31/03/2018
23:09:33
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La Grande Loterie de Messalie [jeu de piste] - Page 4

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L'oratoire de Sainte-Fortune

— Vous savez je…

Vous n’écoutez pas le pèlerin qui s’est assis à côté de vous : trop tard vieil homme. Vous vous levez et, l’air de rien, regardant les plaques votives, vous vous dirigez vers l’oratoire dédié à Sainte-Fortune.

S’y trouvent une statue de la sainte et un tableau qui la représente, dans un style classique, les cheveux aux vents, à demi-nue, entourée des bienfaits qu’apporte la Chance : récolte de trèfles à quatre feuilles, fruits et légumes en abondance, grosses vaches et enfants replets. Sept étoiles brillent autour de son front, sept anges comme les sept dons de l’Esprit Saint. La femme aux traits sans âge avance cependant dans un univers sombre et mouvant, que le peintre a figuré par des bourrasques orageuses entrecoupées de clairs-obscurs incertains. Pendant quelques instants, vous observez ce tableau et méditez sur sa signification.

Un coup d’œil dans votre dos vous assure que personne n’est là ; c’est l’heure creuse, le nombre de visiteur diminue, et ceux qui sont présents sont concentrés sur un office qui se déroule vers le chœur. Vous êtes a priori tranquille. Sous vos yeux, aux pieds de la statue de plâtre moins charmante que le personnage peint, se trouve la boîte des offrandes.

C’est un petit coffre noir dont le battant est entrouvert. Une simple fente permet d’y glisser chèques et billets, et, depuis quelques années et le passage à la modernité, y a été inclus un récepteur sans-contact pour les cartes bancaires. L’offrande recommandée pour un cierge est de deux drachmes, mais vous lisez l’adage qui orne l’urne : Fortune vient à qui donne bien.

Le battant entr’ouvert est désormais à portée de main. En une seconde, ce sera fait, et personne n’aura rien vu ; dehors, Benjamin vous attend, et vous serez prêt à repartir de cette église où flottent en se mêlant le passé et le présent.




Et maintenant...

☞ Voler les offrandes dans le coffre dédié à Sainte-Fortune.
☞ Repartir sans toucher au coffre.

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Non Capta O Fortuna

Vous récupérez les pièces et les billets accumulés dans le coffre. Personne ne vous a vu. Vous venez de gagner la somme de 666 points... Soyez discrets : il est désormais temps de partir sans être repéré.




Et maintenant ?

☞ Sortir de l'église.

5522
Le pèlerin

— Vous savez, je crois que je n’ai jamais vu une journée aussi chaude en automne.

Le pèlerin s’est adressé à vous. Vous lui répondez une phrase banale. Après quelques instants, il reprend, en caressant ses genoux éraflés et maculés de poussière :

— C’est les trucs que Carnavale fout dans l’atmosphère, ça dérègle le climat.

Vous méditez sur cette hypothèse. A bien y regarder, vous constatez que le vieil homme n’a pas un seul cheveu, ni un seul sourcil. Ses cils sont pâles et courts, comme repoussés de la dernière pluie. Ses yeux, d’un brun délavé qui tend au saumâtre, sont pleins d’une énergie intense et fraîche. Vous lui demandez alors si c’est bien pour le pèlerinage qu’il marche sur les genoux.

— Non, par plaisir, pourquoi ?

Il a un rire bref à sa propre plaisanterie. Puis il reprend :

— Oui, je suis un pèlerin. Notez, ce n’est pas la première fois que je le fais, ce pèlerinage : on part de la Myrte, là-bas de l’autre côté de la ville…

Il désigne une direction vague, dans son dos vers l’entrée.

— … Et puis à genoux tout du long jusqu’au sommet de la Sauvegarde, on arrive ici. On en a pour grosso modo la journée, moi je suis parti à quatre heures du matin pour éviter d’avoir à piétiner dans l’après-midi.

Il prend une gorgée de sa bouteille d’eau. Pourquoi fait-il ce pèlerinage ?

— J’ai un cancer. Le foie. Assez avancé ouais.

Il demeure silencieux. Vous restez tous les deux mutiques quelques instants, en regardant la croix de l’autel et, sur le côté, l’oratoire dédié à Sainte-Rita.

— Vous n’êtes pas d’ici, vous, je me trompe ?

Vous répondez au vieil homme la raison de votre présence à Messalie. Celui-ci écarquille les yeux en l’apprenant, comme s’il découvrait qu’il s’adressait en fait à quelqu’un de très important. Son front se ride jusqu’au sommet de son crâne le temps de cette expression fugace. Vous lui retournez la question.

— Moi ? Oh moi, vous savez… je suis d’ici et pas d’ici.

Il fait un clin d’œil.

— J’étais marin, à l’origine. Entre mes vingt et mes quarante ans. Je suis né à Theodosinos, dans la Leucytalée orientale. Sur l’isthme qui sépare l’Occident de l’Orient. J’ai tout vu dans ma vie : le Nouveau-Monde, le détroit du Drovolski et ses vents contraires glacés, le grand canal du Jashuria sur lequel passent les jonques. Les atolls ensoleillés dans l’archipel wanmirien, la Baie des Baleines de Gorae Man, et j’en passe tellement… Il n’y aurait pas assez de tout une vie pour dire ce qu’a été ma vie. Et puis, à quarante ans, figurez-vous, j’ai rencontré l’amour !

Un sourire passe sur ses lèvres et ses yeux brillent un instant. Puis, comme dans un film à l’eau de rose, un voile passe devant les yeux de votre conteur.

— Prumielle… une Carnavalaise. Elle aussi n’avait jamais eu personne dans sa vie. C’était là, juste en bas, sur le Port Ancien. Je cherchai où loger, elle louait une chambre pour des propriétaires dans le Saladier… Le quartier du Saladier, tout près du port. Entre nous, ça a été le coup de foudre. Trois ans de bonheur…

Il se tait quelques instants alors qu’un curé en soutane noire passe près de vous. Celui-ci, les mains jointes, lance un regard sévère. Vous l’auriez rencontré si vous étiez descendu dans la crypte. Mais c’est trop tard : il s’éloigne vers l’autel. Le pèlerin reprend son discours :

— … Trois ans avant qu’elle ne soit emportée par le cancer. Dans le sein, elle ; et moi dans le foie aujourd’hui. Quelle ironie, hein ? J’étais fou de douleur. J’avais quitté la marine pour elle, et à présent je me retrouvai vraiment seul. Je me suis retiré du monde. Je suis allé loin de tout, au milieu de rien, dans une vallée dans la Kresetchnie, à Bergrun je suis devenu moine. Oui, moine ! Je ne voulais plus rien faire d’autre que cultiver mon potager, prier et raffiner ma connaissance des bières locales. Ce que j’ai pu boire… J’ai bu comme un trou. Voilà le résultat aujourd’hui.

