11/02/2016
06:13:15
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Sommet Caribeña—LIBERALINTERN

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London port

Alors que l'U.I.C.S. Loduarienne attire les États socialistes et les partis communistes mondiaux, l'Internationale Libertaire, elle, continue d'attirer les démocraties comme le montre la dernière candidature faite à l'attention du Haut Château pour les Liaisons.

Petit État de la côte Nord-Est du Paltoterra ; la République de Caribeña est une république socialiste qui, malgré son système de parti unique — compensé par la présence de trois députés anarchistes à son Assemblée nationale — couplé à la pauvreté pour l'instant inhérente au pays, reste malgré tout une défenseuse des libertés fondamentales.

Sur le parvis de l'hôtel de ville de Kotios, Jesper Leusink, le représentant Zélandien au LiberalIntern, attendait les invités du jour avec cette pensée en tête. Peut-être que les Caribeños ont la volonté d'intégrer l'Internationale justement pour sortir de leur situation économique et peut-être même de leur système de parti unique, qui sait ?

Quoi qu'il en soit, ces interrogations sauront être répondues à ce sommet par les officiels Caribeños.

Pour une fois le Soleil brille sur la commune ; l'hôtel de ville est toujours autant agité, les greffiers prennent leurs aises, les théières et les cafetières sont déjà en place ; Le diplomate Zélandien est seulement habillé d'un veston beige par-dessus une chemise blanche aux manches retroussée et d'un pantalon à épingles, assorti au veston, pour faire face à la chaleur de cette fin d'août. Arrivent enfin les Caribeños missionnés pour représenter leur pays à ce sommet.

Après les salutations d'usage, Jesper les guide dans les couloirs et méandres de l'hôtel de ville ; jusqu'à un salon, dans un style encore bourgeois, vestige de la période Francisquienne, dont le balcon est encore aménagé d'un potager après des années d'indépendance et de luttes face à l'oppression et la Réaction.
Une fois chacun installé, le représentant Zélandien entame la réunion.

« — Bien. Si tout le monde est installé, j'imagine que nous pouvons commencer. Thé ou café ? Vous pouvez vous servir quand bon vous semble, les boissons sont en libre-service ici.

Traditionnellement pendant ce genre de sommet introductif, il convient de demander quelles sont les ambitions de l'État candidat dans sa région, son continent, le Paltoterra dans votre cas, ainsi qu'à l'international ?
Qu'attend votre république de notre Internationale ?

Par ailleurs, où et comment se positionne Caribeña dans le LiberalIntern et à l'international ? Isolationniste ou Internationaliste ? Ou bien encore interventionniste ?

Pardonnez mon ton inquisiteur. Ce n'est pas là mon but. Seulement il nous est important de savoir ce genre détails ; en particulier dans un moment de grands changements comme la réorganisation de notre formation à la suite de la perte de l'un de ses éminents membres. »
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Javier Delgado

Javier Delgado venait de poser le pied dans la ville de Kotios. On lui avait donné rendez-vous à l’hôtel de ville pour y rencontrer Jesper Leusink, le représentant zélandien au Libertalintern. Bon, ce qu’il faut savoir sur Delgado, c’est que c’est un sacré personnage. Un grand révolutionnaire, qui aurait commis, dit-on, des actes que l’on suspecte d’assez terribles sur de nombreux anciens colons issus du régime de la dynastie Pareja, ceux qui gouvernaient Caribeña avant la Révolution.

De ce fait, Javier Delgado n’a rien d’un politicien professionnel, ni d’un diplomate, loin s’en faut. Non, lui, c’est un agriculteur de tabac qui s’est retrouvé, presque malgré lui, à devenir un redoutable guerrillero durant cette période dont tout le monde sait désormais les tenants et aboutissants. C’est quelqu’un de fougueux, avec le sang chaud, un homme qui ne se laisse pas abattre. Et pourtant, contre toute attente, il avait fini par rejoindre les proches du Camarade Président Sol Márquez en 1995, pour intégrer la sphère politique et mener la Révolution à l’échelle de tout le pays.

Depuis, Delgado avait, en grande partie, repris sa vie d’avant dans le domaine agricole, un retour au service de la terre. Bref... Mais alors, que faisait-il ici, à Kotios, pour un sommet d’une importance incontestablement capitale? En fait, vêtu de sa simple veste noire, il avait été choisi, apparemment sur le vif, par Sol Márquez lui-même, pour représenter la voix la plus authentique de Caribeña.

Arrivé donc à l’hôtel de ville, accompagné d’un modeste groupe de collaborateurs – un traducteur, une secrétaire et un garde du corps – Javier Delgado ne tarda pas à se faire remarquer. Sa voix rude, son accent rauque typiquement caribeño, étaient si marqués que même son traducteur peinait parfois à le saisir. Impossible de faire plus authentique.

Après les salutations d’usage avec son hôte zélandien, Monsieur Leusink, Delgado s’installa dans cette maison bourgeoise, imposante à s’envoirer. Il ne se fit pas prier pour se mettre à l’aise, prêt à répondre aux questions de son interlocuteur au sujet de l’adhésion de Caribeña au Libertalintern.


— Bon, avant tout, je tiens à vous remercier pour votre accueil. Franchement, je n’ai pas l’habitude de me retrouver dans des demeures aussi bourgeoises, mais passons, je vais faire abstraction de ça. De toute façon, on n’est pas là pour ça, pas vrai ? Alors, on va aller droit au but. Moi, je suis là pour représenter Caribeña et parler de son adhésion à votre alliance, cette alliance de camarades.

