- Viens seul et tu connaitras la vérité.
Dans les collines du nord, l’homme masqué de noir pénètre une maison de brique, recouverte de mousse. Les fenêtres fermées d’épais rideaux ne laissent passer nulle lumière et bien qu’il fasse jour au dehors, seuls des chandelles éclairent l’intérieur d’une couleur tamisée.
- Mihai Cojocaru, le Grand Inquisiteur, quel honneur pour notre confrérie.
Trois femmes, une vieille, une jeune, et une d’âge moyen, se tiennent assises au fond de la maison. Leurs cheveux longs sont respectivement blanc, roux et gris. Elles ont les yeux clairs et des robes en toile et en chanvre, sur lesquelles on devine des motifs colorés.
Lui, debout, de noir et de cuir. Haut et musculeux, le visage dissimulé derrière son voile, sa tenue militaire et ses bottes boueuses contrastent avec la peau laiteuse et immaculée des pieds nus des trois femmes.
- Sorcières.
Il n’y a nulle hostilité dans sa voix, le constat est celui du bourreau. C’est au moins une voix d’homme qui résonne dans la maison, et non pas une de robot. Les soldats du Grand-Duc gardent leurs vibrateurs vocaux pour les palais et les bals. A la guerre, on doit pouvoir respirer correctement.
- D’autres que toi aurais déjà brûlé cette maison, sans oser y pénétrer, Mihai Cojocaru, qui es-tu que veux-tu savoir ?
L’homme se tait. Dehors il n’y a pas un bruit. Sa troupe est restée en bas des collinnes, laissant, à l’incompréhension des officiers, le temps au coven de s’enfuir. Il ne sera pas réduit aujourd’hui, mais deux-cents cavaliers vont plus vite que des femmes qui courent pieds nus dans les bois. Mihai Cojocaru a une radio dans sa veste. D’un mot d’ordre, il lance la grande chasse.
Il n’en fait rien. La radio est éteinte. Loin en contre-bas ses hommes ignorent ce qui se joue dans cette maison de sorcière. Il dégrafe son col, dépose son chapeau sur le sol. Il retire son voile.
- Changelin, souffle la sorcière.