15/05/2013
06:40:21
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Sommet Aumérine/Grand Kha à Elizabeth Lake House

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Le balai incessant des hélicoptères ainsi que le bruit des quads quadrillant le secteur venaient rompre la quiétude de ce petit bout de paradis le temps du sommet. Pour peu que l’on ait l’œil attentif, nous pouvions également apercevoir les drapeaux du Grand Kha et de l’Aumérine flotter côte à côte près du site…

ELH

Nous sommes à « Elizabeth Lake House », baptisé ainsi en hommage à la reine Elisabeth V. Situé sur un terrain gouvernemental, non loin d’un vaste terrain militaire servant à l’entrainement des troupes d’élites de l’armée aumérinoise, le lieu offre toutes les garanties de sécurité attendues.

D’ailleurs, les « men in black » comme on les appelle, viennent de terminer la sécurisation du site après s’être assurés qu’aucun piège ni micro ne viendrait troubler la rencontre officielle. Une mission mener conjointement avec le service de sécurité kah-tanais, venu au-devant de la délégation officielle qui ne devrait maintenant plus tarder.

En effet, après avoir pris l'avion depuis Aumérine à destination de la piste asphaltée de la base voisine, les véhicules du cortège diplomatique étaient en approche. Il s'agissait d'imposants SUV noirs roulant en colonne et à vive allure, soulevant dans leur sillage un épais nuage de poussière perceptible depuis le chalet.

Note Hrp : Je pars du principe que les salutations protocolaires, assez rébarbatifs d’ailleurs, sont déjà derrière nous lorsque ta délégation est arrivée à l’aéroport.
Nous pouvons donc dès à présent entrer dans le vif du sujet malgré le retard pour lequel je te demande de bien vouloir me pardonner. Espérant que cela te conviennes ainsi.
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Actée Iccauhtli (Mikako Ichikawa)

La dernière fois que la citoyenne Actée Iccauhtli avait rencontrée les officiels Aumérinois, elle était membre du Comité de Volonté Publique Estimable, membre centrale d’un gouvernement puissant, sur la pente ascendante et jouissant de la confiance et du respect des communes. C’était à Lac-Rouge, sous les latitudes chaudes du Grand Kah. La dernière fois qu’elle était montée aussi loin au nord de l’Aleucie, c’était bien plus tôt dans sa vie, d’abord en tant qu’étudiante, puis en tant qu’autrice reconnue, le temps de visites de courtoisie durant lesquelles elle avait donnée quelques conférences (dans ces contrées on parlait plus volontiers de « Masterclass »), signées quelques livres, rencontrés quelques homologues étrangers.

C’était cependant la première fois qu’elle s’arrêtait vraiment en Aumérine, et elle ne le faisait ni en tant qu’écrivaine, ni en tant que membre d’un quelconque comité. Elle n’était plus que la citoyenne Actée, personnalité déclassée de la vie publique kah-tanaise, disparue dans les méandres de l’administration, loin des yeux scrutateurs du peuple et des remarques acerbes des communes, d’où elle continuait de régenter son petit royaume de diplomatie et de vision, de conseiller les différents délégués et de traiter personnellement quelques dossiers qu’elle avait jugée trop important pour être laissé à son remplaçant, le citoyen Sakeh Ngobila, dont elle reconnaissait les qualités mais qui parlait plus facilement aux peuples colonisés, aux puissances secondaires, aux oubliés de l’Histoire, qu’aux premiers de cordées. Actée, elle, était en quelques sortes une vipère. En tout cas sa ferveur révolutionnaire ne l’avait jamais éloignée d’une certaine forme de bourgeoisie culturelle, qui lui avait permis de tisser la toile relationnelle du Grand Kah moderne. Résolument adaptable, s’adressant à tous, faisant des concessions sur les principes révolutionnaires en vertu des nécessités du moment.

Personne d’autre qu’elle ne pouvait parler, et bien parler, à l’Aumérine. D’autant plus qu’elle avait pris un soin tout particulier à créer des relations humaines de respect et d’appréciation mutuelle avec son homologue d’alors, le ministre des Affaires étrangères Anderson Boyd.

