02/05/2018
Pour désengorger le métro aérien, Marc Micmac parie sur l'inventivité carnavalaise

C'est un problème que n'avaient pas prévu les premiers concepteurs du métro aérien de Carnavale : l'extension rapide de la population de la Cité noire, et surtout la constitution récente d'une classe moyenne en mesure de se payer un ticket, encombre les anciennes structures ferroviaires. Bouchons, queues et attentes parfois interminables, les ambitions d'Améthyste Castelage en matière de mobilité urbaine se heurtent à des défis inattendus. La semaine dernière, un passager ayant voulu se rendre au quartier des chanterelles depuis le quartier des abricots témoigne avoir été contraint de voyager pendant plus de 76h pour atteindre sa destination. Un problème conséquent qui gêne la mobilité à l'intérieur de Carnavale et réduit son potentiel touristique, les habitants n'étant guère encouragés à circuler d'un quartier à l'autre.
Marc Micmac, le directeur de la Société Princière de Gestion du Métro Aérien Carnavalais, assure prendre le problème très au sérieux : "Améthyste nous a confié une mission, rendre le métro aérien fonctionnel pour les Carnavalais au quotidien et relier un maximum de quartiers de la Cité noire, nous ne faillerons pas." Plusieurs solutions innovantes sont sur la table, plus ou moins farfelues ou ambitieuses selon les dépassements budgétaires que s'autorisera la SPGMAC. Car Marc Micmac s'est entouré des esprits les plus brillants de leur génération, des ingénieurs dont la plupart ont fait leurs armes au sein des Industries Obéron, pour un certain nombre reconvertis dans le civil. Il fallait au moins cela pour oser s'attaquer au labyrinthique réseau ferré de Carnavale, dont le métro aérien porte parfois bien mal son nom, tant il passe sous terre, sous l'eau, au dessus des rues et à l'intérieur des bâtiments. Le serpent de fer se complexifie d'autant que les travaux n'ont pas cessé, depuis l'Armageddon't, de le remettre à neuf, entraînant une augmentation mécanique de sa fréquentation, mais aussi des zones à risques et des points de tension.
"Une solution assez simple serait de rajouter deux étages au métro aérien" nous explique Marc Micmac. "La plupart des métros du monde se contente d'un seul, de deux pour les plus ambitions. En transformant chaque wagon en un petit immeuble roulant, nous optimisons drastiquement la place et multiplions par trois ou quatre la capacité d'emport, à moins coût." A moindre coût, vraiment ? Le directeur de la SPGMAC concède qu'avant de procéder à de tels aménagements, un réexamen de la totalité du réseau sera nécessaire. "Il y a la question des rails, qui devront mécaniquement supporter un poids deux à trois fois plus lourd que ce pour quoi elles ont été conçues. C'est du solide, le métal carnavalais, mais il a malgré tout ses limites surtout s'il n'a pas été prévu pour ça. Si les rails tiennent le coup, d'autres questions vont se poser : il faudra agrandir certains tunnels et vérifier que la force centrifuge ne fera pas dérailler les wagons dans les virages. Plus un wagon gagne en hauteur et plus le risque qu'il s'envoie lui-même dans le décor est grand..."
Pour le moment, une expérimentation est prévue sur la ligne Bon Voyage, qui a le mérite d'être complètement droite et de circuler presque exclusivement en extérieur. Plus difficile sera d'aménager la ligne Joyeux Sourire, qui passe sous plusieurs quartiers inondés où des travaux d'aménagement dans les tunnels sont, pour le moment, impossibles.
