Posté le : 02 jui. 2025 à 11:05:54
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Pierre Lore s'enfonça un peu dans son siège à la prise de parole du Consul Stérusien. Il avait mal joué sur le coup, en étant mal compris de son interlocuteur. C'était une erreur involontaire, mais cela resta une erreur et qui pouvait remettre en cause la réussite de cette médiation, utile pour toutes les parties. Cette médiation était essentielle tout d'abord pour éviter un potentiel conflit en Aleucie entre des puissances majeures, dans lequel le Royaume de Teyla serait sans doute mêlé à travers la Fédération de Stérus. Le Royaume de Teyla était une nation qui respectait tous ses traités qu'importe le contexte et en ce sens, si la Fédération de Stérus était attaquée, alors le Royaume de Teyla répondrait à tout appel émanant des dirigeants de la Fédération de Stérus. Elle l'était pour la libre-circulation en mer et le commerce mondial. Le Royaume de Teyla devenait une nation de plus en plus exportatrice à l'étranger, conséquence d'une industrialisation à travers l'industrie de pointe et chimique réussie à bien des égards.
Elle l'était, en partie, pour la diplomatie du Royaume de Teyla et son prestige. Une médiation réussie voulait dire un prestige plus grand pour la diplomatie teylaise et la possibilité que ses propositions futures de médiations soient acceptées par les acteurs d'une autre crise. Mais pour cela, il fallait réussir cette médiation et montrer la bonne foi du Royaume de Teyla envers tous les acteurs, montrer son indépendance et sa neutralité. Pierre Lore allait devoir clarifier ses propos au Consul, ce qu'il fit sur un ton calme.
- Permettez-moi tout d'abord de vous remercier, Votre Excellence, dit Pierre Lore en répondant au Consul, pour votre franchise, même si elle est teintée d'une frustration que je peux percevoir. Je souhaite aborder immédiatement le point qui semble avoir causé le plus d'offense, à savoir la référence à la Loduarie et à Teyla. L'évocation de l'analogie historique avec la Loduarie Communiste et le Royaume de Teyla ne visait en aucun cas une comparaison morale entre la Fédération de Stérus et le régime barbare et sanguinaire de la Loduarie Communiste. Si cela avait été ma volonté, cela aurait été une insulte à votre nation, et cela n'est aucunement l'intention du Royaume de Teyla que d'insulter une nation aussi noble et honorable que la vôtre. Vous remarquerez que je n'ai jamais parlé, dans mes propos, de morale ou d'intention belliqueuse. J'ai uniquement évoqué la situation vis-à-vis d'une alliance. Comme toutes les comparaisons, elles peuvent être dures à faire, mais permettez-moi d'expliquer mon propos. En outre, je cherchais exclusivement à illustrer un contexte de dynamique d'alliance face à une nation. Nous avons observé l'évolution de la Loduarie Communiste qui pensait être face à une alliance, à savoir l'Organisation des Nations Démocratiques, qui menaçait ses intérêts vitaux, stratégiques et plus encore sa souveraineté nationale. La comparaison visait à souligner la perspective d'un État qui se sent contraint de défendre fermement ses positions face à une situation qu'il juge potentiellement déséquilibrée ou menaçante pour son intégrité ou ses alliés face à une organisation internationale qui inclut une alliance militaire.
Je ne dis pas que la faute est due à la Fédération de Stérus, comme cela était le cas de la Loduarie Communiste, ou que vos valeurs morales sont similaires. Loin de là, Votre Excellence. Nous avons vu ce qu'une situation de rivalité entre deux blocs donne concrètement auprès des populations, au sein des nations et des gouvernements. Ma volonté à travers cette comparaison était uniquement là, alerter. Faire en sorte que cette situation ne se reproduise pas entre la Fédération de Stérus et ses alliés versus l'Alliance pour la Sécurité Économique Aleucienne ou de l'Alliance pour la Sécurité Économique Aleucienne versus la Fédération de Stérus et ses alliés. Le but était d'alerter tous les acteurs ici présents sur le danger d'une telle dynamique et cela pour toutes les parties. Il n'était aucunement question de faire des comparaisons morales ou que sais-je encore, Vos Excellences.
