31/03/2018
23:09:30
Index du forum Continents Eurysie Messalie Récits de RP

La Grande Loterie de Messalie [jeu de piste] - Page 3

585
Raté !

Vous actionnez avec force le levier de la bobinette. Un frein lâche semble s’actionner ; les cylindres ralentissent petit à petit. Carreau, trèfle, peau de banane… les symboles vont bientôt se stabiliser…

La machine s’immobilise : carapace rouge, étoile de David, trèfle. C’est raté !

Vous venez de perdre vos 1000 points. C’est dommage ! hélas, votre jeton est épuisé ; il faut libérer la place à présent. De dépit, vous lorgnez sur le guichet, qui vient de fermer. Il ne vous reste plus qu’à rentrer à l’hôtel.

Déçu par votre échec, vous sortez sur le chemin de graviers. Vous passez à nouveau dans le patio.




Et maintenant ?

☞ Aller au comptoir prendre quelque chose à boire.
☞ Vous diriger vers les tables de poker.

850
Gagné !

Vous actionnez avec force le levier de la bobinette. Un frein lâche semble s’actionner ; les cylindres ralentissent petit à petit. Carreau, trèfle, peau de banane… les symboles vont bientôt se stabiliser…

La machine s’immobilise : carapace rouge, carapace rouge… carapace rouge ! C’est gagné !

Vous venez de gagner 10'000 points, c’est vraiment votre jour de chance ! Bravo ! Il faudra les retirer sur votre compte à la Banque Océane pour que je fasse le transfert de points.

Vous criez de joie. Un vigile s’approche de vous, baraqué et austère, avec un doigt sur la bouche pour vous dire poliment de fermer votre gueule. Vous comprenez qu’il va falloir intérioriser votre tempête émotionnelle.

Vous songez à rejouer : vous accourez au guichet. Mais celui-ci vient de fermer ! Plus possible de jouer ? Dommage. Il ne vous reste plus qu’à retourner au patio.

On vous en ouvre la porte ; à gauche se trouvent les tables de jeu, à droite le bar.




Et maintenant ?

☞ Aller au comptoir vous prendre quelque chose à boire.
☞ Vous diriger vers les tables de poker.

2843
Poker

Vous vous approchez des tables de jeux. Elles sont rondes et nappées d’un tissu de velours vert, couleur propice à la réflexion. Il y a, dans une deuxième salle aux coloris boisés plus loin, une grande roulotte, et d’autres jeux qui n’ouvriront qu’à la soirée ; pour l’instant, quelques joueurs assistés d’un croupier qui déplace les mises et révèle les cartes se disputent une partie de poker.

Vous vous approchez de celle où le jeu semble le plus intéressant ; il attire quelques spectateurs, debout derrière les joueurs, silencieux et savourant, d’un chuchotement, leur avis sur la tournure de la partie. Mais les véritables maîtres sont assis, parfois en train de fumer. Des tas de jetons représentent leurs gains. À intervalles réguliers, ils poussent devant eux une nouvelle mise, ou se retirent du jeu en rabattant leurs cartes sur la nappe. Tous les cinq tours, les cartes sont révélées, et le gagnant empoche l’ensemble des mises tandis que les spectateurs frémissent légèrement. Le poker est un jeu de patience et d’audace, dans le calme feutré des cartes.

— Fold.

Quatre joueurs s’affrontent ; une femme et trois hommes. La femme a les cheveux recouverts d’un fichu, et porte des lunettes de soleil. C’est elle qui vient de renoncer à sa première mise, c’est-à-dire qu’elle « se couche » ; un jeu de mot vaseux passe comme une blague fugace dans quelques esprits autour de la table.

Celui qui joue après elle est un homme à la peau très brune, aux cheveux noirs coupés courts, rasé de frais, dans un complet noir que dénote une simple broderie, comme une décoration sobre, d’un profond rouge communaliste. Il avance trois jetons dont le disque nacré chatoie à la lumière du jour. Ce sont de grosses pièces de plomb coloré qui valent une grande masse d’argent. Le joueur suivant est sous pression de suivre ou se défausser.

C’est un homme en chemise bleue et jaune, plus épais que le précédent, qui impénétrable scrute le jeu derrière ses lunettes noires. Son cigare reposé au cendrier diffuse un parfum écœurant de bon tabac alguarenais. Il ne semble aucunement perturbé par la grosse mise du Kah-Tanais ; il avance, en lieu des trois jetons verts, un jeton noir d’une valeur 25 % supérieure au total. La pression monte.

Après la mise de l’Alguarenais, un dernier joueur doit jouer. C’est un Velsnien assez volubile, qui émet autour de la table des remarques qui amusent les spectateurs. En polo blanc et casquette rouge, il doit cependant se rendre à l’évidence ; sa main ne tolère pas de suivre à un tel niveau de mise. Il fait flop, et défausse ses cartes sur le board.

C’est fini pour la Fortunéenne et le Veslnien qui soudain se mettent à converser d’une voix rapide sur le jeu. Sombres comme s’ils allaient s’entretuer, le Kah-Tanais et l’Alguarenais révèlent leurs cartes. Avec les cinq cartes révélées du board, le premier aligne un brelan de rois et une paire de huit, ce qui forme un full. Mais le second révèle à son tour ses cartes, et annonce un carré de huit. Le carré l’emporte sur le full : l’Alguarenais rafle la mise.

