Grand Kah
1 – Le statut de la peine de mort
La charte constituante du Grand Kah prévoit encore le recours à la peine de mort dans certains cas. De nombreuses communes ont abolies la peine de mort sur leur sol propre, mais l’Égide (principal service fédéral de police judiciaire et service de renseignement intérieur de l'Union) peut mener l'extradition un individu vers la commune spéciale d'Axis Mundis, sous la juridiction des institutions fédérales, si la Magistrature l'exige. Ainsi, un individu jugé dans une commune ayant abolie la peine de mort peut théoriquement être extradé et jugé à l'échelon confédéral, et cette-fois être condamné à mort.
Ce cas de figure n'est possible que si la situation le justifie. Par exemple, si un individu a sévi dans plusieurs communes ou si les actions pour lesquelles il est jugé ont affecté plusieurs communes, et les poussant à réclamer un jugement confédéral plutôt que local.
2 – Position de la société sur la peine de mort
La possibilité pour les kah-tanais de faire abolir la peine de mort à l'échelle de leur commune a eut pour effet paradoxal de limiter l'apparition de tendances abolitionnistes, celles-là se limitant dès-lors à une action localisée.
De manière générale les kah-tanais sont favorables au maintien de la peine de mort tel qu’appliqué au sein du Grand Kah (87%), chiffre qui a nettement évolué depuis les évènements de 2004 (qui seront détaillés plus bas). 4 % n’ont pas d’avis et 9 % y sont opposés. Une tendance réformiste tend à se développer, souhaitant limiter la peine de mort à un usage confédéral et pour des crimes particulièrement graves ou impliquant la sûreté de la confédération. C'est déjà en pratique ce qui se fait, bien que la loi ne limite pas l'application de la peine de mort à ces cas de figure.
Dans l’imaginaire populaire Kah-tanais, la peine de mort est un élément essentiel de la culture autochtone. Traditionnellement, les peuples pré-coloniaux sacrifiaient des prisonniers de guerre et des volontaires pour des motifs religieux. Si ces pratiques ont depuis partiellement disparues, remplacées par des sacrifices d’animaux, de nourriture ou de biens, elles ont été en grande partie intégrées aux interprétations les plus mystiques du « Kah », idéologie et système politique de l’Union depuis la révolution de 1784. Une partie de la population conserve l’idée mystique selon laquelle les sacrifices aideraient à rééquilibrer le destin du monde et du peuple. Plus prosaïquement, la peine de mort est employée de façon rare. Son utilisation est d’autant plus notable que la justice kah-tanaise est notoirement réhabilitatrice. Si les crimes les plus graves sont habituellement punis par l’ostracisme, les individus représentants un danger pour la société et le Kah, soit par leur engagement personnel, soit par leurs actions, sont exécutés.
Ainsi, la peine de mort est comprise comme une nécessité de défense nationale, appliquée pour de bonnes raisons. Traditionnellement, son application est un moment de communion populaire donnant lieu à des festivités dans le plus pur esprit des fêtes pré-coloniales. Les juges kah-tanais portent d’ailleurs encore le titre de prêtre-juge, mettant en avant leur autorité tant légale que morale, et leur droit spirituel à exécuter la peine capitale.
3 – Histoire de la peine de mort
Si l’on s’en tient à l’histoire du Grand Kah en tant que tel, donc commençant lors de la guerre d’indépendance de 1774, la peine de mort a déjà une longue et tragique histoire derrière elle. Outre les guerres fleuries et les sacrifices humains organisés dans les royaumes et cités-État pré-coloniales, le système de loi ayant dominé la colonie est celui des colons nazumis, appliquant une loi féodale basée sur une notion stricte d’honneur et de respect du suzerain : dans cette conception des choses, la vie humaine n’a pas de valeur intrinsèque. Les châtiments physiques et les exécutions sont légions pour maintenir l’ordre dans une colonie de plus en plus instable. Au début de la guerre, l’une des priorités des révolutionnaires et d’établir une constitution et des lois régissant l’application des peines. Cette période s’accompagne cependant d’une véritable terreur révolutionnaire visant les potentats coloniaux, les grands propriétaires terriens, les contre-révolutionnaires, les espions étrangers présumés ou avérés, etc. De nombreuses personnes sont capturées puis exécutées. Dans ce contexte la peine de mort est comprise comme légitime dans l’application du contrat social liant les citoyens de la jeune union entre eux : elle est légitime par son effet dissuasif, son application « parcimonieuse » (en comparaison à l’arbitraire colonial) et le but qu’elle défend : protéger les libertés nouvellement acquises.