Ceci étant clarifié, du moins je l'espère, permettez-moi de répondre sur les autres sujets. Nous prenons note que vos mots n'étaient pas des menaces envers la Grande République de Westalia et nous en sommes heureux d'une telle clarification, en espérant que toutes les parties sauront faire preuve de telle clarification si cela s'avère nécessaire à l'avenir. Je ne comprends pas cette phrase : "Si la Westalia ne fait pas de concessions". Toutes les parties ont déjà fait preuve de concessions ici. Si votre phrase vise uniquement le Golfe Alguereno, je dois exprimer ma perplexité face à une telle affirmation, non pas que votre demande soit illégitime. Mais conditionner la suite des discussions à des concessions de la Grande République de Westalia, alors qu'elle en a fait, au même titre que vous, durant ces discussions, c'est oublier les efforts entrepris tant par vous que par la Grande République de Westalia.
Pierre Lore fixa successivement les différentes délégations, alors que Sa Majesté Catherine III continuait la visite des lieux. Elle était d'une familiarité déconcertante par certains mots, ce qui pouvait être surprenant pour une Reine. Mais malgré cela, elle affichait un prestige que seule la première monarchie du monde pouvait prétendre avoir. Celui d'une nation sûre de ses forces, consciente de ses faiblesses, mais unie dans une terrible épreuve qu'était la lutte contre la Loduarie Communiste. Elle se rappelait, et cela se voyait sur son visage, les deux Teylais assassinés par la Loduarie Communiste, sans que le Royaume de Teyla ne puisse obtenir justice, faute de puissance à l'époque. Le Gouvernement de Sa Majesté avait continué, des années après, à chercher une coopération avec les autorités Loduariennes, sans réussite. Sa Majesté Catherine III, qui avait envoyé l'un de ses fils en Fédération de Stérus pour faire son service militaire, était joviale, tout le contraire de l'ambiance qui régnait dans la salle où se déroulaient les négociations, une tension qu'on pouvait sentir dans l'air.
Permettez-moi de faire une proposition sur le Golfe Alguereno qui, je l'espère, saura satisfaire toutes les parties ici présentes. En réalité, il s'agit de deux solutions prenant des chemins bien différents. Le premier chemin est que la situation actuelle reste la même, mais la Fédération de Stérus a déclaré des inquiétudes quant à sa sécurité concernant la présence de la Marine nationale de la Grande République dans le golfe. Si les deux parties signaient un traité reconnaissant le droit à l'autre partie signataire de la libre-circulation dans les eaux du Golfe, mais que dans le même temps les deux parties s'engagent à ne pas y mener d'exercices militaires en nombre important ou encore s'engagent à ne pas avoir une présence navale militaire dépassant une certaine limite qui serait fixée dans cette discussion. Si la faiblesse du dispositif est trop faible par rapport aux menaces locales, comme la piraterie, une nation neutre, mettant d'accord toutes les parties ici présentes, pourrait à terme venir renforcer le dispositif, dont le rôle serait cadré par un accord, un traité. De plus, et je souhaite insister sur ce point tant il me paraît important, les nations se refuseraient à avoir des bases militaires ou des places fortifiées militaires dans tout le pourtour du Golfe Alguereno.
La seconde solution serait, par certains aspects, plus radicale. La Grande République de Westalia a refusé le fait de ne plus avoir de présence navale militaire sur zone pour des raisons qui sont compréhensibles par toutes les parties. Ainsi, la seconde solution serait de maintenir la situation actuelle, mais en renforçant la discussion entre la Grande République, la République de Lermandie et la Fédération de Stérus quant aux positions des navires militaires, tout en respectant le secret défense des différentes législations. Ce dispositif pourrait nécessiter la création de ponts communs de communication entre les différents états-majors, mais étant donné que vous étiez tous membres d'une même organisation et alliance défensive, vous aviez eu à faire ce genre de manœuvre à l'époque, j'imagine. Ce type de collaboration, bien que ne réduisant pas la présence navale en soi, permettrait d'éviter les malentendus et d'accroître la prévisibilité des actions de chacun, un facteur essentiel pour désamorcer les tensions et construire la confiance.
Nous reprendrons les discussions sur les autres thématiques une fois que ce point précis aura trouvé un accord commun, Vos Excellences. Vous l'aurez compris, les deux propositions offrent des conceptions concernant le Golfe Alguereno bien différentes. La première vise une réduction mesurée de la présence et des activités militaires et une neutralisation progressive des zones de friction, tandis que la seconde privilégie la transparence et le dialogue opérationnel renforcé.