Le Kah-Tanais se lève pour aller fumer. Sa nervosité indique aux spectateurs que l’heure, pourtant si propice, est malvenue pour faire des analogies géopolitiques avec la partie qui vient de se dérouler. Finalement, le croupier vous interroge du regard.




— Excellence, désirez-vous jouer ?

☞ Oui : payer 1000 points pour convertir votre argent en jetons et rejoindre la partie (fictif, la loterie c'est fini).
☞ Non : retourner vers le patio.

1120
La mission

— C’est d’accord, déclarez-vous.

Elle se réjouit en souriant à travers la fumée de cigarette.

— Vous êtes adorable. Mon ami s’appelle Marcel Experto. Vous devriez le repérer sans mal, il est très grand, avec une barbe blanche, et un air… sympathique. Il sera présent ce soir au Domaine Sainte-Fortune. Vous le connaissez peut-être déjà ?

Sans vous préoccuper de votre réponse à cette question rhétorique, elle prend son sac à main, en sort un chéquier, dont elle règle un billet qu’elle signe d’une main ferme ; elle dépose le paiement sur le comptoir, tout en enfilant l’anse de son sac par-dessus son épaule. Elle s’apprête à partir.

— Merci beaucoup, meine Liebe, déclare-t-elle en se levant.

Elle se rapproche de vous et dépose sur votre joue un baiser sec.

— Je file.

Et elle file. Vous restez là, assis sur le comptoir, en finissant votre verre ; elle s’éloigne. Elle vous lance, depuis l’entrée de la salle, une dernière déclaration qui attire l’attention des autres clients :

— Vous devriez y aller aussi, l’heure tourne !

Vous saisissez l’enveloppe kraft qu’elle a laissé ; un espèce de tissu pèse à l'intérieur, comme une sorte de petit chiffon, de chaussette ou de sous-vêtement. Vous fourrez l’enveloppe dans votre poche gauche.




Et maintenant ?

☞ Quitter l'Hôtel Nérème et vous mettre en route pour le Domaine Sainte-Fortune.
☞ Aller voir du côté des salles de jeux.

759
Pas de poker

Vous avez bien observé la partie précédente et vous avez jugé que ce n’était pas la peine de vous y joindre. Les joueurs ont l’air trop redoutables, ou bien c’est vous qui êtes timo(u)ré, ou encore c’est parce que vous détestez les jeux d’argent : quoi qu’il en soit, vous n’aurez pas tenté votre chance. Vous êtes une personne prudente, mais un piètre disciple de la Fortune !

Vous tournez le dos à la salle de jeux et vous dirigez à nouveau vers le patio. Pendant que vous lorgniez du côté du poker, la salle s’est dégarnie ; il n’y restent que quelques clients sans histoire. Vous n’avez plus rien à faire ici ; le moment est venu de quitter l’hôtel. Vous vous dirigez alors vers la sortie ; un flot de voitures passe devant l’entrée de l’établissement, et dans un taxi noir, vous reconnaissez votre accompagnateur Benjamin. Vous montez dans sa voiture.




Où on va Benjamin ?

☞ — Je vous amène au Domaine Sainte-Fortune, Excellence.

2234
Début de partie

— Prenez place, Excellence.

Le croupier vous montre, d’une paume ouverte recouverte d’un fin gant blanc, un fauteuil qu’un de ses assistants tire pour vous. On vous débarrasse de tout effet encombrant et, en échange d’une discrète transaction au guichet, l’on vous remet des jetons scintillants. Ces petits disques de plomb nacré en gris, bleu, vert, rouge, noir, sont une monnaie fictive, interne au jeu de poker ; en quittant la table, vous emporterez les jetons qu’il vous reste, et les échangerez contre de l’argent frais au guichet à la sortie. On a coutume de dire à Messalie que un jeton gris (le plus faible, l’unité de base) vaut 1 chèque carnavalais.

Vous vous asseyez sur la cinquième chaise de la table. D’un signe de la tête, vos compétiteurs vous adressent un salut discret ; la Fortunéenne, avec son fichu et ses lunettes de soleil, le Velsnien, en polo blanc et casquette rouge, le Kah-Tanais, en complet noir et rasé de frais, et l’Alguarenais en chemise bleu et jaune dissimulé derrière une paire de lunettes noires, qui est assis devant un beau tas de jeton.

Le croupier distribue les cartes. Ses gestes fins et précis révèlent une maîtrise absolue de ses dix doigts ; entre ses mains les cartes semblent animées par leur volonté propre. Vous vous emparez de votre main ; deux cartes. Complétées avec d’éventuelles cartes du board central, elles formeront une combinaison ; vous remporterez la partie si votre combinaison est plus forte que celle des autres joueurs, du moins ceux qui sont restés en jeu après les trois tours de mise… Jouer au poker, c’est parier en permanence, et deviner la détermination des autres joueurs à vous suivre sur des paris audacieux.

Vos deux cartes pour cette première manche sont le trois de trèfle et le trois de cœur. Vous avez entre les mains une paire de trois. La paire, c’est déjà une combinaison ; la plus petite d’entre elles. Ce n’est pas une mauvaise main en soit ; ce n’est pas la meilleure non plus. Tout dépendra de votre capacité à faire fuir les joueurs avant la fin de la partie ; s’ils se découragent et se défaussent, vous gagnerez. S’ils soutiennent votre rythme jusqu’au bout, ce sera à celui qui a la meilleure main. Et plus il y aura de joueurs à tenter leur chance, plus gros sera le magot du gagnant à la fin.

