04/10/2015
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[RP] Le Consulat d'Azur à Gurapest - Page 2

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Amr scrute le fond des yeux de Jan, n'y lisant qu'un mélange d'angoisse et d'incertitudes. Donc tu obéis bien à quelqu'un, note l'Azuréen en lui-même. Il desserre sa poigne et relâche l'adolescent.

― Ibn Samt, que faites vous...

― Rashid, Hakim, debout.

Hakim entend son nom et passe la tête à l'intérieur de la maison. Rashid se lève péniblement. Amr prononce ses ordres dans leur langue arabe.

― Retournez au Consulat avant le lever du jour. Vous donnerez ceci au consul Ogodeyi.

Il ouvre une des poches de sa ceinture et en sort, sous la forme d'un petit cylindre de métal noir, l'enregistreur qui y était dissimulé.

― Il saura quoi faire. Allez-y vite pour ne pas attirer l'attention sur vous.

― Et vous, Ibn Samt ?

― Je m'occupe de ces deux là.

Il baissa les yeux vers l'aveugle et le garçon.

Dominul Preda, je ne vous veux aucun mal.

Il reporta à nouveau son attention sur Jan. Il y a pas que de la peur. Il y a autre chose. Les yeux du jeune Pal oscillent entre la porte de la maison et l'arme que porte Amr à la ceinture. L'agent les toise pendant que les deux autres s'affairent à remonter sur leurs chevaux, là-dehors. Le garçon est une taupe, songe-t-il. Le vieux n'a pas confiance.

― Jan, j'ai besoin que tu traduises. Tant que tu restes avec moi, il ne t'arriveras rien.

Il s'accroupit au niveau des deux Pal.

Dominul Preda, professeur, c'est une affaire très importante. S'il vous plaît, dites m'en plus sur vos travaux, à défaut de savoir comment les trouver.

La nuit est sombre et glaciale. Amr sent l'obscurité noircir jusqu'aux flammes timides de l'âtre. Il sent en lui une tension depuis que Preda s'est emporté et emmuré dans son refus, répétant le nom de ce Grand-Duc. Soudain il se sent très loin de chez lui, et entouré d'êtres suspects. Jan ne l'a pas amené là par hasard, ni pour lui rendre service. Et ce que les deux Pals se disent reste abstrait, incompréhensible. J'ai la situation sous contrôle, se dit-il en caressant l'angle froid de son pistolet semi-automatique. Ce ne serait pas la première fois. Les nerfs en alerte, les sens éveillés par l'excitation d'un danger invisible et prégnant, il songe à tout ce qu'il a fait pour le Bureau des Enquêtes, qui, malgré le parfum de bibliothèque que son nom évoque, n'hésite pas à recourir aux pires méthodes. Faire disparaître les espions et les traces, se volatiliser, c'est possible. Mais il faut d'abord obtenir des réponses. Le Calife les attend. Amr pense à toute vitesse. Coupé de la civilisation, perdu loin du consulat dans la steppe noire, peut-être n'a-t-il plus exactement le contrôle de la situation. Qu'ils coopèrent, prie-t-il. La nuit est sombre et glaciale.
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L’atmosphère s’était très rapidement tendue à l’intérieure de la maison. La défiance furieuse de Dragomir Preda venait s’ajouter à l’agitation des Azuréens et de Jan qui ne semblait rien moins vouloir qu’être là où il était. Le garçon semblait à mi-chemin entre éclater en sanglot ou se jeter sur le poignard d’Amr pour lui taillader le visage. Il se contenta seulement de le foudroyer du regard lorsqu’il lui demanda de traduire. Il se tourna vers Preda de mauvaise grâce.

― Ils insistent pour connaitre vos travaux, ils veulent savoir pourquoi on vous a crevé les yeux.

Le vieil universitaire siffla entre ses dents, comme un serpent, ou un chaton.

― Allez au diable, cracha-t-il, vous et vos manigancez à tiroirs. Ils sauront et le Grand-Duc saura, et la terre entière saura ou bien personne si vous êtes venus jusqu’ici me tuer, qu’est-ce que j’en ai à foutre au bout du compte ?? Je suis lassé de ce tissu de complot et de vous autres !

― Il va coopérer, traduisit sobrement Jan.

― J’étais archéologue, commença Preda d’un ton plus calme en se saisissant de la main d’Amr. J’ai fouillé sous la Pal et j’en ai exhumé ce que tout le monde sait qui s’y trouve : des traces de passage. Dix mille ans de civilisations qui s’entrechoquent et se mélangent dans ce couloir au milieu de tout.

― Il dit qu’il était archéologue, qu’il a fait des fouilles qu’il a trouvé des traces de plusieurs civilisations en Pal ponantaise.

― Bien sûr les faits contredisent leur fantasme d’un sang blêmien pur, leur empire transcontinentale c’est de la merde, mais qui est surpris ? Tout ça ça n’a jamais été qu’un roman pour imbéciles…

Jan paru mal à l’aise.

― Il dit que ça entre en contradiction avec ce que disent les Transblêmiens, sur le sang blême et tout… qu’on ne se serait pas mélangé avec les autres peuples.

― Le Grand-Duc m’a énucléé pour ça. Pour une banalité. Mais j'imagine que cela a suffit pour calmer tout le monde et on n’a plus fouillé derrière moi. Ce secret de polichinelle restera enfoui sous des kilos de gravats et de tourbe.

― Il dit que c’est pour ça qu’il est aveugle.

Dragomir Preda pointa du doigt en direction d’Amr, semblant s’enflammer de nouveau.

― Sklavinois hein ? Ils ont causé ma perte. Le plus grand marché au esclave de la région sous nos pieds. Des milliers de Blêmes vendus à travers le monde pendant des temps immémoriaux, abâtardis avec les populations indigènes, fondus dans trois continents si ce n’est plus. Il a belle allure leur « sang pur », la vérité est que nous sommes plus cosmopolites encore que les Fortunéens. De chacun des deux pôles, la terre est arrosée de sang blême.

― Il dit… il dit qu’on a vendu les Blêmes en esclavage, partout dans le monde, qu’il y a du sang blême sur la terre entière… mais c’est impossible…

― Toi ! (il s’adressait maintenant à Jan) Traduis lui ça : il y avait autre chose sous les marchés aux esclaves, des choses plus profondes, qui n’ont pas été excavées encore…

― Il dit qu’il y a autre chose… en dessous des fouilles…

― Le véritable secret de Blême, ce qu’Anton Puscas a cherché à faire disparaitre : les traces d’une civilisation plus ancienne encore, qui remonterait à plus de trois-mille ans avant notre ère… qui aurait pu servir de matrice à celles d’Eurysie, du Nazum et d’Afarée peut-être ? Un berceau insoupçonné de l’humanité sur le pourtour de la mer…

― Je ne comprends pas tout, s’excusa Jan, il dit qu’ils ont trouvé des choses plus anciennes qui remonteraient à moins trois-mille, que la Pal est peut-être un berceau de la civilisation autour de la mer Blême. Que c’est ça qu’Anton Puscas voulait cacher.
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