En fait elle rechignait simplement à laisser la main sur ce qu’elle considérait, dans ses moments solitaires, comme son œuvre. Elle n’oubliait pas que la révolution, l’acte de gouverner, toute création se faisait à plusieurs mains. Elle n’ignorait pas non-plus que son égo causerait probablement sa fin. Mais pour l’heure il l’avait bien servi, et lui avait entre-autre permis d’imposer à la citoyenne Meredith de lui faire quelques concessions lors de la prise de poste de son comité.

Alors elle était toujours là. Pour le meilleur comme pour le pire, et particulièrement satisfaite d’enfin se rendre dans ce pays auquel elle avait promis une certaine visite. Pour la grandeur du Kah, de la Révolution, de tout ce qui s’en suit.

« Quand j’y penses, ce qui me surprends le plus dans ces régions ce sont les arbres. Ils sont tellement… Sages ? Les forêts du Grand Kah sont chaotiques ; Elles donnent moins cette impression d’ordre. »

Elle avait effectivement passée une grande partie du trajet à fixer le paysage d’un air grave, son assistant personnel numérique posé sur ses genoux. Elle voyageait léger. Plus précisément, laissait à ses assistants — bien réels, eux — la charge de transporter tout éventuelle mallette, porte-documents, paperasserie. Il s’agissait pour elle de participer à l’initiative du « Cool kah-tanais », qui accompagnait les investissements dans les nouvelles technologies voulues par le Commissariat à la Planification. Voyager léger, avoir l’air fluide, réactive, jeune. S’éloigner des standards poussiéreux bien que confortables de la diplomatie classique. Au moins en apparence. Aux yeux du monde elle avait été cette femme bien habillée (un peu à son corps défendant et grâce aux conseils avisés d’une autre membre du Comité, Rai Sukaretto, qui non-contente d’être une fille de dictateur reconvertie avait surtout un pied dans le monde de la mode), qui ne transportait jamais rien de plus qu’un téléphone de dernière génération et une petite tablette qu’elle tapotait parfois avec un stylet.

Ce qu’elle fit, cessant soudain de regarder le paysage, interrompue par une notification, pour plutôt se saisir du PDA. Un bref regard sur son écran, elle acquiesça, le fit disparaitre dans une poche de sa veste. Ses contours aux bords arrondis se dessinaient clairement sous le tissu. Un jour peut-être la miniaturisation permettrait de venir à bout de ce que les plus tatillons des communicants considéraient encore comme un problème.

« Bref. L’endroit est effectivement charmant. Tu sais dans le fond je comprends les sociaux-démocrates. La révolution a un côté un peu fouillis. Le Grand Kah, par exemple, fait très désordre. Mais tu sais peut-être ce qu’on dit de notre côté de la frontière : le Kah c’est l’ordre dans le chaos. »

Elle s’arrêta pour regarder les drapeaux de l’Union, qui lui arrachèrent un acquiescement satisfait.

« Bon. Et donc pour en revenir à ce dont nous discutions : la technologie Aumérinoise satisfait pleinement nos marins. J’avais laissé entendre qu’il pourrait y avoir de nouvelles commandes. On en reparlera, mais cette supposition est devenue une certitude. Tu pourras dire à votre complexe militaro-industriel de remercier le Vinheimur et le mystérieux coma de sa majesté Abigail. » Elle se repris, d’un ton moins détaché. « Oh, j’espère qu’elle s’en remettra, nous ne sommes pas dénués d’empathie. D’ailleurs j’espère que sa majesté la reine se porte bien. Là où je voulais en venir c’est qu’il y a des tensions et qu’elles risquent de ne pas se calmer. Soit il y a une guerre et qu’elle qu’en soit le résultat il y aura des conséquences désastreuses que les communes imputeront nécessairement à l’Alguarena et à l’ONC, soit il n’y a pas de guerre, et les tensions continueront d’augmenter. A la maison c’est compliqué. Meredith est une fille calme mais les gens l’ont élu parce qu’ils croient qu’elle représente la sécurité. Elle représente surtout l’ordre. A côté de ça il y a Caucase, qui espère pouvoir calmer le jeu. Le problème c’est évidemment que l’actualité fait échos aux prévisions catastrophiques de certains clubs — pardon, mouvements politiques — que l’on pourrait ranger du côté de l’extrême-droite kah-tanaise. Nous n’avions plus de nationalistes depuis vingt ans et voilà qu’ils sortent du bois.