Le jeu commence ; par chance, vous êtes le dernier à jouer. L’Alguarenais pose déjà l’ambiance en mettant la mise de départ à un jeton vert ; la Fortunéenne suit, ainsi que le Velsnien ; le Kah-Tanais monte la mise à deux jetons verts, et tout le monde suit en rajoutant un jeton.




A vous de décider : allez-vous faire défaut et abandonner cette manche, ou bien suivre et chercher à gagner ?

☞ Faire flop et attendre la manche suivante.
☞ Suivre sur deux jetons verts.

1599
Suivre la mise

Vous suivez la mise ; ça sera donc deux jetons verts pour continuer la partie. Le croupier récupère votre mise et la place dans un tas ; vous ne récupérerez ce magot que si vous remportez la manche. D’ici là, le jeu continue.

Le croupier révèle les trois premières cartes du board, ce tableau commun avec lequel vous pourrez faire vos combinaisons. Il en sort une dame de pique, un dix de cœur, et un trois de carreau.

Si vous étiez un joueur expert au poker, vous calculeriez les probabilités que l’un des autres joueurs ait dans sa main de quoi préparer une suite royale, ou quinte flush, avec le dix et la dame, par exemple avec un valet, un roi et un as. C’est la meilleure combinaison ; si quelqu’un la réalise, il vous écrasera. Cependant, rien n’est sûr à ce stade : le comportement de vos adversaires va donner des indications sur leur positionnement vis-à-vis de cette nouvelle donne.

L’Alguarenais pose à nouveau deux jetons verts ; il garde la mise équivalente. C’est une façon de jouer qui semble dire « ni oui, ni non » ; peut-être cache-t-il son jeu, et se prépare-t-il à vous manger tout cru ; mais derrière ses lunettes noires, impossible de dire ce que ses yeux expriment. Le Kah-Tanais double la mise en posant un jeton noir devant lui ; cela vaut le double. L’Alguarenais est sous pression. La Fortunéenne suit le Kah-Tanais avec un jeton noir ; le Velsnien, lui, se retire du jeu ; il défausse ses cartes, renonçant à gagner cette manche. Il ne sera plus de la partie à partir de maintenant.

Pendant que l’Alguarenais hésite à se hisser au niveau du jeton noir, c’est à votre tour de jouer. Pour rappel, vous avez dans votre main une paire de trois ; et un troisième trois s’est révélé dans le board, ce qui indique que vous disposez déjà de trois cartes identiques : un brelan. Une combinaison assez forte. Vos chances de l’emporter demeurent minces, mais pas nulles.




Et maintenant ?

☞ Faire flop et quitter jusqu'à la manche suivante.
☞ Suivre sur un jeton noir.

2962
Suivre encore la mise !

Vous posez votre jeton noir devant vous, assumant de suivre jusqu’au bout. C’est un choix courageux : vos cartes sont pourtant assez faibles. Le croupier glane votre mise et celle de vos compétiteurs avec un petit balais en bois ; les jetons s’agglutinent en un magot alléchant. Qui le remportera ?

Le croupier révèle une carte, qu’il adjoint aux trois déjà révélées sur le board ; c’est un deux de pique. Au total, il se trouve donc sur le board un deux de pique, un trois de carreau, un dix de cœur, et une dame de pique. Rien qui ne permette plus de faire une suite ; cela va se « jouer au couteau », c’est-à-dire que les combinaisons qui s’affronteront vont être toutes assez faibles.

Vos chances de remporter la partie viennent de bondir. Vous vous préparez à intervenir. Quand l’Alguarenais fait défaut, le Kah-Tanais place un nouveau jeton noir devant lui : la Fortunéenne également, et vous suivez aussi, soucieux de remporter cette partie à la loyale. Avec une paire de trois dans votre main, et le trois qui se trouve au centre, vous disposez déjà d’un brelan, de quoi leur mettre une branlée.

Après avoir récupéré vos mises, le croupier révèle la cinquième carte du board.

C’est un trois de pique ! Victoire ! Vous avez le carré de trois ! C’est assurément la plus forte combinaison possible dans cette situation. L’Alguarenais semble hésiter ; la Fortunéenne se retire. L’Alguarenais finit par se retirer aussi. Victoire par K.O. ! Tous vos adversaires ont renoncé à l’emporter ; ils ont dû sentir votre excitation, et cela leur a indiqué la force de votre jeu.

C’est une victoire douce-amère ; tandis que le croupier vous confie le magot aux jetons scintillants, les spectateurs songent que votre impatience a dû se voir. Si vous aviez été plus impassible, les deux autres compétiteurs auraient pu se sentir plus en confiance, et miser encore davantage. Cela aurait accru vos gains.

— Vous avez bien joué.

C’est un vieil homme derrière vous qui vient de vous le murmurer à l’oreille ; son accent, sa peau tannée lui donnent des origines orientales. Churaynn, ou Banairais, peut-être ? Il semble être un joueur expert. Ses yeux pétillent comme des flammes derrière son nez imposant.

— Je vous ai observé, continue-t-il. Vous ne vous êtes pas laissé impressionner. Ni par l’Alguarenais, là-bas ; ni par la Fortunéenne, ici. Ni par les autres. Vous les avez fait monter petit à petit, et puis à la fin, paf ! Vous les avez eu. Ça vous fait une belle victoire !