Il montre son crâne brillant.

— Chimiothérapie. Cancer du foie mais on arrive pas à le traiter.

Vous lui demandez alors s’il croit en Dieu.

— En Dieu ? Bien sûr ! Je crois en lui. Est-ce que lui, il croit en moi ? Cela reste à prouver.

Il désigne du menton le fond de l’église.

— Notre-Dame va faire l’émissaire entre nous. Je viens faire ce pèlerinage pour qu’elle me protège et m’accorde la guérison. Si Dieu le veut bien, son intercession me sera salutaire. Et sinon, j’aurais profité d’une belle journée, dans cette ville où j’ai vécu trois ans avec Prumielle.

Il se tait. Vous comprenez qu’il a peut-être besoin d’être seul, de prendre du temps pour se reposer et prier, car il vient de finir son pèlerinage. Vous vous apprêtez à vous lever, mais il pose sa main sur votre bras.

— Attendez, s’il vous plaît. Vous savez, je n’ai pas eu l’occasion de parler à grand-monde depuis des années, et c’est la première fois que je reviens ici depuis… depuis mes jeunes années de soleil. Alors, s’il vous plaît, je vous en prie, soyez mon Chien.

Vous froncez les sourcils. Pourtant, aucune ironie ne brille dans son regard couleur noisette à la menthe. Vous lui demandez alors, tout juste près de l’indignation :

— Votre « chien » ?

— Mon Chien, mon gardien, mon porte-chance. Vous savez, la huitième case, sur les cartons de loto !

Vous comprenez que par « Chien », le pèlerin fait référence à un symbole de chance dans le folklore messaliote.

— Vous ne connaissez pas l’histoire du Chien ? vous demande-t-il amusé. C’est lié aux Sept Dormants d’Éphèse, les sept jeunes hommes d’une histoire chrétienne. Ou musulmane, d’ailleurs, car le mythe est partagé. Enfin, c’étaient des jeunes gens poursuivis pour leur foi envers la Vraie Religion, laquelle, c’est secondaire. Ils allèrent se cacher dans une grotte, et ils s’y endormirent pendant des siècles et des millénaires. Il paraît même qu’ils y dorment encore. Ce sont eux dont les visages ornent les cases du ticket de loterie, vous voyez ? Eux et l’Esprit Saint, qui a offert sept dons à l’Humanité. Ne me demandez pas de tous les reciter, je n’ai pas assez bonne mémoire… Le prêtre, là-bas, pourra peut-être vous renseigner. Quoi qu’il en soit, l’on dit qu’un Chien veille sur eux, et c’est le huitième saint d’Éphèse, celui que la liturgie a oublié… et qui porte chance ! Enfin, regardez bien le carton de loto, vous trouverez le Chien.

Vous le fixez, dubitatif. Lui vous regarde avec l’air content. Il met la main à sa poche.

— Ce que je voulais dire, c’est que vous me portez chance.

Il en tire une liasse de billets.

Fortune vient à qui donne bien !

Il vous tend les billets. Son regard encourageant vous incite à les saisir. Il insiste une dernière fois :

— Prenez, s’il vous plaît. Vous êtes le Chien, l’Étranger de cette histoire. Vous me porterez chance pour vaincre mon cancer. Prenez, et allez dans la paix du Christ.




Que faire ?

☞ Prendre les billets, gagner 3'333 points et se diriger vers la sortie.
☞ Prendre les billets, gagner 3'333 points et aller voir le prêtre pour lui demander la signification réelle du "Chien"..

3740
Le curé

Vous tendez vos mains jointes à côté du curé, dont les yeux brillent de satisfaction en vous voyant vous rallier à son appel à la prière. Vous fermez les yeux et demeurez ainsi quelques instants devant la statue de Notre-Dame à l’enfant, dont le visage de pierre scintille au rayon du jour.

Après quelques minutes, les mains du prêtre s’abaissent en frottant sa soutane. Vous rouvrez les yeux : rien n’a changé.

In nomine Pater, et Filii, et Spiritus Sancti, Amen.

Amen.

L’atmosphère se détend quelque peu. Alors, le prêtre se déporte de quelques pas vers une partie de la crypte que vous n’aviez pas vue : dans un renfoncement se trouve une petite pièce sombre. Sous une statue du Christ en croix se trouvent quelques gisants. Vous suivez le saint homme, qui se retourne vers vous.

— Ici reposent quelques-uns de nos Archevêques. Erménetrand, Archambaldun, Prophysiamis : de grands meneurs d’hommes, et de saints croyants, à l’époque où l’Eglise était grande.

Vous constatez les dates gravées au pied des gisants. 1209. 1154. Et même, au fond, 996. Dans la pénombre, vous vous sentez inspirés par une époque médiévale pleine de foi et de mystères. Puis vous rapportez votre attention au prêtre, qui s’est remis à parler :

— Les marchands, les libertins et les Juifs n’ont pas toujours eu le contrôle de notre ville comme c’est le cas aujourd’hui. Vous contemplez là trois héros de notre Eglise qui ont dirigé le pays, et au-delà même, d’une main de velours dans un gant de fer. L’Archevêché, comme nous l’appelons, n’est pas qu’une vague idée ; cela a été, un temps, une réalité temporelle. Chevaliers, négociants, paysans et bourgeois réunis dans l’ordre le plus pur, et le culte commun de la Chrétienté ; celui du Fils de Dieu, de Jésus-Christ, notre Sauveur pour l’éternité.

Vous observez avec attention votre interlocuteur. Sa lèvre inférieure se relève légèrement à chacune de ses intonations, légèrement péremptoires, et sa glotte redescend avec sa voix douce. Il porte à la main une bague, ou plutôt une chevalière : un anneau de métal doré assez épais, frappé d’une croix pattée que vous reconnaissez vaguement.

