29/03/2015
03:13:24
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RP : La fuite de Sandra Roussa

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Un réveil difficile...


TAC TAC TAC TAC


Réveillée une fois de plus par les coups de marteau du menuisier, Sandra profita des quelques secondes de répit dont elle disposait pour garder les yeux fermés avant d'entrer dans une énième journée de fugitive. Peut être espérait-elle se réveiller dans un autre endroit, que Dieu l'avait mystérieusement transportée dans un autre pays ?

« Dieu n'existe pas, enfin. »

Ayant en effet décrété que Dieu n'existait pas, Sandra ouvrit les yeux. Et oui, elle était toujours au même endroit. Aux murs, toujours les mêmes briques rouges mal placées. Au plafond, toujours la même ampoule clignotante et menaçant de se briser sur le sol à chaque instant. Dans le coin opposé, toujours la même minuscule fenêtre laissant à Sandra le loisir de regarder les pieds affairés des passants. Toujours le même lit au matelas maigre et taché. Et sur ce lit, toujours la même enflure de Sandra Roussa.

« Après tout, je pourrai être en prison, alors ce n'est peut-être pas si mal, pensait-elle. »

Elle avait trouvé refuge dans la cave de ce menuisier de Poulainville, une bourgade au Nord de Koslov, il y a maintenant trois semaines et n'en était jamais sortie depuis. Pas très enchantant d'être la personne la plus recherchée du pays ! Boris, le menuisier, avait facilement été berné par les partisans de Sandra qui lui avait dit qu'elle était la jumelle de Sandra Roussa, et qu'elle avait besoin d'un endroit où loger dans la mesure où sa maison avait été retournée de fond en comble et occupée par les forces de l'ordre.
CLAC CLAC

Sandra sursauta au bruit du verrou s'ouvrant sous les grosses mains de Boris.
« Ton petit déjeuner, Olivia. »
C'était le nom qu'elle s'était donnée. Sandra saisit le bout de pain rassi que Boris lui tendait et se rassit d'un air las.
« Y viendront t'chercher bientôt tes camarades ?
- Bientôt, oui. »

En réalité, cela faisait une semaine entière qu'elle demeurait sans nouvelles de Karl, son correspondant qui avait accepté de l'aider dans cette cavale. Il était membre des éveillé.es qui s'étaient regroupés en organisations clandestines après la manifestation de Koslov.

CLAC CLAC

Le menuisier était sorti. Alors que Sandra s'apprêtait à mordre le caillou qui lui tenait lieu de pain, une main passa les barreaux de la fenêtre au dessus d'elle et jeta dans la petite pièce une boule de papier. À peine Sandra eût-elle le temps de lever la tête que la main avait disparu. Excitée devant le plus grand événement qu'elle avait vécu ces derniers jours, elle défroissa le papier tombé au sol et y lu le message suivant :


KARL ARRÊTÉ. JE SUIS ODONEL, NOUVEAU CORRESPONDANT. RDV DEMAIN 2H DU MAT. SQUARE SAINT ALBERT. POUR PARTIR VERS ERDAIM.


27/03/2008
2783
Rendez-vous avec Odonel



Après une journée de réflexion et d'ennui profond, l'heure du rendez-vous approcha. Sandra trépignait d'impatience à l'idée de quitter la cellule qui lui servait de cachette.

« J'aurai dû en profiter pour écrire un livre. Il y a bien longtemps que je souhaite discourir sur la question carcérale. On devrait appliquer des solutions moins punitives à la criminalité dans notre pays. Et même dans le monde d'ailleurs. Par exemple, nous pourrions simplement faire davantage de prévention, ou bien nous devrions poser la question aux gens qui n'ont pas de problème, car c'est avant tout de leur faute si certaines personnes au comble de la misère en arrivent à commettre des crimes.  »
Comment l'homme en est-il arrivé à de si naïves réflexion ? Je ne saurais pas apporter la réponse à cette question, mais il faut avouer que cela comporte tout au moins le mérite de faire passer le temps. En effet, il était deux heures moins le quart.
Sandra frappa quatre fois à la porte de la cave, selon le signal convenu avec le propriétaire des lieux. Après une longue minute d'attente, le bruit massif du verrou se fit entendre et la porte grinça sur ses gonds. Sandra remercia rapidement le menuisier pour sa modeste hospitalité, lui promettant qu'elle le dédommagerait dès que possible.

