Eurysie centrale, à l'heure où l'effondrement du bor--, du modèle pharois en mer du nord, peut faire craindre une certaine forme d'oisiveté des capitaineries de pirates hébergées là-bas. La Manche blanche, malgré une nette pacification après l'effondrement du Prodnov et du Pharois, montre encore quelques incertitudes qui, à n'en pas douter, profiteront au Saint Empire de Karty s'il parvient à pousser au pari de la route pour la mer de Leucytalée. L'intérêt aujourd'hui défendu par une rencontre telle que celle-ci, consiste d'abord à vous manifester toute la lucidité alguarena eu égard à la légitimité et la valeur ajoutée du Saint Empire de Karty pour la région..."