Ambassade Lutharovienne - Page 3

J'espère que cette lettre vous trouvera autant en forme que lorsque je vous ai quitté la fois précédente. Je garde toujours de bons souvenirs de mes voyages en Lutharovie, quand même bien ceux-ci soient parfois un peu houleux. On n'est agréablement stimulé que dans l'adversité, n'est-ce pas ?

La raison qui anime ce message, aujourd'hui, est vieille comme notre relation. Plus que jamais, le Syndikaali et ma personne sont convaincus de la nécessité de mettre en place pour les nations frontalières de l'océan du nord des institutions et des garde-fous politiques afin de gérer collégialement leurs dissensus.
Si jusqu'alors ces questions étaient purement théoriques, la crise du Prodnov et le massacre d'innocents à nos frontières accélère cet agendas. Je sais que tout le monde n'est pas favorable à cette idée en Lutharovie mais les circonstances ont changé me semble-t-il, et vous savez comme moi qu'en matière de géopolitique, c'est souvent la géopolitique qui décide pour nous.

L'un des défis majeurs que notre région doit relever est la disparité flagrante de ses idéologies et de ses régimes politiques. Tout nous oppose et pourtant, le Syndikaali et la Lutharovie marchent main dans la main. Les ponts sont possibles pour qui s'en donne les moyens. Ce conseil que j'appelle de mes voeux, serait l'un de ces ponts. Non pas pour gommer des différences qui de toute façon sont flagrantes, mais pour les gérer, collectivement, et en bonne entente.

Ne pas s'engager dans ce processus, c'est prendre le risque que certains d'entre nous agissent unilatéralement et de ce fait, embrase la région. Une allumette qui mettrait le feu au poudre et que ne se priveront pas d'exploiter nos ennemis, soyez-en sûrs, car chaque conflit, chaque dissensus serait alors une porte d'entrée pour les agents extérieurs et pour l'ingérence de l'étranger.

Tuons le danger dans l'oeuf, dotons nous d'institutions collégiales capables de gérer les crises et faisons du Prodnov notre premier chantier.

J'espère que vous allez bien, pour ma part je n'ai pas une seconde à moi ces derniers temps ! C'est bien dommage, le temps libre est le sel de la vie et le carburant d'une existence dynamique, on ne travaille bien que reposé.

Puisque la conclusion du conflit prodnovien semble désormais actée, je viens vous voir pour discuter de l'avenir, si vous m'excusez le côté sentencieux d'une telle phrase d'accroche. Malgré la fracturation de la région qu'imposent les intérêts impérialistes de l'ONC, celle-ci n'efface pas des siècles d'histoire où le Prodnov fut une terre unie.
Nous souhaitons préserver cet héritage et je souhaitais vous faire part de notre souhaite d'abolir les frontières entre la République de Peprolov et celle de la région que vous administrez aux alentours de Bridjesko.

Abolir est un mot lourd de sens et de sémantique, clarifions-le : je comprendrais que vous vous opposiez à la libre circulation des biens marchands entre ces deux territoires, cela afin de ne pas enrayer votre modèle économique planificateur. Cependant, si l'idée vous intéressait, sachez que nous sommes ouverts à trouver des traités d'échange entre nos régions, de façon à satisfaire et dynamiser chacune.
Compte tenu du fait que la marine pharoise continue de tenir les côtes de l'ancien Prodnov, il nous sera très facile de mettre en place des liaisons maritimes entre Peprolov-port et toute autre ville que vous jugerez propice aux exportations et importations.

Plus cruciale est sans doute la question des échanges humains : il est cruel de laisser des familles, déjà déchirées ou endeuillées par la guerre, être séparée par une frontière administrative.
J'irai jusqu'à souhaiter la mise en place de passeports communs, rappelant l'ancien Prodnov, pour les ressortissants de ces régions. De cette manière, nous réunirons un peuple qui aurait dû rester indivisible, si les coups du sort et des ambitions aventurières de certaines nations ne l'avait coupé en deux.

Dites moi ce que cette idée vous inspire.