S'enfouissant dans la capuche de sa veste, elle parcourut rapidement les quelques ruelles qui la séparaient du square Saint Albert et escalada difficilement les grilles d'entrée, déchirant sa veste au passage. Il était deux heures. Marchant sur la pelouse pour rejoindre le centre du square, Sandra ressentit une pointe de culpabilité à l'idée de piétiner l'habitât de pauvres petits insectes, les tirant ainsi de leur paisible sommeil. Soudain, elle réalisa que ce faisant, elle piétinait aussi des brins d'herbes tout juste sortis du repos hivernal. Une plus grande culpabilité l'envahit alors à l'idée de s'être d'abord souciée de la vie de certains êtres vivants plutôt que d'autres. Alors que Sandra allait éclater en sanglot, éprouvée par ces nombreuses semaines de cavale, elle aperçut une personne pouvant s'apparenter à un homme selon les codes de la société. Il se tenait au centre du square, sur le parvis de la statue de Saint Albert qui y trônait. L'ayant aperçue à son tour il lui fit signe et Sandra le rejoignit.

« Odonel... c'est vous ?
- C'est moi.
- Original comme nom. C'est votre vrai nom ?
- Non. C'est un nom que je me suis choisi, différent de celui qui m'a été injustement attribué à ma naissance par la société. Enfin, si du coup, c'est mon vrai nom. Mon vrai nom. Bref, on n'a pas le temps de parler de ça ici, on va partir pour Erdaim, ma voiture est garée là-bas. »

Odonel pointa l'extrémité du square.

« On y va en voiture ? demanda Sandra.
- Oui. Je sais que ça pollue, mais pas le choix pour cette fois. »

Ils atteignirent la voiture en quelques pas. C'était une vieille Alpha C orange tout ce qu'il y avait de plus banal.

«  Tu montes dans le coffre. C'est plus prudent. »

Sandra pénétra à l'arrière de la voiture et y retrouva les odeurs de poussière auxquelles elle avait goûté ces trois dernières semaines. Après avoir trouvé la position la moins inconfortable possible dans ce sombre habitacle, Sandra s'endormit, bercé.e par les tressauts du véhicule qui démarrait.
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Route vers Erdaim


Sandra s'alluma une cigarette et fixa l'horizon d'un air inquiet. Cela faisait des jours que Odonel la conduisait en voiture. Des jours, alors que Erdaim se situait à à peine une centaine de kilomètres de Poulainville. Odonel disait que c'était pour éviter les grands axes. Toute grande route était donc à bannir et le chemin était donc beaucoup plus long.

Mais là, ils n'étaient pas loin. C'était au moins le dixième village où ils s'arrêtaient. Une petite station essence, c'était l'endroit où ils se trouvaient pour quelques minutes et où Sandra avait pu se ressourcer et respirer autre chose que l'air renfermé du coffre de la Alpha C de Odonel.

« On va repartir, dit Odonel en rangeant la pompe à essence qu'il tenait à la main. »

« Ok. »

Sandra écrasa sa cigarette pas finie et se dirigea d'un air las vers la voiture orange. Elle monta dans le coffre et retrouva l'inconfortable position qu'elle avait adopté depuis une semaine de route.

« Mais pourquoi on va à Erdaim en fait ? questionna-t-elle.
- On va retrouver des gens là-bas, lui dit Odonel, et ces gens vont nous fournir de quoi passer la frontière loduarienne. Enfin, si tout se passe bien.
- D'accord. Mais la frontière est pas hyper sécurisée en ce moment ?
- Si, mais on a pas le choix Sandra.
14/04/2008
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Arrivée à Erdaim



Des heures et des heures de route, Sandra n'en pouvait plus. Dans le coffre de la petite voiture, elle suffoquait presque et lâchait de grands soupirs, autant pour s'aérer les poumons que pour signifier à Odonel qu'elle en avait plus qu'assez de ce train de vie qu'elle menait depuis maintenant de nombreux jours.

Il sembla que son stratagème fonctionna : Odonel se retourna, après avoir vérifié que personne ne le regardait et, tenant d'une main le volant, lui lança :

« Tu veux qu'on mette la radio ? »

Sandra acquiesça d'un signe de tête fatigué et Odonel tendit le bras pour mettre en marche son autoradio. Après un grésillement agonisant de l'appareil, un son distinct se fit entendre.