Les méthodes d’exécutions les plus appliquées au début de la révolution sont la décapitation (à l’aide de hache), la pendaison et le peloton d’exécution pour les militaires et les hauts-gradés. Les autochtones ralliés aux révolutionnaires utilisent aussi massivement les sacrifices rituels, réhabilitant pour se faire leurs vieux temples d’où on recommence pour la première fois depuis bien longtemps à arracher des cœurs.
Un outil sera finalement mis au point pour faciliter le processus d’exécution, réduisant à la fois le nombre d’exécution bâclées (s’y reprendre à plusieurs fois pour décapiter un individu, etc.) et le temps nécessaire pour éliminer les ennemis de la nouvelle société : la Guillotine. Elle ne quittera plus le sol du Grand Kah.
À partir de là l'Histoire kah-tanais suit un même motif concernant la question des exécutions : en 1801, les conservateurs présents à la Convention Nationale organisent un coup d’État mettant au pouvoir le général Jin Sukaretto. Cette dictature, surnommée l'Empire Paltoterran, ne connaît aucune période de paix. Elle centralise le pouvoir, mène de grandes guerres continentales et fait face à une constante guérilla révolutionnaire qui l'amènera finalement à sa fin. Durant cette période, les opposants politiques sont muselés, assassinés, et les exécutions mises en scène massivement. On interdit les exécutions traditionnelles autochtones pour se concentrer sur l'usage des pelotons d'exécution, progressivement abandonnés au profit de la guillotine pour répondre aux pénuries de munition entraînées par la guerre.
Le cycle sanguinaire continue après la chute de l'Empie : la Seconde Confédération, quoi que sociale et démocratique, consolide son pouvoir en éliminant une bonne fois pour toutes la "réaction", tant pour se venger de la période impériale que pour éviter qu'elle ne se reproduise. Une terreur rouge s'organise, donnant lieu à de nombreux débordement et à de nouvelles exécutions menées par de nouveaux tribunaux révolutionnaires. Cette période d'intense violence se calme cependant progressivement et dès 1819 la situation retourne à la normale, avec un usage de la peine de mort même bien inférieur à celui des autres pays de la région à la même période.
En 1848, le Grand Kah est envahi par une alliance de pays souhaitant éviter que sa politique socialiste n'inspire des révolutions. Cette période ouvre celle du Second Empire, qui durera jusqu'à 1864 et se montrera bien moins nationaliste ou violent que son aîné. L'empereur Obuo Sukaretto respecte les cultures autochtones et défend le syncrétisme installé durant la révolution. Sa principale action est de libéraliser l'économie et de réduire la démocratie directe, lui préférant un parlementarisme représentatif. En 1864, la révolution de velours aura lieu. Elle ne fera pas un mort (pas même l'Empereur et ses ministres, qui recevront le droit de rester simples citoyens de l'Union), et amènera à une prise de pouvoir sans violence des révolutionnaires : en effet, le second empire n'exécutait pas plus que la seconde confédération, préférant enfermer ou contrôler ses opposants par des moyens administratifs. Les kah-tanais de l'époque ne lui tinrent, étonnamment, pas rigueur de sa politique "autoritaire". La seconde Confédération fait cependant face aux guerres de réaction - suite de guérillas monarchistes initialement démarrée par peur d'une nouvelle terreur révolutionnaire. Cette guerre donnera lieu à de nombreuses exécutions rituelles ou par la guillotine d'ennemis de la révolution capturés. (Ceux qui se rendent sont plutôt ostracisés ou envoyés en travaux généraux pour une période donnée). Cette période de violence relative s'étendra jusqu'aux années 1930 où elle évoluera en un bref mais intense conflit mené par les mouvements fascistes internationaux, qui tentèrent une invasion du Grand Kah. Là encore, de nombreux prisonniers étrangers furent exécutés.