Il vous sourit, puis semble vouloir s’éloigner.

— Je vous laisse, je dois y aller. Mais je vous incite à continuer. Je les ai bien regardés, les autres joueurs : ils vous sous-estiment. Impressionnez-les. C’est ça qui va marcher. Déstabilisez-les ! Bonne chance !

Et il s’en va, vous laissant à vos réflexions. Les jetons sont amoncelés devant vos yeux. C’est ça, le poker : un jeu de dupes permanentes. Comprendre la psychologie de l’adversaire est plus important que connaître la valeur des cartes. Vous songez que la géopolitique y ressemble beaucoup. Regardez-les : l’Alguarenais et le Kah-Tanais vont continuer à se disputer la première place ; la Fortunéenne et le Velsnien, tout en commentant le jeu, attendent leur heure pour tirer leur épingle du jeu. Et bien d’autres joueurs espèrent avoir un jour une place au soleil.

Vous avez désormais le choix ; continuer à jouer avec votre magot, au risque de le perdre, mais aussi de gagner plus ; ou bien tout retirer maintenant, en quittant la partie.




Partir avec quelque chose, ou rester pour gagner plus ?

☞ Quitter la partie et repartir avec vos gains (8000 points) (ben non car la loterie cest fini).
☞ Rester pour la partie suivante.

735
La deuxième partie

Vous regardez la manche finir d’être jouée, et se terminer alors. Après quelques instants de décontraction, où l’on sert des boissons, le croupier rappelle les joueurs à l’ordre ; nous allons commencer la prochaine manche. Il agite et distribue les cartes. Vous lui signifiez votre intention de jouer, ce qu’il approuve d’un hochement de tête. Deux cartes sont données à chaque joueur pour cette nouvelle manche. Vous vous emparez des vôtres ; vous avez un deux de trèfle et un sept de pique.

C’est un jeu piètre. Vos cartes sont faibles, et ne vous permettent pas d’espérer faire une suite. Vos chances semblent compromises.

Le croupier vous appelle en premier pour la blinde de départ. Vous devez dire avant les autres à combien vous fixez le jeu.




Question

☞ Jouer prudemment en misant une petite blinde : miser un jeton bleu.
☞ Jouer agressivement et bluffer : miser un jeton noir !

1536
Le jeton bleu

Vous poussez timidement un petit jeton bleu devant vous, signe de votre incertitude pour la suite. Mauvaise idée : les autres joueurs décèlent immédiatement votre fragilité, et ne vous feront pas de quartier. Le Velsnien, qui joue après vous, pose un jeton noir ; le Kah-Tanais, deux jetons noirs, que suit l’Alguarenais ; la Fortunéenne fait tapis. Faire tapis, ou all-in, signifie miser tous ses jetons. En général, face à un joueur qui fait tapis, on se défausse, ou on fait tapis aussi. C’est que la partie va bientôt finir.

En désespoir de cause, que vous vous défaussiez ou que vous fassiez tapis, la manche est perdue ; il ne vous reste qu’à abattre rageusement vos cartes. Vous faites flop. Si vous n'avez rien gagné précédemment, vous ne gagnerez rien de plus à cette deuxième partie. Pire, si vous avez gagné quelque chose précédemment, vous perdez les jetons perdus lors de cette deuxième partie, soit une perte de 3000 points sur vos gains ! Pendant que les quatre comparses se mettent à se disputer la victoire avec frénésie, vous vous écartez, écoeuré, de la table de jeu ; vous ne gagnerez pas davantage. Le jeu, qui vous avait absorbé, vous rejette. Vous vous sentez trahi par lui, trahi par le sort ; c’est cela, la roue de la Fortune. Elle vient, et repart. Allez donc vous allumer une cigarette par là-bas, cela vous détendra.

Vous consultez votre montre ; c’est bien l’heure d’y aller si vous voulez être ponctuel pour la soirée de tirage de la Grande Loterie de Messalie ce soir.

Vous vous dépêchez de sortir de l’Hôtel Nérème ; après le couloir, le comptoir de l’accueil, et la lourde porte rotative de l’entrée principale, vous vous retrouvez dehors ; un taxi noir ralentit à votre hauteur ; le conducteur n’est autre que Benjamin, votre accompagnateur.

— Montez, Excellence ! Je vous amène au Domaine Sainte-Fortune.




Et maintenant ?

☞ Continuer votre aventure.

2686
Le jeton noir

Vous décidez de jouer agressivement en posant un jeton noir devant vous. Vous guettez alors la réaction des quatre autres joueurs ; ceux-ci semblent s’énerver comme des chevaux au box. L’Alguarenais hausse le ton à deux jetons noir, et tout le monde suit. Le moment est venu de les impressionner, songez-vous.

Vous pratiquez alors un all-in stupéfiant ; vous poussez tous vos jetons devant vous, en faisant tapis. Faire tapis, cela veut dire placer tous ses jetons dans la mise ; c’est une façon de tester vos adversaires. En général, face à un tapis, soit on se couche, soit on fait tapis. C’est ce que fait le Velsnien, qui joue après-vous, et qui pousse son tas de jeton devant lui. Le Kah-Tanais lui emboîte le pas, suivi de l’Alguarenais et de la Fortunéenne.