RADIO a écrit :« Encore une nouvelle journée ensoleillée pour les Septentrionaux ! Je rêve ou ça sent l'été ? Attention, les allergiques au pollen, bouchez-vous les narines ! Les autres, profitez du beau temps ! Wouhou, et toi Caroline, comment ça va ?
- Très bien.
- Au top ! Alors, tu nous dis la météo d'aujourd'hui, ma petite Caro ?
- Bien sûr. Aujourd'hui, 18 degrés à Erdaim, 17 à Koslov et à Minères, 20 à Amelilkkovo, à Léongrad et à Puis-sur-mont, 15 à Solki, 19 à Solgrad et Fassalamert, et 22 à Legkibourg.
- Trop, trop bien. J'adore ce parfum de printemps, moi, on le sent même dans le studio hahahaha ! Pas toi, Carolinou ?
- Non, pas spécialement.
- Eh dis-donc t'es bougonne aujourd'hui ou quoi, hahahaha ! Caroline y'a quelque chose qui va pas ?
- Jérôme, je suis encein...
- Olalalalala, petite coupure de communication j'ai l'impression ! Caroline ? Ton micro ne marche plus j'ai l'impression ! Hahaha ! Ca arrive souvent ce genre de petits incidents... Les aléas du direct héhéhé ! Eh bien, on passe aux infos ! Dimitri, je te laisse l'antenne !
- Bonjour Jérôme, bonjour à tous, depuis une semaine et demie, pas de nouvelle de la Loduarie, la frontière semble s'être stabilisée. Les habitants de Erdaim restent effrayés après le passage des trois avions loduariens à côté de leur ville. Y avait-il un réel projet d'attaque des communistes ou était-ce simplement une mesure de dissuasion ? Les avis fusent, mais aucune preuve réelle n'est apportée pour corroborer à une de ces deux hypothèses.
Quant à Sandra Roussa, la fugitive numéro un du pays n'a toujours pas été retrouvée par les forces de police. Les clovaniens pourraient perdre patience ! »

Sandra blêmit.

RADIO a écrit :« Mais, heureuse nouvelle, les éveillé.es se font cueillir un peu partout dans le pays par les forces de l'ordre. En effet, 43 arrestations ont été recensées cette semaine. »
La voiture se mit à ralentir. Ils approchaient d'Erdaim, et comme ils pouvaient s'y attendre, un contrôle de police était mis en place à l'entrée de la ville.

« Putain ! Je savais qu'on aurait pas du prendre les grandes routes !
- Pourquoi on les a prises alors ? questionna Sandra.
- Parce qu'on avait rendez vous avec les éveillé.es de Erdaim ! On pouvait pas perdre de temps. »

Sandra se prit la tête dans les mains.

« Bon, maintenant qu'on y est... »

La radio continuait de tourner.

RADIO a écrit :« Si vous apercevez Sandra Roussa, n'oubliez pas, contactez immédiatement le 05 76 32 88 88, je répète, le 05 76 32 88 88 ! »
A ce moment là, la voiture s'arrêta devant le barrage de police et un officier s'avança d'un air examinateur vers la voiture. Odonel baissa sa vitre tandis que Sandra se cachait derrière les sièges arrières, essayant de faire sa respiration la plus discrète possible.

« Bonjour, monsieur. Papiers d'identité. »

Odonel montra ses papiers. L'officier les examina longuement et les lui rendit, impassible.

« On peut regarder dans le coffre ? »

Le cœur de Sandra bondit dans sa poitrine, mais c'est alors que Odonel sortit discrètement un papier et le montra au policier. Celui-ci le fixa dans les yeux pendant une poignée de secondes semblables à des années et déclara :

« Allez-y, monsieur. Pardon de vous avoir dérangé. »

Et la voiture redémarra, faisant choir Sandra de sa position accroupie.

« Aïe ! Euh... Qu'est ce que tu lui as montré ? lui demanda-t-elle sous le choc.
Des papiers d'officier supérieur de police. Je les ai volé dans une manif. »

La voiture roula encore quelques minutes et Odonel s'arrêta sur un parking d'hôtel.

« C'est là que sont nos amis. Je vais les voir, reste là. »

Enervée d'être une fois de plus laissée sur la touche par ce mâle blanc dominateur, Sandra se résigna tout de même à rester dans le coffre, cela valait mieux pour elle.

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Un plan risqué et un agent pas bavard



Après avoir patienté ce qui lui sembla être plusieurs heures, Sandra entendit le bruit de la portière s'ouvrir, la tirant du demi-sommeil dans lequel elle était sur le point de s'installer. C'était Odonel.

« Tu peux venir. Mets bien ta capuche. »

Sandra obéit et se dégagea lentement du coffre de la voiture, étirant avec délices ses articulations qui s'étaient habituées à être compressées dans l'habitacle du véhicule. Comme à son habitude, Odonel prit les devants et énonça sèchement les instructions que Sandra devait suivre.