Donc il faut nous défendre et prouver qu’un gouvernement modéré est capable d’assurer la sécurité des communes. Y compris grâce à l’assistance de nations "capitalistes".
» Elle fit des guillemets avec ses doigts, comme si l’appel constant au capitalisme l’agaçait de plus en plus. Un allié est un allié, quelle que soit sa couleur politique.
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Dans la suite du cortège diplomatique en route pour Elizabeth Lake House, à bord d’un imposant SUV aux vitres fumées, le Ministre des affaires étrangères terminait de brifer sa fine équipe…

« Notre objectif commun est la sauvegarde de la paix en Aleucie !

Il apparaît maintenant très clair que le jeu de l’ONC et de facto, celui de l’Alguarena, puisque ces deux-là sont étroitement liés l’un à l’autre, est celui d’imposer un nouvel ordre mondial.

Nous observons depuis plusieurs années maintenant l’actuel pouvoir d’Aserjuco fomenter ses coups d’état foireux dans les pays non-alignés avec lui ou qui refusent tout simplement son dictat.

Aujourd’hui encore, et plus que jamais, cette espèce de régime hybride que je qualifierais de démocrature tente, par le biais de sa propagande d’état et de ses nombreuses actions clandestines, de déstabiliser le Grand Kah ainsi que l’Aumérine après que nous soyons parti de l’ONC.

Comme si Aserjuco souhaitait finalement nous faire chèrement payer le prix de cette émancipation et notre refus catégorique d’adopter cette monnaie de singe qu’est l'ecobelt.

Le dernier article en date met quant à lui parfaitement en exergue la jalousie maladive de ces mafieux en col blanc qui tirent les ficelles du pouvoir à Aserjuco lorsqu’il évoque de nouveau ce contrat de vente d’armes du siècle passé sous le nez de l’Alguarena et va même jusqu’à se la jouer donneur de leçons en matière d’économie alors que le Reinaume se hisse tout de même à la huitième position dans le tout dernier classement…

Car en définitive, qu’est-ce que l’ONC !?

Bien que je leur attribuerais bien volontiers un pouvoir de nuisance de quinze points sur une échelle allant de un à dix ! L’ONC, ça n’est jamais rien d’autre que dix pays ! Dix pays sur cent dix-huit ! Dont seulement cinq d’entre eux figurent dans le top ten ! Alors, allons bon… Pas de quoi menacer très sérieusement le tourisme ni même l’économie aumérinoise en soit. Ni cette année, ni l’année prochaine… ni jamais !

Un brin prétentieux et chauvin avec ça ! Il n’y a vraiment qu’Aserjuco et ses idiots utiles pour croire à ce genre de ramassis de conneries servit tout chaud sans même avancer de chiffres tangibles.

Mais c’est bien là que réside tout le danger pour la paix internationale ! En cette capacité qu’à Aserjuco, devenue maître dans l’art du subterfuge et de la subversion, pour convaincre et entrainer avec lui dans le conflit ses vassaux. »


Il est interrompu par le chauffeur qui lui annonce l’arrivée imminente au chalet avant de reprendre d’un ton plus bref encore…

« Bien !

Fermons cette parenthèse avec Aserjuco car de là à ce que son ambassade à Aumérine soit expulsée manu militari il n'y a maintenant plus qu'un seul pas à franchir...

Comptant sur votre professionnalisme à tous, veuillez s'il vous plaît, rester pleinement concentrer sur la présente rencontre et demeurer cette fois-ci très discrets sur un hypothétique contrat de vente d'armes qui serait conclu aujourd'hui ! »


Alors que les kah-tanais commencèrent également à descendre de leur véhicule, le chauffeur ouvrit à son tour la portière afin d'en faire sortir le ministre aumérinois, rapidement suivit par les membres de son équipe. Aumérinois et kah-tanais pouvaient à nouveau échanger ensemble sur le perron du chalet...