Cette croix est celle de l’Archevêché, une entité politique médiévale oubliée dans les parchemins de l’Histoire puis ressuscitée par des écrivains romantiques ; elle représente, au-delà d’un signe catholique banal, l’attachement à une certaine idée de la société. C’est un symbole intégraliste par excellence. Les Intégralistes, ces penseurs d’extrême-droite ultra-conservateurs et néo-traditionnalistes, appartiennent à un mouvement intellectuel qui prône le retour au passé : aux classes sociales figées dans le marbre de la religion, à l’anti-modernisme et au rejet des valeurs libérales promues par les Juifs et la classe marchande, à la préséance politique et sociale de l’Eglise qui doit être remise au centre du village.

Vous méditez sur ces idées politiques en reportant votre regard sur la statue de Marie, dont les yeux de pierre sont aimants mais aveugles. Dans le rayon de jour qui traverse la crypte, vous songez à vos croyances religieuses, à votre rapport à la mort et à la politique.

Le prêtre vous regarde avec un air empreint de sympathie.

— Vous venez jouer à la Loterie, n’est-ce pas ?

Vous répondez sobrement.

— En tous cas, sachez que vous êtes le bienvenu ici, comme dans toutes les églises de ce pays.

Il vous tend une main pour que vous la serriez, de manière chaleureuse et solennelle.

— Je suis Edmond Aimé-Gerry, le recteur de cette basilique. Heureux de faire votre connaissance.

Il vous tend sa carte de visite, contenue dans une poche intérieure de sa soutane.

— N’hésitez pas à m’appeler si vous avez besoin de quoi que ce soit. Je vais à présent me retirer.

Il fait un pas en arrière, s’incline de façon révérencieuse et se dirige vers une porte réservée aux membres du presbytère. Bientôt le voilà échappé de la crypte silencieuse.

Vous contemplez la carte de visite ; elle est sobre, et élégante, ornée du blason de son institution. Vous regardez votre montre : il va être temps de repartir. Vous repartez avec la bénédiction de l'abbé Aimé-Gerry, ce qui vous confère un bonus pour influencer la politique intérieure messaliote. Vous avez un gros bonus d'influence : 10'000 points de faveur excellente auprès des Catholiques, à investir auprès de n'importe quel parti politique que vous soutiendriez pour de futures élections, y compris le vôtre si vous en avez un.




Et maintenant ?

☞ Retourner au parking, retrouver Benjamin et continuer votre aventure.

2780
La vérité

Le prêtre semble surpris de votre réaction véhémente. Il recule et cligne des yeux. Puis, portant la main au crucifix qui pend sur sa poitrine, il se récrie de vous, d’une vois feutrée dans la crypte :

— Alors retournez à vos démons, infernal pécheur !

Il vous foudroie du regard, et se détourne en passant près de vous, orageux, en bourrasque. Ses pas résonnent avec colère dans l’escalier. Leur éloignement plonge la crypte dans le silence.

Vous soupirez près des cierges, que la fureur du prêtre a fait chanceler, et qui reprennent leur équilibre scintillant dans la pénombre. Un froissement attire votre attention. Une créature passe dans votre dos. Vous sursautez presque. C’est une personne cachée sous un voile, une cruche à la main. Vous ne remarquez que maintenant qu’il y a, au pied de la statue de Marie baignée dans le rayon de jour, un abreuvoir ; les racines translucides d’une fleur des cavernes y trempent indolemment. La personne fluette comme un fantôme verse délicatement un filet d’eau pour renouveler la source artificielle. Vous la contemplez. C’est, visiblement, une nonne affectée à l’entretien de l’église. Elle se tourne alors vers vous.

Son regard doré comme une braise vous fait sursauter. Il est presque surnaturel. Ses cheveux, à la fois bruns et blonds, rayonnent ; son visage doux est celui d’une femme très jeune, mais ses lèvres au sourire malicieux lui donnent une maturité mystique, et déconcertante. Elle s’adresse à vous d’une voix chuchotante.

— Le père vous a raconté une histoire fausse. Enfin, à moitié vraie. Les sept flammes représentent bien les sept dons de l’Esprit Saint, mais cette attribution est postérieure. À l’origine, elles étaient sept étoiles.

La jeune femme s’approche de la toile et, sous ses mains, de manière surnaturelle, les couleurs et les formes semblent changer.

— Elles étaient sept sœurs dans le pré, à l’aube du monde. Sept Naïades pourchassées par le Chasseur, le Grand Titan, et dont le père avait été puni par le grand maître de l’Olympe. Orion les désire, il court à travers le ciel pour les attraper ; toutes petites, toutes légères, elles lui échappent encore : elles sont les sept étoiles d’une seule constellation. Les dons de l’Esprit Saint sont les Pléiades qui brillent dans le ciel. Maia, Alcyone, Astérope, Céléno, Electre, Taygète, et Mérope, la perdue, la manquante.

Un bruit d’eau attire son attention derrière. Elle semble déstabilisée un instant. Vous clignez des yeux, à présent incapable de discerner le vrai du faux : quelle est cette crypte étrange croulant sous les symboles contraires ? Votre carton de loterie est-il païen ou chrétien ? Vous voudriez en savoir plus, mais déjà elle s’échappe ; elle disparaît derrière une porte du presbytère. Vous vous retrouvez seul dans la crypte.

Vous voulez en avoir le cœur net et vous reportez votre attention sur la peinture sur bois. Pas d’étoiles, mais des flammes ; pas de Naïades, mais l’Agneau christique en sacrifice pour le péché de l’Humanité. Vous entendez des pas difficiles ; une vieille dame ahanante, soutenue par son petit-fils, vient de descendre dans la crypte. Elle a un gros billet à la main, qu’elle va déposer dans l’urne aux offrandes pour allumer un cierge.

Vous battez des paupières. Vous avez besoin d’air à présent et il va être l’heure d’y aller de toutes façons.




Il est temps d'y aller.

☞ Remonter vers la sortie.

567
Sortir de l'église

Vous passez sous la porte d’entrée de Notre-Dame-de-Sauvegarde ; le soleil tombe à nouveau sur vous, chaud et doré. Un vent s’est levé. Des oiseaux de mer braillent en altitude. Messalie resplendit. L’heure avance ; il est temps de vous mettre en route !

— En route !