De la fin de des Guerres de réaction à 1985, le Grand Kah n’exécute presque plus personne. Sont exécutés quelques terroristes, des tueurs en série. La société est cependant de moins en moins violence et le contexte politique et économique extrêmement favorables aident à apaiser la société au point qu’il fut même envisagé par le gouvernement des années 70’ d’abolir la peine de mort à l’échelle confédérale. Cela ne fut finalement pas appliqué, de nombreuses communes préférant conserver cette option tout en abolissant la peine de mort sur leur sol même.
En 1985, le gouvernement Izcale et d’autres financent un nouveau coup d’État. Cette junte, divisée entre ses pendants monarchistes, fascistes et capitalistes, surpassera largement les précédentes dans son incohérence politique et sa brutalité envers la population. Elle ne connaîtra jamais la paix sur le plan intérieur. De 1985 à 1992 on compte plusieurs centaines de disparitions forcés, assassinats, exécutions sommaires et un usage de la peine de mort extrêmement étendu. Sans surprise, lorsque les communalistes reprendront le pouvoir en 1992, ils mettront en place une brève mais intense terreur : jugés lors d’immenses procès, les hauts fonctionnaires, cadres de l’armée, ministres et capitaines d’entreprise du régime militaire seront jugés les uns après les autres. Environs 120 personnes finiront en intérêts généraux, 45 seront frappés d’ostracisme et 57 seront exécutés sur les grandes pyramides d’Axis Mundis. Le personnel intermédiaire ne sera cependant pas éliminé.
Depuis 1992, les exécutions sont peu employées, mais les souvenirs frais du coup d’État et l’histoire particulièrement mouvementée de l’Union poussent les kah-tanais à se montrer très favorables à une politique de prudence, préférant en somme exécuter les ennemis avérés de l’Union que se montrer humaniste au risque d’à nouveau subir une dictature.
Ainsi, en 2004, lorsque l’Égide met à jour un complot « Synarchiste » visant à prendre le contrôle de l’administration confédérale par un groupe d’intérêt capitaliste issue de certains des clubs les plus centralisateurs de l’Union, les 24 conjurés seront tous exécutés, ce qui ne sera pas vécu comme un drame mais comme une victoire et une immense liesse par une population rendue très sensible –- peut-être même paranoïaque – aux questions de sécurité intérieur du système. En 2008, une tentative par des terroristes d’assassiner les membres du gouvernement récemment élu donne lieu à une fusillade avec les forces de l’ordre et à une grande enquête dans laquelle un grand réseau de responsabilité fut établi. La question de l’exécution des terroristes n’a pas encore été tranchée, notamment, le juge chargé de l’affaire considère que plusieurs d’entre eux ne sont pas « irrémédiablement opposés à l’Union », méritant ainsi une chance de « simplement » passer plusieurs décennies en réhabilitation.
Accessoirement, une guérilla menée par des terroristes fanatiques damanns (religion celtique) dans les jungles du sud de l’union alimente les pyramides régionales en sacrifices, les combattants capturés ne s’y opposant pas d’une part, et leur fanatisme religieux avéré les rendant impropres à toute réinsertion de l’autre. Un compte ainsi chaque année deux à trois sacrifices issus de cette guerre larvée.
4 – La peine de mort automatique
Tout criminel kah-tanais doit être jugé par la Magistrature qui doit prendre en compte l contexte et l'historique de l'accusé pour définir sa peine : en d'autres terme il n'existe pas de peine applicable automatiquement au sein de l'Union.
