TAC TAC TAC TAC
Réveillée une fois de plus par les coups de marteau du menuisier, Sandra profita des quelques secondes de répit dont elle disposait pour garder les yeux fermés avant d'entrer dans une énième journée de fugitive. Peut être espérait-elle se réveiller dans un autre endroit, que Dieu l'avait mystérieusement transportée dans un autre pays ?
« Dieu n'existe pas, enfin. »
Ayant en effet décrété que Dieu n'existait pas, Sandra ouvrit les yeux. Et oui, elle était toujours au même endroit. Aux murs, toujours les mêmes briques rouges mal placées. Au plafond, toujours la même ampoule clignotante et menaçant de se briser sur le sol à chaque instant. Dans le coin opposé, toujours la même minuscule fenêtre laissant à Sandra le loisir de regarder les pieds affairés des passants. Toujours le même lit au matelas maigre et taché. Et sur ce lit, toujours la même enflure de Sandra Roussa.
« Après tout, je pourrai être en prison, alors ce n'est peut-être pas si mal, pensait-elle. »
Elle avait trouvé refuge dans la cave de ce menuisier de Poulainville, une bourgade au Nord de Koslov, il y a maintenant trois semaines et n'en était jamais sortie depuis. Pas très enchantant d'être la personne la plus recherchée du pays ! Boris, le menuisier, avait facilement été berné par les partisans de Sandra qui lui avait dit qu'elle était la jumelle de Sandra Roussa, et qu'elle avait besoin d'un endroit où loger dans la mesure où sa maison avait été retournée de fond en comble et occupée par les forces de l'ordre.
CLAC CLAC
Sandra sursauta au bruit du verrou s'ouvrant sous les grosses mains de Boris.
« Ton petit déjeuner, Olivia. »
C'était le nom qu'elle s'était donnée. Sandra saisit le bout de pain rassi que Boris lui tendait et se rassit d'un air las.
« Y viendront t'chercher bientôt tes camarades ?
- Bientôt, oui. »
En réalité, cela faisait une semaine entière qu'elle demeurait sans nouvelles de Karl, son correspondant qui avait accepté de l'aider dans cette cavale. Il était membre des éveillé.es qui s'étaient regroupés en organisations clandestines après la manifestation de Koslov.
CLAC CLAC
Le menuisier était sorti. Alors que Sandra s'apprêtait à mordre le caillou qui lui tenait lieu de pain, une main passa les barreaux de la fenêtre au dessus d'elle et jeta dans la petite pièce une boule de papier. À peine Sandra eût-elle le temps de lever la tête que la main avait disparu. Excitée devant le plus grand événement qu'elle avait vécu ces derniers jours, elle défroissa le papier tombé au sol et y lu le message suivant :
KARL ARRÊTÉ. JE SUIS ODONEL, NOUVEAU CORRESPONDANT. RDV DEMAIN 2H DU MAT. SQUARE SAINT ALBERT. POUR PARTIR VERS ERDAIM.
27/03/2008