Benjamin démarre le moteur du véhicule, et l’engage vers la sortie du parking pentu ; dans le rétroviseur, le clocher de la basilique tutélaire de la ville disparaît derrière un immeuble. Et avec lui ses statues, ses pèlerins, ses mystères : dès le premier tournant, vous retrouvez le flot de voitures et de klaxon des rues encombrées de Messalie.




Et maintenant...

☞ La voiture s'engage vers la suite de votre aventure.

2545
Une simple question

Vous remerciez le pèlerin, qui s’agenouille pour prier. En vous relevant, vous remarquez que le prêtre qui vous a fait une drôle d’impression est au fond de la nef, en train de trafiquer Dieu sait quoi au niveau de la nef.

Vous vous approchez de lui. Ce que vous dit le pèlerin a attisé votre curiosité : Vous êtes le Chien, l’Étranger de cette histoire. Qu’est-ce que ça peut bien vouloir dire ? Vous n’êtes pas venu à Messalie pour repartir sans réponses. Lui, le saint homme, il saura bien vous en donner.

— Mon Père…

Vous l’interpellez doucement, mais celui-ci sursaute ; il lance sur vous un regard mauvais, qu’un instant plus tard il pacifie dans un masque calme et agréable. Ses lèvres sourient presque quand il vous répond :

— Dites-moi, mon enfant, en quoi je puis vous être utile.

Vous lui racontez ce que vous avez vécu : un pèlerin est venu vous voir, vous a raconté l’histoire des sept saints d’Éphèse, et vous a demandé de lui servir de Chien. Vous vous interrogez sur le sens de cette proposition.

— Qu’est-ce que vous avez tous avec cette question !

Il soupire, l’air agacé, comme s’il était outré par le mot « chien ».

— Ce n’est pas le « Chien », ce chien, c’est l’agneau, l’Agneau du Christ sacrifié pour la rémission des péchés de l’Humanité, nom de Dieu !

Il se mord la lèvre, et lève un regard désolé vers la croix.

— Pardonnez-moi, je n’aurai pas dû jurer. Mais ce que je veux dire, mon enfant, parce que vous m’avez l’air peu familier de notre ville, c’est que c’est un blasphème de parler ainsi de « Chien » quand vous désignez l’Agneau.

Vous expliquez que sur les cartons de loto…

— Je sais, je sais, que les pécheurs dans votre genre qui jouent au loto appellent la huitième case le « Chien ». Mais vous voyez quoi sur le carton ? Un chien ? Non, c’est un agneau. Donc arrêtez de venir me voir en me parlant ainsi d’un chien, y a pas de chien !

Vous insistez néanmoins : le pèlerin vous a raconté que les sept jeunes gens d’Éphèse s’étaient réfugiés dans une grotte avec un huitième compagnon à quatre pattes, qui veille sur eux.

— Vous avez tout faux, vous corrige le prêtre. Vous n’auriez pas dû écouter ce bouffon. Ce qui a protégé les Sept Dormants d’Éphèse jusqu’ici, c’est l’Esprit Saint ; c’est leur conversion à la parole du Christ et à la voie du Seigneur. Il n’y a pas de chien, il n’y a que l’Agneau de Jésus-Christ.

Un sourire mauvais passe soudain sur son visage, fugacement remplacé par une mine apaisante.

— Mais puisque vous avez l’air d’y tenir, je vais vous faire une confidence, et vous délivrer un petit secret.

Il se penche vers vous pour être sûr de n’être entendu de personne, surtout pas de la famille de touristes sylvois qui se prend en photo avec la Vierge Marie derrière vous.

— Si vous voulez connaître la vérité, il vous faudra remonter au début du pèlerinage : à la chapelle de la Myrte, d’où est parti l’abruti qui vous a raconté son tissu de sornettes. Vous y trouverez un petit sanctuaire dédié à la Vierge, et là, vous constaterez la vérité par vous-même. Allez-y, et vous verrez !

Il se détourne à présent de vous.

— Allez dans la paix du Christ, mon enfant !




Il est temps de finir votre visite.

☞ Vous diriger vers la sortie.

5419
Embouteillage

Benjamin conduit la voiture à travers les rues de plus en plus encombrées de Messalie. À la densité du trafic, vous sentez qu’on approche du centre-ville. Des voitures vous grillent parfois la priorité. À l’auto devant vous, immatriculée dans les Trois-Nations, Benjamin colle au train ; quand elle ralentit pour laisser passer des piétons sur la route, dont une mamie hésitante, il klaxonne.

— Oh il s’endort lui !

Vous regardez par la fenêtre. Que vous soyez raciste ou colorblind, il vous est impossible de ne pas remarquer les couleurs bigarrées de cette ville cosmopolite. Devant une petite boutique à la devanture couverte de logos flashy, des hommes noirs font la queue pour acheter des cartes de crédit téléphonique, ou pour envoyer de l’argent dans leur pays d’origine. L’arrêt à un feu rouge vous permet de jeter un œil à l’intérieur depuis la voiture : le petit magasin, qui vend aussi des câbles et des téléphones, est tenu par un Jashurien au teint foncé. Les visiteurs viennent envoyer quelques dizaines de drachmes en Antérie, au Gondo, en Sochacia.

La voiture redémarre et passe devant une place saturée par une brume de poussière. C’est un jardin d’enfants vétuste. Des femmes voilées, noires, blanches ou jaunes, y conversent, entourées de poussettes et de nuées de petits. Des vieillards sont assis sur des bancs. À la terrasse d’un café attenant sont assis des nord-afaréens que vous dévisagez avec prudence ; autour d’eux, des tickets grattés et des gobelets de thé fumant. Il y a dans les rues de jeunes femmes chargées de course, des étudiants baraqués sortant de la salle de sport, casque sur la tête ; un restaurateur linguois qui fume devant son petit commerce de traiteur. Au-dessus de leurs têtes, des câbles téléphoniques ou électriques, les branches d’arbres desséchés, des enseignes plus ou moins anciennes pendent.