« Nous y voilà !

Je vous en prie, très chère, entrez donc vous et votre équipe et installez-vous !

Le confort est plutôt spartiate et la déco digne d'un chalet de montagne resté dans son jus mais vous l'aviez, je suppose, très bien compris...

Nous avons choisi ce lieu pour toute la discrétion qu'il confère par son éloignement de la capitale. »
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« C’est l’endroit idéal pour discuter de ce dont nous devons parler. » La citoyenne eut un sourire en coin, puis acquiesça, amusée. « Et nous nous en serions tous voulu de passer dans votre pays sans en visiter un bâtiment typique. Nous n’avons pas vraiment ce genre de chose dans l’Union. »

Elle fit un petit geste à l’intention de son équipe, qui se déploya pour prendre place du côté de la salle que le chargé du protocole leur avait destiné. On ouvrit des dossiers, des PDA, fouilla dans des pochettes cartonnées. Actée, pour sa part, lança un dernier regard alentour.

« Je ne vous apprends rien en disant que l’Union a été très satisfaite des précédents contrats d’armement signés avec l’Aumerine. Vous suivez l’actualité eurysienne ? Nous avons mené des manœuvres dans la proximité de notre base navale à Carnavale. Autant vous dire que votre technologie a fait forte impression. »

Elle se dirigea à son tour à l’intérieur, attrapant d’une main un porte-document que lui tendait l’une de ses aides.

« Ma foi. Je ne sais pas à quel point votre gouvernement souhaite rester discret. Le Grand Kah aime à rappeler ses liens d’affaire avec le monde capitaliste. » Encore des guillemets, faits de sa main libre. « Mais la situation politique étant ce qu’elle est nous comprendrions que vous préfériez éviter toute… Publicité de notre part. Ce qui importe vraiment c’est que nous avons une fois de plus besoin de vos services experts. L’Union a initié une nouvelle phase du développement de ses moyens de dissuasion maritime. Nous allons acquérir un certain nombre de porte-hélicoptères étrangers pour les reconvertir en appareils de chasse au sous-marin. Et, c’est ce qui vous concerne, nous espérions comme je vous le disais dans notre précédent appel, acheter des sous-marins supplémentaires pour assurer la paix dans nos territoires les plus isolés. »

Elle croisa les bras et siffla entre ses dents.

« Sale situation, mais rien dont on ne saurait se sortir. À ce propos le courage de votre gouvernement a impressionné à la maison. On ne s’attendait pas à ce que vous quittiez l’ONC. C’était courageux de votre part. Il faudra que l’on étende le champ de nos coopérations, certains analystes craignent que les gouvernements de l’Organisation ne cherchent à vous blacklister économiquement. Si cela devait se produire il est évident que vous avez des alliés tant le bloc libertaire et, aussi, dans ce troisième monde qui s’est dressé pour nous soutenir lors des derniers évènements. »

Puis, enfin, elle prit place à la table, ouvrit la pochette et fit émerger un porte-plume d’une poche intérieure de son veston.

« Mais revenons-en aux submersibles. Y a-t-il eu des changements dont vous devriez me notifier depuis nos discussions préliminaires ? »
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Toutes les délégations prirent rapidement place autour du foyer tiède placé au centre de la pièce…

« Je suis ravi d’apprendre que nos navires, je veux bien entendu dire vos navires maintenant, remplissent pleinement le cahier des charges pour lequel ils ont été mis à flot.

[…]

Effectivement, je ne suis pas véritablement au fait de toute l’actualité eurysienne. Notre nation se voulant neutre avant toute chose et ne prenant donc pas part aux débats qui se tiennent en dehors de nos frontières… Hormis quelques dossiers marginaux qui requiert malgré tout notre attention.