Le croupier demeure impassible malgré l’intensité de la partie ; la tension monte en vous. Avec un sept et un neuf, c’est une idée absurde de faire tapis ! Le maître du jeu retourne petit à petit les cartes du board. Se révèle alors quelque chose de stupéfiant : un dix, un valet, une dame, un roi, un as : une quinte flush ! La quinte flush se trouve dans le board !

Qu’est-ce que cela signifie ? Cela signifie que tout le monde est désormais à égalité : la seule chose qui va départager les joueurs sont leurs deux cartes dans leur main (en vrai ça se passe pas comme ça mais tant pis c'est moi qui décide maintenant). C’est à celui qui aura la plus forte paire, ou la plus haute carte !

Vous abattez vos cartes : deux et sept. Vous êtes sûr de perdre, pensez-vous. Le Velsnien montre les siennes : trois et quatre. Le Kah-Tanais : quatre et cinq. L’Alguarenais : deux et six. La Fortunéenne : cinq et six.

Mince alors. Votre neuf est la carte la plus haute ! Vous venez de remporter la partie !

Le croupier pousse vers vous tous les jetons gagés : cela fait une fortune ! Vous venez de remporter une fortune avec une simple carte, un simple sept !

Sept, le chiffre de la chance ! C’est lui qui vous a sauvé. Au croupier, vous demandez si vous pouvez garder la carte de ce sept de pique qui vous regarde, impassible, mystérieux, et puissant. Le jeune homme, qui trouve votre requête étrange, vous dit que oui.

Vous allez, guilleret, encaissez vos gains au guichet. La jeune femme à lunettes derrière la verrière reste tout à fait imperturbable malgré le grand nombre de jetons que vous présentez sur sa table, sous l’œil mauvais de vos quatre compétiteurs qui vous regardent avec haine. Elle les replace, par des gestes très vifs et très sûrs qui témoignent d’un grand professionnalisme, dans des boîtes adaptées. En échange, elle vous glisse un reçu, qu’elle tamponne à l’emblème des Casinos Nérème.

— Votre virement sera fait aujourd’hui, Excellence.

Vous la remerciez et quittez la salle de jeu, votre reçu fourré dans la poche gauche. Vous traversez le patio, le couloir, arrivez à l’accueil ; un portier ouvre pour vous la grande porte rotative. Vous arrivez à l’extérieur. Il est temps de vous rendre à Sainte-Fortune, songez-vous, pour le tirage du loto ; aujourd’hui, c’est votre jour de chance.

Tandis que la voiture noire que conduit votre accompagnateur Benjamin glisse le long du trottoir pour que vous y montiez, vous serrez entre vos doigts ce petit bout de papier, qui vous confirme votre gain net de 16'000 points.




Et maintenant ?

☞ Continuer votre aventure.

3421
L'aérodrome

— Je vais attendre l’hélicoptère, déclarez-vous.

Le jeune homme en sueur, dans sa veste trop grande, s’arrête et une expression de dépit passe sur son visage. Il est venu jusqu’à vous pour rien. Vous constatez qu’il s’apprête à insister pour que vous veniez avec lui, mais le sergent Pomerol lui barre la route.

— T’as entendu, tu dégages de mon aérodrome.

L’autre ne se fait pas prier. Votre valise à la main, vous vous mettez le long de la piste de l’aérodrome percée de quelques nids-de-poule d’où jaillissent des herbes desséchées. Le soleil fait rougeoyer le bitume de la piste. Le sergent Pomerol revient vers vous.

— Restez pas là vous, allez vous mettre à l’ombre.

Il vous indique une salle désaffectée dans l’un des petits bâtiments vétustes du camp militaire. C’est le réfectoire des soldats ; quelques-uns d’entre eux mangent leur gamelle autour d’une table centrale. Ils tournent la tête vers vous quand vous poussez la porte vitrée « Accès réservé ». Vous expliquez que le sergent vous a dit d’attendre là. Leurs crânes rasés et leurs mines méditerranéennes leur donnent l’air patibulaire. L’un d’entre eux, aux manches relevées montrant de puissants avant-bras, vous tire une chaise à leurs côtés. Vous n’avez pas d’autre choix que de vous y asseoir timidement. Les jeunes hommes vous dévisagent sans complexe.

— Vous êtes là pour la loterie ?

Vous acquiescez. Celui qui est devant vous, la cuillère suspendue à une phrase qui ne vient pas, se contente de hocher la tête, le regard vide. Un autre s’adresse alors à vous avec plus d’enthousiasme.

— Vous avez inscrit quoi dans le Chien de votre carton ?

Vous comprenez que le jeune homme à la boule à zéro fait référence à la huitième case des cartons de loterie messaliote, celle qui est tirée à part. Vous répondez votre chiffre. Les autres vous répliquent alors immédiatement :

— Il faut vraiment mettre le 7.

— C’est le 7 qu’il faut mettre dans le Chien.

— Le 7 c’est le chiffre du Saint-Esprit.

La plupart d’entre eux se signent immédiatement ; vous comprenez que vous êtes face à de fervents catholiques. Le jeune soldat curieux continue sur sa lancée :

— Et vous allez à la soirée de loterie du coup ?

Vous répondez que oui. Le grand face à vous se départ de son air taciturne pour dire :

— Ah ben c’est du joli.