Vous dévisagez l’architecture de la ville que vous traversez, très hétéroclite. Contrairement à bien des métropoles du Vieux-Monde, Messalie n’a pas achevé sa mue en cage dorée pour classes bourgeoises modernes entourées de banlieues dortoirs ; les quartiers populaires se mêlent aux allées tranquilles, les villas aux barres résidentielles, créant un damier social qui à présent vous saute aux yeux. Les immeubles méridionaux à un ou deux étages, au toit de tuiles d’argile, côtoient des constructions en ciment ou bien des immeubles modernes. Des maisons mitoyennes entourent des entrées de cour où vous apercevez, sur des nappes de bitume fissuré par les racines émergentes de grands et puissants platanes, de vieilles automobiles garées. Çà et là, vous apercevez des chats efflanqués qui se faufilent, des chiens tenus en laisse par leur maîtresse chaussant des lunettes noires. Vous détaillez alors les vêtements des gens ; grands boubous bleus et jaunes de daronnes afaréennes, jeans et marcel blanc d’homosexuels branchés, nattes, boucles d’oreille d’or et d’argent, bracelets, vestes désuètes et élégantes de retraités portant un béret et une canne, robe légère de jeune femme méridionale, bien des combinaisons possibles se retrouvent dans la population.

Vous constatez peu d’homogénéité. Le soleil brille fort au-dessus des rues, les arbres offrent parfois une ombre sèche et bienvenue. Un vent souffle au-dessus des immeubles ; il vient du nord, c’est le mistral, qui murmure et s’insinue dans les ruelles, soulevant feuilles et détritus, faisant rouler des canettes vides sur le trottoir.

Vous avez le temps de regarder tout ça parce que le trafic est dense. On n’avance pas.

— Je crois qu’on n’y sera pas à l’heure, se plaint Benjamin. C’est complètement bouché en centre-ville.

Il rallume son Akaltopos, qui vous dévoile les conduits rougis par les embouteillages sur la carte numérique du véhicule. Votre accompagnateur peste.

— C’est les grévistes, rouspète-t-il. Ils bloquent la rocade extérieure maintenant.

Il klaxonne de dépit. De fait, depuis le début du trajet, vous avez remarqué les fréquents appels sonores que les voitures s’envoient les unes aux autres, manifestant une humeur confusément agitée à travers la ville. Benjamin s’empare de son téléphone portable pour y pianoter quelque chose.

— Je vais appeler mon père, il bosse à Meyrargues, à la sortie de la rocade, il va me dire où ça en est. Mais je pense que le plus simple ça va être que vous preniez le train.

Il jette un coup d’œil par-dessus son épaule, revérifiant si besoin que vous êtes complètement coincés dans l’embouteillage.

— Il y a un train de banlieue qui vous emmène directement aux Eaux-du-Fiongue, et le domaine est à dix minutes de la gare du village. Ça sera plus rapide, sinon en voiture clairement vous serez jamais à l’heure avec ce bordel.

Benjamin démarre l’appel. Dans la voiture immobile, vous entendez les bips d’attente. L’air est chaud ; les fenêtres ouvertes font à peine passer l’air. C’est alors qu’une brochette de klaxon proche de vous fait sursauter l’atmosphère.

— Oh mon gaté !

Vous tournez la tête. Quelqu’un vient de s’arrêter à hauteur de Benjamin et s’adresse à lui. Le frein de sa trottinette électrique crisse.

— Bien le sang ?

Benjamin et lui entrechoquent leur poing fermé en souriant. Le nouveau venu s’accoude à la portière et passe une tête à l’intérieur. Ses yeux de braise, soulignés par des sourcils d’un noir profond, vous constatent. Il vous salue d’un hochement du menton, sans sourire, puis son attention revient à Benjamin.

— Tu traînes plus avec nous ?

Le petit gros qui vous sert d’accompagnateur se met à négocier.

— Eh, le travail, tu sais, moi je bosse.

— Et lui là c’est qui.

— C’est mon client. Je dois l’amener aux Eaux.

— Aux Eaux ?

Le brun à trottinette jette un regard désolé vers la file de voiture, désespérément immobilisée dans l’embouteillage.

— Eh, t’y seras à l’an Pèbre !

Ils rient. Vous intervenez alors pour demander si la gare est encore loin.

— Vous allez à la gare ? demande l’ami de Benjamin.

— Je pensais le déposer à Saint-Porphyre, dit votre accompagnateur comme si vous étiez transparente. Pour qu’elle finisse le trajet en train.

Leur accent chantant berce et agace vos oreilles. Le nouveau venu hausse alors les épaules.

— Eh, si vous voulez, vous pouvez venir avec moi !

— Eh comment, todi ?

— En montant derrière ! En cinq minutes j’y suis à la gare, je vous dépose, vous irez plus vite qu’en attendant dans la voiture.

Benjamin reporte son regard vers vous.




— Vous en dites quoi ?

☞ Monter derrière l'ami de Benjamin, sur la trottinette électrique, jusqu'à la gare pour y prendre le prochain train.
☞ Refuser poliment et rester dans la voiture pour aller à la gare.

3481
En trottinette électrique

— D’accord, déclarez-vous, je vais monter avec Monsieur s’il peut me conduire à la gare.

— Pas de souci !

Benjamin vous adresse un regard reconnaissant. Puisqu’il n’a plus à vous surveiller et vous accompagner, c’est comme si vous lui donniez l’occasion de finir sa journée en avance.

Prenant les choses en main, vous ouvrez la portière, sortez de la voiture et claquez la porte. Vous faites le tour du véhicule pour arriver à hauteur de l’ami de Benjamin. Sa tête de bandit méridional vous inspire peut-être un peu d’appréhension. Sans vous serrer la main, il remet un pied sur sa bécane et, d’un mouvement de menton :

— Tenez-vous bien derrière.

Vous posez les mains sur ses épaules, recouvertes d’un maillot bleu ciel de l’Olympique messaliote. Accroché à la fibre synthétique, vous sentez votre cœur être bouleversé quand il fait avancer la trottinette, dont le moteur électrique a ce démarrage puissant qui peut être parfois dangereux.

— Bonne soirée !

Benjamin vous salue ; vous tournez la tête vers lui une dernière fois, mais il est déjà trop occupé à faire le demi-tour en pleine rue pour s’intéresser davantage à vous. Il prend sa liberté, songez-vous, tout heureux de finir plus tôt que prévu : un vrai messaliote.

Vous vous balancez presque à l’horizontale quand la trottinette fuse à travers la circulation. Les freinages de votre conducteur autochtone sont aussi subits qu’inquiétants. Il zigzague à gauche ou à droite de la file sans aucun souci pour le code de la route. Il traverse un rond-point sans s’arrêter, fait une queue de poisson à des cyclistes, grille des feux, dépasse dangereusement des véhicules garés sur la voie devant un restaurant kebab en saluant des piétons sur la route d’un geste de la main, en faisant tinter son klaxon pour attirer leur attention.