[…]

Si nous mettons ainsi un point d’honneur à tout ce mystère entourant ce sommet, c’est parce que certaines nations cadres de l’ONC, particulièrement hostiles à notre égard et au reste du monde non aligné avec leurs principes idéologiques, n’attendent que l’ombre d’un prétexte pour tenter de justifier d’éventuelles sanctions économiques ou une intervention armée à notre encontre…

Après tout, qui sait ce que ce couple DIVIGRACIA et SILVERTRUPP pourrait faire pour tenter d'instrumentaliser la grande majorité silencieuse et malléable de cette organisation…

Il y a déjà un précédent à tout ceci, c’est l’exemple du Prodnov où seulement une poignée de va-t’en guerre s’est octroyé le droit de planifier des opérations militaires sous l’égide de l’ONC. Renonçant de fait à vouloir exploiter les autres recours possibles. Ce dans le mépris le plus complet de leurs partenaires, insultant la diplomatie de chacun.

Là aussi, ce n’est pas sans nous rappeler une certaine décision prise par Aserjuco d’envahir le Varanya sous couvert d’une action humanitaire… Alors que la transition pouvait se faire pacifiquement. Chaque fois, Aserjuco comme Pemberton pour ne citer que ces deux larrons là, nous ont démontrés qu’ils préféreront employer la méthode brutale plutôt que le dialogue.

Cela dit, de telles mesures sonneraient comme étant parfaitement grotesques et démesurées, dans la mesure où le reinaume, étant radier de ses registres, demeure complétement libre de mener sa politique étrangère tout comme il l’est également dans le choix de ses importations et de ses exportations. Comme d’ailleurs chaque état se revendiquant souverain et indépendant…

De plus, l’ONC n’a de légitimité à sanctionner que ses membres. Tout pays n’ayant pas ratifier leur charte n’a aucune raison de respecter leurs dogmes et leurs principes… Néanmoins, rester ainsi discret sur nos intentions et sur nos échanges témoigne, de notre point de vue en tous les cas, que nous respectons les institutions, même cet organisme pour qui nous ne lui devons absolument rien !

[…]

Tout cela pour en arriver à la conclusion que vous pouvez bien entendu compter sur nos savoir-faire en matière de construction navale. Et que pour l’ONC, intenter des mesures de rétorsions contre l’Aumérine enverrait à coup sûr un très mauvais signal à la communauté internationale en plus de renforcer l’idée que nous nous faisons d’une organisation hostile à la notion de libre-échange. »


Sans pour autant détourner le regard, il attrapa le tisonnier qu’il agita dans les braises rougeoyantes afin de raviver les flammes du foyer…

« Nous pourrions justement aborder ensemble les questions de cette coopération étendue… A vrai dire, nous serions intéressés par vos possessions outre-mer qui nous permettrait d’allonger le rayon d’action de nos bombardiers et de ravitailler nos navires éloignés de leurs ports d’attache. Conditions sine qua non pour nous positionner parmi les thalassocraties. A vous de nous dire ce que vous souhaiteriez en échange d’un accord de passage de nos troupes dans certains de vos territoires ultramarins et pour le bail à perpétuité permettant l’installation et l’utilisation de bases opérationnelles avancées sur le sol kah-tanais… Nous restons tout ouïe à vos propositions. »
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« On ne peut pas vous donner tort. Mon gouvernement partage vos constats. Et considérant la pression considérable qu’exerce la simple présence de l’Alguarena à nos frontières, nous n’osons imaginer la corde particulièrement raide sur laquelle vous devez marcher, vous dont les frontières sud comme nord sont encadrées par une potentielle opposition. » Elle se passa une main sur le front et le frotta avant d’acquiescer. « Mais il est indéniable que votre démocratie est un modèle reconnu de stabilité et de neutralité. Véritablement l’un des joyaux d’Aleucie. Il serait inenvisageable pour l’ONC de tenter quoi que ce soit, soit ouvertement soit par des biais détournés de nature à générer une situation critique. »

Elle marqua un temps et s’avança un peu, coudes posés sur ses jambes, pour profiter du feu. Il y avait quelque-chose dans l’ambiance générale des lieux qui lui rappelait la longue période où elle étudiait puis enseignait à l’étranger, avant que le Grand Kah ne redevienne une démocratie. Elle avait passé le gros de son temps dans des pays froids. Si froids, qu’à son retour sur ses terres natales, elle les avait trouvés étouffante de chaleur. Situation ambiguë dont il lui restait une grande considération pour les poêlons à bois, et le charme rustique d’un chauffage traditionnel en période froide.