Le petit curieux lui répond du tac au tac que faut pas dire ça, ce que le grand tacle d’un c’est tout vu ça s’appelle de la trahison nationale. Un troisième éclate de rire en lui disant qu’il ne sait même pas ce qu’il dit. Le petit revient à vous.

— Vous savez que c’est pas super populaire cette histoire de loterie.

— C’est une idée de ces enfoirés de réformateurs.

— Ils veulent vendre le pays.

— Donner les clés aux étrangers.

— Aux homosexuels.

— Aux musulmans.

— Tomarels et ses potes, résume le grand en touillant sa gamelle.

Vous faites un sourire forcé en attendant que l’heure passe. Il est 11h52 à l’horloge électronique du réfectoire quand vous entendez un bourdonnement sourd qui semble provenir du ciel. Vous vous redressez.

— Votre hélico est là on dirait !

En vous levant, vous faites face au jeune soldat, qui vous fait un sourire radieux.

— Bon, c’était un plaisir, hein !

Ça reste entre nous, comprenez-vous de leurs regards qu’à présent vous constatez empreints d’une certaine fragilité. L’un d’entre eux, dont une grosse croix pattée tatouée sur l’avant-bras dépasse de l’uniforme, vous regarde tristement. Vous comprendrez peut-être la signification de ce symbole ultra-catholique plus tard ; en tous cas vous savez que ces garçons qui n’ont pas vingt-cinq ans espèrent que vous ne répéterez pas en haut lieu les propos équivoques qui ont jailli de leurs bouches.

Vous fermez la porte sur leurs inquiétudes pour venir à la piste de l’aérodrome balayée de puissantes rafales de vent. Ce sont les pales de l’hélicoptère qui est là devant vos yeux comme une grande cigale noire. Vous avancez, votre valise roulant derrière-vous. Le pilote ouvre la porte de l’habitacle et vous tend une main franche pour vous aider à monter. Derrière ses lunettes noires vous ne voyez pas ses yeux, mais son visage se fend d’un grand sourire :

— Bienvenue à Messalie, Excellence !




Allons-y.

☞ Monter dans l'hélicoptère.

3111
En hélicoptère

Vous vous hissez dans l’hélicoptère. À bord, le pilote reprend les manettes de sa machine après avoir claqué la portière sphérique de l’habitacle, et vous avoir installé dans le siège passager. C’est vraiment comme une sorte de petite voiture volante, en fait assez confortable ; un casque, qui pèse sur vos oreilles et porte à votre bouche l’embout feutré d’un micro, vous isole des battements assourdissants des pales dans l’air et vous permet de communiquer avec Dimitri.

— Vous avez fait bon voyage ?

Vous lui répondez quelque chose ; le regard absenté par des lunettes noires de pilotage, Dimitri hisse l’hélicoptère à cent mètres au-dessus du sol. Vous voyez défiler sous vos yeux l’aérodrome, les pinèdes environnantes, les faubourgs ; les maisons deviennent de petites maquettes, les voitures des jouets, la ville enfin un tableau de citybuilder pour adolescent.

— Désolé pour le retard, hein !

Ses lèvres bougent mais le son de sa voix vous parvient légèrement parasité par les tympans du casque.

— Tout le monde attendait votre avion à l’aéroport principal, mais les contrôleurs ont sorti le brassard rouge…

Le brassard de gréviste.

— Une grève surprise… on vous a redirigé vers l’aérodrome du Phamos, on m’a expliqué. Le temps que je vous rejoigne… ça va, vous avez pas trop attendu j’espère ?

Vous répondez rapidement sans trop détailler ce que vous avez pensé des soldats qui vous ont accueilli. L’hélicoptère, légèrement incliné vers l’avant, vous transporte dans les cieux. Vous passez au-dessus de la plage des Hellènes, de l’Hôtel Nérème à la toiture cuivrée de la Belle époque ; au-dessus des quartiers anciens de Messalie, aux ruelles étroites et aux toits de tuile orange ; de la colline de l’église Notre-Dame-de-Sauvegarde, dont la silhouette fine perchée sur le mont se dérobe déjà de votre regard. Au-dessus du Port Ancien, au-dessus du Port-Neuf, des plaisanciers qui batifolent, des cargos alignés sous les grues de chargement, des grosses masses blanches de navires de croisière qui font escale dans la calanque, des parcs, des barres d’immeubles, des quartiers de villas entourées de jardin, ou de tours d’habitation vétustes et surpeuplées ; vous contemplez la ligne blanche qui sépare la côte urbaine du grand bleu de la mer. Vous survolez Messalie. Vous passez au-dessus de ses contes et de sa rumeur ; en choisissant l’hélicoptère, vous avez préféré vous abstenir d’entrer dans la cité deux fois millénaire ; vous fréquenterez la haute société bourgeoise, raffinée et parvenue, mais ne connaîtrez rien de l’esprit réel du peuple. Votre impatience m’en dit long sur vous. Mais je m’égare : votre hélicoptère arrive.

Les pales de l’appareil hachent l’air tandis que votre habitacle se stabilise dans le plan. Le monde se rapproche lentement de vous ; vous perdez lentement de l’altitude et finalement, alors que tout autour semble balayé par de fortes rafales de vent, vous sentez les patins de l’hélico toucher le bitume chaud de la piste. C’est une station peinte d’un grand H.