Vous vous cramponnez. L’avenue descend à présent en pente assez forte le long d’une rangée de beaux platanes dont les feuilles d’un vert jauni se répandent doucement sous l’ombrage. Votre frêle bicycle prend de la vitesse, vous frôlez les soixante kilomètre heures sans aucune protection. Peut-être un début de prière vous vient-il aux lèvres lorsque surgit à l’orée d’une ruelle improviste la figure énorme d’un camion qui s’engage.

Votre conducteur manœuvre adroitement pour éviter une mort certaine. Doublant par la file d’en face, il se réinstalle dans le flot de la circulation et déjà arrive au bas de l’avenue.

— La Chanevière, la plus belle avenue de Messalie !

Happé par la vitesse, vous n’avez presque rien vue de cette artère iconique, qui donne, plus loin, sur le Port Ancien et ses rumeurs immémoriales de tavernes, de marins, de cafés où l’on croise tout ce que le monde compte de bateliers, de mousses, de capitaines, de pilotes. Vous déboulez plutôt sur une place assez classique. Un ancien hôtel particulier, à la façade brunie par le temps, l’humidité et la pollution, la préside de son fronton néoclassique ; des drapeaux rouges et jaunes flottent à ses fenêtres. C’est la Bourse du Travail.

Votre conducteur freine des quatre fers à hauteur de l’immeuble et finalement vous arrête.

— Faut que je passe chercher un truc, explique-t-il rudement en vous intimant de descendre de son véhicule.

Il l’arrête, le fait grimper sur le trottoir et le dépose à l’entrée du bâtiment. Un vigile, homme noir d’âge mûr aux traits marqués par la fatigue, fait les cent pas devant la porte, préposé à la sécurité d’une réunion qui se tient à l’intérieur. Déjà le trotteur fou a disparu dans l’embrasure de l’entrée de la Bourse du Travail. Le vigile vous adresse un regard indifférent.

Vous entendez les échos d’une réunion syndicale qui se tient à l’intérieur. Parfois des gens sortent, pour se rouler et allumer une clope à l’extérieur. Un regard circulaire sur la place où tombe le soleil sur un rang de platanes vous fait remarquer un panneau. Celui-ci vous indique que la gare Saint-Porphyre n’est qu’à cinq minutes à pied, en remontant une rue animée. Vous êtes tout prêt de pouvoir prendre le train, mais allez-vous laisser celui qui vous a conduit jusque-là sans l’avertir ?




Que faire ?

☞ Monter à pied vers la gare.
☞ Entrer dans la Bourse du Travail, à la recherche de votre chauffeur de trottinette.

3285
En voiture à la gare

— Non merci, dites-vous, je veux bien que Benjamin me dépose en voiture à la gare comme prévu.

Les deux jeunes hommes vous regardent en haussant les épaules. Le conducteur de trottinette électrique tape sur la portière et salue son ami.

— Aller le sang, je file, je dois récupérer les clés du local chez le vieux là.

— Vas-y, à t’aleure le S.

Et il s’éclipse ensuite : vous le voyez disparaître entre deux voitures, sur son bolide à propulsion électrique. Pendant ce temps, l’embouteillage se décoince tout lentement.

Finalement, une ouverture entre les obstacles de la circulation est saisie par Benjamin qui enclenche l’accélérateur. Vous doublez une demi-douzaine de voitures et grattez trente mètres en changeant de file. Les protestations d’autres automobilistes résonnent mais, imperturbable, votre conducteur se glisse dans la bretelle de dépose-minute qui passe sous la gare Saint-Porphyre, où vous devez prendre votre train.

— Voilà, vous montez, regardez les panneaux, ça sera indiqué. Vous pouvez prendre un billet sur l’application bref je vous laisse faire vous avez pas trois chromosomes. Faut prendre le train régional qui va au Rouseron, vous en avez pour quoi, dix-douze arrêts. Vous descendez aux Eaux-du-Fiongue, la gare est au village, le Domaine Sainte-Fortune il est à quoi vingt minutes à pied, je vais leur passer un coup de fil et leur dire d’aller vous chercher mais bon c’est pas long quoi vous pouvez aussi finir à pied. Voilà.

Il vous fait un grand sourire et vous ouvre la portière de la voiture depuis sa place de conducteur.

— Aller, excellente journée !

Vous marmonnez quelque chose mais Benjamin vous laisse là, trop pressé de mettre fin à sa journée en se débarrassant de vous à la gare. Il vous expédie vite vos affaires, et, rassis au volant, il démarre en trombe et disparaît de votre vue. La voiture noire se perd dans la circulation. Vous ne le reverrez pas.

Vous prenez vos bagages et montez par un escalator au grand hall de la gare Saint-Porphyre. Lentement, debout sur les marches métalliques qui se génèrent et s’avalent en un cycle ininterrompu, vous contemplez la verrière suspendue par des poutrelles métalliques. La réfection du hall de gare a permis de mettre en valeur le patrimoine architectural de la révolution industrielle. Vous arrivez à hauteur du parvis ; celui-ci est une grande terrasse de pierre calcaire blanche, depuis laquelle on peut contempler Messalie qui vibre dans la lumière. Au loin, l’horizon bleu pâle de la mer se confond avec le soleil, et la silhouette de Notre-Dame-de-Sauvegarde trône comme une matronne au-dessus des toits de tuile ocre.

Vous achetez un billet à la machine selon les indications que vous a données Benjamin. Un coup d’œil à l’un des panneaux électroniques vous informe de la voie de votre train. Vous vous dirigez vers elle. C’est un train régional qui patiente dans sa travée, petit à petit gagné par des voyageurs. Il est peint en bleu, en jaune et en rouge, les couleurs de la province de Garance vers laquelle vous vous dirigez.

Vous entrez et choisissez une place tranquille près de la fenêtre. Il fait chaud, et malgré le bruit grésillant qu’elle produit, la climatisation ne rafraîchit rien, comme si elle était défectueuse. Pour passer le temps avant le départ du train, vous ouvrez Akaltopos sur votre téléphone portable et regardez le temps de trajet qu’il vous reste à parcourir. Environ une heure. Les-Eaux-du-Fiongue est un village situé dans la province de Garance, dans le dème d’Estolie ; c’est, vous apprend Pipiwédia, un ancien vicomté dont la famille existe toujours. L’un des membres de la famille Fiongue s’est d’ailleurs illustré récemment en Mer Blanche, vous rappelez-vous.