« Vous savez, les communes exclaves ont leur indépendance. Formellement parlant, le Grand Kah n’est pas une nation unitaire. C’est un regroupement de petits entités. Bien entendu celles-là délèguent des responsabilités et des pouvoirs à l’organe confédéral que j’incarne ici. En temps normal je devrais donc vous répondre que votre demande est compliquée. Mais le temps sont loin de l’être, c’est une chance. » Elle continua un peu de fixer le feu, puis fronça les sourcils et se redressa.

« À vrai dire ces communes exclaves sont celles qui ont poussé la Confédértion à acquérir une flotte moderne. Elles savent très bien que nous faisons affaire avec le Reinaume. Dans l’affaire leur commissaire délégué – si communiste qu’il soit – est peut-être le plus avant-gardiste de nos militaires. Sur le principe, l’installation de bases sur nos territoires serait accepté par la population et par leurs instances représentatives. L’aspect le plus compliqué serait la notion de bail emphytéotique. » Elle avait prononcé le mot avec un fort accent elpide.

« Techniquement le Grand Kah est disposé à louer ses terres. Mais notre système ne permet pas un cas de figure où il serait inenvisageable pour une commune de pousser des locataires vers la sortie. Nous pourrions cependant trouver un compromis, tel qu’une compensation financière de la Confédération, qui mitigerait la potentielle instabilité liée à une situation telle que celle dont je vous parle.

Nous pourrions évidemment vous proposer de vous laisser obtenir ces concessions en échange des sous-marins dont nous parlions, mais je crois que ça serait manquer une opportunité clef pour nos deux nations. Ce qui intéresserait le plus l’Union, à l’heure actuelle, ce serait la possibilité d’investir en Aumérrine. Nos capitaux sont à la recherche de déboucher extérieures et de marchés. Sur le plan concret cela initierait une dynamique mutuellement profitable. L'alternative serait d'établir un prix qui couvrirait une location sur une grande période de temps, un prix qui pourrait effectivement correspondre à celui des sous-marins. Mais bien que j'apprécie les principes de troc je crois que cette aurait pour effet d'empêcher un partage de devises dont nos deux économies pourraient jouir.
»
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Bennett FRAZER n’eut finalement d’autres choix que de s’accommoder des réponses de son homologue dont les arguments faisaient mouche toutefois…

« Eh bien, vous avez sans doute raison !

Ce type d’accord ne serait probablement pas la solution la plus adaptée et équitable pour les deux parties. Néanmoins, la coopération peut se poursuivre de plein d’autres manières…

Par exemple, nous pourrions commencer ensemble la rédaction d’un mémorandum d’entente !

Ce document informel plutôt que formel ne vincule aucune des deux parties et aurait cependant le mérite de transposer par l’écrit les conditions ainsi que les intérêts pour chacune des parties prenant part à cette coopération. Il n’aurait également aucune valeur juridique et n’engagerait donc pas les parties en cas d’échec, mais signifierait officiellement au monde le début de notre coopération.

Bien que je sois obligé de reconnaître que je préférerais conserver une certaine discrétion vis-à-vis de certaines puissances rongées par l’ambition, et ce tant que nos intérêts réciproques n’auront pas été clairement clarifiés avec elles. Laissons cela de côté pour le moment et étudions d’autres options…

[…]

Parmi les idées qui me viennent à chaud, les accords de coopération militaires peuvent prendre plusieurs formes comme celle de l’entraînement et la formation de soldats amis dans un domaine de compétence ou à l’utilisation d’un équipement bien spécifique.

