Pharot, ville grise et bétonnée. Le goût des Pharois pour l’architecture. Pas étonnant que le nord de la Péninsule souffre d’un complexe d’infériorité par rapport aux Albiens du sud, en toute objectivités, la capitale du Syndikaali faisait pâle figure face à l’étrange Albigärk.
Il neigeait ce jour-là, comme souvent au Syndikaali dont le taux de précipitations s’affolait pendant l’hiver. On en venait presque à attendre la tempête pour balayer les vents froids du nord et profiter après de quelques jours d’éclaircie.
Les drapeaux noirs des Pharois et bleus des Finnevaltais flottaient ce matin sur le port de Pharot. La mer et ses symboles avaient pris une telle place dans la culture albienne qu’un quai tout entier avait été réservé à la diplomatie, ses accès gardés par une poignée de garde-côtes qui se tapaient dans les gants pour se réchauffer un peu les mains.
Enveloppé dans un épais manteau de fourrure, son crane dégarni coiffé d’un chapeau haut de forme qui laissait deviner les poils de phoques dont on l’avait garni, le Capitaine Ministre Mainio se tenait face port, entouré d’une poignée de ses homologues.
Le Citoyen Ministre Sakari était absent aujourd’hui, des affaires en Kaulthie mobilisaient l’état-major. Des visages moins connus à l’internationale se trouvait toutefois aux côtés du médiatique capitaine Mainio.
Le Citoyen Ministre Kaapo, chef de la police et des services secrets, le Capitaine Tellervo, l’influant ministre de la Mer et de la pêche, la Capitaine Ministre Reima, qui avait participé aux négociations avec le Finnevalta, enfin, la Capitaine Marketta, ministre communiste de la Planification.
Tout le monde n’avait pas l’air très content d’être là, mais c’était sans doute d’avantage imputable à la météo qu’aux invités, au demeurant fort sympathiques.
Et puis, il y avait la conviction qu’on marquerait l’histoire, d’une manière ou d’une autre.
Comme de coutume, l’hymne finnevaltais retentit sur le port, bientôt suivi du dissonant hymne du Pharois. Quelques badauds applaudirent, mais il fallait bien avouer que la plupart des gens étaient restés chez eux par ce temps.