Finalement, les moteurs du train s’activent progressivement.

— Mesdames et messieurs bienvenue à bord, je suis Florentin et nous allons partir, gare à la fermeture des portes attention au départ.




Et maintenant...

☞ Regarder le paysage défiler et continuer votre aventure en train.

1497
A pied à la gare

Puisque votre conducteur dont vous ne connaissez même pas le nom vous a laissé pour compte à la Bourse du Travail, vous décidez de finir votre chemin tout seul. Dehors, vous suivez le panneau en remontant la rue d’Athenai, passez sous les frondaisons des platanes. La rue aboutit à la gare, qui brille comme un grand dôme de verre sur la colline ; vous vous faufilez par une entrée, esquivez un mendiant unijambiste et des loubards encapuchés, et entrez dans le hall.

Les trains régionaux sont affichés sur un panneau bleu. L’express pour le Rouseron, qui dessert Les Eaux-du-Fiongue où se trouve votre destination, part dans neuf minutes voie J. Vous vous y dépêchez, entrez dans l’appareil de métal peint aux couleurs d’une compagnie étrangère – le groupe Tellary, originaire du Wanmiri, s’est taillé la part du lion dans le secteur ferroviaire local.

Vous entrez et choisissez une place tranquille près de la fenêtre. Il fait chaud, et malgré le bruit grésillant qu’elle produit, la climatisation ne rafraîchit rien, comme si elle était défectueuse. Pour passer le temps avant le départ du train, vous ouvrez Akaltopos sur votre téléphone portable et regardez le temps de trajet qu’il vous reste à parcourir. Environ une heure. Les-Eaux-du-Fiongue est un village situé dans la province de Garance, dans le dème d’Estolie ; c’est, vous apprend Pipiwédia, un ancien vicomté dont la famille existe toujours. L’un des membres de la famille Fiongue s’est d’ailleurs illustré récemment en Mer Blanche, vous rappelez-vous.

Finalement, les moteurs du train s’activent progressivement.

— Mesdames et messieurs bienvenue à bord, je suis Florentin et nous allons partir, gare à la fermeture des portes attention au départ.




Et maintenant...

☞ Regarder le paysage défiler et continuer votre aventure en train.

499
Après l'hôtel

Vous décidez de quitter l’Hôtel Nérème. Vous descendez quelques escaliers, empruntez de grands couloirs à la moquette rouge et verte, et arrivez à la sortie. La dame de l’accueil vous salue ; le portier vous ouvre une porte rotative dans laquelle vous vous engouffrez. À l’extérieur, devant l’entrée principale, stationne un taxi noir dont le conducteur n’est autre que votre accompagnateur Benjamin. Celui-ci se lève pour vous ouvrir la porte. Vous vous installez dans le véhicule, et il reprend sa place de chauffeur.




— Où est-ce que je vous dépose, Excellence ?

☞ Au Domaine Sainte-Fortune.

6150
EURYCOPTER

Vous posez un pied sur le tarmac de la piste. L’air fait virevolter les rabats de votre chemisier et des mèches de votre chevelure. Les mains dans le dos, des personnes vous attendent ; elles portent des gilets de sécurité fluo, des casques jaunes ; quelques-unes d’entre elles sont habillées en costumes sous la veste de couleur. C’est un homme d’une cinquantaine d’années qui s’avance le premier. Il vous tend la main droite. Ses rides de professionnel shooté à l’exercice du pouvoir sur ses subalternes se plissent en un sourire corporate.

— Excellence, bienvenue à Eurycopter. Je suis Augusto Fayols, directeur du site de Marigues.

Vous serrez ensuite la main à toute une tripotée de chargés de relations presse, de directeurs techniques, financiers, de chefs d’équipe. Vous levez les yeux ; dans le ciel bleu flottent, enhardis par une brise soutenue du large, les drapeaux messaliotes et wanmiriens.

— Helia Industries est le nouveau propriétaire.

Vous avez entendu parler de cet industriel wanmirien, dont l’acquisition d’EURYCOPTER avait fait grand bruit dans la presse économique. L’étendard bleu à l’arbre de vie se déploie aujourd’hui devant le dernier site industriel du fleuron messaliote, que vous vous apprêtez à visiter.

— EURYCOPTER est l’une de nos industries nationales les plus prospères et les plus célèbres, vous explique le directeur du site en vous faisant entrer dans un hall d’accueil frais et moderne.

Un prototype d’hélicoptère trône d’ailleurs au centre.

— L’Hirondelle, dont voici un exemplaire, est fameusement connue dans le monde entier.

Des techniciens et des ouvriers vous accompagnent dans la déambulation que vous fait parcourir le directeur Fayols.

— Il existait autrefois treize sites de construction d’hélicoptères, et plusieurs écoles de formation de pilotes, à travers Messalie. C’était l’âge d’or.

On vous passe un petit film sur l’histoire de l’entreprise, qui se conclue par une emphase positive, racontant avec enthousiasme comment la visite du fleuron industriel a déjà convaincu des investisseurs étrangers de la qualité des entreprises messaliotes.

— Si vous le voulez bien, nous allons passer aux lignes de production.

Vous traversez une grande cour qui conduit à des ateliers bruyants. Des portes sécurisées entourent le lieu de fabrication des dernières Hirondelles en construction dans le monde.

Vous pénétrez d’abord dans le hall d’assemblage, vaste nef bardée de charpentes métalliques, où trônent plusieurs fuselages d’hélicoptères encore nus, fixés sur leurs gabarits de montage. Le bruit des riveteuses hydropneumatiques résonne tandis que des techniciens contrôlent l’alignement des couples et des lisses de structure. Plus loin, on aperçoit une ligne automatisée de fraisage CNC où sont usinés les longerons en alliage d’aluminium aéronautique. Des robots de soudage à friction-malaxage s’affairent sur les sections de poutre de queue, garantissant une résistance mécanique optimale.