Nous pouvons également organiser périodiquement la tenue d’exercices militaires visant à évaluer les champs de possibilités entre nos forces armées et renforcer entre elles une certaine cohésion.

[…]

Vous me parliez d’investissements ! Là aussi, c’est une approche tout à fait envisageable…

Tout dépend dans quelle proportion votre nation entend bien investir dans notre économie, mais si j’ai un conseil à vous donner, le secteur de la défense serait prometteur !

Nous y trouverions tous les deux entière satisfaction, l’investissement bien entendu pour notre part, mais pour vous la garantie de disposer des équipements de pointe dont vos armées ont cruellement besoins sans débourser vos précieux deniers à chaque occasion. Tenez, regardez-ça ! »


Il fouilla brièvement dans son attaché-case pour en sortir un document estampillé du sceau de la défense aumérinoise…

« En tant qu’actionnaire majoritaire, le gouvernement aumérinois gère les actifs de ce segment désormais, et la première des choses que nous souhaitions mettre en place est ce plan d’investissement majeur pour permettre à notre département de la recherche et du développement de rester compétitif face à nos principaux concurrents que sont l’Alguarena, entre autres !

Mais aussi permettre de développer et d’élargir l’offre au sein de notre branche export !

Seulement voilà… Avec l’échec de l’entente BOREALIA dont les membres qui, pour la plupart, n’ont absolument pas compris tout l’intérêt qu’il y avait pour les aleuciens d’acheter et d’investir en interne plutôt que d’acheter alguareno et ainsi creuser l'écart entre nos continents respectifs, nous devons nous rendre à l'évidence et faire l'amère constat que nous manquons d’investisseurs capables d’offrir les garanties suffisantes… Sauf si, bien évidemment, cela pouvait intéresser le Grand Kah !

Je ne doute aucunement des capacités du Grand Kah qui nous l’a maintenant démontré par l’acceptation d’un premier contrat historique couvrant l’achat de vingt-deux navires de guerre…

De plus, le Grand Kah semble vouloir intensifier ses efforts également en matière de militarisation de sa société et en cela, justement, vous y trouveriez également sur le long terme votre bénéfice à investir chez nous plutôt que chez la concurrence !

Nous serions même prêts à étendre le prochain contrat avec un accord de maintenance qui prévoirait de remplacer automatiquement les pièces qui feraient défaut et garantir ainsi la disponibilité opérationnelle de vos équipements en permanence. Cela inclurait également les mises à niveau technologiques lorsque des améliorations seraient techniquement disponibles.

[…]

Qu’en dites-vous ? »
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[hrp] Encore pardon pour le temps que ça aura pris ! [/hrp]


« Des exercices militaires serait du plus bel effet. Considérant les menaces régionales et internationales nos soldats ont un besoin urgent d'entrainement en territoires nordiques. Sans parler des possibilités d'opérations conjointes, de manœuvres navales, aériennes, de simulations de débarquement telle que celle effectuée avec les forces du Péronas, et je suis sûr que vos propres troupes apprécieraient recevoir un entrainement au combat en terrain... Équatoriaux. Oui, dans l'ensemble je ne trouve rien à y redire. »

[…]

« Le projet Borealia partait effectivement d’une bonne idée, il est dommageable que les nations de la région n’en aient pas saisi l’intérêt immédiat. Quoi qu’il en soit cette… Chambre d’écho économique, si vous me permettez la comparaison, intéresserait tout à fait l’Union. Oui. Il est temps de créer des marchés alternatifs facilitant l’enrichissement de nos partenaires et alliés, plutôt que des mêmes quelques grandes puissances impérialistes. »

Elle tapota la table du bout de ses doigts puis acquiesça vivement.

« Vous aurez vos bases militaires et vos accès privilégiés en Océan d’Espérance. À ce stade on peut dire sans se tromper qu’une plus grande capacité de déploiement Aumérinoise est une plus grande capacité de déploiement pour la paix, de manière générale. L’Union est ravie d’avoir trouvé des amis si loin au nord.

Eh bien je ne vois pas quoi ajouter. Ratifions, mon cher ami. Ratifions et serrons-nous la main.
»
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