5 – Méthode d’exécution de la peine
Les exécutions les plus pratiques sont respectivement la décapitation par guillotine et le sacrifice rituel (cardiectomie au sommet d'un temple). Cette dernière méthode est généralement réservée aux ennemis mortels de l'Union ou aux dignitaires ennemis de haut-rang et, dernièrement, c'est à peu près tout ce que la Magistrature a eu à faire exécuter, ce qui se traduit par une nette recrudescence des cardiectomies par rapport à la décapitation. Les méthodes de cardiectomies variaient d'une région à l'autre avant la colonisation, et il existe encore différentes méthodes dans l'application selon les régions, les prêtres-juges etc. A noter que le sacrifice est culturellement considéré comme un honneur et une forme d'expiation. Les condamnés à mort ont aussi droit de demander des anti-douleur ou des anxiolytiques avant d'être exécutés.
Le sacrifice est aussi utilisé comme forme d'euthanasie, particulièrement festive, mais c'est un autre sujet.
En temps de guerre et en théâtre d’opération extérieur, les exécutions se feront plutôt par peloton s'il n'est pas possible de rapatrier les condamnés au Grand Kah pour qu'ils y soient pris en charge par la Magistrature.
6 – Les conditions de détention avant exécution
Les prisonniers kah-tanais sont bien traités. La justice de l'Union se veut humaine et portée sur la réhabilitation. Même si les condamnés à mort ne seront évidemment pas réintroduis en société, ils jouissent tout de même d'un certain confort et de nombreux droits parmi lesquels ceux de voir leurs proches et de faire appel à un scribe issu de l’ordre des tlacuilo. Le délai d’attente est cependant assez court après la condamnation, en trois à quatre mois.
7 – Les crimes capitaux, les crimes passibles de peine de mort : théorie et pratique
Les crimes de sang, le trafic d'organes, d'animaux en voie d'extinction, d'armes ou d'organes, le terrorisme, la "grande corruption", visant à systématiquement détourner les institutions de la Confédération pour des gains personnels (on parle par exemple d'un réseau de corruption au plus haut niveau de l’État), complot contre la sûreté publique (préparation ou réalisation d'attentats), espionnage, collusion avec les forces ennemies etc.
Dans les faits la peine de mort est assez peu appliquée, sinon comme outil politique visant à envoyer un message clair aux ennemis de la Confédération : depuis la dernière révolution on a surtout exécuté des individus complotant directement contre le système kah-tanais, ou ayant pris les armes contre ce dernier. La plupart des autres crimes graves donnent plutôt lieu à des ostracisations ou des peines réhabilitatrices.
8 – Conditions éventuelles concernant les personnes mineures, les femmes enceintes, les personnes âgées et autres particularités
Les enfants ne peuvent pas être condamnés à morts. Les femmes enceintes sont avortés si le conjoint, le père ou la commune ne désirent pas s'occuper de l'enfant, sans quoi la grossesse ira à son terme avant l'exécution. Dans les faits, la cellule familiale kah-tanaise est très ouverte et l'éducation des enfants est le rôle de toute la société : ainsi, il serait culturellement inenvisageable que la commune d'origine de la mère n'accepte pas de prendre l'enfant à sa charge.
Les maladies mentales n'impactent pas toutes la peine des condamnés : dans les faits, si elles ne peuvent pas être traitées, ou si la responsabilité de l'individu est démontrée en dehors de ses troubles, il sera tout de même exécuté. Sans quoi il sera pris en charge dans un centre spécialisé.
9 – Statistiques de la peine de mort
Depuis 2000, si l'on excepte les exécutions liées au Complot Synarchiste, on compte une moyenne de 12 condamnés à mort par an. Cette tendance est assez fixe mais on s’attend à ce qu'elle baisse drastiquement avec la défaite annoncée des guérilleros damanistes dans le sud du pays.