— À EURYCOPTER on a un savoir-faire reconnu par toute l’industrie aéronautique, historiquement on a fourni toute l’Eurysie avec nos Hirondelles qui ont longtemps régné sur la concurrence pour répondre aux besoins des services de secours en montagne par exemple. La confiance du marché s’est renouvelée car on travaille actuellement avec Helia Industries sur un projet de porte-hélicoptères polyvalent civil et militaire, c’est aussi ça l’intérêt d’avoir le Wanmiri comme actionnaire principal, c’est l’ouverture à de nouveaux marchés en plein essor et la possibilité de partenariats clés sur les aspects technologiques et industriels.

Dans un atelier voisin, des opérateurs en combinaison blanche travaillent dans une salle propre sur les composites carbone-époxy destinés aux pales de rotor. Les moules chauffants et les autoclaves géants assurent la polymérisation à haute pression, conférant rigidité et légèreté. Un peu plus loin, on découvre l’intégration des moteurs turbomoteurs : les compresseurs axiaux, les chambres de combustion annulaires et les turbines libres sont soigneusement assemblés puis testés sur banc d’essai avec instrumentation vibratoire et thermocouples.

Vous passez ensuite devant la station d’avionique, où les écrans multifonctions, calculateurs de vol, gyrolasers et systèmes de navigation inertielle sont montés dans le cockpit. Enfin, dans le hangar de réception, un appareil entièrement assemblé subit des essais de roulage, puis un test de mise en régime rotor avec mesures de couple et contrôle du pas collectif et cyclique. Les équipes de contrôle qualité, munies de tablettes numériques, valident chaque étape via la traçabilité numérique intégrée au logiciel PLM (Product Lifecycle Management). La visite se termine sur l’aire extérieure, où l’hélicoptère flambant neuf attend son vol d’acceptation, silhouette fuselée prête à rejoindre son futur utilisateur.

— Nous avons fait le tour. Excellence, toute l’équipe du site vous souhaite une très bonne soirée de…

Des exclamations se font entendre. Alors que vous vous apprêtiez à regagner votre hélicoptère, des hommes se dirigent vers vous, en casque et gilet jaune. Certains portent des drapeaux.

— Non, non, non !

Fayols s’avance vers eux pour s’interposer. Le nombre d’ouvriers grossit.

— Laissez-nous parler à votre invité, c’est tout ! s’explique un syndicaliste.

— Vous n’avez pas le droit d’être là, votre grève n’est pas déclarée !

— Laissez-nous parler à votre invité !

La tension semble monter. Vous vous approchez. Ce sont des ouvriers syndiqués à l’Union Générale, section de l’industrie aéronautique. La plupart sont épais, barbus ; leur voix rocailleuse porte loin. L’un d’eux s’impose à vous, avec une tablette et un stylet.

— Excellence, on a besoin de votre signature.

— Vous dépassez les bornes, Jean-Michel, peste le directeur.

— Le droit est de mon côté, le nargue le syndicaliste.

On s’adresse bien à vous. Vos yeux se baissent sur un texte au titre écrit en gras : RENATIONALISATION DES INDUSTRIES D’ARMEMENT.

— Le gouvernement a fait le choix de vendre EURYCOPTER, qui n’a plus qu’un seul site en activité ici, à un privé, une compagnie étrangère. Faut savoir qu’EURYCOPTER, c’est vingt-trois mille emplois directs et indirects, c’est un poumon économique pour nous autres. On est une entreprise qui produit les hélicos pour les services de secours, pour l’armée, pour les pompiers, bref on est une entreprise d’utilité publique, d’intérêt national. Face au risque de délocalisation, parce qu’on les connaît, on est passés de treize sites à aujourd’hui un seul, et à présent nous voilà passés sous pavillon wanmirien, face au risque de perte de souveraineté industrielle, on appelle à la re-nationalisation d’EURYCOPTER, qui s’appelait, faut le savoir, MESSALICOPTER avant d’être transformé en société à capital ouvert. MESSALICOPTER, c’est une industrie nationale créée par l’Etat, dotée d’argent public, exerçant une mission d’intérêt public. Il faut la faire revenir dans le giron du public. Signez notre pétition !

Il vous tend à nouveau le stylet. A côté, Fayols fulmine.

— La nationalisation n’existe même pas dans la loi, siffle-t-il.

— Eh ben justement. Raison de plus pour marquer une opposition syndicale, populaire, à la privatisation de… eh bien, vous signez ??




Vous signez ?

☞ Signer la pétition (et gagner un bonus électoral pendant la loterie).
☞ « Non je signe pas ! Casse-toi ! » (bonus financier).

479
Signer la pétition

Vous apposez votre signature à la pétition syndicale. Les ouvriers sont ravis. En vous joignant à leur combat, vous renvoyez une très bonne image aux syndicalistes. Cela donne du poids à votre soutien pour une force politique locale. Vous gagnez un bonus de 10'000 points de faveur excellente auprès des Ouvriers : ce bonus vous servira à soutenir un parti politique messaliote de votre choix en vue des prochaines élections. Cependant ne venez pas réclamer ce bonus si vous lisez ceci sur le forum, c'est trop tard.




Et maintenant ?

☞ Continuer votre aventure.

926
Rejet de la pétition

— Casse-toi !

Votre réponse est cinglante. Elle fuse droit à l’amour-propre des ouvriers, qui s’énervent alors. Mais la sécurité arrive déjà.

— Aller, va-t’en, Jean-Michel ! ordonne le directeur du site au responsable syndical. Sinon je te colle un avertissement ! T’as rien à faire là !

— Excellence, je vous propose d’y aller.

C’est Dimitri, votre pilote, qui s’est adressé à vous. Vous acquiescez et vous dirigez vers l’appareil, qui commence à battre des ailes. Le vent va souffler sur le site et vous transporter vers la suite de votre voyage. En refusant de signer leur pétition avec force, vous avez démontré votre capacité à gérer la contestation syndicale. Quelle poigne ! Cela plaît à la bourgeoisie : vous gagnez 5000 points de faveur excellente auprès d’elle. Indiquez-moi à quel parti vous voulez donner ce soutien ! Cela vous donne aussi une bonne réputation dans les milieux financiers. Vous gagnez 10 obligations d’Etat à taux 5 %, qui vous donneront le droit d’assister aux séances du Conseil d’Administration ! Si vous lisez cela sur le forum c'est trop tard cependant.




Pas mal...

☞ Continuer votre aventure.

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