Je vais être honnête : on a longtemps hésité chez nous, dans l’administration. On s’est dit qu’on pouvait peut-être se contenter de faire notre révolution à l'échelle nationale, et c’est ce qu’on fait depuis 1995, c’est notre priorité, notre chantier. Mais voilà, ça ne suffit pas. On a des ambitions, et pas seulement pour nous. On veut voir cette révolution vivre ailleurs, dans d’autres pays, parmi des peuples qui se battent, comme nous, pour la justice sociale, pour un monde meilleur, pour des valeurs que nous partageons : égalité, justice, dignité.

Chez nous, en Paltoterra, ce n’est pas un continent où il se passe beaucoup de bouleversements, pas comme ailleurs, même si on a vu le Communaterra, ce qu’il s’est passer, on est d’accord là-dessus. On est au courant. Mais ce que je veux vous dire, c’est que notre position naturelle ne peut pas rester repliée sur nous-mêmes. On doit aller plus loin, on doit intervenir à l’international.

Je le sais bien, et je ne me fais pas d’illusions: Caribeña est une nation aux moyens limités. On n’a pas les richesses des grandes puissances politiques ou économiques. Mais on a une conviction solide. Et clairement, on compte sur vous, sur le Liberalintern, pour nous apporter un appui, pour nous aider à développer notre capacité d’action.

Cependant, ne vous y trompez pas… On ne veut pas rejoindre cette alliance juste par intérêt, pour notre développement. Non, ce n’est pas ça. Nous, on veut que cette alliance serve à quelque chose. On veut qu’elle intervienne là où c’est nécessaire, sur les conflits où la dignité humaine est en jeu, sur les champs de bataille où il faut rétablir la justice sociale. Ça, c’est notre combat, c’est notre raison d’être aujourd’hui. Et ce combat, il faut le mener. Il faut agir.

Intervenir, ça veut dire quoi? Ça veut dire aller sur le terrain, aller sur le front si besoin. Et vous savez quoi? S’il y a des premiers volontaires à envoyer là-bas, ce seront les Caribenos. Parce que nous, on sait ce que c’est que de se battre, et on n’a jamais eu peur de défendre ce qui est juste. Alors voilà, Caribeña est prête à porter ce combat avec vous, pour vous, pour tous les peuples qui en ont besoin.


Comme à son habitude, Javier Delgado ne mâchait pas ses mots et se montrait plutôt direct, même si rien de vraiment extraordinaire ne sortit de sa bouche.
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Lin Wei-Zhen écouta Javier Delgado avec attention, un léger sourire en coin, dissimulé derrière sa tasse de thé noir encore fumante. Elle n’était pas du genre à interrompre, encore moins à s’imposer dans une pièce où d’autres parlaient avec force et passion. Elle connaissait bien ce type d’orateur – de ceux qui parlent avec le ventre et dont la sincérité brute traverse chaque syllabe. Delgado n’était pas un politicien poli par des années de diplomatie, c'était le moins qu'on puisse dire, et c'était très bien comme ça.

La représentante kah-tanaise attendit un instant après qu’il eut terminé, puis posa sa tasse avec délicatesse sur la table en bois ciré, elle redressa ses lunettes carrées du bout des doigts et prit la parole d’un ton calme.

« Camarade, il n’y a aucun doute sur la place de Caribeña dans notre lutte commune. Vous n’avez pas besoin de prouver quoi que ce soit à quiconque ici, ni de démontrer votre engagement dans la révolution. Votre histoire parle pour vous. Vous êtes de ceux qui ont mené la guerre nécessaire, et vous avez, en un sens, gagné votre place à cette table bien avant d’y être invité. »

Elle croisa les jambes, s’appuyant légèrement en arrière contre le dossier du fauteuil. Elle n’avait pas le charisme explosif de son interlocuteur, mais n’essayait de toute façon pas de faire mieux que lui.

« Je ne vais pas vous faire un long discours sur la fraternité révolutionnaire. Nous savons pourquoi nous sommes ici. Vous avez choisi de faire de votre révolution une force active : ce choix vous honore. Parce que oui, nous savons tous ici que l’isolement est un luxe que nous ne pouvons plus nous permettre. »

Elle fit rouler la manche de son imperméable pour ajuster un bracelet. Elle acquiesça.

« Intervenir, donc. Nous sommes bien d’accord. Vous n’avez pas besoin de nous convaincre que la révolution ne doit pas être un concept abstrait ou une doctrine enfermée dans des frontières. Le Grand Kah, que je représente, a apprit à ne jamais laisser ses camarades seuls, à ne jamais laisser un feu révolutionnaire s’éteindre sous la botte d’un régime hostile ou d’une armée mercenaire. Mais nous devons nous poser une question fondamentale : comment, où, et avec quelles forces ? Nous ne devons pas seulement réagir aux injustices. Nous devons organiser nos actions, comprendre les dynamiques, frapper là où cela compte et assurer que chaque intervention renforce la révolution au lieu de l’exposer à des représailles prématurées. L’ennemi apprend, s’adapte, et nous devons être capables d’être plus rapides que lui.

Puisque vous êtes de ceux qui ont la détermination d’agir, nous ne pouvons que vous dire ceci : bienvenue.
 »

Elle inclina la tête en arrière et fit vaguement la moue, avant d'ajouter en haussant les épaules :

« Et ne vous inquiétez pas trop pour le mobilier. Je crois que pour nos hôtes il a surtout une valeur émotionnelle. »
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