« Ils sont dans la chambre 163. Quand on arrivera, tu montreras bien ton visage sans dire un mot. Pas de téléphone dans la chambre. »

Sandra sourit à l'énoncé de cette dernière consigne, sachant que son portable n'avait plus de batterie depuis maintenant plusieurs mois, mais qu'elle l'avait toujours gardé sur elle. Ils montèrent les escaliers en silence, Odonel à l'avant et Sandra derrière, le nez devant le pistolet que Odonel gardait toujours à sa ceinture.
Bientôt, ils atteignirent la chambre 163. Odonel frappa trois coups rapides à la porte, puis 2 coups lents. Après quelques secondes d'attente, la porte s'ouvrit. Dans l'espace laissé par l'entrebâilleur, un visage sombre apparut. Comme convenu, Sandra ôta sa capuche afin de lui découvrir son visage. L'inconnu referma la porte, le bruit de l'entrebâilleur se fit entendre et la porte s'ouvrit en grand, laissant passer les deux personnages.

Sandra découvrit une chambre miteuse, dotée d'un lit double aux draps défaits, d'une commode aux tiroirs manquant et d'une minuscule salle de bain dans le fond. Au centre trônait une table en bois et une autre personne était assise à cet endroit.

« Bonjour, osa prononcer Sandra d'une voix faible.
- Bonjour, camarade Sandra, lui répondit l'autre d'une voix basse mais non dénuée de soulagement et d'admiration. »

La personne qui leur avait ouvert se dirigea en silence dans un coin de la pièce, y saisit deux chaises et les plaça à côté de la table.

« Asseyez-vous. »

Les quatre personnes attablées, l'homme qui était assis commença son discours.

« Bien. Vous êtes parvenue jusqu'à nous, cela relève déjà du miracle. Je me présente : Naïa. Mes pronoms sont il, elle, et iel. Lui, c'est Jénaio, ses pronoms sont il et iel. Bien, les présentations sont faites, bien. Bien, on a été obligés d'envoyer un appel à l'aide à la Loduarie. »

Sandra eut un sentiment de soulagement. Depuis des semaines, elle se doutait bien que Odonel la menait à Erdaim pour passer la frontière, mais elle n'en était pas certaine et n'osait pas lui poser la question, de peur de briser son énigmatique silence. Naïa poursuivit.

« Nos compagnons ont donc eu une réponse il y a cinq jours. Un agent loduarien vous attend ce soir à une heure pour vous faire passer la frontière. Le lieu de rendez-vous est à trois rues d'ici.
- Mais la frontière n'est pas gardée ? s'interrogea Sandra.
- Oui, mais ce soir, ce sera plus facile. Les loduariens ont lancé des diversions à l'Est et les rangs des gardes frontières se sont donc dégarnis. Par contre, il ne faut surtout pas qu'on vous voie. Ce serait un prétexte parfait pour l'Empereur pour déclarer la guerre. Bien. »

Sandra jeta un regard inquiet à Odonel, écrasée par tous ces enjeux qui reposaient maintenant sur elle. Au début, elle voulait juste écrire des livres !

« Ça va bien se passer, la rassura Odonel.
Et aussi, faites attention, il faut bien vous appeler camarades. Vous pénétrez dans un pays communiste, ok ?
- Ok. 
- Bien. »

Un réveil sonna sur la table de nuit.

« C'est l'heure, prononça gravement Jénaio. »

Avant de les laisser partir, Naïa leur donna des sacs contenant de quoi manger, boire, ainsi qu'un couteau pour se défendre.

« Merci beaucoup. »

D'un signe de tête, Naïa leur souhaita bonne chance et leur ouvrit la porte.

Des frémissements d'excitation et de peur traversant le corps de Sandra, elle parcourut avec Odonel les quelques rues la séparant du point de rendez-vous d'un pas fébrile. Ils se retrouvèrent sur le port. A quelques centaines de mètres, la frontière. Ils patientèrent quelques minutes à cet endroit avant de voir s'approcher d'eux un homme au pas pressé. C'était sûrement l'agent communiste.

« Camarade Odonel ? demanda-t-il sans préambule.
- C'est moi. »

L'agent leur fit signe de le suivre d'un pas rapide qui se transforma bientôt en une course longeant les bâtiments du port. Au dernier moment, il s'engagea dans une ruelle et s'arrêta juste devant la frontière. Le phare du mirador passa juste devant eux et, dès qu'il eut disparu, l'agent leur fit signe de courir. Le passage était ouvert, au nez et à la barbe des gardes clovaniens. Sous le regard attentif des gardes loduariens, les trois personnages passèrent la petite porte installée dans la grille.

Sandra regarda autour d'elle. Des visages affairés de militaires, le symbole communiste sur leurs casquettes. Ça y est, ils avaient franchi la frontière.

27/04/2008
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