Une autre solution envisagée par la Société Princière de Gestion du Métro Aérien Carnavalais est tout simplement d'accélérer le métro. Marc Micmac assure que l'expertise des ex-employés des Industries Obéron a été précieuse pour élaborer une méthode permettant, en théorie, de doubler la vitesse de chaque wagon. "Avec les ex-Obéron c'est toujours la même chose" s'amuse Micmac dans son bureau "des réacteurs, des réacteurs et encore des réacteurs. Mais ce qu'ils savent faire ils le font bien." Le ne s'agit pas que de monter le métro sur fusée mais également de le doter d'un système de guidage de haute technologie, d'une anticipation IA des collisions, et de paramétrer informatiquement la trajectoire des wagons afin d'optimiser leurs itinéraires, tout en réduisant les risques de déraillement dû à la vitesse. "Ne me demandez pas comment ça marche mais nos employés m'assurent que propulser un métro et propulser un missile balistique revient à peu près au même, le tout est de savoir gérer le dosage à la mise à feu."
Si les ingénieurs Obéron ont fait leurs armes dans la propulsions par combustion, ils ne sont pas fermés à des techniques plus modernes et originales, comme par exemple l'utilisation de rails magnétiques, expérimentés à plusieurs reprises notamment à CRAMOISIE© dans le cadre de l'Opération Mars. Une collaboration internationale entre les deux nations qui permet de tester, dans le no man's land du désert rouge, des technologies ambitieuses avant de les transposer au contexte de Carnavale. La propulsion électromagnétique est au cœur du projet de vactrain, des trains qui circulent à très grande vitesse grâce à la limitation des frottements. Marc Micmac explique que le projet de transformer certaines parties du métro aérien en vactrain est étudié, mais que cela ne pourra s'appliquer, dans un premier train, qu'aux lignes entièrement restaurées. "Contrairement aux trains traditionnels, les vactrains ont besoin de circuler dans un environnement contrôlé, il faudra tout construire de A à Z." Pas question donc de se contenter de moderniser les lignes déjà existantes et qui circulent à l'air libre de la capitale.
Enfin, d'autres solutions ont été envisagées en sont encore débattues : doubler absolument toutes les rails pour avoir deux fois plus de trains en circulation, optimiser la capacité d'emport en interdisant l'accès aux wagons aux personnes en surpoids, ou encore augmenter drastiquement le prix des tickets pour diminuer la fréquentation du métro. Une dernière solution envisagée, "mais pas dans l'immédiat" précise Marc Micmac, est d'exploiter à termes la stabilisation des trous de ver, un exploit qu'a réussi à accomplir la République Démocratique Populaire de Ouaine, afin de diminuer le temps de trajet en jouant sur les plis de l'espace-temps. Une solution alléchante mais que Marc Micmac temporise : "Il ne faut pas s'attendre à ce que Carnavale maîtrise le voyage spatio-temporel avant au moins 2050, d'ici là les citoyens de la Cité noire doivent pouvoir disposer de moyens de transports sûrs et efficaces. Il sera toujours temps de transformer le métro aérien en musée lorsque nous aurons appris à rentabiliser les téléporteurs."
En attendant, de nombreux habitants de la Cité noire assument se tourner vers les alternatives. La voiture, véhicule traditionnel et familial, épargne la proximité de la foule grâce à son habitacle privé, mais ne permet pas d'esquiver les bouchons. Il est souvent plus rapide de faire un trajet court à pieds qu'en roulant. Les zeppelins, qui font la fortune de Cielestin Armatteur, sont également une alternative prisée par les citoyens. La flotte de dirigeables du candidat à la municipalité s'est enrichie d'une cinquantaine de ballons depuis 2017 et une centaine d'autres sont actuellement en fabrication, ce qui élèvera leur nombre total à deux-cents-quatre-vingt-trois dirigeables volant en même temps dans le ciel de Carnavale. Troisième option : les égouts. Certains passages sécurisés par le syndicat des égoutiers peuvent être empruntés pour esquiver des obstacles naturels telles que des avenues encombrées, des immeubles effondrés ou des quartiers entiers, jugés trop dangereux. Aucune de ces options n'est toutefois réellement satisfaisante et la Cité noire pâtit de l'absence d'un véritable réseau de transport de masse, comme elle avait su s'en doter au début du siècle dernier.
Il reste donc encore beaucoup à faire et à inventer, mais comme toujours : la Principauté est sur le coup !
grâce à ses ordinateurs cantiques religieux.
pour des matins de bonne humeur !