Dimitri éteint le moteur et retire son casque. Le tourniquet des pales ralentit imperceptiblement. Il sort une tablette numérique d’un boîtier et semble vérifier quelque chose dessus. Sans la quitter des yeux, il vous annonce :

— Avant de vous conduire au Domaine Sainte-Fortune, les organisateurs voulaient donner l’occasion de visiter l’une de nos plus belles usines aux investisseurs comme vous. Nous sommes arrivés sur le site principal d’EURYCOPTER. Vous avez deux heures de visite, après on reprend l’hélico et je vous pose au domaine pour la soirée. Des questions ? Non ? Alors, après vous.

Il ouvre la portière globuleuse de l’appareil.




Et maintenant ?

☞ Descendre de l'hélicoptère et commencer votre visite de l'usine EURYCOPTER.

3230
La nef

Vous montez quelques marches et pénétrez dans la basilique. La nef se déploie, ceinturée par des colonnes hautes et une voûte byzantine d’où vous regardent les ocres et les bleus d’une grande mosaïque. Jusqu’au chœur, des bancs s’alignent ; une grande croix en bois trône au fond. Les visiteurs s’agglutinent dans les passages latéraux, certains sont assis dans l’assistance ; plusieurs d’entre eux sont à genoux, en signe de recueillements. Des chandelles fluettes vacillent devant une statue de la Vierge, ou un oratoire dédié à Sainte-Marthe. L’atmosphère est feutrée et imprégnée d’un parfum d’encens.

Vous constatez une myriade de petits objets qui attirent votre attention. Du plafond sont suspendus, au bout de fils de pêche translucides, des maquettes de bateaux, des voiliers à un seul mât dont la quille peinte tournoie légèrement. Vous y lisez des noms amusants ou ridicules, comme Dauphin, Radis des mers, ou encore Souverain d’Akaltie. Ce sont des embarcations consacrées à Notre-Dame-de-Sauvegarde, patronne des marins et des ports, gardienne des embarcations, protectrice contre les naufrages.

Les murs des oratoires sont couverts de médaillons en céramique, qui forment comme un tableau rempli de posts-its. Ce sont des ex-voto, accumulés au fil des ans, depuis la construction de la cathédrale et peut-être même avant. Vous vous rapprochez : vous lisez. Merci d’avoir sauvé Maman. A côté : À Michel. Ailleurs : Don pour la famille Pinasse. Merci pour mon neveu. Ces ex-voto sont apportés par les fidèles qui prient la Vierge et les saints de les protéger, de leur rendre la santé, la fortune, le chemin, selon le problème qui se présentent à eux. Merci Sainte-Fortune pour mon gain au loto, lisez-vous auprès de l’hôtel dédié à la divinité païenne ramenée au rang de sainte par le catholicisme syncrétique de l’Eurysie du Sud. Merci Sainte-Rita pour ma sortie de prison. En face de la nubile Fortune prie la pieuse Rita, patronne des causes perdues.

En tournant dans la nef, vous vous imprégnez de cette religion dévote, de la piété du peuple messaliote enguirlandée de croyances et de superstitions méridionales.

— Excusez-moi s’il vous plaît.

Vous baissez les yeux vers quelqu’un tout près de vous. L’homme chauve, aux traits ridés par une vieillesse précoce, est à genoux par terre et se meut sur les rotules, mains jointes. Vous remarquez d’autres arrivants dans cette étrange posture. Ces vieux sexagénaires avancent péniblement, de façon un peu ridicule. Vous comprenez, à la poussière qui macule leurs jambes, qu’ils remontent la colline à genoux, en signe de pèlerinage dévoué.

Vous vous écartez pour laisser passer l’homme. Une oraison commence ; près de l’autel, une chanson ténue s’est lancée. Vous comprenez qu’une cérémonie de bénédiction va avoir lieu ; une ancre, apportée sur un transpalette depuis un ascenseur du presbytère, est roulée près du chœur pour recevoir la consécration. Au milieu de cette nef saturée de prières et de dévotions traditionnelles, vous vous sentez inspiré.

Finalement, le pèlerin que vous avez laissé passer s’assoit près de vous. Au-dessus de vos têtes tournent lentement les miniatures de navires. Un coin d’œil vers la statue de Sainte-Fortune vous indique que les gens s’en sont détourné ; plus personne ne s’y agglutine. Vous observez plus distinctement ; le coffre à offrandes est entrouvert. C’est pourtant là que les visiteurs déposent leurs dons pour offrir un cierge ou faire une offrande au lieu. Parfois, vous rappelez-vous de mémoire, certains déposent des sommes mirobolantes dans ce petit coffre.

Personne ne semble s’y intéresser. A côté de vous, le pèlerin, qui soupire de fatigue, regagne son souffle. Vous comprenez qu’il s’apprête à vous parler.




Que faire ?

☞ Vous lever et aller "inspecter" le coffre d'offrandes de Sainte-Fortune.
☞ Rester et écouter ce que le pèlerin s'apprête à vous dire.

4407
La crypte

Vous descendez quelques marches qui descendent dans une sorte de caveau, par un escalier enroulé sur lui-même. La pénombre règne bientôt, en contraste total de la luminosité solaire de l’extérieur ; il vous faut quelques secondes pour vous y habituer.

L’odeur est celle d’une fraîcheur ombragée de cave saine, et flotte un remugle de ciment frais, signal de travaux récents. Dans la pénombre vous voyez, comme dans la nef, des ex-votos ; mais ceux-ci sont plus gros, plus massifs, et l’écriture y est gravée à l’encre rouge. Sainte-Marie je vous prie pour ma guérison. Plus loin : Notre-Dame gardez mes enfants au Paradis. L’atmosphère y est plus sombre et quelque peu inquiète. Vous constatez un orgue à cierges où vacillent quelques flammèches, déposées par les visiteurs rares dans cette crypte. Une statue de Notre-Dame à l’enfant, éclairée par un rayon de jour, semble fantômatique, surgissant du monde divin au milieu du calme renfermé de la crypte.

— Vous cherchez quelque chose ?

Vous sursautez. La personne qui a murmuré tout près de vous est un prêtre. Ou un moine, difficile à dire. Sa face rasée vous regarde avec des yeux noirs mêlant intensité et distance. Cependant sa voix est douce.

Vous lui répondez que vous visitez la crypte de Notre-Dame-de-Sauvegarde, tout simplement.

— Oui, et vous avez raison de le faire. Ici, il y a presque deux siècles de foi et de piété, de larmes et de prières.

Il considère un instant les plaques votives où sont inscrites les doléances des fidèles envers la divinité, puis revient à vous.

— C’est là que les Messaliotes viennent trouver le salut.

Le prêtre est, vous le remarquez, habillé d’une élégante soutane noire et brodée, et il porte un calot de bonne facture. Il vous montre un panneau de bois peint, orné de couleurs vives à peine discernables dans l’obscurité ; des flammes et des loups entourent un petit agneau, auréolé en majesté, porteur d’un drapeau marqué d’une croix pattée.

— L’Agneau de Dieu enlève le Péché du Monde.

Le prêtre vous explique la signification de cette œuvre étrange, gardée dans la crypte.

— L’Agneau représente le Christ, l’animal sacrificiel qui s’est offert pour la rémission du péché de l’Humanité. Le folklore lui attribue une fonction de porte-bonheur, mais c’est avant tout le Christ lui-même qu’il représente : surtout, ne tolérez pas, comme la vulgate populaire le surnomme, qu’on le qualifie de « Chien » !

Il semble s’être légèrement emporté ; quelques secondes passent, avant qu’il ne reprenne, d’une voix modulée par la discrétion et le murmure :

— Il est béni par la colombe de l’Esprit Saint.

Vous observez l’oiseau qui descend du ciel vers le personnage.

— Sept flammes l’entourent : ce sont les dons de l’Esprit Saint. La piété, le conseil, la force, l’intelligence, la science, la sagesse, et la crainte. Ces dons, donné par Dieu aux Hommes, leur permettent de vivre et prospérer dans la voie du Seigneur. C’est pour les revivifier et les affûter en eux-mêmes que les Messaliotes viennent prier la Vierge Marie. Quelques sots ont cru bon de faire des sept dons, les sept cases du carton de loterie…

Vous faites remarquer qu’il est assez connu que les Messaliotes viennent surtout prier la Fortune pour avoir de la chance. Il semble irrité par votre référence fort peu catéchitique.

— Le culte de la Fortune est un culte païen, siffle-t-il, affectant le calme et la douceur. La seule chose qu’il y a à chercher à Notre-Dame-de-Sauvegarde, ce sont les Dons de l’Esprit-Saint et la clémence de l’Agneau.

Vous acquiescez : le moment n’est pas venu de vous lancer dans un débat philosophique avec un curé que vous ne connaissez ni des dents ni des lèvres. Après un court temps de silence, celui-ci retourne son attention vers les cierges, qu’ont allumé quelques visiteurs silencieux.

— Dans les ténèbres de notre temps, c’est la prière et l’offrande qui nous rapprochent de Dieu ; c’est là notre voie, la seule possible pour revenir à la lumière. Il n’y a aucune place pour le hasard. Il est Tout-Puissant.

Vous acquiescez à nouveau sans rien répondre. En vous intéressant à un détail d’une icône, vous sentez sur vous l’intérêt de l’homme d’Eglise. Celui-ci semble avoir apprécié votre écoute studieuse de ses propos. Il est prêt à se lancer dans un nouveau monologue.

— Des mères à la grossesse endeuillée. Des pères brisés par la déviance de leurs enfants. Des enfants éperdus par les égarements de leurs parents. Avortement, homosexualité, irréligion : notre temps est frappé de bien des fléaux. L’épreuve que nous donne Dieu le Père est difficile, mais nous en réchapperons. Mon enfant, prions ensemble pour le salut de nos âmes et notre libération des démons qui les hantent. Prions pour la croisade, pour l’Evangile, pour la conversion des cœurs et le retour de l’ordre divin sur la Terre. Prions pour notre guide, Monseigneur l’Archevêque, digne vicaire du Christ après le Pape ; que Dieu l’aide à nous guider à travers cette classe politique corrompue et cet électorat de brebis égarées. Prions, mon enfant, pour le salut de notre pays et le salut du monde ; prions pour la défaite des incroyants et la punition des hérétiques ; prions pour l’Eglise universelle et le retour du Messie, auréolé de gloire, après la conversion de toute l’Humanité. Prions !




— Mon enfant, prierez-vous avec moi ?

☞ Prier avec le prêtre.
☞ « Quoi ?? Certainement pas ! » Refuser et quitter la crypte.

Haut de page